Il avait à discuter d’un plan d’action pour la mise en place d’une taxe sur l’alcool avec différents interlocuteurs : des représentants des impôts, des taverniers, des producteurs, etc etc… Autant dire que la tâche n’était pas mince pour satisfaire tout ce beau monde. Ses deux premiers rendez-vous étaient justement des porte-paroles des producteurs, l’un de vin, l’autre de whisky, avec qui il avait réussi à argumenter un premier accord oral sur une taxe dont la base serait de 1,3% du prix de vente du tonneau d’alcool. Pas grand-chose, en sommes, mais un tel pourcentage pouvait faire une très grosse différence dans les caisses de l’état.
Il sortait du deuxième entretien et s’était arrêté à une échoppe pour y acheter un morceau de fromage, histoire de ne pas avoir trop faim en attendant le repas, lorsque sa journée prit un tournant plus qu’inattendu. Son morceau de cantal en main, prêt à entrer dans sa bouche pour y être mordu goulument, il s’arrêta net en remarquant un étrange cercle, tout autour de lui. Il écarta le fromage de son orifice buccal, l’air perplexe. Qu’est-ce que c’était que ce truc-là ? Un pouvoir ? Sûrement. Une farce ? Un piège ? Un attentat ?? Il gambergeait intérieurement mais n’eut pas le temps de pousser réflexion bien loin : une vive lumière l’aveugla, le forçant à plisser les yeux par peur d’y perdre la vue tant la lueur était perçante et puissante. Il eut tout juste le temps d’entendre le vendeur à qui il avait acheté son cantal souffler un « Ben ça… », et l’instant d’après, plus rien. Les bruits de la ville avaient disparu, et à leur place il perçut d’étrange sons, des cris d’animaux… Des mouettes ?
Quelques secondes suffirent pour que ses yeux s’habituent à la clarté éclatante du soleil, qui tranchait nettement de la grisaille partielle de la Capitale. Il finit par ouvrir les yeux, mais le choc de voir ce qui l’entourait prit le pas sur sa volonté de rester stoïque. À sa gauche, une forêt, luxuriante, faite d’arbres qu’il n’avait vu qu’en de rares occasions et qu’il n’était même pas sûr de pouvoir nommés, de fleurs tellement grandes qu’il aurait pu se servir de leurs pétales comme draps, et de tout un tas d’autres végétaux plus étranges les uns que les autres. À droite, en revanche, un simple banc de sable, blanc et resplendissant, parsemé ça et là de coquillages et morceaux de bois probablement déposés là par le vent marin ou la houle des vagues…
La houle des vagues ?!
Encore après le banc de sable, qui était en réalité une plage, se trouvait la mer. Ou l’océan ? Qu’importait ! Une étendue d’eau tellement grande qu’il était impossible d’en voir la fin. Il tourna la tête dans tous les sens, à la recherche d’autre chose : rien. Pas une seule terre à l’horizon.
Il n’eut pas fait 200 mètres qu’il aperçut quelqu’un, probablement une femme, avec une longue chevelure verte, en avant de lui. Il alla à la rencontre de cette personne, plein d’espoir pour les éventuelles informations qu’il arriverait à obtenir de cette rencontre bénie de Lucy. Décidément, même dans les situations les plus étranges, la déesse lui souriait. Du moins, c’est ce qu’il crut jusqu’à être suffisamment proche de la femme en question, qu’il reconnut dans l’instant comme étant l’amie et associée de Nyx Belacqua : Sphérany Ambroise. Cette fois encore, la surprise d’une telle découverte se peint sur son visage.
