Marc-Antoine avait un comportement qui amusait beaucoup Yunaëlle. Il n'aimait pas sa famille, et du haut de ses quinze ans, un tel comportement pourraient choquer, mais notre protagoniste souriait. Elle l'avait entendu parler d'un plan. Elle ne savait pas ce que cela signifiait, mais le connaissant, elle se doutait que cela pouvait avoir un lien avec sa famille. Voulait-il les éliminer, ou quelque chose dans le genre ? Même si c'était cela, Yunaëlle se doutait qu'il ne passerait jamais à l'acte, alors elle jouait le jeu. Après tout, Yunaëlle, elle aimait beaucoup jouer.
« Ewh. J'aime pas les pauvres. » Murmura-t-elle.
Petite peste qu'elle était. Au-dessus des autres, elle se considérait. Pourtant, elle aimait bien les villages voisins. Ils étaient beaucoup plus paisibles que le palais, et parfois, elle avait besoin de sa dose de tranquillité. Aujourd'hui, ce n'était pas réellement le cas. Elle était accompagnée de Marc-Antoine, après tout.
« Allez, on se pose. J'ai mal aux pieds. » Affirma-t-elle en grognant. « Bon, bon, bon. C'était quoi, ton plan foireux, là ? »
Elle ricanait en tapotant l'épaule du blond. En réalité, elle voulait en savoir davantage sur ce qui se passait chez les de l'Épée, en ce moment. Mais s'y rendre simplement, c'était trop facile. Alors voilà, elle avait traîné le cadet avec elle près des villages, pour discuter. Elle en saurait plus sur ce qu'il souhaite réellement, et par la même occasion, elle pourra récolter des informations, hé hé.
« Ton cœur bat vite, Marc-Antoine. Ne me dis pas que tu manques d'entraînement, quand même. »
Ils n'avaient pas beaucoup marché. Une petite demie heure, tout au plus. Elle n'entendait pas d'autres battements, à proximité. Si ce n'était quelques oiseaux qui passaient par-là.
L’autoproclamé fils prodigue connaissait par ailleurs les talents de la jeune femme. Entendre les battements de cœur d’autrui … Un pouvoir faible en apparence mais qui pouvait revêtir une utilité certaine dans quelques cas de figure. Tout comme Shir, il était difficile de berner Yunaelle. Pour cause, le rythme cardiaque allait probablement trahir celui qui tâchait de cacher la vérité à la demoiselle. Marc-Antoine avait donc pris l’habitude de toujours mentir à cette curieuse interlocutrice. Car si Yuna pouvait discriminer un mensonge d’une vérité, elle était néanmoins incapable de connaître la nature du bobard. Était-ce un mensonge par omission ? Par ajout de faits superflus ? Toutes ces subtilités dépassaient le pouvoir de celle qu’il surnommait avec affection « l’ignoble garce ».
C’est donc en suivant sa logique bancale que Marc-Antoine répondit :
▬ J’ambitionne de faire virer l’actuelle capitaine de la garde, une certaine Loreleï. Elle, puis tous les autres. Ainsi je pourrais prendre leur place et devenir chef à la place du chef.
Il mentait. Marc-Antoine passait son temps à lui mentir, chose qu’elle avait dû remarquer depuis belle lurette. Yuna qui distinguait parfois le vrai du faux allait avoir fort à faire puisque, en la présence de Marc-Antoine, elle faisait face à un sacré client. Il lui fallait distinguer le faux du moins faux au « complètement faux ».
▬ Manquer d’entraînement moi ? Pour en manquer, encore faudrait-il que je daigne m’entraîner. Or on sait tous les deux que … Hein. Bon. Voilà. Tu m’as compris.
Le cadet des de l’Épée avait la fâcheuse tendance à sécher les séances du matin. Il lui arrivait même de sécher celles du midi … Et parfois même encore celles du soir. En bref, il s’évertuait à ne pas s’entraîner. Le jeune homme était partisan du moindre effort et avait fait de la glandouille un mode de vie.
▬ J’aimerais beaucoup que tu m’aides dans ma noble entreprise. Si tu es prête à réaliser moult tâches afin de mettre à mal la hiérarchie et ainsi promouvoir mon ascension, je te serais éternellement reconnaissant.
Biip. Encore un mensonge. Encore un. Décidemment, il ne s’arrêtait plus.
« Qu'il est mignon. » Souffla-t-elle en s'arrêtant pour tapoter la tête du blond, un geste qu'il ne devait pas supporter, mais cela ne préoccupait guerre la jeune femme.
