Keith abattit ses poings sur la rambarde croulante du voilier.
"Ca, c'est une propriété d'un noble qui vit au bord de l'eau. Un rafiot miteux où tout ce qu'on a, c'est une voile, mais pas de vent ! On a beau cherché de l'aide, entre les pimbêches de nobles dans la cale avec leur intoxication alimentaire, le seul que j'ai sous la main, c'est toi Newt !"
Le mépris dans la voix de Keith était évident quand il regardait Newt, sans compter de l'agacement qu'il ressentait à l'idée de ne pas savoir diriger un bateau.
"Encore un qui n'a rien fait pour en être où il en est ! Oisiveté, paresse, et pire que tout, l'incompétence ! Tu ne saurais donc pas être utile dans ta vie ? Tu as un dragon qui nous survole depuis tout à l'heure, mais il ne pourrait pas ramener le voilier au rivage ? Cela doit être une bonne bête de somme ! Regardes ça ! Une vraie mer d'huile !"
Keith avait comme un air crispé. Que ce soit la frustration ou le soleil de plomb, c'était visiblement regrettable de se trouver ici.
- Ca va on va survivre.
Défaut d'être un habitant du port, il avait été convié.
- Je t'accorde que TU aurais pu trouver un meilleur navire Keith, mais à cause de toi, on se retrouve là à bosser, fit le jeune héritier en tirant sur un bout. Je te jure tu me le rendras !
L'écoutant d'une oreille distraite en faisant son noeud, Newt se tourna vivement vers lui quand l'ombre de Nivom leur passa au dessus.
- Rappelle moi pourquoi tu as besoin de ma présence ?! Je sais naviguer et tu as besoin de mon influence ! Et si ce fichu bateau avait des cordages suffisament solide, il nous aurait tiré ! Et t'es trop lourd pour qu'ils nous porte.
Le jeune homme faisait de son mieux pour garder son calme, mais la chaleur et la dérive à cause du manque de vent n'aidait pas face à Keith.
- Allez aide moi à hisser ça au lieu de raler. Ne viens plus dire que c'est moi qui fout rien, monsieur l'entrepreneur
Néanmoins, Keith alla aider Newt, ils étaient dans la même galère et il voulait regagner la terre ferme au plus vite.
"Tu t'affubles d'un dragon, mais apparemment son utilité est proportionnelle à la tienne. Tu sais naviguer ? Je veux bien te regarder faire ! Tu comptes manipuler un voilier avec seulement tes petits bras et un néophyte ? J'y mettrais presque de la bonne volonté !"
Tirant sur le cordage, le jeune Veriano retira bien vite une couche de vêtements afin d'effectuer les tâches manuelles et mieux supporter la chaleur.
"Dis moi, y'a-t-il encore des gens qui sont impressionnés par cette bestiole que tu entraînes partout avec toi ? Peux-tu seulement prendre tes responsabilités vis-à-vis du port ? Qu'on laisse une personne comme toi comme candidat au poste de Gouverneur m'horripile. Je le répète, on te donne, mais qu'as-tu gagné de tes mains seules ?!"
- Tu te fous de moi ?! Et qui es tu toi ? Ok t'as gravit tes échelons, soit, j'suis simplement parti avec de l'avance.
On en choisit pas son destin. Et le fait que Nivom sembla approuver son dragonnier, se perchant sur le mat du voilier un instant le temps de rugir sur Keith.
- Merci Niv' ! T'es bien content de nous avoir pour surveiller les frontières et rendre visite aux petits gens ! Toi ton hippodrome il sert à quoi ? A part concentrer les nobles les plus chiants du royaume ? Je n'ai pas vu ni mon père ni le roi à ton établissement !
Le brun se rendit à la barre, prêt à les diriger vers la rive, faisant signe à son dragon de battre des ailes vers eux pour produire une brise, espérant les faire avancer. Mais la perte d'envergure n'aidait pas...
