Adrian Isaac Teli’rh

Nom du pouvoir : Summone Spirituum Elementis

Catégorie : Divers – Appel d’esprits élémentaires


Adrian ne se préoccupe pas de son pouvoir. Il sait qu’il le découvrira tôt ou tard et cela ne le dérange pas d’attendre. Il aurait aimé pouvoir communiquer avec les chats, et puisque ce n’est pas le cas, il n’est pas pressé de savoir.
Summone : Invoquer (mais ici Appeler) / Spirituum : Esprits / Elementis : des Éléments.
Ces esprits sont des incarnations des éléments qu’ils représentent et qui habillent le Royaume d’Aryon. Adrian n'en a pas conscience, mais chaque esprit n'est en fait que l'incarnation de son pouvoir et n'a rien de naturel. Ils n'ont d'esprit que le nom que le jeune homme leur donne.
Ils peuvent se rendre tangible et possèdent de nombreux pouvoirs. Certains sont majeurs : le feu, le vent, l’eau, la terre, la lumière et l’obscurité ; quand d’autres sont mineurs : la foudre, la glace, la brume etc…
Pour se lier avec un esprit, Adrian doit d’abord le rencontrer. Nés des conditions les plus extrêmes liées à leurs éléments, les esprits ont chacun leur apparence et leur caractère propre ainsi que des lieux de prédilection. Lorsqu’il parvient à se lier à eux, Adrian peut ensuite les appeler et communiquer avec eux par la pensée. Chaque esprit lui apporte une capacité passive ou parfois, un pouvoir momentané lorsqu’il combat à ses côtés (jusqu’à 3 niveaux du lien).
Évidemment, chaque esprit est avantagé dans son milieu et quasiment inutile dans le milieu opposé.

Quelques aspects pratiques :
1) Le lien n'est pas systématique : Si Adrian peut voir et comprendre tous les esprits des éléments, il est pour l'heure loin de pouvoir se lier avec chacun d'eux. Ils ont chacun une volonté propre et si la force mentale / le pouvoir du jeune homme n'est pas suffisant, il ne parviendra pas à se lier à eux, au point d'avoir des hallucinations s'il essaye un peu trop. Cependant, l'entrainement et la maturité lui permettront petit à petit de se lier à chacun d'eux (on parle en terme de décennies tout de même).

2) L'appel n'est pas immédiat : il faut le temps pour Adrian de l'émettre et pour l'esprit d'y répondre (1 à 5 minutes environ). De plus, il faudra un pré requis (ça ne se fait pas comme ça) qui sera précisé pour chaque esprit.
Une fois que l'esprit a répondu à l'appel, il fait ce qu'il veut. Il peut décider de rester intangible et donc invisible pour quiconque sauf pour Adrian, comme de prendre sa forme animale et d'interagir avec le milieu (capacités suivies d'une astérisque dans la liste ci-dessous, non systématique), comme de faire une remarque et de déguerpir aussitôt. Adrian acquiert immédiatement la capacité de niveau 1 pour tout le temps que l'esprit reste à ses cotés; si l'esprit s'en va, la capacité aussi.
Adrian ne peut pas appeler le même esprit que deux fois par semaine. De plus, il est incapable de formuler un appel deux fois dans la même journée (24h de "rechargement" du pouvoir) et sera donc accompagné que d'un seul esprit à la fois.

Un esprit ne peut rester que 5h maximum avec Adrian. Mais, passé une heure, les pouvoirs qu'il accorde son diminué pour devenir proche de zéro. L'esprit prend alors la place d'un ami imaginaire, voire d'un simple animal de compagnie dont les capacités diminues avec le temps. Aussi, à part l'Eau, il est rare qu'un esprit reste plus d'une heure avec le jeune homme car il devient inutile.  
Exemple, si Adrian appelle un esprit pour X ou Y raisons mais qu'une heure plus tard, il se fait attaquer, il ne bénéficiera pas de sa capacité. Toute fois, l'esprit peut décider de prendre sa forme tangible et ainsi aider son compagnon.
Sous forme tangible, les esprits peuvent être blessés mais pas tués. Si la blessure est trop importante ils redeviennent intangibles et s'en vont se soigner dans leurs éléments respectifs. Dans ces cas là, ils ne peuvent pas être appelé pour au moins une semaine.


