Il avait compris.
Bien que malgré tout, le garde espérait se tromper et qu’Atheas revienne le soir même, comme si de rien était. Une tromperie qui aurait pu causer problème, mais Owain était capable de passer outre. Alors, il avait pris une grande bouffée d’air comme pour s’oublier à ses problèmes. Ainsi, son travail serait bien plus difficile à partir de maintenant si la princesse ne revenait pas. Lui qui aurait aimé prendre quelques jours de repos, il pouvait dorénavant se les mettre où il pensait. Et d’un soupir, il abandonna les appartements de la cadette royale pour s’aventurer dans les longs couloirs du palais. Une démarche rapide, mais tentant de cacher cette peur qui le rongeait de l’intérieur jusqu’à ce qu’il arrive devant les grandes portes de la salle du trône.
Évidemment, les portes fermées indiquaient que le couple était occupé. Mais Owain ne pouvait pas se permettre d’attendre, ignorant totalement où la princesse pouvait être à l’heure actuelle, plus encore sachant pertinemment qu’elle possédait un pass de téléportation. C’est donc avec le courage d’une première fois, qu’il ordonna malgré tout à ses collègues, tu lui ouvrir la porte, faisant un pas dans cette salle grandiose qui n’était pas pour lui dans l’état actuel.
« Ma reine ? »
Le pas délicat mais pourtant rempli de confiance, le garde était entré dans la salle de réunion malgré la présence de diverses personnalités. Sur son visage, aucun trait étranger qui pouvait laissait transparaître son inquiétude.
« Oh excusez moi du dérangement, je n’avais pas vue que vous étiez occupés. Comme je m’ennui en ce moment, j’ai la tête ailleurs. »
Il n’était pas dans les habitudes d’Owain de déranger le couple royal, lui qui se savait assez talentueux pour régler tous les soucis habituels. Mais le problème était bien plus compliqué et intense, au point même qu’il n’avait pas vraiment la possibilité d’attendre la fin de la réunion pour informer la Reine de ses craintes.
La plus grande idiotie d’Owain face à la Reine Allys était que, depuis des années, malgré la connaissance de son pouvoir. Le garde semblait être convaincue qu’un jour où l’autre ses mensonges joyeux finiraient par passer comme une lettre à la poste. Mais actuellement, cela lui permettait de faire passer un message à la Reine, lui indiquant qu’il était nécessaire de mettre fin au meeting, et cela, sans inquiéter les conseillers ou ministres -en vérité, il ne savait même pas qui était ces personnes- sur la possible et réelle fugue, de la princesse Atheas.
Parce qu’en vérité, il était autant désolé qu’il ne s’était pas aperçu que les portes étaient fermées. Son travail était si complet, que par moment, Owain n’avait même pas le temps de respirer à force de s’occuper de la princesse. Mais ça… Et de là, il avait laissé un léger rire frais s’aventurer dans la salle.
Si elle entendait bien les avis de chacun, certaines décisions ne se résumaient pas sur un oui ou non. Elle en avait touché deux ou trois mots à Grimvor, pour avoir son avis sur différentes questions. Ils avaient à échanger avec d'autres personnes ; elle savait combien ces réunions lui étaient insupportables. D'autant que parmi les présentes, il n'y avait que d'illustres noms venus échanger avec eux. Si elle avait l'habitude d'assister à ce genre d'événement, elle savait bien qu'il serait présent mais qu'il n'aimait pas trop que cela s'étende trop en longueur. Or là c'était effectivement bien parti. Elle lui avait bien sûr communiqué qu'elle avait dû mettre en garde Atheas sur ses sorties, elle lui avait brossé ce qui s'était passé non sans le dire avec une forme de distance, en vrai elle essaya de ne pas trop entrer dans les détails. Si elle avait eu l'habitude que Atheas s'efface, elle n'avait jamais entendu des remarques aussi cinglantes. Elle tournait le plus tranquillement qu'elle pouvait sa cuillère en regardant chaque participant. Tout se déroulait sans trop de surprise ... Il ne fallait jamais croire que ces moments pouvaient durer une éternité? Elle en eut très vite la preuve. Malgré l'office de la garde, elle entendit qu'on l'appelait et fronça les sourcils vers l'intéressé. Elle sentit un gros frisson sur son bras digne d'un sacré et beau mensonge. Owain n'avait jamais troublé de la sorte une assemblée, elle lui accorda donc une certaine attention. Allyss posa sa main sur l'épaule de son mari en s'excusant pour son absence.
