Le froid était vraisemblablement de retour, du moins, ça avait été le cas cette nuit. Le printemps avait pourtant doucement pointer le bout de son nez, les paysages groggy étaient lentement sortis de leur torpeur hivernale. Le terne était devenu lumineux. Coloré. Tout ça te donnait l’envie de travailler, et mine de rien, tu n’avais pas chômé cette semaine. Tu avais commencé par ramener l’épée à la fameuse veuve … et coup de chance, celle que tu avais trouvée en morceaux dans la grotte du Changelement était belle et bien l’arme que la vieille dame recherchait avec tant d’ardeur. De même, la plaque était celle de son mari. Tu avais donc affiché une petite moue satisfaite lorsqu’elle avait donné sa confirmation, avant de prendre le temps de calmer les sanglots de cette pauvre femme bouleversée. Au final ? Cette vieille mégère avait rechigné à cracher les cristaux qu’elle devait, et devant l’intendant à la guilde, elle avait demandé à verser moins que la prime initiale simplement à cause de l’état de l’épée, invoquant le fait qu’elle allait devoir investir pour reforger la lame et qu’elle n’avait pas spécialement les moyens. Étrangement, son cinéma, loin de t’attendrir n’avait fait que t’énerver, surtout lorsque l’intendante avait finalement décidé de lui laisser retirer un petit pourcentage sur ta prime. Trente-cinq cristaux de moins sur la petite centaine attendue. Il avait fallu que tu fasses preuves d’un self-control hors du commun pour ne pas faire un scandale, surtout compte tenu des risques que tu avais pris, et que tu avais fait prendre à Marc-Antoine pour récupérer cette foutue lame rouillée.
Fort heureusement, tu avais eu le temps de faire deux quêtes supplémentaires à la suite qui elles ne t’avaient pas posé de soucis majeurs et t’avais permise de faire le plein de cristaux. La dernière en date consistait tout simplement à ramener quelques herbes médicinales à une pharmacienne dans un village se trouvant à approximativement deux jours de marche de la forteresse, non loin de la forêt. La maison de cette femme était une sorte de petite ferme isolée, se trouvant à deux heures environ d’une bourgade au nom imprononçable. Pour gagner du temps, tu avais donc pris la décision de voyager de nuit sur la seconde partie du chemin, tu étais arrivée chez la pharmacienne avant le levé du jour et à l’aube, tu avais eu le loisir de poser tes affaires sous l’une des tables de la taverne de la petite ville. Le froid, la marche, tout ça avait contribuer à te fatiguer, si bien que tout en buvant ton infusion bien chaude, tu avais fini par t’assoupir un instant. Tu t’étais arrangée pour faire savoir à ton petit-ami que tu serais dans les parages, tu ne savais pas trop s’il aurait la possibilité de venir, ou s’il était encore occupé par ses propres affaires, cependant, dans le but de l’attendre, tu avais prévu de passer la journée ici, ainsi que la nuit à venir. Tu repartirais dés le lendemain, surtout si le blond n’avait pas pointé le bout de son nez d’ici là.
Après quelques longues minutes de somnolence … tu es comme dérangée. Tu fronces les sourcils en sentant ton pied bouger. Une grimace. Un léger grognement, et puis, tu sursautes tout en lâchant un cri alors que les petites dents d’Azur viennent se planter dans ta main.
Il s’y était fait. Marc-Antoine avait fini par avoir l’habitude de sa nouvelle vie. Surveiller les alentours, s’assurer de ne pas avoir été suivi ; toutes ces activités qui lui paraissaient étrangères autrefois lui étaient désormais familières. A chacun de ses déplacements, il vérifiait encore et encore certains détails tels que la présence de chevaliers dans la ville. En général, il ne s’attardait pas. Une fois arrivé en ville, il faisait ce pour quoi il était venu puis s’en allait. Aujourd’hui, Marc-Antoine se rendit dans un petit village afin de retrouver Terry. La jeune aventurière avait informé son amant de sa présence et c’est tout logiquement qu’il fit le déplacement afin de lui rendre visite. Les deux tourtereaux ne s’étaient pas vus depuis plus d’une semaine. Le de l’Épée avait profité de ce laps de temps pour mettre à bien son plan machiavélique. Legion avait fait le nécessaire et, si tout se passait selon son plan, ce soir même il serait le dernier membre de sa famille debout.
Intérieurement, le cadet de l’illustre lignée jubilait. Son statut de criminel ne lui permettait pas de profiter de son héritage néanmoins l’idée de ne plus avoir affaire à ses frères et sœurs l’enchantait. Selon lui, s’il ne pouvait profiter du manoir et du rang de chef de maison alors personne parmi ses aînés ne devait jouir de ce privilège. Il préférait encore voir les trésors des de l’Épée brûler plutôt qu’entre les mains d’Adeline, de Shir ou d’Alberic.
Rêveur, il poursuivit sa marche et vit un pickpocket quitter la taverne lui faisant face. L’homme courait en sa direction, le frôla puis le dépassa. Marc-Antoine pour sa part ne bougea pas d’un cil et ne fit même pas l’effort de se retourner. Oh, bien sûr il se doutait que l’homme avait commis un terrible larcin mais le grand blond ne daigna pas réagir pour autant. Pire encore, il esquissa un sourire, se moquant tacitement de la naïve personne ayant été volé par le pickpocket. « Il ne faut vraiment pas être très doué pour se faire avoir par ce genre de manant » s’était-il dit. Quelques secondes plus tard, alors que l’individu était déjà loin, Marc-Antoine vit Terry sortir du même établissement. Azur se trouvait sur l’épaule de sa maîtresse. Celle-ci ne remarqua pas notre héros qui, dissimulé sous une cape et une masse de vêtements sombres, était difficile à reconnaître.
La scène face à lui était cocasse. Terry venait de sortir en furie, peu après un homme qui avait tout d’un voleur à la tire. Les petites cellules grises du bretteur ne tardèrent pas à résoudre cette « équation ». En effet Marc-Antoine comprit bien vite que Terry avait été la victime d’un larcin et il daigna enfin tourner les talons.
▬ Ils sont loin, souffla-t-il, désabusé.
Le de l’Épée ne souhaitait pas courir mais s’exécuta malgré tout. Il maîtrisait de mieux en mieux son pouvoir et pressa le pas. Alors que l’adrénaline fluait dans les cavités cérébrales du héros, celui-ci avait en visuel l’aventurière et le voleur. Estimant Terry assez forte pour se débrouiller seule, il ne souhaita pas intervenir mais restait à portée afin de lui prêter main forte en cas de besoin.
Ça n’arrivait qu’à toi ce genre de choses, du moins, c’est ce que tu étais en train de te dire alors que tu t’étais lancé en courant à la poursuite de ton voleur. C’est qu’il ne manquait pas de culot celui-là, il avait chipé ton sac alors que tu t’étais endormie, certes, mais il l’avait fait au nez et à la barbe de toute la clientèle de la taverne … et évidemment, sans doute par facilité et confort, personne n’avait rien vu. Tu enrages. Tu te sentais fatiguée, encore un peu groggy par la toute petite sieste que tu venais de faire, tu n’avais aucune envie, et surtout, aucune motivation pour courir à travers les rues après ce pauvre type. Et pourtant. Il le fallait, tout simplement parce que ce simple sac contenait toutes tes affaires à l’exception de tes armes que tu gardais sur toi – conseil de tonton - … Cristaux. Lampe magique. Provisions. Tout était dedans, hors de question donc de le lui abandonner sans essayer de lui remettre la main dessus, et quand ce serait fait bon sang, il allait t’entendre.