- Maudite mage... marmonna-t-il. J'ai été formé toute ma vie à mon poste futur de gouverneur. Cette "bestiole" peut te bouffer en quelques secondes je te conseille de ne pas la provoquer ! Et toi alors ? Qui es-tu dans ce royaume ? Tu n'es rien, tu es un petit entrepreneur qui a une petite notoriété. Même moi, seulement en volant, j'avais plus d'importance tandis que tu te baladais au milieu des poneys de tonton à faire courir ! D'ailleurs, commerce équestre que tu n'as plus ahah vu que Tonton s'est affublé d'un éleveur plus performant parait-il !
Keith s'arrêta un instant dans sa tirade, reprenant son souffle après avoir fini d'aider Newt. Le travail physique n'était clairement pas son fort.
"Tu penses que seuls les nobles viennent dans mon hippodrome ? Les courses hippiques sont un loisir trop raffiné pour la populace, tu penses ? Ne vas pas croire que les arènes et les combats peuvent satisfaire la population. Ça, ce sont vos aspirations barbares. A vous les nobles "non-chiants" comme tu dis. La guerre, le métal et le sang. Cela vous fait frétiller, tels les grands hommes d'actions que vous êtes. Mais as-tu au moins remarqué le diète ? Les orphelins ? Les commerces détruits ? Les maladies qui se répandent à cause de cadavres au soleil, d'hommes comme de bêtes ?! Sais-tu seulement ce que tu vas gouverner ?!"
Veriano lança un regard au dragon. En effet, il pouvait le manger... C'était un point à ne pas oublier pour des raisons élémentaires de survie.
"Ton dragon, est-il capable d'aider à la reconstruction de maisons, ou d’assainir l'eau d'un puits, où est-il comme son partenaire : motivé par une force immuable de confrontation ? Il pourrait me manger ? Donc tu me tuerais pour me faire taire, c'est ce que tu sous-entends ?" Son ton se calma ensuite. Moins énervé, mais tout aussi accusateur, visiblement, sa prochaine remarque serait prononcée avec le cœur. "Et si tu as affaire à moi, ne mêle pas mon oncle à ça. C'est une bonne personne qui a toujours agit dans l'intérêt de ses proches et des animaux. Je te trouve bien des défauts, mais je ne t'imagine pas aussi bas.
...
Sans compter que je n'ai jamais été éleveur, j'ai des employés qui font ça pour moi."
- Et à ton avis le controle des frontières, les patrouilles aériennes, je les fait pour quoi ? Pas pour tes petits fesses de noble arrogant. La misère est plus élevée à la capitale qu'aux grands port, je pensais que tu le savais mais de toute évidence tu ne connais rien à la ville portuaire ! Taxes moins chères, diversités des produits, cultures ! C'est pas dans ton petit établissement qu'on peut trouver cela !
Nivom envoya une grande rafale venteuse dans les voiles mais peinait à rester en surplace. Newt souffla, agacé et se pinça l'arête du nez.
- Tu sembles en savoir assez peu sur la vie de guerrier, de ceux qui nous défende. C'est pas toi qui affronte les Béhémots qui passent la frontière ou qui repoussent les voleurs qui pillent les villages, toi tu es dans ton opulence, en reprochant aux autres une opulence que tu exerces, ça se voit seulement à tes manières ! Je connais parfaitement les besoins de mon peuple, mais tu n'y viens pas voir, en même temps tu n'as aucune capacité de déplacement viable.
Oui, lui seul pouvait parcourir le royaume en moins d'une demi journée de vol.
- Tu parles sans rien n'y connaitre, que ce soit à mon sujet ou au sien ! Et non, il va pas te manger, il mange pas les humains. Quoi que pour les crétins j'ai un doute.
Le dragon aux écailles sombres se reposa sur le mat en équilibre, s'ébrouant et faisant tanguer le bateau.
