Il devait être approximativement dix-neuf heures quand Draelaa sortit sur le parvis en bois de la maison. Quelques invités étaient déjà présents. Rien de très original jusqu'ici. Il s'agissait des habitués des festivités du gouverneur. Les musiciens s'étaient installés dans un coin de la terrasse, jouant ainsi une petite musique d'ambiance. Dans sa robe blanche glissant sur le sol, Draelaa alla saluer les invités. Tous ici la connaissaient. Elle était la fille à marier. Les parents de la jeune femme étaient sortis très tôt pour recevoir leurs invités. Garan, le gouverneur, était contre cette idée de mariage forcé. Il aimait néanmoins les bals des saisons pour y retrouver d'anciens amis. Il discutait, un verre à la main avec un homme assez âgé. Aenor, sa femme, vêtue de sa robe bleue, déambulait à travers les convives pour leur parler fiançailles. Elle avait fait préparer par le fleuriste du village une couronne de rose pour sa fille, signe de grande vertu. Ainsi, alors que l'adolescente se promenait de çà et là, un homme, probablement du personnel, l’arrêta pour lui remettre la couronne de fleur. Aussi, en plus de son fragment d'os, Draelaa avait maintenant une couronne de rose pour orner sa tresse.
- Pourquoi faut-il toujours qu'elle me ridiculise ? Je ne vous ai jamais rien demandé de tel !
Newt n'avait rien contre les soirées mondaines, en aucun cas. Il en avait vécu plein et la dernière datait de quand il avait subi cette transformation physique, son père avait tenu à le représenter à beaucoup. A cela s'ajoutait les annonces du roi et de la reine qui certifiait que le fils d'Arphéos était bien ce jeune homme aux cheveux noir et non plus le brun à la tignasse ébouriffée. Il s'y était fait et avait même repris l'entrainement avec Nivom, qui recommençait à maitriser le ciel avec un cavalier. La vie avait repris son cours.
En cette saison douce, un messager était arrivé jusqu'à eux, venant du village perché, pour l'habituel bal de la famille du gouverneur. Habitué à ne pas y aller car souvent au palais à cette époque, Newt avait cédé en acceptant d'acceptant d'accompagner son père. Il le rejoindrais donc sur place avec son dragon carboné. On voyait venir les d'Arphéos père et fils dans les receptions, car toujours accompagné du dragon du port, véritable légende dans la ville de la mer.
Aussi, ils furent annoncé au gouverneur comme habituellement. Newt avait troqué sa tenue de vol contre une tenue plus élégante, et il restait près de son parternel qui salua d'abord le gouverneur du village perché.
- Aide visu:
(Aide visuelle avec une meilleure cape)
- Garan ! Quel plaisir, tu connais mon fils ? Newt d'Arphéos, ma fierté.
Le jeune dragonnier s'inclina respectueusement tandis qu'une femme qu'il reconnu comme la compagne du gouverneur s'approcha d'eux, lui demandant où en était ce mariage royal. Newt échangea un regard son père et répondit le plus calmement possible, faisant fit de sa gêne.
- A vrai dire, il n'est pas prévu. Ce n'était qu'une rumeur en fait. Et tout à fait logique quand on y pense, mais non, je ne vais pas encore me marier, du moins, pas à la princesse.
Il était souvent gêné par cette question, surtout qu'avec sa soit-disante disparition, le jeune homme avait autre chose à penser. Du coin de l'oeil, il aperçu néanmoins une jeune femme jeter une couronne de rose à la tête d'un des serviteurs, et sa tete s'inclina légèrement d'incompréhension face à ce geste étrange à ses yeux.
- As-tu fini de vouloir à tout prix me marier au premier venu ! C'est extrêmement agaçant. Je ne veux plus que tu interfères dans ma vie. Plus jamais.
- Monsieur le gouverneur, je vous prie de bien vouloir me pardonner pour cette altercation.
Drælaa se tourna ensuite vers le jeune homme qui se tenait près du gouverneur et lui adressa un timide sourire tout en se présentant.
- Je me nome Drælaa Tōnco, fille de Garan Tōnco, gouverneur du village perché. Je vous souhaite la bienvenue dans cette demeure et espère que vous passerez une excellente soirée.
