J'ai l'impression que cela fait une éternité que je suis partie. Mes vacances n'ont duré qu'une dizaine de jours, mais pourtant j'ai l'impression que des semaines se sont écoulées. Tellement de choses me sont arrivées pendant cette courte période de temps... Je me suis évidemment reposée et j'ai profité de ma famille, mais j'ai aussi eu mon lot de situations imprévues et burlesques, de rencontres étranges et étonnantes et j'ai vécu des événements plus ou moins marquants. Oui, ces vacances auront paru à la fois très courtes et horriblement longues. Alors aujourd'hui je suis plus qu'heureuse de regagner les montagnes et la forge Obsid. J'ai presque envie de ne plus quitter cet endroit pour être sûre de couler des jours bien plus tranquilles, mais je sais que c'est totalement irréalisable.

C'est donc après une dizaine de jours d'absence à profiter de ma famille que je gravis le chemin entre la Forteresse et la forge de mon maître. À vrai dire, j'aurai déjà dû arriver hier. C'est la date que j'avais promis à Lyle en tout cas... Je n'ai aucune idée de la façon dont il va réagir à ma journée de retard. S'en est-il seulement rendu compte ? J'imagine que oui. Avec ses tendances de papa poule, je l'imagine bien m'attendre et s'inquiéter du fait que je ne sois pas arrivée le jour promis. Ou alors il a encore passé toutes ses journées et nuits à forger et il n'a pas vu le temps passé. Il m'a peut-être même oublié... Non, quand même pas !

Bien que je sois partie pour des "vacances", je ne suis pas certaine que mon état actuel va rassurer mon maître. Je suis partie dans le but de passer du temps loin de la forge, mais aujourd'hui j'ai simplement envie de ne plus la quitter. J'ai envie de regagner la chaleur du brasier et vider complètement mon esprit pour oublier certains des événements des jours passés. Mes prochains congés ? Certainement en solitaire. Loin de tout. Retourner voir ma famille aura été bien plus épuisant physiquement et mentalement que de forger quotidiennement avec le rythme infernal que m'impose mon maître. Je reviens avec encore plus de doutes et d'inquiétudes qu'à mon départ, mais aussi avec des blessures. Et pas seulement des blessures physiques.

Alors quand je vois enfin la petite maison au bout du chemin, je ressens presque comme une sorte de soulagement. Ce n'est pas chez moi et je ne me suis installée il n'y a que quelques lunes, mais pourtant je ressens un certain bonheur à l'idée de retrouver cet endroit. Je repense au fait que je n'ai pas pu prévenir mon maître de mon retard et espère sincèrement qu'il ne s'est pas inquiété pour moi. Au fur et à mesure que j'approche de l'habitation, je commence à sentir l'odeur si reconnaissable qui vient de la forge située plus haut dans la montagne. Je profite un moment des sons et odeurs qui se dégagent de l'endroit avant d'entrer dans la maison. Je profite aussi des rayons du soleil qui viennent chatouiller mon visage et alimenter ma fleur. Je me vide la tête pour essayer de présenter au moins une expression potable à mon maître. Quand je me sens enfin prête, je pousse la petite porte pour y entrer.

C'est presque une nouvelle personne qui entre à ce moment-là. J'ai évidement de nouveaux vêtements que j'ai récupérés chez mes parents ou que l'on m'a offert. J'ai un sac sans fond à l'épaule avec plusieurs vêtements et effets personnels que j'ai ramenés. Mais j'ai aussi maintenant un tatouage à la base de la nuque qui m'a permis de découvrir un nouvel aspect de mon pouvoir. J'ai aussi encore quelques traces et cicatrices des combats que j'ai menés il y a quelques jours. Un reste de gueule de bois que je chasse depuis la veille et une mine bien plus triste et déprimée qu'à mon départ. Je m'efforce quand même d'afficher un petit sourire en passant le pas de la porte. Ne sachant pas où se trouve mon maître à l'heure actuelle, je m'annonce en espérant ne pas être accueillie avec une remontrance pour ma journée de retard.

« Je suis rentrée. »

Mon maître n'était pas loin parce qu'il me rejoint assez rapidement. Pour première salutation, il fait une remarque sur mon jour de retard. Mais pas de remontrances ou d'autres réflexions. Non, à la place le forgeron vient poser ses mains sur mes joues et les frotter avant de vraiment me saluer cette fois. Je ne sais pas trop comment réagir à cette façon unique de saluer quelqu'un. Je suis tétanisée par la surprise et ne fait que fixer le forgeron avant de lâcher un petit rire presque nerveux quand il me lâche. Encore une chose bien unique chez lui. Je suis habituée aux embrassades chaleureuses de mon père, aux salutations froides de ma mère, aux piques de Rid, aux câlins énergiques de Sio, mais certainement pas à ce frottage de joues de Lyle.

Effectivement, j'ai des choses à ranger. Beaucoup de choses à vrai dire. Mon sac sans fond est presque plein entre les cadeaux que j'ai reçus, les emplettes que j'ai faites, les choses que ma sœur voulait absolument que j'emmène ou simplement les affaires que j'ai récupérées. Et puis Lyle m'annonce qu'il va cuisiner. Sa cuisine ! J'adore la cuisine de ma mère, il n'y a rien à dire, c'est une excellente cuisinière. Mais celle de Lyle a une toute autre saveur. Alors l'idée d'y goûter à nouveau me motive. Au moins je ne vais pas m'ennuyer pendant qu'il cuisine. C'est avec un vrai sourire et en pensant à sa cuisine que je hoche la tête avant de me diriger vers ma chambre.

« A tout à l'heure alors. »

Je parcoure le couloir de la maison tout en imaginant ce que mon maître compte cuisiner jusqu'à la dernière porte. Je l'ouvre et retrouve ma petite chambre dans l'état dans laquelle je l'ai laissé. Seule un peu de poussière s'est accumulée sur les meubles, mais rien de méchant. Je pose mon sac dans un coin et commence par ouvrir la fenêtre pour aérer l'endroit. Je viens ensuite défaire le lit pour en aérer les draps par la fenêtre. J'entreprends un rapide ménage pour nettoyer mon petit bureau et mes rares meubles. Je me pose enfin sur mon lit et ouvre mon sac sans fond. Je vais avoir du boulot avec tout ce que j'ai à ranger...

