On m’a foutu la paix pendant longtemps avec l’épée débile de la Garde mais je crois que ce temps est révolu… “Il te faut une vrai arme”, “Tes poings, c’est pas suffisant par ici” etc… ça fuse dans tous les sens depuis mon arrivée à Forteresse. Qu’est-ce qu’ils ont tous à vouloir me voir avec un de leur pic à glace ? Il n’y a pas besoin de plus que mes mains pour baffer deux ou trois malotrus qui font du mal aux mioches… Mais non, ça, ils comprennent pas. Et comme ça me gonfle d’entendre parler de ça à tout bout de champ, autant trouver une solution. Et pas un pic à glace moche et peu pratique !

Chose pratique à être dans la Garde, on se partage les bonnes adresses. Et surtout les bons forgerons, encore plus les très bons. C’est un peu plus compliqué quand ils se planquent dans les montagnes mais ça s’arrange facilement pour nous. Une petite visite impromptue des avant-postes des Sentinelles et le tour est joué. C’est justement ce que je dois faire dans les prochains jours, heureux hasard. On m’a prévenu, le forgeron qu’on m’a recommandé, c’est un homme extrêmement talentueux mais il est perché… Je dois bien avouer qu’il faut être un peu perché pour s’isoler dans les montagnes comme ça… Mais bon, on dit pareil de moi et ma coiffe d’ours, alors ça doit être un gars bien quand même.

Entre deux visites d’avant-postes et revues des troupes, je dévie un peu (beaucoup) de ma route pour me rendre chez ce fameux forgeron. Plus je m’approche, plus je comprend ce qui a pu attirer l’homme ici… Le calme, la beauté de la nature. C’est bien différent de ma forêt natale avec ces arbres à pertes de vues. Ici, le monde entier s’étale sous les yeux. Arrivant en vue de la demeure du forgeron, enfin je suppose vu la colonne de fumée s’élevant de l'appentis et des coups métalliques résonnant, je descends de mon cheval pour finir à pied. Ne voulant pas m’introduire sans autorisation chez l’homme, je m’immobilise à une dizaine de mètres et lance un appel.

Excusez-moi ! Je cherche une personne nommée Lyle, on m’a conseillé ses talents de forgeron.

Les bruits de marteau ne trompent pas, je suis bien proche d’une forge mais de là à être à la bonne, c’est une autre histoire. Il ne faut pas bien longtemps pour que le marteau cesse de battre le fer après mon appel. Un peu plus pour qu’une personne daigne sortir de ce qui doit être la forge. Sans aucune fenêtre, rien ne permet de jauger de l’approche de l’homme jusqu’à ce qu’il apparaisse par l’ouverture sombre. Moi qui m’attendait à un vieux forgeron à la barbe grisonnante, me voilà à la fois déçu et surpris. C’est un petit jeune qui m’aborde. Un petit jeune qui n’a clairement rien à envier à la plupart des gardes niveau physique. Le marteau, ça vous forge un homme visiblement. Un sourire amusé passe sur mon visage à son commentaire. Je l’apprécie déjà celui-là, pas de faux-semblants.

Sait-on jamais, j’aurais pu tomber sur l’apprenti balayeur de charbon.

C’est bien comme ça que j’imagine un apprenti forgeron commencer son apprentissage du métier. Apprendre à observer et retenir par lui-même. C’est ce qu’on faisait à la régulière. Un ancien avec un jeune pour que l’expérience s’échange au mieux, je ne vois pas de raison pour que ça ne fonctionne pas pour d’autres métiers. Caché derrière ma coiffe, je hausse un sourcil. Il y a une boutique ? On aurait pu m’en parler… Sûr que c’est volontaire pour bizuter le nouveau Lieutenant… Tant pis, il a pas l’air de le prendre mal. Et mes Sentinelles ont l’air de faire un bon boulot dans le coin vu qu’il semble ne pas recevoir de mauvaises visites. Lâchant les rennes du cheval, plus préoccupé à brouter l’herbe fraîche, je m’avance vers le jeune homme. Me grattant la joue du doigt, je m’excuse quand même d'empiéter ainsi sur sa propriété.

Mes excuses, je ne savais pas que vous aviez un magasin. Je soupçonne que l’on m’ait délibérément caché cette information… Fort heureusement, les gardes savent où vous trouver.

Arrivant à sa hauteur, je lui tend une main amicale en me présentant.

