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Aord ouvrit les yeux timidement alors qu’il prenait conscience du mal de crâne qui l’habitait. Il grommela dans son lit et referma les yeux pour repartir dans les bras de Morphée. Mais la déesse en avait décidé autrement aujourd’hui. Il sentit ses cheveux bouger, et il essaya de chasser la mouche qui l’embêtait, mais ce ne fut pas un insecte que sa main rencontra. C’était froid et … mou. Il ouvrit un œil et tomba nez à nez avec l’énorme museau d’un cheval qui broutait tranquillement la paille qu’il avait dans les cheveux. Peu à peu, le voile du sommeil se dissipa et l’adolescent put de nouveau sentir les odeurs d’écuries qui flottaient autour de lui. Il ouvrit les deux yeux pour contempler la bête qui essayait de grappiller un peu de paille depuis son box, se tordant le cou pour atteindre la botte de paille sur laquelle Aord s’était écroulé la veille.
En se relevant, le jeune homme délogea une bouteille qui avait dormi confortablement à côté de lui. Elle roula sur le sol en teintant violement sur les dalles de pierres arrachant une grimace aux dormeurs mal léché …
« Oh putain, jura-t-il et se massant les tempes. »
Sa gueule de bois était particulièrement atroce ce matin, il faut dire qu’il s’était saoulé sans aucune retenue la veille au soir. Il s’était fait attraper par un groupe de fêtards et les avait rejoints dans leur concours de boissons. Mal lui en a pris vu qu’il avait visiblement fini en épave dans une écurie non identifié. Il se frotta les yeux en essayant de se remémorer la nuit passée, mais il ne trouva qu’un immense blanc dans sa mémoire. Il avait tant abusé que ça ? Il ne fallait pas s’étonner, depuis le début de son voyage, c’était presque devenu une habitude de finir dans le mal au matin. Un regard à l’extérieur lui indiqua qu’il avait tort, ce n’était plus du tout le matin. Le soleil de l’après-midi brillait haut dans le ciel. Aord soupira, s’il voulait arriver à destination avant la nuit, il allait devoir se bouger les fesses. Il se leva, ou plutôt il roula, atterrissant sur le sol.
« Plus jamais je touche à l’alcool »
Le jeune voyageur attrapa son baluchon et repartit sur la route en direction du grand temple. La fin de son voyage était toute proche. Voilà un mois qu’il avait pris la route après la mort de sa sœur pour rejoindre le temple et y trouver, peut-être, des réponses. C’était une sacrée aventure pour un adolescent comme lui de traverser l’intégralité du pays depuis la forteresse pour devenir prêtre. Ses parents avaient essayé de l’en dissuader, son père voulant qu’il rejoigne le blizzard comme lui et sa mère préférant le savoir proche d’elle. Mais depuis la mort d’Elana, tout était devenu différent. Il se sentait perdu, lui qui était si sûr qu’il deviendrait garde n’arrivait plus à se projeter dans l’avenir. Il avait besoin de réponses, de trouver un but et c’était au temple qu’il pensait trouver tout ça.
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Le grand temple était immense. Un édifice massif construit sur les bords du Lac. Aord resta un instant bouche bée devant sa grandeur. Sas jambes lui faisaient souffrir le martyre. Il avait marché comme un forcené, ignorant les messages de douleurs de son corps tout entier et maintenant il ne tenait plus debout. Assit sur un muret, il vidait les dernières gouttes de sa gourde et grignotait un morceau de pain rassit qu’il avait glané auprès de l’aubergiste qui l’avait laissé dormir dans l’écurie. Dès qu’il aurait fini, il allait falloir qu’il trouve le courage de monter toutes ses marches pour se présenter au temple. Comment allait-il être accueilli ? Qu’allait-il dire ? Comment on devenait prêtre d’ailleurs ? Il n’avait eu que cet objectif en tête durant son voyage, mais maintenant qu’il était arrivé à destination, il se rendait compte qu’il n’en savait rien.
Il sauta au pied du muret, grimaçant quand le choc parcourut ses jambes endolories. Il était vraiment temps qu’il s’allonge pour la nuit.
« Allez Aord, encore un petit effort, se dit-il à lui-même pour se motiver. »
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Par la déesse, pourquoi y avait-il autant de marches pour un simple temple ? Aord peinait à gravir les dernières au bord de l’épuisement. Il était enfin arrivé, il pouvait voir la grande porte, mais personne devant. Merde, devait-il entrer ? Il se faisait tard, les religieux s’étaient sûrement retirés pour la prière u pour manger. Allez savoir ce qu’ils faisaient à cette heure.
L’adolescent se rapprocha, indécis, et fit le tour des colonnes ne sachant pas ce qu’il devait faire. Soudain, il vit une adolescente en robe de cérémonie qui passait au loin. C’était peut-être une initiée ? Devait-il aller lui parler ? Évidemment ! Sinon, il allait devoir dormir devant la porte.