Je commence donc à sortir un à un les objets de mon sac. Je commence avec de nombreux vêtements. Beaucoup trop nombreux. J'ai l'impression d'avoir déménagé et que ma garde-robe a triplé de volumes depuis que j'ai quitté la maison familiale. Je commence même à avoir un doute sur le fait que tout rentre dans ma penderie. Mais en prenant le temps de tout plier et organiser, je finis par réussir à tout rentrer. Enfin, cela, c’est pour les vêtements que moi j'ai choisis d'emmener. Viennent maintenant les affaires que ma mère et ma sœur ont glissé dans mon sac. Je retrouve des affaires pour à peu près toutes les saisons... Allant d'un maillot de bain visiblement neuf et bien trop aguicheur pour que je sois celle l'ayant acheté à l'énorme manteau pour affronter la neige. J'arrive facilement à deviner qui a rangé quoi dans mon sac et désespère un peu. Je sélectionne ce qui ne me servira pas avant un moment et range le tout dans un coffre au pied de mon lit et le reste dans ma penderie. Je sors ensuite les différents cadeaux que j'ai reçus. Des carnets neufs, des petits couteaux que mon père m'a forgé, des accessoires pour mes cheveux choisis par ma sœur ou encore des livres choisis par ma mère. Tous y ont mis leur petite attention.

Je sors ensuite mes différents équipements d'aventurière pour les ranger à leurs places habituelles. Épées, couteaux à lancer, lame retour, cordes, mon pass de téléportation, mon jade de téléportation, une gourde fontaine, mon net'noix ou encore une pierre de feu. Je sors enfin ce que ma mère et ma sœur m'ont donné avant de partir. Une boîte contenant un ensemble de gâteaux et autres pâtisseries maisons qui restent de ma soirée d'anniversaire. Je chasse les souvenirs de cette horrible soirée et pose la boite sur mon bureau. Je fouille mon sac sans fond pour vérifier qu'il n'y reste rien. Normalement j'ai tout sorti. Mais main rencontre une boite que je ne me rappelle pas avoir posé. Je sors l'objet rectangulaire en fronçant les sourcils. Il s'agit d'une sorte de boite dans laquelle certains vêtements chics sont emballés. Elle est toutefois étonnamment plate et fermée avec un élégant nœud en tissu.

Je m'assieds sur mon lit, la boite sur les jambes. Je viens récupérer une petite enveloppe glissée sous le nœud de la boite. Je reconnais l'écriture de ma petite sœur qui m'indique qu'il s'agit d'un petit cadeau "surprise" à ouvrir quand je suis seule. Intriguée, j'entreprends de délicatement défaire le nœud en faisant attention à ne pas abimer la boite plutôt élégante. J'ouvre ensuite le couvercle où du tissu est replié pour protéger le contenu du cadeau. Je défais le tout et viens déplier le vêtement qui est rangé dedans. Je mets un moment à comprendre dans quel sens se porte le fin morceau de tissu et arrive enfin à le mettre à l'endroit. Je le prends par les bretelles et regarde ce qui ressemble à une robe. Toutefois, le tissu est particulièrement court, sexy et étonnamment fin. Si fin qu'il est en est transparent. Je mets un moment avant de réaliser ce que je suis en train de regarder. Le rouge me monte aux joues et je remballe le tout à la fois honteuse et énervée.

« SIO ZMEÏ ! »

J'oublie pendant un instant que je ne suis plus chez mes parents et que je ne vais pas voir la petite tête cornue de ma frangine dans l'encadrement de la porte. Je ne vais pas non plus entendre son petit rire taquin devant ma gêne. Non, je ne suis plus avec ma famille et Lyle risque de se poser des questions à m'entendre hurler ainsi depuis ma chambre. Je range le "cadeau" empoisonné dans sa boite que je glisse sous mon lit. Je ne tiens pas à avoir ce genre de vêtements dans ma penderie ou avec mes vêtements de saison froide. Je reprends un peu de contenance et récupère la boite de gâteaux sur mon bureau avant de quitter ma chambre.

Toujours un peu gênée par le cadeau de ma sœur, je sens que mes joues sont encore un peu rouges. Celle-là, la prochaine fois que je la vois elle va m'entendre. Je ne suis pas du tout amusée par ce genre de plaisanteries et j'ai déjà demandé à ma sœur d'arrêter de penser qu'il y a quelque chose de sexuel entre mon maître et moi. Quand elle est ainsi, j'ai l'impression d'avoir affaire à une version plus jeune d'Eulalie. Ces deux-là s'entendraient bien là-dessus.

Je rejoins la cuisine où Lyle est en train de finir de cuisiner. Je viens poser la boite sur la table où nous mangeons et l'ouvre. Ma mère y a placé de nombreux petits gâteaux, aussi bien sucrés que salés. Je laisse la boite ouverte et rejoins mon maître pour l'aider à mettre le table.

« Ma famille a tenu à fêter mon anniversaire avec un peu d'avance. Et ils ont préparé bien trop de gâteaux... Ma mère m'en a donné tout un assortiment. Il n'y a pas que du sucré si tu veux goûter. »

Fêter mon anniversaire ? Je l'ai fêté en avance avec ma famille parce que je savais que je ne serais pas là pour le fêter avec eux. J'ai maintenant un doute sur la date d'aujourd'hui. Je ne fais pas spécialement attention au temps qui passe et n'accorde pas une grande importance à fêter mon anniversaire. Pour moi ce n'est qu'une façon de passer du temps avec ma famille, rien de plus. Et aussi l'occasion d'un repas plus copieux qu'habituellement. Évidemment j'ai eu droit à des visages tristes quand j'ai annoncé que mes vacances se terminent avant l'arrivée de mon anniversaire. Mais le fêter en avance me convient également et m'a largement suffit. Surtout que la fête a un peu trop débordé à mon goût...

