La sombre Cheeko n'a pu qu'être aperçue qu'aux mêmes endroits et aux mêmes moments. Ses heures de "sortie" ne semble ni changer, ni varier. Elle fait acte de présence pratiquement chaque jour de la semaine, et les citoyens qui habitent dans les environs ou bien les quelques commerçants qui passent par là régulièrement ne le savent que trop bien. Depuis son retour à la surface, elle n'a fréquenté que les bords de la Capitale où elle continue d'essayer d'échanger plantes et carcasses contre des cristaux. Certains civils pensent qu'elle ne tente pas de marchander comme à l'époque. Cette humaine à l'apparence d'un monstre de la nuit attend peut-être une proie à capturer.
En ce début de soirée, elle est encore une fois présente à sa manière. A l'entrée de la forêt, à proximité d'un premier arbre, on peut y retrouver plusieurs sacs en tissu usés déposés l'un à côté de l'autre. La plupart contiennent des plantes en tout genre, les autres contiennent de la viande venaison franchement extraite de leur malheureux propriétaires. Vu les morceau, il n'est pas bien difficile pour un œil aguerri de deviner qu'il s'agit bel et bien de viande animale, mais quelqu'un de moins expérimenté pourrait croire autre chose. Cheeko, quant à elle, n'est pas visible.
Elle est pourtant bel est bien là.
Cachée.
Proche.
Invisible.
D'après les quelques rumeurs qui circulent depuis quelques temps déjà, certaines personnes -des imprudents- ont déjà tenté de s'approcher pour s'emparer de ces sacs et de filer avec. D'autres, non pas mal intentionnées mais pas forcément plus malignes, ne savaient simplement pas à qui étaient ces affaires et pourquoi elles étaient posées là sans personne pour les surveiller et se sont donc approchées pour les examiner, et certainement, tenter de les rapporter à la Garde. Tous ont pu constater que ces marchandises étaient bel et bien surveillés et ce d'une manière qui explique en partie ce pourquoi tout les habitants du coin sont inquiets pour leur sécurité.
Peut-être aurez-vous entendu parler de ces quelques rumeurs, peut-être que quelqu'un vous a résumé la situation. Peut-être venez vous ici avec un objectif ? Ou arrivez-vous sans aucune idée de ce qu'il se passe par ici ? Il n'est pas impossible que vous ignorez tout de cette histoire de sauvageonne potentiellement dangereuse. Dans tout les cas, vous qui approchez de ce lieu, de vos yeux vous ne pourrez voir que ces étranges sacs à l'entrée de la forêt alignés devant un arbre. Et peut-être que, si votre regard a été entraîné, remarquerez-vous aussi ces étranges orbes dorés qui vous observent à travers les feuillages.
1re lune de la saison douce de l'an 1001
Elle empaqueta ses choses, attacha à sa ceinture sa dague, sa gourde et son carquois, glissa son sac dans son dos, attacha son arc avec des sangles et descendit à l’étage inférieur. Elle alla directement au comptoir, pas pour commander à boire pour la route, mais pour payer ce qu’elle devait.
Le tenancier la regarda. Elle regarda le tenancier. Il sembla s’intéresser à son arc. Elle ne bougea pas. Il la détailla du regard. Elle resta impassible. Il lui dit finalement : - On peut s’arranger autrement, pour le paiement, j’ai une --, Evelyn ne le laissa pas terminer sa phrase, elle lui dit d’un ton sec :
- J’suis pas intéressée par c’que t’as, ou n’as pas. Pas intéressée, surtout, par le paiement en nature que semblait suggérer l’homme; il avait « une chambre à l’arrière » avait-il certainement eu l’intention de dire.
