Quand on y pense, c’est pas énorme, si la piste s’avère être la bonne. Faut dire, c’est un dossier important, à cause des implications possibles, mais pas capital, par rapport à tout ce avec quoi on jongle déjà au pôle espionnage. C’pour ça aussi que c’est moi qui suis envoyé, a priori j’devrais avoir une bonne chance de la chopper, et de l’identifier, aussi, plus formellement que si c’était genre Feuille qui s’y était collé.
Reste que les réseaux utilisés par Ombre font bien le boulot. Avec la description un peu sommaire que j’ai filée en revenant de la quête du Monastère des montagnes, ils ont réussi à trouver quelque chose, quelqu’un, d’un peu plus prometteur que toutes les fausses pistes qui avaient été initialement annoncées. Donc j’boude pas mon plaisir, quand on m’dit d’aller faire un tour du côté du Village Perché. En plus, avec la téléportation, c’est vite fait, hein…
Le plus gros risque, c’est si elle réussit à nouveau à nous faire apparaître des gévaudans, on risque d’être assez dans la merde, en fait… Enfin, moi, ça ira, mais ça nous distraira. Après, quelles sont les chances d’en avoir qui apparaissent aussi loin des montagnes ? Mais on connaît pas son pouvoir, réellement, au final, même si on a supputé qu’elle les avait attirés avec l’espèce d’appât bizarre. Puis elle se souviendra pas de moi, ce qui devrait constituer un bon avantage.
A la sortie du portail de téléportation, j’suis prêt à admirer l’escouade qui a été mise sous mes ordres. Mais y’a personne sur la grande place, à part les gardes habituels qui font le planton et s’assurent que rien avec l’air trop méchant n’aille foutre la grouille à la Capitale. Juste des passants normaux, et un soldat qui regarde avec attention les gens qui entrent et sortent du portail, à la recherche de quelque chose.
Pas d’insigne particulier, d’ailleurs.
Est-ce que ce serait une forme assez élaborée de farce ? Est-ce que le courrier envoyé par la patronne était pas clair ? Ou est-ce qu’on m’a refilé un genre de tueur, spécialiste de l’investigation, de la traque, capable d’arrêter des voleuses qui volent… dans les airs… en claquant des doigts, avec un pouvoir super fort et utile ? Y’a intérêt.
J’me pointe devant lui, dans sa grosse armure un peu moche et ridicule. Ça doit pas être pratique pour courir dans les branches, ça, même si elles sont très grosses au Village Perché. Il a loupé sa vocation, en tout cas. J’suis sûr qu’il aurait été bien, à l’astiquer avec ses collègues dans la Garde Royal. Ils auraient été beaux, tout suants, à laver et huiler leurs épées dans un bel ensemble. Hein, n’est-ce pas. Puis Hekmatyar crache jamais sur des gens qu’ont la même passion que lui, et c’est pas forcément protéger la Couronne.
J’fais un vague salut militaire totalement salopé, que Grassim m’aurait à nouveau foutu un coup de bâton si elle avait été là.
« Sergent Vraine, de la Régulière de la Capitale, ‘chanté. »
L’identité de sergent, c’est l’feu, pas pour rien que Zah l’utilise tout le temps.
« T’es les renforts alloués par le ‘pitaine Nautsaine ? »
La prononciation est hasardeuse à dessein, histoire de voir s’il réagit un peu ou s’il en a rien à battre. J’sais pas lequel je préfèrerais, entre le balais dans le cul et les pintes à foison, donc on avisera suivant ce qu’on me donne.
« J’sais pas si tes patrons t’ont fait le topo. Y’a une voleuse assez dangereuse qu’a participé au massacre du Monastère dans les Montagnes, là, au nord, à perpette. Elle en a aussi profité pour faucher une relique apparemment inestimable, qu’il serait idéal qu’on retrouve, même si, selon toute probabilité, elle l’aura déjà refilée à son commanditaire. On est sur un ennemi de niveau… dangereux, donc il a été recommandé une escouade assez fournie. »
J’regarde de façon appuyée derrière lui.
« J’suppose qu’ils se cachent pas dans les buissons, hein ? »
Ouais, nan, ç’aurait été trop beau.
« Mais paraît que vous saurez où la trouver. »
Malheureusement pour lui, d'autres affaires méritaient apparemment son attention, car on le chargea d'accueillir ainsi que d'accompagner un sergent tout droit venu de la Capitale, ce dernier avait vraisemblablement le privilège d'user des portails entreposés aux quatre coins du royaume. Équipé pour l'opération à venir, Alvar était muni de sa fidèle armure intégrale, d'une réserve de sang plutôt conséquente et sa paire de menottes anti-magie. Il surveillait en silence les passages à la recherche de son futur collaborateur, qui ne tarda pas à faire son entrée, ce à une heure plus ou moins convenable.
