Quand tout va mal
Jaina avait perdu conscience de ce qui l’avait entouré pendant un certain temps. Elle s’était mise à bouger sans en avoir confiance avait posé des actes qu’elle ne pouvait pas justifier. Même lorsqu’elle avait subi cette mutation, elle ne pouvait pas l’expliquer. Après cela, elles avaient retrouvé ses deux compagnons et n’avaient retrouvé possession de sa personne qu’une fois arrivé au bateau qui se situait tout au fond de la crique. Elle n’arrivait pas à expliquer ce qu’elle n’avait fait durant ce temps ni même comment elle s’était rendu jusqu’ici, mais ils avaient trouvé un moyen de fuir cet endroit maudit.
Ce n’est qu’une fois sur les flots qu’elle put constater l’étendue des dégâts. Devon avait un bras bien amoché couvert de sang, Jin semblait trembler comme une feuille et pour sa part, elle n’entendait plus les murmures, mais elle éprouvait une drôle de sensation à son bras droit. Comme si quelque chose d’anormal s’y trouvait et quand elle regarda sa main, elle constata avec horreur que celle-ci était faite de pierre. La tournant dans tous les sens, elle ne comprenait pas. Le pire c’est qu’elle n’avait pas l’impression qu’elle lui appartenait. Sa seconde main se mit alors à trembler alors qu’elle se mit à repenser à tout ce qui s’était passé, toutes les phrases qui avaient été dites, les runes, ce moment où elle avait perdu connaissance de ce qu’il se passait autour d’elle. Comment Devon s’était blessé ainsi? Avait-elle été de nouveau contrôlée? Certainement.
La demoiselle s’était alors isolée du reste du groupe passant le reste du voyage seul dans son coin maintenant fermement ses bras de ses deux mains. Était-elle en train de se transformer en pierre? Est-ce que cela avait un rapport avec son rêve étrange qu’elle avait fait sur les lieux? Qu’était-il en train de lui arriver. Seul le temps pourra lui dire.
Jaina était arrivé au grand-port accompagné de tous les survivants et avait dû réserver son passage avec le pass de téléportation en direction de la capitale. L’attente était insupportable et elle n’avait qu’une seule envie retourner dans sa chambre personnelle… Elle avait disparu quelque temps, manqué à son travail et surtout, avait négligé par la même occasion ses pauvres familiers qui l’attendaient très certainement avec impatience. Mais que pourrait-elle raconter aux gens qui lui demandaient où elle était partie? Déjà, elle n’avait rien dit à personne et avait quitté sur un simple coup de tête? L’appel, suite à un rêve, ne passerait pas et on la traiterait de folle encore plus si elle parlait de ce qui s’était passé là-bas. Malheureusement, les seules personnes à pouvoir la croire étaient celles ayant vécu un véritable calvaire en sa compagnie. D’ailleurs, la concentration n’étant pas son fort actuellement, car elle eut bien du mal à penser à l’endroit où elle devait aller. Ce n’est que lorsqu’elle fut sûre d’elle qu’elle mit les pieds sur la plaque au sol.
Transporter aussitôt jusqu’à la capitale, Jaina se dépêcha de retourner à la caserne où elle logeait. Chaque bruit suspect la faisait sursauter, chaque mouvement était perçu du coin de l’œil et la faisait se tourner. Son coeur palpitait à tout rompre et alors qu’elle ne faisait pas attention à l'endroit où elle allait, elle accrocha l’épaule d’un citoyen qui manqua de la faire tomber. Elle tenta de s’excuser, mais sa main droite s’agrippa au collet de ce dernier. La demoiselle se mit aussitôt à paniquer et dû utiliser sa senestre pour libérer le pauvre homme. Apeuré, affoler, la tête tournante, Jaina ne s’excuse pas. Non, elle prit la fuite tenant son bras cloué contre sa poitrine. Elle courut aussi longtemps que sa condition actuelle le lui permettait s’arrêtant que lorsque ses poumons lui brûlèrent.