« Eh excuse-moi, la héla-t-il en agitant la main »
Mais l’intéressée ne semblait pas l’entendre. Il se rapprocha donc en courant pour ne pas qu’elle s’en aille et le laisse seul dans la nuit tombante.
« Pardon de te déranger, eh, excuse-moi ! »
Il accourut à sa rencontre à bout de souffle. Il n’était pas très présentable. Sa peau avait cuit au soleil, prenant une teinte cuivrée assez profonde. Ses cheveux et sa barbe naissante ne semblaient avoir aucune organisation et un œil attentif y repérerait même les quelques brins de paille qu’il avait omis de retirer ce matin.
« Bonsoir, je m’appelle Aord, commença-t-il. Je suis venu pour devenir initié, mais je sais pas trop comment on fait. Tu pourrais m’indiquer le chemin ? Tu me sauverais ! »
Il lui adressa son plus beau sourire en priant qu’elle accepte.
- Ah, Mélia, attend ! Il ne faut pas sortir à cette heure !
Elle n'avait pas encore eu le temps de se changer puisqu'elle s'était occupée de sa cadette en premier. Sa longue aube blanche de cérémonie était surmontée d'une étole brodée d'argent représentant des plantes en pleine floraison et les sandales à ses pieds claquaient sur le pavé. Le couvre-feu avait retenti depuis longtemps, si quelqu'un les attrapait, elles auraient des ennuis... Enfin, pas la petite, mais Merry, oui, sans doute des tâches supplémentaires en guise de punition. Hors de question !
L'initiée sautilla sur un pied, tirant violemment sur le lacet de sa chaussure pour s'en défaire, tandis ce qu'une voix qu'elle ne connaissait pas l'interpellait. Trop concentrée sur l'épée de Damoclès qui pesait au-dessus sa tête, elle ignora l'appel, jetant un regard circonspect à l'individu sans s'arrêter. La deuxième chaussure rejoignit la première tandis qu'elle accélérait. Malheureusement, Mélia était plus rapide que bavarde, et la gardienne du lac l'avait mené de l'autre côté du temple, proche de la partie du bâtiment dans laquelle dormaient certains adultes. Elle rattrapa la petite juste avant qu'elle ne sorte de l'ombre et la souleva pour lui faire effectuer un demi-tour.
Merry faillit avoir une crise cardiaque quand elle se retrouva nez à nez avec l'inconnu. Il l'avait suivi ?! Devait-elle crier ? À cette distance du dortoir, quelqu'un accourrait en moins de deux minutes. Elle n'avait ni cristaux, ni objet de val... Sa main se porta automatiquement à son pendentif et elle plaça Mélia derrière elle en la retenant par le poignet, prête à courir en l'entraînant à sa suite. Sourcils froncés, méfiante, elle laissa le garçon se présenter. Il devait avoir à peu près son âge, sa peau cuivrée était à l'opposé de la sienne, blanche comme neige, et il ne sentait pas très bon, un mélange de sueur et de crottin de cheval ayant macéré dans la paille... Élément qu'on retrouvait d'ailleurs dans ses cheveux sombre et mal peignés.
Il semblait épuisé, et plus inquiet qu'inquiétant à la réflexion. La jeune femme se détendit un peu et l'écouta patiemment. Ainsi, il était ici pour prononcer ses vœux ? À cette heure ? Et dans cet état ? Quel drôle d'énergumène ! Une lueur naquit du côté du dortoir adulte et la demoiselle bondit en avant en plaquant sa main sur la bouche du garçon. Tout en plaçant son index devant ses lèvres, elle chuchota en les poussant dans l'ombre du temple, hors d'atteinte de la bougie qui partait dans la direction opposée :
- Suis-moi, Aord, nous discuterons dans le dortoir des initiés. Si l'on m'attrape ici, j'aurai des ennuis.
Mélia, à présent fatiguée et les cheveux de nouveau emmêlés, referma sa petite main sur la robe de la blanche qui la souleva pour la caler contre elle avant de faire signe au nouveau venu en le pressant :
- Par ici !
Elle fit le chemin inverse en expliquant à voix basse :
- Je m'appelle Merry, je suis Initiée. Tu ferais mieux de te laver et de passer une bonne nuit de sommeil, ainsi, tu te présenteras au temple dans de meilleures conditions demain. Tu as faim ?
Elle posa son doigt sur ses lèvres et Aord comprit qu’il s’imaginait beaucoup de choses. En plus, elle tenait la main d’une enfant. Il avait vraiment trop d’imagination ou alors c’était la fatigue ? Probablement … Il se tut comme on lui indiquait de faire, suivant du regard celui de la fille pour comprendre à quoi il devait faire attention. Il rougit légèrement quand elle s’écarta de lui pour libérer ses lèvres, mais la pénombre lui servit de couverture pour qu’elle ne le remarque pas. Il avait l’air d’avoir réussi obtenir son aide. Il la suivit dans les allées du temple en regardant avec minutie tout ce qu’il découvrit sur son chemin, comme un enfant qui découvrait le monde pour la première fois. Perdu dans sa contemplation des grandes arches de pierre, il n’entendit pas tout de suite que la jeune fille s’était de nouveau adressée à lui.