- Tu pourrais au moins reconnaitre que sans lui, t'es pas grand chose. L'influence ça s'apprend ! Mais tu vas encore me dire que le grand Keith Veriano est un homme simple qui s'est fait seul sans l'aide de personne. Ce serait vantard !
Newt n'avait pas l'habitude de rentrer dans le jeu de la confrontation.. Mais par Lucy, il commençait à avoir faim et chaud à cause du soleil tapant.
Au fil des reproches qui lui furent adressés, Keith se rapprocha de Newt. Il ignorait s'il disait la vérité sur son dragon qui ne mangeait pas d'Humain, mais pour une obscure raison, il ne le voyait pas mentir.
"Sans rien, ni personne, je me débrouillerai toujours mieux que toi. J'ai la débrouillardise, l'effort au travail, et suffisamment de connaissances nécessaires. Je sais ce qui doit être fait et comment le faire. Si on te retire tout, peux-tu me dire, droit dans les yeux, que tu seras capable de rebondir ? Sans ton dragon je ne suis pas grand chose, hein ? Peux-tu me dire ce qu'il arrive si on te le retire ?"
Keith s'éloigna quelque peu, épongeant la sueur d'un revers de sa manche.
"Et pour ce que tu me reprochais, sur mon opulence. Crois-tu qu'on ait le même degré de richesse, prochain gouverneur ? Penses-tu que la soi-disant fortune que je vais me bâtir égalera celle dont tu hériteras ? Ne sois pas plus ridicule. Traites moi de vantard tant que tu veux, c'est une réputation qui me colle déjà. Mais moi je ne vois que de la jalousie.."
Son timbre de voix était devenu encore plus méprisant.
"C'est bien plus facile de critiquer l'arrogant, que d'avouer qu'il en a baver pour arriver où il en est. L'opulence... Je vis chaque jour en travaillant d'arrache-pied pour rembourser mes investisseurs. Pour payer ce que je leur dois pour l'hippodrome, et ce que j'arrive à générer en bénéfices me servira à construire d'autres édifices et à encourager l'éducation. Sans le travail des soldats qui défendent notre pays, mes efforts seraient inutiles, mais ait la décence de reconnaître que c'est grâce aux entrepreneurs de mon genre que ça vaut le coup de se battre !"
Quand Keith parla de supprimer Nivom de l'équation, le dragon lui grogna dessus et Newt haussa les épaules.
- Sans Nivom, je n'ai pas de pouvoir. Je ne l'ai pas dressé figure toi, il est lié à mon pouvoir donc si on me le retire, je ne sais pas vraiment ce qui va m'arriver. Encore une fois, tu parles sans savoir. Et il en va de même pour la richesse. Mon lien avec la couronne n'est pas l'origine de ma fortune, mais plutot les efforts d'aventuriers que sont mes ancêtres.
Il leva sa boussole des Milles Savoirs, artefact puissant au sein de la famille d'Arphéos.
- Ce compas m'indique ce que je veux plus que tout au monde, ce qui a le plus de valeur. A coup sur, si je l'ouvre, je sais qu'il va te pointer pour le plaisir que j'aurais à te faire taire.
Il rattacha le compas à sa ceinture, en sécurité. Il savait qu'en l'ouvrant, la boussole indiquerait la direction d'Elyssia, ou peut être sa soeur. Il ne voulait jamais savoir.
- On se bats, nous guerriers et défenseurs du royaume pour le peuple et non pour les entrepreneurs capables d'engager des mercenaires. En général vous vous passez bien de la garde, fit-il en descendant à la cale pour chercher une corde suffisamment puissante ou tenter que Nivom les tracte. Soit ça, soit Keith serait le premier à pouvoir se vanter d'avoir éliminer sa patience.
- Et par pitié, que je ne t'entendes plus ! Tu es insupportable, faudra qu'on me rappelle pourquoi j'ai accepté de venir ! Heureusement pour toi que j'ai besoin de m'entretenir avec le gouverneur !