Une méprise, le tenancier continua : - ...Une proposition. J’annule ta dette, si tu t’occupes de me débarrasser d’une sauvageonne qui traîne dans l’coin. Elle fait fuir la clientèle! Evelyn rit, et ce qu’elle lui répondit était méchant mais vrai : - C’qui fait fuir ta clientèle, c’est le manque de propreté des lieux et ta cuisine médiocre. Elle entendit un homme, assis non loin à une table, rire sans se cacher. Le tenancier bafouilla, outré, et plaida que son établissement était mieux que bien des établissements qu’on pouvait retrouver dans la capitale. C’était peut-être vrai, c’était peut-être faux, Evelyn s’en moquait bien. – Bref, dit-elle pour couper court au monologue du tenancier. – Rajoute la chambre pour cette nuit, et c’est bon, j’accepte.
Il accepta même de lui laisser gratuitement la chambre pour le reste de la semaine. L’homme était soit désespéré, soit il aimait la compagnie et les beaux yeux d’Evelyn. Peut-être un peu des deux. Elle demanda des détails. La seule chose à retenir était que la présence de cette femme inquiétait tout le monde. ...Il ne fallait pas grand chose, pour effrayer le petit peuple. Enfin, peu importe, de l'alcool et une chambre payés, elle n'allait pas refuser ça. Ce qu'elle devait faire? Parler à une femme. Le nom de cette femme? Le tenancier n'avait pas su le retenir et avait réduite l'étrangère au nom de "sauvageonne". Elle plissa des yeux : c’était peut-être lui, le sauvage, à vouloir qu’Evelyn demande à une femme d'aller se promener ailleurs parce qu'elle effrayait supposément la clientèle.
Quoi qu’il en soit, elle se dirigea vers le lieu qu’on lui indiqua et s’arrêta à une dizaine de pas de l’entrée de la forêt, face à plusieurs sacs en tissus; le contenu de ses sacs intéressait peu Evelyn. Elle promena son regard, puis leva les yeux vers les arbres en direction de deux orbes lumineux. Bien… Bien… Par quoi commencer? Une dose de politesse?
- Bonsoir!, dit-elle assez fort pour se faire entendre. Voilà, la politesse c’était fait, maintenant les choses sérieuses : - Montrez-vous, je souhaite seulement discuter.
Son arc était retenu à son carquois de hanche par deux sangles. La main droite d’Evelyn reposait tranquillement sur une extrémité de l’arc. Le comportement de l’étrangère était insolite, pensa soudainement Evelyn. Pourquoi se cacher? Laisser des sacs à la vue? Souhaitait-elle se les faire voler? Une excuse pour attaquer les gens? Cette « sauvageonne » était peut-être effectivement dangereuse; Evelyn commença à se méfier.
Juste là.
Elle.
Elle n'a pas observé bien longtemps les sacs de la sauvageonne. Son regard a rapidement scanné les alentours, et a cessé de se déplacer dès lors qu'il s'est posé sur Cheeko.
Non.
Non non non.
Non.
Qui que soit cette femme, elle cherche la sombre marchande.
Qui que soit cette femme, elle a trouvé la sombre marchande.
??? : "Bonsoir! Montrez-vous, je souhaite seulement discuter."
Rares sont les personnes qui ont souhaité discuter avec la sauvageonne. Rares sont celles qui on pu la contacter et repartir sans une griffure. Les autres ont tenté de pourchasser Cheeko, mais Cheeko s'échappe à chaque fois. Cheeko sait mieux que ça. Cheeko voit. Cette main posée sur cette arme, elle parle à la place de la femme. Elle parle des mots dangereux. Elle est comme les humains en armure. Comme eux. Dangereux.
Dangereux.
Danger ?
Danger.
Quittant sa position dans l'arbre, Cheeko descend à son arrière de sorte à ce qu'elle ne soit pas dans le champ de vision de l'inconnue. Le son que ses déplacement font ne sont pas inaudibles, mais ils restent faibles. De nouveau les pieds au sol, la sauvageonne se dépêche de faire le tour à quatre pattes jusqu'à pouvoir se trouver à portée de ses sacs, de ce fait, de se retrouver de nouveau mais partiellement dans le champ de vision d'une potentielle menace à sa vie. Une fois à portée, elle ne bouge plus. Elle ne tend même pas un bras pour récupérer ses affaires. Elle reste là, immobile, mais prête à ramasser ses sacs et à s'enfuir dans la forêt à toute allure. En aurait-elle seulement le temps ? Qu'importe, l'heure n'est pas à cette réflexion. Du moins, pour l'instant.