Ray Oderik, je suis lieutenant du Blizzard depuis peu. On m’a chaudement recommandé vos talents pour faire fabriquer des armes de bien meilleure facture que ce qu’on fournis à la Garde.

Souriant, je reprends son expression pour me décrire avec un peu d’auto-dérision.

Donc le Roi des Nounours est venu pour commander des griffes !

De vraies griffes, pas un cure-dent d’épée comme les autres. Quitte à avoir la tête de l’ours, autant avoir aussi ses griffes acérées et puissantes. Je sort d’une de mes poches une de mes armes habituelles, une simple barre métallique avec quelques emplacements pour passer mes doigts. Une arme suffisante pour cogner de simples malfrats sans les tuer, j’ai une préférence pour la justice du royaume.

J’utilise ceci habituellement mais avec les bestioles du coin, je vais avoir besoin de quelque chose de plus “létal”... Je me bat avec mes poings, c’est plus agréable qu’une épée si vous voyez ce que je veux dire.

J’apprécie de sentir le corps de mon ennemi se cambrer sous l’impact de mon poing dans son estomac. C’est autre chose que de lui planter une épée dans le bide.

Une poigne ferme et robuste comme attendue d’un homme qui travaille le fer avec passion. Tout à fait le genre de personne qui paraît digne de confiance. La présentation de mon besoin et de l’existant est assez rapide. De un, mes armes habituelles sont plutôt rustiques et de deux, j’ai aucune idée de ce que je veux. Mais bon, c’est l’avantage de venir voir les meilleurs dans leur disciplines, ils ont les idées et l’intelligence pour s’adapter aux besoins de leurs clients. Et le voilà qui se met à rire… J’hésite un peu à dire qu’il se moque de moi mais peut-être que ce n’est pas cela. Allez savoir ce qui se cache dans la caboche d’un forgeron à qui ont montre des objets archaïques et pas top niveau qualité. Finalement, ça à l’air d’avoir plutôt en lien avec une sorte de chance insolente. Avec une bonne tape sur son épaule, les réflexes de bon vivant reviennent vite quand la personne en face est sympathique, je le rassure.

Ce n’est pas nécessaire de vous presser comme ça ! Je suis de passage pour l’inspection des garnisons détachées, je vais repasser dans le secteur d’ici une dizaine de jours, ce n’est donc pas si pressé que ça. Je suis curieux quand même de voir ces fameux prototypes, cela doit être quelque chose. Ils pèsent lourds ?

Je m’en voudrais de le presser pour si peu. Il pourrait bien m’annoncer un délai d’un mois que ce ne serait pas un souci, je n’aurai qu’à trouver un motif pour partir faire une nouvelle inspection d’une des garnisons de sentinelles. Je lui tend mes mains à sa demande. Alors que je me pointe à l’improviste, il se dévoue totalement à ma demande. Ce n’est pas n’importe qui qui peut se permettre cela, c’est pour moi la marque du professionnel extrêmement compétent. Tout en prenant des mesures sur mes paluches, il se présente. Il est le propriétaire de cette forge ? Je ne m'attendais pas vraiment à cela, il semble vraiment jeune. La ressource dont peut faire preuve la jeunesse lorsque la motivation est là me surprendra toujours.

Enchanté de vous rencontrer Lyle. Cela vous dérange si je vous appelle par votre prénom, c’est une mauvaise habitude chez moi.

Toujours aussi souriant, je le laisse continuer ses mesures. Le tutoyement m’a toujours paru plus utile que le vouvoiement. Trop impersonnel à mon goût… Comment voulez-vous impliquer les personnes qui vous entourent s’ils ne se sentent pas directement visés et traités d’égales à égales ? J’hausse un sourcil sous ma coiffe à son interrogation sur la personne l’ayant recommandée. J’aime cette mentalité, ce jeune homme est véritablement un bon gars.

Il s’agit de ma secrétaire, des membres de sa famille ont acheté des armes forgées par tes soins. Sûrement dans votre boutique du coup. Bien que je la soupçonne d’être apte à me planter un couteau dans le dos si je fais le moindre pas de travers, elle n’est pas vraiment attirée par les armes. Peut-être que le nom de Desna te dira quelque chose ?

Amalis est la secrétaire du lieutenant des Hippogriphes depuis un bon moment donc je suppose qu’elle n’est pas si ignarde en maniement des armes qu’elle veut bien me le faire croire. Mais en tant que citoyenne, cela n’est pas un souci, je lui offrirai quelques petites choses pour la remercier de son travail et ça sera moins cher qu’une arme de bonne facture.