Pour rappel, Adrian n’a pas encore rencontré d'esprit. A noter qu’Adrian commencera avec chaque esprit au niveau 1 et qu’il faudra un grand nombre de RP pour permettre une évolution, sachant que le niveau 3, lorsqu’il existe, sera quasiment inatteignable (j’aime juste anticiper).
Chaque esprit additionnel du premier sera un objet/amélioration de pouvoir acheté dans la boutique. Le premier esprit qu'il rencontre est celui de l'eau.


Liste des Esprits Majeurs (apparence, caractère, pouvoir, malus, lieu de prédilection).
Cette liste a pour but d'expliquer le pouvoir, les esprits mineurs seront détaillés au cas par cas si besoin mais suivront généralement cette ligne de conduite.

- Le Feu (Image de Clockbirds DeviantArt) Furet rouge au poitrail étincelant. Il mesure 70 cm au garrot pour 3 mètres d’envergure (corps + queue). Espiègle, il n’en fait qu’à sa tête. Vorace, il dévore tout ce qui se trouve sur son passage, parfois même Tsuki le chat. Il permet à Adrian de résister au feu et est un combattant féroce* lorsqu’il daigne lever une griffe (niveau 1). Il crache des flammes lorsque nécessaire (niveau 2). Inutile en région humide, le furet ne viendra tout simplement pas. Il est né d’un volcan mais aime à se balader en forêt. Pour l'appeler, Adrian doit être en présence de flammes.
- Le Vent : (Image de Mythka DeviantArt) Phoenix blanc et vert de 3 mètres d’envergure. Il est fier et présomptueux. Il accorde de la vitesse et de l’agilité à Adrian et fait office de sentinelle* (niveau 1). En combat son cri strident est assourdissant (niveau 2) et il peut invoquer des tornades (niveau 3). Il vit dans les montagnes rocheuses, le plus haut possible. Pour l'appeler, il faudra à Adrian un courant d'air (lieux clos inaccessibles).
- L'eau : (Image de Mythka DeviantArt) Loutre noire aux moustaches bleues de la taille d'une petite panthère. Douce et loyale, elle est l’esprit dont Adrian est le plus proche. Elle lui permet de respirer sous l’eau et elle se laisse chevaucher* pour dévaler les rivières (niveau 1). Elle ne combat pas mais possède des dons de soin (niveau 2). Hors de l’eau, elle ne se sent pas à l’aise et ne montrera pas une moustache. Elle préfère les rivières mais se rince à l’eau de mer tous les mois. Pour l'appeler Adrian devra être en présence d'eau (non, la bière ne fonctionne pas).
- La Terre : (Image de Sakimichan DeviantArt) C’est un loup blanc aux reflets verts et possédant des bois de cerf. Il mesure 2 mètres de long pour 1m20 de hauteur au garrot. Il est pacifique dans la mesure du possible mais sait montrer les crocs. Il se refusera toujours à combattre un animal. Il augmente la force brute d’Adrian et combat* a ses cotés (niveau 1). Il peut transporter Adrian sur de longues distances (niveau 2) et manipuler les racines des arbres pour entraver les ennemis (niveau 3). Il fuit les habitations humaines comme la peste et leur préfère les régions les plus reculées où la nature règne. Pour l'appeler, Adrian doit tenir une feuille ou de la poussière dans ses mains.
- La lumière et l'obscurité : (Image de Chili Ferrets) Ils sont inséparables mais confèrent des capacités différentes. L’un ressemble à un agneau blanc avec un masque noir et l’autre à un loup noir avec un masque blanc. L’agneau est de lumière, le loup d’obscurité. Ils sont taquins et agissent comme un seul être. L’agneau permet à Adrian de voir dans le noir tandis que le loup lui permet de se fondre dans l’obscurité et de passer inaperçu (niveau 1). Un œil entrainé ne se laissera cependant pas duper. En combat, l’agneau aveugle les ennemis et le loup les attaque (niveau 2). Ils sont l’esprit le plus puissant auquel Adrian peut se lier car il n’a pas vraiment de lieu malus. De nuit, l’agneau sera affaibli mais le loup vigoureux et vice et versa.

Adrian est un jeune homme dans la moyenne. Il n’est pas le plus grand, ni le plus fort, ni le plus intelligent mais il est attachant.