« C'est pas mal. Resserre un peu tes rênes Lyana. Ce qui fait une bonne monture c'est un bon cavalier. Cesse donc de tirer ainsi dessus ça me désole de voir que tu n'as toujours rien retenu de ce que je t'ai enseigné ! Si tu souhaites que ton cheval ralentisse la cadence il faut que tu effectues plusieurs pressions régulières sur tes rênes. Plus tu tires dessus, plus le cheval va tirer à son tour. Et crois moi dans un combat de force tu n'es pas de taille contre un tel animal. Alors concentre toi je ne le répéterai pas. »
Elle était peut être dure, mais son éducation portait toujours ses fruits et cela n'empêchait pas ses élèves de revenir et de l'apprécier. Même si ça pouvait paraître étonnant d'ailleurs. Lyana était une élève brillante mais trop dissipée et son jeune âge n'arrangeait vraisemblablement pas les choses. Plus les minutes passaient et plus Spherany se sentait exaspérée par ce manque de concentration flagrante. Sans compter qu'il faisait une chaleur étouffante et que le soleil ne faisait que battre d'aisance, agitant ses nerfs. Pourtant cela lui tenait assez à cœur pour qu'elle garde son calme et trouve un équilibre parfait entre le professionnalisme et l'éducation.
La plupart de ses journées se résumaient à ça : enseigner. Il faut dire que l'entreprise Ambroise connaissait une réelle réputation qui s'étendait jusqu'à la capitale. Spherany était fière de pouvoir diriger petit à petit cette immense horloge dont chaque engrenages se révélaient précieux pour son avancée. Et toutes ses séances étaient importantes, aussi bien les unes que les autres.
Lorsque le cours fut terminé elle soupira d'aise. C'était quand éprouvant, sans compter qu'il ne s'agissait que de son sixième cours de la journée. Elle en avait encore plusieurs à effectuer et la voilà déjà éreintée. La journée était bien partie pour n'en plus finir. Cependant, alors qu'elle s'apprêtait à hydrater sa cavité interne terriblement asséchée elle fut surprise de constater un cercle lumineux s'instaurer autour d'elle. Elle relâcha la bouteille qui se renversa à ses pieds pendant que son regard rond scrutait chaque parcelles de cette inadvertance.
« Par Lucy qu'est ce dont qu-... »
À peine elle n'eut le temps de terminer sa phrase qu'une lumière aveuglante la força à protéger ses pupilles à l'aide de ses bras. La seconde d'après c'était une sensation môle et brûlante qui la ramena à l'ordre. Du sable, des torrents de sable et une étendue d'eau à perte de vue. La demoiselle jeta un regard rond et raide sur ce qui l'entourait, puis d'un mouvement furtive elle se retourna et ne pouvait que constater le déluge. Une forêt que dis je, une jungle. Des fleurs, des arbres, des végétaux étranges et inconnus.. Tout laissait à croire qu'elle avait atterri sur ce qui semblait être une île. Manquerait plus que cela soit une île déserte et là c'était la cerise sur le gâteau. Son exaspération grimpait à petit feu jusqu'à ce que ses pommettes prônèrent une couleur plus vive. Elle s’esquinta la lèvre inférieure, remuant ciel et terre afin de remettre de l'ordre dans son esprit et surtout d'apporter une explication logique et rassurante à sa situation.
Son regard se tourna sur le côté et c'est là qu'elle l’aperçut. Et son regard était bien trop familier à son goût. Primus Milan. Milan hein.. un scenario aberrant traversa son esprit alors que ses sourcils se froncèrent légèrement. Elle lui fit face, s'avançant vers lui tout en relâchant quelques mots avec un semblant de contrariété.« Primus je vous préviens si il s'agit d'une plaisanterie sachez qu'elle est de très mauvais goût et me déplaît au plus au point ! Ramenez moi chez moi, tout de suite. J'ai des élèves qui m'attendent et si mon entreprise en découd je vous conseille de ne pas vous trouver dans mes parages pendant que ça arrivera. »
Dans le fond elle ne pensait pas réellement qu'il était la cause de cet imprévu. Mais il était là, et c'était le seul à qui elle pouvait remettre la faute. Même si elle l'appréciait, il n'en restait pas moins un Milan et l'on pouvait s'attendre à tout avec cette famille.
