Un campement dans la grande forêt, d'architecture sommaire , des grognements qui s'élèvent ça et là, des hommes menottés au sol, des gardes un peu partout. Aujourd'hui au menu, une demande de chasseur de venir inspecter un étrange camp d'où provenaient plusieurs sons gutturaux au caractère dérangeant. En soit rien de bien méchant, Yuduar avait attrapé l'assignation au vol pour en profiter de faire un tour de manoeuvre avec sa troupe réduite de fantassin. Chacun des gars savaient qu'il n'y avait pas grand chose à craindre et pourtant l'ordre avait été clairement donné de traiter l'affaire comme si il s'agissait d'un cas de grande importance. Il s'avéra que, fidèle à son instinct, ils ne firent que tomber sur un ramassis d'illuminés vêtus de haillons qui tenaient tout debout par la crasse. En voyant la garde arrivé ils ont commencés à s'agiter en braillant au blasphème, Yuduar tenta de désamorcer diplomatiquement l'effervescence mais vu qu'il n'y en avait visiblement pas un pour rattraper l'autre là-dedans, l'histoire s'est terminé en grand coup de pommeau dans le nez et autre coups de bâtons dans les mollets.
Bref, une petite heure plus tard et quelques lestes enjambées en chemin pour passer le fer aux récalcitrants, c'est sans perte aucune que le régiment Al Rakija s'affirma bon gagnant de cette rencontre qui n'avait absolument aucun sens.
"Vario, je vous laisse vous occuper de ramener nos nouveaux amis au Village Perché, faites passer le mot à l'Officier Kaara de libérer des geôles pour entasser tout de beau monde. Normalement la paperasse pour le tribunal est déjà prête donc vous pourrez disposer à partir de là." après l'affirmative de l'officier concerné le Capitaine se retourna vers le reste des troupes "Meievir, commencez à rentrer à la Capitale pour informer les gars de la Commission que tout roule, normalement en chemin vous tomberez sur le petit patelain qu'on a croisé à l'aller. Auberge, note de frais, tout le bazar habituel bref tu connais la musique." puis il fit volte-face vers les derniers "Geld, Kin, Christiel, vous vous occupez de faire le tour des baraques. Et... Tient, Prêth venez avec moi on vas voir ce qu'ils cachent dans leur temple de bout de bois là. On vas peut-être avoir une surprise qui sais!"
Yuduar s'avança vers le dit "temple" qui n'avait de temple que le nom vu la gueule de la bâtisse délabrée qui était jonchée de bout de tissus surement sensés lui donner une quelconque importance particulière.
"Et beh, c'est qu'ils les aiment bien leurs saloperies eux... Pour des illuminés, on peut dire que c'était pas des lumières hein?"
Fier de sa blague il décrocha un grand sourire niais à la Soldate qui marchait derrière lui. Prêth n'était pas la plus comique du tas mais ça lui ferait surement du bien de se dérider en mission.
- Ha beh là c’est sûr, ils avaient pas la lumière à tous les étages….
J’entrais à la suite du capitaine pour regarder ce qu’il y avait à l’intérieur. Peut-être un trésor, de qui arrondir la fin de mois. Mais la pièce était vide. Il y avait simplement un trou dans la roche dévoilant une galerie s’enfonçant dans les ténèbres. Je soupirais en regardant mon supérieur.
- Que fait-on capitaine ? On explore jusqu’au bout pour voir ce qu’ils ont préparé ?
De mon point de vue, il fallait y aller, Lucy seule savait ce qu’ils y avaient au fond et si cela appartenait aux illuminées, il valait peut-être mieux mettre la main dessus. Mais nous n’étions que deux. Je préférais donc demander l’accord de mon supérieur. Nous étions en mission de toute façon. C’était à lui de décider ce que nous allions faire et quels risques nous allions prendre.