Mon père a insisté pour que l'on tienne une petite fête la veille de mon départ en réunissant la famille ainsi que quelques voisins proches. Ma mère et Sio ont cuisiné en grande quantité pour l'occasion et chaque voisin a ramené des bons petits plats ainsi que de l'alcool. Évidemment, mon enthousiaste de père s'est laissé entrainé par l'air de fête a bien abusé sur la bière et les autres alcools. Il en a aussi profité pour faire boire sa fille ainée qui n'a absolument pas l'habitude de boire. Il m'a servi verre après verre alors que Sio s'occupait de remplir mon assiette. J'ai été plutôt gâtée et j'ai passé un bon moment. Mais j'ai beaucoup trop bu... Beaucoup trop. À tel point que je n'ai pas pu me lever le lendemain. Est-ce que je compte raconter cela ? Pas vraiment...

Tout en mettant la table, je recompte les jours mentalement. J'ai comme un doute sur le temps avant mon anniversaire. Puisque je suis rentrée avec un jour de retard cela signifie que mon anniversaire est... demain. Oui, si je ne me trompe pas, le grand jour n'est que demain. Je pose donc les assiettes et les couverts alors que Lyle me demande pourquoi j'ai crié plus tôt. Je me fige et sent le rouge me monter aux joues. Évidemment, je repense à la tenue que ma sœur m'a offerte. Que dire ? Je me sens incroyablement gênée. Je suis une très mauvaise menteuse alors rien ne sert d'inventer un bobard. Autant donner des demies vérités.

« Oui, Sio est ma petite sœur. Tu sais, celle qui a des gênes draconiques et qui m'assistait à la forge familiale. » Est-ce que je suis en train d'essayer de noyer le poisson ? Oui, complètement. « On va dire qu'elle m'a fait un cadeau surprise de... mauvais goût. Une petite farce. Et elle sait que je n'aime pas ça. »

Je repense à la tenue en parlant et je sens que mes joues deviennent cramoisies. On va éviter de mentionner le genre de cadeau dont il s'agit. Je me sens déjà assez gênée d'avoir ce genre de tenues ici. Il faut que je change de sujet avant que Lyle n'essaye d'en savoir plus.

« Au fait tu veux fêter mon anniversaire ? Mais ce n'est que demain, tu sais ? On peut donc attendre demain. »

Je finis de mettre la table et prends un petit gâteau salé que j'engloutis avant de venir voir ce que mon maitre prépare à manger. Les odeurs m'ouvrent l'appétit et mon regard se met à briller à la vue du riz qui a l'air réellement délicieux.

« Tu veux de l'aide ? »

C'est vrai qu'il n'y a pas grand-chose pour fêter un anniversaire ici, mais la simplicité me convient aussi. Cela tranche avec ma famille qui a parfois tendance à en faire des tonnes. Un cadeau et une journée libre, c'est déjà pas mal comme anniversaire selon moi. Et d'ailleurs, Lyle m'offre la journée de demain. Je le regarde en haussant un sourcil. Je viens à peine de rentrer et j'ai déjà une journée de libre ? Et je n'ai pas vraiment de choses à lui demander non plus... Il faut que je réfléchisse donc à ce que je veux faire demain ou si j'ai envie de quelque chose. Mais avant cela, le riz est servi. L'odeur est particulièrement alléchante et j'attaque après un simple « bon appétit ».

Un plat simple, mais pourtant plein de saveurs. Je profite de la cuisine de mon maître avec joie et la savoure. Ce n'était qu'une dizaine de jours, mais j'ai l'impression de ne pas l'avoir goûté depuis des semaines. Je suis concentrée sur la nourriture alors que Lyle semble avoir quelque chose qui le perturbe. Quand je préfère recevoir les cadeaux de ma famille ? Je ricane un peu. Il ne connait vraiment pas ma famille. Elle est bien trop énergique à mon goût, envahissante et surtout on ne me demande pas beaucoup mon avis pour ce genre de choses. Je regarde mon maître dans les yeux alors qu'il y a visiblement quelque chose qui le dérange.

« Si j'étais avec ma famille, je n'aurais pas le choix. Ça serait évidemment le jour même. Mais en vérité, j’en aurais certainement la veille aussi... Et ils fêtent les choses en grand. Bien trop grand... Du genre à commencer la veille... »

Je repense à quel point la soirée a dérapé. Mon père complètement bourré dansant sur les tables avec le voisin... Non, je ne veux plus y penser... Mais je ne réponds pas vraiment à la question de mon maître. Il veut savoir ce que moi je veux.

« Pour moi, peu importe. Mon anniversaire n'est qu'une journée où je profite d'un bon repas. Les cadeaux, c’est un bonus. » Et puisque quelque chose semble le tracasser, autant mettre les choses au clair tout de suite. « Et si tu veux me faire plaisir pour mon anniversaire, alors cuisine quelque chose de bon et copieux ! Je n'ai rien besoin de plus. »

Je lui adresse un petit sourire moqueur avant de retourner à mon riz sauté. J'espère avoir répondu à la question du rouquin. Je ne sais pas ce qui le tracasse, mais je ne tiens pas à ce qu'il se prenne la tête pour mon anniversaire. Ce n'est qu'un jour comme un autre. Je compte d'ailleurs lui demander de travailler demain. Je ne vois pas ce que je peux faire d'autres... Ou peut être que je pourrais lui demander de m'apprendre à cuisiner quelques plats. Même s'il m'a déjà appris quelques trucs, je ne suis pas contre l'idée d'apprendre d'autres choses. Je tapote mes lèvres avec ma cuillère en réfléchissant avant de la pointer vers le forgeron. C'est décidé, je sais ce que je veux faire demain.

