Tout ce beau tableau était parachevé par la bonne nouvelle qui était enfin tombée dans la bouche boudeuse de son affilié de la Commission: sa mutation prochaine au Grand-Port. Bientôt, ce mot qu'il redoutait toujours autant, bientôt, ce mot qu'on lui avait servit tant de fois et qu'il avait mâché si longtemps à contre-coeur, bientôt qui laissait souvent apercevoir son petit-frère juste derrière, un autre bientôt rempli d'une promesse jamais pleinement accomplie. Désormais le bal des bientôt arrivait à terme et le futur se concrétisait pour de bon. Car bientôt le régiment Al Rakija allait pouvoir s'envoler vers le Grand-Port pour s'installer au sein de la place-forte du Sud depuis trop longtemps désertée par la présence d'un Capitaine. Certes le sud du Royaume n'était pas le théâtre des plus grandes dangerosités mais sa stabilité ne tenait parfois qu'a un fil selon les agissements des bandits des grandes plaines et d'autres menaces. Sous la future tutelle de Al Rakija, ces maux seront, il l'espère, bien vite conjugués au passé.
Puis sa famille. Résidents de la Ville-Aquatique, ses parents ne seraient qu'a une navette et avec eux les rejetons de Yuduar sous bonne tutelle de leurs ainés. Fini les allés-retours trop rares dictés par les permissions données de mauvais coeur. Terminé les attentes interminables rythmées uniquement par les multiples lettres et dessins que son fils et sa fille lui envoyaient depuis la magnifique cité de coraux. La quiétude d'une nouvelle vie, d'une nouvelle ville, d'une famille plus proche et quasiment réunie. Sa reconversion en Garde semblait entrer dans ses meilleures années.
Une poignée d'heures plus tard, arrivé sur le seuil de la pièce qui lui servait de bureau, sa surprise ne fut pas feinte quant au fait de trouver son brave Lieutenant Calyx sur le pied de guerre. Yuduar resta interdit quelques instants, s'attendant surement à la suite d'une journée calme et paisible.
"Emeor?"
"Capitaine." salua son second avec son habituel droiture impeccable "Vous avez reçu une affectation pour cette après-midi."
"Oh dieu, cette journée était trop belle pour continuer ainsi je le savais..." soupirant de lassitude le Capitaine se laissa choir sur les confortables capitons de son fauteuil "Allez-y je vous écoute mon brave."
"Ce n'est que de la routine rassurez vous. Une patrouille organisée de cinq hommes dans les quartier ouest de la Capitale. Des civiles auraient rapportés d'étranges activités liées à une jeune pègre entrain de s'installer."
"Une branche de la bande du Joker?"
"Négatif, aucunes nouvelles d'eux depuis des mois maintenant. Aucune affiliation avec un retour des Loups Argentés non plus. Surement juste des coupes-jarrets qui profitent des quartiers plus pauvres."
"Bien, bien, bien..." tapotant le bord de son bureau avec une moue hésitante et presque déçue, Yuduar se donna un élan pour se redresser afin de mettre pied à l'étrier "Et bien on est partis. Attrapez quatre gars sur votre route et..."
"Désolé de vous interrompe Capitaine mais la patrouille n'est pas faite sous les couleurs du régiment. Vous serez avec des réguliers."
"Pardon?" les yeux comme des soucoupes, Al Rakija resta à mi-chemin de son mouvement de se lever afin d'assimiler la double mauvaise nouvelle désormais énoncée.
"A vrai dire l'équipe est déjà construite et pré-proposée par la Commission. Voila vos hommes, ils doivent être entrain de se rassembler dans la Cour à l'heure où on parle."
Saisissant le document qu'était entrain de lui tendre Emeor, Yuduar en profita pour se rasseoir avec l'espoir que la pillule serait plus facile à avaler. Ne lésinant pas sur les commentaires muets quant aux profils qu'il avait devant les yeux, son mécontentement en devenait presque aussi palpable que sa flegme. Clairement on lui avait pas refilé les meilleurs foudres de guerre de la Caserne. A tout juste quelques semaines de la validation de sa mutation, voila là le parfait pied de nez de ces gredins de cols-blancs. Lui qui avait pourtant accepté l'idée d'avaler quelques couleuvres pour faire bonne figure, vous m'en direz tant. La seule bonne nouvelle là-dedans était l'un des gars qui allait l'accompagner en cette belle journée ensoleillée: Rid Doroy. Son profil avait déjà attiré son attention lors des réunions avec Fergys et il avait même osé avancer son nom en tant que possible Lieutenant. Mais le moustachu n'était pas convaincu par l'état de service du borgne, jugé un peu trop explosif à son goût dut à quelques anciennes affaires résolue à grand coup de savate. Mais ce genre de lignes n'étaient que du détail pour le fantasque Capitaine. Il n'avait jamais bossé avec lui sur le terrain, ce serais là l'occasion de vérifier si le soldat est si bas du front que ce que sa tendance à la violence laisserait penser.
Équipé de sa fameuse armure de Capitaine aux tons d'or et d'émeraude, le tout habillé par une longue cape beige clair tenu par son insigne dorée de Capitaine, Yuduar fit enfin son arrivée dans la Cour où se tenaient déjà le gros des troupes sur le départ. Une unité réduite, ornée d'un capitaine principalement là pour faire de la figuration et donner un sentiment de sécurité aux pauvres des quartiers Ouest. Sommes toutes rien de bien sorcier.
"Messieurs, rassemblement." vérifiant machinalement la bonne tenue du bandeau qu'il portait constamment sur le front pour lui maintenir les cheveux, outre la signification personnelle bien entendu, Yuduar se racla le gosier pour annoncer les ordres du jour "Bon, vous avez dut déjà recevoir les indications pour la patrouille à venir mais on vas se mettre au diapason hein. Quelques malins s'amuseraient à faire peur aux bonnes gens des quartiers Ouest, on vas donc se payer une balade dans le coin pour vérifier que la veuve et l'orphelin se portent bien. Si jamais ça commence à remuer ou qu'un joueur de couteau se sent pousser des ailes, on intervient rapidement et efficacement quitte à faire un peu d'éclat. Mais pas trop hein, l'important c'est de passer un message, pas de casser des chicos sans se poser de question on se comprend." quelques rires gras parsemèrent l'assemblée, il fallait s'y attendre "Je part du principe que la plupart d'entre vous me connaissent mais on sais jamais. Capitaine Yuduar Al Rakija, je serais donc responsable de notre petite sortie organisée. J'ai rien contre les originalités, comme certains le savent, mais évitez de trop jouer au con ça m'arrangerait. Vous aimez pas la paperasse, moi non plus, vous avez envie de rentrer tôt pour boire une mousse, moi aussi. A partir de là, vérifiez bien que vous avez votre attirail, menotte, anti-magie si besoin, et on est partis. Compris?"