" Pardonnez moi, une affaire requiert ma présence. Je reviens près de vous dans un instant. "
Elle ignorait ce qui le poussait à interrompre leur assemblée... mais elle allait vite le découvrir. Elle passa devant lui sans un mot, lui jeta un regard pour lui signifier qu'ils allaient marcher quelques pas. Elle ne souhaitait pas déranger ses invités... s'en voulait de laisser toute cette charge à son mari... Au moins elle ne les laissait pas sans une présence royale. Elle poussa la porte d'une pièce plus éloignée et fit signe au jeune homme. C'était hors de question qu'ils puissent perturber davantage le déroulement de cette entrevue.
" Que cherchez-vous à faire Owain ? Faire croire à nos invités que votre ennui est supérieur à leur présence ? Dites moi vite ce qui vous amène que je puisse au moins comprendre. Ce n'est pas dans vos habitudes.. j'espère que ce n'est pas une nouvelle parce que je ne supporterai pas que vous vous divertissiez ainsi.... Vous vous ennuyez... Vous n'aviez pas mieux à nous dire ? " aligna t-elle en gardant son attention sur ce qui allait suivre. Elle soupira en se demandant ce que penserait l'assistance de son départ. Elle se souvint encore des sourires moqueurs face à sa réaction de répondre aussitôt. Allyss connaissait les habitudes de chacun, elle faisait confiance à son don... Quelque chose se tramait, elle n'aimait pas attendre.
" ... Qu'attendez-vous ? Je vous écoute à présent. Je vous écoute." avait-elle continué sans même laisser le temps au pauvre homme de placer un seul mot.
« J’avais hésité entre évoquer la nourriture qui est tout bonnement délicieuse, vous informer que votre fille souhaite terriblement un Smilodon Fulgeo au point de mettre sa chambre en bazar, ou tout simplement dire qu’elle avait disparu. »
De chacune de ses idées, Owain comptait sur ses doigts comme s’il en avait préparé une liste toute préfète. Lorsque le troisième doigt se leva, il eu un moment d’hésitation. Ce n’était peut-être pas la meilleure façon de présenter les choses, mais le garde avait toujours sa manière très personnelle de rigoler, même lorsque les faits n’y étaient pas. Par ailleurs, il espérait que cela éviterait un potentiel ascenseur émotionnel à la reine et qu’elle verrait la chose de manière avisée.
« Car Atheas a effectivement disparu. »
Comme souvent aurait pu répondre quiconque face à cette nouvelle. Mais personne ne connaissait réellement ses nombreuses fugues aussi bien que son garde rapproché. Et là, s’il était aujourd’hui venu déranger le couple royale en pleine réunion, il ne faisait aucun doute que le problème était bien plus grave.
« Elle n’était pas dans ses appartements ce matin. J’ai ratissé le palais et parcouru les rues qu’elle a l’habitude de prendre d’habitude… »
Et lorsqu’il était revenu en ce début d’après-midi, rien n’avait changé.
" Je... vais... dois m'asseoir" fit-elle de façon sèche. Elle n'avait pas cette voix plaintive qui cherchait dui réconfort, mais plutôt celel d'un énervement contre la plus grande des fautives : elle-même. Sa fille lui avait même dit, elle lui avait dit qu'elle ne savait que lui donner des ordres et donc elle avait fait l'inverse de ce qu'elle lui avait dit. Elle en était capable. Elle mit son poing sur sa poitrine en sentant quelque chose se déchirer... Elle tomba sur un siège situé bien judicieusement au milieu de la pièce.
" Venez en face de moi Owain... narrez moi tout, je veux tout savoir. Quand remontent vos recherches ? Quand l'avez-vous vue la dernière fois ? Que vous a t-elle dit...? Asseyez vous vite, je.. n'ai pas la patience d'attendre plus".