Physique : Il mesure 1m80 pour 78kg. Ses cheveux sont châtains et il les porte mi-longs ; jusqu’à pouvoir se les attacher sur le dessus, ce qui est plus pratique à la forge. Son visage est doux mais se durcit lorsqu’il travaille le métal ou qu’il est concentré. Ses yeux verts s’assombrissent alors pour se perdre dans le travail. Ses mains sont pratiquement toujours recouvertes de suie et restent légèrement colorées même après les avoir passées à l’eau claire. Il s’est fait tatouer le bras droit l’année de ses 15 ans, requête de sa mère pour des raisons mystérieuses.
Adrian vient d’un milieu modeste et possède donc peu de vêtements dont il prend le plus grand soin. Ses habits ne le mettent aucunement en valeur malgré qu’il soit en bonne condition physique, il n’est pas de ceux qui se préoccupent de ce genre de détails. Généralement il porte un chemisier vert foncé un peu ample pour lui, ainsi qu’un pantalon marron qui lui tombe sur les chevilles ; Ses chaussures sont en cuir et ont été réparées plus de fois qu’il ne saurait compter. Il possède également un bracelet en lanière qui appartient à son père ainsi qu’un médaillon en argent qui lui vient de la famille de sa mère, seul objet de valeur en sa possession.

Mental : Adrian est un jeune homme très humble et terre à terre. Il est serviable et attentionné mais également particulièrement maladroit, tant sur ses propos que sur ses gestes. Respectueux de ses ainés, il n’est pas plus dédaigneux avec les jeunes. Il apprécie d’ailleurs particulièrement la compagnie des uns comme des autres, mais à plus de mal à se lier d’amitié avec les jeunes de son âge. Il voue une admiration sans faille à ses parents à qui il doit son humilité.
Adrian connait sa place au sein de l’ordre établit. Il n’est pas belliqueux et évite les conflits au maximum. Quand ils sont inévitables, il fait preuve d’une force brute remarquable, préférant ses poings à de quelconques lames. Comble pour un forgeron, qui lui vient surtout d’un manque de connaissance dans l’art du combat. Mais il se soigne depuis son entrée dans la Garde.
Coté valeur, le jeune homme est donc plutôt quelqu’un de pacifiste. Il a un sens de la justice très prononcé et qui lui tient à cœur. A ce jour, c’est une des seules raisons valables pour le faire sortir de sa zone de confort.
Niveau compétences, Adrian ne sait pas lire et ne compte plus ou moins que jusqu’à 20. Il est cependant minutieux et demeure très créatif. Souvent la tête dans les nuages, il passe son temps libre à les observer lorsqu’il n’est pas à la forge. Il aime la tranquillité qu’apporte la nature et prend le temps de l’écouter et de la respecter depuis son plus jeune âge.

Le nom qu'il a choisi de porter "Teli'rh" est celui de son Maître Forgeron. Il l'adoptera avec la bénédiction de ses parents pour permettre à l'homme sans enfant de faire vivre son nom.  

Le soleil se lève timidement sur le Royaume d’Aryon ; il se cache derrière les montagnes, craignant de déranger puis, soudain dans un éclair rougeoyant, déclare sa présence. Ses rayons percent alors les nuages et s’en vont caresser la Terre pour la sortir de son sommeil : la journée peut commencer.
Dans les grandes villes, la vie déborde vite d’énergie et une fois lancée, devient rapidement bruyante : les charrettes s’élancent et font tousser les passants ; les chiens aboient et chassent le chat, tandis que les commerçants ouvrent leurs échoppent. Tant de sons qui se rencontrent et s’entrechoquent jusqu’à créer une cacophonie instrumentale. Le bourdonnement s’élève et ne disparaitra qu’à la nuit tombée.
Au loin dans les contrées, la vie sait se montrer plus douce. Les animaux sortent de leurs tanières sans bruit ou presque : là un lapin, là-bas un mulot ; Tous s’en vont tambourinant le sol à la recherche de nourriture. Seul le ruisseau qui s’écoule paisiblement semble accompagner cette mélodie feutrée par ses notes cristallines. Dans les bourgades de paysans, le travail a commencé bien avant l’aube. Pourtant l’humain n’émet pas plus de bruit que le bruissement d’un vol d’oiseau. Le sifflement de la faux sur les blés n’est alors que le métronome d’une nature encore assoupie.