« Euh … enchanté Merry, moi c’est Aord … enfin tu le sais déjà …ahhh »
Le jeune homme se frotta l’arrière du crâne un peu pris au dépourvu par tout ce qui lui était arrivé. Il se souvint alors de ce qu’elle avait dit.
« Me laver ? Je suis si sal que ça ? »
Son regard fut une réponse en lui-même. Il s’inspecta alors sous toutes les coutures et remarqua qu’effectivement, il avait bien besoin d’un bain. D’un long bain et de beaucoup, beaucoup de savon. Il s’en trouva encore plus gêné d’apparaître comme ça devant Merry.
« Euh … oui, peut-être que t’as raison, j’aurais bien besoin d’un bain. Ça ne dérange pas ? Tu pourrais me montrer où c’est ? »
Il sourit gentiment pour essayer de faire oublier qu’il n’avait l’air que d’un garçon d’écurie. Quoique même un garçon d’écurie vivait mieux que lui ces dernières semaines. Aord n’était plus vraiment gêné de prendre un bain dans une rivière une fois par semaine, mais il venait de retrouver la civilisation et devait se plier à ses codes. Tout d’un coup, un grondement sourd retentit dans le couloir en provenance directe du ventre d’Aord. Trahi par son corps, l’adolescent ne savait même plus où poser les yeux.
« Eh oui, je ne dirai pas non à un repas, même sommaire. »
Encore un sourire gêné, décidément ça devenait une habitude chez lui.
« Je vais peut-être prendre un bain d’abord ? Tu pourras aller coucher la petite ? »
Il désigna l’enfant du menton qui commençait doucement à fermer les yeux. Il se retourna pour se diriger vers les bains, mais au bout de quelques pas, il se rendit compte qu’elle ne lui avait pas encore montré où aller. Il pivota donc sur lui-même, agacé de n’avoir pas réussi à se sauver.
« Et du coup les bains sont par où ? »
Il écouta sa réponse et prit la direction qu’elle lui indiquerait si tant est qu’elle le fasse. Aord se sentait totalement déboussolé, d’où son manque total de tact fasse à Merry. Traversé le pays était une chose, mais commencer une nouvelle vie dans cet endroit immense en était une autre. Lui qui avait été profondément convaincu que c’était sa destinée, hésitait maintenant aux portes de la maison de Lucy. Il finit par trouver les bains et commença à se laver en réfléchissant au chemin qu’il avait parcouru.
L’eau froide balaya la crasse ainsi que ses doutes, alors qui commençait à se nettoyer. Il avait fait tout ce chemin pour prononcer ces vœux. C’est ce qu’il voulait, il voulait dédier sa vie à Lucy et aux autres. Plus jamais, il ne voulait se sentir aussi perdu qu’à la mort d’Elana. Il voulait comprendre les desseins de la déesse, expliquer pourquoi le monde était tel qu’i était : injuste et cruel. Il avait encore beaucoup à apprendre. Peut-être que Merry saurait lui dire ce qu’il attendait ? Aord se dépêcha donc de finir sa toilette sans pour autant la négliger, il devait être présentable demain, et enfila une tenue propre.
L’adolescent rejoignit l’endroit où il avait quitté l’initiée tout à l’heure sur la pointe des pieds. Des ronflements se faisaient entendre un peu partout dans les couloirs, signe que les habitants du temple n’aimeraient pas être dérangés. Il poussa une porte et glissa un œil à l’intérieur.
« Merry ? chuchota-t-il en faisant le moins de bruit possible. »
- Bien sûr que non, je ne te l'aurait pas proposé sinon ! Viens.
Ils avançaient rapidement lorsque le ventre du garçon rugit. Car oui, à ce niveau, c'était un rugissement. Quand bien même elle n'en avait que peu entendu, elle savait les reconnaître ! Il avait l'air tout gêné, ce qui fit rire Merry derechef avant qu'elle n'explique à voix basse :
- Je vais te trouver quelque chose pendant que tu prends ton bain. À cette heure-ci il ne restera sans doute pas grand chose, j'espère qu'un fruit et une miche de pain te suffiront à tenir jusqu'à demain matin.
Melia remua dans ses bras et la blanche approuva :
- Il vaudrait mieux, oui. Suis ce couloir, et entre dans la pièce au rideau bleu. Tu devrais y trouver un baquet plein, des seaux, des serviettes et du savon en nombre suffisant. Pense à tout laisser propre derrière toi, sinon, c'est moi qui vais avoir des problèmes.