Il n'y avait guère plus à épiloguer sur le sujet. Les soldats avaient l'air simple et formuler des ordres trop complexes à grand renforts de métaphores obscures ne serviraient qu'a créer une sensation de flou inutile dans la présentation. L'entrainement du jour de son régiment était laissé au bon soin de Emeor en compagnie de Thépa qui avait encore toutes ses preuves à faire, il ne se faisait aucun soucis de ce côté là.
Ainsi, la joyeuse troupe se mis en marche pour accomplir sa sainte mission ordonnée par ces messieurs de la Commission. Trois petits tours et puis s'en vont, qu'est-ce que pourrait mal se passer après tout?
Enfin, si Rid avait rejoins la garde lors de son début d’adolescence, c’était plus pour l’action et les castagnes. Il avait sans doute pensé qu’il en recevrait plus que dans ses pensées, mais faut croire que la criminalité n’aime pas se prendre de face le poing d’un garde dont la force est amplifiée par son pouvoir. Du coup, les journées pleines d’actions fut finalement assez rare, en tout cas pour le gout du jeune borgne.
Cela allait néanmoins un peu changer, surtout que Rid fut sélectionner pour une patrouille d’une assez grande envergure. Equiper de son équipement de garde, assez légère que celle des autres, équiper d’une large épaulière et de son cache œil qui le rendait très reconnaissable parmi ses paires. Lui et plusieurs gardes furent choisi pour accompagner le capitaine Yuduar. Ce dernier ne perdait pas de temps à expliquer les raisons de la patrouille avec son humour habituel. Humour qui tourna quelques regards vers le borgne qui s’en moquait terriblement. Il ne fallait pas oublier que Rid était connue pour se lâcher entièrement lors d’un combat.
Enfin, le jeune borgne se fichait un peu des regards et des pensées des autres. A vrais dire, il s’en fiche un peu près de toutes les critiques à son encontre, tant qu’il à son fun, il sentira bien. Bien qu’aujourd’hui, l’adrénaline n’allait pas être pomper dans son sang, car c’était une patrouille qui allait être sans doute être calme.
Mais pas la peine d’en faire tout un plat, il y avait bien d’autre moyen de rendre sa journée bien meilleure après le boulot. Cependant, il fallait s’y mettre. Arme à la ceinture, le jeune borgne resserra un peu son épaulière et se mit en formation pour commencer la patrouille avec ses collègues. En termes de questions, Rid n’était pas le fan de ces derniers, donc il était assez silencieux. Son œil se perdant juste au loin alors que la troupe de gardes commençaient à s’approcher des rues bondés par les civiles.
Au milieu de tout ça, Yuduar tâchait de garder son air solaire, le visage animé d'un sourire doux, marchant en tête de la petite phalange d'hommes. Derrière lui, quelques conversations allaient bon train entre les réguliers. Par moment le capitaine se retournait pour ramener les priorités à l'observation des entourages mais globalement il laissait volontiers champs libres aux soldats d'user un peu de leur salive. Le seul qui restait un peu en retrait était ce fameux Rid dont il avait entendu parler, il s'attendait à plus dynamique au vue des on-dits qu'on lui avait rapporté. Un détail qu'il ne manqua pas de noter dans un coin de sa caboche.
Arrivés à une sorte de carrefour, aussi petit soit-il, il rassembla ses troupes afin d'organiser un topo sommaire de la situation:
"Bon. Jusque là rien à déclarer. Les gars qui sévissent dans le coin sont visiblement pas assez débiles pour venir nous serrer la main. D'un côté c'est bon signe, de l'autre c'est emmerdant. Gardez l'oreille ouverte, à la moindre inflexion préparez vous à avancer au pas de course." du coin de l'oeil, par dessus l'épaule d'un garde qui lui faisait face, il aperçu un mouvement singulier d'une silhouette qui ne lui était pas étrangère. Habillé d'un étrange trois pièces aux reflets indigo et affabulé d'un chapeau aux mêmes tons, le doute n'était pas de mise: Norman le Bleu, l'un de ses indic' habituels, était visiblement au courant du passage et avait quelques mots à lui toucher. Relevant le nez vers ses hommes, le Capitaine continua "Tenez la position quelques minutes, je reviens."
Se dirigeant vers l'original qui se tenait adossé contre une façade d'une échoppe aux murs de chaux et aux poutre apparentes, le sourire de Yuduar se teinta d'un air malicieux. Le vieux Norman, comme il l'appelait le plus souvent, était une sorte de détective privé au statut pas totalement clarifié quant à ses activités. Grand dégingandé de surement pas loin soixante ans, il était sec comme un coup de trique et avait un visage marqué aux traits taillés à la serpe. Sous ses lunettes aux verres fumés qu'il ne quittais quasiment jamais, un grand sourire s'étira, découvrant des dents par endroits jaunies et par endroits brillantes du métal qui les remplaçaient dorénavant. Ce vieux grigou avait toujours plus d'un tour dans son sac et le passif qui l'unissait à Yuduar ne datait pas d'hier.
Les deux hommes se serrèrent la main d'une poigne franche et commencèrent à échanger quelques mots tapissés de coup d’œils alertes sur de possibles oreilles entrain de trainer. Sa voix rauque et cassée par le temps était aisément reconnaissable, tout comme le Capitaine avait la fâcheuse tendance de sortir du lot avec ses airs de grand bandit en pleine reconversion en agent de la loi. Ils n'eurent besoin que de quelques minutes pour arriver au terme de cette courte conversation qui, visiblement, avait sut agrandir le sourire du gradé. D'une amicale tape sur l'épaule, le vieux briscard aux airs de dandy s'éloigna vers les rues qui menaient au centre de la ville tandis que Yuduar retrouvait sa troupe. Plusieurs oeillades interrogatives accueillirent son retour.
"Bien, bien, bien. C'était inattendu mais j'ai des infos qui pourraient nous faire accélérer la manoeuvre. Pas besoin de s'attarder sur le cas de mon ami qui a repris sa route, chacun fait son petit réseau à sa manière que les choses soient claires." tenant à jouer carte sur table, les possibles commentaires déplacés quant à la présence d'un tiers externe au fonctionnement de la garde n'étaient pas de mises pour le moment. Peut-être auraient t-ils l'occasion d'en parler plus tard en fin de service mais ça, seul Lucy le sait. "Donc! On aurait à faire à des nouveaux joueurs en ville, ce qui colle avec les informations que m'as transmis la Commission pour le moment. Surement une retombée logique vu qu'on a sorti les Loups Argentés du paysage y'a quelques mois de ça, qui dit territoire libre dit nouvelles opportunités. Pour nous ça veut surtout dire nouveau boulot. Bref, nos gars se feraient appeler "Les Aurochs". Ils ont deux coins de prédilection dans le quartier, on vas donc se séparer en deux escouades de trois pour couvrir les deux possibilités." jaugeant la réaction de ses hommes tout en essayant de se rappeler des états de service de chacun lorsqu'il avait survolé leurs dossiers, Yuduar tenta d'équilibrer les forces tant que faire se peut "Doroy, Lohir, vous viendrez avec moi. Les trois autres, ça coule de source. Bergen prendra la tête de la seconde escouade."