C’est dans ce tableau paisible qu’à grandit Adrian. Le village de sa famille était planté en pleine campagne, sans rien autour si ce n’est des champs à perte de vue. Presque aussi loin de la Capitale qu’elle l’était du Village Perché, la bourgade ne comptait que quelques habitations dont la plupart étaient vides. On y trouvait une quinzaine de familles de paysans, tous cultivant la terre ou élevant des bêtes. Parfois, une nouvelle famille s’installait, pour diverses raisons ; Mais souvent, elle finissait par migrer au village voisin, à cinq kilomètres de là. Juché à cheval sur l’une des branches du Grand Fleuve, les Hommes là-bas avaient développé commerces et prospérité : de quoi séduire les citadins égarés.
Néanmoins, il régnait une bonne entente entre les deux bourgs : l’un produisait les richesses tandis que l’autre les transformait.

Monsieur et Madame Dalgaard avaient décidé de s’enfoncer dans les terres bien avant la naissance de leurs enfants. Ils n’avaient rien quand ils étaient arrivés et se réjouissaient désormais d’avoir « tout ce dont ils avaient toujours rêvé ». A savoir quelques champs, trois poules, une vache, un bourricot et des enfants en bonne santé. Ils faisaient partie de ceux qui étaient resté, et formaient avec les autres familles, une petite communauté heureuse et solidaire. A eux tous, et aidé par la myriade d’enfants, ils avaient réussi à créer un petit village animé et sans histoire perdu au fond des terres.
Adrian n’était pas l’ainé de la famille, mais il en était le premier fils. Fierté de son père, il fut très jeune habitué à la besogne de paysan et il se mit très vite en tête de devoir participer aux revenus familiaux. Quand ses frères et sœurs se contentaient d’accomplir les corvées quotidiennes avant de s’en retourner à leurs jeux, lui essayait de se rendre toujours plus utile bien que sa maladresse soit parfois contre-productive. Si bien qu’un jour, quelques temps avant ses 10 ans, il émit l’idée de devenir apprentis boulanger pour ainsi apprendre à transformer le blé que ses parents produisaient. Accueillant cette idée avec un sourire, les parents de l’enfant réalisèrent vite qu’il serait difficile de dissuader leur fils de son plan. Ainsi, lorsque son père s’en alla pour le village voisin avec les quelques sacs de grains qu’il lui fallait vendre sur les épaules et la liste des courses à collecter en tête, il emmena son fils avec lui. Sur place, ils se rendirent immédiatement chez le boulanger. C’était un homme généreux qui était proche de ses pains et qui chérissait l’art de la boulangerie. Il accepta rapidement de prendre le garçon sous son aile et l’envoya travailler dans la foulée, intimant au père de s’en aller à ses achats. Du point de vue d’Adrian, ce jour resta mémorable.

11 ans plus tôt.

Comme souvent, Adrian avait mal dormi cette nuit-là. Les bougies étant précieuses, sa mère refusait d’en laisser brûler lorsque la maisonnée dormait. « On ne va pas laisser brûler l’argent voyons » Avait-elle expliqué à l’enfant en lui caressant la joue. *Non, on ne va pas brûler l’argent* s’était-il répété dans sa tête avant de regagner sa couche. Dans la chambre qu’il partageait avec sa fratrie, il avait le lit le plus proche de la fenêtre, le plus proche de la lune. Mais ce soir-là il avait beau l’avoir priée, elle n’avait pas montré l’ombre d’un croissant et laissait donc à la nuit l’hégémonie de cet instant. Dense et froide, cette nuit semblait envahissante, oppressante, étouffante pour le petit garçon. Au fond de son lit il ne savait plus où elle commençait et où elle se terminait.
Soudain pourtant, une lueur vint le sortir de sa torpeur. Juste là en face, la petite flamme d’une bougie naissante semblait ne danser que pour lui. Il se souvint alors que c’était la saison des mises bas et chez les Sanley, leurs voisins, c’était le branle-bas de combat. Durant cette période, la famille laissait toujours une ou deux bougies dans leur étable, au cas où le père ne doive descendre en catimini s’occuper d’une de ses vaches. Tourné sur le côté, Adrian pris cette bougie comme compagne et doucement, se laissa aller à la nuit. Louées soient les vaches.