Comme elle avait l'habitude de s'occuper des plus petits, le ton de Merry était plus maternel qu'autoritaire, toutefois, il ne valait mieux pas ignorer ses consignes pour autant. Elle attendit d'être sûre qu'il entrait dans la bonne pièce et fit demi-tour pour aller poser la fillette dans son lit. Elle la borda délicatement et déposa un baiser sur son front avant de s'éclipser sur la pointe des pieds pour ne pas éveiller les autres. Personne n'avait de chambre individuelle, ils étaient toujours trois ou quatre par pièce, voire même plus dans certains cas. Passant par la buanderie, elle récupéra un pantalon et un maillot qui lui semblait à peu près de la bonne taille et fila les déposer devant l'entrée des bains.
Quelques minutes plus tard, la voix d'Aord lui parvint depuis les couloirs. En le voyant entrer dans une pièce, Merry l'attrapa par le poignet et sifflant :
- Shhhh, suis-moi, on va manger dehors, les miettes risqueraient d'attirer les rongeurs dans les dortoirs. Et comme ça, nous pourrons discuter sans réveiller les autres !
Elle l'entraîna à sa suite au-dehors et prit la direction d'une table de bois cerclé de bancs. Il y était disposé exactement ce qu'elle avait dit plus tôt. Le pain était certes un peu sec, mais il était du jour, et les pommes venaient du verger. Merry le relâcha et s'assit sur la table, à côté du plateau sur lequel elle avait tout posé avant de la questionner, la curiosité faisant briller son regard :
- Alors, tu viens d'où ?
Aord vit les vivres qu’elle avait dégoté pour lui et il commença à saliver. La fatigue lui avait fait oublier à quel point il mourrait de faim. Il le réalisa quand la simple vue d’une pomme lui fit oublier tous ces problèmes. Son ventre gargouilla, mais cette fois il n’y prêta pas attention. Il s’assit à la table précipitamment et joignit ses deux mains.
« Merci à vous déesse pour ce repas providentiel. »
Il se jeta alors sur son repas sans autre forme de procès. Même si le pain était sec et les pommes pas forcément très nourrissantes, il accueillit ce cadeau avec le sourire aux lèvres. Peu importe le goût, c’était le meilleur repas qu’il avait mangé depuis des semaines, tout du moins, c’était l’impression qu’il avait.
« Merchi, j’en avais vraiment besoin, dit-il la bouche pleine »
Le dernier morceau de pain disparu de sa bouche et son visage se détendit instantanément. Il ne connaissait pas encore cette Merry, mais elle venait de gagner 10 000 points avec son super repas !
« Je viens de la Forteresse, tout au Nord d’Aryon. Je suis parti il y a un mois environ pour rejoindre le temple. Ce fut un très très long voyage. Je te raconte pas comment j’ai galéré ! »
Il croqua dans une pomme et le jus sucré qui glissa dans sa bouche lui arracha un nouveau sourire heureux. Oui, son voyage n’avait pas été de tout repos. Partir avec presque rien pour traverser un pays n’était pas chose aisée. Il s’était un peu fâché avec ses parents avant de partir et ces derniers ne l’avaient pas vraiment aidé dans cette tâche.
« Eh tu sais si on peut envoyer une lettre à la Forteresse depuis le temple ? Mes parents seront sûrement rassurés de savoir que j’ai atteint ma destination. »
Il termina sa pomme et en attaqua une deuxième goulument avant de reprendre son histoire.
« T’imagines pas tout le chemin que ça fait depuis la Forteresse. J’ai l’impression d’avoir traversé le monde entier. La grande forêt, le fleuve, la capitale, le Grand-Port, le lac … C’était incroyable … enfin un peu moins quand je dormais à même le sol sous la pluie en compagnie des insectes, mais on s’y fait ! »
Aord semblait ravi de partager sa vie de sauvageon avec la jeune femme. Il faut dire qu’il n’avait pas eu de conversation posée comme celle là depuis des lustres. Celle qu’il avait eu était souvent teinté d’alcool. C’était plus facile d’oubliée comme ça …
« Dis je peux te demander comment ça se passe au temple ? Le frère qui tenait ma paroisse m’a un peu raconté, mais il n’y était pas allé depuis des lustres ? On doit faire quoi quand on prononce ces vœux ? Et on dort où ? On apprend aussi à se battre ? »
- Aucune idée, il faudrait poser la question à la sœur qui s'occupe des initiés, c'est elle qui gère les frais que nécessite chacun d'entre nous. Mais je pense que si tu demandes gentiment, il n'y a pas de raison qu'elle dise non ! La famille, c'est important !
Elle eut une pointe au cœur en disant cela et cacha sa gêne en attrapant une pomme avant de croquer dedans à belles dents. Heureusement pour la jeune fille, Aord ne semblait pas l'avoir remarqué, peut-être trop concentré sur son repas, ou le récit de son périple. Merry en profita pour le pousser à en parler davantage, vivant par procuration la traversé de tous ces paysages qui lui semblaient si lointains et intrigants :
- Quel était l'endroit le plus beau que tu as vu ? Et le plus terrifiant ? Tu n'avais pas froid sous la pluie ? Et la nourriture ? Ne me dis pas que tu t'es nourri de vers tout de même ?!