« Demain, j'aimerais qu'on cuisine le repas ensemble. Et tu m'apprends à cuisiner un des plats que tu aimes. Voilà ce que j'ai envie de faire. »

Une pierre deux coups. Je m'entraine à cuisiner et apprend un plat qu'il apprécie. Idéal le jour où j'ai envie de lui faire plaisir. Par exemple, pour... son anniversaire ? Je n'ai aucune idée de quand il est... Il faudra que je lui demande à l'occasion. En attendant je finis mon assiette en attendant l'avis de Lyle sur mon projet du lendemain.

J'ai l'impression que ma réponse n'a pas vraiment eu l'effet voulu. À peine rentrée et voilà qu'il y a déjà un malaise entre nous. Notre relation n'est vraiment pas simple tous les jours... J'ai beau essayé d'apprendre à le connaitre, j'ai l'impression de découvrir une nouvelle facette de la personnalité de Lyle tous les jours. Et je pense que cela n'est pas simple pour lui non plus. J'ai envie de crever l'abcès pour que le malaise ne dure pas. Mais je ne sais pas comment faire. Je n'en ai aucune idée. Qu'est-ce qui peut bien mettre le rouquin dans cet état ? Est-ce qu'il s'est passé quelque chose durant mon absence ? Peut-être... Ou c'est ce que j'ai dit ? Est-ce que j'ai été blessante sur quelque chose ? Je n'en sais strictement rien. Ce genre de malaises, je ne sais jamais comment les gérer. Devant les problèmes je fuis ou évite la question, mais j'ai l'impression que pour une fois je dois essayer de résoudre la situation.

Mais le sourire de mon maître revient légèrement alors qu'il parle de la recette que l'on peut faire le lendemain. Un rôti ? Ça a l'air appétissant... Et si c'est en plus une recette de son père... J'imagine que cela doit lui faire plaisir de cuisiner les recettes que son père lui a appris. Le plus important pour moi, c’est qu'il retrouve son sourire désormais. Je lui réponds donc avec un sourire en espérant ne pas le blesser à nouveau.

« Ça a l'air délicieux... J'ai hâte ! »

Je retourne à mon assiette que je termine avec appétit. Discuter, c'est laisser refroidir son plat. Alors je le termine religieusement en savourant chaque bouchée. Il n'y a pas à dire, cette cuisine, c’est un autre niveau pour mes papilles. Quoiqu'en dise Lyle, j'adore sa cuisine. Là-dessus, il ne m'a jamais déçu et j'ai l'impression que chacun de ses plats et un nouveau bonheur gustatif. Une fois mon riz terminé, je me sers un peu de salade et adresse ensuite un nouveau sourire à mon maître.

« Ton riz est délicieux ! Il faudra que tu me montres comment faire à l'occasion. »

Je mange ma salade tout en réfléchissant à notre discussion de plus tôt. Je n'arrive toujours pas à comprendre ce que j'ai pu dire de mal. Et j'ai beau ne pas chercher à retourner le couteau dans la plaie, j'ai cette horrible sensation que cela est ma faute et que je dois faire quelque chose pour arranger les choses. Je mange en silence tout en réfléchissant et me repassant la conversation dans la tête. C'est alors que je réalise une chose. Lyle vit seul depuis des années. Il est complètement seul dans les montagnes. Si j'ai bien compris, son vieux père est mort depuis quelque temps déjà. Alors cela veut dire qu'il n'a pas fêté son anniversaire ou celui de quelqu'un d'autres depuis longtemps... Je ne suis qu'une imbécile ! J'ai tellement l'habitude de la présence étouffante de ma famille, que j'en oublie à quel point la vie de mon maître est solitaire. Peut-être qu'à sa façon, il voulait profiter de l'occasion de fêter mon anniversaire puisqu'il n'a pas pu le faire pour personne depuis un moment.

Je m'arrête donc de manger, jouant avec une feuille de salade. J'hésite entre parler et risquer d'à nouveau blesser le forgeron ou le laisser alors qu'il semble avoir trouvé à nouveau un semblant de sourire. Je ne sais pas quoi faire et j'ai peur d'encore tout gâcher. Je vais certainement tout gâcher si j'ouvre la bouche. Alors je préfère me taire et finir de manger.

Je termine ma salade et récupère ensuite la boite de gâteaux que j'ai posé plus tôt. J'utilise le couvercle en bois de la boite comme planche pour y mettre les gâteaux. Je prends le temps de séparer délicatement les gâteaux sucrés et salés. Je fais attention à mettre ceux qui sont salés du côté de Lyle et les sucrés de mon côté. Je mets ensuite le plateau entre nous et offre à nouveau un léger sourire à mon maître. J'espère qu'au moins les gâteaux faits par ma famille lui plairont.

Les gâteaux semblent plaire à Lyle, ce qui me donne un nouveau sourire. Je suis contente qu'il puisse en profiter même s'il n'aime pas vraiment les choses sucrées. J'ai bien fait de demander à ma mère de me donner autant de gâteaux salés que sucrés. Je peux donc savourer ces petites pâtisseries en compagnie de mon maître et cela me ravie. Pour l'instant, j’ai oublié ma déprime des derniers jours et je profite simplement du moment présent. Je prends une pâtisserie sucrée après que le rouquin ait complimenté la cuisine de ma famille. Il faut reconnaitre que ma mère et Sio se sont plutôt bien débrouillées là-dessus. Elles m'ont vraiment gâtées et ont fait des quantités pour nourrir tout un régiment. Peut-être qu'elles vont en apporter à Rid ? Certainement.

Mon maître cherche donc à faire la conversation. Il me demande les cadeaux que j'ai reçus, ce que j'ai envie de faire demain et... il me demande quel genre de cadeau peut me faire hurler de colère comme plus tôt. Sur le moment, je me fige dans mon mouvement. Je pose doucement le gâteau que j'étais en train de manger et je sens le rouge me monter aux joues et jusqu'aux oreilles. J'ai envie de me transformer en petite souris et de disparaitre dans un trou pour ne plus jamais en sortir. Qu'est-ce que je peux répondre à ça ? Si je mens, cela va se voir et créer encore plus de questions. Mais si je dis la vérité... Non, je ne veux pas imaginer cette scène pleine de gène et je ne tiens réellement pas m'humilier devant mon maître. Il faut que je continue sur la technique des demies vérités. Mais je suis tellement gênée que je me mets à bégayer un peu.