Le matin de leur départ, Adrian avait passé une heure complète à préparer ses affaires. *Une première impression, doit être une bonne impression* se disait-il tout en nettoyant ses chaussures, pour la troisième fois. Inconsciemment, le petit garçon essayait de contenir l’appréhension qui l’habitait. Il avait beau prétendre à ses parents qu’il était prêt, du haut de ses 10 ans, le petit garçon restait terrifié comme tout petit garçon pouvait l’être. Il n’avait jamais été le plus courageux, ça il le savait, mais il avait tout le trajet pour se préparer.
Au début, ce fut le village qui lui donna des sueurs froides. Il était encore tôt et pourtant, le monde fourmillait sans jamais s’arrêter. C’était la première fois qu’il venait. Depuis son mètre vingt, il se sentait minuscule et chaque nouveau passant semblait toujours plus immense. Aussi, lorsqu’ils arrivèrent son père et lui à la boulangerie, il sut immédiatement qu’il n’y arriverait pas. Le magasin lui donna des maux de ventres. Là, amassés en un semblant de ligne, les adultes se pressaient pour récolter la fournée qui venait de sortir. « Il me faut deux pains ! » disait-on par là ; « Moi j’en veux quatre » rétorquait-on de l’autre côté ; « Où est ma monnaie, il manque deux pièces » s’inquiétait-on alors. Tout le monde criait. Plus personne ne s’écoutait.

Accroché au pantalon de son père, Adrian n’attendait que le moment où cela s’arrêterait. Ainsi, il ne prêta pas attention lorsque le boulanger vint à leur rencontre, poussant les badauds sur son passage. Ni aux mots qu’il échangea avec son père, ni à la remarque qu’il lui fit. Comme porté, il réalisa juste qu’il se retrouvait soudain au calme. Son père avait disparu, la foule aussi.
La pièce dans laquelle il se trouvait désormais était particulièrement chaude. Cinq fours à pains brulaient à tour de rôle, sans cesse, pour que la production contente les clients. L’air ne circulait pas. Dans un coin, plusieurs établis attendaient qu’on y pétrisse la pâte et dans le fond, une porte en bois était entr’ouverte.
Cette porte menait dehors, et à quelques pas de là, les pales d’un moulin tournaient à vive allure. « C’est pour moudre les grains de ton père » entendit-il vaguement. Mais il n’écoutait pas, il était trop hypnotisé par le tourbillonnement des pales qui semblait s’accélérer. *Une.. Deux.. Quatre..* Essayait-il de compter dans sa tête. * Non, trois…* Mais les pales se mélangeaient et très vite, lui donnèrent le vertige.
Le reste de la matinée s’écoula difficilement. A chaque tâche demandée, Adrian s’essayait, en vain. Maladroit de nature, il l’était particulièrement ce jour-là.

Y repenser peut parfois le faire rougir aujourd’hui, tant il enchaina les âneries.

Avant même que le soleil n’ait atteint son apogée, Adrian était recouvert de farine. Le boulanger lui expliqua alors qu’il n’était tout simplement pas encore prêt et qu’il lui fallait encore une année ou deux avant de pouvoir être un bon apprenti. « Je te prendrai à ce moment-là, ne t’en fais pas mon garçon ».

Il rendit son tablier et quitta la boutique, penaud.