Atheas avait donc fait comme son frère... La disparue. Même si elle avait senti des manifestations dans ses mensonges... ce n'était pas un hasard. La reine l'avait poussée dehors froidement. Elle s'en voulait tellement. Mais elle devait lutter contre cette tristesse qui la rongeait. Rien que de savoir sa fille loin, elle en était malade. Certes elle pouvait se cacher, se dissimuler, mais saurait-elle éviter les dangers se présentant à elle ? Non, c'était un cauchemar devenu réel. Comment elle allait annoncer à Grimvor... Lui qui disait parfois de la lâcher un peu... Elle avait sans,s doute donné des mots trop forts. Sa fille reviendrait dès qu'elle serait calmée, elle voulait s'en convaincre. Il fallait raisonner au plus urgent. Allyss allait tout mettre en place pour s'assurer que tout aille bien. La ramener de force au palais ne donnerait rien dans un premier temps... Elle ne pouvait pas se coucher en se disant qu'il pouvait lui arriver à elle aussi.. n’importe quoi.
" Owain... depuis combien de temps n'aviez vous plus eu de ses nouvelles ? Vous m'avez avertie aussitôt je suppose... Vous avez bien fait de venir... Vous avez bien agi... " tenta t-elle de rattraper en sachant qu'Atheas n'était pas la personne la plus facile à surveiller ces temps. " Mais je ne comprends pas simplement que vous ayez perdu sa trace, vous qui avez tant l'habitude de la retrouver. Si vous n'en avez pas été capable, vous me mettez dans la plus grande des inquiétudes... Nous devons vite agir".
Le regard inquiet qui ne se détournait pas de la reine, son fils était déjà porté disparu depuis des mois maintenant, apprendre que sa fille était elle aussi manquante en ce jour pouvait être une nouvelle très difficile à assimiler. Bien qu’il n’eût ni enfant, ni cadet dans sa famille, Owain pouvait en être certain. Ainsi, évidemment que le sujet serait très difficile pour lui. En venir au fait, lui qui durant dix années avait toujours réussi à remettre la main sur la demoiselle lorsqu’elle était en fugue. Ce jour était un terrible échec, et il s’en voulait terriblement. Outre le fait qu’il en était tout autant inquiet. Bien que son collier jumeau fût censé le prévenir si elle était en danger, Owain ne pouvait s’empêcher de tourner en rond.
Alors il alla s’asseoir en face de la reine comme elle lui avait demandé, la tête qui s’était secoué de droite à gauche, comme pour présenter la fatalité.
« Je suis partie hier, lorsque vous l’avez convié à jouer. Je n’étais pas censé revenir au palais avant ce matin, chose que j’ai faite à la première heure. Sa chambre était vide, personne ne semblait l’avoir vu se lever non plus. Je suis allé en ville pour tenter de mettre la main dessus, sans succès. Alors je suis revenu, en pensant qu’elle aurait pu rentrer entre temps, mais non. Et me voilà devant vous. »
La vérité était qu’Owain était terriblement inquiet. Non pas pour son travail, bien qu’une partie de lui l’était. Mais, au fil des années, le garde s’était tellement attaché à Atheas qu’il ne savait où donner de la tête. Il vivait cette fugue comme une trahison, incapable de la retrouver comme si la princesse avait fait tout son possible pour qu’elle ne puisse pas être ramenée.
« Lorsque je l’ai quitté hier, elle semblait aller bien. Atheas était heureuse de pouvoir passer du temps avec vous, rien qui ne portait à croire qu’elle ne serait pas là demain matin. »
Surtout qu’il s’était imaginé qu’Atheas voudrait lui raconter comment sa rencontre avec sa mère s’était déroulée, elle qui se faisait une joie de passer du temps avec elle après tant de semaines sans avoir pu la voir.
" ... Ah... " fit-elle les yeux de plus en plus fermés. Elle avait envie de s'effacer au monde, mais elle se devait de rester. S'il 'était rendu dans tous les endroits où elle avait l'habitude d'aller, ils étaient effectivement face à un problème épineux. Sa voix semblait teinte de fatalité à présent ce n'était plus le calme mais une espèce de ... tension. La reine inspira doucement en fermant les yeux tandis qu'Owain poursuivait en soulignant sa surprise. Sa fille était heureuse de la voir... tout avait ainsi pris des dimensions ... pitoyables. Elle se sentait réellement déclencheuse de ce bazar.