Une grimace de dégoût tordit le visage excité de la demoiselle qui enchaîna avec passion, balayant ses questions rapidement :
- On est comme une grande famille, chacun aide aux tâches comme il peut, il y a beaucoup d'heures de cours et de prières, on se couche et se lève tôt. Les dortoirs des initiés sont séparés en plusieurs chambres, d'un côté les garçons et de l'autre les filles. Les plus grands s'occupent des petits. Et oui, on apprend à se défendre et à désarmer et immobiliser, mais pas à initier, ce n'est pas le rôle de ceux qui se vouent à Lucy. Mais plus important ! À quel point le fleuve est profond ? Tu y as vu beaucoup de poissons ? Des différents de ceux du lac ? Et les gens, ils étaient comment ? Ils t'aidaient dans ton voyage ? La capitale, c'est comment ? Sœur Eve dit qu'il y a tellement de monde qu'on se marche dessus, mais qu'on y trouve tant de plats différents qu'on pourrait y rester toute sa vie sans se nourrir deux fois de la même façon ! C'est vrai, dis ?!
Merry s'était penchée vers lui, son regard d'azur plongé dans le sien sans honte ni réserve. Il aurait pu dire n'importe quoi, elle l'aurait cru, toute innocente et emplie de curiosité qu'elle était.
« Ohlala, je ne pensais pas que tu aurais tellement de question Haha. Laisse-moi une seconde pour tout assimiler sinon je ne vais pas réussir à répondre à chacune d’entre-elles ! »
Il s’essuya les yeux, humidifiés par ses larmes de rire. Son regard se fit plus sérieux quand il reprit.
« D’abord Mery, je veux te remercier de m’avoir accueilli comme ça au beau milieu de la nuit. Crois-moi, ce n’est pas tout le monde qui ferait ça pour un inconnu. Que la déesse te bénisse »
Un sourire chaleureux embellit son visage, souligné par le mince duvet de moustache qui poussait au-dessus de ses lèvres. Il croqua dans sa pomme pour la finir avant de s’essuyer la bouche dans sa manche sans aucune forme de civilité et il tourna sa chaise vers Mery.
« Alors, par où commencer ? Tu m’as posé tellement de questions, j’en ai perdu le fil ! Ah oui, mon endroit préféré … »
Aord se plongea dans ses souvenirs, recherchant une quelconque histoire d’intérêt pour sa nouvelle amie.
« Je crois … hum oui je crois que c’était le marché aux coraux. Quand je suis arrivé au Grand-Port, je n’avais plus un cristal en poche, alors j’ai cherché du travail. J’ai fini par en trouver sur les quais auprès d’un marchand qui voulait charger une navette pour la cité aquatique. J’ai aidé à tout charger sur l’embarcation et ensuite je suis partie avec eux pour décharger. On était en route et là … »
Le souvenir devint plus vivace, comme s’il le revivait. Il racontait tout dans ses moindres détails. Comment il s’était rendu compte qu’il avait le mal de mer. Comment les runes magiques s’étaient illuminées, entourant les bateaux d’une bulle, et comment il avait sombré sous les flots. Il lui raconta les fonds marins, les poissons, les algues et même une baleine. Dans ses mots transparaissaient sa naïveté d’adolescent et son émerveillement face à ce spectacle. Il lui raconta ensuite comment il avait visité la ville aquatique en attendant que son embarcation lève l’ancre. Il lui parla des bâtiments uniques qu’on trouvait sous la mer, de la grande coupole et aussi de l’immense marché magique qui faisait le cœur de la cité.
« C’était tellement … magique, je n’ai pas d’autres mots. »
Son regard était posé sur Merry, mais il semblait la traverser pour se perdre en un point infini. Toutes les émotions qu’il avait vécues remontaient.
« Quand je suis arrivé là-bas, j’étais tellement … heureux, c’était comme si je m’étais un peu plus rapproché de la déesse. J’aurais aimé … que ma sœur voie cela. »
Une ombre ternit le tableau de son visage. À la simple mention d’Elana, Aord s’était soudain assombri. Il pouvait être amusant de voir à quel point ses émotions passaient d’un sommet à un gouffre, mais il se laissait à chaque fois emporter. Son regard, toujours perdu dans le vide, se fit plus sec et une rivière de larmes commença à perler aux coins de ses yeux. Se rendant compte qu’il allait encore craquer, le jeune homme serra les dents et détourna la tête pour se cacher de Merry.
« Pardon, je …, bredouilla-t-il tandis que sa voix grinçait à mesure que sa gorge se serrait. »
U, soubresaut, un spasme et ensuite un sanglot. Tout le travail de Merry réduit à néant, car il avait dit un seul mot. Un seul petit mot qui avait le don de lui ravager l’esprit comme aucun autre. Il se leva, honteux de paraître aussi sombre devant elle, alors qu’il lisait encore un peu dans ses yeux la curiosité qu’il avait allumée en la rencontrant.