Cheeko : "Tu pas vouloir parler. Que tu vouloir ?" Dit-elle, la prudence sondable dans le son de sa voix abimée.
Les mots n'étaient pas prononcés avec tant de force que ça, mais le silence qui règne ce soir permettra à l'inconnue d'entendre assez clairement la sauvageonne. Au moins aussi clairement qu'elle la voit.
1re lune de la saison douce de l'an 1001
Immobile, se tenait Evelyn, fixant l'inconnue. Sans animosité sur son visage, mais également sans bienveillance. Elle était armée, oui; dans ce monde, qui ne l'était pas? Son visage était sérieux, oui; c’était son air naturel et l’étrangère ne lui avait pas encore donné une raison de sourire.
Il y avait quelque chose d’étrange avec l'inconnue. Elle effrayait les habitants du coin. Il y avait une raison bien simple à cela : elle était différente. La différence effrayait toujours. Cela n’effrayait pas Evelyn, mais elle se méfiait. C’était dans ses habitudes de se méfier et l’étrangère ne lui inspirait aucune confiance.
- Tu pas vouloir parler. Que tu vouloir ?
Un début de conversation. C’était bien, Evelyn allait pouvoir expliquer à l’autre que sa présence nuisait aux commerçants du coin et à l'état psychologique des gens. …Comment expliquer cela à l’inconnue sans l’insulter?
À la question qui lui était posée, Evelyn répondit simplement :
- De l’alcool et un lit confortable. Il était vrai qu’elle ne souhaitait pas vraiment discuter; son seul désir était qu’au terme de cette rencontre elle obtienne alcool et logement gratuits. Elle demanda : - Toi, tu veux quoi? Des cristaux en échange de tes sacs? Ou seulement effrayer les habitants du coin?
Ces mots résonnent presque dans l'esprit de la sauvageonne. Ils lui disaient quelque chose. De vieux mots qu'elle avait collé à de vieux sentiments oubliés plutôt qu'à deux objets servant au bonheur de certains et d'autres. Elle se souvient brièvement d'avoir goûté au premier mot. Elle se souvient d'avoir beaucoup aimé le second. Mais à quoi correspondaient-ils exactement ? Essayer de se souvenir... Ca lui donne mal à la tête. L'étrangère poursuit.
??? : "Toi, tu veux quoi? Des cristaux en échange de tes sacs? Ou seulement effrayer les habitants du coin?"
Cristaux, sacs, les deux alignés dans la même phrase... *Cliente !* Sans bouger pour autant, Cheeko laisse s'échapper un léger soupir à peine audible. Un soupir de soulagement, ou de surprise, peut-être des deux. Après quelques secondes de silence pour considérer l'idée, elle décide de sortir un peu de l'arrière de son arbre. Non pas pour sortir complètement à découvert, mais pour cette fois-ci se cacher juste derrière ses sacs. De cette manière, elle serait un peu plus visible aux yeux de l'étrangère, et la communication en serait peut-être plus facile.
Cheeko "Cheeko vouloir cristaux. Cheeko do... Donnoir sac."
Pour compléter ses paroles, la sauvageonne glisse l'une de ses mains jusqu'au sommet de l'un de ses sacs. Celui contenant des carcasses d'animaux. Se saisissant d'une sorte de lacet, elle tire dessus afin de permettre au sac de s'ouvrir, et de permettre à une odeur de cadavre pas forcément plaisante de se répandre sur la scène. Ce geste avait pour but principal de prouver à l'étrangère que la sauvageonne ne mentait pas. L'odeur, en revanche, avait pour but de... Et bien... Méditez donc là dessus !
1re lune de la saison douce de l'an 1001
Cheeko, s’appelait donc l’étrangère, et non pas "sauvageonne" comme aimait l’appeler le tavernier. Evelyn aurait au moins un nom à donner à l’homme, pour parfaire son éducation. Et elle aurait une histoire à lui raconter, ce qui lui vaudrait peut-être une bière ou deux; on ne racontait pas une histoire la gorge sèche.