" Ce qu'il faut que vous sachiez, c'est que nous nous sommes disputées lors de ce jeu. Atheas s'est ensuite rendue à sa chambre, j'ai respecté ce repli en ne voulant pas la troubler plus. Jamais, je n'aurais imaginé qu'elle... ah.. " Allys fut prise d'une envie de se lever pour marcher quelques pas. Ce sentiment lourd de culpabilité était sur elle et elle ne parvenait pas à le faire glisser, à l'oublier. " Je pense être la responsable de ce départ précipité. Vous n'avez aucunement failli à votre tâche. A présent, il faut la retrouver... Par Lucy... si j'avais su... "
Sa voix se coupa presque immédiatement alors qu'elle se rendait vers la fenêtre la plus proche. Sa fille était quelque part là où elle ne pouvait plus poser son regard, plus rien savoir d'elle. Ses bras se crispaient le long de son corps comme si on venait de la changer en statue rien qu'à la vue de ce paysage.
"... Nous n'avions pas besoin d'une nouvelle catastrophe..."
Hors contexte, on aurait presque pu croire qu'elle tournait ce reproche contre Atheas comme tant d'autres fois, mais là elle s'attribuait tout le mérite de cette fugue. C'était à elle de veiller sur sa fille. Les gardes n'étaient là que pour sa sécurité...
" Et donc... avant de venir.. elle était ... heureuse ? Elle s'est montrée si emportée, je ne savais plus comment lui répondre... Il n'y avait donc rien de sur... "
Tout tourbillonnait à nouveau. Une envie de s'allonger, elle se sentit s'affaiblir à nouveau. Elle s'adossa bien vite le dos collé à un mur. Ses nuits courtes devaient être responsables de son manque de solidité. Mieux valait ne pas trop marcher, surtout quand elle tentait de digérer cette nouvelle.
" Vous avez missionné d'autres gardes pour faire le tour de la ville. Vous savez que vous avez carte blanche dans ce cas précis. " commenta t-elle en revenant à des faits rationnels touchant de près à l'organisation du moment.
Atheas était têtue, cela n’en faisait aucun doute. Elle avait son caractère bien à elle, trempé comme certain le dirait même. Tant d’éléments qui l’entourait, l’empêchaient même de vivre comme elle l’entendait. Un surplus qui avait sans doute fini par exploser face à la reine. Et tout cela avait fini par se transformer par une fugue véritable, celle dont on fait tout l’inverse de l’habituelle pour le simple désir de rester seule. D’être certain que personne n’arrivera à suivre ses traces pendant un temps. Soulevant ses épaules d’une respiration, le regard posé sur la reine. Owain était actuellement bien plus préoccupé par la souveraine du royaume. Elle, qui avait déjà perdu son fils, venait de perdre sa fille, qui plus est, probable à cause d’une dispute dont elle était la source.
Le garde n’avait pas besoin d’être bon dans l’observation et la lecture des gens, car même un aveugle aurait pu s’apercevoir de l’état d’Allys. Elle avait beau être reine, Owain était aujourd’hui face à une mère inquiétée plus qu’autre chose. Le visage légèrement pâle, la peur qu’elle en vienne à s’évanouir lorsqu’elle s’approche de la fenêtre. L’inquiétude incertaine qu’il aurait, une fois encore à déranger la réunion dans la salle des trônes pour prévenir le roi de l’évanouissement de sa femme. Un très léger frisson qui avait parcouru son corps. La tête relevée dont l’expression se voulait bienveillante.
« Si je peux me permettre, je ne pense pas que ce soit votre faute. Elle avait beaucoup de choses en tête, et cette dispute à juste été… La goutte d’eau de trop. »
Notamment, car Atheas grandissait avec l’envie de sortir, de découvrir le monde. D’une manière qui lui était interdite car incompatible avec son statut de princesse. Et Owain avait secoué sa tête de manière très légère.
