Vous avez décidez de vous rendre au temple de Lucy. (A vous de dire pourquoi)
Arrivées là-bas, vous cherchez la salle principale pour pouvoir faire une offrande. Vous rentrez donc dans le temple.
5 minutes de marche...puis 10...15...
Au bout d'une vingtaine de minutes, vous vous posez des questions. Depuis quand faut-il marcher aussi longtemps pour pouvoir faire un cadeau à Lucy ? Vous essayez de faire demi tour, mais impossible de trouver la sortie.
Vous voilà prises au piège dans le labyrinthe de Lucy.
Pour atteindre le temple, la jeune femme se joignit à un groupe de cinq aventuriers qui souhaitaient se rendre à la capitale. La traversée de la sylve luxuriante qui enserrait le village perché n’était pas exempt de périls. Toujours aux aguets, les voyageurs privilégièrent prudence et rapidité tout au long de leur avancée. Néanmoins, leurs pas les menèrent face à un Dafresk à la rage sourde, réveillé par erreur. Vifs, les attaquants avaient assailli l’animal, tandis que les archers l’arrosaient d’une pluie de flèches. Le groupe aguerri sortit vainqueur de l’affrontement, bien que marqué par quelques morsures. L’animal gravement blessé au flanc s’était enfui, ce qui désola Aelith. Elle ne doutait pas que sa fourrure insolite aurait trouvé des acheteurs.
Une fois les berges du Grand Fleuve atteintes, le périple s’adoucit. La jeune femme profita du trajet pour récolter quelques plantes qui ne poussaient pas aux abords du Village Perché. Elle ne connaissait pas leurs effets exacts mais se promit de se renseigner une fois en ville. Longeant le cours d’eau, les aventuriers atteignirent sans embûches les fortifications de la capitale. La blonde y rejoignit Dahlia, qu’elle avait prévenu quelques jours plus tôt de son arrivée imminente. Les vieilles amies échangèrent joyeusement autour d’un verre de rhum dans une auberge chatoyante, narrant leurs dernières épopées. Découvrant que chacune avait des affaires à régler au Grand Temple, elles décidèrent de faire route ensemble. Aelith se réjouissait à l'idée de passer quelques jours avec la garde, moins rustre que la plupart de ses compagnons d'armes.
« Le Grand Temple, hmm... Ça me dirait bien d'y retourner, pour prendre de leurs nouvelles, depuis cette sombre affaire de nécromancie, à la Crypte. Et puis, je pourrais en profiter pour y faire des offrandes à Lucy, afin qu'elle m'aide à accélérer ma montée en grade. »
Dès le lendemain, Dahlia avait donc empli son grand sac sans fond des affaires nécessaires pour leur périple, et elles prirent la route ensemble. La garde conservait un souvenir encore vivace du voyage, qu'elle avait déjà réalisé quelques semaines auparavant, et celui-ci ne leur posa pas de grandes difficultés. Elles empruntèrent les grands chemins praticables du pèlerinage, et s'arrêtèrent dans les auberges des hameaux égrenant le trajet pour dormir. La garde n'était en effet pas équipée d'un emport-tout, et elle craignait les vicissitudes liées aux nuits à la belle étoile, trop souvent émaillées d'attaques de bandits ou de créatures. Et puis, elle aimait trop savourer le confort d'un vrai lit, après une journée de rude chevauchée. Cependant, la veille de leur arrivée, elle proposa à Aelith :
« On la passe à la dure, en mode aventurière, cette nuit ? »
Bien entendu, son amie n'y vit aucune objection, étant plus que rompue à ce genre de nuitées en pleine nature. Dahlia, pour sa part, en vint à regretter rapidement son idée. Elles jetèrent leur dévolu sur une petite bergerie abandonnée, qui n'était guère plus qu'une cahute branlante, mais présentait l'avantage d'offrir un toit, en cas d'intempéries. Une porte de guingois fermait la masure, et son intérieur vide et austère exsudait la paille pourrie et le suint de mouton refroidi. Dahlia alla chercher des branches mortes pour constituer un fagot qui leur permettrait d'entretenir un foyer, tandis qu'Aelith partit chasser des gloots qu'elles dégustèrent en brochettes pour le repas.