« Je … ghjkf, dit-il avant de se diriger vers la porte. »
Sa phrase était morte avant même de passer ses lèvres, rendant sa déclaration incompréhensible. Il traversa les couloirs, se mordant les lèvres pour se retenir de hurler et de réveiller tout le monde. Il accéléra, passant devant les portes des chambres comme un éclaire. Il poussa la porte de l’extérieur et il put laisser le barrage céder. Ses larmes coulèrent sans retenues et ses sanglots s’exprimèrent par des bruits étouffés. Encore une fois, il s’était réfugié ailleurs, loin des autres avec la déesse pour seule compagnie. Sourde et muette, comme elle l’avait toujours été.
- Lucy nous apprend à faire preuve de générosité, c'est donc bien normal. De plus, tu es venu pour nous rejoindre, il aurait été mal avisé de ma part de te repousser en dehors du chemin que tu t'es choisi. Tu peux compter sur moi pour t'aider à te faire une place ici !
Elle le regarda finir son fruit, puis s'essuyer sur la tenue propre qu'elle lui avait fournie. Bon, il y aurait un peu de travail... Mais rien d'insurmontable ! Il se décida à répondre à toutes ses interrogations et la blanche se mit à boire ses paroles avec bien plus d'intérêt que les leçons des Frères et Sœurs. Il lui parla de nombreux endroits que Merry n'arrivait même pas à imaginer. Le jeune homme avait un don pour raconter les histoires, les yeux de l'initiée brillaient de curiosité et elle hochait régulièrement la tête pour l'encourager à continuer et lui témoigner de son attention. Son regard lointain paraissait être resté prisonnier de cette ville aquatique qu'il décrivait à grands renforts de détails, et Merry l'envia d'avoir pu observer de tels endroits.
Le sourire quitta son faciès au moment où il évoqua une sœur qui n'avait visiblement pas pu le suivre. L'expression d'Aord était plus sombre encore, les larmes s'amassaient aux coins de ses yeux pour dévaler la courbe de ses joues et chuter de la pointe de son menton. La blanche tendit la main, incertaine de ce qu'elle devait faire, mais, déjà, il s'esquivait de ses mots, s'excusant, fuyant physiquement la situation. La douleur peignait ses traits si franchement qu'il n'était pas dur pour la jeune femme de comprendre que cette sœur n'était plus. Elle se leva, sans savoir vraiment pourquoi, quand il quitta son siège, le cœur serré de le voir ainsi, écho à sa propre douleur. Elle aurait voulu effacer le désarrois de ses yeux, secher ses larmes. Mais n'était ce pas malvenu ? Ils ne se connaissaient pas vraiment... Et puis Merry n'avait pas l'habitude de côtoyer des garçons...
Toutefois, quand il quitta son siège, fonçant tête baissée vers le bâtiment, la blanche n'hésita pas plus et lui emboîta le pas. Bon sang, il courrait vite ! Elle eut du mal à le rattraper, il parvint à ressortir par la deuxième entrée, celle de la cantine, avant que la jeune femme ne puisse l'atteindre derrière le bâtiment. Sa main saisit sèchement son bras, l'obligeant à pivoter, puis ses bras s'enroulèrent naturellement autour de ses épaules tandis qu'elle le serrait contre elle avec force. Là, il pouvait pleurer en toute humilité, sans se soucier du regard des autres. Son étreinte contenait avec peine les sanglots d'Aord, mais rien n'aurait pu la pousser à abandonner pour autant. Elle devait le soutenir, partager un peu de cette douleur, quitte à absorber sa tristesse, sa colère, la rancœur que l'on éprouve quand on perd un être cher sans comprendre, en continuant de se demander ce que l'on aurait pu faire de plus...
Il n'y avait pas de mots, rien qui aurait pu le soulager, il devait simplement se débarrasser de ce trop-plein, faire ce dont elle était incapable, "tout simplement". Plus tard, quand il se fut calmé, la blanche chuchota à son oreille avec une grande douceur presque maternelle, comme lorsqu'elle s'adressait aux plus petits :
- Je suis sûre qu'elle était avec toi dans cette ville aquatique. Elle sera toujours à tes cottés, tu sais, et vous avancerez sous le regard bienveillant de Lucy, ensemble. Tu verras !
Ses mains s’accrochèrent au dos de la jeune fille, chiffonnant sa robe. Il s’accrochait à elle comme si elle était le dernier morceau de réalité qui l’empêchait de sombrer dans le désespoir qu’il côtoyait depuis trop longtemps. Il ne savait pas pourquoi il se laissait tellement aller avec elle. Peut-être qu’il en aurait fait de même avec n’importe qui ? Ou alors, elle avait un don qu’il ne comprenait pas ? Ses larmes refluèrent enfin, calmées par Merry qui, étonnamment, n’avait rien dit pendant toute sa crise.