« J’ai bien peur qu’à l’heure actuelle, la ville ne soit pas suffisante. Atheas aurait très bien pu prendre l’apparence de quelqu’un pour sortir de la capitale et partir en chariot. »
Ou même en pass de téléportation, mais aux yeux d’Owain, peut de gens en possédait un. Alors il s’imaginait qu’Atheas ne l’avait pas utilisé.
« Par ailleurs. Il se leva de sa chaise. Si cela peut vous rassurer d’une façon ou d’une autre. Rien ne lui a arrivé. Hum, si quelque chose de grave venait à se produire, je serais immédiatement mis au courant. Et ce, qu’importe son emplacement. »
Parce qu’il se sentait un peu intelligent par moment, d’user son argent pour un rien.
Au moins, elle voulait indiquer à Owain les raisons du départ d'Athéas, qu'il puisse saisir non pas dans les détails, mais comprendre ce qui motivait son départ. Si d'aventure elle revenait, elle ignorait à quelle distance devrait-elle se conformer. Elle était responsable de son départ... peut-être même de son malaise ici. Ce n'était vraiment pas son intention pourtant. Elle se glissait peu à peu contre le mur jusqu'à légèrement se replier contre elle même. La reine laissait Owain dans la pire position qui soit. Elel voulait entendre des paroles rassurantes, mais pas sur des éléments fragiles, des choses solides pour lesquelles croire. Sa robe l'empêchait de se laisser totalement tombée au sol, sinon elle l'aurait volontiers fait. Elle ne se sentait plus vraiment honteuse de quoi que ce soit. La honte vivait en elle à cette heure et rien de ce qui pouvait se passer ne pouvait contrebalancer cet état. Les yeux embués dans le brouillard de ses pensées, elle entendait vaguement les quelques premiers mots d'Owain.
" ... La goutte de trop... sans doute", répéta t-elle comme si elle n'avait pas la force d'en débattre. Si se remettre en question en tant que mère était difficile, en tant que reine ce combat pouvait même prendre d'autres dimensions. Elle se fit violence pour tenter de se redresser en fermant les yeux. Pour le moment,elle préférait se reprendre, respirer en se concentrant sur la voix d'Owain. L'idée qu'elle était montée dans un chariot n'était pas à exclure non plus. Elle inspira en ouvrant doucement les yeux. Allys espérait avoir moins cette sensation de vertige, qu’elle disparaitrait d'elle même. Cette impression coriace semblait s'attacher à elle comme si ses griffes s'étaient plantées dans sa tête occupant toutes ses pensées.
" Il est impossible de tout contrôler... on ne peut rien faire... hormis chercher et... espérer" répétait elle d'un ton morne, fatigué de redire ces mots qui sonnaient comme un refrain. Combien de fois les avait-elle dit en parlant d'Aeron ? Trop de fois. Elle était fatiguée de n'être qu'un disque rayé qui répétait en boucle cette même phrase dans l'espoir que ce sera la dernière fois. Ce n'était jamais la dernière et avec Atheas si elle avait pris cette décision, même si elle revenait.. il y aurait toujours des gouttes en trop. Un certain défaitisme se voyait sur son visage auparavant souriant. On pouvait sourire lorsque la situation était incertaine, amis jamais quand elle est désespérante. Owain sentit peut-être cette impression car il tenta de lui insuffler un espoir. Le visage de la reine s'éclaira doucement comme une faible chandelle une veille d'orage.
" Comment seriez-vous au courant alors que nous ne savons rien de sa destination ?... Ne le dites pas juste pour me rassurer Owain, je ne suis pas d'humeur à me nourrir d'illusions"
Elle n'avait pas fait le lien avec un objet magique, elle pensait qu'Owain avait juste répondu à sa détresse comme un bateau répond à l'appel d'un phare en pleine tempête. Allys tituba jusqu'à rejoindre la table qui lui parut beaucoup plus proche une fois qu'elle fut de nouveau installée.
"... Pouvez-vous partir retrouver ma fille Owain... Retrouvez la, je vous prie. Je le ferai savoir dans le royaume, mais j'attends aussi de vous. Elle vous écoutera, j'en suis persuadée. Vous la connaissez bien. Je vous remercie pour votre bienveillance.. ".