Dans son dos, Aenor piétinait d'impatience de lui présenter ce jeune homme, noble et de surcroît pas encore fiancé. Après l'esclandre qu'avait fait sa fille, elle ne voulait pas se risquer à envenimer la situation devant tous les invités, encore outrés par l'attitude de Drælaa. La femme du gouverneur avait plutôt prévu de les placer cotes à cotes pendant le repas de façon à ce que les enfants fassent plus ample connaissance. Aussi, pour adoucir l’atmosphère pesante, Aenor frappa un d'une cuillère en argent un verre à pied, convia l'assistance à commencer la dégustation et encouragea les musiciens à entamer un air.
- Mes chers amis, les amuses bouches sont servis, n'hésitez pas à vous délecter de ces mets.
Le dragonnier observa la scène comme la plupart des invités. La jeune femme fonça vers la femme du gouverneur et Newt eut le réflexe de reculer d'un pas pour la laisser exprimer sa colère. Apparemment, elle était dans la même position que lui à devoir subir les volontés d'un mariage arrangé d'un parent - bien qu'Aragon n'en soit pas encore à forcer Newt, juste à s'émoustiller de toutes opportunités présentées. Newt croisa les mains dans le dos, un peu mal à l'aise de la situation. Il croisa le regard de Garan qui lui fit comprendre que le problème était présent au sein de cette famille.
Quand la demoiselle reconnut les deux nobles, elle s'inclina et s'excusa platement. Newt inclina doucement la tete en salut de retour puis se tint bien droit. Elle se présenta à lui comme Drælaa Tōnco et lui souhaita une bonne soirée. La femme du gouverneur, dans la foulée, appela tout le monde à manger. Le dragonnier sentit alors une migraine furtive de quelques secondes et se ressaisit rapidement. Il glissa à son père :
- Je vais juste voir Nivom, il s'éloigne je veux m'assurer qu'il reste dans le coin.
Aragon hocha la tête, peu désireux de voir son fils s'écrouler parce que le dragon prenait un malin plaisir à partir trop loin pour lui. Newt recula de la foule et sortit sur le devant de la demeure. Le dragon gris carbone se posa devant lui, se lèchant les babines. Le jeune dragonnier comprit vite que son compagnon était parti chasser, mais le village perché était non loin d'un lac, mais suffisamment pour que Newt ressente la distance entre lui et son comparse.
- Ne pars pas trop loin, je sais que pour toi c'est juste beaucoup de patience. Désolé mon grand. Tape toi une sieste, ça ira mieux ! fit-il en grattant le menton de son dragon.
Après quelques gratouilles, Newt retourna l'air de rien à la soirée et on lui apporta un verre sans qu'il n'ait besoin de demander. Il reste néanmoins près de la porte, ne sait-on jamais.
Tout en se promenant sur la terrasse, Drælaa goûtait les bouchées aux légumes préparées par le cuisinier du village. Elle avait pour habitude de ne jamais manger de viande sous forme humaine. Son désir carnivore était cependant trop important quand elle était sous forme de renard pour se refuser à croquer un ou deux pinplumes. Alors que l'un des serveurs lui apportait un verre, sa mère, encore elle, lui adressa un rictus maladroit et lui demanda :
- Où est passé Newt ? Il est le fils du gouverneur du port tu sais, vous avez sans doute quelques expériences en commun. Tu devrais parler avec lui, le pauvre, vous êtes les seuls jeunes à cette soirée.
Draelaa plissa les yeux, se concentrant pour apercevoir le moindre détail. Sa tresse glissa sur son épaule et l'os de dragon frotta contre sa joue. D'un coup, la jeune femme sursauta. Une décharge électrique venait de lui frapper la joue, à l'endroit même ou l'os la touchait. Elle n'avais jamais ressentit cela auparavant. Était-ce lié à l'ombre de la forêt ? Probablement pas. Il s'agissait sans doute d'une coïncidence. La jeune femme se caressa la joue pour tenter d'apaiser la douleur, puis remonta les escaliers afin de trouver une pommade à base de plante pour la soulager.