Premièrement, il n’en savait pas plus qu’elle. Si elle se permettait de lui parler de la sorte alors qu’ils avaient, les quelques fois qu’ils avaient parlé, toujours eu une relation cordiale et sympathique, c’était probablement du fait de la panique. Elle n’avait, tout comme lui, aucune idée du pourquoi ou du comment de leur présence en ce lieu. De même, elle ne savait probablement pas non plus où ils pouvaient se trouver. Ils étaient donc tous les deux au même point : arrivés ici par hasard, tout simplement. Deuxièmement, il n’avait pas envie de lui poser des questions parce qu’il n’aurait pas soupçonné qu’elle puisse se montrer aussi féroce et parce qu’elle parlait fort, trop fort. Ces deux éléments, séparés, n’étaient pas gênants en soi. Mais, une fois combiné, c’en était de trop pour Primus qui était aussi perdu qu’elle et qui ne concevait pas qu’elle puisse se comporter ainsi alors que lui arrivait aisément à se contenir et à rester digne. Quelle déception.
Alors qu’elle continuait de déblatérer comme s’il était l’incarnation même du Mal – et Lucy savait à quel point elle pouvait être dans le vrai sans même s’en douter –, Primus, lui, se contenta de rester impassible. Une fois qu’elle eut fini, il lui sourit largement et reprit d’une voix douce et calme, malgré le léger agacement qu’elle avait suscité en lui :
D’un côté, Primus Milan, héritier de la famille Milan, noble et ultra-riche, doué d’un pouvoir lui permettant de découvrir les intentions des gens en les touchant, raffiné au possible et n’ayant jamais pratiqué ce qu’on appelle le « bricolage ». De l’autre, Sphérany Ambroise, éleveuse de chevaux et accessoirement enseignante d’équitation – du moins, d’après ses sources –, tout aussi noble que lui et donc probablement pas apte au travail manuel du bricolage ou de la construction, ni apte à la récolte de fruits et légumes en sachant différencier lesquels étaient comestibles et lesquels ne l’étaient pas. Pouvoir inconnu, plus par manque d’intérêt envers celui-ci qu’autre chose. En résumé, deux êtres à l’opposé complet du genre de personnes qui auraient pu se débrouiller en ce lieu et survivre. S’ils étaient bien seuls en ce lieu, il ne donnait pas cher de leur peau…
Malgré le tempérament pour le peu explosif de la belle, le jeune homme semblait préférer adopter un ton plus calme et plus serein. Dans le fond ce n'était pas une si mauvaise chose, au moins ainsi il éviterait le pire. Si il avait préféré lui tenir tête cela n'aurait eu comme effet que d'accentuer sa colère et son exaspération. La tranquillité n'était pas à ignorée. Il arborait un large sourire, pointant le caractère volcanique de la belle avec une pointe d'étonnement. Ensuite il avança ses mains devant lui, déclarant n'être aucunement responsable de ce qui leur arrivait. Elle ne quittait pas son regard du sien, toisant le jeune homme de haut en bas avec un regard peu convaincu allant même jusqu'à examiner chacun de ses faits et gestes. Elle ne pouvait que se rendre à l'évidence : il était vraisemblablement aussi fourvoyé qu'elle.
Elle se redressa alors, relâchant un léger râlement avant de jeter un nouveau regard sur ce qui les entouraient. Rien n'avait changé depuis leurs échanges, en même temps c'était assez utopique que d'imaginer que la situation pourrait évoluer en si peu de temps. Ses mains se posèrent sur ses hanches tandis qu'elle tourna légèrement la tête sur le côté, déclarant alors d'un ton quelque peu détaché et contrariée.
« Naturellement. De toute évidence vous ne semblez pas y être pour quelque chose. En contre partie sachez que si un jour on m'informe du contraire... » Elle rabaissa alors la tête, posant un regard profond et foudroyant sur lui avant de marquer un léger temps. Cet échange de regard devrait en dire long sur le fond de sa pensée. Un soupire s'échappa d'entre ses lèvres alors qu'elle rabaissa légèrement sa garde, relâchant la pression qu'elle exerçait sur ses hanches avant de déclarer calmement.« Nous y sommes pas. Bien, je n'ai aucune idée d'où nous nous trouvons et visiblement vous aussi. Peut être devrions nous faire un tour des lieux afin de recueillir de nouvelles informations ? »
Bien sur cela sous entendait de ne pas trop s'éloigner. Spherany avait beau être une jeune femme intelligente, réfléchie et débrouillarde elle n'en restait pas moins affreusement lamentable lorsqu'il s'agissait d'orientation. Elle risquerait aisément de se perdre et ce n'était sûrement pas ce dont ils avaient besoin actuellement. Ils leur fraudaient soit se déplacer ensemble, soit établir un périmètre de sécurité avec lequel elle ne serait pas susceptible de se perdre. Son cerveau tournait à pleins régime afin de trouver des solutions plausibles et utiles qui leurs permettraient de revenir rapidement à leurs domiciles ou encore d'apporter de nouvelles idées sur ce lieu dont ils n'en connaissaient que la devanture.