Après une soirée passée au coin du feu, elles s'enveloppèrent dans leurs couvertures... et Dahlia ne dormit presque pas de la nuit. Citadine qu'elle était, elle n'était pas habituée aux rumeurs sauvages qui se déployaient la nuit, en pleine cambrousse. Aussi, le moindre jappement, glapissement, et autre hululement, lui infligeait des palpitations du myocarde. Pourtant, Aelith avait posé des pièges, tout autour de la bâtisse en guise de protection, mais cela ne suffisait pas à apaiser Dahlia. Elle ne pouvait s'empêcher d'imaginer des cris d'écorchés ou d'égorgés derrière toutes ces clameurs nocturnes animalières, qui lui dressaient les cheveux sur la tête et l'empêchèrent de fermer l'oeil.
Ce fut donc avec des yeux fort pourvus en cernes, le lendemain, que la garde retrouva le fronton lumineux du Grand Temple, d'où émanait toujours cette même majesté pieuse. Elle y pénétra accompagnée d'Aelith, et elles se dirigèrent vers la salle des prières, qui accueillait l'autel des offrandes... pendant d'interminables minutes. Avec son esprit harassé de fatigue, Dahlia avait mis du temps à réaliser qu'elles y évoluaient depuis un temps anormalement long.
« Hum, on marche depuis combien de temps, là ? Pour y avoir déjà été, la salle des offrandes n'est pas censée être si loin... On devrait peut-être faire demi-tour, on a dû la dépasser. » suggéra-t-elle alors.
La proposition de la garde avait agréablement surpris Aelith. Elle imaginait mal Dahlia dormir à la belle étoile, sur un sol rude et potentiellement entourée de prédateurs. Elle-même avait eu besoin de plusieurs mois pour réussir à s'assoupir sans trouble dans ces conditions. Dans tous les cas, l'aventurière prit plaisir à enseigner quelques astuces à son amie, dont l'art de poser des pièges. Sa nuit fut aussi reposante que celle de la garde fut éreintante, et elle se risqua à taquiner cette dernière au lever du jour.
« Je vois que deux lourdes valises ont rejoint tes bagages. Moi qui aurais souhaité te proposer une course... J'espère que tu auras encore suffisamment d'énergie pour gravir les marches du Temple !»
Lorsqu’elles atteignirent enfin ces dernières, Aelith ne put masquer son émerveillement. L'aube éclairait de ses lumières rougeoyantes le marbre des prestigieux piliers qui soutenaient l'édifice. Native du Village Perché et accoutumée à la Tour d'Astronomie, la jeune femme était habituée aux sommets éminents. Toutefois, une toute autre aura, emplie de mysticisme, habitait les lieux. Ravie, la blonde se figea quelques secondes pour admirer les moulures qui ornaient le fronton du Temple. Elle ne doutait pas que cette visite lui apporterait l'ardeur et la vitalité qu'elle y cherchait. Elle allait prendre du galon en tant qu'aventurière !
Elle fut tirée de ses pensées pétillantes par un signe de Dahlia, qui l'invitait à pénétrer dans l'édifice. Elle suivit docilement son amie, qui connaissait déjà les lieux. Captivée par l'architecture, elle mit quelques minutes à remarquer que le trajet était étonnement long. Ce n'était pas fondamentalement surprenant pour un monument aussi imposant, c'est pourquoi elle se garda de faire tout commentaire jusqu'à ce que sa partenaire lui confirme l'étrangeté de la situation.
« Au moins vingt minutes. Oui, tu as raison nous devrions faire marche arrière, concéda-t-elle. Ne t'endors pas en arrivant à la bonne intersection cette fois-ci ! la taquina-t-elle en lui tapotant l'épaule. »
Quelques minutes plus tard, les deux voyageuses atteignirent un croisement à trois embranchements.
« Tiens, c'est étrange, je ne me souviens pas d'être passée par là. Il faut croire que j'ai moi aussi l'esprit embué... Cet endroit te dit quelque chose ? S'enquit-elle, perplexe»
Tout en écoutant la réponse de la garde Aelith examina les différents chemins qui s'ouvraient à elles. Les trois couloirs, dépourvus de fenêtres, étaient d'aspect identique, décorés des mêmes sculptures et dallés du même marbre. Voilà qui l'avançait bien peu. La jeune femme frotta songeusement son menton.
