L'eau coule doucement sur mon corps. Quelques gouttes de sang s'éclatent au sol, me rappelant douloureusement ma défaite d'il y a quelques minutes. Je suis partie sans rien dire, la tête basse et le visage fermé.
Mon poing droit vient rencontrer le mur de la douche, faisant vibrer doucement le tuyau.
Je n'en reviens pas d'avoir réagit comme cela. Pourquoi n'ai-je pas réussi à le faire saigner en premier ? Pourquoi je me suis sentie rougir ? Mon corps était comme pétrifié, mon esprit embrouillé.
Je connais Hryfin depuis des années, et c'est bien la première fois que ça se passe comme ça. Nous avons déjà fait plusieurs combat ensemble, nos corps se heurtant régulièrement. Mais cette fois-ci...
J'éteins la douche et enfile une tenue simple, composé d'un gilet à manche longue, d'un débardeur à mi-ventre et d'un pantalon ample. Qu'est-ce que je pourrais faire, maintenant que tout ça soit fini ? Je n'arriverai pas à croiser Hryfin. En tout cas, pas pour l'instant.
A sa simple pensée, je sens une drôle de chaleur se réveiller en moi. Pourquoi maintenant ? Hryfin est mon ami, un très bon ami, et...Non, ça ne doit pas être cela. J'ai dû tomber malade quelque part, et les symptômes ne commencent que maintenant.
Je m'assois sur un des bancs pour enfiler mes chaussures, quand la porte des vestiaires féminins s'ouvrent, laissant entrer deux femmes en pleine conversation.
Cachée derrière des armoires, elles ne peuvent pas me voir. Je continue de faire mes affaires, sans trop leur prêter attention.
Pas besoin de faire l'idiote, je sais très bien à quoi elles pensent. Nous sommes proches, oui, mais je n'ai jamais imaginé que cela puisse aller plus loin. Il n'y a jamais eu de geste de trop entre nous deux, à part celui de toute à l'heure. C'est peut-être pour ça que je me suis sentie aussi mal, je n'avais pas l'habitude.
Leurs rires résonnent dans le vestiaire, et c'est le moment que je choisis pour sortir. Elles sont toutes les deux de la garde régulière, et pensaient visiblement être seules, vue leur yeux exorbités.
Je ne leur laisse pas le temps de parler, ni de faire quoique ce soit. Je les évite tout simplement. Leur parler ne serait qu'une perte de temps. Oui, j'obéis aux moindres ordres de mon capitaine, comme tous les gardes royaux. Et alors ?
Le doute m'habite.
Est-ce qu'une femme garde est repoussante ? Est-ce qu'un homme ne pourrait envisager de sortir avec elle ? Est-ce qu'Hryfin ne voudrait pas de moi ? Plus je me pose ce genre de questions, plus mon coeur se met à parler.
Comment je vois Hryfin ? Comme un ami, ou plus ? Au dernier mot, mon coeur se met à battre un peu plus fort, et une gêne au niveau de mon ventre commence à se former. Ni pensons pas.
Cela fait plus d'une heure que je vagabonde sans but dans la capitale. J'avais envie de faire quelques achats, mais rien ne me tente. Même boire un coup ne me fait pas envie. La dernière fois, c'était avec lui, et j'avais passé un agréable moment.
Au bout de cette heure, j'ai finalement réussi à comprendre ce qu'il se passait dans ma tête, dans mon esprit, et dans mon coeur. Le sentiment qui naît en moi n'est pas forcément de l'amitié, mais je ne pourrais pas parler d'amour, pour l'instant. La situation de tout à l'heure m'a aidé à comprendre ce qu'il se passait. Mais je me sens torturé.
Est-ce qu'il peut partager ça ? Est-ce qu'il y a une chance qu'il ressente la même chose ? Même en me mettant à sa place, je n'arrive pas à trouver de réponse.
Mais maintenant que je suis (presque) en phase avec ce que je ressens, comment vais-je réagir quand je vais le revoir ? Vais-je me sentir gênée ? Vais-je bafouer à chacun de mes phrases ? Haha, vraiment intéressante, comme situation.
Je ne suis pourtant pas le genre de personne à cacher ses émotions. Le mieux à faire dans ce cas de figure, c'est de foncer tête baissée. Et si cela ne fonctionne pas, et bien tant pis ! Au moins, je n'aurai pas de regret ni de remord. Je ne me torturer pas l'esprit à me dire que j'aurai dû y aller, que j'aurai dû prendre mon courage à deux mains et tout lui dire.
Arrêtons de nous déchirer. Je décide d'aller chez lui, de tout lui dire, et de voir comment il réagit. Et évitons de tourner autour du pot, c'est Hryfin.
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