Après quelques secondes, Primus interrogea la belle sur son état. Chose qui avait eu le don de légèrement la surprendre. Elle cligna lentement des yeux, posant un regard observateur sur son corps si frêle et si fragile.
« Et bien... » Ses bras se levèrent tandis qu'elle se mit à effectuer quelques fines rotations sur elle même. Mais aucune plaie apparentes ne semblaient entraver sa peau d'albâtre. En tout cas, rien qui ne puisse éveiller son attention. Elle reprit alors doucement.
« Non je n’aperçois rien d'alarmant. » Ses yeux se posèrent à nouveau sur lui alors qu'elle enchaîna de nouveau. « Et vous, tout va bien ? » Son inquiétude était curieusement sincère. Et bien que son attitude semblait plus calme et plus abordable elle n'en restait pas moins toujours aussi méfiante. Une part d'elle restait à l’afflux de toute suppositions. Elle n'avait que trop bien appris à toujours garder une part de méfiance sur ce qui s'interposait à elle. Sur la noblesse et les bassesses manipulatrices qui s'accrochaient fatalement à elle. Même la plus douce des rivières pouvait dissimuler le plus fulgurant barrage.
À peine avait-elle mit les pieds sur cette île qu'une chaleur étouffante prit place. Cela n'allait pas arranger leurs affaires. Il lui était même possible de ressentir toute l'aridité du sable qui s'engouffraient peu à peu dans ses chaussures, la forçant alors à s'en dévêtir. Si elle avait su, elle ce serait au moins accommodé d'un maillot de bain.. Ou pas.
« Cette chaleur est exaspérante... Moi qui devait me rafraîchir après ma leçon me voilà perdue au milieu de nul part sans aucune issues proposées. C'est bien la première fois que pareille chose m'arrive et ce n'est pas pour me plaire croyez moi. »
Loin d'elle l'idée d'une nouvelle fois porter le tort sur lui. Il lui fallait juste réaliser et peut être un peu râler. Il paraît que c'est bon pour la santé de râler, alors autant s'en accommoder. Elle rapporta sa main vers sa poitrine avant d'attraper le bout de tissu qui semblait déjà fortement s'y attacher du bout des doigts. Commençant à effectuer quelques ventilations dans l'espoir de pouvoir se temperer un minimum. Ou du moins, d'essayer. C'était presque inconvenant pour une dame de son rang et inhabituel de sa part, mais dans le fond elle n'en avait que peu à faire. Étant donné l'état de la situation elle pouvait bien se permettre de laisser la coutume et l'étiquette de côté. Au diable les idioties.
« Bien ! Je ne vais pas rester là à moisir au soleil. Avez vous une brillante idée à proposer ? »
Quémanda t-elle. Partie comme c'est partie, c'est presque si elle ne serait pas capable de se dévêtir pour aller se rafraîchir dans l'eau. Il faut dire qu'il n'y avait pas grand chose à faire, si ce n'est faire le tour des lieux... Mais encore faut il en avoir la motivation.
C'était évidemment plus facile à dire qu'à faire. S'enfuir, oui, mais quand et comment ? Ils ne savaient pas où ils étaient, donc partir de la supposée île, oui, mais dans quelle direction ? Iraient-ils dans le bon sens, ou à l'exact opposé ? Arriveraient-ils à trouver de la terre, ou mourraient-ils en mer ? Et même avant cela, arriveraient-ils à survivre à cet endroit ? Quels fruits étaient comestibles et lesquels ne l'étaient pas ? Où trouver de l'eau fraîche et potable ? Y avait-il des animaux sauvages et dangereux ? Des insectes potentiellement mortels ? D'autres personnes mal intentionnées ? Tomberaient-ils malades, auraient-ils une insolation, souffriraient-ils de la chaleur au point d'en tomber dans les pommes ? Tant de questions terriblement réalistes et proches d'eux, qui ne faisaient que noircir le tableau pourtant idyllique du cadre dans lequel ils avaient été transportés. Et il lui semblait qu'elle ne réalisait pas bien l'ampleur, la gravité de la situation.