Avec désinvolture, le barbu qui vint à sa rencontre lui offrit un salut bâclé, chose qu'Alvar se garda bien de faire remarquer du fait de son habituelle politesse. Il répondit par le même signe d'appartenance au corps armé d'Aryon mais le fit avec davantage de droiture cependant. Avec un accent marqué, le sergent Vraine se présenta très sobrement et ne s'embarrassa pas du vouvoiement qui était pourtant d'usage entre les gardes de la Capitale. C'était un détail certes troublant, mais rien d'extraordinaire néanmoins. Alvar, désormais habitué au tutoiement imposé par Magnus à l'ensemble de l'effectif, ne remarqua que brièvement ce léger détail qui lui fit hausser un sourcil sous son masque, il décida toutefois de faire de même pour bénéficier d'une bonne première impression. La légère faute de prononciation quant au nom du Capitaine le fit tiquer également, mais il mit cela sur le dos de la méconnaissance et ne prit pas la peine de la corriger, préférant amorcer le dialogue de façon avenante.
"Pareillement. Officier de Brumerive, division des Tortugrams. C'est effectivement moi qui vais t'accompagner durant cette opération."
Suite à cette confirmation, l'officier vint croiser ses bras contre son plastron et écouta en silence le résumé du sergent qui présenta l'objectif brièvement sans perdre son temps en fioritures. De cet individu curieux transpirait une aura de lassitude et de relâchement que l'on pouvait interpréter de diverses manières, cependant Alvar perçut ce trait de personnalité avec optimisme et partit du principe que l'expérience du personnage l'avait rendu drastiquement moins enthousiaste, mais probablement pas moins efficace sur le terrain. Il conclut son discours en évoquant le danger élevé que représentait le suspect, une nouvelle que le Belluaire accueillit en opinant du chef avec gravité. Vraine ne cacha pas sa déception quant au nombre très restreint de militaires placés sur l'affaire, Alvar fit donc au mieux pour lui offrir une explication qui se voulait à la fois honnête et rassurante au sujet de ses propres capacités et des moyens réduits qui leur étaient accordés.
"Une partie de l'effectif est allouée à des tâches de surveillance en vue de certains événements problématiques. Mes supérieurs ont estimé que me mobiliser seul était bien suffisant étant donné la nature de la mission."
Loin de vouloir se vanter de ses attributs magiques, il était depuis peu pourvu d'un don qui lui permettait de simplifier de manière significative les tâches impliquant de traquer un individu particulier. S'il n'appréciait pas nécessairement d'avoir à s'en servir à outrance, son sens du devoir le poussait tout de même à faire appel à sa bête intérieure lorsque la situation le lui imposait. En guise de courte démonstration, il porta une main gantée d'acier à son masque qu'il décrocha lentement, dévoilant son visage bestial aux yeux de son partenaire du jour. Tout en conservant l'accessoire en main, il jeta un regard neutre à Vraine et lui expliqua la nature de sa magie.
"Mes aptitudes me permettent, entre autre, de flairer et de traquer un être vivant. S'il est blessé, cela me facilite la tâche et je peux sans mal mémoriser son odeur. Si nous parvenons à lui mettre le grappin dessus une première fois, elle ne pourra pas s'échapper tant que je serai sur sa trace."
Ce bref résumé pouvait susciter la crainte chez certains, plus encore lorsqu'il était couplé à la révélation de l'apparence monstrueuse du militaire, mais la nécessité contraignait Alvar à ne pas se montrer trop mystérieux au sujet de ses atouts, exceptionnellement. Sa discrétion lui avait déjà coûté beaucoup par le passé et il voyait là une erreur qu'il ne souhait pas reproduire à l'avenir. Les habitants du village étant désormais habitués à son faciès atypique, l'officier décida qu'il était inutile de s'encombrer davantage de son masque et l'accrocha à sa ceinture, puis tourna les talons en invitant son compère à le suivre, estimant que tout complément d'information pouvait être fourni pendant qu'ils se rendaient à leur première destination, une zone à risque que les Belluaires avaient identifié comme emplacement de trafic potentiel. En temps normal, les abords du Village Perché étaient surveillés par les Tortugrams, mais les meurtres en série ayant obligés la Garde à réviser ses affectations, d'autres malfrats avaient rapidement saisi l'occasion pour faire leur nid sans être trop embêtés.
"La faune de ce quartier n'est pas la plus accueillante, mais nous avons de grandes chances d'y trouver des indices intéressants. Une voyageuse en particulier semble correspondre au descriptif fourni et c'est dans cette zone qu'elle aurait été aperçue la dernière fois. Nous devons évoluer avec précaution, nous ne sommes pas toujours les bienvenus ici."