« C'est... euh... Un... Un vêtement... Oui, un vêtement... Mais, euh... Pas vraiment un vêtement... »

Ce que je dis n'a aucun sens et j'ai l'impression de me transformer en tomate. Je viens croiser mes mains devant moi et appuie mon front dessus pour cacher un peu mon visage cramoisi. Je dois me reprendre et sortir quelque chose de crédible et qui ne créera pas plus de questions. Je regarde Lyle dans les yeux, une moue résignée sur le visage alors que je suis rouge comme une tomate.

« Un vêtement pour dormir. Mais pour femme. Voilà. »

Un bon résumé. Pitié. Qu'il ne pose pas plus de questions. Pitié. Par Lucy. Je jure d'étriper Sio quand je la verrais. Je vais même m'arranger pour prendre une mission à la Guilde pour la croiser. Oui, je vais faire ça. Et lui passer le plus gros savon possible. Me faire perdre la face devant mon maître et ainsi démolir toute ma crédibilité. Je ne la pardonnerai pas. Jamais. JA-MAIS. Je prends un verre d'eau pour faire passer la chaleur qui m'a envahi et essayer de reprendre un peu de sérieux. Je baisse le regard après avoir posé mon verre vide et évite ainsi de voir la réaction de l'homme en face de moi. Je sais qu'il est ermite et qu'il n'y connait rien aux "tenues sexy", mais j'espère qu'il a tout de même compris la nuance et ne va pas en demander plus. Il faut que je change de sujet pour m'assurer qu'il n'essaye pas d'en savoir plus.

« Sinon oui, j'ai reçu des cadeaux que j'apprécie. Des livres, des vêtements, de nouveaux carnets à croquis, des choses de ce genre... » Je pense alors au cadeau de mon père. Voilà une bonne idée pour détourner l'attention d'un forgeron passionné comme Lyle. « Et mon père m'a forgé des petits couteaux qu'il m'a offerts. Il s'est apparemment surpassé pour me faire plaisir. » L'appât est lancé, faite que Lyle y morde...

Par Lucy... Lyle ne semblait pas se rendre compte d'à quoi ressemble le cadeau de ma sœur. C'est peut-être pas plus mal comme ça... Toujours est-il qu'il me dit qu'il ne me jugera pas dans un pyjama pareil. Non, il ne se rend clairement pas compte. Je vais éviter de répondre à cela, il le vaut mieux pour tout le monde. Ce cadeau finira au fond d'un placard et n'en sortira pas. Il est hors de question que je porte ça ici. Bientôt, mon maître oubliera cette histoire et moi aussi. J’en suis certaine. Sio passera un sale quart d'heure et cette tenue ira prendre la poussière cachée au fond de mes affaires. Ne pensons plus à la farce de ma sœur.

Mon rougissement se calme enfin et je chasse de mon esprit l'image de cette nuisette. Le forgeron a mordu à l'hameçon que j'ai lancé. Parfait. Nous allons donc pouvoir discuter de mon père et de sa forge. Il commence par relever sur le fait qu'il aurait plutôt offert des outils à sa fille s'il en avait une. L'image est amusante et me fait sourire. J'imagine parfaitement Lyle en vrai père poule. Mais il se trompe sur un point. Mon père m'a longtemps offert des outils, il est même celui qui m'a encouragé dans cette voie en m'offrant mon premier marteau de forgeronne. Ces souvenirs remontent et m'arrachent un véritable sourire. Au moins, avec cette discussion, je peux définitivement oublier la farce de ma sœur.

Je dévore un nouveau gâteau alors que mon maître commence à préparer du thé. Il faut que j'arrête de grignoter... Il continue et semble intéressé par le cadeau de mon père. J'affiche un sourire. Il semble vraiment curieux maintenant. Je me relève et le laisse finir de s'occuper du thé.

« Je reviens. »

Je me dirige vers ma chambre. Je cherche rapidement dans mes affaires que j'ai rangées plus tôt. Je sors mon marteau et la ceinture que mon père m'a offerte il y a de nombreuses années, mais aussi les couteaux qu'il m'a offerts il y a deux jours et qui sont soigneusement emballés dans du tissu. Je récupère le tout et quitte ma petite chambre pour retrouver le forgeron. Le thé doit maintenant être prêt et je sens que l'on risque de partir dans l'une de nos longues conversations jusqu'à ce que je tombe de fatigue. Cela me fait plaisir de pouvoir montrer le travail de mon père et d'en discuter avec mon maître. Je sais qu'il n'est qu'un forgeron moyen de la Capitale, mais le voir faire tant d'efforts à son âge me fait plaisir. Et puis c'est lui qui m'a tout appris. Même si aujourd'hui Lyle est mon maître, mon père restera celui qui m'a donné cette passion.

Je retrouve le rouquin et m'installe face à lui. Je commence par poser le marteau et la ceinture que j'utilise quand je suis à la forge.

« Alors, il m'a fait des outils aussi. Les premiers que j'ai utilisés. » Je désigne d'abord le marteau. « C'est le premier qu'il m'a offert quand il m'a autorisé à apprendre à ses côtés. Il l'a refait et adapté avec les années pour l'adapter à ma taille et ma force. Il a refondu la tête à chaque fois et il a utilisé le manche d'origine jusqu'à ce qu'il ne soit plus utilisable du tout. Il en a quand même découpé un morceau qu'il a incrusté à la base du manche. »

Je désigne l'endroit où le bois est légèrement différent et où mes initiales sont gravées. Les voir me fait sourire et remonte de nombreux souvenirs. Je désigne ensuite la ceinture.