Ce n'était pas pour lui plaire d'être dans pareille situation ? Logique. Personne n'aimerait être téléporté à l'autre bout du monde, dans un lieu totalement inconnu et dont chaque recoin pouvait être un danger potentiel. Cependant, comme elle l'avait si bien dit, la chaleur était abrutissante. Planté là à scruter l'horizon, il se sentait si peu motivé à se déplacer pour chercher des informations que son corps avait déjà envie de renoncer à l'escapade. Il aurait voulu s'allonger et attendre : soit la situation s'arrangerait d'elle-même en les téléportant à nouveau ; soit ils mourraient. Ces deux cas étant les plus probables pour lui comme il ne les voyait clairement pas réussir à survivre à l'endroit. Elle vint cependant bousculer toutes ces idées d'abandon qui lui trottaient dans la tête en lui demandant brusquement s'il avait une idée sur quoi faire. Il eut un léger déclic suite à sa demande. S'ils survivaient et qu'il avait abandonné dès le début, plus jamais le nom de Primus Milan ne serait respecté. Il devait faire de son mieux. Il retira sa veste, étouffé par celle-ci et la chaleur, se trouvant alors en chemisette légère, tout en continuant de regarder à l'horizon, à la recherche désespérée d'un quoi que ce soit qui pourrait les sauver mais qui n'était pas là.
Il s'examina à son tour, relevant l'indemnité de son corps apparent. C'était une bonne chose. Si ils avaient atterris sur une île dont ils n'en connaissaient que la devanture et où le tableau ne leur offrait qu'un sombre aperçu, ils pouvaient au moins se réjouir de n'avoir aucune plaie qui ralentiraient leur fuite. Leurs idées semblaient se rejoindre : explorer et trouver quelque chose ou quelqu'un qui ferait avancer leur situation. Sur le moment elle s'interrogea tout de même sur le fait de chercher de la nourriture. Peut être ne prenait elle pas la situation assez au sérieux ou du moins elle semblait favoriser l'idée que leur séjour serait de courte durée et qu'une explication se poserait sur leur énigmatique apparition. Qu'au bout d'un certain temps ils finiraient par retrouver leurs positions initiales et ne seraient donc pas dans l'obligation de rechercher de la nourriture. Car qui dit trouver de quoi se nourrir, dit envisager un séjour plus long et plus hargneux.. Non c'était impensable. Si le goût de l'aventure ne l'effrayait pas elle préférait tout de même la choisir et être maîtresse de cette dernière. Lui imposer un sort dont elle n'en avait aucunement l'envie ne rentrait pas dans ses désirs premiers.
Soudain et alors qu'elle était en pleine réflexions internes, Primus leva la voix violemment sur elle, lui hurlant de faire attention tout en affichant un regard qui aurait fait frémir n'importe qui.
« Atten..? HEIN QUOI?! » Son palpitant manqua alors un battement dans sa poitrine tandis qu'il s'élança en avant, lançant un galet derrière elle. Son regard suivi alors instinctivement la pierre avant de se tourner totalement sur l'objet de toute cette agitation. Une espèce de crabe non identifié et totalement étrangère à la demoiselle, d'une couleur fortement désagréable était sur le point de s'en approcher dangereusement. Heureusement pour elle, le jeune homme avait réagit en une fraction de seconde et avait fait fuir l'intrus aussi loin que possible. Ses pupilles rondes clignèrent légèrement alors que sa pression redescendit lentement à la vue de la chose lointaine. Un soupire de soulagement s'échappa d'entre ses lèvres scellées, tandis qu'elle fronça légèrement les sourcils avant de répliquer fermement et maladroitement, un léger tremblement dans la voix.