J’me souviens plus, officier, c’est mieux ou moins bien que sergent ? En plus, c’est un grade qui veut rien dire, nan ? Il aurait des épaulières ou un badge ou j’sais pas quoi, comme les lieutenants et capitaines, s’il était important, j’suppose. Et s’il était plus haut-gradé que moi, il m’aurait p’tet fait une réflexion sur mon attitude, qu’est pas si éloignée de celle des patrouilleurs de la Capitale, mais probablement moins en vogue dès lors que tu vas dans des coins franchement militarisés, comme de passer de la civile à la Royale. J’me suis basé sur Zahria, et son sergent désinvolte. Si ça marche pour elle, pas de raison que ça foire pour moi, après tout.
Ça s’trouve, c’est moi le plus gradé de nous deux et j’peux lui dire de sauter jusqu’à ce qu’il demande à quelle hauteur. M’enfin, j’vais éviter de faire le malin. J’suis là pour le turbin, pas pour martyriser les p’tits gars du Village Perché. Puis on m’en a prêté qu’un seul, alors j’vais pas prendre le risque de le casser, quoi.
J’ai pas de mouvement de recul quand il enlève son masque. Ok, il est sacrément moche, et c’est pas d’bol, mais honnêtement, j’ai vu bien pire. Et c’était des gens qui avaient même pas l’excuse d’un pouvoir un peu foireux, juste des parents peu avantageux, une suite de mauvaises rencontres dans des ruelles, des consommations que la Couronne n’encourage pas… Bref, c’pas pire.
« Super, j’comprends pourquoi on t’a envoyé seul, alors. Surtout qu’elle m’a filé entre les doigts la dernière fois, donc si ça pouvait éviter de se reproduire, ça serait vachement mieux. »
Puis on m’annonce qu’on va dans une zone dans laquelle vaut mieux pas être garde. Putain, si j’avais su, j’me serais glissé dans le coin sans un chaperon, ça se serait p’tet bien mieux passé. Surtout qu’elle se rappelle pas de moi, donc j’aurais pu me rapprocher en toute quiétude.
« Pas de souci pour le quartier un peu tendu, j’ai l’habitude de faire des rondes dans les quartiers mal famés de la Capitale. »
Pas totalement un mensonge, même si c’était pas vraiment des rondes en tant que Garde. Je hausse les épaules. C’est le moment où je parle de mon pouvoir ? C’est toujours une purge à expliquer, putain.
« En ce qui me concerne, tu risques de m’oublier très vite. Pas de panique, tant qu’on reste ensemble, y’a aucun souci. Et si on tombe sur elle ou un morceau un peu trop coriace, j’ai quelques surprises dans mon sac à malice, m’enfin ça m’étonnerait qu’ils décident d’attaquer deux gardes de but en blanc… hein ? »
Pasque ça s’est vu à la Capitale, et depuis, ils se déplacent rarement à moins de huit. Le but est pas tant de chopper les criminels en flagrant délit que de faire mine de se montrer et que la garde a un minimum de contrôle sur les lieux.
Au bout d’un peu de marche, on arrive au coin que Brumerive a désigné comme le quartier dans lequel on rigole bien. Les arbres sont un poil moins beaux qu’en centre-ville, un peu plus fins, petits, p’tet même décharnés. J’me demande si c’est pour ça qu’on y a foutu les pauvres, et que l’habituel concoction de criminalité et de misère a fait le reste. Probablement. M’est avis que toutes les villes du monde se ressemblent.
Les ponts qui courent entre les arbres sont un peu moins bien entretenus, le bois ayant des traces de pourriture. Autant, j’suis à peu près sûr de pouvoir passer dessus, autant l’autre avec son armure lourde… J’avoue, j’serais moins serein à sa place. D’un autre côté, s’il connaît, avec sa division des tortues, il doit savoir si c’est craignios ou non.
On attire immédiatement les regards, moi les pognes dans les poches, lui avec sa boîte de conserve et sa gueule finalement assez unique. Pas trop de doute sur ce qu’on est : des condés. J’laisse filer mon regard sur les passants, et j’y vois la même chose qu’à la maison, sans mentir. Des gens qu’essaient de survivre avec ce qu’ils ont, magouillent ce qu’ils peuvent, pour garder la tête hors de l’eau. Les vrais gros poissons sont pas ici, à l’entrée. Au mieux, on va avoir un guetteur, et encore : c’est les habitants qui s’en chargent généralement, en échange d’un peu de tranquillité.
Puis, pour ce que le Royaume fait pour eux, hein…
Alors qu’on s’enfonce davantage dans le quartier, on attire de plus en plus de regards en coin, et les bonnes femmes et p’tits artisans sont remplacés petit à petit par des hommes à l’air un peu désoeuvrés. Ha.