Tu as une bonne clientèle malgré le lieu reculé où tu as ta boutique ?

Ce n’est pas commode de devoir faire une telle route depuis Forteresse pour une arme, ça doit impacter durement son commerce… Mais en même temps, il ne doit pas subir des négociations interminables pour un cristal. On ne vient pas ici pour négocier des bouts de chandelles.

ça, c’est parce que vous n’avez jamais eu à leur donner des ordres à longueur de journée en tant que chef. Allez savoir pourquoi, ça les rend plus agressives…

De vraies démones quand elles s’y mettent. Mais comme il dit, suffit de bien les traiter pour limiter les risques de finir avec un poignard dans le dos… Et il y en a, quoi qu’on fasse, elles essayeront toujours comme la petite Oppia. Suivant Lyle, je rentre dans son antre, la forge. C’est pas bien différent des rares forges que j’ai côtoyées. Sombre et surchauffée… Mais là, on peut dire qu’il y a du matos… Il est bien équipé, est-ce qu’il se sert vraiment de tout ? Pendant que j’observe son espace de travail, il se met à fouiller dans ses affaires. Dans une boîte débordant d’armes en tout genre. Difficile de dire avec l’obscurité, mais elles n’ont pas l’air de si mauvaise facture pour être mise ainsi de côté… C’est bien un grand du métier, la qualité est au-dessus du standard. En même temps qu’il cherche, il me répond sur sa clientèle. C’est amusant la façon dont il peut décrire ceux qui arrivent jusqu’à lui.

Il y a des crétins partout malheureusement. N'hésitez pas à venir signaler les incivilités à la Garde, surtout quand ils dégradent vos locaux… Ils payeront pour réparer les dégâts.

C’est aussi notre travail de calmer les ardeurs de certains… Quand on n’est pas capable d’apprécier la qualité au premier regard, on va pas chez un maître artisan. Approchant la table quand il dépose plusieurs armes dessus, je me concentre sur le matériel. Comme c’est gentiment proposé, je prend l’arme présentant une lame déportée. Effectivement, c’est un peu petit pour moi, mon petit doigt ne passe pas. Amusé, je montre le tout à Lyle.

Petite main votre cliente en effet.

Je teste quelques mouvements rapides mais repose rapidement l’arme. Je ne suis pas très démonstratif et c’est bien suffisant pour vérifier ce qui m’importe. La lame déséquilibre trop la masse du poing. Avec un tel changement de répartition de la masse, je doute d’avoir ma pleine puissance avec. Je prend en main ensuite celle qui me semble la plus lourde, masse égale puissance bien souvent. Même procédure, je grimace. C’est lourd et sans nul doute efficace mais je crains que ce ne soit pas assez “létal” en l’état… Je la repose décidant de remettre ma décision à plus tard pour prendre en main le dernier prototype. Plus léger et plus compact, il change nettement moins la répartition de masse de mon poing. Quelques mouvements de bras suffisent à me convaincre.

Celui-ci, il est plus stable entre mes mains. Il est possible d’avoir plutôt des lames à la place des pointes sans trop modifier la répartition des masses ?

Des pointes, c’est un bon début mais n'apporte qu’un maigre effet par rapport à mes outils actuels.

Malheureusement, je comprend la position du forgeron concernant les malotrus qui saccagent sa boutique… Il y a effectivement des risques de représailles avec certains. Je trouve ça particulièrement mesquin de vouloir se venger d’une punition pleinement méritée mais tout le monde n’a pas l’once d’honneur nécessaire pour penser à ces choses là.

Si vous avez pu vous faire indemniser, c’est tout ce qui compte.

Le test des armes prototypes se passe relativement bien. Je souris au commentaire de Lyle concernant celle à qui était destiné ces prototypes. Pour manier une telle arme, elle serait assurément une adversaire de taille. Je suis nouveau dans le coin mais je me renseignerai, cela ne pourra être que bénéfique de croiser le fer avec cette dame aux poings d’acier. J’écarte assez rapidement deux modèles pour n’en conserver qu’un à l’équilibre et à la masse agréable entre mes mains. Mais les pointes ne sont guère à mon goût, trop peu létales pour l’usage auquel je destine ces armes. Un sourire taquin apparait sur mon visage à la mention de la difficulté de ma demande. Mais il est sûr d’avoir réussi d’ici une semaine. Avec une nouvelle tape sur l’épaule, je taquine le jeune homme.