"C'est intéressant de me parler d'un objet magique très puissant et dont la valeur doit être inestimable, juste pour le ranger ensuite. Tu as un dragon, tu as un cap, tu n'as que trop de temps libre, alors explique-moi pourquoi tu es encore ici ? Je ne pense pas que ce soit un problème de responsabilité ou d'argent, te concernant. Qu'est-ce qu'il te manque pour aller à la rencontre de ce que tu désires le plus ?"
Veriano eu comme un pincement au coeur, en songeant à ce que ce compas pourrait pointer pour lui."
"Parce que les nobles ont de l'argent il ne mérite pas la protection de l'armée ? Tu pourrais me la redire en face lors d'une soirée mondaine, je suis certain d'apprécier les retombées qui s'en suivront. J'ignore ce que tu vaux réellement au combat, mais ta rhétorique n'est assurément pas digne de celle d'un gouverneur. C'est honteux de voir des incompétents arriver à des postes de décision."
Malgré tout, il aidait à transporter le cordage, la survie de touts ceux sur le vaisseau pouvait en dépendre. Après quoi, il regarda Newt dans les yeux.
"Fais honneur à cette nation, et décline ce poste de gouverneur. Des gens plus consciencieux prendront le relais. Tu auras toujours des titres, de l'argent, ton dragon et ton compas." Keith parlait presque avec solennité, et mépris. "Si tu es un combattant, un tacticien ou un stratège hors pair, tes capacités seront mieux employées comme militaire ou aventurier. Si tu persistes à être gouverneur avec cette attitude, lâche et malhabile, tu vas nuire aux habitants de la ville dont tu auras la charge."
Avec n'importe qui d'autres, Keith aurait sûrement essayé un contact physique avec sa prochaine question, mais pas avec Newt.
"On ne parle pas de tuer un monstre ou de trimballer du cordage, mais de politique. Crois-tu être capable de contenir les nobles, de rassurer le peuple, d'administrer une ville, de rester des jours, des mois et des années au même endroit parce que c'est le devoir que tu as accepté ?"
Keith agaçait Newt, qui avait faim et qui n'aimait pas s'embrouiller.
- Je suis encore ici pour essayer de ramener tout ce beau monde à terre. Sinon, en effet, je serais déjà parti, si mon rôle n'était pas de veiller sur des habitants du royaume. Et pour le reste, ça te regarde pas. Niv ! Descend !
Le dragon carboné se posa comme il pu, accroché au bastingage de la proue du navire. Newt attacha le bout que les deux nobles avaient ramenés à sa selle.
- J'ai parlé de noble comme toi, qui engagent tous et n'importe quoi, presque au profit de la loi. Je ne serais guère étonné qu'un gars comme toi n'ai pas un assassin à son service. Quant à ma répartie... On va dire qu'elle est en vacances le temps qu'on gagne la terre et qu'on ait à manger, j'ai une faim de Gévaudan !
Il esquissa un sourire qui disparut quand Keith mentionna qu'il ferait mieux de quitter son poste de futur gouverneur.
- Je connais par coeur le trafic maritime, chaque pavé, chaque route et chaque commerçant de ma cité. Que je sois un combattant ou autre n'y change rien. Je sers et servirais la couronne avec l'honneur et le devoir qui m'incombent avec ce rôle de la plus haute importance. Contrairement à toi, je n'ai pas choisis ma vie, mais je l'accepte et je l'aime, cette vie. J'en suis pas aigri moi au moins.
Il ne ferait jamais une croix complète sur ses vadrouilles aériennes, les patrouilles et tout ce qui en suit. Il les réduirait, comme il le faisait depuis des années alors qu'il reprenait peu à peu la ville du port en main à la suite d'Aragon.
- Tu n'as qu'à soumettre ton idée au roi, de me trouver un remplaçant je veux dire, il en sera ravi je pense !
Il siffla brusquement entre ses dents et Nivom s'envola doucement, essayant de tracter le navire. Newt espérait que le bout tienne !