« Sympa, l’ambiance. M’rappelle chez moi, tiens. C’loin encore ? »
Occasionnellement, Vraine prenait cependant la parole pour transmettre des informations essentielles au bon déroulement de l'opération. Parmi ces données, il transmit à Alvar quelques menues informations concernant son pouvoir mais resta très évasif sur la nature exacte de sa capacité. L'officier tourna la tête en direction de son compagnon, quelque peu intrigué par cette révélation et ce qu'elle impliquait. Vraine décida de ne pas s'étendre sur la question et informa également l'officier qu'il était équipé en vue des éventuels obstacles qui se présenteraient devant eux, se préparant évidemment à une interaction musclée avec la suspecte. Lorsque Vraine émit l'hypothèse que peu de malfrats allaient se risquer à les attaquer frontalement, Alvar hocha latéralement la tête en laissant apparaître une grimace sur son faciès bestial, exprimant ses doutes à ce sujet.
"Eh bien... Pour tout te dire, je suis déjà tombé sur certains voyous qui ne craignaient pas la vue de la médaille. Nous exerçons toujours une forte pression sur ces malfrats, mais il arrive qu'ils tentent de se frotter à nous lorsque leurs intérêts sont menacés."
Le Village Perché était certes réputé pour son attrait touristique et ses paysages absolument grandioses, mais le fonctionnement économique de l'endroit n'était pas nécessairement mieux pensé qu'ailleurs et quelques zones étaient toujours moins entretenues ou moins surveillées que d'autre, ce qui avait petit à petit laissé s'installer un système de délinquance organisée difficilement destructible car perpétuellement renouvelé par des arrivants toujours plus nombreux. Les récents changements dans les patrouilles avaient encore fragilisé la sécurité au sein de ces zones déjà partiellement délaissées, occasionnant une baisse significative du niveau de vie dans la zone.
Alvar jetait silencieusement des coups d’œil aux visages durs qu'il sentait peser sur lui. Parmi les hommes et les femmes à la mine patibulaires qui jaugeaient le duo de militaires, l'officier reconnaissait quelques visages qui ne lui inspiraient pas confiance. Il y avait parmi eux certains individus qu'on savait impliqués dans des affaires obscures, mais ces filous n'avaient pas encore eu la malchance d'être pris la main dans le sac. Le Belluaire constata sans mal la présence des habituels traînards du coin, qu'il soupçonnait d'être en charge de la surveillance de certains commerces dissimulant des activités criminelles, mais les perquisitions attendraient. Pour l'heure, ils avaient d'autres chats à fouetter. Vraine lui demanda s'ils étaient enfin proches de leur destination et Alvar opina du chef tout en se penchant vers son compagnon, à qui il murmura.
"Nous y sommes déjà. C'est plus ou moins dans cette zone qu'elle aurait été aperçue. Mes hommes m'ont également informé qu'ils croient l'avoir aperçue à la taverne des Couteaux Tirés. La propriétaire est très amicale mais sa clientèle, beaucoup moins."
Et pour cause, Alvar avait déjà eu l'occasion d'attraper divers malfrats ayant pour habitude de traîner la patte de ce côté du village, ce qui avait tendance à occasionner un remue-ménage que n'appréciait guère la vieille femme en charge de l'établissement. D'une certaine manière, la bonhomie et la sympathie de cette tenancière contrastait anormalement avec l'ambiance générale du quartier, Alvar se demandait d'ailleurs toujours si elle couvrait une quelconque activité ou si elle était simplement indifférente aux sinistres projets de ses clients, voir même trop naïve pour s'en rendre compte.
Sous haute surveillance, les deux militaires continuèrent ensemble leur exploration de la zone de recherche et Alvar n'estima pas utile de mettre en garde le sergent contre les divers ennuis qu'ils pouvaient subir en foulant ces pavés là. Autant par ses mots que par l'aura se dégageant du personnage, Alvar avait la nette impression qu'il n'était pas nécessaire de materner ce mystérieux sergent qui semblait évoluer avec assurance au beau milieu des brigands dissimulés parmi les résidents.
Alvar mena Vraine jusqu'à la fameuse taverne où d'autres traînards leur jetèrent des œillades furtives tout en s'écartant du passage lors de leur arrivée. L'un des gaillards encapuchonnés s'éloigna un peu du lot et l'officier le suivit des yeux tandis qu'il s'éloignait, le soupçonnant d'aller prévenir quelqu'un de leur venue. Il décida néanmoins de pousser la porte de l'établissement, suivi de près par le sergent, et ils se retrouvèrent nez-à-nez avec la patronne qui les salua par réflexe avec gentillesse, mais perdit bien vite son sourire avenant lorsqu'elle eut reconnu Alvar.
"Bien le bonjour ! Qu'est ce que je peux vous... Ah, c'est vous."