L'intérieur ressemblait à un lieu de culte étrange avec plusieurs tapis disposés au sol sans véritable harmonie. L'autel de bois était encadré par deux cierges défraichis et une coupole se tenait au centre, les bords marqués d'un liquide rouge séché qui s'apparentait du sang. Etrange. Un peu plus et il s'attendait presque à croiser des ossements en preuve de cannibalisme.
Accompagné du Soldat Prêth qui restait sur le qui-vive Yuduar ouvrit la marche à l'intérieur du boyaux rocheux. Les parois étaient éclairés par une mousse fluorescente qui laissait émaner un halo bleue relaxant. Si l'ambiance n'avait pas été aussi sordide et les anciens occupants aussi dérangés du ciboulot, il aurait presque pus s'émerveiller d'une telle conception de la nature. Il ne leur fallu que quelques mètres pour enfin déboucher sur ce qui semblait être le fin de mot de l'histoire: un bosquet végétal qui avait pris naissance à l'intérieur d'une grotte au plafond haut et vouté. Comme une bulle de roche qui avait sut accueillir un morceau de forêt en son sein. Les plantes étaient essentiellement de type nocturne, arborant des feuilles bleutées par le manque naturel de soleil, un pollen épais flottait dans l'air et brillait à la manière d'étranges lucioles organiques. Qu'importe sa méfiance naturel, Yuduar ne pus que pousser un léger sifflement de surprise devant un tel théâtre de la nature. Rien ne semblais dénoter à première vue si ce n'est la présence d'un énorme arbre à l'allure centenaire qui trônait au centre du bosquet luminescent. Plusieurs roches gravés les entouraient, certaines semblaient naturelles tandis que d'autres portaient les marques du travail de l'homme.
L'endroit n'était pas spécialement grand mais possédait quelque chose de majestueux, respectable même. Tout en avançant à pas de loup, le regard balayant les alentours en guettant avec insistance les arrières des arbres, les deux gardes restaient prêt à en découdre face à un éventuel survivant voir même à croiser une bête sauvage à la présence inattendue. Mais le destin en fut tout autre. Au détour de leur exploration, qui était jusque là rectiligne, ils tombèrent face à une roche en forme grossière de coupole inversée. Tout cela ne lui disait vraiment rien qui vaille mais aucune logique ne semblait l'animer en l'instant présent.
"Tu sais ce que j'aime pas avec les missions en forêt Prêth? Avoir l'impression de passer pour un gland."
Les mains sur les hanches, la manie blasée, Yuduar scruta l'étrange coupole centrale qui se tenait devant eux et qui ressemblait presque à de géantes toilettes sacrées trônant devant l'arbre géant. L'endroit était magnifique soit, de quoi animer un culte de dégénéré sans soucis, mais hormis deux trois saloperies bizarrement sculptés et une nature adapté à des conditions closes, il n'y avait pas de quoi se taper le cul par terre non plus.
Quand soudainement, un halo doré l'attira du coin de l'oeil, non loin de la position de la Garde.
"Prêth derrière toi. C'est moi où y'a un truc qui brille?"
- Vous savez capitaine, ce qui me soûle avec ces illuminés ? c’est que leur trésor nous illumine bien plus qu’eux.
Oui, un trésor, c’est ce qu’il y avait, ou plus précisément une petite statuette assez jolie qui traînait par là. D’un geste lent, je l’attrapais. Et la magie s’activa. Je n’eus pas le temps de réagir que je me retrouvais au ras du sol. Et je tombais. La statuette avait d’un seul coup grandi. Je me tournais vers le capitaine. Lui aussi avait rétréci. Il était même devenus un enfant en armure. Terrible, lentement, je regardais mes mains. Des mains d’enfants. J’ouvris la bouche mais aucun son n’en sortit. Un pas en avant, et je tombais par terre. Déséquilibrer, lâchant la statuette bien trop lourde pour moi.
- Capitaine, vous avez une idée de ce qui se passe ?