Petit à petit, alors qu'il allait parler, Keith laissa filtrer son pouvoir, pour partager ses émotions à Newt, l'étreignant dans toute la rage et la résolution qui l'animait.
"Parce que tu as faim, tu ne peux plus aligner des mots censés ? Parce que tu connais les routes comme le ferait une carte tu te crois digne ? Arrêtes de te cacher, Arphéos. Tu es un enfant perdu à qui on confiait trop de charges sur ses épaules. Et maintenant que tu as grandi, tu essayes péniblement de faire ce qu'on attend de toi. Dans ton coeur, tu es comme on est ici : perdu en mer."
Keith fit son possible pour rendre ses sentiments aussi étouffants que possible. Si Newt n'aimait pas le conflit parlé, Keith en était alors un grand amateur.
"Tu ne veux plus discuter avec moi, alors tu me demandes d'aller en parler au roi ? Ton Gouverneur de père, ton Roi de parrain, ton Dragon de pouvoir. Tu ne fais qu'emprunter une force qui n'est pas la tienne, et tu n'as rien pour m'affronter directement. Tu fuis le conflit, tu évites les sujets épineux, tu reportes les ennuis ! Mais aucune confrontation ! Tu n'es qu'un lâche, Newt d'Arphéos !"
L'idée transperça tout de même Keith, que de mettre publiquement en avant les défauts de Newt et de montrer son incompétence à administrer une grande ville. Et cette pensée plaisait étonnement à Keith. Dans son pouvoir, une émotion filtra au milieu de la colère assurée : un amusement malsain.
"C'est facile de se cacher derrière ceux qui t'aident depuis toujours, mais tu ne pourras pas continuer indéfiniment."
Newt n'était pas un grand parleur, sa rhétorique n'était pas aussi aiguisée que son épée et surtout, il avait un tempérament calme. Mais une fois Nivom en l'air, Keith attrapa l'héritier au col.
- Ce que tu dis est faux, toi même tu le sais.
Alors qu'il finissait de déblatérer, le jeune entrepreneur fut brutalement projeté au sol par un coup de queue de Nivom qui lui bondit dessus, le plaquant au sol du navire d'une patte lourde, grognant.
- Tu es un beau parleur, on l'a bien compris. Un gros con aussi. Plus tu parles, plus je me dis que tu cherches gratuitement à me déstabiliser. Pour quoi faire, j'en sais rien, mais tu perds ton temps. Contrairement à toi apparemment, je sais ce que je vaux.
Sous l'influence du pouvoir de Keith, Newt avait dégainé l'épée à sa ceinture, pointant la pointe vers le jeune homme.
- Maintenant on va regagner la terre et plus jamais tu n'oseras ouvrir ta gueule envers moi. Si ma noblesse est illusoire, la tienne est une escroquerie. Et que j'ai ou non mérité mon titre futur ne te regardes en rien, tu n'es même pas concerné par le port. je plains néanmoins la capitale d'avoir à supporter un aussi sombre personnage, aveuglé par des sentiments soit disant nobles mais qui ne sont en fait que ceux d'un malfrat. Tes mots mériteraient bien de t'envoyer un prison un moment, au même titre que porter la main sur moi. Tu crois que je ne sens pas ton amusement, vipère ?
Il y avait de la pitié dans la voix du jeune homme, qui avait bien cerné le pouvoir de l'autre.
- Ton pouvoir a bien du t'aider dans ta montée en puissance, mais au final... Tu n'es rien, pour moi ou pour ce royaume, pourquoi devrais-je m'en prendre à toi.
Il senti une brise qui, familière, gonfla les voiles. Il rangea son épée, monta sur son dragon encore harnaché au navire et le força à libérer l'abruti. Il glissa à terre, siffla et passa à côté de Keith pour aller au gouvernail. Il les orienta vers la terre. Il se prépara à lancer néanmoins une boule de feu vers Keith si ce dernier se décidait à l'approcher.
