Le Grand Port a repris vie après l’attaque terroriste qui a détruit des murs de défense qui semblaient imprenables, quand le malheur a frappé au cœur de nos rues et de notre quotidien. Les citoyens ont été choqués, parfois traumatisés mais il existe dans notre cité un lien collectif et une volonté de créer et d’avancer, qui redonnent du courage et l’envie d’agir. L’habitation concernée par les faits est encadrée par des barrières de sécurité, les commerces alentours touchés par le saccage de l’allée par l’enracinement de plantes dans le sol de leur devanture, ont fermé pendant quelques jours, puis ont rouvert leurs portes. Celle de la maisonnée ciblée reste close sans un mot. Les bruits envahissant du travail et des allers venues des passants prennent forme et du volume. Le silence étrange qui s’est imposé après la mort laisse place à la densité urbaine, qui s’exprime à nouveau avec ses joies et ses peines.

Cassandra est revenue sur les lieux du crime pour faire le point avec une équipe de choc composée d’enquêteurs. Lors de cette visite officielle, elle est le visage du gouvernement présent pour parler pour le Royaume. Il souhaite montrer sa préoccupation du sujet, ses recherches sans faille et sans fin pour débusquer le ou les criminels impliqués dans cette horreur sans nom. La présence de la ministre et son investigation étant requise par sceau Royal, elle représente l’intermédiaire chargé de découvrir la vérité et d’encourager les équipes de terrain à progresser, en s’assurant des moyens humains et matériels employés.

Marchant à l’intérieur du périmètre de la scène de l’attentat, c’est aussi intéressant de sortir de sa mission d’émissaire du gouvernement, pour faire preuve de curiosité. Son œil d’enquêtrice pourrait percevoir dans la foule de la ville ou dans l’environnement occupé précédemment par l’auteur un indice ou une subtilité non dite.

Entourée de gardes royaux et d’agents de sécurité pour cette occasion, d’un assistant Yves, de conseillers divers du cabinet, elle serre plusieurs mains d’affilée, quand elle les retrouve tous au point de rencontre. L’assemblée est pleine d’une vingtaine de personnes, sans compter les soldats qui font le tour de la place pour demander aux habitants de ne pas stationner dans les environs. Ils sont postés autour d’un certain périmètre de sécurité. Une pancarte de la place qui accueille habituellement d’autres annonces de la ville, du Royaume à destination des citoyens informés, renferme l’avis de recherche rédigé par Cassandra. Au-dessus du document, la couronne Royale étincelle de toute sa splendeur dorée, dans les premières lueurs du soleil.

La place du marché est presque déserte aujourd’hui car cela ne correspond pas aux jours d’installation dans la semaine des commerçants de fruits et légumes, de produits laitiers, de poules, de lapins, d’étoffes, de tapis, de bijoux ou de plats épicés. Seule la soupe du jour est encore distribuée par un cuisinier possédant une cargaison nomade, aux travailleurs alentours et aux passants qui souhaitent se réchauffer la panse. Une odeur de sel et de pomme de terre s’échappe des bols entre les mains des deux hommes qui repartent manger sur un banc d’une ruelle.

Le rassemblement de gardes, de soldats, de commissaires et de politiciens ne semblent pas perturber les gens qui s’en vont, intimidés peut-être par le corps d’individus importants bien armés. Parfois ils passent, s’arrêtent pour regarder les insignes et écouter une bribe de la conversation mais ils s’en vont, ne pouvant apercevoir la ministre ou un autre personnage, cachés au milieu de l’assemblée. En observant les habitations autour d’eux, Cassandra se demande pourquoi Klarion Brando s’est dirigé vers cette porte en particulier parmi tant d’autres. La vie d’une personne ne tient qu’à un fil, au choix fait par un individu perturbé qui a en lui tant de rage et de violence, qu’il souhaite abattre l’infortune sur le premier humain venu. Cela aurait pu être son voisin juste à côté, la trésorière Queen aurait pu tomber face à ses attaques, mais le hasard a guidé le malheur au pas de la porte d'un jeune homme qui a maltraité les plantes de son jardin.

Elle ne sait pas si la nature se présentait de cette manière avant son passage, mais elle remarque sur les pavés qu’un chemin d’herbes à pousser et relie les pas des visiteurs à la porte d’entrée de la victime. Le bois est recouvert de mauvaises herbes, et une bande d’avertissement signale sur la porte l’interdiction d’entrer. C’est ici que le terroriste a frappé pour libérer sa colère et tuer à tout prix. Les enquêteurs ont conclu lors des balbutiements de leurs recherches, quand ils ont étudié les lieux du crime, que cette victime contrairement à la conseillère royale Queen qui a réchappé à la mort, n’avait pas été ciblée. Dans l’air devant son ancienne habitation, on sent vagabonder une aura de magie sombre. Un climat étrange demeure figé dans le temps et il vaut mieux ne pas rester trop longtemps par ici.