Arrivée chez elle, Draelaa se dirigea immédiatement vers sa chambre et sortit un flacon composé d'un mélange de feuilles d'argousier et de catharanthus, deux plantes facilement trouvable dans la forêt. Elle avait appris au cours de ses expéditions animalières l'utilité de certaines plantes. Elle appliqua le cocktail sur sa joue à l'endroit même où elle avait reçu la décharge. Une légère trace de brûlure se remarquait déjà. La jeune femme décrocha une mèche, lui permettant de masquer en partie cette brûlure et retourna aux festivités. Les convives étaient maintenant dans la grande salle à manger. Chacun prenaient place au banquet, une femme attablée entre deux hommes, comme le voulait les règles de bienséances. Une place de choix avait été réservée pour Draelaa par sa mère, entre le gouverneur du port et son fils. La jeune femme rejoignit ainsi sa place et s'excusa pour son retard, remarqué encore une fois par l'assistance. Décidément, c'était la deuxième fois au cours de cette soirée qu'elle se faisait remarquer.
Une légère musique, calme, résonnait dans la salle. Quelques couples dansaient au milieu de la pièce, se tenant par la main, parfois enlacés. La douleur sur la joue de Draelaa lui rappelait l'ombre qu'elle avait vu dans la forêt. Elle voulait savoir pourquoi Newt était là-bas, et surtout ce qu'était cette ombre. Sans vraiment le regarder dans les yeux et timidement, elle lui demanda :
- Voulez-vous allez danser ?
Newt se fondait bien dans la masse des soirées mondaines, discutant avec bons nombres des nobles avec qui il avait pris l'habitude de s'entretenir, avec ou sans le gouverneur. Il surprit les regards en coin de la femme du gouverneur du village mais il n'aperçut plus sa fille, sans réellement s'en préoccuper. Peut-être fuyait-elle la soirée.
Le Gouverneur vint d'ailleurs le voir, le félicitant de cette reprise en main et début de succession de son père. Newt lui expliqua avec un grand sourire qu'il prenait cette tâche avec plaisir, son affiliation avec le roi lui assurant la succession. La royauté choisissant les gouverneurs, Newt n'avait pas de soucis à se faire quant à sa place. Filleul du roi, fils du gouverneur actuel, son destin s'était tracé tout seul. Il lui arrivait rarement de le regretter, la vie au Port n'était pas si désagréable quand on rêve d'aventure. Alors qu'il discutait légèrement avec Garan, ils furent appelé à manger. Au moins il n'y aurait pas que Nivom qui aurait le ventre plein.
Draelaa redescendit tandis que Newt prenait place, placé à un siège de son père, où Draelaa fut installée. Le jeune homme lui fit un sourire tandis que quelques couples se levèrent pour danser. On leur amena à manger mais à peine eut il le temps de gouter un morceau que la jeune femme lui demanda s'il désirait danser. D'abord surpris, Newt accepta finalement l'invitation après avoir surpris un regard d' encouragement de son père.
- Avec plaisir, fit-il avec un sourire en se levant et lui tendant la main.
Ils les guidèrent jusqu'à la piste de danse. Le brun n'était pas dupe, aussi, veillant à n'avoir aucune oreille, indiscrète dans le coin, il reprit doucement la parole :
- Vous ne voulez pas que votre mère vous marie mais vous m'invitez à danser. Je dois y voir un message quelconque ?
Il n'y avait aucune suspicion dans sa voix, seulement un questionnement bienveillant.
Sur la piste Draelaa se rapprocha de Newt. Elle apposa sa main gauche sur l'épaule de son invité, lui permettant d'être assez proche de lui pour lui murmurer quelques mots. Son partenaire, bien plus grand qu'elle, fut le premier à prendre la parole, se questionnement sur les réelles motivations de cette danse. Draelaa lui adressa un léger sourire et à son tour, lui répondit :
La danse, il connaissait. Oh il était loin d'en être friand, mais il connaissait les pas classiques. Il était néanmoins le premier à descendre dans le Port pour les fêtes de citoyen et de paysans, toujours très dansant et bien plus libre que toutes ces danses que le jeune noble abhorrait. Mais il faisait l'effort, pour son père, son parrain et son image de noble et d'héritier. Les gouverneurs étaient choisis par la royauté, en général c'était les enfants qui succédaient car le parent en charge avait transmis le métier.