Tu ne peux rien tenter. S’il est effectivement ralenti par les épaules qu’il a tendance à bousculer et par sa tendance à se retourner depuis qu’il a remarqué que tu lui courrais après, tu l’es tout autant. Il a de l’avance, tu n’es pas particulièrement rapide et surtout, la foule ne cesse de te bousculer. Il y a bien trop de monde, tu ne peux rien tenter et même lorsque tu viens, sous le coup de la colère attraper ton arc et une flèche, tu te rends compte qu’un tir en pleine rue serait bien risqué. Tu pourrais blesser n’importe qui. Ton arme en mains, tu patientes donc, tu continues de courir, bien décidée à ne pas lâcher l’affaire et finalement … il sort de la foule, il sort même de la rue principale, une rue qui débouche en dehors du petit village. Il s’éloigne sur la route et une fois sortie de la foule à ton tour, tu décoches l’une de tes flèches sans prendre la peine de viser. En réalité, ce serait mentir de dire que tu as bonne conscience, le fait est que tu regrettes ton tir aussitôt. Heureusement, ta flèche passe simplement tout près de son oreille, tu t’imagines qu’il a dû l’entendre siffler puisque l’espace d’un instant il semble surpris, surpris au point de perdre l’équilibre ce qui te permet de manger un peu de la distance qu’il était parvenu à instaurer entre lui et toi.
Tout aurait pu se passer au mieux, maintenant. Tu le tenais. Il lui aurait suffit de te rendre tes affaires, et te connaissant, tu l’aurais laissé s’enfuir sans rien lui demander de plus. Oui mais voilà. Lui. Il te sourit. Un sourire narquois qui te fait froncer les sourcils. Immédiatement, tu comprends qu’il ne compte pas abandonner le fruit de son larcin si facilement, peu importe qu’il soit acculé … il se laisse tomber à genoux, ton sac à ses pieds, il s’agite un instant et sous tes yeux, son corps change, se transforme pour prendre la forme d’une créature qui semble grandir à vu d’œil.
La paresse avait envahi le de l’Épée. Courir l’ennuyait au plus haut point mais il fit un effort et poursuivit la rousse ainsi que le voleur. Ce dernier s’arrêta net face au tir de Terry. Encapuchonné, Marc-Antoine était resté à bonne distance du duo. Il ne put réprimer un sourire en voyant l’aventurière si sûre d’elle – du moins en apparence. Comme quoi, il avait raison de ne pas être intervenu. L’archère était tout à fait capable de se sortir de ce faux pas seul. Selon Marc-Antoine, d’ici quelques secondes le voleur s’en irait la queue entre les jambes. Avec un peu de chance, il implorerait même la clémence de sa bien-aimée.
Quelle naïveté de la part du de l’Épée.
Si le voleur posa un genou à terre, c’était pour mieux se relever. L’homme avait laissé place à une bête de quelques mètres de haut. Anxieux, Marc-Antoine songea à intervenir. La pluie venait de tomber. Pour lui, ce phénomène météorologique témoignait d’un manque de confiance de Terry en ses propres capacités. La demoiselle doutait, avait probablement peur, d’où l’averse. Ne voulant prendre aucun risque, le de l’Épée fit quelques pas, se plaça aux côtés de Terry et se dressa lui aussi contre le Cerberus. Marc-Antoine retira le morceau de tissu couvrant sa tête et dévoila son visage à la jeune femme.
▬ Besoin d’aide ?
La question était rhétorique. Il aurait aimé que ses retrouvailles se déroulent dans d’autres circonstances, dans une atmosphère plus détendue mais il n’en fut rien. Bien décidé à récupérer le sac de sa petite amie, il dégaina son épée.
▬ Il va falloir que tu m’aides.
Doué au combat ou non, le voleur possédait un pouvoir puissant. Se transformer en Cerberus n’était en effet pas anodin. Certes Marc-Antoine avait vaincu un Kerberus Alpha dans la tour néanmoins, pour ce faire, il avait été assisté de Yuduar et de Cassiel. Sans forcément attendre de Terry le même degré d’aide, il espérait qu’elle pouvait se montrer utile. Selon toute logique, l’aventurière avait progressé à l’arc. En outre, il y avait ce compagnon, Azur … Marc-Antoine ne l’avait jamais vu se battre mais espérait de lui qu’il soit doté de certaines compétences plus utiles que celles de sa maîtresse.
Si en temps normal Marc-Antoine aurait d’abord essayé de raisonner son adversaire, il ne se donna pas cette peine dans le cas présent. L’homme s’était volontairement transformé. De plus, le fugitif doutait de pouvoir faire la conversation à un Cerberus. Il ne connaissait pas réellement les tenants et les aboutissants d’un tel pouvoir mais présumait – probablement à tort – qu’il n’y avait plus rien d’humain chez ce voleur dès lors qu’il laissait son côté animal prendre le dessus. Ainsi donc, il s’élança, en espérant que les flèches de Terry lui permettent de trouver une ouverture.
Ne pouvait-il pas simplement te rendre tes affaires sans faire d’histoire ? Tu étais loin d’être impressionnante, loin d’être méchante, aussi, et tu partais du principe que tout ça se voyait chez toi au premier regard. Tout ce que tu voulais, c’était récupérer ce fichu sac et pourtant, pourtant, oui, ce crétin persistait à vouloir se battre. Était-il aussi désespéré que ça ? Au point de se transformer en Cerberus si près d’un village et de chercher le combat juste pour quelques cristaux, une lampe magique et les remèdes de ta grand-mère ? « Quel crétin … » Une voix. Elle résonne, là, toute proche de toi … c’est une voix presque enfantine, ou alors féminine. Une voix inconnue qui te force à te retourner, à regarder autour de toi et tout ce que tu vois, c’est cette silhouette qui vient se positionner près de toi. L’homme retire rapidement la large capuche qui dissimulait son visage et évidemment, tu reconnais aussitôt les traits de ton petit-ami. Sa question reste sans réponse, probablement sous l’effet de la surprise, ou alors est-ce le fait que non, vraiment, cette voix n’était pas la sienne et tu es complètement sûre de ça.
Au bout de quelques secondes, alors que tu es restée silencieuse et que déjà, Marc-Antoine a son épée en main près à te filer un coup de main avec cette créature, tu secoues la tête. Tu dois simplement être fatiguée, rien de plus. Tu as du … penser, ou rêver. Bref. C’était ton imagination. Il n’y avait personne de toute façon.
L’espoir fait vivre mais en l’occurrence il faillit tuer Marc-Antoine. Sa collègue n’était pas au mieux de sa forme et ses flèches n’aidèrent en rien l’épéiste à trouver l’ouverture tant recherchée. Le de l’Épée s’arrêta à mi chemin, évita un coup de griffe ennemi puis adressa un regard inquisiteur à Terry. La jeune femme n’était pas très douée arme en main néanmoins il ne la pensait pas aussi inapte au combat. Ne pas réussir à toucher ce monstre relevait de l’exploit tant sa taille et sa largeur dépassaient la « norme ». Qu’à cela ne tienne, il se débrouillerait seul.