Marc-Antoine avait cette fichue manie de mentir à Yunaëlle. Il mentait tout le temps, en fait. Mais la demoiselle le connaissait bien, maintenant. Lui, devenir chef ? À la limite, cela pourrait être crédible, enfin... Chef de la flemmardise et rien d'autre, mais Yuna épargna ce commentaire gratuit. Il n'oserait jamais démanteler la garde, de plus, il n'aurait aucune raison de vouloir devenir chef. Trop de responsabilités. Il le disait lui-même, il ne s’entraînait même pas.
« Ton frère doit être bien peu fier de toi, mon pauvre Marc-Antoine ! » Dit-elle en ricanant, avant de s'allonger au sol. « Ne t'en fais pas, je ne te demanderai pas de t'entraîner. Tu fais ce que tu veux, après tout. »
Ah. L'herbe était si agréable. Décidément, la jeune femme avait trouvé l'endroit parfait où se poser ! Le consentement de Marc-Antoine ne lui importait pas, elle avait réussi à l'amener ici, c'était le principal. Par contre, elle n'aimait pas perdre son temps, même si elle n'était pas pressée.
« Oh mais bien-sûr mon petit, je t'aiderai volontiers. À une seule condition ! » Elle se redressa pour esquisser un grand sourire à son camarade. « Dis-moi la vérité, allez, s'il-te-plaaaaaaît. Sinon je vais pleurer. Tu ne voudrais pas faire pleurer une dame, pas vrai ? »
Elle mimait alors une fausse moue triste, luttant pour ne pas échapper un rire. Elle n'avait jamais vraiment pris Marc-Antoine au sérieux, et c'était réciproque. Au moins, les deux agissaient de la même façon. Cela ne menait jamais à quelque chose de très concluant, d'ailleurs, mais Yunaëlle ne comptait pas lâcher le morceau pour autant. S'il refusait de parler, elle allait lui ordonner de marcher pendant une demie heure supplémentaire.
Et ça, ce serait sans doute suffisant pour le convaincre.
▬ Il l’est, pour sûr. Je suis le fer de lance de la famille de l’Épée après tout.
Pour la énième fois de la journée, Marc-Antoine mentit à son interlocutrice. Ce n’était un secret pour personne néanmoins le cadet des de l’Épée était assurément la risée du clan. En cent ans, on n’avait encore vu pareil énergumène. La faute n’était pas à imputer à ses parents ou ses précepteurs qui, durant de longues années, s’étaient évertués à offrir à Marc-Antoine la meilleure éducation possible. Non, le jeune blond faisait simplement parti de ces incorruptibles, ceux que l’on ne peut sauver malgré toute la bonne volonté du monde. De la bonne volonté, c’est précisément ce qu’il manquait à notre héros.
Le garçon à l’esprit perverti écouta les conditions de Yunaelle et un sourire narquois ne tarda pas à se dessiner sur son visage. « Faire pleurer une dame ? » songea-t-il. Pour lui, Yuna avait perdu le statut de femme depuis bien longtemps. Elle était au mieux une sorcière qu’il fallait brûler. En outre, son aide lui importait peu en vérité. Cette Loreleï n’intéressait pas l’interne qui avait cité son nom afin de dissimuler ses véritables intentions. En effet, Marc-Antoine se fichait pas mal de son pauvre petit poste de capitaine. Il aspirait à bien plus. Il voulait être l’héritier des de l’Épée. Il voulait succéder à son père, prendre la place de son frère et même celle du roi s’il le pouvait. Rien que ça.
▬ Très bien. Je vais te dire la vérité. Ou plutôt te la redire puisque je n’ai vraisemblablement pas été assez clair pour ton esprit diminué. Je veux du pouvoir, des responsabilités, des titres et tout ce qui amènera à ce que mon nom soit sanctifié. Je veux être le plus apprécié, je veux qu’on me baise les pieds et plus si affinité. JE VEUX ETRE GRANDIOSE.
Pour une fois, il lui avait dit la vérité. Certes, il avait omis les détails concernant sa façon de procéder néanmoins Marc-Antoine avait été le plus honnête possible.
▬ BON. Je mérite bien un truc pour t’avoir dit la vérité. Sauf qu’en fait, la capitaine de la garde m’intéresse pas. Genre PAS. DU. TOUT. Je disais ça au pif. En plus tu imagines, si on apprend que j’ai tenté de la faire virer. OLALA. J’ai tellement peur rien que d’y penser. A défaut de m’aider dans une quelconque entreprise de sabotage, je veux bien que tu me dises des vérités toi aussi ! DES TRUCS SUR MES FRERES ET SŒURS PAR EXEMPLE.