Draelaa lui expliqua qu'avec sa mère, elle serait forcément mariée sous peu et à quelqu'un de haut. Lui n'était que l'héritier - certes il était le seul enfant de gouverneur a être certains de son avenir - et apparemment la femme de Garan aurait pu pousser sa fille jusque dans les bras du prince ou du roi. Un léger sourire fit son apparition et Newt le renferma immédiatement. Aeron était exécrable, même en étant son aîné Newt avait subit les caprices du jeune prince quand il était enfant. Et pour Grimvor... Son parrain aimait sa femme, c'était un fait. Bon courage Dame Tonco...
Le jeune homme fronça néanmoins les sourcils quand Draelaa lui parla de sa sortie. Il ne pensait pas avoir été suivi. Newt s'étonna que la jeune femme n'ait pas connaissance du dragon du port. Newt se concentra pour ne rien laisser paraitre et répondit néanmoins :
- Je pensais que vous saviez, ou du moins que votre père vous ai mis au courant que mon pouvoir implique un dragon. Nivom est mon compagnon de toujours. Je suis sorti m'assurer qu'il aille bien. Le village perché n'a rien à craindre du port si c'est là votre inquiétude.
Sa dernière phrase, sans qu'elle ne soit plus forte, était plus sèche qu'il ne l'aurait voulu. Ses pas guidant toujours ceux de Draelaa suivant la musique, sa chevalière draconnique s'activa une seconde, lui conférant juste ce temps là les compétences d'un dragon. Le jeune homme sentit alors brusquement la présence de l'os de dragon que portait Draelaa. Il fronça les sourcils et tacha de se faire discret :
- Néanmoins je sens que son espèce et par extension moi nous posons problème pour vous, aux vues de l'artefact que vous possédez, fit-il en désignant l'os de dragon.
Malgré son régime végétarien sous forme humaine et son grand respect pour les animaux, Draelaa était tout de même fière de porter le nom des Tonco. Fière car son ancêtre Bluegon, célèbre chasseur de dragon avait dû rusé pour tuer l'animal. Il avait du se servir de son intelligence. C'était là, la seule raison pour laquelle elle appréciait son aïeul. En effet, elle avait, en suivant ses études de zoologie, appris beaucoup sur les dragons. Elle pensait qu'ils étaient dotés d'une certaine intelligence et que s'ils le souhaitaient, seraient capable d'anéantir l'espèce humaine, ou bien au moins de l'asservir.
Tout à coup, le regard de l'homme en face d'elle fut plus sombre. Ses muscles semblaient se contracter et ses mains plus fermes. Une sorte de colère se lisait sur son visage. L'objet de son irritation semblait être l'os de dragon que la jeune femme portait dans les cheveux. Il est vrai en effet qu'en terme de parure, un os était plutôt étrange. Cette relique n'était pas un simple objet décoratif. Il était en réalité un objet de protection contre le feu des dragons. Newt semblait embêter de se trouver face à une femme portant cet objet, l'accusant même de discrimination envers les dragons. A ce moment là, l'os s'activa et lança une décharge à Draelaa au niveau l'épaule. Aussitôt, elle lâcha la main de Newt et émit un léger couinement. A son tour, elle regarda le jeune homme et lui répondit , vexée, dans le plus grand des calmes.
- Visiblement je ne suis pas la seule à ne pas connaître mon partenaire de danse. Il aurait été judicieux d'en apprendre un peu plus sur cette famille avant de tirer des conclusions hâtives. Chaque invité ici présent est au fait de ma situation quant aux créatures.
Le bal de la saison douce
Sachez que là, la politique rentre en jeu. Draelaa s'aperçoit de la réticence de Newt face à son comportement anti-dragon. Oh oui, les dragons sont des êtes puissants et dangereux, Newt avait fait pas mal de recherche sur le sujet afin de développer son équipement qui en faisait aujourd'hui un guerrier redoutable. Ses flammes seules n'étaient pas un atout, Nivom était bien meilleur en terme de force de frappe et puissance de feu. La chevalière, l'armure... Les connaissances de Newt en avait fait un homme dragon, pas encore apte à la métamorphose, heureusement qu'il ne le souhaitait pas.