« Et où était la déesse quand elle suffoquait dans son lit hein ? maugréa-t-il. »
Aord se souvenait de son visage bleu alors que l’air manquait à ses poumons. Il se souvenait de sa main qui attrapait la sienne à la recherche d’un quelconque secours. Il avait essayé de la sauver, de l’aider. Il avait crié à l’aide, il avait prié, mais avant que quoique ce soit ne lui vienne en aide … elle était partie. Mais ce n’était pas la faute de Merry, il le savait. Il s’essuya les yeux avec sa main et se rendit alors compte de la proximité qu’il avait avec la jeune fille. Il rougit jusqu’aux oreilles et s’écarta gentiment sans la brusquer pour briser son étreinte. Il baissa les yeux.
« Pardon, c’est … c’était pas de ta faute. »
Il se sentait mal de l’avoir agressé comme ça, alors qu’elle avait été si gentille avec lui jusque-là. C’était même grâce à elle qu’il avait réussi à passer cette nouvelle crise. D’habitude, il se consolait autrement … généralement avec une bouteille. Il fit quelques pas et s’assit sur une marche du grand escalier.
« Merci, sans toi, ça aurait duré longtemps. »
Ses doigts se serrèrent sur la pierre froide et son visage s’assombrit, avant de se muer un sourire contrit.
« Je crois … que j’ai un peu exagéré comment ce voyage a été merveilleux et pleins de surprises … »
Il resta un instant silencieux à fixer les eaux luisantes du lac, y cherchant une réponse qu’il n’avait toujours pas trouvée. Tout d’un coup, la fatigue venait chatouiller ses paupières et il sentit son corps peser énormément. La tornade d’émotions qui l’avait traversé venait de saper ses dernières forces.
« Je crois que ce sera tout pour ce soir, je peux dormir où ? »
Son regard était interrogateur et disait clairement qu’il ne voulait plus parler de ce qu’il venait de se passer. Seul lui importait de fermer ses yeux et d’oublier l’instant d’une nuit, que la déesse l’avait abandonné.
- Ce n'est pas grave. Je comprends.
C'était bien plus vrai que son attitude désolée ne le laissait paraître. Des mots durs et douloureux restaient coincés dans sa gorge, des envies, non, des besoin de comprendre pourquoi parfois tout allait de travers. Après tout, son père l'avait rejeté à cause de sa magie, un don qu'elle n'avait pas choisi, et sa mère, pourtant l'incarnation de l'amour maternel, avait fini par en faire de même, ne pouvant supporter la vie au Temple, loin de son confort matériel. Pouvait-elle se plaindre pour autant ? Elle était appréciée des autres, mangeait à sa faim, portait des vêtements propres et en bon état, dormait à l'abri, au chaud et au sec, et recevait une éducation. Tout ça ne remplaçait pas la présence de ses parents, bien sûr, mais au moins, elle avait une chance d'avancer. Une telle opportunité ne se refusait pas ! Aord saurait il lui aussi saisir cette chance ?
Demeurant immobile, un piètre sourire au visage, mal à l'aise à présent que la tension retombait, Merry alla s'asseoir à ses côtés, laissant cette fois un bon espace entre eux. Le regard planté dans les étoiles, elle haussa les épaule, un peu triste d'apprendre la vérité. L'initiée répéta dans un souffle bas, la voix un peu tremblante, cachant tant bien que mal sa déception :
- Ce n'est pas grave. Je comprends...
Elle aurait voulu croire que c'était si simple de voyager, d'aller voir tous ces endroits qu'il lui avait décrits... Quand le jeune garçon demanda où il pouvait passer la nuit, la blanche prit sur elle d'afficher un sourire rassurant en se redressant d'une impulsion :
- Suis moi !
Il y avait peu de chambres qui n'étaient pas occupées, et amener un inconnu en pleine nuit dans l'une des autres aurait été imprudent. Aussi, elle le fit à nouveau traverser le réfectoire, puis le long couloir et l'amena vers l'une des pièces après la salle de bain. Il devait y avoir un nouvel arrivant et le lit avait été préparé en avance. À l'heure actuelle, il était donc inoccupé, Merry expliqua donc en chuchotant :
- Tu peux dormir là, je viendrais te chercher demain matin. À priori, personne ne devrait venir te déranger avant moi.
Elle hésita un instant sur le pas de la porte, le laissant explorer ses quartiers provisoires. Outre le lit simple aux draps propres qui sentait encore le savon, il y avait un petit bureau, une étagère ne pouvant contenir que quelques tenues et affaires personnelles, puis un autre lit, de l'autre côté dont le matelas avait été laissé nu puisqu'il n'était pas prévu qu'il soit occupé. La demoiselle l'interrogea innocemment :
- Est-ce que ça ira, tout seul ? Je peux aller chercher un oreiller et des draps et prendre l'autre lit si tu veux... Enfin, je ne veux pas m'imposer, mais après tout ça, et puis, dans un endroit que tu ne connais pas... Voilà, quoi.