Expliquant l'emplacement des nouvelles positions autour desquelles tourner, Yuduar tenta aussi d'estimer un possible point de retrouvaille une fois le parcours terminé. L'ordre était clair, prendre son temps une fois arrivé dans les zones concernés et, si jamais du remue-ménage se déclare, pousser le cor dès que possible et foncer dans le tas pour entamer le sale boulot. Il ne comptait pas y aller par quatre chemins et visiblement ses gars étaient ravis à l'idée d'un plan aussi simple d'esprit. Si ils pouvaient frapper fort dès les débuts d'une nouvelle organisation, ils allaient faire en sorte de faire passer le message clairement. Dans tout les cas aux premiers sons de rassemblement, la troupe se réunit pour opérer une tenaille classique et passer le plus de menottes possibles en limitant le sang à faire couler. C'est dans les vieux pots qu'on fait les meilleures soupes, pas besoin de couper les cheveux en quatre pour cogner du malfrat en herbe.
Ce sont des méthodes un poil brutales pour certains, mais se sont des méthodes qui fonctionne pour Rid. Après tout, pour le borgne, si quelqu’un cherchait les noises, il s’attend à s’en prendre une en pleine figure. Il ne s’agit donc la que de répondre aux attendes de l’adversaire, même s’il n’est pas bien costaud ou ne cherche pas forcément à se battre. Enfin, s’ils cherchent les ennuis, ils s’avent qu’il y auras des conséquences et Rid n’est pas vraiment quelqu’un qui du genre à tourner autour du pot. Pour lui, il n’y a qu’une seule solution à la violence, une violence plus grande encore, c’est comme se battre contre le feu avec le feu.
Il n’allait pas se comporter comme un ours non plus, le jeune garde sait se mesurer une fois que son adversaire est hors combats … Pour de ce qui est avant, il considère que des dégâts matériels involontaires peuvent être acceptable tant qu’ils permettent l’arrestation du malfrat. Un point de vue qui divise, mais il sait se décrocher quand une vie est en jeu. Après tout, c’est un garde qui doit protéger les habitants de la capitale, pas une machine à tout détruire.
Néanmoins, la petite patrouille s’arrêta bien vite peut après que les gardes avaient quittés la caserne. Apparemment, le capitaine Yuduar allait voire une de ses connaissances, collègue ou autre, cela n’intéressait pas trop Rid. Il était juste un garde, il n’avait pas besoin de savoir de comment se gère les officiers de la garde. Un manque de curiosité qui peut sans doute être un gros désavantage, mais le jeune borgne est quelqu’un d’assez confiant. Naïf, pas jusqu’à la, car si on lui fait fausse route, il trouve les bons arguments pour pouvoir éviter qu’on le double. On a tendance à oublier que derrière son sourire et sa bonne humeur, Rid se laisse rarement faire.
Pour le moment, les rues de la ville étaient assez calmes, un peu de vie par-ci et par-là. Les marchands exposant leurs produits, les ouvriers à leurs taches et les passants regardant à droite et à gauches jusqu’à ce que leurs yeux repèrent quelque chose d’intéressant. Quant à l’œil valide de Rid, ce dernier regardait un peu le ciel, les lèvres affichant un sourire presque habituel. Il n’y avait pas de raisons que la patrouille tourne en catastrophe, mais déjà l’orage se faisait sentir.
Alors que le chef de la joyeuse bande revint vers eux, Yuduar signala la présence probable d’un gang à quelques rues de la ville. Qu’est ce qu’ils ont avec les noms d’animaux pour leurs noms de gang ? A croire qu’on se dirait dans un zoo dans les rues de la ville, mais les bestioles pouvaient causer quelques soucis. Très vite, le capitaine forma deux groupes, histoire de pouvoir nettoyer plus rapidement le problème qui se baladait en ville. Rid fut sélectionner dans le groupe de son chef. Le jeune borgne n’avait pas l’habitude d’être une grande bouche, préférant parler que si c’est vraiment nécessaire ou alors s’il avait vraiment envie de parler. En tout cas, il rejoignit son capitaine et l’ouvra pour y ajouter un peu dose d’humour tout en craquant un peu les doigts comme si la bagarre s’approchait.
- A croire qu’ils sortent tous d’un zoo avec leurs noms, je ne serais pas étonné qu’un groupe s’appelle les « rats d’égouts » ! Du coup, c’est quoi le plan une fois qu'on les repère capitaine?
"On se tient à la formule classique. Si ça carapate, on cours plus vite, si ça lutte, on cogne plus fort. On évite de craquer des nuques, on fait en sorte que ça soit le plus propre possible, on passe les fers et on rentre à la Caserne dès que la session de pêche est terminée. Facile non?"
Le capitaine porta sa dextre sur le pommeau de son épée comme un vieux réflexe, dans le fond il préférerait ne pas avoir à sortir l'acier de son fourreau aujourd'hui mais hélas les criminels ne lui laissaient jamais vraiment la vie facile.
Ainsi la troupe se sépara en deux groupes distincts et commença à déambuler dans des quartiers aux rues de plus en plus étroites et mal-entretenue. Les faubourgs ouest de la Capitale méritaient bien leur réputation et la vie des pauvres gens qui y résidaient ne devait pas être des plus simples non plus. Les gardes n'étaient que trois et avaient de fait perdu cet avantage flagrant du nombre qu'apporte une marche organisée de cinq hommes menés par un capitaine. A plusieurs reprises Yuduar jura être entrain de se faire observer par des angles à la probabilité douteuse. Quelque chose semblait se tramer autour d'eux.
Plusieurs minutes s'égrainèrent. Certains volets et pas de portes se fermaient sur leur passage comme si les chalands locaux ne désiraient pas avoir à traiter avec la Garde en faction dans leurs rues. A coup sûr qu'ils étaient entrain de se rapprocher d'un point de contrôle géré par ces fameux Aurochs, le poids d'un règne de terreur semblait résonner dans certains regards fuyants des habitants. Soudainement un éclat de voix à quelques ruelles de leur position attira son attention. D'un geste vif de la main il ordonna l'arrêt à ses troupes puis, se retournant vers eux pour échanger des regards entendus, invita les deux hommes à marcher sur ses pas sans trop se faire remarquer. Le pas plus mesuré, ils arrivèrent à un croisement des plus banals. Yuduar le premier, il pencha furtivement la tête à l'angle pour jauger de la situation: deux hommes, un balourd de presque deux mètres à l'allure massive et bedonnante, chauve comme un caillou avec une barbe hirsute, accompagné d'un roquet à l'allure de chat de gouttière, maigre comme un coucou juché d'une tignasse blonde en bataille qui retombait sur des joues creusées. Le tandem était entrain d'alpaguer un marmot qui devait avoir tout juste ses dix ans. Le garde se jura de l'avoir croisé quelques minutes plus tôt entrain de jouer aux osselets avec d'autres gamins de son âge, le pauvre petit bougre devait aussi servir de vigie pour gagner quelques cristaux à ramener au foyer familial.