N’est-ce pas pour l’impossible qu’on vient voir un maître ?

Je prends quand même le temps de réfléchir à mes besoins en termes d’équipements. Tant qu’à être ici, autant en profiter un peu. La dotation de la Garde n’est pas mal quand il s’agit de tout porter mais pièce par pièce, elle n’est pas très utile. Contre les humains, je ne crains pas grand chose, ils sont extrêmement prévisibles mais c’est autre chose avec les monstres venant de l’autre côté de la frontière, il serait peut-être bon que je prépare quelques protections pour augmenter ma capacité de défense.

Vous seriez capable de fabriquer des bazubands et des gréves ? Quelque chose de léger sans fioritures ? Juste le nécessaire pour que les griffes d’un monstre ne les traversent pas.

Je n’ai pas besoin de choses brillantes et finement gravées. Je laisse ça à la Garde Royale, je veux juste de l’utile et du résistant. Je range dans ma mémoire le nom qu'il me donne. Java... Cela ne me dit rien mais je ne connait pas l'ensemble des troupes de Forteresse, j'interrogerai Bridget pour ça à l'occasion.

Ma commande s’allonge finalement plus que prévu… Cela reste un matériel nécessaire, je ne vais pas avoir affaire uniquement à de petits brigands dans le coin. Il y aura certainement des monstres dans le tas avec la proximité de la frontière avec les terres gelées. Comme il le dit si bien, cela ne me préservera pas d’un dragon mais soyons réaliste, qu’est-ce qui pourrait vraiment nous en protéger ?

Promis, je ne viendrais pas me plaindre de tes créations si cela venait à se produire. Mais j’espère que cela n’arrivera jamais, ce serait une catastrophe…

Il sera sûrement plus efficace d’évacuer les populations et d’attendre qu’il reparte que d’essayer de l’affronter. Des monstres comme ça, il est presque impossible de lutter sans des moyens énormes. On verra pour envoyer les aventuriers au casse-pipe, l’appât d’une gloire illusoire, ça marche bien avec eux. Lyle semble quand même mal à l’aise avec l’idée de me voir perdre un bras à cause de ses propos.

T'inquiètes pas, j’arracherai le bras de mon ennemi avant qu’il arrive à me prendre le mien.

A défaut, je le sentirais venir donc peu de chance d’être pris au dépourvu. Je suis le forgeron jusqu’à l’extérieur. Inutile de rester plus longtemps dans l’obscurité et la chaleur pour le moment. Là, il me propose de m’accompagner jusqu’à son magasin ou que l’on se retrouve dans une dizaine de jours pour récupérer mes armes et chercher le reste de ma commande.

Tu étais en plein travail à mon arrivée, je m’en voudrais de te déranger plus. A moins qu’il était déjà prévu que tu t'y rende maintenant ?

J’ai déjà abusé en me pointant directement chez lui, ce serait abusif de ma part de l’obliger à abandonner son travail en cours.

Va pour dans quelques jours alors ! Je saurais être patient et attendre devant votre boutique cette fois !

J’éclate de rire, c’est quand même bien bête de ne pas avoir su plus tôt qu’il y avait une boutique. Cela m’aurait éviter de paraître pour un malotru même s’il l’a plutôt bien pris. Je serre la main du forgeron scellant par la même une forme de contrat tacite pour la création de mes armes. Pas besoin de contrat papier entre hommes d’honneurs… L’accord conclu, je retourne vers mon cheval pour reprendre ma route vers les avant-postes des Sentinelles. C’est un travail peu intéressant que de faire le tour des Avants-postes mais nécessaire pour moi qui vient de prendre mes fonctions de lieutenant. Il faut bien s’imprégner du travail de ses équipes.