Elle pencha à nouveau la tête, visiblement absorbée par son ménage consistant désormais en de furieux coups de balai. Alvar lui offrit une risette quelque peu embarrassé et vint se masser la nuque en signe de gêne. Visiblement, la dernière altercation qui s'était amorcée dans la taverne lui avait attiré les foudres de la tenancière. Il la comprenait, mais savait aussi que c'était par nécessité et non par choix qu'il avait causé un tel chaos sur son passage. Cette rancœur qu'elle éprouvait à son égard ne l'arrangeait d'ailleurs pas beaucoup, car il avait fait venir son collaborateur justement pour questionner la propriétaire. Il se surprit à espérer que la suspecte ne soit pas dans le coin, car démarrer une nouvelle poursuite ici n'allait pas manquer de lui attirer les foudres de la vieille femme.
"Bonjour, nous aurions quelques questions à vous poser."
D'un signe de main, il invita Vraine à s'avancer pour interroger leur interlocutrice. Pendant ce temps, Alvar balayait la zone à la recherche d'une éventuelle trace de la femme qu'ils recherchaient.
Cela dit, j’suis de mauvaise foi : il sait où il va, et il a l’air d’avoir un pouvoir qui colle exactement à ce que j’veux faire. Pour le reste, j’me démerderai, même si on n’est pas à l’abri d’une mauvaise surprise. M’enfin, y’a pas de gévaudans ici, normalement, donc y’a pas de raison… Par contre, vingt personnes qui me déchargent en même temps leur pouvoir dans la gueule, m’est avis que ça peut vite devenir compliqué à gérer.
La taverne dans laquelle on se retrouve est pas vraiment miteuse. Enfin, pas en elle-même. C’est davantage la population qui s’y trouve qui renvoie immanquablement en partie cette impression. L’autre partie, c’est une forme de danger, pasque là où les miteux sont clairement dans l’indifférence, ceux qui le sont moins et doivent s’enrichir de petits et gros trafics accueillent pas vraiment notre arrivée avec des sourires ravis.
Traditionnellement, tant qu’on fout pas trop la merde et qu’on pose pas les mauvaises questions, c’est censé bien se passer. Donc à moins que la nana fasse partie d’un groupe solidement établi, ils devraient pas venir nous casser les roustons. Et d’après les informations qu’on avait, elle était plutôt mercenaire, donc ça se tente…
J’m’avance vers la tenancière, une p’tite vieille style boulotte, qui a l’air de connaître mon compère, et pas forcément en bien. Ça doit faire désordre, d’accueillir des gardes dans son établissement, surtout vu où il est situé, alors j’lui en tiens pas rigueur. Par contre, faut respecter quand même un minimum les codes locaux, alors j’m’appuie au comptoir, un grand plateau de bois qui sépare les boissons de la salle.
Machine fait le tour, pose son balais, et se met face à moi, mains bien en évidence.
« Deux whiskeys, que j’commande, pour mon copain et moi. Un troisième pour vous, si vous voulez.
- Ca ira, merci.
- ‘Sûr.
- Posez vos questions et faites attention, puis partez. »
Ah ben super, on est bien accueilli.
J’laisse Brumerive examiner la salle. J’ai pas souvenir d’avoir vu ses tifs, à la voleuse, mais au cas où, ça fait pas de mal d’avoir quelqu’un qui surveille, surtout si l’un des zonards commence à avoir des idées pas rigolotes. Les p’tits verres arrivent devant nous, et j’en pousse un du côté du collègue, avant de descendre le mien cul sec, pour le reposer à côté des cristaux qui payent la consommation, et un peu davantage.
« Est-ce que vous auriez vu une jeune femme…
- Des tas. Pas chères, ou plus chères, si c’est ce que vous cherchez.
- Tifs mi-longs, genre au-dessus des épaules. Lunettes. Court-vêtue. »
Elle hausse les épaules.
« Ca va faire monter le tarif, surtout s’il faut une potion de changement d’apparence ou une illusion.
- Tifs auburn.
- Cinquante de plus.
- Aurait été vue dans le coin.
- Seulement quarante de plus.
- Voleuse. Mercenaire. »
Elle tape ses jointures sur le plateau de bois, passe la main sous le comptoir. C’est le moment où elle sort un couteau ou un gourdin, c’est ça ? Pas que j’sois inquiet d’une p’tite vieille, mais avec les pouvoirs, on sait jamais trop sur quel pied danser. J’me raidis un peu, j’répartis différemment mon poids pour être prêt à bondir dans n’importe quelle direction. A côté, j’sens que l’officier est aussi plus tendu, en train d’observer le reste de la clientèle. S’passe quelque chose, j’suppose.
Elle sort un torchon, frotte frénétiquement une tache devant elle, que j’vois même pas. Certes… Un genre de signal ? Mais nan, ça s’anime pas outre-mesure.
« Il est possible qu’elle soit venue par ici. J’ai beaucoup de passage, dit-elle prudemment. Je ne me souviens clairement pas de tout le monde.
- C’est dommage. »
J’laisse courir mon doigt le long de ma bourse, et le tintement des cristaux qui s’entrechoquent sonne doucement. Regard fuyant sur ma gauche. Ah.