Yuduar revint à l'attention des deux gardes qui l'accompagnait et résuma vite fait les informations qu'il venait de glaner par sa courte observation. Il ne restait plus qu'a entrer en scène.
Se redonnant contenance, les trois hommes passèrent cette fois l'angle comme si cela n'était que la conséquence logique de leur marche, au détail prêt que leur démarche suintait l'assurance de trois chevaliers le torse bombé prêt à rendre justice. Ils s'arrêtèrent après quelques mètres, le Capitaine au centre, main sur les hanches et sourire au visage.
"Aurochs?" question rhétoriquement Yuduar avec un amusement non-feint.
La réponse ne tarda pas à arriver, par l'action plus que par la parole. L'enfant se fit pousser d'une bourrade sans tendresse pour percuter le mur et les deux hommes s’empressèrent de prendre la fuite une fois que la surprise ahurie ait quittée leur visage. Tout en entamant ses premières enjambées, Yuduar fit fuser les ordres:
"Lohir, sonne le cor et vérifie que l'enfant vas bien puis retrouve nous. Doroy, on part en chasse!"
Ils venaient de ferrer deux poissons, un démarrage des plus respectable pour faire bouillir la marmite de l'interrogatoire qui s'en suivrait. Restait plus qu'a mettre la main dessus et -qui sais- peut-être que d'autres camarades allaient s'inviter à cette petite course inattendue.
Néanmoins, il fallait plutôt ouvrir l’œil pour repérer d’éventuelle situation que la garde se doit de gérer. Cependant, l’atmosphère était plus que particulière au passage du petit groupe de garde. Les regards étaient posés sur eux, mais ces regards fuyaient les yeux des gardes en patrouille. Comme quoi, les soucis étaient sans doute assez proches d’eux et que peu de monde voulait s’en mêler au risque de se faire prendre à partie.
Cependant, la patrouille fut rapidement stoppée par son chef qui alla juste quelques coups d’œil à la rue voisine. Il était probable qu’il avait repérer quelque chose qui sent mauvais. Il était même probable qu’il y aurait un peu d’action. Il n’en fallut pas long pour que le capitaine Yuduar retourne vers sa patrouille et explique la situation. Deux gars louches avec un gamin dont le dernier semblait donner des informations aux deux autre.
Du coup, la procédure allait être assez hasardeuse, mais elle permettrait de savoir à qui la patrouille avait affaire. Alors que les trois gardes s’engageaient dans la ruelle tout en se faisant repérer par les gars louches qui semblait s’être fait surprendre. Peu après avoir essayer de savoir l’identité de ces individues qui commençaient à prendre la fuite, Yuduar donna ses ordres et le jeune borgne s’engagea volontiers dans la course poursuite.
Il pouvait sentir l’adrénaline monter à nouveau dans son sang, une sensation qu’il aime particulièrement, surtout quand son pouvoir s’active. Mais il n’avait pas besoin de ce pouvoir pour le moment, il se concentrait plus sur la course, gardant en vue de son seul œil les individues qui fuyait les deux gardes. Pour Rid, c’était qu’une question de courir pour le moment, il n’y avait aucun besoin de se faire mal soi même pour activer un pouvoir qui ne permettrait même pas à courir plus vite. Peut être pour crée un raccourcie en détruisant un mur, mais il n’y en avait pas besoin. Peut être que son capitaine avait un tour en plus dans son sac.
- Je n’ai pas de pouvoir pour les rattraper plus vite, capitaine, mais vous avez sans doute une idée en tête pour les rattraper ?
Dit il en gardant une respiration rythmer et continuant à courir à la poursuite des deux individues.
"Courir. Plus vite. C'est le plan." cala t-il entre ses respirations.
Avait-il plus besoin d'en dire? Ce n'était pas nécessaire en soit et puis la situation était mal choisie pour tailler la bavette si ils devaient sprinter derrière les deux gars des Aurochs. Yuduar ne masquait pas son amusement face à cette course-poursuite inopinée, c'était exactement le genre de sortie champêtre qu'il adorait au sein de la Garde! Le sourire aux lèvres, il lâcha un dernier clin d'oeil goguenard et bifurqua dans l'allée empruntée par les fuyards.
Ils tentèrent bien de renverser des cageots et de bousculer quelques badauds pour gêner leurs poursuivants mais le Capitaine semblait danser sur les obstacles et avec la foule avoisinante, rajoutant quelques "Hâlte!" par intermittence ou rappelant leur statut de Garde devant les yeux ébahis de la population locale. Voila qui allait animer les choux gras du quartier pendant quelques jours. Le bon plan avec le fait de maintenir une allure régulière c'est que les contrevenants devaient bien se diriger quelque part en particulier. Où, c'était là toute la question. Un endroit avec d'autres collègues, une planque, un lieu de rassemblement. Tout était bon à prendre. Et si cela devait rimer avec le fait de devoir en venir aux mains, ainsi soit-il. Ce ne serais pas le premier malandrin de la capitale qui allait se retrouver avec les chausses du Capitaine Al Rakija collées aux fessiers!
L'espace d'un instant Yuduar se remémora son enfance, quand c'était lui qui courait de ruelle en ruelle avec les gardes de la Ville-Aquatique à ses trousses. Et son grand-père sur la ligne d'arrivée, les mains déjà chauffées pour lui infliger une correction digne de ce nom. Qui allait être doublée par sa mère. Puis vaguement triplée par son père, à sa manière. La belle vie! Quelques années plus tard, le voila maintenant entrain de donner la chasse armé de la justice de son statut, en plein quartier pauvre de la Capitale. La vie à une drôle de manière de faire de l'ironie.
Au bout d'un moment, un sifflet retentit au loin. Surement l'autre partie de la patrouille qui prévenait de leur arrivée, entrain de s'engager dans la rue que remontait actuellement à toute berzingue le duo Rid-Yuduar. Les bandits bifurquèrent maladroitement dans une nouvelle ruelle et très vite des éclats de voix plus paniqués s'en suivirent. Une paire de seconde plus tard, les gardes arrivèrent pour en trouver un qui venait de royalement d'étaler sur le pavage plein de crasse pendant que l'autre marquait l'arrêt, surement tiraillé par l'envie de porter secours à son camarade.
"Doroy, maintenant!"
Yuduar se rua ver l'homme à l'arrêt, le maigrichon, laissant le balourd rétamé aux soins de son aide du jour. Un nouveau sourire se dessina sur son visage. Espérons qu'il n'ai pas à dégainer et que tout se passe comme du papier à musique, n'est-ce pas?