La tournée est plus harassante que prévu. La première partie s’est plutôt bien passée mais une fois arrivés aux avant-postes les plus éloignés, les choses ont été bien différentes… Est-ce parce que l’information circule mal jusque là-bas ? Ou qu’ils sont un peu récalcitrant à un commandement venu du centre névralgique local ? Je ne saurais pas le dire pour l’heure, mais les choses vont devoir changer à partir de maintenant. Aussi expérimentés soient-ils, les ordres doivent être suivis et exécutés comme attendu. N’en faire qu’à sa tête, c’est perdre des vies inutilement. Un dur travail d’adaptation nous attend tous… Eux à mes méthodes et à ma vision des choses, moi à leur tempérament… Mais pour l’heure, il est temps de rentrer à Forteresse avec un crochet à la Forge d’Obsid. Trouver la fameuse boutique de Lyle n’est pas aussi simple que je le pensais… J’ai eu plus de facilités à trouver sa forge à vrai dire. Tourner en rond dans la zone géographique à la recherche d’un bâtiment isolé, c’est un peu comme jouer au dés. Il faut parfois du temps pour gagner. Et c’est mon cas aujourd’hui… Mais j’arrive finalement face à la boutique. ça paye pas de mine de l’extérieur comme la forge de l’artisan. Mais ce n’est pas la gueule de la boutique qui compte à mes yeux, c’est ce qu’on trouve à l’intérieur. J’essaye de pousser la porte mais celle-ci est fermée. Lyle ne doit pas être là pour le moment. Il faut savoir profiter des moments de malchances, autant piquer un somme en attendant. Cheval attaché à un arbre, je m’adosse au tronc pour une petite sieste improvisée en attendant que le patron descende par ici.

Une bonne sieste ! Rien de mieux pour revigorer un corps sain accompagné d’un esprit pas sain du tout. Au moins, dehors, il n’y a pas ce crépitement désagréable d’un feu dans la cheminée. Plutôt crever de froid que de dormir à côté de ça. La sieste ne me paraît pas si longue que ça lorsqu’on me réveille à petit coups dans le pied. Pas de sensation de danger, aucune nécessité de bondir et casser une tête sur un arbre. Sans spécialement bouger, je lève la tête vers l’opportun qui me réveille. Je souris au commentaire du jeune homme au visage connu. 200 piges, hein ? Une vraie bonne sieste ça ! Je me relève en prenant appui sur le tronc d’arbre.

Hé bien mon pauvre, après deux cents piges, t’a pas trouvé mieux qu’avoir la même gueule que ton vieux ? Va falloir dire à vos femmes d’imposer un peu plus leur style chez vous… Crois-moi, ça met un peu de piment dans la vie !

Sans déconner, je plaint la série de mioches qui ressemblerait tous traits pour traits à leur daron… Un petit blondinet dans la famille, ça fait jamais de mal. Sauf quand c’est celui du voisin. Au moins ma commande est prête ! En même temps, après deux cents ans, vaudrait mieux…

ça s’est bien passé Lyle-junior, j’espère que tu t’es pas abîmé la santé pour sortir tout ça en temps et en heure ?

C’est pas mon objectif… Un forgeron mort, c’est un forgeron qui travaille pas ! Faut en prendre soin de ces petites choses, on en trouve pas des biens à tous les coins de rue. Je me tourne vers la porte de la boutique.

Donc c’est ça ta boutique ? Simple et efficace de l’extérieur. Le trésor est caché à l’intérieur ?

Pas de superflus, juste du fonctionnel. A l’image du proprio en somme. J’aurai été surpris de trouver une boutique qui pue le luxe à dix kilomètres à la ronde vu le tenancier.

L’ours se réveilla doucement de son arbre, prenant rapidement de la taille face à toi, mais ne s’énervant pas de son soudain voyage dans le temps ou la mauvaise blague, mais jouant directement le jeu. Il répliqua que les femmes devraient même plus leur style chez vous… AHHHH ! Il pensait que tu étais le petit-petit-petit-fils de toi-même. Tu souris alors, croisant les bras et rigolant. « Ahahah ! Pas besoin de changer ce qui est parfait ! J’en suis la preuve même ! »

Un gros mensonge et tu savais parfaitement que tu n’étais PAS parfait et encore plus que le parfait n’existait pas. Rien ne pouvait être parfait. Si quelque chose devenait parfait, le monde en serait bouleversé de plein de façons. Ray continua la petite déconnade entre vous deux, mais montra qu’il s’inquiétait encore pour toi, surtout pour sortir ça à l’heure. Tu haussas les épaules, gardant ton sourire. « On verra cela après, si ce que j’ai fait a valu le coup, alors c’est très bien. Si ce que j’ai fait est inutile, alors j’aurai du plus me gâcher ma vie en forgeant tes armes. Et ensuite, je ne suis pas le descendant du forgeron que tu as rencontré, je suis le même, je ne vieillis juste pas ! Immortel ! »