Il savait qu’elle avait la côte auprès de ses deux aînés et que Luna la haïssait pour cette raison. A ce titre et à bien d’autres, Marc-Antoine espérait lui tirer les vers du nez et obtenir des informations croustillantes. S’il n’était pas encore en mesure de tuer Nox ou Shir, il pouvait néanmoins s’arranger pour les mettre dans une mauvaise posture. Ou mieux, les faire s’entre-tuer – les deux ayant des vues sur l’ignoble garce.
Le fer de lance de- quoi. Ah, le roulement d'yeux était devenu une habitude en compagnie de Marc-Antoine. Yunaëlle n'arrivait jamais à croire un traître mot de ce qu'il bafouait. Cela en devenait ennuyant, à vrai dire. La jeune noble était bien courtoise, mais si le gamin continuait de faire à sa tête, elle allait perdre en gentillesse, et surtout en patience.
« Tu veux vraiment avoir des responsabilités ? »
Même si dans son timbre de voix et dans ses battements de coeur, le blondinet paraissait plus sincère qu'à son habitude, la demoiselle ne parvenait pas à le suivre. Marc-Antoine de l'Épée, le personnage le plus flemmard du royaume souhaitait devenir responsable de quelque chose ? Cela paraissait bien paradoxal, un peu trop pour la violette.
« Se faire baiser les pieds, c'est peut-être un fantasme très commun de ceux qui n'ont pas de reconnaissance mais crois-moi, en réalité, c'est répugnant. »
Elle ricanait. Si elle parlait pas expérience ? Allez savoir, elle aimait bien laisser planer le doute dans l'esprit de ses pairs. Un doute sur quelque chose de bien peu passionnant certes, mais quand même.
Le voilà qu'il voulait connaître des anecdotes croustillantes sur sa propre famille, maintenant. Comme si Yunaëlle était assez proche d'eux pour en savoir plus que le frérot. Luna la détestait, Shir l'évitait comme la peste, Perceval et Adeline étaient constamment occupés alors elle ne les croisait pratiquement jamais, et Noximilien... il n'y avait sans doute que très peu de choses cocasses à dire sur lui, il était adorable mais Yunaëlle n'en savait que très peu. Concernant Alberic, c'était sans doute le membre de la famille qu'elle connaissait le moins.
Qu'attendait-il d'elle ? Qu'elle fasse l'espionne improvisée de la famille de l'Épée ? Non clairement, il leur voulait du mal pour lui demander une telle chose. Réfléchissait-elle trop, encore une fois ? Sans doute, mais avec Marc-Antoine, tout était possible.
« Je crois que tu me surestimes, mon pauvre Marc-Antoine. Tu sais très bien que j'intimide la moitié de ta famille, si bien qu'ils n'osent même pas m'adresser la parole. »
Elle exagérait clairement. Ce n'était certainement pas de l'intimidation, mais cela l'amusait de le penser. Elle manquait de modestie, mademoiselle Aldrah.
« Enfin, je pense tout de même être plus proche d'eux que toi. Qu'est-ce que tu cherches à savoir, exactement ? Tout ceci me semble bien sournois. »
Un sourire se dessinait sur son visage. Yunaëlle ne savait pas si elle aimait la situation, elle qui était du genre très fourbe, ou si elle en était dégoûtée. Après tout, elle aimait bien les de l'Épée, et ce conflit d'intérêt semblait assez compliqué. Marc-Antoine était compliqué. Oui, cet énergumène avait sans doute atterri dans cette famille par erreur ; on lui avait teint les cheveux à la naissance et on l'avait échangé avec un diablotin des bois, sans doute.
Converser avec Yunaelle ne présentait pas grand intérêt. A dire vrai, cette jeune dame dans son entièreté ne présentait pas grand intérêt aux yeux de Marc-Antoine. Elle avait pour seuls talents sa beauté et son nom. Ces deux traits n’ayant pas été acquis à la suite d’un dur labeur, la jeune femme n’avait aucune gloire à tirer de ces deux uniques atouts. Le reste de sa personne était tout juste bon à donner aux cochons. A sa place, Marc-Antoine aurait prié Lucy chaque jour de sorte à la remercier. Car fort heureusement pour Yunaelle, la génétique et la chance avaient été de son côté.
▬ Assurément tu nous intimides tous, surtout Shir.