Il n’était pas rentré immédiatement après cet incident. Sa conscience lui rappela plusieurs fois que ses parents n’approuvaient pas qu’il resta dehors tout seul. Mais il ne trouvait pas la force : il avait honte. Il avait honte de son échec et peur de décevoir. Aussi il s’éloigna à bonne distance de la boulangerie et s’assit contre un mur. D’abord, il prit le temps d’épousseter ses chaussures qui étaient blanches comme neige ; puis il fit de même avec son chemisier, et ses cheveux. Il avait de la farine partout.
Tandis qu’il s’affairait, il sentit quelque chose qui lui chatouillait le haut du crâne. Surpris, il se leva d’un bond pour se retrouver nez-à-nez avec une paire de moustaches blanches. Au milieu du mur, un chaton avait profité d’un trou pour passer sa tête et, à en juger par la couleur de son museau, lécher la farine à même son cuir chevelu. L’animal était roux, noir et blanc et avait le regard rieur, du moins, selon Adrian. Amusé, le petit garçon tendit immédiatement la main vers le chapardeur et fut déçu de le voir rebrousser chemin pour s’enfoncer dans le mur d’où il était sorti. Sans réfléchir, le garçon fit alors le tour de la bâtisse et, inconscient, s’enfonça dedans dès qu’il en trouva l’entrée.
C’était également un endroit particulièrement chaud. Mais, contrairement à la boulangerie, on y entendait aucun bruit, et il y faisait particulièrement sombre. Tétanisé, par ce noir étouffant, l’enfant s’arrêta net et laissa le temps à ses yeux de s’accommoder. Dans le fond, des braises encore chaudes rougeoyaient en crépitant, baignant l’ensemble de la pièce dans un halo orangé ; quelques fenêtres obstruées de planches laissaient également filtrer la lumière par étroits rayons, ce qui donnait à l’ensemble un air mystérieux. Intrigué, Adrian oublia un instant le chat et prit le temps d’observer les lieux. Il y avait des tonneaux d’eau, ou en tout cas, d’un liquide sans odeur, des plaques de fer entreposées çà et là, des outils qui ressemblaient à des instruments de torture et enfin, une quantité astronomique d’épées et armes en tout genre. Par réflexe, Adrian recula d’un pas, comme prêt à s’enfuir. Puis du coin de l’œil, il repéra le chaton qui l’observait depuis une pile de tissus l’air malicieux et son inquiétude le quitta. Du moins, jusqu’à ce qu’une voix rauque et sourde le surprenne dans son dos.

« Que fais-tu là, gamin ? »

Immobile, le garçon se refusa d’abord à bouger. De là où il était, il n’avait aucune échappatoire. Il entendait déjà les échos de toutes les histoires sordides que certains enfants plus âgés lui avaient raconté pour lui faire peur. Et tandis qu’il se montait la tête, une main puissante lui attrapa l’épaule pour le faire se retourner. Accablé par le stress et l’ensemble de la matinée qu’il venait de subir, Adrian fondu en larmes avant même de se retrouver face à son interlocuteur. Ce dernier n’avait pas l’habitude des enfants, ni de la compagnie en général. Aussi, lorsqu’il découvrit ce petit bout d’homme couvert de farine, de larmes et de morve, il se trouva confus. Son premier réflexe fut de tendre un carré de tissus au petit garçon puis, naturellement lui mit le chaton dans les bras. Il n’en fallut pas plus à Adrian pour commencer à se calmer. Interloqué il leva les yeux vers l’inconnu.
C’était un grand homme. Il était plus vieux que ses parents, avait les mains abimées et les traits tirés. Ses cheveux noirs et hirsutes tombaient sur ses épaules et continuaient en une barbe où quelques poils blancs se faisaient remarquer. Mais malgré cet air rustre, de la douceur se dégageait de son regard. Adrian n’avait jamais vu pareil personnage.

Ils discutèrent tous deux un moment. L’homme s’appelait Samuel et il était forgeron. Il vivait seul. Lorsqu’il avait entendu l’histoire du garçon, il lui avait proposé de s’essayer à son métier dès le lendemain. « Je te laisse deux années » lui avait-il dit « Si dans deux ans tu préfères retourner à la boulangerie, je ne te retiendrai pas ».
Ravi de cette proposition, le garçon avait alors repris le chemin de son village, un chaton dans les bras et beaucoup de nouveaux rêves en tête. Dans son dos, le soleil entamait sa course descendante.

Il avait été difficile de convaincre ses parents. Forgeron, ce n’était pas un métier facile pour un petit garçon. Mais finalement, après plusieurs heures de débat, l’enfant avait eu gain de cause.

C’est ainsi que quelques années d’apprentissage plus tard, Adrian était devenu forgeron. En grandissant, le garçon était devenu un jeune homme droit et loyal, mais dont le visage impassible cachait un manque d'assurance et un grand nombre de peurs irrationnelles. Samuel, lui, avait prit du bagou et du blanc à sa barbe. Tous deux formaient une équipe incongrue qui travaillait le fer comme jamais. Parfois, ils se rendaient en charrette jusqu’à la capitale, où ils écoulaient les stocks d’armes qu’ils avaient fabriqué l’année durant.