En tout cas la poursuite était accompagnée d’une sacrée bousculade entre les poursuivit et les poursuivant à l’encontre des passant. Bien que le capitaine Yuduar évitait avec dextérité les passants bousculer, criant l’ordre aux bandits de s’arrêter. Quant à Rid, on va dire que sa dextérité était celle d’un buffle en pleine charge. Bien sûr, il n’allait pas renverser les passant en leur fonçant en plein dans la poire, mais il en bousculait certain. Il voudrait hurler avec son chef, mais sa politesse le rattrapait en disant « pardon, excuser moi » à chaque passant ayant été renversé tout en continuant à poursuivre les fuyards.
Très vite, l’autre équipe fit savoir qu’ils étaient en chemin pour venir en aide au borgne et au capitaine. Les bandits ont dû aussi sentir la tempête qui venait pour eux, ces derniers décidant de prendre un autre cap pour essayer de semer leurs poursuivants. Néanmoins, il semblerait que ce soit un calcul qui donna un mauvais résultat.
Le capitaine et le garde voyait leurs fuyards ralenties après une chute de l’un d’entre eux. Très vite, Yuduar donna l’autre à Rid de s’occuper de celui qui était à terre. L’œil encore valide du borgne se fixa sur le balourd qui avait du mal à se redresser, il aura encore plus de mal à se redresser avec le garde qui se jetais sur lui pour le neutraliser et non dans la douceur.
Après avoir atterrit sur le bandit, la main du garde s’agrippa très vite au col du gaillard pour le redresser et tout en baissant la tête pour y rencontrer son front assez violement dans le geste. Ce coup terrible fit reculer chacune des têtes. Néanmoins, le choc réveilla un peu l’adrénaline de Rid dans le sang, augmentant légèrement sa force physique. Enfin le gaillard semblait bien sonner lui aussi après ce choc de tête, tout comme Rid qui secouait légèrement la tête tout en entendant cette dernière siffler un peu avant de reprendre ses esprits tout immobilisant au sol le gaillard.
"Messieurs, par ordre de la Garde, vous êtes désormais en état d'arrestation. Vous aurez tout le temps d'expliquer votre petite escapade une fois rentrés à la Caserne."
Yuduar commença à saisir la paire de menotte qu'il gardait accroché à sa ceinture-outil lorsque soudainement le son strident d'un sifflet particulier se fit entendre à une rue de leur position. Clairement ce n'était pas là le typique son du cor de la Garde. Derrière eux, les renforts du Capitaine commencèrent à se dessiner à l'orée de la ruelle où avait eu lieux le maigre combat expédié. Devant eux, plusieurs silhouettes commencèrent à se dessiner provenant d'autres ruelles des alentours. L'air semblait se charger de tension, Yuduar attrapa le bandit qu'il avait précédemment mis au sol mais sa prise se résuma à du vide à sa plus grande surprise. La silhouette du bandit se désagrégea devant ses yeux étonnés, comme une bulle de savon à forme humaine.
"Illusion! Doroy fait gaffe!"
Mais l'avertissement arriva trop tard. Une dague siffla en direction du visage du capitaine, dague qu'il évita in extremis grâce à ses réflexes améliorés par sa magie. Dague qui alla se ficher à l'arrière du mollet de Rid qui se tenait juste derrière. Le balourd lui était bien réel mais le petit malin qui l'accompagnait avait réussi à filer tout en laissant son filet d'illusion couvrir sa fuite pour prévenir les renforts.
"Oh putain, ils veulent jouer à ça ils vont pas être déçus eux." marmonna Yuduar dans sa barbe en faisant jouer ses jointures, le regard rivé sur les Aurochs qui gonflaient les rangs en face d'eux "Rid tu tient debout c'est bon? Vas falloir y retourner." puis le Capitaine se retourna de trois-quart pour beugler au reste des hommes "Compagnie en position! Que l'un de vous sonne le grand cor pour appeler d'autres patrouilles du coin, les petits gars ont décidés de jouer la manière forte!"
Décidément le rapport qu'il avait eu sur les Aurochs et les infos qui lui avait donné Norman ne mentaient pas: ces gars étaient de nouveaux joueurs en ville mais comptait bien récupérer du territoire sans se laisser marcher sur les pieds, quitte à faire des coups d'éclats. Foi de Al Rakija, ils allaient être reçus ces cons.
Néanmoins, il ne fallut pas chercher longtemps. Il semblerait qu’une fête un peu explosive allait se préparer alors que le capitaine s’empressait de menotter le malfrat qu’il avait entre les mains. Cependant, Yuduar et Rid furent tout deux surpris de la disparition du brigand comme s’il s’agissait d’un genre d’illusion. Quant au jeune borgne il n’eu pas le temps de prévoir comme son supérieur le projectile qui alla lui trancher le mollet du garde.
La douleur pouvait se sentir partout dans son corps, montant peu à peu jusqu’à la tête. Poussant un léger cri de douleurs, il se serra les dents avant de prendre la dague et la retirer de son mollet. Le sang y coulait et il fallait régler cela avant d’en perdre trop. Arrachant un bout de tissus sans la moindre peine du malfrat, il se dépêcha à se fait un bandage avant de sentir qu’il serrait très fort sans y faire attention.
Car oui, son pouvoir gagnait en puissance avec la douleur qu’il recevait et tout ses gestes pouvaient devenir plus dangereux que des armes. Il pouvait sentir l’adrénaline se mélanger avec son sang, parcourant son corps entier pour y renforcer ses capacités physiques. Ce qui est l’idéal vu la situation presque bagarreuse.
Alors que Yuduar et les autres se mettaient en ligne pour recevoir les malfrats et les affronter, Rid avait une tout autre idée pour commencer la partie. Pas besoin de ses armes, ses bras feront l’affaire et il avait une autre arme en main. Le balourd qu’il avait assommé avec son coup de tête. Il faudrait au moins trois hommes pour soulever ce gaillard, mais pour Rid et son pouvoir, c’était un jeu d’enfant. Bien sûr, la blessure au mollet n’aidera pas … Ou presque. Quand le jeune borgne souleva sans grande peine le corps du balourd, la blessure s’ouvrait légèrement un peu plus, mais rajoutait de la force dans les bras de Rid.
- Capitaine ! Garder la tête basse !
Il criât avant de prendre un peu d’élan en tournant les épaules, puis sans montrer le moindre problème, il projeta le balourd au-dessus de la tête de Yuduar et de ses collègues avant que le corps du balourd redescendît dans les airs et s’écrasa sur la petite bande compacte. Ce geste à dû en surprendre quelques-uns et Rid se mit à boiter légèrement pour se remettre du geste.
- Allez-y ! Je vous rejoins ! Laissez en moi un peu quand même !