Elle emprunta les petites ruelles afin d’éviter de croiser, qui ce soi et lorsqu’elle arriva enfin à la caserne royale, elle entra dans cette dernière sans s’annoncer bien qu’on la remarqua passer telle une furie. Certains tentèrent de se mettre sur sa route, mais elle les bouscula rapidement d’un mouvement de bras qui était hors de son contrôle. Des larmes commençaient à lui monter aux yeux alors qu’elle ne comprenait tout simplement pas ce qui lui arrivait.
Une fois dans sa chambre, c’était une tout autre histoire. Son petit Lugnipus reconnu aussitôt sa maîtresse et se mit à sautiller dans tous les sens voir à tenter de lui sauter dessus. Heureusement qu’elle avait pensé à demander à l’un de ses voisins de chambre de venir s’occuper de son familier. Il avait tellement grandi depuis son absence, mais quand elle tenta de le calmer pour qu’il s’assoie, sa main partie d’elle-même repoussant le canidé bien trop fort ce qui le fit heurté la base de lit en bois. Il échappa un couinement à l'impact. Celui-ci se mit en position de peur et quand Jaina tenta de se rapprocher de ce dernier en lui tendant sa main forte, il retroussa ses babines montrant ainsi les dents, les oreilles plaquées contre son crâne. Elle tenta avec sa gauche et celui-ci fut plus enclin à s’approcher bien que peureux. Il toucha du bout de sa truffe l’extrémité de ses doigts et lui fit une légère lichette avant qu’elle ne puisse le caresser avec tendresse.
- Pardonne-moi Cobalt… Je…je ne sais pas ce qui m’arrive.
La demoiselle prit une douche inspectant par la même occasion son visage qui ne possédait plus aucune trace de mutilations, puis se coucha. Sa nuit fut très courte et parsemée de réveil en sursaut.
***
Les jours se ressemblèrent, Jaina restait allongé dans son lit fixant sa main qui n’était plus sienne. Pourtant lorsqu’elle la bougeait, cette dernière semblait se plier à sa volonté. Elle ne s’alimentait presque pas se contentant de simples rations de survie. Elle perdait du poids et ne semblait plus du tout en bonne santé. Ses nuits étaient toujours aussi courtes et cela se voyait de plus en plus à son visage cernant ses yeux jusqu’aux joues d’une couleur violacé. Par soucis, elle avait entouré sa main d’un bandage afin que personne d’autre ne puisse la voir surtout lorsqu’elle sortait son Lugnipus. Jaina négligeait son apparence, bien qu’elle n’omettait pas de prendre des douches.
Son retour parvint rapidement jusqu’aux oreilles de ses supérieurs et elle savait que ce moment devait arrivée. Elle avait elle-même une décision à prendre, mais dans cette condition un seul choix lui était possible; se retirer de ses fonctions. Elle n’était plus en mesure de protéger qui que ce soit alors qu’elle était elle-même un danger pour les autres. Cette main était ce qui avait causé sa perte, cet appel l’avait détruit et même si elle n’entendait plus les voix, elle voyait ces créatures, ces êtres difformes, ces choses dont elle n’avait pas de mot pour décrire chaque fois qu’elle fermait les paupières. Si elle s’assoupissait, elle se revoyait soulever par ses nombreuses statues et trainer de force alors qu’elle hurlait et se débattait pour s’en libérer. Cela lui donnait des frissons de dégoûts chaque fois qu’elle y repensait. La sensation était toujours présente…
D’ailleurs, comment expliquer son absence? Il n’y avait pas de bonne méthode ni de bonnes excuses et Jaina ne pouvaient pas déserter les rangs. Si elle quittait la garde, elle le ferait de la bonne façon. Alors elle prépara une lettre qui mentionnait son départ. Combien de gens allait-elle décevoir? Déjà, elle n’a pas pu honorer sa promesse à Nora de l’accompagner jusqu’aux Archipels lui faisant ainsi faux bon. Pourtant c’était quelque chose de très important pour son ami en quête de réponses. Elle allait décevoir Arthorias malgré tout ce qui leur était arrivé, mais elle était un danger pour la famille royale, elle n’avait pas d’autres choix.