Tu le guidas alors vers le magasin, l’extérieur était très simple et classique, rien de plus rien de moins. Tout ce qu’il fallait sans pour autant déborder… Et Ray demanda même si le trésor se cache à l’intérieur. « Tout peu être un trésor dans les yeux de certaines personnes… Et là… Bah, on finit toujours trouver un trésor dans un bazar non ? » Tu ouvris les portes du magasin, faisant découvrir à l’ours l’intérieur de ton chez-toi. Et le terme bazar n’était pas une blague. Chaque tonneau, porte arme, armoire et étagère étaient recouvert d’arme en tout genre. Le magasin semblait presque en déborder. Tu guidas Ray à travers un chemin sinueux menant au comptoir où les meilleures armes se trouvaient… Des armes si efficaces que les prix étaient juste impossibles… C’était des armes "à vendre" mais tu ne comptais jamais les vendre, plutôt les donner à ceux qui seront dignes selon toi.

Tu sautas derrière le comptoir avant de te pencher et te relever en sortant les armures qu’il avait commandées. Une paire de Bazuband et grèves argenté propre et brillante.  « Voilà, faudra juste les ajuster, mais c’est pour les armures. J’ai pas fait de superflu, acier trempé en plusieurs couches, ça ne cassera pas et si ça prend un coup violent, ça se pliera, mais protégera du coup sans mal. Évite donc les attaques trop lourdes. »

Tu te penchas à nouveau commençant à retourner plusieurs trucs. « Pour tes armes, j’ai deux modèles, tu prendras ton préféré. L’un est plus solide et plus lourd, mais risque pas de casser si il absorbe un mauvais coup, l’autre à pas la résistance, mais un tranchant digne de mes plus bonnes lames… Pas mes meilleurs, mais elles sont vraiment pas mal. »

Tu te relevas, déposant deux paires sur la table. L’un était gris foncé sans le moindre détail. Très rustique en apparence, mais semblait être aussi solide qu’une montagne. L’autre était bien plus légère, plus affiné, et souple, les lames ayant plus de porté, avec avec une parfaite prise en main.« Fait ton choix… »



HRP :
- Premières paires de poing d'acier :

Spoiler:

- Deuxièmes paires de poing d'acier :

Spoiler:

C’est bien là un vrai maître, toujours à prévoir de laisser sa vie pour obtenir un niveau de qualité maximum… Pas de ce soit louable mais c’est quand même dommage de se sacrifier pour un bonus de performance très faible. On va dire que c’est ce qui fait le fossé entre un forgeron passable et un maître. Je ne relève pas la révélation de son immortalité… Vérité ou nouvelle plaisanterie, je serai bien en peine d’affirmer l’un ou l’autre. Un immortel, ça doit bien exister quelque part dans le royaume, ce n’est pas parce que j’en ai jamais rencontré que ça existe pas. ça doit être bien pratique pour s’exercer et devenir un maître… Pas de limite de temps ni de perte de capacités physique au fil des ans. Peut-être aussi pour ça qu’il est en hermitage, ça doit être pesant de voir ses amis mourir de vieillesse en permanence. Je suis Lyle jusque dans la boutique. Le fameux bazar qu’il évoque me tire un sifflement admiratif. Même l’armurerie de Forteresse n’est pas aussi fournie en matériel… Et tout ce que je peux voir m’a l’air d’être d’une bonne facture, pas de la merdre fabriquée à la chaîne sans aucune attention. La curiosité est forte alors qu’on avance entre les tonneaux et présentoirs. Par moment, je m’arrête pour tirer une arme par-ci par-là.

C’est toi qui a forgé tout ça ? C’est un sacré bon boulot !

Largement de quoi faire pâlir les forgerons qui nous fournissent en temps normal et mettre des étoiles dans les yeux de bien des gardes. Je m’immobilise devant le comptoir comme tout bon client qui se respecte pendant qu’il passe de l’autre côté. J’en profite pour regarder les armes présentées derrière lui. Là, on n’est plus du tout dans la même cour… C’est le top du top de l’armement. Des armes créées avec tout le talent et la minutie d’un maître et qui méritent un propriétaire bien meilleur que moi. Je sais à qui envoyer mes subalternes au moins. Le forgeron sort les pièces d’armures en premier et me présente son travail. Les pièces métalliques sont sobres mais respirent la résistance, tout ce qui m'importe. Je tapote du doigt le métal le faisant tinter légèrement. J’apprécie ce son pur et délicat du métal dans son plus simple appareil.