Yuduar, au visage traversé par son sourire joueur, ajusta sa cape et laissa l'astre solaire frapper son insigne dorée de Capitaine. La promesse silencieuse que leur adversaire allait se démontrer plus retors que prévu. Dans les mêmes secondes, l'appel de Rid derrière lui happa son attention et sans même se retourner il décida de suivre la direction imposer par le soldat. Fléchissant sur ses jambes à la manière d'un coureur sur la ligne de départ, il eu tout juste le temps de voir la gigantesque ombre du précédent balourd entrain de voltiger au-dessus de lui, jusqu'à rejoindre ses camarades façon poids mort. Une formidable entrée en matière, là il reconnaissait le garde dont il avait entendu parler dans les couloirs et réunions! Pas loquace mais actif le p'tit gars! Il n'en fallu pas plus au Capitaine pour donner le coup d'envoi de ce règlement de compte urbain.
"C'est parti!"
Joignant le geste à la parole, il s'élança tel un félin ventre à terre en dégainant son épée courbe au fil de sa course. Le corps de leur camarade venait à peine de créer l'émoi de la surprise que le Capitaine faisait déjà face à son premier adversaire, les yeux comme deux soucoupes face à l'étonnement de voir un ami utilisé comme projectile. Yuduar tempêta à son contact et, d'une torsion de torse, amena le pommeau de son épée à frapper sans merci le visage étonné du malandrin qui se tenait en face de lui. Le cri de douleur mêlé au craquement de l'os du nez se fit entendre comme promis, si le malheureux tenait encore debout avec sa conscience après ça, il n'allait plus être très vaillant pour encore longtemps.
Les bandits se ruèrent de manière désordonnées autour du gradé, accueillis très rapidement par le reste de la patrouille organisée par Yuduar. Ce n'était pas des flèches de guerre mais ils savaient grincer des dents, ruer et rugir en assénant la justice à grand renfort de coups bien placés. Au final on ne leur en demandait pas plus. Ce n'était pas eux qui avaient décidés de régler ça par la force après tout.
Le mêlée fut ainsi lancée, à la fois désordonnée et sauvage mais au milieu de laquelle le sourire carnassier du Capitaine Al Rakija savait se faire briller. Les hommes de la Garde savaient que tuer ne faisait pas parti de leurs fonctions au-delà du risque majeur d'y laisser leur propre vie. Mais pommeaux, manches, coups contondants et autres manoeuvres avancées suffisaient à disloquer les bonnes articulations aux bons moments. Parfois sans grâce, parfois avec, souvent avec une efficacité redoutable. Yuduar projeta justement son second adversaire sur le Garde Bergen, en l'avertissant de la passe, pour voir le manche de la lance de ce dernier faucher violemment les jambes du malheureux Aurochs malmené. Ils allaient rentrer avec des bosses, pour sûr, mais la bière et la charcuterie n'en sera que plus bonne une fois qu'ils pourront en rire un sac de glace posé sur le front!
De plus que ça blessure allait le ralentir un peu, ce n’était pas une plaie qui allait aggraver ses compétences martiales, il faudrait bien plus que cela pour le mettre à terre. De plus que la douleur à sa blessure légère allait beaucoup l’aider à en mettre quelques-uns au sol sans qu’ils demandent leurs restes. De plus, Rid n’allait pas laisser le grand plaisir au garde de se battre sans lui contre la criminalité.
Un combat sans sa participation, c’était scandaleux pour lui, même s’il n’avait rien à avoir avec le combat, il devait se battre. C’était sa nature d’homme d’action qui parlait et qui lui ordonnait de se remettre de sa petite blessure et de reprendre le combat. Se reprenant de son lancer de poids contre l’adversaire, le jeune borgne se prépara à prendre la charge pour s’inviter à la mêlée et de refaire le portrait à certains jusqu’à ce qu’ils soient à terre.
Prenant un peu d’élan, sentant que sa cheville lui faisait encore un peu mal, mais cela ne l’arrêta absolument pas dans sa lancé. D’un pied à l’autre, il arriva de plus en plus près de ses camarades et adversaires, prêt à charger comme un taureau allant envoyer dans les airs un malheureux et il y avait le choix pour le dit malheureux. Il ne fallut pas longtemps pour que le borgne prenne pour cible un des malfrats et se prépare à envoyer son poing sous le menton.
Son poing s’élança à grande vitesse contre l’un des malfrats, les dents provoquaient un bruit strident comme elles se brisaient entre elle du au pouvoir du jeune garde. Il n’en fallut pas long pour que le coup de poing envoi le malfrat dans les airs et atterrir sur les tuiles d’un toit avant de glisser légèrement avant de retomber sur le sol. Après ce terrible coup de poing, le jeune garde craqua ses doigts avec un regard plein d’énergie.
- Allez ! Au suivant !
D'un geste ample visant l'estomac, pourtant bien protégé sous son armure, le rival de l'instant face à Yuduar semblait se sentir pousser des ailes. Le Capitaine se fendit sur la droite du pauvre homme pour lui attraper fermement une épaule puis, donnant de tout son élan, laissa son front percuter violemment le nez du malheureux. Et un deuxième naseau pour Al Rakija. Mais il ne comptais pas s'arrêter là! Sous le recul de la douleur de son adversaire, Yuduar pris ses distances, suffisament pour ajuster son prochain coup. Toujours armé de sa lame courbe, il laissa courir le trait d'acier jusqu'à la main armée du couteau pour la trancher net au niveau du poignet. Etait-ce vraiment nécessaire ou réglementaire? Probablement pas de la plus grande propreté mais après tout ce malotru venait d'attaquer un capitaine avec une arme blanche donc bon, quelque part il devait être dans son bon droit après tout.
"Jeux de mains, jeux de vilains!" lâcha t-il rigolard, laissant son regard faire un tour vite fait de l'état de ses troupes. La trempe qu'ils étaient entrain de leur mettre était quasi totale, les hommes de la garde bien mieux armés et préparés que ces gredins de bas-étages.
Tout en appelant l'attention de Rid, Yuduar décocha un furieux coup de pied à la croupe d'un adversaire qui lui tournait le dos. Déstabilisé, il alla s'échouer sur la dextre revancharde du Garde qui expédia une deuxième cible dans les airs de la Capitale. Il aimait bien son style à celui-là y'a pas a dire, il se faisait pas chier avec les détails! Un autre vint percuter le capitaine d'un coup de batte de bois, coup qu'il encaissa de justesse avec son brassard renforcé gauche. Décalé juste à côté de Rid qui continuait à faire parler ses poings, le gradé remarqua que ses troupes étaient scindées et, de fait, susceptible au débordement dut à leur désavantage numérique. Mais la mauvaise nouvelle ne s'arrêta pas là.
A quelques mètres plus loin dans la ruelle, un rugissement presque royal retentit de toute part contre les pavés. Suivi de très prêt par des cris d'une ardeur renouvelée. Puis se dessinant à l'arrière des Aurochs qui étaient entrain de collectionner les bleus, une silhouette massive s'avança dans la mêlée à grand renfort de puissants tournemains. Il s'agissait bel et bien d'homme, ou tout du moins ce devait être le cas à la base, mais ce dernier semblait être un hybride avec un Ours des Montagnes. Voir même un Grognours, vu la carrure. Et ça c'était vraiment pas une bonne nouvelle.
