La ciel est clair et n'augure aucun présage néfaste. Mes yeux perçoivent l'horizon qui se rapproche, on commence à entendre la vie s'activer. Le personnel du pont ne tarde pas à manœuvrer les voiles pour ralentir la cadence.

L'air iodé qui emplit mes poumons s'accompagne du bruit des vagues qui se rétrécissent, se fracassants contre les pierres qui jonchent le long de la ville portuaire. Le bois du navire vrombit, on peut l'entendre travailler par endroits.

Un son perçant vient me tirer de mes pensées. Il me tardais d'entendre la cloche tinter.

Je suis enfin arrivé. Voilà un certain temps que je navigue en ces eaux, mais je ne saurais dire depuis combien de temps je suis parti exactement. Surement 3 ou 4 nuits tout au plus. Peut-être même une lune.

Je n'ai de cesse de repenser à mon départ. Bien entendu, j'ai eu toutes les raisons du monde de partir. Mais mes pensées restent là bas. Près de ceux que j'ai laissés. Ce qui est fait est fait, ressaisit-toi Yū Hanahiko veux tu : Te voilà presque arrivé sur le continent, tu planifies ton départ depuis quelques saisons. Quelle est la suite du programme ?

"Hm."

Depuis le pont, profitant des derniers remous des vagues et du magnifique panorama dont je dispose, je sors mon journal de mon sac afin de jeter un dernier œil furtif à mon organisation.

Dans ce journal, tout semble retracer le parcours de notre nouvel arrivant, et ce, depuis quelques années. Les dernières pages auraient, à s'y méprendre, tout d'un voyage touristique : Les dates de chaque trajets, les coûts associés, quelques tickets et factures ça et là, et même quelques plans pour se repérer.

Dès mon arrivée, je devrais trouver mon correspondant, qui est censé me faire découvrir les milles merveilles que proposent le Grand Port, au détour d'une "balade gustative des mets les plus nobles de la région". Cette "promenade" a le mérite de me faire aller jusqu'à la capitale, gites et couchers inclus. Le temps pour moi de me trouver une demeure pour en faire mes quartiers personnels.

Alors que je feuilletais les dernières pages de mon journal, j'en profitais pour y inscrire quelques mots, pour me rappeler mon sentiment à mon arrivée.

"Confiant. Oui, confiant ira très bien", dis-je en l'inscrivant dans mon carnet. Tout a été préparé pour que je puisse mener commencer mon périple ici, sur le continent.

A peine eussé-je avoir le temps de placer une feuille de buvard entre les deux dernières pages pour sceller mes écrits, que le volume environnant avait progressivement augmenté. La cloche tintait fort, le personnel était agité et bruyant. Des caisses étaient transportées d'un bout à l'autre du bateau : Une chose est sur, la cargaison serait livrée sans problèmes.

Mais tout ceci n'est en rien mon problème. Le navire amarrant, je pris le temps de glisser quelques cristaux au capitaine pour m'assurer que mes traces étaient couvertes.
Sale et probablement bien peu instruit, il ne semblait avoir pour préoccupation que de livrer ses marchandises et gagner de l'argent. L'honneur n'est pas un concept qu'il saurait apprécier. J'ai donc fait parlé les cristaux à ma place.

Il grommela deux trois mots s'apparentant à un remerciement. Je pris ensuite congés d'un léger haussement de tête. Je ne voudrais pas qu'il prenne mon rapprochement pour une incitation à la discussion.

Ma bourse de cristaux aussitôt rangée à la ceinture, j'entreprends de me rendre sur quai, en quête de mon correspondant avec mon katana à la ceinture, claquant à ma jambe à chacun des pas descendants le bateau.

C'est donc ça, le Grand Port ! Sous mes yeux, tout s'agitait. Père m'avait déjà amené ici étant plus jeune, mais c'était il y a trop longtemps pour que je m'en souvienne. Des stands de poissons et de fruits de mer par dizaines, des soldats qui viennent machinalement contrôler les stocks de marchandises arrivants, et du monde. Beaucoup de monde !