Même sans le pouvoir de sa bague, Newt ressentit la force du battement du cœur de la jeune femme quand elle lui reprocha de ne pas connaitre son hôte. Oh il savait que l’aïeul des Tonco était un chasseur de dragon, pour autant, il n'aimait pas cela et pensait naïvement que cette "tradition" s'était tarie. Il faut croire que non. Et pourtant, la jeune femme avait la réputation de paix avec les animaux. L'ambivalence était profonde, Newt ignorait si elle faisait des dragons une exception. Avec une révérence expédiée, Draelaa quitte la danse et Newt, de son air le plus stoïque, regagne sa place. Personne ne se lance à la poursuite de Draelaa et le jeune homme hérite d'un regard dur de son paternel. Newt soupire et se lève pour la rejoindre.
Dehors, Nivom semble avoir perçu le sentiment de menace qu'a ressenti son dragonnier. Sa vision, excellente de nuit comme celle des chats, lui permet de repérer la jeune femme qui sort en furie et s'installe dans un fauteuil suspendu. Il s'approche doucement, félin qu'il peut être, mais rapidement, le lézard ne tarde pas à passer inaperçu. Il n'est pas menaçant, son regard ambré rougeoyant dénotant dans le noir. Il se redresse un peu, toujours peu menaçant en apparence. Pourtant, sa queue bat le sol. Bien que dragon pour la grande part, le fragment d'âme de Newt dans le reptile le pousse à vouloir défendre son dragonnier.
Quand Newt arrive sur la terrasse, il remarque immédiatement l'attitude du dragon, amplifié par le pouvoir de l'os. Et tout va très vite ; avant même qu'il n'ait pu lâcher un rugissement, les pupilles étrécies par le sentiment de danger, Newt bondit de la terrasse et encercle le museau du dragon qui était bien trop proche de Draelaa. Nivom, museau coincé mais sentiment de colère face à l'artefact, se débat des bras du dragonnier, habitué à l'exercice.
Rentre ! ou retire cet os !
Il sent sa force faiblir tandis que Nivom s'agite, battant à présent des ailes avec férocité. Agilement, Newt attrape la sangle attachée à la selle et bloque le museau du dragon en montant dessus avec vivacité. Nivom lui avait échappé une fois. Ca n'arriverait plus. Il espère néanmoins que la jeune femme réagisse rapidement.
L'extraordinaire créature dominait Draelaa. De sa tête toute proche, la bête pouvait croquer la jeune femme. Intimidée et affolée, la noble tenta se lever en vain. La peur la tétanisait. Elle restait assise au-dessus du vide, sur sa balançoire qui s'agitait grâce au souffle du dragon. Les yeux fixant la bête, elle sentait son cœur s'emballer. Elle resta un court moment fixe à regarder la mort dans les yeux. Elle était jeune. Sans doute trop jeune encore pour donner son dernier souffle.
Tout à coup, en une fraction de seconde, Newt, vif comme l'éclair bondit de la terrasse et harnacha comme il put le reptile gigantesque qui se débattait. De son opulente queue, la créature cassa une branche et tambourina sur le tronc du tourbium sur lequel était battit la maison. Tout allait si vite, Draelaa était dépassée par les événements. Elle tenta une nouvelle fois de s'extirper de sa balançoire. Cette fois-ci, le geste était plus difficile. Elle devait se hisser hors d'une balançoire en mouvement pouvant ainsi chuter et se retrouver 60 mètres plus bas, étalée au sol sans vie. En un instant, le dragon déchaîna une énorme trombe d'air et de morve de ses narines en direction de la noble. Celle-ci fut brusquement poussée au sol, fort heureusement, le sol de la terrasse.
En plein débat de force et d’endurance avec son compagnon, Newt hurla à la jeune femme de rentrer ou au minimum de retirer son os. Rentrer ne lui servirait sûrement à rien. L'animal était comme possédé. Les murs de la demeure ne seraient certainement pas assez gros pour séparer la créature de Draelaa. Il lui était également impossible de retirer l'os, l'objet lui lançant des décharges à chaque fois que la peau entrait en contact avec celui-ci.