Parallèlement, d'autres cors sonnèrent dans le quartier où l'empoignade avait lieux, signalant que d'autres renforts de la garde étaient en chemin. Ils n'allaient plus en avoir pour longtemps avant de créer un réel avantage mais... le but du jeux allait d'être de limiter la casse en évitant que ses hommes rentrent avec des bras ou des jambes cassées d'ici là. Voir des vies perdues.
Heureusement qu’il y avait les collègues et le chef qui se firent un grand plaisir à jeter leurs malfrats sur Rid pour que le borgne puisse les mettre KO d’es le premier coup de poing qu’il donnait aux bandits. Cela aurait pu continuer un petit moment, mais il faut croire que les malfrats n’allaient pas se laisser marcher dessus en ramenant du renfort, pile au moment ou la garde commençait à arriver en plus grand nombre au son d’un cor bien familier pour les gardiens de la paix.
Cela aurait pu faire fuir la bande, ne voulant certainement pas se battre contre un régiment entier de la garde, mais c’est qu’il insistait de plus en plus comme pour protéger leurs territoires. C’est très souvent quand une bête est cernée qu’elle met encore plus d’énergie pour de se défendre. Mais ils semblaient bien vouloir poursuivre le combat qu’en plus qu’un gros gaillard semblait faire son approche.
Alors là, soit-il à pas prit de bain depuis un moment ou soit il a été élever chez les animaux sauvages pour rugir comme cela, mais là ça posait un problème pour la garde. Mais pour Rid, il en souriait de voir enfin quelque chose qui pourrait se tenir debout même après avoir reçus un coup de poing. Bien que la douleur fût encore présente dans sa blessure qui ne se calmait pas, boitant même un peu en revenant près de son chef, il pouvait sentir encore l’adrénaline monter en lui. Heureusement qu’il fut blésé, cela lui allait donner la force nécessaire de refaire le portrait du géant. Le garde se posa à coter de son chef, le sourire aux lèvres tout en craquant légèrement ses doigts tout en faisant gaffe de pas se les détruire avec sa nouvelle force.
- Je m’occupe de lui ! Ça les ralentira le temps que les autres arrives !
Dit-il avant de charger, mais il sentait bien que sa blessure allait l’énerver dans la charge. Se mordant un peu les lèvres, il tourna légèrement sa cheville, sentant la blessure devenant plus importante, mais encore supportable pour se tenir debout. Sautillant encore un peu avant de partir à l’attaque, il se mit à charger le géant.
Courant comme le vent, le jeune borgne ouvrit les bras tout en gardant la tête baiser et le choc fut terrible. Bien sur avec sa nouvelle force, il put sentir à son adversaire qu’il avait une force extraordinaire alors qu’il avait réussi à le faire reculer de quelque pas. Mais ce n’était pas avec ça qu’il fera chuter ton adversaire. Mais malgré la force qu’il donnait, sa cheville soufrait encore un peu plus, le rendant un peu plus fort à chaque seconde. Il se mordit la lèvre pour calmer la douleur et soudainement alla soulever le colosse qui ne devait pas s’attendre à ce que Rid en soit capable. D’une force extraordinaire, il souleva le malfrat pardessus son épaule et tomba au sol tout en plantant la tête du colosse en plein sur les pavés de la rue. Un énorme bruit de choc entre la pierre et un nez cassé pu se faire entendre. Une prise qui pouvait faire assez mal, en plus que les pavés en pierre n’ont pas été suffisant pour amortir la chute, mais les dégâts étaient là. Quant à Rid, se cheville c’est rouvert dû à l’effort surhumain, l’empêchant de se remettre debout pour se défendre.
"Maintenez le flux, bloquez les lignes et laissez passer Doroy!" beugla Yuduar à l'attention de sa troupe, ordre qui fut vite reçu par plusieurs cris d'accord.
Tel un buffle, le garde chargea à travers la foule en direction du colosse des Aurochs. Et le moins qu'on puisse dire c'est qu'il avait pas froid aux yeux le petit bonhomme. Tout en continuant à batailler, Yuduar paternaliste dans l'âme garda un oeil rivé sur l'action de son subordonné du jour qui se rua en lutte de poigne sur le métamorphe. Derrière, les gardes tenaient bon et donnèrent la part belle à l'action de leur confrère.
*Et bah merde alors.*
Voila ce que fut la pensée qui traversa l'esprit du Capitaine lorsqu'il vit l'imposante silhouette de l'hybride s'envoler dans les bras d'un Doroy remonté comme jamais, jusqu'a voir le tour retomber sauvagement contre le dallage de la ruelle où le combat avait lieu. Si les deux tenaient encore debout après une ouverture de la sorte, ça tenait franchement du miracle.
Mais contre toute attente, un nouveau rugissement émana de la foule et soudainement le corps d'un bandit vola pour s'éclater en sang contre un mur. Une nouvelle beigne du Garde peut-être? Il n'en fut rien. Le pauvre bougre qui venait de perdre la vie s'était juste penché pour, à la base, aider son compagnon qui venait de se faire lamentablement rétamer au sol par le jeune borgne. Mais piqué au vif dans son égo d'homme-animal, la bête n'as pas trouvé mieux que de gratifier son feu compagnon d'un violent revers qui eu l'effet de couper court à l'existence d'un bandit trop soucieux et poli.
Et Doroy là-dedans? Il ne semblait pas se relever sur le coup.
"Olin! Couvre moi j'avance!"
Joignant le geste à la parole, Yuduar laissa son flanc droit ouvert à la bonne garde du petit rouquin qui se tenait à côté de lui. Le bouclier du garde intercepta une dague vicieuse qui tenta de poinçonner l'aisselle du Capitaine tandis que ce dernier était déjà entrain de sauvagement jouer des coudes à grand renfort de bourrade pour se créer un chemin jusqu'à Rid. La garde de son épée écrasa une pommette, le métal durcit de ses épaulières percutèrent les côtelettes mal protégées des bougres qui lui faisaient face, déviant une lame en la faisant glisser le long de son épée courbe, il dégaina sa deuxième lame pour tailler sans merci la cuisse du malheureux sous lequel il se glissait avec vivacité. Transporté par son Ivresse, le Capitaine dansait au milieu des bandits en faisant jouer armures et épées au coeur d'une seule et même chorégraphie envoutante couvrant tout ses angles. Il ne lui fallut que quelque pas pour apercevoir au sol la silhouette du Garde tandis que l'Homme-Ours se relevait enfin de toute sa hauteur.
"Doroy!"