Piquant un fard, elle fit demi-tour, prête à partir sans se ridiculiser davantage. Une image traversa son esprit alors que son pied était encore en suspens. La blanche vit Soeur Eve à ses côtés, chaleureuse et toujours souriante, lui faisant la discussion sans jamais se lasser de sa piètre compagnie. Les jours précédents le départ de sa mère avait été bien sombres. Parfois, on avait besoin de se reposer sur les autres sans avoir à le demander. Aussi, Merry fit un nouveau demi-tour sur elle même, telle une girouette indécise et s'exclama, écarlate :
- Tout bien réfléchi, je vais dormir ici, il faut bien que je surveille que tu ne fasses pas de bêtises !
Sans lui laisser le temps de refuser, elle disparut dans le couloir et ne revint qu'une bonne poignée de minutes plus tard, vêtue d'une chemise de nuit simple et portant dans ses bras ses affaires de couchage. Poussant la porte, elle souffla avec la discrétion d'une horloge sonnant minuit :
- Tu dors déjà ?
Son visage se détendit donc quand Merry ne chercha pas à en savoir plus. Oui, elle comprenait et il la remerciait pour cela.
« Merci … souffla-t-il à demi-mot. »
Un immense soulagement détendit son corps qui chassa un peu les sentiments sombres qui avaient ressurgi. Il se laissa encore entraîner par Merry en silence jusqu’à ce qui allait lui servir de chambre. Il n’avait pas remarqué au début, mais il se sentait terriblement fatigué. Comme si tout le poids du monde s’était posé sur ses épaules. Il était tellement reconnaissant à Merry pour tout ce quelle avait fait pour lui alors qu’il ne la connaissait à peine.
« C’est parfait j’aurais pas pu rêver mieux merci … »
Il lui adressa un sourire sincère. Elle était tellement gentille avec lui et il savait que quelque part, cela lui faisait du bien, mais il avait également trop honte de demander. Alors quand elle s’approcha, de la porte pour le laisser, il ne put que lui dire :
« Merci, Merry, merci pour tout. »
Elle partit en le laissant seul avec ses démons. Évidemment, ça ne pouvait pas durer. Elle n’allait pas rester pour effacer ses pensées noires. L’adolescent se détourna de la porte et retira sa chemise propre qu’il jeta sur le lit. Il n’avait pas l’impression qu’il arriverait à dormir malgré la fatigue. Trop de choses se bousculaient dans sa tête et même si son corps le suppliait de se coucher son esprit ne voulait pas le laisser en paix.
« Fais chi … »
La porte s’ouvrit en grand révélant un Aord ahuri qui regarda Merry avec des yeux ronds. Elle n’avait pas dit qu’elle le laissait dormir. Aord la regarda sans comprendre avant qu’elle ne reparte chercher ses affaires. Il cligna des yeux et sourit dans la pénombre. Il était heureux qu’elle reste avec lui, même s’il aurait aimé être un peu plus habillé. Il se rapprocha du lit et tira les draps avant de se glisser sur le matelas. Il soupira de soulagement quand il put enfin se détendre sur un vrai matelas. Il avait dormi sur du foin, du bois, de la pierre, mais là c’était vraiment le paradis. Bon, objectivement c’était un matelas de mauvaise qualité, mais il ne s’en plaindrait pas. Il resta allongé sur le dos, étalé comme une étoile en attendant que Merry revienne. Il luttait contre ses paupières lourdes et bouffies qui glissaient lentement vers le sommeil. Savoir que Merry était là l’avait … soulagé. Ces pensées avaient arrêté de tourner en rond un instant, accueillant le sommeil à bras ouvert.
Il se réveilla quand la voix de Merry se fit entendre dans la pièce, surprit d’avoir réussi à se laisser aller aussi facilement. À quel moment s’était-il endormi ? Il avait juste fermé les yeux un instant et c’était Merry qui l’avait réveillé. Il se redressa sur un coude en bâillant.
« Oui je crois que je m’étais assoupi sans m’en rendre compte. »
Il sourit tandis que Merry prenait place dans le deuxième lit. Il avait pris l’habitude d’être seul durant son voyage, alors une compagnie pour la soirée le rassurait un peu. Quand Merry fut installée, Aord se rallongeant, tirant le drap sur lui.
« Merry … chuchota-t-il. »
Il ne savait pas comment le dire. Comment lui faire comprendre qu’il lui était reconnaissant d’être là.
« Merci de … pour tout à l’heure. Ça … c’était important pour moi de … ne pas en parler … et … merci … d’être là. »
Il se retourna n’ayant plus rien à dire et ferma les yeux pour se laisse emporter par le sommeil. Demain l’attendait sa nouvelle vie.
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