Le pauvre. A cet instant précis, Marc-Antoine éprouva – pour la première fois depuis longtemps – de la pitié à l’égard d’un être humain. Le pouvoir de Shir lui permettant de sonder les esprits d’autrui, le jeune noble avait dû découvrir à ses dépens le sens du mot « néant » en entrant dans la tête de la Aldrah. Le jeune interne médita de longues secondes et se demanda même comment son frère aîné était parvenu à retrouver ses esprits. Il n’est après tout jamais aisé de retrouver son chemin après avoir pénétré dans des eaux aussi sombres.
▬ Sournois ? Moi ? Voyons, je ne suis qu’amour et paix. Du reste … J’avoue être quelque peu déçu. Je suis pragmatique et logique de nature. Et bien que tu n’aies pas l’air de comprendre ces concepts, je vais m’efforcer de t’expliquer le processus de pensée que je développe malgré moi en ce moment-même.
Il inspira un long moment avant de reprendre, tout en pédanterie et en sournoiserie :
▬ Tu me demandes ce que je cherche à savoir, or je ne cherche rien, si ce n’est à te trouver une utilité. Contrairement à bon nombre de personnes sur ce continent, t’observer et écouter ta douce voix ne me suffisent pas. Et si tu me demandes ce que je cherche à savoir, c’est que tu n’as rien d’intéressant à me dire. A moins peut-être que tu attendes de moi que je te tire les vers du nez ? Si tel est le cas, sache que je n’en ai ni l’envie, ni la patience tant mon intérêt pour toi décroît à mesure que tu ouvres la bouche. Ainsi et pour simplifier, j’imagine que tu n’as rien d’intéressant à me dire. Or si tu n’as rien à me dire, tu ne m’amuses pas. Si tu ne m’amuses pas alors tu m’es aussi utile qu’un cheval estropié. Je vais donc cesser de t’écouter, de te parler et même de te regarder. En somme, tu peux considérer que JE BLOQUE tes paroles et tes actes de sorte à ce qu’ils ne souillent plus mes organes sensoriels.
Et sur ces mots, il tourna les talons tel un prince, le regard rempli de dédain. Il allait rentrer chez lui afin de s'adonner à de plus fructueuses activités.
[HRP : Je suis vraiment le pire trash. Désolé. Je t’aime bien quand même ! XD]
Écouter Marc-Antoine parler, c'était un peu comme lire un long texte de philosophie ancien. La première phrase t'interpelle, puis, plus les mots arrivent, plus ton esprit divague, et bam ; tu réalises que ton attention a été absorbé ailleurs. Autrement dit, Yunaëlle avait capté environs 25% de ce que le blond venait de lui raconter. Elle avait même lâché un petit bâillement sans subtilité.
« T'as fini ? » Dit-elle en s'essuyant les yeux, faisant mine de se réveiller.
Elle soupirait. Déception, disgrâce. Avoir amené monsieur de l'Épée ici n'avait donc servi à rien ? Pourquoi avait-elle penserait que cela aurait pu être fructueux ? N'empêche, même si c'était difficile pour elle de l'admettre, son égo venait d'en prendre un coup. Un coup assez violent, même. Yunaëlle n'aimait pas lorsqu'elle ne parvenait pas à obtenir ce qu'elle voulait.
« Très bien, je vois que tu es bel et bien un cas désespéré. Tu me déçois, Marc-Antoine. Je te pensais moins... toi. » Elle croisa les bras, ne sachant pas comment le catégorisé autrement. « Je crois que je perds mon temps. Mais sache que derrière tous tes petits mensonges, je sais que tu caches quelque chose. Je t'ai à l’œil, monsieur de l'Épée. »
Elle se releva. Son sourire s'était dissipé. Elle n'essayait plus de jouer la carte de la séductrice, ou même du sarcasme. Il était, définitivement, plus le seul à bloquer les paroles de son interlocutrice. Elle tourna les talons, levant la main et, avant de partir, elle esquissa tout de même un dernier sourire condescendant au jeune homme, en tournant légèrement la tête.
« Ta maison est à une demie heure à pieds, j'espère que tu n'as pas déjà dépensé toutes tes forces. À la prochaine ! »
Sur ses belles paroles, elle quitta les lieux. La prochaine fois qu'elle le croisera, cela risquait d'être intéressant... Ou alors pas du tout.
[HRP : Je t'aime aussi, un peu, parfois, quand il pleut les soirs de pleine lune. /PAN/ Bon je me suis dit que j'allais conclure, comme ça tu seras moins débordé et moi aussi, merci pour ce RP clash. 8D]
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