RYMAS CWENBALD

Par où commencer… Je suis né dans un petit hameau isolé, à la lisière nord de la grande forêt, au pied des montagnes. Le climat et l’environnement n’étais pas vraiment idéal à la croissance d’un nouveau-né, c’est pourquoi mes parents, bien qu’aventuriers passionnés, ont sacrifié plusieurs années de quêtes afin de m’élever dans les meilleures conditions, à la capitale. A mon adolescence, alors que je commençais à me débrouiller seul, ils sont tous deux repartis à l’aventure, poussés par la soif de sensations qu’ils avaient contenue pendant presque 15 ans. Je ne leur en ai jamais voulu pour ça, et je n’ai jamais souffert d’un quelconque sentiment d’abandon. J’ai appris quelques années plus tard qu’ils étaient tous deux décédés au cours d’une quête dangereuse, et bien qu’attristé, j’avais maintenant ma vie à moi, et à vrai dire, je m’en sortais plutôt bien.
L’année de mes 22 ans, j’ai rencontré l’amour. Elle était aventurière et à cette époque j’étais apprenti-forgeron. Elle s’apprêtait à partir pour une longue quête de groupe, et venait à la boutique pour une nouvelle arme. Elle avait beau paraître frêle physiquement, il ne lui aura fallu que quelques mots et un sourire pour mettre à genoux un homme aussi solide que moi. Du jour au lendemain, je quittais ma vie paisible à la forge pour la suivre dans son aventure. Elle était loin d’être bête, et elle avait bien compris qu’elle était la raison de ma soudaine reconversion. J’imagine que c’est parce qu’elle se sentait responsable qu’elle s’était mis en tête de surveiller mes arrières en permanence. Le rapprochement se fit naturellement, au fil du temps passé ensemble à essayer de veiller l’un sur l’autre, et sans prévenir, un heureux évènement pointa le bout de son nez : le 30ème jour de la 2ème lune froide de l’an 989, Ealga, notre fille, vit le jour. Et c’est ce même jour en donnant naissance que le dernier souffle de vie quitta la femme que j’aimais.
La soigneuse n’avait pas eu besoin de m’expliquer la raison : nous étions parti à l’aventure 4 ans plus tôt, et 4 années durant, j’avais pu me rendre compte que son corps faiblissait de jour en jour. Elle était malade de naissance, et sachant que sa vie arrivait à son terme, elle avait choisi de partir pour une dernière quête mémorable… puis j’ai débarqué… Et tout comme moi, sans qu’elle ne se l’explique vraiment, elle en oublia sa maladie, et se laissa bercer par notre histoire, jusqu’à ce que la graine se mette à pousser dans son ventre. A ce moment, la fatigue se fit plus intense, et bien qu’elle savait que ses jours étaient comptés, elle continua de lutter nuit après nuit, pour garder notre fille en vie. Quand finalement, les cris du nourrisson se firent entendre, elle souriait, et voyant les larmes que je ne pouvais contenir, elle me fit jurer de les sécher et d’élever notre enfant avec le sourire, d’en prendre soin comme j’avais pris soin d’elle.
Dix ans plus tard, il m’est toujours difficile de retenir mes sanglots lorsque je pense à elle, mais à chaque fois, le souvenir de son visage souriant me rappelle ma promesse, et me pousse à faire de mon mieux en tant que père. Je suis revenu m’installer dans la capitale, où j’ai ouvert mon échoppe : bien que la forge rapporte gros, mon pouvoir a l’avantage de n’être pas limité aux armes, et certains clients viennent pour faire réparer leurs meubles ou rafistoler un vêtement. Mes revenus me suffisent largement pour vivre convenablement, et pour élever une petite chipie qui a hérité du caractère de sa mère, en plus de ses cheveux roux et de ses yeux verts.