Trop occupé à éviter les coups de griffes et autres attaques du Cerbereus, Marc-Antoine n’enclencha pas la moindre riposte. Il n’y avait pas l’espace, pas la place pour une estoc ou une quelconque tentative. Marc-Antoine comptait sur son endurance. Il s’imaginait que son adversaire ne tarderait pas à fatiguer, à ralentir toutefois il n’en fut rien. Bientôt, l’épéiste fut même touché à la cuisse par une des griffes du bandit. Il grimaça de douleur cependant aucun bruit ne quitta ses lèvres. Le fratricide ne souhaitait pas en arriver là mais il allait bientôt tenter une percée désespérée, au risque d’être grièvement blessé. Il n’arrivait pas à approcher son ennemi et estima que foncer droit devant lui était finalement sa meilleure opportunité. Il aurait pu en être autrement si Terry s’était montrée utile cependant, jusqu’à présent, sa belle n’avait pas été d’une grande aide.
Alors que la situation se corsait pour le duo composé de Marc-Antoine et de Terry, le ciel s’assombrit plus encore. Notre héros entamait sa percée suicidaire mais un éclair l’arrêta dans sa course. La foudre perça les nuages, frappa le sol et termina sa route entre Marc-Antoine et le monstre. Alerté et probablement apeuré, la créature quitta les lieux. Le chevalier noir pour sa part fronça les sourcils et fixa le sol. Son attention se portait sur cette crevasse créée par l’éclair. Il leva ensuite les yeux au ciel, comme pour déterminer la cause de cet évènement météorologique. « Terry ? » s’était-il demandé. Il tourna les talons et vit sa camarade s’effondrer sous ses yeux. Marc-Antoine la rejoignit sans plus attendre avant de lui demander :
▬ Tu vas bien ?
Question inutile, pour sûr, à laquelle Terry ne put répondre de par son état. Marc-Antoine passa une main sous ses jambes, une autre sous sa tête et porta l’aventurière. Au préalable, il avait récupéré son sac et alla rejoindre l’auberge la plus proche. Azur de son côté virevolta autour du chevalier et de la rouquine avant de se poser près de sa maîtresse encore inconsciente.
Une fois arrivé dans un établissement propice au repos, il installa Terry sur le lit et patienta de longues minutes, le temps qu’elle retrouve ses esprits et reprenne ses forces.
Cet éclair … C’était elle. Il en était persuadé. La situation n'était pas propice aux réjouissances pourtant il ne put s'empêcher de sourire.
C’est toujours comme ça, ton pouvoir, plus que par ta volonté est contrôlé par tes émotions. Ta colère, ta peur, ta tristesse ou ta détresse, tant de facteurs qui trop souvent ont servi à déclencher la pluie, uniquement la pluie, rien de plus. Et à chaque fois c’est pareil, tu as la tête qui tourne, ou alors tu t’effondres, complètement vidée de ton énergie magique dont tu ne contrôles pas le flux non plus. C’est le contrecoup de ton pouvoir, un pouvoir que tu n’as jamais trouvé utile et qui n’a jamais rien fait de bien impressionnant … jusqu’à présent. Perturbée par cette voix qui ne cesse de retentir et dont tu ne trouves pourtant pas la provenance, tu as eu le temps de voir cet éclair frapper le sol à moins d’un mètre des pattes du monstre. Tu l’as même aperçu alors qu’il tournait les talons pour s’enfuir avant de sombrer dans l’inconscience.
Tu ne sais pas combien de temps s’écoule après ça. Si ça se compte en secondes, en minutes, en heures. Toujours est-il que lorsque tu ouvres les yeux, tu n’es plus dehors, tu n’es plus sur le chemin, tu es allongée sur un lit dans une pièce qui t’es complètement inconnue mais que tu identifies comme étant la chambre d’une auberge tant l’endroit est vide, dépourvu de décoration ou de personnalisation. Ouvrir les yeux s’avère être le plus simple, se redresser en revanche est clairement plus compliqué et une fois assise, il te faut prendre quelques longues secondes, la main posée sur ton front pour que le monde autour de toi ne cesse de te donner l’impression d’être en perpétuel mouvement au point de t’en donner la nausée. Il était rare que tu restes inconsciente plus de deux minutes, rare aussi que tu peines autant à reprendre tes esprits. Après une ou deux minutes de silence, tu as cependant enfin le loisir de regarder autour de toi. Tes affaires sont là, Azur est couché sur tes jambes, la tête relevée il te fixe avec insistance et comme pour le rassurer tu viens passer tes doigts sur le dessus de sa petite tête.
Détournant ton attention d’Azur, tu bouges, tu bascules tes jambes sur le côté du lit avant de te lever et de rester debout quelques secondes, puis de faire quelques pas mal assurés pour attraper rageusement ton sac.
Marc-Antoine s’assit sur une chaise posée là en attendant le réveil de sa petite-amie. Extenuée, Terry s’était évanouie et ne se réveilla pas de sitôt. Le chevalier en armure était lui aussi fatigué par la route et son combat. De fait, il ne tarda pas à s’assoupir à son tour. Le sommeil du jeune homme n’était pas profond. Bien qu’il se trouvait dans un état de semi-conscience, Marc-Antoine rouvrait les yeux à intervalle régulier, vérifiant par la même occasion l’état de sa bien-aimée. C’est après un peu plus de trois quarts d’heure que la belle rouvrit les yeux. Elle caressa le dragonnet puis se leva du lit, le tout ponctué d’excuses et de constatations rhétoriques.
▬ Hey, souffla-t-il calmement afin d’apaiser ses craintes, sans grand succès visiblement.
« Retourner à la taverne ? Mais de quoi parle-t-elle ? » pensa-t-il sur le coup. Un peu lent d’esprit, il fronça les sourcils et se leva de son siège. Le de l’Épée ne voulait pas la quitter et ne souhaitait pas non plus la voir retourner servir des verres aux voyageurs et aventuriers venus se reposer chez son père. Dans le fond, il se fichait de prendre des risques ou de devoir « tout faire ». Néanmoins il se doutait que la situation ne pouvait durer indéfiniment. D’une part car ils finiraient tout deux tués un beau jour s’ils poursuivaient sur leur lancée et d’une autre part car Terry ne pouvait se satisfaire de ce rôle ingrat. Être un boulet n’était pas dans les plans de l’aventurière qui, de jour en jour, enrageait en voyant son manque de progrès. Le sac fut la première victime de l’agacement de l’aventurière et alla rejoindre le lit. Azur s’envola afin d’esquiver le projectile, Marc-Antoine s’approcha de la rousse et ses bras l’enlacèrent. Il plaça sa main droite sur la nuque de la jeune femme. La tête de cette dernière vint se poser sur le torse du garçon qui, d’un geste de la main, accompagna le mouvement. Dans la foulée, le ton qu’il employa se voulait rassurant :
▬ Je vais bien. Ça aurait pu être pire si tu n’étais pas intervenue.
