"Madame Tōnco, si je dis vrai... Vous êtes la fille de Garan ? Un général illustre. C'est bien cela ?"
Alors qu'il allait poursuivre... Une vive douleur céphalée le saisit. Se prenant la tête subitement ! Il peinait à ouvrir les yeux. Ses pensées étaient chamboulées.
Bordel, ma tête... C'est insupportable !
Elle siégeait dans un immense manoir en bois de tourbium. Le magnifique bois de son village. Face à elle se trouvait Keith Veriano. De neuf ans son aîné, il buvait un thé. Elle ne le connaissait pas très bien. Il avait une affaire concernant les chevaux. Sans doute encore un humain fier d'exploiter les pauvres créatures. Malgré ce défaut, sa présence ne semblait pas gêner Draelaa. Cassant le léger fond sonore musical, l'homme prit la parole. A son tour la jeune femme lui répondit calmement.
- En effet, Draelaa Tonco. Fille non pas du général, mais du gouverneur du village. Ne seriez-vous pas Sir Kieth ? Votre réputation vous précède.
Elle remarqua que l'homme se tenait la tête. Elle ne pensait pourtant pas être si ennuyante. A son tour, une vive douleur lui prit la tête. Laissant tomber la tasse qu'elle tenait, elle comprima ses tempes. La paume de ses mains collées aux tempes, elle pensa.
« Qu'est ce qu'il m'arrive ? Cette douleur est atr ... »
Soudain, plus rien. Plus un bruit, plus un son. Elle ne pensait plus, elle n'avait plus mal. Le vide dans sa tête était étrange. Elle leva la tête et observa Keith. Que s'était il passé ?
Comment cela se fait-il ? Elle a eu l'air d'avoir mal également. Elle a lâché sa tasse.
Keith se trouva désorientait face à tout cela. Il essayait bien de rester calme. De chercher une logique à la situation. L'utilisation d'un pouvoir télépathique ? Un objet magique ? Le résultat d'une mauvaise blague ? En pensant à cela, il regarda autour de lui. Une personne, un indice, peut-être ? Fenêtre et portes closent, ils étaient seuls. Le jeune homme s'approcha de la fenêtre. Personne aux alentours de l'autre côté. Ils étaient à l'étage, mais qui sait...
Keith chercha à retrouver un peu de calme. Il ne se voyait pas rebondir sur leur dialogue. Le contexte avait évolué au-delà de tout contrôle.
Comment puis-je entendre ses pensées...?
Puis, avec un sursaut, il la fixa.
Peut-elle entendre les miennes ?
Veriano la fixa, venant se poser à sa place. Assit sur le canapé. Son regard passa de la tasse renversée à la Dame. Elle comme lui, ils semblèrent déboussolés par la situation.
Je … Ce sont donc ses pensées ?
Que se passait-il ? Était-ce vraiment l'homme face à elle ? Ce mal de crane l'avait-il rendu folle ? Elle tapota son front et se frotta les yeux. Le thé était-il empoissonné ou quelque chose comme ca ? Un moment, elle se demanda si elle rêvait. Il était impossible qu'elle entende la voix de Keith.
- C'est vous que …
Elle regarda le noble. Ca semblait tellement réel. Il semblait aussi entendre les pensées de Draelaa. Aussi, au lieu de finir sa phrase, elle pensa :
Vous m'entendez ?
Ca y est, elle était probablement folle. Elle le regarda attendant une réponse qui n'arriverait jamais. Elle pensait pour communiquer avec l'homme devant elle. Sous forme de renard, elle comprenait les autres animaux. Ce n'était pas comme une conversation. Elle partageait leurs émotions et leurs sentiments. Elle ne pouvait entendre les pensées des autres. L'homme d'affaires était-il capable de partager ses pensées ?
Ses pensées n'étaient plus seulement les siennes. Mais c'était valable pour les deux, au final ! Ils les partageaient sans le vouloir, sans le désirer. Forcés à s'entendre penser. Tout ce qui leur passerait par la tête.
Mes démons intérieurs ont fini par me rattraper... L'alcoolisme et mon traumatisme.