Exactement ce que je recherche. Je peux essayer ?

Certains diraient certainement que je suis trop pressé comme un gamin. Mais avant tout, Lyle passe à ma commande principale : les armes. Et il n’a pas chômé puisqu’il me présente deux modèles différents. Je remet à plus tard l’essayage pour me concentrer sur ce qu’il me propose. Deux modèles, l’un plus résistant que l’autre mais aussi peut-être un peu moins efficace… Cruel dilemme que voilà. Je soupèse les deux modèles en prenant un dans chaque main. Rien de rédhibitoire à ce niveau, c’est largement satisfaisant à mon goût pour les deux modèles.

Pas le choix ! Faut que j’essaye tout ça ! Tu aurais pas une bûche de bois à sacrifier par hasard ? Tu pourrais la tenir ou me la lancer dessus ?

Je vais quand même pas cogner sur un arbre bien vivant pour essayer mes armes, ce serait dommage de faire souffrir un être vivant comme ça. On pourrait dire que l’ours a fait ses griffes sur un arbre mais bon, pas mon style.

Aller, on va d’abord essayer les armes avant de s’attaquer aux pièces d’armures. C’est surtout une excitation toute enfantine qui me pousse à faire ce choix. Un nouveau jouet, ça s’essaye tout de suite, non ? Lyle ne refuse pas ma demande même s’il soupire. Est-ce qu’il a l'impression que je doute de son travail ? Ou juste que ça l'ennuie ? Impossible de répondre à la question alors je la range dans un coin obscur de ma tête en suivant. En prenant les quatre armes, je me rends mieux compte de la différence de masse entre les deux modèles. Cela ne me gênera pas, elles sont bien plus légères que ce à quoi je m’attendais, mais elle est bien présente. Pendant que Lyle va chercher du bois, je pose la paire la plus légère. Je pense qu’il vaut mieux commencer par la paire la plus lourde, je sentirais mieux la différence dans mes muscles. Revenu avec deux belles bûches, il annonce qu’il ne les tiendra pas. Il ne veut pas être blessé par les éclats de bois qui vont invariablement voler à l’impact.

Pas de soucis, po…

Ah bah non… Il me la lance dessus. Pas du tout prêt pour la réception, je sens la bûche qui pénètre dans mon aire de contrôle. Elle arrive vite mais pas assez pour me surprendre. La force de l’habitude de suivre la trajectoire en direct des choses autour de moi, ma garde est rapide et instinctive. Le choc des griffes sur le bois est mesuré mais je ressens les multiples éclats de bois qui se forment et volent dans tous les sens. Sous l’impact, la bûche est expulsée à ma droite. La sensation est agréable, les lames ont bien mordu le bois sans que je ressente une grosse pression. Mais surtout, le poids donne une sacrée puissance d’impact.

J’aime bien, la sensation de puissance est vraiment là. J’ai l’impression que le poids aide les lames dans leur découpe… On passe à l’autre paire ?

Je change rapidement d’armes avant que le forgeron décide de m'assommer en lançant la seconde bûche. Une fois en position, la bûche prend une trajectoire similaire parfaite que j’essaye le même mouvement. Cette fois, moins d’éclats se forment et je ressens une importante résistance dans le bras. Moins de masse pour imposer le changement de direction au bois… La bûche change bien moins de direction après le choc. En regardant la bûche, je constate que les griffes ont bien mordu dans le bois mais moins profondément. J’ai pourtant l’impression d’avoir frappé à peu près pareil dans les deux cas… Ces griffes là, elles auront plus d'efficacité sur des matières peu résistantes qu’elles trancheront sans se coincer. Pas facile de faire un choix. D’une griffe, je me gratte le bout du nez. Privilège de celui qui connaît la position exacte de son arme, je ne risque pas grand chose à faire ça.

Pas simple tout ça… Celle-ci sera plus efficace sur des chaires molles et l’autre pour des choses plus solide…

Pour traverser une armure, je parierai plus sur la première paire mais face à un monstre, j’opterai certainement pour la seconde… Il faut bien pourtant faire un choix…

Tu me fais la paire à combien ? Et le total avec les autres pièces ?

Peut-être que cela soldera mon problème de choix. Si je peux, autant partir sur les deux pour une meilleure polyvalence...