En effet, sa charge avait eu peu de chance de réussir. Il aurait probablement blessé le Cerbereus néanmoins celui-ci aurait attaqué en retour. Le fait que cet éclair tombe ainsi, à ce moment, avait été une chance. Une chance que Marc-Antoine mît au crédit de Terry. Le fugitif ne croyait pas au hasard. Si la rousse était en mesure de faire tomber la pluie peut-être pouvait-elle – en de rares occasions – générer du tonnerre. C’est cette hypothèse qu’il souhaitait vérifier au plus vite.
▬ Je t'aime, je ne veux pas qu’on arrête de se voir. Et je ne veux pas te voir servir les verres d’aventuriers alors que tu as tout ce qu’il faut en toi pour faire partie des meilleures.
Il marqua un temps d’arrêt. A ses yeux, le potentiel de son pouvoir dépassait de très loin le sien.
▬ Ce que tu as fait tout à l’heure … Peut mettre le monde à tes pieds.
L’autre jour, Marc-Antoine avait dit qu’il l’aiderait à se défendre. Il n’avait pas menti et allait s’y atteler. Dans l’intérêt de la jeune femme comme du sien, il l’assisterait dans sa quête de pouvoir.
C’est un complet mélange de rage, de déception, et regrets qui gronde tout au fond de toi. Tu ne sais probablement même plus réellement ce que tu dis, ou encore ce que tu penses. Tu aimerais parvenir à être plus forte, tu aimerais savoir te servir d’une arme, tu aimerais savoir maîtriser ce pouvoir qui n’est finalement qu’une tare depuis ta naissance. Tu te voyais accomplir de grandes choses, et tu avais toujours été soutenue et encouragée par les gens qui t’entouraient. Ton père. Ton oncle. Même ta grand-mère. Sans compter les amis de la famille. Les clients les plus réguliers de la taverne. Aniel. Ils avaient tous à leur façon placer en toi une certaine confiance et à chaque fois que tu réitérais ce genre de bêtise, d’échec, tu ne pouvais t’empêcher de t’en vouloir et de penser que tu trahissais cette confiance. Evidemment que tu avais besoin de temps … c’était nécessaire à l’apprentissage, et dans d’autres circonstances, peut-être que tu aurais accepté ce fait. Peut-être que tu aurais consenti à prendre tout le temps nécessaire. Seulement, ce n’était que des peut-être et avec les derniers événements survenus dans ta vie, tu étais bien consciente qu’il était plus que nécessaire que tu apprennes à te débrouiller seule.
Depuis que tu avais rencontré Marc-Antoine, tu t’appuyais énormément sur lui. C’était comme ça depuis le début, et tu n’avais déjà pratiquement plus assez de doigts pour compter les fois où il avait fallu qu’il te vienne en aide. La dernière chose que tu souhaitais, c’était qu’il soit blessé, voir tué à cause de toi. La peur de le perdre était déjà bien assez présente … C’est bien pour ça que sur un coup de tête, tu en viens à lui dire ne plus venir à toi, d’éviter de te voir. Tu n’as pas envie de ça, évidemment, pourtant, sur l’instant, ça te semble être la meilleure des solutions. Une solution loin d’être approuvée par le jeune homme, néanmoins. Il s’est approché de toi, et alors que tu soupires, ses bras t’enlacent, il t’attire à lui et ta tête vient prendre appui contre son torse. Tu restes silencieuse, ne sachant quoi ajouter, ni même quoi penser en vérité. Il essaie de te rassurer, tu le sais. Mais tu sais aussi que tes paroles ont très certainement une part de vérité, que tu le veuilles ou non. Et pourtant … pourtant, à mesure qu’il parle, une part de toi ne peut s’empêcher de le croire. Lui, il continue d’avoir confiance en toi, malgré toutes les fois où tu as pu démontrer que tu manquais de pratique et d’expérience, lui continue de penser que ta place est ici et non pas dans la taverne de ton père.
Il faisait effectivement allusion à l’éclair tombé entre lui et son opposant. Ce même éclair qui avait provoqué la panique du polymorphe et poussé ce dernier à fuir. Terry ne maîtrisait pas pleinement son pouvoir néanmoins le potentiel caché en elle était immense. Ni l’aventurière ni Marc-Antoine n’avait idée des limites de son talent. Jusqu’à présent elle n’avait jamais expérimenté en long en large et en travers l’étendue des possibles, il y avait donc tout à faire, tout à découvrir. Dans l’esprit de Marc-Antoine, si la demoiselle était en mesure de faire tomber la pluie et la foudre, elle était probablement capable de commander aux vents et à la grêle. Il se souvint alors d’une bribe de conversation qu’il avait eu avec Terry lors de leur premier voyage à Bourre-la-Ville. Ce jour-là, Marc-Antoine avait présumé – à tort – que le talent de la rousse était de maîtriser les évènements météorologiques. Celle-ci l’avait corrigé en indiquant que seule la pluie était sous son contrôle … Finalement, il avait été visionnaire. « Entre de bonnes mains, un tel pouvoir serait redoutable » pensa-t-il. Le tout était maintenant de façonner le diamant brut qu’était Terry. Pour ce faire, il avait sa petite idée quant à la méthode à suivre. Toutefois l’heure n’était pas aux entraînements mais bien à la parole, il lui fallait rassurer la jeune femme sur ses capacités, lui faire comprendre que tout cela était normal :
▬ Peu importe comment tu as fait. Avec de l’exercice, je pense que tu pourrais recommencer, oui. Tout le monde éprouve des difficultés au début, tout le monde.
Lui-même se souvenait avoir eu du mal. Son talent était bien moins surprenant que celui de diriger la foudre pourtant il lui avait fallu des semaines avant de saisir les modalités de fonctionnement de ce don apparu tardivement. Encore aujourd’hui, il ne maîtrisait que partiellement son pouvoir. Tous les jours, il en apprenait un peu plus sur ce qu’il lui était possible de faire ou non.
Comme pour justifier son geste, l’ex-serveuse mentionna une voix entendue plus tôt. Marc-Antoine resta silencieux, incapable de se souvenir de quelconques bruits provenant de femme ou d’enfant. L’adrénaline le poussait à se concentrer sur une seule et même tâche. En l’occurrence, il s’était focalisé sur son adversaire et était dans l’incapacité de confirmer ou infirmer les dires de sa petite-amie. S’il y avait eu une voix, il ne l’aurait pas entendu …
▬ Euh.
S’il ne pouvait être catégorique quant à la voix entendue plus tôt, il était ici sûr de lui : personne n’avait parlé. Il relâcha son étreinte et vit sa camarade reculer. Elle fixa alors Azur et le regard de Marc-Antoine se posa à son tour sur l’animal mythique.
▬ Non. Je n’ai rien entendu. Mais … Tu sais … Un dragon, ça ne parle pas. Du moins pas à ma connaissance.
N’étant ni monstrologue, ni expert en zoologie, ses connaissances dans le domaine étaient limitées. Peut-être que d’une façon ou d’une autre cette créature était en mesure de communiquer avec Terry. Une autre possibilité était que la jeune femme soit tout simplement en proie à la fatigue. Etant un homme de logique, Marc-Antoine penchait pour la seconde option … A tort.