Le fantôme d'une femme calcinée passa devant la fenêtre. Un bref moment, un fugace instant. Keith frissonna en voyant son pouvoir s'activer seul. Cela lui arrivait quand il était perturbé. Il passa sa main sur son visage en sueur. Il retira immédiatement après sa veste. Soudainement, il avait l'impression d'étouffer. Il respirait fort.
Un autre...
Il interrompit ses pensées. Se forçant à visualiser le ranch de sa propriété. Le Noble souffla doucement. Son regard retourna sur Drælaa. Il essaya de sourire, mais en vain.
On s'entend chacun ? Comme dans notre tête ?
"Absurde" était le mot qui revenait le plus. Son esprit embrumé par ce qu'il vivait. Incapable d'avoir des pensées cohérentes. Il lui fallait avant tout se calmer.
En guise de réponse, de nouvelles pensées submergèrent la demoiselle. Des pensées qui se voulaient sombres. Keith avait souffert d’alcoolisme. Une maladie, si l’on en croit la légende, incurable. La noble avait croisé au village des buveurs nés. Ils titubaient dans la noirceur de leurs pensées. Enivrés d’un breuvage qui les consumaient de l’intérieur. Par respect pour l’homme face à elle, Draelaa se tue. Elle contrôla ses pensées. Elle tenta d’oublier ce qu’elle venait d’entendre. Contrainte cependant à penser que Sir Veriano eut été intempérant.
Après un long moment de malaise, il lui répondit. Non pas de vive voix, mais en pensée. Elle n’était pas folle. Ils pouvaient communiquer en pansant. C’était incroyable. Elle aurait cependant préféré partager ce don avec une amie. Keith était pour elle un inconnu.
Je pense oui. J’ai l’impression d’être folle.
Doutant de ce qu’il se passait, elle tenta une stratégie. Elle servit un verre d’eau qu’elle posa sur la table. En pensée, elle le proposa a Keith. Ça ne pouvait lui faire que du bien. Il avait, après ce malaise, besoin de se rafraîchir.
Prenez donc, ça vous fera du bien.
Sans toucher au verre, elle regarda la réaction de l’homme. S’il le prenait, il l’entendait. Sinon, elle devrait faire un tour à l’hospice.
Drælaa servit de l'eau et lui tendit le verre. Keith la regardait avec des yeux vitreux. Elle a raison. Boire de l'eau lui ferait peut-être du bien. Il se pencha pour prendre le verre. Leurs pensées étant partagées, il savait ce qu'elle voulait. Une preuve que de la situation improbable. Après quelques gorgées, il reposa le contenant. Las, mais apaisé, il répondit doucement. Merci, ma Dame. Parler semblait obsolète d'un coup. Et fatiguant, même...
Veriano chercha des raisons. Qu'est-ce qui pouvait être à l'origine ? Un tel phénomène ne survenait pas sans raison ! Un pouvoir ? Un objet magique ? Une créature étrange ? L'hypothèse du pouvoir lui semblait plus crédible.
Il souffla, posant sa main sur son visage. Le sang lui battait les tempes. Cette pression venait de l'assommer. Il avait l'impression d'être froid. Fatigué. Vide.
Je pense avoir besoin de repos.
Les circonstances ne se prêtaient guère au dialogue. Surtout quand nul n'avait besoin de parler. Keith peinait à garder les yeux ouverts. Il se remit sur ses pieds. L'effort fut aussi pénible que les impôts à payer. S'appuyant sur le canapé il marcha vers la sortie. Nul besoin de s'attarder, sans doute. La fatigue et la folie le guettèrent. Veriano passa la porte avec une certaine lourdeur.
Inutile de me raccompagner. Je vais en rester là pour aujourd'hui.
Ne pas parler avait ses quelques avantages. Aucun effort physique n'était à produire ! Keith sortit du manoir et rejoignit son carrosse. Là, un cocher l'attendait.
Ramenez moi chez moi.
Mais l'employé le fixait avec de grands yeux vitreux. Keith réitéra son ordre, mais toujours rien. Oh. Lui ne m'entend pas.
"Ramenez moi chez moi."
L'employé fit un hochement de tête. Il fit claquait les rennes d'un coup sec. Et le véhicule se mit en route.