Au sol, Draelaa essaya de se relever. Elle s'appuya sur ses bras tremblant. Sa vision devient trouble. Elle ne voyait plus le sol. Elle entendit ses os craquer un à un. Une douleur atroce lui parcouru le corps et la fit hurler. Elle espérait que là, à l'intérieur, la musique serait assez forte pour que personne n'entende le vacarme qui se passait à l'extérieur. Elle espérait aussi que son professeur sorte, comme par enchantement de sa maison pour venir l'aider. Une minute, c'est le temps qu'avait pris la transformation complète de Draelaa en un renard roux, aux yeux bleus. Les vêtements, bijoux et autres accessoires de la jeunes femme étaient restés au sol.
Le bal de la saison douce
Faire du rodéo de dragon perché sur une branche face à une fille descendant d'un tueur de dragon ne fait pas partie de ce que l'on appelle une bonne soirée. Draelaa semble tétanisé tandis que Newt, maintenant ancré sur sa selle, pied dans les étriers, maintient la tête de Nivom contre le poitrail du dragon. Au sol sur la terrasse, Draelaa ne bouge pas, fixant le dragon rendu fou par la présence de l'os.
Puis elle hurla et sous les yeux de Newt devint un renard. Une minute de bataille et l'os finit au sol. Newt, sentant ses doigts faiblir, décide de changer de stratagème et talonne brutalement le dragon à la jonction des ailes. Surpris, Nivom étend les ailes et décolle rapidement à une vitesse vertigineuse. Les arbres risquaient de lui abîmer les ailes mais au moins, une fois au dessus de la cime, ils seraient enfin tranquilles.
Là mon grand, stop ! On va aller se poser !
Avec un rugissement, Nivom stabilisa son vol et secoua la tête. L'os ne semblait plus avoir d'effet. Après l'avoir repris correctement sous son contrôle, Newt conduisit Nivom au pied de l'arbre où se tenait la maison du gouverneur. Il calma son compagnon, mit pied à terre et remonta, s'attendant au pire quant à Draelaa, et espérant que personne ne soit venu voir ce qui posait problème.
Le renard roux se retrouva seul sur la terrasse des Tonco. Il entendait la musique provenant de l'habitation. Le renard étant de nature peureuse voulu s'éloigner. Malheureusement pour lui, aucune sortie n'était possible, sauf en passant par les escaliers en colimaçon. L'animal fit le tour de la terrasse en grognant puis revint sur ses pas. La bête sentit de sa truffe les vêtements au sol et attrapa l'os de dragon resté sur le bois de la terrasse. Tenant dans sa gueule l'objet de la colère du dragon, la bestiole alla le placer dans le creux du tourbium sur lequel était construit la maison des Tonco.
La fête battait son plein dans la maison. Personne ne semblait avoir entendu le vacarme. Tous devaient probablement avoir bu plus que de raison le vin préparés grâce aux vignes sauvages de la forêt. De plus, l'orchestre jouait ses musiques de plus en plus fort. On pouvait même danser sur la terrasse si on le souhaitait. Fort heureusement, personne ne le voulut.
Draelaa ne contrôlait pas à la perfection son pouvoir. Elle s'était transformée, involontairement, et était ainsi devenue un renard. Un renard à la fourrure rousse et soyeuse certes, mais un renard fatigué. L'émotion et la transformation douloureuse lui avait prit toute son énergie. Aussi, après plusieurs tours sur lui-même, une fois l’adrénaline redescendu, le renard fut prit d'une folle envie de s'endormir. Sous cette forme, Draelaa n'avait pas conscience d'être une métamorphe. Elle ne pouvait deviner que c'était le moment de reprendre sa forme originelle. La bête s'allongea sur le sol. Elle n'avait pas sentit Newt remonter. La perte de sens était sans doute le premier pas vers sa transformation humaine. De nouveau, tous ses os craquèrent. Le renard glapit une première fois de douleur. Le cri strident résonna dans la forêt au loin. Comme la première fois, la transformation était douloureuse. Elle prenait plus de temps en ce sens.
Après 3 minutes qui semblèrent interminable, Draelaa avait repris son corps d'humaine. Elle était étendue sur le sol, nue et évanouie. Elle se souviendrait de tout une fois réveillée. Des gouttelettes de sang coulaient d'une blessure à la hanche, qu'elle avait eue quelques semaines auparavant. La jeune femme resta, allongée sur le sol, immobile.
- Cri du renard:
- https://www.gamaniak.com/video-9889-le-cri-du-renard.html
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