Tout le monde … Hm. Il avait effectivement probablement raison. Peu importe la magie de ce monde, ça ne changeait pas le fait que pour obtenir certaines choses, il fallait travailler, travailler dur même dans certains cas. Tu ne pouvais pas tout obtenir en claquant des doigts et sans faire le nécessaire. Tu avais laissé ton pouvoir de côté durant bien trop longtemps, et pourtant, il ne manquait pas de susciter certaines réactions lorsque tu en parlais. Peut-être avais-tu réellement du potentiel. D’ailleurs, si tu étais bel et bien responsable de cet éclair, c’était même assez certain. Pour l’heure, cependant, tu étais préoccupée par toute autre chose … Cette voix. Au départ, tu l’avais mise sur le compte de la fatigue, de ton imagination, ou même de la peur. En clair : tu avais rêvé, personne ne t’avait parlé. Et pourtant, là, alors que tu te sentais tout de même relativement reposée et que tu étais au calme et en sécurité, elle avait de nouveau résonné. Où ? Aucune idée. Elle était proche. Mais tu étais bien incapable de définir si elle venait de devant toi, de derrière toi et par réflexe, c’est sur Azur que ton regard s’était posé. Les mots avaient été clairs et parfaitement audibles, aussi, maintenant que le silence régnait, tu avais posé la question à Marc-Antoine … Lui, il n’avait rien entendu.
Finalement bien décidée à mener l’enquête, tu viens te mettre à genoux sur le plancher devant la créature que tu soulèves et que tu observes fixement.
Le repas pris à l’auberge te rends les quelques forces qu’il te manquait encore. Tu avais faim. Sans doute à cause de l’énergie dépensée face au Cerberus. Si effectivement, tu n’avais pas fait grand-chose en apparence, utiliser ton pouvoir avait piocher dans tes maigres réserves. Le déjeuner avalé, donc, vous quittez l’auberge pour rejoindre la sortie de la ville et c’est là, après quelques centaines de mètres, au milieu de nulle part, loin des habitations que tu te décides à poser ton sac au sol.
Sûr, il l’était. Cela se saurait si les monstres étaient en mesure de communiquer avec les humains. Même s’il n’était pas un grand connaisseur, Marc-Antoine était formel. L’assurance qu’il dégageait ne parvint cependant pas à convaincre Terry. La demoiselle s’assit puis se mit à faire la conversation à Azur. Médusé, le de l’Épée écarquillait les yeux et observait la scène. Durant de longues minutes, elle resta là et tentait d’entrer en communication avec l’animal bleuté. A ses yeux, tout cela était surréaliste. Pour un homme manipulant les ombres et vivant depuis ses plus jeunes années dans un monde où la magie régnait en maître Marc-Antoine était loin d’être fantasque ou imaginatif. Malgré tout, comme pour rassurer son âme sœur, il répondit avec sérénité :
▬ Oui oui, tu l’as entendu. Je te crois. Tu devrais te reposer et réessayer plus tard. Il sera peut-être plus conciliant.
Il ne croyait pas un mot de ce qu’il venait de dire. En vérité, il espérait simplement voir Terry dormir de longues heures et la récupérer – à son réveil – dotée de toutes ses facultés mentales. Loin de vouloir retourner se coucher, l’aventurière poursuivit son monologue. De nouveau, elle questionna Marc-Antoine qui resta éberlué de longues secondes :
▬ Terry … C’est un dragon. Je n’ai rien entendu car …
Elle ne l’écoutait pas. Perdue dans ses rêveries, l’ancienne serveuse ne prêta pas attention aux dires de Marc-Antoine qui ne prit pas la peine de terminer sa phrase. Puis après de longues secondes de silence, elle conclut d’une façon bien … Originale.
▬ De la télépathie ? … D’accord.
Son ton ne se voulait ni moqueur, ni sceptique. Il était parvenu à rester neutre. Pourtant, il n’en croyait pas un mot. « Elle est devenue folle » concluait-il en vérité. Azur rejoignit les bras de sa maîtresse qui souhaitait aller manger avant d’entamer l’entraînement. Un tantinet inquiet, le chevalier sombre demanda :
▬ Tu es sûre que tu ne préfères pas dormir un peu ?
Lui, aurait été plus rassuré en tout cas. Cette histoire de télépathie ne tenait pas debout.***
Sceptique, il fallut une bonne demi-heure – et surtout quelques démonstrations – à Terry pour convaincre Marc-Antoine. Dans le but de prouver que sa santé mentale n’était pas atteinte, l’aventurière énonçait à voix haute les paroles de son acolyte bleuté qui s’empressait alors d’accomplir le geste qu’il avait dicté plus tôt à Terry. Si pendant un court instant, il pensait avoir affaire à un simple numéro, il comprit bien vite par la nature des mouvements effectués qu’il y avait bien un lien entre les deux ; un lien qui leur permettait de communiquer autrement que par la parole. Quelque peu rassuré – mais toujours très intrigué – Marc-Antoine alla déjeuner avec sa petite-amie. Suite à quoi, le duo quitta la ville et rejoignit les abords de cette dernière afin de s’exercer, conformément au souhait de l’ancienne serveuse.
▬ Là comme ça, je t’avoue que moi non plus … Tu peux demander à Azur, il est peut-être plus apte que moi à te conseiller. Personnellement, j’aurais tendance à te dire de faire comme tout à l’heure. Mais j’imagine que c’est plus facile à dire qu’à faire.
Tout à l’heure, la situation exigeait qu’elle intervienne. Terry avait produit cet éclair instinctivement car ils étaient en danger. Peut-être que la mettre dos au mur était un bon moyen de la pousser à utiliser ce pouvoir. Marc-Antoine ne souhaitait pas se battre contre elle, ni lui faire du mal de façon délibérée cependant c’était une idée qu’il envisageait sérieusement.
Marc-Antoine était sceptique. Il fallait dire que maintenant que toi, tu avais compris, tu n’avais pas fait énormément d’efforts pour lui expliquer correctement les choses … De la télépathie ? Oui. Mais encore. Tu l’avais senti relativement réticent et il n’aurait pas été étonnant qu’il te prenne effectivement pour une folle pendant au moins quelques minutes puisque c’est bel et bien l’impression que tu avais donnée, malgré toi. Tu avais donc finalement consenti à prendre un moment pour lui prouver que ce que tu avançais – à savoir que oui, ton Dragon était totalement capable de communiquer avec toi par télépathie – était vrai. Forcément, il lui avait fallu quelques démonstrations pour accepter le fait que ce que tu racontais était tout simplement la vérité et après ça, vous aviez enfin eu tout le loisir de déjeuner tranquillement avant de rejoindre la sortie de la ville.