Yuduar lança un coup de pied bien placé en direction de la coupe du gaillard qui lui tournait le dos mais, fort de stature animale, l'ennemi ne trébucha même pas d'un pas en avant. A vrai dire ce fut même le contraire, Yuduar qui, opposé à son propre élan, dut reculer de deux pas pour récupérer ses appuis. Un homme en profita pour lui asséner un violent coup de matraque sur le bras gauche, heureusement amorti par l'armure du Capitaine. Se dégageant de ce mauvais pas après un coup de boule asséné sur l'arrête du nez de l'importun, il pus remarquer que l'Ours se tourna vers sa direction, surement pour se demander qui avait donc oser lui botter le train sans le moindre respect -ni le moindre effet, pour ce qu'il en est-. Il vit immédiatement le regard de la bête se porter sur l'insigne de capitaine qui trônait fièrement sur son poitrail et le sourire qui s'en suivit fut sans équivoque: l'Auroch se voyait déjà clamer la tête d'un Capitaine en cette fin de journée.
*Merde, merde, merde...*
On pouvait dire que ça ne sentait pas bon pour une arrivée en grande pompe. Mais suite à ces trois mots à la philosophie profonde, le naturelle de Yuduar revint à triple galop pour illuminer son faciès d'un sourire narquois. Un bon vieux défi comme il les aiment tant. Saisissant l'homme à qui il venait d'asséner un furtif coup de tête, il lança le malheureux sur son compagnon tout en fourrure. A coup sûr qu'il n'allait pas recommencer a... Ah bah si. Aussitôt dans ses pattes, l'homme-ours attrapa le pauvre homme pour l'envoyer valdinguer derrière lui, à la manière d'une vulgaire brindille. Aucun respect pour ses compagnons ce malotru, tout bonnement inacceptable. Mais ces quelques secondes gagnées suffirent au Capitaine pour retrouver ses appuis. Il allait devoit esquiver un petit moment avant de créer une ouverture digne d'attaque au milieu de cette cohue. A moins que Doroy ne se relève sous peu lui aussi et, à son humble avis, si c'est lui qui lui botte l'arrière-train l'effet n'allait pas être le même, foi de Al Rakija.
Néanmoins, son attention se porta sur son capitaine et non sur lui, alors qu’il était à terre. Rid aurait été une cible plus facile à finir, mais Yuduar était plus prestigieux pour les yeux d’un petit bandit de gang. Bien que Rid était tirer d’affaire pour le moment, il était toujours au sol. Pouvant se mouvoir encore assez, mais tenir debout reviendrait à se faire encore plus mal. Mais dans la douleur, le jeune borgne devient de plus en plus dangereux et se fut sans doute une erreur pour cet auroch to faire dos au garde pour faire face au capitaine.
Rid ne pouvait pas foncer ou même encore sauter sur le bandit des rues, mais il devait faire quelque chose, de plus que sa force physique ne faisait que grandir avec la douleur. Il aurait pu soulever à nouveau le bandit et cette fois sans problème, mais avec une cheville blesser, c’était impossible. Enfin, s’il ne pouvait pas utiliser une de ses jambes, il l’utilisera l’autre. Poussant un peu sur les bras, il se positionna vers l’arrière l’auroch et s’aligna avec de pousser un peu plus pour se glisser près des jambes. Une fois en position, le borgne leva sa jambe valide à une grande vitesse et sa chaussure vint frapper l’entre jambe du colosse.
Le choc fut terrible, surtout pour l’auroch. Ce dernier n’au sans doute pas eu le temps de sentir le pied venir lui détruire une partie de sa corp, il n’a sans doute du pas remarquer non plus que ses pieds avaient quitter le sol de quelque centimètre. Aucun homme, ne pourrait résister au coup le plus horrible qu’un homme pouvait recevoir. Il n’a fallu quelque seconde pour que les pieds de l’auroch retombent sur le sol, mais dû à la puissance du coup, il tomba rapidement à genoux. Il aura du mal à se remettre debout pour un bon bout de temps avant que … Qu’il tombe raide sur le sol. Un coup pareil, on se demande si on serait encore très conscient. Rid regarda le corps de l’auroch, lui-même assez surprit du résultat, car n’ayant pas mesurer la force qu’il à mit dans ce coup de pied.
Le jeune garde essaya de se relever un peu, mais dû à la douleur, se fut des efforts inutiles et retomba sur le sol avant qu’il regarde son capitaine.
- J’aurais besoin d’un brancard ! … Et quant à lui … Je pense qu’il faudrait trouver une charrette !
Plaisant à il légèrement, voulant montrer que tout allait bien.
Derrière eux les soldats gagnaient du terrain et bientôt Yuduar sentit une main amicale se poser sur son épaule, signe que les rangs se resserraient et que les gardes avaient gardés la main. Très vite les cors des renforts retentirent à tout juste un virage de leur position et la débandade fut complète.
"Préparez de quoi ramener Doroy à la maison!" s'exclama le Capitaine en tendant un bras vers le courageux garde pour le remettre sur pied, offrant son épaule en accolade pour un meilleur soutient. Une fois debout à ses côtés, il lui asséna une franche tape sur le torse avec un sourire en coin "Tu t'es bien battu mon gars, propre et efficace!"
Pendant qu'il aidait Rid à se relever d'aplomb, Olin et Bjergen étaient déjà entrain de s'organiser avec les renforts pour démultiplier les arrestations. Si plus d'un des malfrats avaient eu le temps de fuir la mêlée, beaucoup n'eurent pas cette chance et allaient être passés au crible dans des geôles d'interrogations, aux bons soins des brigades de renseignements. De là, les informations sur les Aurochs deviendraient plus précises, de quoi organiser une opération plus directe et ciblée. Au loin Yuduar reconnu le Lieutenant Lagertha qui s'occupait souvent de la sécurité des murailles de la Capitale, c'était donc elle qui avait organisé les renforts à leur encontre. Le gradé salua d'un geste de la main, amenant Rid vers un brancard de fortune déplié par deux médecins de terrain.
"Je vous laisse la suite Lagertha, je ramène mon unité à la Caserne pour dresser les rapports et donner du travail aux médecins. Je reviendrais vers vous pour les rapports d'interrogatoires ou au pire vous pourrez communiquer le tout au Lieutenant Calyx qui se fera une joie de déposer les dossiers sur mon bureau." puis se retournant vers les gars de son unité du jour "Messieurs, on libère le terrain pour aujourd'hui! Bjergen si vous voulez rester pour assurer le lien, que Lucy bénisse votre engagement. Les autres direction la Caserne pour la paperasse et le rafistolage." et d'un clin d'oeil clairement forcé et souligné d'un air malicieux sur le visage il rajouta "Les bières attendrons encore un moment!"
Dans sa phrase résonnait déjà la promesse d'une tournée qui sera payée à ses frais, à n'en point douter. Quelques cris de guerres et autres rires gras accueillirent son annonce, non sans un soupir blasé de la Lieutenant qui venait d'indirectement écopé du rangement et du retour de l'opération coup de poing improvisée du Capitaine Al Rakija. Il s'affaira ensuite à encadrer personnellement l'escorte qui allait ramener Rid à bon port, fendant la foule des curieux amassé devant la ruelle où avait eu lieu l'empoignade. Fidèle à sa réputation, ses méthodes et sa gestion laissaient à désirer mais... les résultats étaient là non?
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