Le monde, le peuple, la populace, peu importe comment vous l'appelez, Yū n'avait pas pour habitude de se sentir si petit et mêlé à ces derniers. Son village, bien que moyennement peuplé, possédait un marché sommaire ainsi que des festivités divertissantes. Et Yū était au dessus de tout ça, littéralement. Ce qui changeait ici, c'était le décor et l'échelle. Tout était plus grand.

Désormais seul et emplit de nostalgie suite à son départ, il ne se laissa imprégner par cette immensité que quelques instants avant de revenir à lui même.

Plus de temps à perdre. Mettons-nous en chemin.
A mesure que je m'enfonçais dans la foule, le bruit et l'odeur des vagues me quittait. Mais ce n'est pas grave, quelque chose de plus grand encore m'attend au loin. Donc, à quoi est censé ressembler un coordinateur de "voyage culinaire" ? Il est supposé m'attendre au détour d'un marchand de poissons exotiques.

Mon sac bien positionné sur mon épaule droite et main gauche positionnée sur mon katana pour éviter toute veine tentative de subtilisation de mes biens, je me dirige vers le marché odorant.
Des gens bruyants. Plus bruyants les uns que les autres, voulant faire valoir leur marchandise, prétendument meilleure que chez le voisin, pourtant à peine aussi cher que la leur. Sans être risible, ç'en était presque ridicule.

Je scrutais l'horizon à la recherche d'une personne qui avait qui savaient se comporter. Il ne fut pas bien compliqué d'en trouver une. Il suffisait de trouver quelqu'un qui savait se tenir droit et qui embaumait encore plus que les étalages. Mais au moins les odeurs étaient plus agréables.

Après quelques humbles présentations et échanges courtois, on me dirigea vers ce qui semblait être l'objet de mes convoitises. Il s'agissait d'un stand en bois tout ce qu'il y a de pas noble situé à côté d'un marchand de bijoux faits en dents de ... créature marine ? J'imagine ?
Je passe mes yeux en Z sur l'étalage et n'aperçoit personne. Mes yeux finirent par tomber sur un écriteau qui disait à peu près ceci :
"Un accident s'est déroulé lors d'une des dernières visites gustatives. Aussi, toutes les visites programmées sont annulées. Nos excuses pour le dérangement."

Un ... accident ? Hm. Au vue de la quantité d'odeur présente par ici, je ne doute pas que les "meilleurs mets de la région" aient un goût à leur pareil. Un accident de ce type pourrait s'expliquer ainsi.

Après un soupir d'exaspération face à tant d'amateurisme, Yū prit les choses en main.

Très bien, nous irons à pied. Ou en monture, si je peux en trouver en fonction de ce qui reste dans ma bourse. Mais où pourrais-je bien trouver un palefrenier dans les environs ?
Je regardais une nouvelle fois les environs pour tenter de trouver un écriteau pouvant m'aiguiller, mais il n'y avait que des gens à perte de vue. Et tes plans Yū ?

Hm. Je n'ai aucun plan précis de la ville. C'est bien trop rare et inutile pour l'usage que j'en aurais fait de toute façon. Même si je dois bien avouer que cela m'aurait été bien utile.

Bien décidé à ne pas prendre racine, je décide de traverser la foule pour m'enfouir dans les rues de la ville, en quête d'un moyen de locomotion.

Les tumultes d'une arrivée portée par l'océan : Un guide esseulé

Entêté à trouver un moyen de transport, j'arpentais les ruelles de cette ville bondée. Les cartes m'indiquent que la Capitale se trouve au Nord-Est.
Avec les étales à perte de vue et ces rues étroites, il m'est difficile de distinguer le nord du sud. D'autant que cela fait presque une heure que je tourne en rond...
Je suis même quasiment sur d'avoir déjà croisé ce stand de friture il y a même pas 20 minutes.

Rends toi à l'évidence Yū, t'es paumé.
Eh merde.

Toujours le dos bien droit, je ne baisse pas les bras. Il faut simplement que je mette ma fierté de côté et m'adresser à quelqu'un qui saurait me guider. Je m'approche donc de cette chariote à friture marine, bien décidé à en repartir avec les informations qu'il me faut.