« DIANTRE. PAR LUCY. PRIMUS. NE CRIEZ PAS COMME CA. J'ai bien manqué la crise cardiaque, bon sang... » Elle prit un court moment, posant sa main sur son palpitant qu'elle sentait encore férocement battre. Ses pommettes prônèrent une teinte légèrement rougie. « Mais... Mmh. Merci. » Relâcha t-elle tout de même. Il ne fallait pas négliger sa prise de conscience et son courage vraisemblable. Elle n'osait imaginer ce que cette créature aurait pu lui faire. Il avait raison sur un point : ils ne connaissaient rien de cette île. La faune et la flore leurs étaient encore étranger et seule Lucy pouvait savoir ô combien le danger pouvait y régner. Faire preuve de vigilance et veiller l'un sur l'autre semblait être une très bonne idée. D'autant qu'ils ne pouvaient compter que sur eux même, bien que dans le fond Spherany jugeait toujours meilleur de compter que sur elle même pour survivre dans la vie de tout les jours.
Son palpitant prenait du mal à se calmer mais au fur et à mesure il devrait retrouver un rythme plus serein. Il faut dire qu'il y avait beaucoup de choses à accepter. Des milliers de suspicions et interrogations fractionnaient dans l'esprit réfléchi de la belle, des idées, comme des constats. Un moyen analogique et mathématique de relayer chaque informations entre elles afin d'élaborer le meilleur plan de leur situation. L'idée du jeune homme n'était pas mauvaise et au moins ainsi elle ne risquerait pas de se perdre à la merci de son manque d'orientation flagrante. Un soupire d'agacement s'échappa de ses lèvres. Son âme d'aventurière semblait loin, très loin même. Rien ne lui donnait envie sur cette île et ce n'est pas l'aridité foudroyante de cette dernière qui arrangeait la donne. Mais voilà qu'il parlait de confiance maintenant. Si il y avait bien un terrain des plus glissant pour la demoiselle c'était ce dernier. Bien qu'il n'ait commis aucune erreur jusqu'ici.. Dire qu'elle lui faisait confiance serait mentir. La confiance était un dur labeur pour elle, pour lequel il fallait se battre d'arrache-pied et dont chacune des parcelles seraient examinées minutieusement. On en avait que trop abusée et elle s'était jurée de ne plus jamais se laisser endoctriner et manipuler de la sorte. Alors la confiance, ce ne serait pas pour tout de suite.« Je vous avoue que cela ne m'enchante pas non plus. Et ... Dire que je vous fais confiance serait vous mentir. La confiance ne s’acquière pas aisément avec moi sachez le bien. Par ailleurs je suis d'accord pour faire l'effort de, et vous suivre pour cette fois. De toute évidence votre idée semble la plus judicieuse. »
Elle afficha un fin mais sincère sourire. Ce n'était pas spécialement contre lui car comme énumérez plus tôt il n'avait pour le moment commis aucune erreur envers la demoiselle. Mais son caractère réfléchi et méfiant veillait constamment sur elle et interagissait loyalement. Et puis il n'était pas question qu'il la rejette, dans le fond elle l'appréciait un minimum. D'autant qu'il semblait pouvoir lui offrir bien des avantages et elle n'était pas assez vaniteuse pour laisser cela lui passer sous le nez.
Elle releva alors ses cheveux avant de les attacher fermement en queue de cheval, tirant légèrement sur son haut pour mieux le placer et réajustant légèrement son short qui commençait à légèrement lui coller à la peau. Puis elle commença à entamer la marche autour de la jungle, avant de reposer son regard d'ambre sur lui un air légèrement malicieux sur les bords et un sourire séducteur élancé.
« Et par pitié Primus... Cessez de dire voyez vous à chaque fin de phrase. Cela vous vieillit énormément... Ne détruisons pas votre charme, voulez vous ? » Un léger ricanement s'échappant d'entre ses lèvres tandis qu'elle reprenait lentement sa marche, patientant qu'il la rejoigne à ses côtés. Dans le fond elle se montrait peut être arrogante sur les bords, mais c'était dans son caractère et même si il ne le voyait pas elle avait légèrement rabaissée sa garde. Offrant de nouvelles parts d'elle même, plus chaleureuses et attachantes. Lentement, mais surement.