L’année de ses 20 ans, Adrian ne le savait pas, mais il effectua son dernier périple en compagnie de son maitre et ami.

1 an plus tôt

La journée avait pourtant débuté d’une manière particulièrement banale. Les deux compagnons de routes s’étaient arrêtés à quelques kilomètres de la ville la veille au soir, et il ne leur restait donc que quelques efforts à fournir avant d’arriver à destination. En grandissant, Adrian avait appris à contrôler sa peur de la foule. Pourtant, il ressentait toujours un léger pincement au cœur lorsqu’il pénétrait l’enceinte de la grande ville. Samuel l’avait remarqué très tôt et il avait depuis longtemps inventé une raison d’utiliser les portes au Nord de la ville. Ainsi, le trajet jusqu’au Grand Marché s’écoulait majoritairement loin de la populace. C’est là qu’ils faisaient la majorité de leurs ventes : le forgeron s’était constitué une clientèle fidèle avec les années.
Le duo avait pour habitudes de rester quatre jours à la capitale : deux jours de marché et de négociations, un jour de repos et un jour où ils se rendaient à la caserne pour vendre à bas prix ce qui leur restait sur les bras. Il était hors de question de ramener des marchandises au village. En général, Adrian restait en retrait et se contentait de retravailler certaines pièces au gout des clients tandis que Samuel jouait au commercial.  
Cette année-là, ils n’avaient pas le temps de rester les quatre jours habituels : des affaires importantes attendaient Samuel au village. Aussi, ils avaient déjà séparé leurs biens en deux : les ventes au marché sur la charrette et celles à la caserne sur les flancs du petit âne de la famille Dalgaard. Heureusement, l’expérience leur permettait désormais d’anticiper suffisamment et donc d’écourter leur séjour. Chacun était donc libre de s’occuper de ses propres affaires et tous deux avaient une taverne précise comme lieu de rendez-vous pour faire le point le soir-même. Il était convenu qu’ils décideraient ensemble s’ils repartaient immédiatement ou s’ils restaient un jour de plus. Samuel, confiant et habitué aux sournoiseries de ses clients, prit donc le chemin du Grand Marché tandis qu’Adrian, lui, se dirigea à la Carserne, où il était attendu.

C’était un Instructeur d’une cinquantaine d’années qui s’occupait des armes de l’Académie et qui chaque année, faisait affaire avec les deux forgerons. Malgré son côté asocial, Samuel avait su créer une sorte d’amitié avec l’homme au fil des années. Ce n’était pas le cas d’Adrian. Le jeune homme était passé maître dans l’art de s’effacer des conversations et de se faire le moins bruyant possible. Aussi fut-il surpris lorsque le Garde le héla depuis le milieu de la rue.

« Adrian ! Te voilà, j’ai bien cru qu’il vous était arrivé quelque-chose, j’étais prêt à demander un escadron ! » S’exclama-t-il en souriant.

Pour toute réponse, le forgeron bredouilla que la route avait été bonne puis, rapidement, s’empressa de décharger l’animal de sa marchandise.

« Eh pas si vite l’ami » Le stoppa le garde. « Nous serons plus à l’aise dans la caserne voyons ! Suis-moi ». Et sans attendre, l’homme fit volte-face et se dirigea vers l’intérieur de la caserne à vive allure.

Soupirant, Adrian lui emboita le pas en trainant la patte. Il n’avait jamais pénétré l’intérieur de la caserne. La porte qu’ils avaient empruntée donnait directement sur la cour d’entrainement où çà et là, gardes, recrues et instructeurs s’affairaient déjà. Ébahit, le jeune homme marqua un temps d’arrêt pour observer un combat entre deux jeunes recrues. Ils devaient avoir cinq ou six ans de moins que lui et se battaient déjà comme de vrais gardes à part entière.

« Ce sont nos dernières années, ils passent l’examen dans quelques semaines » lui expliqua l’instructeur qui l’avait rejoint. « Les armes que tu fabriques, tu sais les manier ? » lui demanda-t-il soudain.

« Euh... Non M’sieur, pas vraiment » Adrian ne quittait pas les deux jeunes recrues des yeux. Leur posture, leurs mouvements, le tintement des lames qui se rencontraient… Tout dans ce spectacle l’enthousiasmait sans qu’il ne sache expliquer pourquoi.