« C'est aussi lui qui me l'a confectionné. J'en ai aussi reçu plusieurs avec ma croissance et Sio aussi. Il nous a plutôt gâté là-dessus. »

J'ai un petit ricanement nostalgique alors que je repense à quand ma sœur a aussi eu le droit de rentrer dans la forge. Je pose ensuite le tissu contenant les couteaux et le déplie. Ce sont des petits couteaux de lancer, rien d'extraordinaire. Toutefois, il a particulièrement fait attention à leur poids et il a passé plusieurs jours à m'en faire essayer pour trouver le bon compromis avec ma façon de lancer. Il a passé plus de temps qu'habituellement sur ce cadeau et je ne suis pas certaine de la raison du pourquoi il a cherché absolument à faire mieux qu'à son habitude ou pour ses clients.

« Et comme tu l'as dit, maintenant je suis aventurière. Alors, il innove pour les cadeaux. »

Je prends un des couteaux dans ma main et l'observe à la lueur des lampes. Ils n'ont rien d'extraordinaire au premier coup d'œil. Toutefois, je connais le niveau de mon père après avoir travaillé à ses côtés pendant plusieurs années. Je sais qu'il a fait mieux qu'à son habitude et qu'il a forgé avec tout son cœur.

Mon maître semble admirer le travail de mon père et le complimente même. Cela me fait plaisir et me donne une certaine forme de fierté. Oui, mon père est adorable. Un forgeron un peu bourru, maladroit, bon vivant et aimant sa famille de tout son cœur. Voilà l'homme qui m'a initié et encouragé à suivre ses pas. Bien qu'à l'origine il souhaitait que je reprenne l'entreprise familiale, me voir voler de mes propres ailes est aussi une fierté pour lui. Alors quand Sio et moi nous sommes inscrites à la Guilde, il nous a encouragé et à sa manière, il a tout fait pour nous protéger. Comme le fait que nous ayons travaillé ensemble une première armure à Sio pour protéger son corps si particulier. Un prototype évidemment et une réalisation imparfaite, mais une confection qui a ravi le cœur de ma sœur qui rêve d'explorer le royaume. Pour moi, il sait que l'aventure n'est pas mon destin, mais il souhaite aussi me protéger et m'encourage à poursuivre mes rêves.

Alors quand Lyle dit que j'ai une famille attentionnée, je ne peux pas le nier. Je ne peux retenir un petit sourire en repensant aux regards dont j'ai eu droit en repartant après cette dizaine de jours de vacances. Je me mets à jouer avec la lame dans ma main, mon autre main supportant ma tête. Je laisse mes pensées vagabonder. Je fais pivoter le couteau dans ma main comme Rid me l'a appris il y a plusieurs lunes et m'étonne de l'aisance avec laquelle j'arrive à exécuter les mouvements contrairement à l'époque.

Le forgeron me demande si je veux continuer de discuter avec lui ou prendre un bain. Les deux propositions sont intéressantes. Il me dit aussi qu'il serait dommage que je passe ma journée de demain à dormir. J'ai presque envie de lui rétorquer qu'il est celui m'ayant donné l'autorisation de faire ce que je souhaite demain. Il revient ensuite sur le pyjama en blaguant. Le rouge me revient un peu aux joues alors qu'il se moque visiblement de moi. Je fais mine de lui lancer le couteau que je tiens avant de me raviser et de le poser devant moi. Je croise les bras et fais une mine boudeuse.

« Si tu savais, tu n'en rigolerais pas comme ça. »

Je repense à la tête qu'il avait fait quand je lui avais annoncé la première fois que j'ai tendance à vivre de façon plutôt dénudée. Non. C'est clair. Sa tête serait pire en me voyant dans une tenue pareille. Il n'a aucune idée du danger que représente ce morceau de tissu. Une arme de distraction massive comme dirait Sofia. Il mériterait que je me venge. Si j'avais un peu plus d'audace je pense que je lui ferais payer. Et puis tiens, demain, c’est mon anniversaire. Il m'a bien autorisé à faire ce que je souhaite, non ? Alors je me vengerai. Je trouverai un moyen de me venger. Et il ne pourra rien y faire parce qu'il s'agira de *ma* journée. Je continue donc sur mon air boudeur tout en élaborant un plan diabolique dans mon esprit.

« Tu vas le regretter. Et moi qui comptais te demander si tu as bien profité de mon absence. Tu taquines déjà ton apprentie à peine revenue. »

Je n'ai aucun doute là-dessus. Il a certainement profité de tout ce temps pour lui pour retrouver un peu de sa très chère solitude. Je n'ai même pas dû lui manquer. J'aurais même pu ne pas revenir que cela n'aurait rien changé pour lui. Juste un estomac en moins à nourrir, et pas des moindres.

Sans trop de surprise, Lyle a retrouvé sa vie de solitaire et sa routine durant mon absence. Je bois tranquillement mon thé tout en l'écoutant. Toutefois lorsqu'il parle du fait qu'il a oublié de se faire à manger en pensant que j'étais là, je m'arrête. Je n'aurais jamais pensé qu'il a ainsi prit l'habitude de ma présence et qu'il commence même à oublier mon absence. Il continue en disant qu'il me taquine pour rattraper le temps perdu. Évidemment cela m'arrache un léger sourire et j'arrête d'essayer de bouder. C'est qu'il saurait presque utiliser les mots qu'il faut pour se faire pardonner ce rouquin.

Il termine quand même en disant que l'endroit était plus calme et vide sans moi. Quelque part, cela me touche. Ses paroles signifient que j'ai un peu chamboulé son quotidien, mais dans le bon sens. Je rends sa solitude un peu plus joyeuse. Je ne peux m'empêcher de trouver cela touchant et de rougir un peu. Je ne pensais pas l'impacter autant. Lyle est une personne réellement gentille malgré son mauvais caractère, mais il a cette habitude de mettre une distance entre nous. Distance à laquelle je me suis habituée et que je m'efforce de remettre par moment. Alors entendre cela... Ça me fait un petit quelque chose que je ne sais pas décrire. Alors quand il part prendre son bain, je hoche simplement de la tête, restant seule avec mon thé et mes pensées.