«Tu ne trouves pas curieux que nous n'ayons croisé aucune sœur jusqu'à présent? Était-ce le cas lors de ta dernière visite ? »
Alors qu'elle considérait l'allée de gauche pour y déceler un indice sur leur position, un léger bruit sourd, tel un caillou tombé au sol, s'échappa de celle-ci.
« Quelqu'un est sûrement en train de s'approcher, allons à sa rencontre ! S'exclama-t-elle en s'élançant sans laisser de choix à Dahlia. »
Malheureusement, l'écho ne se reproduit pas, et alors que leurs pas se multipliaient, aucune présence ne se manifesta. Le silence était leur seul compagnon. Au cours de leur marche, le regard d'Aelith se posa sur une fissure qui scindait une sculpture.
«Je suis persuadée d'avoir déjà cette crevasse à proximité de l'entrée tout à l'heure... Nous devons sûrement nous rapprocher ! S'exclama-t-elle joyeusement en accélérant»
Son dépit n'en fut que plus grand lorsqu'elles débouchèrent, une poignée de secondes plus tard, sur une seconde intersection qui laissait cette fois-ci place non pas à trois, mais huit voies.
« Désolée, Ael', je suis la plus piètre des guides... Je vais t'y amener sans faillir, cette fois, promis. »
La fatigue empesait pourtant toujours ses paupières, et Dahlia n'avait qu'une hâte : qu'elles rejoignent la chambrée dont elles pourraient bénéficier, au sein du temple, après leur rituel pieux à la salle des offrandes. La garde pourrait ainsi y piquer un petit somme, sur un matelas voluptueux qui la grisait déjà d'envie. Toutefois, cela s'annonçait compromis, car elles ne parvinrent à revenir sur leur pas. À la question de son amie, Dahlia prit un air contrit.
« Hm, le problème est que rien ne ressemble plus à une colonnade qu'une autre colonnade... Les éléments composant ce temple sont d'une monotonie bien trop répétitive, ce qui n'aide pas l'établissement de repères fiables. »
Il y avait de ça, mais c'était surtout que Dahlia n'avait absolument pas prêté attention au chemin qu'elles avaient emprunté, à l'aller, de par son état embrumé de somnolence, et qu'elle était donc bien en peine de savoir si elles avaient déjà franchi ce croisement. Elle réfléchit un instant avant de répondre à la remarque suivante de son amie, piochant dans les souvenirs de sa précédente visite.
« La fois précédente, Jaina et moi avions été accueillies par une sœur... C'est plus qu'étonnant que nous n'ayons encore rencontré de résident du temple, en effet. »
Tout cela se parait de plus en plus d'étrangeté. Dahlia emboîta le pas d'Aelith, qui semblait avoir décelé une rumeur, au bout de l'un des couloirs... Mais elles firent, hélas, chou blanc. L'aventurière garda son positivisme en distinguant la lézarde familière d'une crevasse, sur une sculpture, mais la garde vit rapidement celui-ci s'émousser, sur son visage tatoué de bleu, quand elles arrivèrent sur une intersection à huit voies.
« Ah ! Alors, je ne sais absolument pas où nous sommes... Mais j'ai une super technique pour nous sortir de là, apprise d'une grande maîtresse de l'orientation. »
Un sourire un brin nostalgique aux lèvres, Dahlia se positionna au centre de l'intersection. Puis, fermant les yeux, et pointant un doigt tendu devant elle, elle pivota sur elle-même sur plusieurs tours, avant de se stopper net. Puis, forte de son expérience, elle déclara :
« Cela indique... Le passage que nous ne devons pas prendre. Il nous faut juste reproduire l'exercice pour les six autres couloirs restants, et on aura celui que nous devons emprunter. »
Dahlia essuya alors l'étonnement d'Aelith, tout en lui assurant le bien-fondé de cette démarche. Ce fut finalement éprises d'un certain tournis qu'elles décidèrent de s'engager dans la voie qui n'avait pas été désignée par leurs petits tourniquets. Bien sûr, ce mode opératoire n'était sûrement pas fiable, mais cela avait au moins été drôle. Les deux jeunes femmes s'avancèrent dans le couloir dallé, et aboutirent malheureusement... à une impasse. Cela finit par faire céder la patience de Dahlia, dont l'irritabilité était exacerbée par son état de fatigue.