D’ailleurs, qu’allait-il advenir d’elle? Elle ne pourra pas rester ici éternellement et devra quitter son logement amené avec elle, Plue et Cobalt. Elle avait un emport’tout qui pourra lui servir ainsi qu’un sac de couchage. Quelques éléments de survie, mais sans logement tout était plus compliqué. Elle ne pourrait pas planter sa tente dans la capitale, puisqu’on finirait par lui dire de dégager de là. Elle n’avait ni famille et ses seuls amis ne pourraient pas plus l’héberger. Devon avait très certainement retrouvé sa belle et elle ne pouvait pas lui demander de l’aider, pas après ce qu’elle leur avait fait subir là-bas.
Ses pensées se tournèrent alors vers la sœur qu’elle avait rencontrée dans un des temples dédier à la déesse Lucy… Sur le coup, celle-ci lui avait totalement fermé ses portes et n’avait pas projeté sa lumière sur la pauvre garde et cela ne risquait plus d’arriver de toute façon. Du coup, Jaina tenta d’envoyer une lettre au temple adresser à sœur Friede afin de solliciter une rencontre avec elle. La sœur s’était portée volontaire pour aider Jaina a retrouvé les membres de sa famille et si c’est bien la dernière chose sur laquelle elle pouvait se raccrocher.
Jaina avait plié bagage et s’était assurée que tous ses biens étaient en sa possession et ranger dans son sac avant d’annoncer quoi que ce soit, mais dans tous les cas, elle ne pouvait plus retarder l’inévitable. Elle avait été convoquée par Arthorias et celui-ci demandait des explications. La demoiselle ne s’était pas fait prier et avait pénétré le bureau la tête bien basse. Tout son corps tremblait et lui remettre sa lettre lui avait demandé tous ses efforts. Elle ne pouvait pas lui dire ce qu’elle avait vu ou vécu, ce qu’elle voyait toujours, ce que sa main était devenue et quel danger elle mettait les autres en restant ici. Elle avait fait simple, elle avait remis sa démission mentionnant que dans le contexte actuel, elle n’était plus capable d’accomplir ses fonctions et ne savait pas si un jour elle serait de nouveau en état pour. Elle ne pouvait pas attendre jusqu’à ce jour non plus.
Un rendez-vous avait donc été pris afin de lui retirer son marquage magique qui lui permettait d’utiliser son pouvoir dans le palais ce qui était tout à fait normal et compréhensible et dans le doute, elle avait attaché sa main contre son abdomen afin d’éviter une quelconque réaction de celle-ci. La paperasse avait été complétée et il ne manquait plus qu’à Jaina de remettre son insigne et d’apposer sa signature.
Aujourd’hui, c’était toute sa vie qui s’écroulait devant elle. Être garde c’était tout ce qu’elle connaissait. Protéger le peuple avait toujours été sa plus grande ambition, mais voilà qu’aujourd’hui elle éprouvait le sentiment d’être un danger pour qui que ce soit. Sa main qui tenait la plume était hésitante et agitée. Ses yeux s’étaient emplis de larmes alors que ses épaules se soulevaient à chacun de ses sanglots.
C’était la bonne décision…
Aujourd’hui, moi Jaina Stonebridge démissionne de mes fonctions de garde auprès de la couronne royale ainsi que de la garde civile.
C’était un nouveau départ, mais où pourra-t-elle aller? Accompagné de son glooby qui s’était logé sur son épaule ainsi que son Lugnipus qui se trouvait à sa gauche, Jaina se dirigeait maintenant vers l’inconnu sans savoir ce qu’il lui arrivera.
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