"Tout ce que j'ai dit... N'est que pure vérité. Mais aveuglé tel que tu l'es, par la prétention que tout te revient de droit, par la couardise qui motive tes actes, mais aussi par la traîtrise qui à présent te caractérise..."
Keith toussa bruyamment une nouvelle fois. Ce coup avait été violent, et l'encaisser sans armure fut rude.
"Tu crois pouvoir m'inspirer la peur car je te mets face à tes contradictions ? Car tu as toujours entendu des félicitations alors que tu n'étais pas digne de ces louanges ?"
Un spasme l'agita, ce satané drake gardant la patte sur lui. C'était bien trop lourd pour un Humain.
"Regardes moi, Échec ! Contemples ce que tu fais au nom de ton titre prestigieux. Tu blesses et bafoues. Tu justifies de la torture, cela ne porte aucun autre nom, pour la raison que quelqu'un a eu le cran de te dire ce que tu devais entendre !"
Keith essaya de retirer la patte de Nivom alors que Newt le fit reculer à sa place. Néanmoins, il ne put pas encore se relever.
"Un être civilisé, plein d'esprit, et capable de garder son calme en toutes circonstances ! J'ai eu un aperçu de quel genre de personne tu seras dans les moments de crises, et crois-moi, ils surviendront. Mon amusement viendra seulement de la honte que tu apporteras sur ta maison. De savoir que tu ne te souviendras que d'une seule personne t'ayant percée à jour. Et à cet instant, celui qui n'est rien te sera infiniment supérieur."
Comme si un pouvoir de partage de sentiments pouvait égaler un dragon, Newt ne semblait pas maîtrisé le sens des réalités. Et cela le perdrait. Keith remarqua sa vigilance, prêt à l'attaquer. Newt agissait comme un sauvage...
Même s’il mourrait d’envie de lui faire rotir la gueule, Newt se retint en entendant de nouveau la voix de Veriano.
- Tu me reproches de t’avoir attaqué, mais c’est Nivom tout seul qui l’a fait. Je vais t’apprendre un truc : il est mu de sa propre volonté. Et j’aurais pu le laisser te rotir la face ou te broyer la cage thoracique.
Il sentit enfin une brise et, se penchant au bastingage, s’aperçut qu’il avançait enfin. Il lacha un soupire de soulagement.
- Je n’accorde pas d’importance au titre, mais a croire que tu es inconscient pour attraper ainsi celui qu’on qualifie d’Enfant du Dragon, surtout quand on sait comment sont les dragonnes face à la défense de leur oeufs.
Nivom était très protecteur, parfois trop. Il restait un animal sauvage, seulement docile par le lien avec Newt. Si Newt venait à mourir, Nivom ferait feu sans distinction, se sentant sans doute attaquer. Le dragon restait sauvage. Balayant d’un geste de la main les propos de Keith, Newt se remit aux commandes.
- Nous serons à terre sous peu, je dirais moins d’une heure. Tu retourneras à ta capitale et cette dérive ne sera qu’un lointain souvenir. Par Lucy je n’avais connu autrefois aucun homme aussi agaçant !
Le vent se levait et le bateau glissa finalement sur les vagues.
"Vaniteux. Pas d'importance au titre et tu le mets en avant. Hypocrite. Toi et ta bête sauvage. Je ne vous donne pas 5 ans pour faire face à une guerre civile !"
La douleur le fit taire un bref instant. Newt était visiblement qu'un enfant dans sa mentalité et ses réflexions. Il n'avait pas les épaules et cela fit déglutir Keith.
"Et moi je n'avais vu de ma vie un être aussi dangereux pour le bien de son peuple. Tu as intérêt de te reprendre sérieusement en main, où mes prédictions seront exactes. Agaçant, mais lucide. Administrer une ville n'est pas pour les oisifs, Échec."
Il commençait à prendre le pli, de l'appeler "Échec". Il se calma un peu, fermant les yeux, bercé par le navire qui les ramenait sur la terre ferme.
|
|