« Mais si d’autres personnes peuvent nous indiquer où trouver cette bonne amie, bien sûr, on reprendra notre chemin. Aucun souci.
- Je ne sais pas s’ils ont cette information.
- Dans ce cas, faudrait leur demander.
- Dehors ?
- Allons. C’est rarement comme ça que ça se passe, hé ? »
Elle plisse les yeux, me jauge. J’lui adresse un large sourire prédateur qui atteint pas mes mirettes.
« La table au fond là-bas.
- Bah voilà. J’me disais bien que la mémoire, ça allait et ça venait. »
J’tapote le bras de Brumerive, et on s’dirige vers une table qu’est un peu planquée dans un recoin. Les quatre personnes déjà assises, une femme et trois hommes, ont déjà leur attention fixée sur nous, même si l’un d’eux nettoie avec application ses ongles avec son couteau. Ouuh, menaçant, j’ai peur, j’suis terrifié, tiens.
J’crochète un tabouret du pied pour l’amener sous mes fesses, et j’m’assieds face à eux.
« Salut, la compagnie. Z’allez bien ? »
Mines patibulaires. J’attends que mon pote fasse de même.
« On a pleins de trucs à se raconter, j’sens. »
Et on va devenir les meilleurs amis du monde, même que.
Des rires gras et moqueurs résonnèrent sous les épaisses capuches de jute qui masquaient les faciès des plaisantins. Alvar ne parvint pas à reconnaître la voix de l'auteur de la boutade mais ne fut pas surpris d'avoir été aussi aisément reconnu par les habitués de la taverne. Alvar les toisa de toute sa hauteur mais son compagnon choisit quant à lui une approche plus directe et décida de s'inviter à la table, faisant directement face à la silhouette féminine dont le visage était intégralement masqué par les ombres. Le garde en armure demeura initialement silencieux, voyant avec quelle aisance son collègue semblait savoir s'adresser à des malfrats, mais le voyou qui avait pris la parole ne semblait pas décidé à le laisser tranquille.
"Tu viens pour une deuxième tournée ? La patronne a juste eu le temps de faire remplacer la déco', c'est pas correct ce que tu fais. Mais venant d'un garde, c'est pas surprenant. C'est pas le respect qui vous étouffe, pas vrai ?"
Alvar prit un instant pour reporter son attention sur le provocateur, l'identifiant cette fois-ci sans mal parmi les autres individus. Son regard s'attarda néanmoins une seconde sur la femme qui se gardait bien de répondre aux moqueries par ce rire sardonique qui semblait caractériser le reste de ses camarades. L'hybride marqua une pause de circonstance, laissant à l'assemblée le temps de regagner le silence puis, de cette voix rauque qui marquait tant les esprits de ses pairs, il s'exprima enfin.
"Je suis profondément navré pour les dommages qui ont été causés par la dernière visite de nos services. En tant qu'honnête citoyen du village vous serez sans doute heureux d'apprendre, au demeurant, que ces criminels ont été appréhendés et servent actuellement leur peine au cachot."
Si Alvar n'était usuellement pas homme à user d'ironie ou de sarcasme, il s'était pour une fois senti contraint de répondre aux attaques par cette petite pichenette qui, si elle pouvait sembler innocente, ne parut pas manquer de piquer au vif son interlocuteur. Ce dernier, d'abord impassible, finit par rétorquer par un reniflement sonore avant de porter sa chope à sa bouche, en sifflant le contenu d'une traite. Le silence ne fut cependant que de très courte durée, car un autre homme faisant face au premier décida de prendre la parole à son tour.
"Ecoutez, on fait rien d'mal. On boit juste un verre entre amis après une journée de dure labeur. Pardonnez l'attitude de ce vieux bougre, c'est un grincheux. Qu'est ce que vous nous voulez messieurs ?"
S'il était encore trop tôt pour effectuer des conclusions, Alvar ne put néanmoins pas s'empêcher d'esquisser un sourire sous son masque d'acier. Il croisa les bras et pivota légèrement la tête, visiblement très intrigué par ce soudain regain de politesse de la part de l'un d'entre eux. Le garde n'était pas né de la dernière pluie et avait aperçu du coin de l'œil quelques furtifs échanges de regard entre les clients encapuchonnés, comme s'il cherchaient à communiquer par de brefs mouvements de tête. Cette prise de parole si instantanée avait tout l'air d'un moyen très maladroit de détourner l'attention de la demoiselle qui, au contraire de ses petits camarades, apparaissait bien taciturne. Alvar souffla narquoisement puis porta une main à son fidèle masque, qu'il retira pour ensuite l'accrocher à sa ceinture.
"Mon impolitesse n'a donc aucune limite, j'ai omis de me découvrir. N'ayez crainte, nous n'avons que quelques questions à poser avant de nous remettre en route. Pourriez-vous nous montrer vos visages, que nous sachions à qui nous avons affaire ?"