« Raaaaaaaaaah il commence à me taper sur les nerfs, ce dédale pieux ! Lucy se joue vraiment de nous ! »
Sur ces paroles, elle tapa du poing dans le mur à sa droite, et ses cornes commencèrent également à émerger de façon incontrôlable, sous son énervement.
Il aurait fallut apprendre à l'ingénieur en charge du labyrinthe que la violence ne résout rien, car en frappant, Dahlia, tu as ouvert le chemin en activant un mécanisme caché.
L'impasse se change en un long couloir à mesure que les briques se replacent et disparaissent dans les murs, cependant, les parois derrière vous commencent à se refermer avec vitesse, peut-être même un peu trop vite ... Il va falloir courir très vite si vous ne vous pas y perdre un orteil ou un sabot, dans la course.
En quittant le couloir, vous trouvez une pièce semblable à celle que vous recherchiez initialement, le labyrinthe disparut telle une illusion derrière vous. Pourtant, il n'y a toujours aucune sœur ni prêtre ... Était-ce lié au labyrinthe ? Et surtout, où sont-ils maintenant et vont-ils bien ?
« J'ai hâte de voir ça ! J'espère que ta technique sera plus fiable que mon instinct douteux. »
Sous le regard mi-amusé mi-dubitatif d'Aelith, la garde tourna sur elle-même et pointa du doigt l'une des voies. Sa stratégie arracha un rire à l'aventurière.
« Je fais le prochain tour, faudrait pas que toutes ces rotations te donnent la nausée, répondit-elle jovialement, égayée par ce petit instant de détente. »
Après avoir répété la manœuvre le nombre de fois nécessaire, les deux jeunes femmes s'engagèrent dans le couloir élu par les lois du hasard. Malheureusement, le chemin ne déboucha que sur un mur dallé.
« C'est pas vrai ! se lamenta la blonde, dont l'agacement commençait à poindre. L'architecte qui a conçu temple avait définitivement un grand sens de l'humour... mais peu d'esprit pratique. »
Une fois n'est pas coutume, la patience de sa partenaire céda avant la sienne et elle frappa violemment le mur. Tandis qu'Aelith observait, quelque peu admirative, les cornes de Dahlia pointer sur son front, un cliquetis suivi d'un craquement sourd se fit entendre. La dalle frappée par la garde s'était enfoncée dans la paroi, activant un mécanisme astucieusement conçu. Sous leurs yeux ébahis, les briques du mur leur faisant face tremblèrent, dégageant une nuée de poussière. Puis, formant un rideau de pierre, elles coulissèrent pour laisser place à un long couloir. Avant que l'aventurière ne puisse prononcer le moindre mot, une seconde vibration résonna. Les parois se refermaient frénétiquement derrière les deux visiteuses. Poussées par leur instinct, elles s'élancèrent en avant. Néanmoins, leur vivacité n'était pas suffisante : le couloir se rétrécissait de plus en plus vite dans des vrombissements funestes. Sans tergiverser davantage, Aelith activa sa métamorphose.
« Monte ! hurla-t-elle à la garde en l’attrapant malhabilement à deux mains pour l'aider à grimper sur dos »
La manœuvre était maladroite mais efficace et la jeune femme parvint à se positionner, telle une cavalière, sur son amie.
« Tiens toi bien, j'accélère ! »
La plus grande crainte de l'aventurière était de voir Dahlia perdre l'équilibre : la chute pouvait lui être fatale. Par chance, elle parvint à maintenir son assiette, enserrant la taille de son amie. A bride abattue, les deux voyageuses dévalèrent le couloir.
Celui-ci finit par déboucher sur une vaste salle ovale. Les deux jeunes femmes s'y réfugièrent alors que le dédale de couloir se renfermait derrière elles dans une dernière secousse.
« Quelle chevauchée ! glissa Aelith entre deux inspirations. Nous avons bien failli être englouties par ce sinistre labyrinthe. »
Une fois son rythme cardiaque et sa respiration apaisés, la jeune femme détailla du regard la pièce dans laquelle elle se trouvait. L'autel en son centre ne laissait pas doute à sa fonction : il s'agissait de la tant espérée salle des offrandes. Toutefois, elle était étrangement déserte.