Cheeko voulait donc des cristaux. Des sacs, offrait-elle en échange. L’inconnue tira sur les cordes d’un des sacs, semblant croire qu’Evelyn était une cliente. Ainsi donc, cet endroit était pour Cheeko l’équivalent d’un kiosque de vente. …Si elle désirait des cristaux, pouvait-on en conclure qu’effrayer les habitants arrivait par accident? La sauvageonne avait-elle seulement conscience de créer un climat de crainte dans la communauté?
Une odeur désagréable, rance, se dégagea du sac, empesta les lieux. La viande n’était plus bonne, ce qui n’était d’aucun intérêt pour Evelyn. Elle leva la main gauche – la droite se servant toujours d’une extrémité de son arc comme repose main – pour signifier d’un court geste qu’elle n’était pas intéressée, et elle expliqua brièvement :
- Je chasse, moi-aussi. C’est mon métier.
La compréhension de l’autre semblait limitée, ce qui fit hésiter Evelyn sur la suite des choses. Comment expliquer à Cheeko qu’elle devait se balader ailleurs? Comment le lui faire comprendre? …Cheeko ne désirait apparemment qu’une seule chose : des cristaux. Une idée vint alors à Evelyn :
- Aucun cristaux ici, les gens sont pauvres.
Ce n’était pas totalement un mensonge; si les habitants du coin avaient de l’argent, n’habiteraient-ils pas dans la belle Capitale? Evelyn continua sobrement :
- Tu dois aller ailleurs, partir.
Ce que faisait ou ne faisait pas Cheeko de sa vie intéressait peu Evelyn. …Cependant, à bien y penser, c’était peut-être de rendre service à cette femme que de lui dire d’aller dans un autre endroit, car si les habitants ici étaient effrayés, ils ne devaient effectivement pas acheter grand-chose à Cheeko.
L'étrangère serait donc une chasseuse. Au vu de son geste, elle ne semble pas intéressée par ce que Cheeko a à vendre. Alors... Que veut-elle ?
??? : "Aucun cristaux ici, les gens sont pauvres. Tu dois aller ailleurs, partir."
Aucun cristaux ? Voilà qui expliquerait pourquoi les gens ne viennent rien acheter à cette sauvageonne qui n'est pas consciente du simple fait qu'elle effraie la population des alentours. Si ils n'ont pas de cristaux, sûrement, Cheeko n'en récupérera pas non plus.
*Souvenirs de Cheeko pas être mensonge.*
Pourtant elle se souvient. Elle a souvent marchandé ici, à cet endroit précis. Des souvenirs qui ne font aucun sens, mais c'est là la seule chose à laquelle elle peut se raccrocher. Elle est convaincue que les gens ont des cristaux, elle est convaincue qu'elle peut faire comme elle faisait il y a deux ans. Elle pense qu'elle peut simplement attendre et que les clients viendront comme avant. Ca n'arrivera pas, et elle n'est pas capable de le comprendre.
Cheeko "Cheeko savoir meilleur que chasseuse."
Cependant, la situation ne lui plaît pas. Clairement, la chasseuse n'est pas ici en tant que cliente. Si elle n'a pas tout de suite fait preuve d'hostilité, son arc semble prouver le contraire à la sauvageonne. Les choses peuvent dégénérer. Cheeko a encore moyen de partir avec ses marchandises. Elle n'a pas besoin de prendre la poudre d'escampette en perdant toute ses affaires alors qu'une pluie de flèche lui tombe sur le dos car elle aurait décidé de s'obstiner à rester ce soir.
Elle peut faire plus simple et moins risqué. Elle s'approche un peu, juste pour pouvoir refermer le sac qu'elle avait ouvert. Elle les attrape ensuite tous par leur ficelle et se met à les traîner dans le but de retourner dans la forêt sans quitter la chasseuse du regard.
Si elle part ce soir...
Cheeko "Cheeko reviendre."
... Elle reviendra demain.