Même ma voix avait rajeuni, celle d’une gamine. Lentement, je sentais la panique m’envahir et je fis un effort pour rester calme. Un énorme effort.
Lorsque le capitaine retrouva la vue, une poignée de secondes plus tard, l'axe avec lequel il observait le monde avait complètement changé. Il était petit, du moins se sentait petit. Vraiment loin de son mètre quatre-vingt et des poussières. Et ce qu'il remarqua en premier fut la gamine aux cheveux blancs et en armure noire qui se tenait juste devant lui.
"Prêth?!"
Sous la surprise du son de sa voix, son clapet se ferma instantanément et ses yeux s'écarquillèrent de surprise. Il avait une voix de gamin, haute perchée, loin de ses graves qui roulent sous la langue avec un ton suave ou plaisantin.
"Qu'est-ce que c'est que cette connerie..."
Elle se regardait, il se regardait, ils se regardèrent. Main d'enfants, jambes d'enfants, sous ses doigts un visage aux traits ronds, une armure minuscule, il y a juste son épée qui pour des raisons inexplicables n'avais pas rétrécis à la même échelle que le reste. Un véritable fauchon à deux mains qui trainait au sol, pendant à sa ceinture pour le déséquilibrer.
"Ok, je sais que normalement c'est pas la taille qui compte mais là..." il dégaina l'épée en la maniant à deux mains et abattu l'arme sur la statuette dorée en criant de sa petite voix de marmot "Vas falloir s'en servir!"
Le choc fit simplement rebondir l'arme, renvoyant l'impact à sens inverse pour faire chuter Yuduar sous le poids de sa propre arme et finir cul sur le sol.
"Ah bah ça si c'est pas l'air con par contre." l'épée retombée à côté de lui, il regarda la garde qui l'accompagnait dans cette galère "Prêth une idée?"
Il était pris d'une irrémédiable envie de rire, qui n'avait absolument aucun sens en la situation actuelle mais il trouvait vraiment que tout cela était bien trop ridicule pour être jugé au sérieux. Sauf si... ils arrivent pas a récupérer leurs corps d'adulte. Là en effet, ce serais beaucoup moins drôle en fait.
- Je crois qu’on va devoir rentrer comme ça capitaine, je suis certaine qu’on pourra trouver une solution en ville.
Je fis disparaître mon bouclier qui ne servait plus à rien et attraper ma claymore qui elle n’avait pas rétrécis et m’approcher de la statuette. L’arme était lourde, beaucoup trop lourde. Je regardais le capitaine.
- Peut-être que vue qu’on est plus petit, si on tape plus lentement on tapera dans le fond.. Faut profiter de notre taille sur le coup.
Je tombé en avant lâchant l’arme et jurant. Ce corps n’était pas pratique. Pas confortable. Je ne me reconnaissais plus. Moi qui passer mes journées à m’entraîner, je me retrouver comme une gamine à ne plus rien pouvoir faire de correcte. Restant sur le sol je soupirais.
- Ou alors, on se pose sur mes boucliers, et on rentre tranquille, comme papa dans maman, pour trouver quelqu’un qui nous aidera à péter la statue.
La situation me soûler déjà et ça se sentait dans mon langage. C’était le genre d’événements que je n’appréciais pas véritablement. Surtout en mission en compagnie du capitaine. Bien qu’il puisse paraître détendu, il restait mon supérieur et me retrouver dans cet état, devant lui, me gênais particulièrement.
"Hein? Quoi? Tu disais?"
Les boucliers. Oui, les boucliers. Il la fit répéter une fois, l'information arriva dans une oreille pour aussitôt en ressortir par l'autre. Elle l'appela, une fois, deux fois, il releva la tête une fois de plus, se fendit d'un nouveau sourire niais et goguenard. Une brillante idée venait de lui traverser l'esprit à lui aussi.
"Ou sinon, on en profite pour tomber sur les autres et voir si avec des corps pareil ils arriveraient à nous battre!" il pris une position 'artiste martiale, sourcils froncés et air sévère "Entrainement surprise! Formation!"