« Je ne sais pas quel envoûtement est à l’œuvre ici, mais je m'inquiète du sort des fidèles qui habitent ce temple, rajouta-t-elle d'un air soucieux. »
Alors qu'elle se rapprochait de l'autel, l'aventurière constata avec étonnement que le socle destiné à déposer les offrandes était vide. Des traces de poussières suggéraient que de nombreux objets y reposaient il y a peu de temps, mais avaient été déplacés. Décidément troublée, Aelith fit part de sa découverte à la garde en pointant du doigt le piédestal.
« Regarde, c'est comme si les offrandes avaient... disparu ? »
Il allait vraiment falloir courir, tout compte fait.
« On considère ça comme notre course, ou bien... » commença Dahlia, alors qu'elles prenaient leurs jambes à leur cou.
Mais elle fut rapidement coupée par Aelith, qui avait revêtue sa forme de centaure dans l'urgence, et l'enjoignait à monter sur elle. Avec son aide, la garde parvint à se hisser sur son dos équin, et lui attrapa la taille. Dahlia n'était que peu habituée à monter à cru, et l'exercice était loin d'être évident, mais il différait par le buste de son amie qu'elle pouvait éteindre éperdument, ce qui lui fut salvateur pour maintenir son assise. Ça, et le fait que le couloir était en ligne de droite, dépourvu de tournants qui auraient pu risquer de la désaxer dans une chute funeste.
Leur cavalcade effrénée les mena dans une vaste salle ovale, illuminée par quelques braseros. Tandis qu'elle redescendait du dos son amie, Dahlia ne put s'empêcher de s'extasier, après avoir repris sa respiration précédemment interrompue, tant elle avait été happée par l'action.
« Merci, Ael' ! Quel privilège, d'avoir pu te chevaucher héhé ! À quand la prochaine ? »
La pièce dans laquelle elles avaient débouché semblait indiquer la fin de leur errance : Dahlia put reconnaître la salle des prières, où trônait au centre l'autel dédié à recueillir les offrandes pour Lucy. Cependant, le défaut de présence humaine en son sein restait toujours aussi inexplicable. La garde abonda l'inquiétude d'Aelith.
« Autant de personnes volatilisées... Nous trouvons-nous vraiment dans le temple, ou dans un simulacre de ce dernier ? »
S'approchant de l'autel, elles constatèrent alors ensemble sa vacuité. Seules des traces de poussière attestaient de leur présence récente sur le piédestal.
« Hum... Soit elles ont été déplacées pour être dépoussiérées, soit... »
Un vacarme retentit soudain, non loin de là. Un résonnement assourdissant de cuivres tombant sur le parterre dallé. Dahlia échangea un bref regard avec Aelith, et elles se précipitèrent vers la seule sortie restante de la salle, qui débouchait sur un couloir chichement éclairé. Elles purent alors apercevoir, à une certaine distance de là où elles se trouvaient, un homme fin et sombrement vêtu, accroupi par terre et ramassant malaisément des objets - qui pouvaient s'apparenter à des offrandes - pour les fourrer en hâte dans son ample sac en jute déjà rempli à ras-bord.
« Hé, toi là ! »
En entendant Dahlia le héler, l'homme leva les yeux vers elles, qui se décillèrent de surprise. Interrompant aussitôt son geste, il se remit derechef debout, attrapa son sac qu'il lesta tant bien que mal sur ses épaules, et courut dans la direction opposée aux deux jeunes femmes, prenant la fuite. Dahlia réagit alors le plus rapidement possible : elle attrapa son lasso, à son ceinturon, et le propulsa vers lui. Mais le maraud était déjà trop loin, et la corde miroitante ne parvint à saisir que sa hotte, qui était encore à portée de son rayon d'action.
Aelith passa songeusement ses doigts sur le piédestal poussiéreux. Décidément, les bizarreries s’enchaînaient. Elle avait beau considérer la situation sous différents angles, elle ne parvenait pas à mettre en corrélation le labyrinthe, la disparition des religieux et celle des offrandes. Alors qu'elle essayait de mettre de l'ordre dans ses pensées, un fracas la fit sursauter. D'un accord tacite avec Dahlia, elle se précipita à l'extérieur de la salle.