[HRP : A moins que tu n'ai quoi que ce soit d'autre à ajouter/si tu as encore de quoi faire interagir Evelyn avec Cheeko, fais toi plaisir ! Autrement la sauvageonne va juste quitter les lieux pour la nuit et probablement revenir le lendemain.
]
1re lune de la saison douce de l'an 1001
-Cheeko se trompe, répondit simplement la chasseuse, sans intonation. La femme avait certainement raison de croire que les gens ici avaient des cristaux, qui n’en avait pas? Mais ils n’avaient aucun cristaux à dépenser auprès de Cheeko la revendeuse de produits à la qualité douteuse et à l’attitude étrange.
Mais voilà que Cheeko décida que la conversation était terminée. Elle referma son sac, ce qui était une bonne chose parce que l’odeur était désagréable, attrapa tous ses sacs et s’enfonça dans la forêt. Evelyn ne chercha pas à l’arrêter et n’entendit pas ce que la femme marmonna, mais ce n’était pas très important. Elle attendit que Cheeko ne soit plus dans son champ de vision pour retourner à la taverne. Le tavernier insista : si Evelyn désirait que sa dette soit effacée, il devait s’assurer que la sauvageonne ne reviendrait pas le lendemain! …Bon. D’accord. Evelyn passa donc la soirée à boire en bonne compagnie; se bourra la gueule, retrouva difficile son lit et s’endormit comme une masse.
Le lendemain, en début de soirée, alors qu’elle était en conversation animée avec le tavernier, un homme arriva pour leur dire que la sauvageonne était de retour. Evelyn crut bon de préciser : - C’est Cheeko son nom, pour info. L’homme s’en foutait bien, le tavernier aussi, et ce dernier précisa : - Si t’y retourne pas, j’efface pas ta dette, pour info. Bon. Quelle connerie, elle n’allait pas y passer la semaine! Sans joie, Evelyn retourna donc à l’orée de la forêt. Les sacs étaient bien visibles.
- Cheeko, appela-t-elle alors, espérant que la femme se manifesterait. Elle s’approcha d’avantage que la veille, de plusieurs pas. Elle n’avait pas son arc aujourd’hui, l’ayant laissé à sa chambre, mais elle avait toujours une dague bien visible dans un fourreau à sa ceinture. Elle continua :
- Je veux juste t’aider. Les gens ici ne t’achèteront rien. Quoi que si Evelyn devait dire la vérité, peut-être qu’ailleurs non plus. – Y’a un village à quelques kilomètres, par-là, plein de cristaux, dit-elle en pointant une direction de la main. - J’peux t’y accompagner.
Repartir à zéro ailleurs. Ici sa réputation était faite, les gens étaient effrayés, pourquoi cela changerait-il? Pourquoi se donner la peine de se rebâtir une réputation? …Ah, pas une mauvaise idée, mais Evelyn n’avait pas une semaine à consacrer à Cheeko; elle avait déjà le trajet du retour jusqu'au Village Perché à faire, plusieurs jours de marche.
Elle est là.
Cachée.
Proche.
Invisible.
Cheeko attend. Personne ne vient.
Cheeko attend. Toujours personne.
Cheeko attend.
...
Quelqu'un.
Malgré la nuit, la sauvageonne parvient à reconnaître la chasseuse de la dernière fois. Cette fois-ci, cette dernière ne perd pas de temps à interpeller Cheeko. *Encore elle. Pas cliente.* La sauvageonne ne se montre pas, mais elle peut toujours être remarquée dans son arbre à travers les feuillages à cause de ses yeux dorés reflétant le peu de lumière qu'il y a en cette nuit. La chasseuse continue en faisant quelques pas en avant.
??? : "Je veux juste t’aider. Les gens ici ne t’achèteront rien."
Cheeko ne réagit pas.
??? : "Y’a un village à quelques kilomètres, par-là, plein de cristaux, j’peux t’y accompagner."