Ce n’est donc qu’une fois assez loin de toutes les habitations, assez éloignée des civils et de la population innocente que tu t’étais arrêté pour … Pour ne rien faire, dans un premier temps. Jusqu’ici, ton pouvoir ne s’était manifesté que dans des situations de stresse plus ou moins intense, comme la fois où tu avais fait pleuvoir en t’énervant sur Marc-Antoine après vote chute du pont, ou cet affrontement avec le Cerberus qui remontait à quelques heures à peine. Sans ce genre de facteur déclencheur, tu étais parfaitement incapable de savoir comment manipuler la météo. « Je vais t’aider, regarde le ciel. » Ton petit ami n’avait pour le moment pas d’idée brillante, c’est donc presque naturellement, sans que tu n’ais besoin de demander quoi que ce soit qu’Azur avait pris le relais. Sur ses conseils, tu lèves les yeux au ciel. Toute trace d’orage avait disparue. Le ciel était de nouveau bleu … du moins, il le fut pendant quelques secondes avant de se couvrir de nouveau très rapidement d’épais nuages sombres et menaçants. Là, tu savais bien que ce n’était pas de ton fait, comme tout à l’heure face au Cerberus, le ciel s’était couvert de lui-même – en apparence – sans que tu n’ais besoin de dépenser la moindre dose d’énergie. Maintenant, tu comprenais que ça aussi, c’était lié à ton petit familier. « C’est le lien qu’il y a entre toi et moi qui me permet de partager ton pouvoir, et de communiquer avec toi. Je serais toujours moins fort que toi … mais je peux t’aider à progresser. » Au fond, ça expliquait beaucoup de choses, les nuages étant déjà présent, tu avais donc pu, au-delà de la pluie, provoquer un orage. Le tout était de savoir comment tu pouvais réussir à faire ça sur commande …
Silencieusement, tu continues de fixer le ciel. Tu ne bouges pas dans un premier temps, tentant de te concentrer sur ces nuages pour au moins tenter de déclencher une petite pluie … en vain. Il ne se passe rien. Tu te mets alors à faire les cent pas, sans lâcher le ciel des yeux. Tu te concentres, vraiment, tu te concentres – du moins, tu en as l’impression – de toutes tes forces et pourtant, il ne se passe rien. Au bout de vingt minutes, et seulement à cause de ton agacement, tu n’auras réussi à qu’à faire tomber une pluie fine et très légère qui ne durera que quelques secondes avant de se tarir. Les nuages d’Azur sont toujours là, et tu n’en tires absolument rien malgré les conseils du petit dragon.
Il y avait chez Marc-Antoine une part de naïveté presque touchante dès lors que Terry était impliquée. En temps normal, le fratricide se serait empressé d’attaquer son opposant afin de le forcer à donner le meilleur de lui-même. Le grand blond n’avait pas été un élève assidu durant ses jeunes années pourtant il estimait que les méthodes – qui n’avaient rien de douces – utilisées par ses précepteurs et autres instructeurs étaient les bonnes.
Patient et sans idée, il resta planté là, stoïque, et vit bientôt le ciel s’assombrir. Le héros fronça les sourcils et ses yeux se posèrent de nouveau sur sa bien-aimée. Elle était aussi surprise que lui de voir ces nuages noirs voler au dessus de leur tête. Pourtant, il en était certain, ceux-ci n’avaient pas de cause naturelle.
▬ C’est un début.
Il était à mille lieues de s’imaginer que les nuages avaient été générés par Azur. Le petit dragon conseillait sa maîtresse quant à la procédure à suivre afin de générer un puissant orage. Malgré les efforts de la demoiselle, la foudre ne tomba pas. Marc-Antoine se grattait le menton tout en toisant la rouquine. Agacée, elle se mit à parler seule, comme elle avait l’habitude de le faire par moment. Un sourire se dessinait sur les lèvres du de l’Épée qui se moquait gentiment de sa petite-amie. Lorsque la situation le nécessita, il fit néanmoins preuve d’un peu plus de sérieux et s’évertua à donner la réponse la plus claire possible :
▬ Je ne sais pas trop.
Pour être clair, ça l’était. Marc-Antoine s’était exercé, avait appris jour après jour à manier ses talents. Comme dit précédemment, encore aujourd’hui il découvrait de nouveaux détails concernant pouvoir, preuve qu’il ne l’avait pas encore pleinement maîtrisé.
▬ Ceci-dit, parmi toutes les activités que j’ai réalisé et qui m’ont permis de mieux maîtriser mon pouvoir, je dirai qu’il y a une forme de « constante », de paramètre commun entre toutes ces activités ; c’est la prise de risque.
Que ce soit lorsqu’il avait tenté de retrouver ce cerf ou la fois où il s’était battu contre Adeline, dans tous les cas, Marc-Antoine avait fait preuve de témérité.
▬ Par exemple, la fois où j’ai escaladé le mur … Je ne maîtrisais pas mon pouvoir ce jour-là. Ou en tout cas pas aussi bien qu’aujourd’hui. Il s’est activé plus ou moins tout seul, par hasard. Enfin … Pas vraiment par hasard, j’imagine que j’y suis pour quelque chose. Mais j’ai provoqué la chose en somme.
Marc-Antoine n’était pas sûr que cette information soit rassurante – car pour rappelle, il portait Terry sur son dos ce jour-là – mais qu’importe.
▬ Je pense que tu apprendras à maîtriser ton talent au fil de tes aventures, des fois où tu seras confronté à une situation difficile.
En un sens, c’était sa faute si elle ne progressait pas autant qu’elle aurait dû. A chaque fois que la situation se corsait, il faisait le nécessaire pour lui simplifier la tâche, pour la protéger. Timidement, il proposa :
▬ Veux-tu que je te force à te défendre ?
Comprenez par là : Que je t’attaque.
Tu te sentais perdue. Totalement impuissante face à ton propre pouvoir et évidemment, comme souvent ces derniers temps, tu te sentais particulièrement incapable, incompétente. C’était dans ton caractère de douter de toi-même, de t’agacer, voir même de t’énerver sur des choses qui pouvaient finalement paraître tout à fait insignifiantes pour d’autres. Toi … tu avais cette fâcheuse tendance à prendre les choses bien trop à cœur et franchement, parfois, tu étais effrayée de te rendre compte que ces traits de caractère contribuaient à te pousser sur les voies les plus risquées que la vie s’évertuait à te mettre sous le nez. Vouloir toujours plus, toujours plus vite finirait probablement par te convaincre de choisir les solutions de facilité et il n’était pas rare de se rendre compte – bien trop tard – que ces solutions là étaient loin, très loin d’être les meilleurs choix.
Tout en soupirant, et en continuant de t’agiter sous l’effet de l’agacement provoqué par tes multiples échecs, tu écoutes ton petit-ami. Tu lui demandes des conseils, tu prends donc évidemment ce qu’il a t’offrir même si évidemment, c’est probablement bien loin de ce que tu voulais entendre. Tu te serais presque attendue – naïvement – à une solution miracle. A quelques mots qui aurait pu déclencher quelque chose, une idée lumineuse pour parvenir à un début de quelque chose mais … Non. Rien de tout ça. La prise de risque. Oui. Tu supposes que ça pourrait effectivement contribuer à quelque chose, sauf que de ton côté, tu n’es même pas capable de dire si oui, ou non, une situation de danger imminent serait capable de te faire faire quelque chose d’utile. Tu sais que tu as déjà fait tomber la pluie sous l’effet de la colère. De la peur, aussi. Mais le danger … tu te rends compte que si tu t’es effectivement sentie en danger plusieurs fois ces derniers temps, il y avait toujours quelqu’un avec toi pour éliminer le risque à ta place, que ce soit Marc-Antoine ou quelqu’un d’autre, Velvet par exemple. La seule expérience de ce type ayant effectivement déclencher de manière significative ton pouvoir, c’était aujourd’hui même, face au Cerberus, et encore, tu n’étais même pas certaine d’être totalement responsable de cet éclair.