A la vue du fuyard au sac bien rempli, dont quelques objets miroitant d'une lueur dorée s'échappaient, la jeune femme s’élança à sa poursuite. Tout aussi rapide, la garde lança son lasso dans sa direction. Seule sa hotte fut atteinte, mais cela fut suffisant pour déstabiliser l'inconnu, qui marqua un temps de pause. Aelith saisit l'occasion pour le rattraper en quelques foulées et bloquer son passage. Agile, l'homme tenta d'obliquer à droite. Toutefois, l'équidé était bien plus prompt. D'un coup de sabot, elle l'envoyer à terre.
Alors que sa cible frottait ses membres endoloris, l'aventurière l'attrapa par le col et plaça une dague sous la gorge, rendant toute tentative de fuite impossible. Elle jeta alors un regard à Dahlia, maintenant en possession du sac.
« Est-ce bien les propriétés du temple que ce couard transportait ? S'enquit-elle, même si l'attitude de l'inconnu laissait peu de place au doute. »
Comprenant la précarité de sa situation, le voleur leva les mains au ciel d'un air contrit.
« Du calme mesdames, je suis certain que nous pouvons trouver un arrangement.
-Vous ne me semblez pas en position de négocier, trancha durement Aelith. La situation est simple. On rend ces offrandes au Temple et vous aurez l'occasion de vous justifier plus longuement une fois derrière les barreaux.
-N'en soyez pas si sûre. Il vous serait aisé de me livrer à la Garde, en effet. Mais sans mon aide, vous n'aurez aucun moyen de libérer les fidèles piégé dans le labyrinthe, révéla-t-il.»
Agacée par son air suffisant, l'aventurière raffermit sa prise, arrachant une grimace de douleur au fuyard. Celui-ci finit par reprendre, plus sérieux.
« Les subterfuges qui permettent de pénétrer ou de s'échapper de ce dédale ne sont connus que par une poignée de personnes. De nombreux rouages et sortilèges sont à l’œuvre. Il m'a moi-même fallu plusieurs mois pour étudier ces mécanismes. Les frères et sœurs seront morts avant que vous ne parveniez à les délivrer si vous agissez seules. Faisons un marché. Vous me laissez repartir avec un tiers des offrandes et en échange, je vous montre comment les libérer. »
Aelith resta silencieuse et consulta Dahlia du regard. L'idée de marchander avec le pillard ne lui plaisait pas mais elle estimait qu'en tant que garde, son amie serait plus à même de faire le bon choix.
Heureusement, Aelith avait réagi avec tout autant de promptitude, et bien moins d'économie de mouvements : sous sa forme encore équine, elle était parvenue à rattraper le tire-laine, et à lui barrer la route. Il fut ensuite rapidement mis au tapis, par un coup de sabot interceptant judicieusement sa fuite.
Faisant glisser le sac rempli d'objets visiblement dérobés jusqu'à elle, Dahlia en inspecta rapidement le contenu. Devant le chatoiement univoque de tous ces biens de valeur, elle ne put que rendre un avis formel à la question soulevée par son amie :
« Oui, ça m'en a effectivement tout l'air... »
Le voleur voulut alors engager des négociations, malgré la dague qu'Aelith pressait contre sa gorge, et sa posture bien peu encline au dialogue. L'aventurière faisait preuve d'une rudesse implacable qui ne manqua d'ailleurs d'impressionner Dahlia. L'homme avançait toutefois certains arguments de taille, qui instillèrent un dilemme en elle. Elles avaient en effet besoin de son concours pour retrouver les fidèles... Étaient-elles réellement en position de refuser son offre ?