Après avoir foulé les chemins du crime, la réunion de ces personnages importants se déplace et se poursuit dans la garnison de la Ville. C’est un château fortifié  protégé par deux tours gardées. Dans le grand hall du domaine, les portraits de la Royauté sont affichés. La longue troupe rentre dans la salle des grands rendez-vous, où sont organisés les préparatifs de guerre ou les interventions urgentes. Pour débuter les propos du commissaire principal chargé de l’affaire, une de ses collègues apporte son expertise. Des croquis très réalistes ont été dessinés pour représenter l’intérieur de la maison, sauvegarder des traces et des preuves précises du meurtre et du procédé utilisé par le criminel. Les images sont agrandies et sont projetées par une magicienne technicienne des instantanés de couleurs, qui intègre des dessins dans un diaporama équipé d’une lentille grossissante. Cassandra et ces autres messieurs dames découvrent le corps de la victime, à terre, la peau mangée par les lianes et la gorge étouffante. Klarion Brando a forcé l’hôte à boire le poison qui semblait destiné à la trésorière royale. Les dégâts causés par le liquide composé d’un maléfice mortel sont décrits dans les détails par la magicienne et analyste.

La demande de noble de la ministre de la Justice a pour objectif d’inciter d’autres corps de métiers à s’intéresser à cette enquête. D’autres témoins et civils peuvent partager leurs découvertes, leurs observations et écrire au commissaire. Des aventuriers, des chasseurs de prime  ou des espions se sont aussi portés volontaires, avec leur expérience et leur connaissance de certains quartiers du Royaume, pour mener leur propre enquête hors du champ de direction de la garde royale et des enquêteurs officiels. Rémunérés en conséquence, la situation étant exceptionnelle cela amène à des requêtes exceptionnelles, la couronne a souhaité faire appel à la ministre de la justice qui a émis un avis de recherche pour faire passer cette affaire en priorité dans le Temple de la Justice. Il faudra préparer l’endroit pour accueillir l’écoterroriste en supprimant toutes plantes et toutes fleurs de tout l’édifice.

Deux hommes ont particulièrement cheminé les rues de la ville pour rapporter leurs informations, et leur chef Zahria a transmis les conclusions importantes à la police d’Aryon. Les aventuriers Vrenn Indrani et Jin Hidoru ont trouvé des liens entre une précédente capture, une histoire de neveu dans la famille du commissaire Höls et la fuite de Klarion Brandon qui a mystérieusement disparu dans la nature, alors qu’il était détenu pieds et mains liés dans nos donjons et que les interrogatoires allaient commencer. Les enquêteurs prennent des notes et l’esprit de Cassandra part dans d’autres dimensions. Elle s’imagine que la garde a attrapé le fuyard et ce qu’il ferait de lui après cette échappée. Quelle sentence serait la plus appropriée pour protéger à jamais la population de cette vague de pensées écoterroristes qui se propagent, gonflent et submergent les affiliés du secteur les poussant à l’acte irréparable ?

Dans sa cellule attendant le courroux de la justice, les gardes devraient-ils prévoir un tapis d’orties, des roses piquantes sans fleurs sur les barreaux et des poils à gratter dans la tenue de prisonnier verte comme le chant d’espoir de la nature à l’agonie ? Il serait ensuite, après cette épisode de détention originale, provenant de la fine imagination de la garde des sceaux, envoyé dans le Nord au grand froid au-delà des portes du Royaume, car tout individu ne respectant pas les lois fondatrices de la citoyenneté, est éjecté des frontières établies.

De retour de cette réunion à la fois encourageante par le nombre de personnes impliquées, et décevante par le caractère imprévisible et invisible de l’homme recherché, Cassandra Heydell prend contact avec le prince Aeron Renmyrth par l’intermédiaire des conseillers royaux. Elle souhaite lui transmettre au plus vite les informations principales récoltées selon les derniers compte-rendus oraux, mais elle rédigera un autre nota bene pour donner davantage de précisions et consigner l’absence manifeste de données sur sa cachette qui reste secrète et enterrée par aveuglement général. Les enquêtes sans réponses ne peuvent apaiser les angoisses existentielles de la population et de la famille royale visée prioritairement. Le gouvernement pourrait-il être la prochaine proie de ce virus dévastateur ? Les rêves de Cassandra sont bien ternes et sans relief ces dernières nuits et aucun messager ne lui rend visite pour lui donner un indice de ce qui adviendra dans sa vie. Que se passe-t-il pour que cela soit autant le calme plat dans l’autre monde auquel elle est habituellement connectée à une certaine heure, les paupières closes ? Le monde sous-terrain la prévient-elle du piétinement de leur regard sur l’avenir ?