L’idée du jeune homme – celle de te forcer à te défendre – te laisses … sceptique. Tu plisses les yeux un instant, avant de porter ton regard sur Azur. Est-ce qu’il proposer de t’attaquer pour t’obliger à avoir recours à tes pouvoirs ? C’est ce que tu comprenais en tout cas.
Terry répondit par la positive à la proposition du de l’Épée. Dans le fond, le jeune homme aurait préféré voir la rouquine refuser le combat. Cela lui aurait évité bien du tourment. Quoiqu’il en soit et puisqu’il avait fait l’erreur de parler trop vite, Marc-Antoine leva les yeux au ciel puis fit craquer son cou. L’idée de frapper sa jeune compagne ne l’enchanta pas néanmoins il ne voyait pas de meilleure façon de l’aider à progresser.
▬ Très bien.
Sur ces mots, il s’élança à toute allure et visa les jambes de la rousse. Le chevalier ne se donnait pas à fond et ciblait par ailleurs des organes qui n’étaient en rien vitaux. Ainsi, s’il venait à la toucher, il lui infligerait une blessure potentiellement grave mais non létale malgré tout. Alors qu’il enchainait les coups d’épée, le fugitif s’évertuait à ne pas blesser Terry. A chacun de ses mouvements, il se retint ou ralentit au dernier instant. Bien sûr, il fit le nécessaire pour que cela ne se remarque pas. Il ne voulait absolument pas être pris à parti par sa petite-amie et être accusé de ne pas jouer le jeu. Malgré ses offensives répétées, le ciel ne s’assombrit pas. L’ex-serveuse multipliait les esquives et éprouvait de grandes difficultés à garder un équilibre décent mais aucun orage n’était en vue. Peut-être fallait-il la pousser plus loin encore dans ses retranchements ? Probablement oui. Marc-Antoine rechignait à frapper plus vite et plus fort. Par conséquent, il garda la même cadence, cadence à laquelle Terry s’habitua.
Alors qu’il effectua un coup d’estoc médiocre, facilement évité par sa partenaire d’entraînement, Marc-Antoine subit de plein fouet la riposte de la jeune femme. Il ne s’attendait pas à une contre-attaque et n’avait pas imaginé un seul instant qu’elle puisse ne serait-ce qu’essayer de le toucher. Lui qui depuis le début se retenait vit rouge. Il lâcha son épée et tourna la tête en direction de la jeune femme. Instinctivement, il lui adressa un regard noir, le même que celui qu’il avait pu offrir à Perceval peu avant de le poignarder dans le dos. L’armure sombre se mit à scintiller et l’obscurité envahit la zone. Une masse noire vaporeuse – dirigée instinctivement par Marc-Antoine – quitta les plaques métalliques et tenta d’absorber le bras de l’ex-serveuse, ce même bras qu’elle avait utilisé pour contre-attaquer. Une seconde ombre à la texture vaporeuse se dirigea vers l’aventurière afin de bloquer ses jambes.
Autour d’eux, il faisait nuit noire pourtant Marc-Antoine entendit le ciel gronder. Le bruit le ramena à la raison, Marc-Antoine s'apprêta à faire revenir ses ombres et relâcher son emprise sur sa camarade quand ...
Tu ne savais pas trop si c’était une bonne idée, pour être honnête mais pour le moment, c’était surtout la seule qui paraisse réellement viable et qui ait du sens. Il fallait bien que tu essaies, même si ça devait s’avérer être un nouvel échec, au moins, tu aurais tenté le coup. Tu étais loin d’être douée en combat, mais tu avais des bases que tu estimais solides. Derek t’avais appris à bouger, à te déplacer, à esquiver, et même à attaquer – un dernier point avec lequel tu n’étais toujours pas tellement à l’aise mais là n’était pas le sujet – alors tu pensais pouvoir t’en sortir. De toutes façons, le but était tout de même de te sentir en danger à un moment donné …
Un soupire quitte tes lèvres juste avant que ton petit-ami ne s’élance dans ta direction. Il attaque. C’est un fait. Tu ne sais pas s’il le fait sérieusement, s’il s’acharne réellement à tenter de te toucher, toujours est-il que tu parviens à l’esquiver malgré quelques difficultés, malgré des mouvements parfois très grossiers et maladroits, ainsi qu’un équilibre plus que précaire. Il ne te touche pas. Et alors que les minutes passent, que ses mouvements se mettent à te paraître répétitifs, tu as l’impression de t’habituer à ce semblant de combat qui te donne l’impression de n’être qu’une danse que tu aurais apprise par cœur. La conséquence de cela est simple : tout te parait subitement être atrocement simple. Tu ne te sens pas en danger. Loin de là. Alors au-dessus de vos têtes, le ciel reste nuageux, un peu gris, mais rien ne bouge. Pas d’orage. Même pas un peu de pluie … rien. Absolument rien, si bien qu’un excès de zèle combiné à la frustration d’un nouvel échec à venir te pousse bientôt à cesser de ne faire qu’esquiver et lorsqu’une ouverture se présente, tu contre-attaque, balançant à ton compagnon l’un de ces coups de pied dont seul Derek avait le secret. Un secret visiblement bien transmis.
Ce n’est qu’après quelques secondes que tu te redresses, et que tu fais quelques pas, les yeux encore humides, tu poses un regard encore empli de rage et de colère sur le jeune homme. Tu l’avais voulu, évidemment, et pourtant, tu avais si peur que pour l’heure, tu n’avais qu’une envie : le frapper encore et encore.
La chaussure de Terry vint rejoindre la joue de Marc-Antoine. En effet, peu après avoir effectué une esquive, la demoiselle avait réalisé une pirouette et, dans les airs, donné un coup de pied à son amant. Ce dernier entra dans une rage folle et n’était plus maître de ses agissements. Fort heureusement, la foudre le ramena à la raison. Le ciel s’était obscurcit et un éclair transperça les ténèbres dans lesquels ils étaient plongés afin de venir s’écraser derrière le chevalier noir.
Au sol, Terry resta prostrée un long moment. L’ex-membre de la garde n’alla ni rassurer sa petite amie, ni la consoler. Encore un peu agacé par ce coup subit, il fit preuve d’un pragmatisme presque surnaturel. Dans le fond, il avait rempli sa mission. Il avait amené Terry à utiliser son pouvoir et quand bien même elle le haïssait pour cela, c’était une étape qu’il jugeait nécessaire. Si jusqu’à présent, il existait encore quelques doutes quant aux capacités de la jeune femme, désormais tout était clair. Oui, elle était bien celle qui commandait à la foudre. Marc-Antoine était incapable de dire comment toutefois il n’y avait plus de doute possible sur ce point-là.
Après quelques secondes passées à serrer Azur dans ses bras, la rousse se releva. Les joues rouges, les yeux humides, Terry ne parvenait pas à dissimuler sa colère. En un sens, il voulait se faire pardonner, la calmer. Néanmoins, sa fierté ainsi qu’une volonté de la pousser plus loin encore l’en empêchait. Et à défaut de l’aider à se sentir mieux, il poursuivit :
▬ Si tu pleures maintenant, on peut arrêter.