"C'est un ordre, soldat ?"
La réponse fut sèche et surtout immédiate. A une seconde près, il lui aurait tout bonnement coupé la parole. Alvar porta ses prunelles brunes sur le mystérieux personnage qui avait tant de répondant et lui accorda un sourire curieusement carnassier en vue de son habituelle courtoisie. D'un air goguenard, il répondit prestement.
"Interprétez-le comme vous voulez. Avez-vous une bonne raison de refuser, messieurs dames ?"
Si la tension monta d'un cran, Alvar demeura quant à lui tout aussi souriant. Il avait pourtant la nette impression de percevoir les premiers signaux d'une véritable tempête, à laquelle il était déjà prêt à répondre avec toute la fermeté que l'on lui connaissait.
Mais là où c’est indubitablement une femme, c’est difficile de voir quoi que ce soit de plus, avec toutes les couches de fringues. C’est aussi pour ça que j’arrive pas à savoir s’il s’agit de ma cible ou non, on voit pas assez son corps, ni même son visage. Et, dans tous les cas, j’l’ai vue tellement brièvement que même en la croisant au hasard d’une rue, j’pourrais encore me gourer. Y’a bien que le portrait-robot qui fournit quelques informations.
Derrière nous, on entend un son sourd. J’jette un œil derrière, et j’vois la vieille poser un énorme gourdin sur le comptoir. Ah ben p’tet que les destructions de l’autre fois, c’est pas que le gros garde qu’est à mes côtés, et que ça tapait un peu dans le tas ? Reniflement sonore de la patronne, et le client qui nous a défiés semble se dégonfler physiquement.
Pas sûr que ce soit la tenancière qui l’intimide, mais j’suppose que doit y avoir de sales retombées en terme d’image.
« On peut faire ça dehors ? Tente un des hommes.
- Nan, vous vous enfuiriez, et tout, faudrait vous rattraper, vous menotter, vous emmener à la garnison, ça serait extrêmement fatigant pour tout le monde. Baissez vos capuches, on vérifie vos gueules, et on décale. Ça semble réglo, non ?
- Dis comme ça, oui, mais si vous décalez pas, justement ?
- Ah ben ça, tu verras bien. C’est l’jeu, ma pauv’ Lucette. »
De mauvaises grâce, ils baissent leurs capuchons, et y’a effectivement rien d’intéressant à voir. Des tronches assez marquées, probablement par des boulots pas faciles, la picole, une famille pondue trop jeune, et beaucoup trop de bagarres dans les bars, à voir les nez cassés plusieurs fois, le cartilage de leurs oreilles, et la peau au niveau des jointures des doigts. Des cogneurs, probablement, le genre qui fait un peu videur, et qui règle les problèmes de voisinage, j’suppose.
Pas grand-chose à en craindre, grosso merdo.
J’tourne la tête vers le collègue, qui les examine un par un. Puis il a un hochement bref de tête. Tout va bien, donc. Puis tous les regards se tournent vers la nana, qu’a gardé tout ce qui cache.
« Ca va, on vous emmerde pas trop ? Que j’questionne.
- Un petit peu, pour être honnête. »
Un ongle parfaitement manucuré sort de sous la cape pour gratter une crasse sur la table, et laisse un creux d’un bon millimètre. Ben tiens, un genre de renforcement, ou de griffes ? Ca voudrait dire que c’est pas ma cible, à moins qu’elle ait de quoi se défendre de manière assez souple, un peu comme moi avec mes différents objets de pouvoir.
« En fait, ça valait pour vous aussi, de retirer la capuche.
- Ah. »
Le silence s’étend de façon un peu gênante, et j’ai un ricanement bref.
« Allez, t’es timide ? Moche ? Promis on se moquera pas. »
Enfin, si elle est pire que Brumerive, je garantis pas d’être capable de garder mon calme. Ça en ferait quand même un sacré morceau, après tout. Elle hésite visiblement, et ses petits camarades à elle hésitent aussi. La tension, qu’était un peu redescendue, remonte en flèche. Visiblement, elle a quelque chose à cacher, au-delà de sa tronche, et c’est probablement lié à son identité. Avec un soupir, elle baisse finalement et nous montre.
Une brune assez lambda, du genre mon âge, donc milieu trentaine. Elle est bien apprêtée, mais y’a rien de bien folichon à regarder. A priori, elle doit avoir des moyens financiers qui lui permettent de bien se saper et se maquiller, ou une bonniche qui s’en charge pour elle, tout comme sa coiffure, très élaborée. M’enfin, comme j’disais, pas de quoi s’emballer. En tout cas, j’suis certain que c’est pas ma voleuse à moi, avec ses p’tits amis gévaudans, mais Brumerive fait un signe différent.