Quelque chose me frappa en m'approchant. La rue est bondée, pourtant, personne ne lui achète rien. Mon estomac me fait pourtant savoir que nous ne sommes pas très loin de l'heure du déjeuner, si nous ne l'avons pas déjà raté. Qu'à cela ne tienne, je dois partir d'ici.

- Excusez moi de vous déranger ...
- Soit vous consommez, soit vous décarrez d'ici. Dit le vendeur d'un ton dédaigneux.
- J'espérais que vous puissiez m'indiquer une direction, mais vous allez visiblement l'air très occupé par un afflux massif de clientèle imaginaire qui ne viendra jamais.
- Qu'est-ce tu dis là le mécheux ?
- Que je ne vous souhaite pas une bonne journée. Retorquais-je alors en lui tournant le dos et en rejoignant la foule.

Malgré les discussions de la foule et les vendeurs hurlant leurs produits, on pouvait entendre même plusieurs rues après, cet agréable vendeur beugler après moi. La prochaine fois, je me méfierai des vendeurs sans clients, on ne m'y reprendra pas à deux fois.

Je commence à m'exaspérer. Voilà qu'à ce moment là, une femme, visiblement armée d'un poisson, vient me percuter sans crier gare. Je n'ai malheureusement aucun moyen pour amortir ma chute, avec tout ce monde autour. Je tombe alors de toute ma haute, étonné. Un peu sonné, je me relève, et garde ma main sur mon katana. Je n'ai pas le temps de faire affaire à une bande de voleurs qui fomenterait des petits tours bien ficelés et qui en auraient après ma bourse. Je me relève donc d'un air sérieux, pour me retrouver face à une femme, en plein conflit avec son animal de compagnie. D'une taille pareille, on pourrait se demander qui promène qui. L'incident qui vient de se produire semble me donne un léger indice.

La demoiselle se confond désormais en excuses. Plates, rébarbatives, familières et si longues ! J'appréhende cette dame de toute ma hauteur et la regarde fixement, attendant le moment opportun où elle cessera de jacter.
En la regardant d'un peu plus prêt, je constate la personne. Une petite femme à la peau de porcelaine, aux énormes yeux rouges et aux dents plus qu'acérés. Parmi toutes les personnes que j'ai pu connaitre, aucune d'entre-elles n'a son pareil.
Tant d'excentricité et d'énergie dans un corps si frêle. Cette personne se distingue clairement parmi la foule. Surement pourra t-elle m'apporter quelque chose.

Bien que je ne souhaite jamais la croiser dans un couloir en pleine nuit, cette personne ne semble pas bien méchante. Tâchons de faire preuve de tolérance Yū. Sa vie ne doit pas être facile.

- Ce n'est rien. Vous ne vous êtes pas fait mal j'espère. Cette Laïum ne doit pas vous faciliter la vie. Venez par ici, qu'on puisse respirer un peu. Lui dis-je alors, pour que nous puissions nous extirper de la foule.
Il y avait juste à côté des petits remparts en pierre sur lesquels nous pouvions nous poser, derrière des étales marchandes inoccupées.

Après m'être essuyé les vêtements pour en retiré la poussière du sol, je vérifie que je possède tous mes biens avec moi. Mon sac est plein, ma bourse est inchangée, mon katana bien rangé. A priori tout va bien. J'en profite pour souffler un coup et boire une gorgée d'eau, histoire de me reposer de cette journée qui semble déjà si compliquée, alors qu'elle vient presque de commencer.

- Je m'appelle Yū. Je cherche à me frayer un chemin vers la capitale. Je n'arrive pas à trouver mon chemin dans cette ville. Entre mes différents rendez-vous qui m'ont fait faux bon, la foule, et ce marchand véreux, tout me dit que je n'arriverai jamais à sortir d'ici.

Je prend un léger temps de pause.

- Vous ... Pourriez m'aider s'il vous plait ? Je vous en serai très reconnaissant.