Une bonne migraine s'annonçait. Au moins toutefois, elle avait l'impression d'aller mieux. Se mettre debout même si cela la soulageait d'ordinaire avait empiré les effets du choc. Ses doigts étaient crispés, tout en elle se tordait dans d'infinis remords. Même si c'était la goutte de trop... elle était liée au pouvoir de la vérité, mais parfois c'était un pouvoir qui faisait abstraction de beaucoup de choses. Celui qui cherche la vérité pouvait s'oublier lui-même avait-elle lu. C'était affreux comme il lui semblait avoir manqué à ce devoir si important de garantir la sécurité de ses enfants.
« Si je vous mentais, vous l’auriez vue, non ? »
L'air un peu taquin n'avait pas manqué, parce que sa réaction poussait à croire qu’elle n’avait rien vue, rien sentie. Qu’importe comment les mensonges étaient représentés grâce à son pouvoir. Alors c’était un fait, rien ne lui était arrivé pour l’instant et Owain serait belle et bien au courant dans l’immédiat si une telle chose se produisait. Bien qu’il exprimât l’envie de rester ainsi, sans même donner plus d’information tel un jeu inutile. Sa main s’était élevée pour toucher le bas de son cou, là ou sous ses vêtements se trouvait son pendentif partagé.
« Peu avant la tour, je lui ai offert un collier jumeau. Je doute qu’elle l’ait enlevé, car elle doit avoir conscience des dangers malgré son énervement. »
Du moins, c’est ce qu’Owain espérait. Car dans le cas contraire, il serait face à un problème bien plus grand qu’il n’aurait cru l’imaginer. Et très rapidement, comme la fin d’une chanson, le garde s’était mit en position de garde-à-vous. La tête qui s’incline très légèrement.
« Je me charge de prévenir la garde pour trouver quelques gardes qui pourraient m’aider à ratisser la ville et peut-être les sorties. En espérant qu’elle soit encore quelques parts dans la capitale, autrement… »
Autrement, il n’aurait pas d’autre choix d’espérer qu’Atheas était dans une autre ville du royaume, alors il devrait s’occuper des déplacements pour pouvoir tenter de la trouver ou bien même réussir à mettre la main sur des informations qui pourrait l’aider à retrouver Atheas. Pourtant, espérant qu’elle soit toujours ici même si son instinct lui criait le contraire, il laissa sa phrase en suspens.
« Puis-je faire quelque chose d’autre avant de partir ? »
" Effectivement et vous savez que ce ne serait pas dans votre intérêt."
Atheas et la conscience du danger... Aux yeux de sa mère c'étaient deux concepts qui ne faisaient jamais bon ménage. Elle avait le don de se trouver dans les pires situations. La princesse aurait pu tomber dans un traquenard bien plus facilement que le prince... La reine y jeta un coup d'oeil attentif, elle y consacrait tout l'attention dont elle se sentait capable sur le moment.
" J'espère qu'elle ne l'a pas retiré... Sinon oui c'est une bonne garantie."
Des paroles d'espoir flottaient dans cette salle bien que tous deux savaient qu'elle ne pouvait être dans la Capitale... La reine avait bien du mal à poser son souffle pour tenter d'effectuer toutes les vérifications d'usage. Lui avait-elle tout demandé ? Les informations qu'elle détenait étaient si minces...
" Retrouver sa trace.. rapidement garde Moorhell...Je vous accompagne à la sortie." finit elle par dire en guise d'au revoir. Elle avait dit ces mots à la fois comme un ordre, un conseil... et comme un avertissement. La colère et la tristesse rendait son ton plus confus tandis que sa migraine gagnait du terrain.
La reine respira doucement en tentant de masquer au mieux son angoisse qui bouillonnait en elle. Ses vertiges s'étaient estompés mais venaient lui rappeler sans cesse cette sinistre nouvelle. Son visage s’était muré pour le moment. Elle allait réintégrer une réunion qu'elle peinerait à suivre.Elle se retrouvait dans l'exact position dans laquelle se trouvait auparavant son époux... sauf que même si c'était la dernière goutte d'eau... Elle avait joué un rôle même minime dans cette fuite.
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