« Les gars, vous pouvez nous laisser avec Madame, s’il vous plaît ? On a sûrement pleins de choses à se raconter. Des choses dont vous faites pas vraiment partie.
- M’étonnerait. On s’assied encore où on veut, après tout.
- Nous avons besoin de l’interroger dans le cadre d’une affaire de la plus haute importance.
- Je pense qu’elle préfèrerait qu’on soit là.
- J’pense qu’elle préfèrerait que vous parliez pas à sa place. Et j’pense que j’préfèrerais que vous décarriez. Donc soit on discute à la garnison, dans une petite pièce avec une table, deux chaises, et pas de fenêtres, ou alors on en termine enfin avec cette sombre affaire de merde et chacun peut rentrer tranquillement chez soi pour… ben j’sais pas ce que vous faites. »
Taper votre bourgeoise, probablement, mais j’essaie d’éviter de déclencher une bagarre, là.
« Bon, bon… On est juste plus loin, Elo, tu dis ça t’as besoin de quoi que ce soit. »
Ils partent vers leurs bières, juste hors de portée de voix, si on se met pas à gueuler comme des putois.
« Elo, hein ?
- Elomée Fendryl, chef d’une compagnie de mercenaires, très précisément. »
Elle a une diction très précise, un peu hachée.
« C’est pour ?
- Des renseignements, évidemment. »
Ça fait plaisir de voir qu’on va pouvoir discuter sur des bases saines et sympathiques, maintenant que les grouillots sont partis.
« Vous inquiétez pas, on va vous emmerder bien longtemps, que j’dis.
- J’espère bien.
- M’enfin, ça dépendra aussi de vous, hein.
- Allons donc, quelle surprise.
- Vous savez comment c’est, les affaires de la Garde, tout ça…
- Non, pas vraiment. Et je ne peux pas dire que ça m’intéresse énormément. »
J’sens que la conversation se dirige vers un cul-de-sac. Un autre angle, p’tet.
« C’est vos hommes, ceux qui viennent de s’éloigner ?
- Pas les miens, mais ils travaillent en étroite collaboration avec moi, oui.
- Ils ne font pas partie de vos mercenaires ?
- Nous sommes davantage un… regroupement d’individus au nom desquels je m’exprime, plutôt qu’une véritable force armée telle qu’on en retrouve dans la Garde.
- Je vois.
- Et de nombreux anciens gardes nous rejoignent, d’ailleurs. En tout cas, pour ceux qui en valent la peine. »
Son doigt tapote à nouveau la table, y laissant un creux de trois millimètres. Bonne ambiance. C’est mamie qui va pas être contente, quand elle va récupérer une passoire au lieu d’un meuble de taverne. Mais tout ça m’a fourni mon accroche.
« Et à part des gardes, vous avez d’autres gens qui vous rejoignent ?
- Cela vous intéresse ?
- Ouais, sinon j’poserais pas la question, que j’rétorque plus sèchement.
- Vous ne voulez pas aller droit au but ?
- ‘Sûr. »
J’file la description de ma voleuse favorite, en scrutant attentivement son visage. Elle laisse rien transparaître, ce qui est passablement énervant, donc j’me contente d’attendre qu’elle cause. Dans le pire des cas, faudra revenir nuitamment pour fouiner, ou alors l’envoyer goûter du sérum de vérité, j’sais pas.
Elle prend une grande inspiration, avant de la relâcher en se dégonflant visiblement.
« Oui, elle a effectivement fait partie des mercenaires.
- Au passé ? »
Hochement de tête.
« Elle a disparu il y a quelques jours après avoir dérobé des cristaux et quelques biens plus précieux, dont la valeur est… difficile à estimer.
- Des objets magiques ?
- Des objets d’une grande valeur sentimentale. Et si vous lui mettez la main dessus, je m’attends évidemment à les récupérer. »
Des objets sentimentaux uniquement, bien sûr, on n’y croit pas une seule seconde.
« Des informations sur elle que vous pourriez nous transmettre ?
- Elle se faisait appeler Elya, pour ce que ça vaut. Nous n’avons pas réussi à lui mettre la main dessus, par contre.
- Je suppose que vous avez fait appel à vos réseaux ?
- Je pense que nous n’avons rien de plus à nous dire. »
J’cherche furieusement. Elle me plaît bien, en fait, elle est marrante. Quand j’serai à la retraite, j’viendrai p’tet m’engager, tiens.
« Nan, ça devrait être bon pour nous. »
On ressort sous le regard mi-méfiant, mi-soulagé de la patronne, et j’me tourne vers Brumerive.
« Bon ben, c’est ici que nos chemins se séparent. On a fait chou blanc, mais on l’aura p’tet la prochaine fois, hein ? En tout cas, garde la pêche. »
Des missions comme ça, c’est cool, finalement : on discute un peu puis on rentre chez soi. Ça m’rappelle quand j’étais examinateur.
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