Ce n’était ni une question, ni une proposition. En l’occurrence et à en juger par le ton employé, il s’agissait plutôt d’un reproche et d’une forme de défi. Elle voulait le cogner, qu’elle le fasse. Ceci-dit il n’allait pas faire preuve de retenue cette fois-ci. Exit les ralentissements de dernière minute et les attaques au sol. Dans la mesure du possible il n’allait pas utiliser son pouvoir – à savoir la sécrétion exacerbée d’adrénaline –, de peur d’en perdre le contrôle. Néanmoins il était tout à fait enclin à frapper. Et à frapper fort cette fois-ci. De la même façon, utiliser ces ombres ne lui était en rien proscrit. Elles étaient certes dangereuses cependant il se pensait capable de manier le Sombre Présage. A nouveau, une forme vaporeuse se déplaça le long du corps de Marc-Antoine. Elle passa de son bras puis quitta le membre du héros afin de rejoindre l’adversaire. Cet adversaire qui n’était autre que son âme sœur.
Effectivement, Terry, tu es un peu fragile … Tu as du caractère, c’est certain, mais il y a des choses que tu supportes mal, surtout lorsque tu peines à en comprendre le sens. C’est le cas en ce moment. Et pourtant, c’est toi qui l’as voulu, tu as accepté, tu as même appuyé sur le fait qu’il ne devait pas te ménager … à croire que tu n’étais même pas capable de supporter ça. Vraiment, il y avait des moments où tu aurais vraiment voulu être moins émotive, être capable de rester de marbre, stoïque, de supporter et d’endurer sans montrer ta peine, ta colère ou tout autre sentiment négatif. C’aurait été tellement plus simple. Et pourtant, ce n’est pas la peine de penser à ça, maintenant, puisqu’il est déjà trop tard pour ne serait-ce que songer à rester calme face à ça. Tu t’attendais à ce qu’il attaque. Oui. Tu t’attendais aussi à ce qu’il fasse ça sérieusement, oui. Qu’il aille jusqu’à utiliser le pouvoir de cette sombre – et dangereuse armure – contre toi ? Non. Tu avais déjà vu cette chose à l’œuvre, brièvement, lorsque son ancien propriétaire la portait encore et si ça n’avait pas été le Changelement sous sa forme offensive qui avait envoyé cet homme au tapis, tu doutais que toi, ou même Marc-Antoine ayez réussi à ne serait-ce que l’approcher.
Un soupire quitte tes lèvres … loin d’être compatissant, ou même de songer à quelque excuse que ce soit, ton petit-ami te lance quelques mots qui sonnent à ton oreille comme des reproches. Visiblement, tu as demandé, tu n’as plus qu’à accepter et laisser faire, ce que bien sûr, tu as du mal à concevoir, là, maintenant. Tu ne dis rien, cependant, tu en es de toute façon incapable tant ta gorge est nouée et douloureuse pour le moment et tu te contentes d’essuyer rageusement tes yeux toujours emplis de larme d’un revers de manche. Tu veux simplement faire demi-tour. Repartir en ville et oublier ça, tu estimes que c’est la meilleure chose à faire pour le moment, et rentrer chez toi en laissant Marc-Antoine en plan te parais même être une solution plus qu’envisageable.
Tu jettes un rapide coup d’œil à ton sac, amorçant un pas en avant, et puis, de nouveau, tu t’arrêtes. Les ombres de l’armure étaient de retour, parcourant d’abord le corps de leur maître, elles approchent de nouveau de toi et tu as beau reculer, elles viennent de nouveau te faire prisonnière. Et une nouvelle fois, tu te retrouves dans le noir, une nouvelle fois, tu paniques, une nouvelle fois, tu ne parviens pratiquement plus à bouger … Cette fois, c’était trop. Tu t’étonnais déjà d’être encore debout alors, que tu l’avais remarqué sans pour autant prendre le temps de t’en réjouir, tu étais une nouvelle fois parvenue à faire tomber la foudre, à quelques mètres à peine derrière Marc-Antoine, tu avais remarqué l’impact sur le sol, l’herbe carbonisée et encore fumante.
Alors qu’il continuait d’harceler Terry dans l’espoir de lui faire avoir une réaction d’orgueil, Marc-Antoine fut arrêté par un second éclair, puis un troisième. A mesure que la foudre tombait, le de l’Épée prit ses précautions. Cette fois-ci, il ne serait pas surpris. De nouvelles ombres recouvrèrent le corps du chevalier dans l’éventualité où un éclair venait à finir sa course trop près de sa personne. Ces mesures préventives s’avérèrent efficaces puisque la dernière gerbe d’électricité transperçant le ciel frappa le sol et brûla tout autour du point de contact. Tout sauf le de l’Épée.
Elle lui ordonnait d’arrêter mais lui n’en fit rien. Le ciel s’était obscurci depuis bien cinq minutes et la foudre était tombée à de multiples reprises, ce qui avait alerté les autorités. Terry et Marc-Antoine avaient décidé de s’entraîner aux abords du village et des membres de la garde ne tardèrent pas à faire le déplacement afin de voir de quoi il en retournait. Extenuée, Terry continua de se débattre avant de finalement tomber au sol. Il resta de longues secondes à l’observer, songea à la porter sur son dos afin de la ramener à l’auberge mais fut arrêté par des bruits de pas caractéristiques qu’il reconnut entre mille : Les membres de la garde étaient là, à quelques centaines de mètres. Le groupe de chevalier eut la plus grande difficulté à pénétrer et à se repérer dans la zone d’ombre générée par Marc-Antoine toutefois ils purent néanmoins voir le visage du fugitif. Ce dernier esquissa un sourire narquois, envoya ses ombres sur ses adversaires afin de faire diversion puis tourna les talons. Il devait quitter les lieux. Bien sûr, il aurait aimé amener Terry avec lui mais cela lui était impossible. Selon toute logique, les gardes allaient s’occuper d’elle. En tout cas, il ne comptait les tuer et allait faire en sorte qu’ils soient en mesure de ramener avec elle la rousse qui, au vu de son état, allait passer pour une simple victime du fratricide.
Marc-Antoine courut et trouva bientôt refuge dans les montagnes. Il n’avait pas été suivi. Les gardes avaient préféré sauver Terry et la ramener au plus vite auprès d’un médecin que de traquer le criminel.
▬ Je suis vraiment con.
Il ne savait pas s’arrêter. Il aurait dû pourtant. S’il était effectivement parvenu à échapper aux gardes, il n’avait pas pu emmener Terry avec lui. Bien sûr, il pouvait la retrouver, se rendre à la Capitale sous les traits du chevalier noir afin de l’accoster mais il craignait de ne plus pouvoir lui adresser la parole sans provoquer chez elle des cris de panique ou – à minima – un fort dégoût. Au cours de cet entraînement, Marc-Antoine s’était montré sous un nouveau jour et avait dévoilé une facette de sa personnalité qu’il aurait préféré garder cachée encore un bon moment. Les prochains jours, Marc-Antoine allaient les passer en toute discrétion. Pour l’heure il était incapable de savoir si Terry était encore son alliée ou s’il l’avait définitivement perdue. Jusqu’à présent l’aventurière l’avait suivie malgré ses crimes et ses agissements mais il craignait qu’elle ne lui soit plus fidèle désormais. Elle avait fait tout cela par amour et il s’était comporté comme le premier des abrutis. Loin de se morfondre pour autant, il soupira puis, pris d’une soudaine colère, frappa un rocher qui se trouvait là.
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