Admettre que l'on avait affaire à plus malin que soit était une concession amère, mais elle ne pouvait l'éluder. Bien qu'à contrecœur, Dahlia finit par lâcher :
« Il faut concéder que vous connaissez manifestement mieux ce labyrinthe que nous... Et notre priorité étant effectivement de retrouver les résidents du temple et de les mettre en sécurité, nous allons accepter votre marché. » Sa voix se durcit cependant alors qu'elle ajoutait : « Mais vous marcherez devant nous, les mains bien en évidence... et avec l'interdiction de toucher à quoique ce soit. Pas de tentative d'entourloupe, ou vous le regretterez. Et je conserve le sac jusqu'à ce que nous soyons arrivés, bien évidemment. »
Celui-ci serait un peu lourd à porter, mais il allait falloir faire avec. L'homme acquiesça, et les entraîna dans les couloirs méandreux du temple. Dépendre de ce guide plus que suspect était loin d'être une situation confortable, et Dahlia tenta de demeurer sur ses gardes tout le long, les épaules nouées par la tension, ainsi que ployant sous l'amas volumineux d'offrandes qu'elles devaient supporter. Au bout d'un certain nombre de tours et détours, l'homme finit par annoncer :
« Nous y sommes presque, mesdames... »
En entendant ces mots, Dahlia fut gagnée par un sentiment de délivrance mais celui-ci demeurait relatif, car toujours modéré par la méfiance dont elle ne parvenait à se départir. Et ce malaise diffus fut soudain accentué par une intuition déplaisante, un vague sentiment d'alarme lui nouant l'estomac. Restée un peu en retrait, en bout de file, car faiblissant sous l'effort, elle aperçut soudain l'homme se déporter de façon presque imperceptible sur la gauche, et activer une dalle au sol, en posant nonchalamment un pied dessus. Dahlia lâcha aussitôt le sac d'offrandes juché sur son épaule, et se précipita sur Aelith pour l'amener à se baisser.
« Attention ! »
Une gerbe de feu venait de jaillir de l'une des statues disposées sous l'une des alcôves du couloir, devant l'aventurière.
Ainsi, Dahlia accepta l'offre du voleur. Même si elle en tirait un profond sentiment d'insatisfaction, Aelith comprit la décision de la garde : la sécurité des résidents du temple était la priorité. Toutefois, elle exécrait l'idée de laisser l'individu s'enfuir. Elle espérait qu'en agissant habilement, elles arriveraient à passer outre leur accord et à châtier le pillard. A ses yeux, l'emploi de la ruse et du mensonge était justifié dans une telle situation. Néanmoins, il lui semblait peu probable que la garde partage son avis.
Cette dernière paraissait craindre un coup fourré et imposa des mesures strictes à leur guide, approuvées par l'aventurière. Après tant de mois à peaufiner son plan, elle doutait que le malandrin laisse échapper les deux tiers de son butin si docilement. S'il avait été suffisamment ingénieux pour parvenir à comprendre les mécanismes du labyrinthe, il devait avoir plus d'une corde à son arc.
A l'instar de Dahlia, la jeune femme s'efforça de surveiller précautionneusement le voleur tout au long du trajet. Malheureusement, à force d’enchaîner boucles et lacets dans les méandres du temple, l'attention de l'aventurière défaillit. Elle eut à peine le temps d’apercevoir l'homme s'esquiver sur la gauche lorsque la main de la garde exerça une pression sur son épaule pour la faire ployer. Un jet enflammé frôla son visage et roussit quelques unes de ses mèches.
Profitant de l'instant de trouble, le scélérat déguerpit dans un couloir adjacent. Prompte, Aelith se lança à sa poursuite. Cependant, à mesure qu'elle s'enfonçait dans le dédale du temple, les passages perdaient en largeur : le voleur l'avait guidé dans les quartiers les plus anciens du sanctuaire, uniquement reliés par des allées étroites. Ses imposants membres équins ralentissaient peu à peu son avancée. Au pied du mur, elle fut réduite à inverser sa transformation. Son déséquilibre offrit quelques précieuses secondes d'avance au fuyard, qui se stoppa devant une paroi et appuya sur diverses dalles. La jeune femme puisa dans ses dernières forces pour se ruer sur le malandrin, en vain. Une trappe se déroba sous ce dernier et se referma dans un claquement sourd, la laissant seule face à un mur.
Révoltée, Aelith martela avec fureur chaque dalle de la paroi, pour tenter de rouvrir le passage. Ses efforts furent infructueux. Elle croyait leur cause perdue, lorsque la voix de Dahlia lui parvint. Un passage s'était ouvert en face de cette dernière, dévoilant un groupe de résidents affolés. L'homme avait tenu parole. Un tel acte de générosité était encore inexplicable, mais une chose était certaine : le fuyard rapace ne tarderait pas à revenir s'emparer de son butin.
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