Un silence, long pour la situation, gênant, voir consterné. Yuduar éclata de rire en sautillant sur place, comme si une étrange euphorie était entrain de prendre possession de son petit corps nerveux.
"Un fois je leur ai dit qu'un jour ils seraient fort comme des chênes mais qu'en attendant ils étaient juste une bande de glands, comme ça je me dit que, en plus, je leur montre que moi, bah, même si je suis transformé en gland je les enchaines! Parceque je suis un bon gland, pas vrai Prêth?"
Totalement entrain de monologuer dans son délire tout en gesticulant comme un ninja en pleine formation intensive, Yuduar se rendit immédiatement compte de la double blague qu'il venait de sortir, l'une étant volontaire et l'autre non-volontaire. Il s'arrêta subitement, regard écarquillé, la bouche en un cercle de surprise parfait, le rouge lui montant aux joues. Mais bordel qu'est-ce qu'il lui arrivait.
"Ou... les boucliers ouais, c'est pas mal les boucliers aussi c'est vrai..."
- Bouger capitaine, sinon on sortira jamais et même le pire des glands ne voudrait pas rester coincer au fond.
Je m’assis afin de ne pas perdre l’équilibre, et lorsque le capitaine fut installé, je me concentrer pour faire décoller le bouclier. Lentement. Montant peu à peu afin d’atteindre la cime des arbres. Je ne pouvais pas tenir très longtemps dans ce genre de cas. Une vingtaine de minutes, voir trente tout au plus, mais cela suffirait pour nous ramener là où on devait aller. Du moins nous rapprocher un maximum. Jusqu’au moment où l’on dépassa la cime des arbres, dévoilant à nouveau le soleil m’éblouissant au passage. Une autre lumière s’activa et je sentis mon corps changer à nouveau. Quelques secondes plus tard, j’avais retrouvé mon apparence originale. Immédiatement après être sorti de la forêt, si l’on pouvait appeler ça sortir, j’étais à nouveau normal. Regardant le capitaine j’annonçais.
- Votre plan d’entraînement surprise tombe à l’eau capitaine.
"Joliment exécuté Prêth! Vous avez un bon niveau, y'a de quoi voir de l'avenir là-dedans!" son ivresse le faisait parler plus que de raisons tandis qu'il rangeait maladroitement son épée "Nan parceque vous savez comment on appel un garde qui reste confortablement au même poste par pur soucis du confort que ça lui apporte?" un grand sourire traversa son visage tandis que l'attente s'accumulait, surement entrecoupé d'un possible soupir de la part de son interlocutrice "Un Garde Royal, AHAHAHAHAH"
Ne masquant pas sa fierté il en alla même à se tenir l'estomac d'un trop plein de rire. Ils gagnaient de la hauteur au fur et à mesure que le bouclier de Thépa les menaient vers l'extérieur en passant par l'ouverture de la caverne. Une fois l'air libre, le ciel bleu et le soleil haut de retour, elle envoya l'étrange convoi à toute berzingue en direction du Village Perché. Au pire des cas ils tomberaient sur les restes de la patrouilles en cours de retour au bercail.
Les mètres furent avalés en un rien de temps et plus l'éloignement se marquait et plus leurs corps semblaient grandir à nouveau pour retrouver leur taille d'origine, au point qu'ils en furent un peu serrés sur les boucliers magiques. Yuduar fut instantanément saisi d'un terrible mal de crâne.
"Bah merde alors, c'est peu comme perdre connaissance en rentrant de taverne sauf que les souvenirs sont encore là et intact, en plus-" une grande inspiration lui coupa la parole "ATCHA!" un reniflement colossal s'en suivit "J'allais justement dire qu'un truc me démangeait dans le pif, manquerais plus que je tombe malade! Bon allez, direction la baraque qu'on tire tout ça au clair!"