« Ça ne t’intéresse pas ? »

« Je sais pas M’sieur »

Sortant de sa rêverie, le forgeron se racla la gorge pour se donner un peu de contenance et, sans quitter les deux danseurs du regard, demanda à l’instructeur où il voulait qu’il dépose les armes. Il avait quelques courses à faire avant de rejoindre la taverne, il ne pouvait pas s’éterniser.
Mais alors qu’il s’apprêtait à décharger les armes de son bourricot, quelqu’un le devança. Une des recrues, prenant ses aises, s’était servi dans le panier et observait une épée courte, l’air critique.

« Vous appelez ça des armes, vraiment ? » demanda-t-il en levant un sourcil. « Je ne vois que des bouts de ferrailles. Et bien trop émoussés qui plus est » ajouta-t-il.

Adrian avait l’habitude qu’on le tourmente et tout en restant impassible, récupéra son travail des mains de la canaille. Il lui expliqua ensuite qu’il était plus sûr de voyager avec des lames émoussées, en cas d’attaque ou de vol puis se retourna vers l’instructeur. Ce dernier renvoya le mal élevé d’où il venait et s’excusa auprès du forgeron qui haussa les épaules pour toute réponse.

« Je vais peut-être t’étonner mon garçon, mais, nous faisons passer une session pour les externes qui souhaiteraient entrer à la Garde demain, souhaiterais-tu essayer ? » S’enquit soudain l’instructeur.
« J’en ai déjà discuté avec Samuel, il pense que tu as ta place parmi nous et je suis prêt à faire en sorte que tu aies ta chance. Qu’en dis-tu ? » Poursuivit-il insistant.

Adrian resta bouche bée face à une telle proposition. Son Maître ne lui avait jamais parlé d’un tel plan de carrière et lui-même ne l’avait jamais envisagé.

« Écoutes si tu es intéressé, viens demain à la première heure ici même et je te ferai passer l’examen avec les autres »

Et c’est ainsi que, après en avoir discuté avec son Maître le soir-même, Adrian prit son courage à deux mains et se présenta le lendemain devant la caserne.

Personne ne vous dira que la démonstration du jeune homme fut exceptionnel ce jour-là. Premièrement parce qu’il ne se passa rien de remarquablement anormal et que probablement personne ne s’en souvient ; Secondairement parce que pour sa part, le forgeron ne démontra absolument rien d’exceptionnel. Sur le plan physique, Adrian possédait des qualités certaines, certes : campé sur ses pieds, il était pratiquement inébranlable. Non pas qu’il posséda une carrure anormale, mais il compensait son manque d’agilité par une certaine solidité dans ses appuis et une force brute conséquente. Mais sur le plan technique, il péchait beaucoup plus. Pourtant, il connaissait les armes, c’était indéniable. Il n’avait jamais reçu de leçon de maniement mais il savait où se plaçait l’équilibre d’une lame courte comme d’un marteau à deux mains et se servait de ce savoir à son avantage. Malgré ce, à la fin de la journée il n’avait pas remporté l’ombre d’un combat. Adversaire après adversaire, le paysan finissait toujours par perdre la main. Toutefois, le jury ne le sanctionna pas pour autant : aux vues de son manque de connaissance face à des concurrents plus expérimentés, une victoire était inespérée. On remarqua cependant sa persévérance : quand beaucoup auraient déclaré forfait après tant d’échecs, lui parvint jusqu’aux épreuves psychologiques.
Cette dernière étape se tenait volontairement en fin de journée pour permettre aux examinateurs de pousser les recrues dans leurs retranchements. C’est là qu’Adrian marqua le plus de points. Il n’était pas le plus courageux, certes, ni le plus intelligent ou le plus sûr de lui ; mais on remarqua chez lui un calme à tout épreuve ainsi qu’un pragmatisme et une maturité très appréciés. Lors du questionnement final, la question de son pouvoir fut éludée puisqu’il ne l’avait pas encore découvert.

Et c’est ainsi qu’à vingt ans, Adrian fit son entrée dans la Garde civile. Cela fait maintenant six mois qu'il a rejoint la caserne de la capitale et depuis son recrutement, son maniement des armes s'est nettement amélioré. Il continue de forger sur son temps libre, et rencontre Samuel chaque année, lors de sa visite commerciale.