Je reste ainsi un moment à finir de profiter de ma tasse de thé tout en remettant de l'ordre dans mes idées. La solitude me frappe à nouveau alors que Lyle n'est plus là. Tout devient un peu plus sombre et mes idées noires des derniers jours reviennent doucement. Je les chasse d'un mouvement de la main et range le service à thé. Je fais la petite vaisselle avant de regagner ma chambre. Je m'étale sur mon lit et fixe le plafond un moment. Je lutte pour ne pas m'endormir tout de suite. Instinctivement, je viens chercher le cristal de souvenir que Sio m'a offert et qui reste près de mon carnet. J'observe l'objet sans oser l'activer. Je reste ainsi un moment avant de sursauter quand on toque à ma porte. Je repose le cristal et vais récupérer mes affaires de bain ainsi qu'un véritable pyjama. Je vais profiter d'un bon bain chaud et d'une bonne nuit de sommeil. Je ne vais pas laisser les idées noires m'envahir alors que je suis enfin revenue dans un lieu accueillant et chaleureux.

...

Inconsciemment, mon corps sait qu'aujourd'hui je n'ai pas besoin de me lever aussi tôt qu'habituellement. J'ai donc dormi plus qu'à mon habitude. Malheureusement pour moi, cela a tendance à me rendre beaucoup moins réactive au réveil. C'est avec une grande difficulté que je me lève. Par la petite fenêtre je vois qu'il est encore tôt, mais bien plus tard que l'heure à laquelle je dois me lever. Je m'étire et frotte un peu mon œil. Trop dormir m'embrume vraiment l'esprit. Je me lève donc de façon automatique et récupère ma nuisette que j'ai enlevé la veille avant de me coucher. Un vêtement de nuit très simple à bretelles fines et m'arrivant à la moitié des genoux. Un cadeau de ma mère qui en avait marre de me voir de me voir nue dans la cuisine le matin.

Le vêtement enfilé, je sors de ma chambre en baillant. Encore à moitié endormie je me dirige vers la cuisine à l'odorat. Mon nez a repéré la bonne odeur de la nourriture et déjà mon ventre réclame de la nourriture. Je ne suis même pas complètement réveillée que déjà j'ai de l'appétit. Je passe la porte de la cuisine en m'attendant à déjà entendre ma mère râler sur l'heure à laquelle je me lève. Je l'entends me faire une réflexion sur le fait qu'elle n'est pas en vacances contrairement à moi. Je la salue donc de façon automatique.

« Bonjour M'man... Désolée de me lever si tard... Ça sent bon... »

Je viens m'asseoir à ma place et me frotte l'œil pour finir de me réveiller. Les odeurs de nourriture ont définitivement réveillé mon estomac, alors il faut quand même que je regarde le repas que ma mère a eu la gentillesse de me préparer. Je cligne de l'œil alors que ma vue s'habitue à la luminosité ambiante. Mère a beaucoup changé ou je ne suis pas bien réveillée ? Elle a fait une couleur de cheveux ? Une petite seconde...

Je me fige alors en réalisant que c'est Lyle qui est en face de moi et pas ma mère. Je ne suis plus en vacances. Je suis rentrée hier. J'ai dormi dans ma chambre et non avec Sio cette nuit. Je suis bien de retour chez mon maître, et je ne suis plus en vacances chez mes parents. Je réalise alors que je viens d'appeler le forgeron comme s'il était ma mère. Sympathique comme salutations de bon matin... Et horriblement gênant.

« Euh... Bonjour Ly'... »

Je rougis un peu de honte face à une telle bourde. J'espère qu'il ne m'en tiendra pas rigueur. Je regarde alors le petit déjeuner qu'il a préparé. Je n'ai pas souvenir qu'il ait déjà préparé un tel repas. D'ailleurs je ne me souviens pas d'avoir déjà pris un petit déjeuner avec lui. Le plus souvent, c’est un repas que j'oublie si on ne me le prépare pas alors je crois que c'est une première depuis que je suis ici.

Je m'attends à une taquinerie comme salutation vu que je viens quand même de d'appeler Lyle « Maman ». Mais non, à la place, il prend ça presque comme un compliment pour sa cuisine, ce qui m'arrache un sourire un peu endormi. Il me souhaite ensuite mon anniversaire avec un beau sourire. J'en avais presque oublié le fait que c'était aujourd'hui. Je ne suis vraiment pas réveillée... Je lui rends son sourire et le remercie avant de commencer à déguster le petit déjeuner qu'il a préparé. Un repas spécial pour une occasion spéciale. J'apprécie vraiment le geste. Je commence donc à me servir des tartines et à les manger avec appétit. La nourriture a le don de me réveiller complètement.

Alors que mon esprit se réveille petit à petit, je laisse mes pensées vagabonder. Je passe d'une idée à une autre sans réelle logique. Je repense à la soirée d'hier, à mes rêves de la nuit, à mes croquis ou ce genre de choses. C'est alors que mon esprit retourne sur le petit déjeuner. Oui, c'est un événement exceptionnel que l'on soit tous les deux en train de prendre ce repas. Je ne crois pas d'ailleurs que Lyle m'est déjà vu dans ma tenue de nuit... En fait, j'en suis sûre. Sinon j'en aurais entendu parler. À vrai dire, cela ne fait que depuis mes vacances que j'ai cette tenue. Je n'y suis pas encore habituée, mais je pense qu'il peut remercier ma mère de m'avoir forcé à l'enfiler en me réveillant pendant cette dizaine de jours. Sinon c'est une Sia nue qui l'aurait appelé « Maman » de façon endormie. Une vision presque amusante. Je ne peux m'empêcher d'imaginer sa tête abasourdie devant un tel spectacle. Bien que ça ne soit pas une vision que je compte lui offrir ainsi par pur plaisir, je n'ai pas oublié ses taquineries de la veille et je compte bien me venger. Il a osé m'embêter avec cette histoire de nuisette transparente sans aucune honte, alors il va le regretter.