Cheeko ne réagit pas directement. Elle a bien l'intention de répondre à l'étrangère, mais elle prend avant cela une dizaine de secondes pour se demander pourquoi elle se fait déranger de la sorte. Pourquoi l'inconnue veut-elle que la sauvageonne aille gagner des cristaux ailleurs ? Pourquoi tient-elle tant à ce que la sauvageonne ne reste pas à cet endroit ? Cheeko ne comprend pas. Elle n'a aucune raison de quitter le seul endroit proche de la civilisation dont elle se souvient. L'idée de gagner plus de cristaux ailleurs ne semble même pas l'attirer.
Cheeko "Cheeko peur." Commença-t-elle, révélant ainsi sa position dans les branches de son arbre habituel. "Cheeko rester."
Elle n'élabore pas plus.
1re lune de la saison douce de l'an 1001
- Cheeko peur. Cheeko rester.
Ce n’était peut-être pas Cheeko qu’il fallait éduquer, mais les habitants du coin : leur faire comprendre que la sauvageonne était davantage effrayée qu’eux pouvait l’être; la sauvageonne avait peur de partir et elle avait peur de se montrer. Mais Evelyn n’avait envie d’éduquer personne. Et ce n’était pas à un mur qu’elle s’adressait, mais à l’équivalent d’un enfant. Elle passa sa main droite sur son visage qu’elle frotta. La chasseuse se sentait soudainement lasse. Sa main glissa de son visage, elle soupira et dit d’un ton monotone :
- Alors Cheeko n’aura aucun cristaux. Parce que Cheeko effraie les gens. Parce que Cheeko ne comprend pas. Parce que la viande de Cheeko est mauvaise.
Evelyn recula, sans tourner le dos à la sauvageonne, sur le point de l'abandonner à son sort. La chasseuse ne faisait pas dans l’humanitarisme. Elle avait souhaité obtenir de l’alcool gratuit, et pendant un très bref instant elle avait réellement souhaité faire comprendre à la sauvageonne que son avenir pouvait être meilleur ailleurs; aucun de ses souhaits ne se réalisera aujourd’hui. Mais ce qui était vraiment décevant, c’était le temps qu’Evelyn avait gaspillé. Cependant, en y pensant bien, elle avait l’intention d’obtenir un rabais auprès du tavernier pour ses pourparlers, bien qu’infructueux.
Pas de sa part, en effet.
??? : "Parce que Cheeko effraie les gens."
*Cheeko ...?*
??? : "Parce que Cheeko ne comprend pas. Parce que la viande de Cheeko est mauvaise."
*... Viande de Cheeko bonne. Cheeko en manger.*
C'était désormais gravé dans son esprit, cette chasseuse serait vue en tant que la messagère du mensonge. Elle tente de décourager la sauvageonne en lui promettant qu'elle n'aura pas le moindre cristal ici, mais la sauvage pense mieux savoir. Elle dit qu'elle fait peur aux gens, mais Cheeko sait que ce sont les gens qui lui font peur. Elle dit qu'elle ne comprend pas, mais ce sont les gens qui ne la comprennent pas.
Elle dit que la viande de Cheeko est mauvaise, mais c'est parce qu'elle n'y a pas goûté ! [Elle est très très mauvaise.]
La sauvageonne observe l'étrangère faire quelques pas en arrière, des mouvements de presque-départ. Elle reste silencieuse pendant un instant, mais, décide de se répéter une fois de plus avant que l'autre femme ne décide réellement de partir.
Cheeko : "Cheeko rester."
Ainsi, l'impasse demeurait pour l'étrangère. Elle n'aura pas su pousser la sauvageonne à quitter les lieux. Est-ce vraiment un échec face à un mur tel que Cheeko ? Pas réellement. C'est presque un exploit d'avoir pu communiquer avec elle aussi longtemps sans se faire sauter dessus, toute griffe dehors.
Maintenant que tout est dit et fait, l'humaine pourra calmement quitter les lieux, si c'est ce qu'elle souhaite. La sauvageonne, elle, restera ici avec ses "marchandises". Elle restera. Elle attendra. Personne ne viendra. Elle finira par rentrer dans sa forêt, dans son petit terrier, à profiter seule de sa viande avariée.
1re lune de la saison douce de l'an 1001
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