Alors que j'échafaude un plan diabolique dans mon esprit, le forgeron me demande le programme que j'ai prévu pour aujourd'hui. Mis à part me venger, pas grand-chose. À vrai dire je n'y ai pas beaucoup réfléchi. Une chose est sûre, il ne faut pas que je reste seule aujourd'hui. Hier le simple fait d'avoir été un peu seule a rapidement fait revenir mes idées noires. Mon esprit et mon cœur sont bien plus tristes que je ne veux me l'avouer, alors j'ai besoin de compagnie pour ne pas sombrer à nouveau. Ici je n'ai pas ma famille pour occuper mon esprit, je n'ai que la forge et Lyle. Peut-être une bonne occasion pour apprendre à connaître l'homme derrière le maître ?

Bien que l'on vive ensemble depuis un moment, en dehors de la forge, nous vivons plutôt comme des colocataires qu'autre chose. J'ai appris à connaître le caractère du rouquin et j'ai pu observer certaines de ses petites manies, mais je ne connais presque rien de lui personnellement... Même pas la date de son anniversaire. Il faudrait donc que je réfléchisse à des choses que l'on peut faire ensemble ou pour apprendre à se connaître. La seule chose qui me vient à l'esprit est un jeu d'alcool auquel j'ai eu le malheur de jouer durant ma soirée d'anniversaire. Non, clairement pas une chose à faire en pleine journée.

Je suis en train de réfléchir à cela tout en mâchant une tartine quand Lyle fait tomber un de ses couverts. Il s'excuse et se baisse sous la table pour la récupérer. Je ne sais pas pourquoi, mais soudainement une idée me traverse l'esprit. Je n'ai que ma tenue de nuit sur moi. Rien d'autre. Rien dessous. Ma tartine reste figée dans ma main alors que je suis en train de me dire que mon maître peut tout voir. Alors je sais que j'ai parlé de me venger, mais je ne pensais pas à cet angle de vue. Non, mais à quoi je pense ? Jamais il n'ira regarder volontairement à cet endroit, il est bien trop prude pour cela. Alors qu'il met un peu de temps à ressortir de la table, je viens quand même croiser mes jambes par sécurité. On ne sait jamais. Un accident peut vite arriver. Et même pour une personne peu pudique comme moi, il y a des limites.

Et puis une petite secousse vient faire trembler la table ainsi qu'un petit « boum ». Lyle émerge alors de dessous la table en se frottant la tête. Il dit ne rien avoir, mais visiblement il a mal. L'imbécile s'est cogné en se relevant. Je pousse un soupir voyant qu'il a quand même mal malgré ce qu'il dit. Je pose ma tartine et recule ma chaise. Je me lève et vient le rejoindre.

« Laisse-moi regarder ça. »

Je viens me pencher vers lui et bouge un peu ses cheveux pour voir l'endroit qui semble le faire souffrir. Au moins il ne saigne pas, mais déjà une petite bosse commence à apparaître. Je pousse un soupir. Avec mon pouvoir et ma nouvelle capacité ce genre de bobo serait déjà disparu en un claquement de doigt. Mais je ne peux malheureusement pas partager ce don. Il faudra vraiment que je prenne le temps de me trouver un enchanteur un jour. En attendant, il va falloir faire cela à l'ancienne. Je vais donc chercher la boite contenant tout ce qu'il faut pour désinfecter et soigner les moindres petits bobos. Grâce à Eulalie, ce kit a bien servi, mais on doit avoir ce qu'il faut pour soigner un début de bosse.

Tu frottais le sommet de ton crâne, mais rien, pas de sang, juste une bosse qui gonfle et une douleur perçante qui s’installe doucement à travers ton crâne. Ça ne faisait pas vraiment du bien, mais c’était largement supportable. Tu t’assis donc sur ta chaise, frottant ton crâne d’une main et finissant ton assiette de l’autre. Tu pouvais bien faire avec et supporter la douleur sans mal, tu te soignerais après avoir mangé voilà que Sia vient vers toi pour te soigner.

Obéissant sans plus réfléchir que cela, tu te penches vers elle qu’elle regarde la blessure… Plus tu y réfléchissais, plus c’était logique que tu savais que tu pouvais faire confiance à Sia sur le côté médecine. Après tout, c’était elle qui s’occupait de toutes les blessures d’Eulalie quand cette tempête, c’était incrusté ici avec vous. Tu laisses donc faire Sia, hésitant quand même à manger pendant qu’elle te soigne dans cette position étrange.

Elle repart alors pour aller chercher le kit de soin qu’elle utilisait avec Eulalie, tu te remets donc vite droit le temps de manger encore un peu, mais la voilà de retour et prêt à te soigner. Tu te penches à nouveau donc, la laissant donc s’occuper de ta blessure. Tu avais mal, mais tu te sentais bien plus mal pour Sia en face de toi qui avait son anniversaire aujourd’hui et devait quand même s’occuper de toi et d’une stupide blessure. « Désolé de te forcer à faire ça, surtout aujourd’hui… Tu sais, je pourrais me soigner moi-même simplement. Ça sera plus simple pour toi et comme ça, tu pourras profiter de ton déjeuner pendant que c’est encore chaud… Et puis c’est qu’un simple coup sur le sommet du crâne, je suis pas si fragile que ça heureusement. »

Tu essayes alors d’un peu relever ta tête, espérant qu’elle te libère et te laisse te soigner toi-même, tu n’avais pas vraiment raison, tu le savais, mais c’était son anniversaire, t’allait pas la forcer à s’occuper d’une petite blessure comme ça aujourd’hui. C’était de ta faute après tout, elle n’avait pas à s’occuper de ta blessure ou de toi comme ça.



---HRP---
Désolé de la réponse courte, j'avoue que je n'avais pas trop d'idée.