Une simple cuve d'une mixture collante, mais surtout revigorante. Une voix douce et apaisante, refermant petit à petit mes blessures. Mon corps se souvient presque de chaque jour où mon cœur, brisé en deux se reconstitua. Mes oreilles se souvenaient de la douce mélodie que me chantait Daena à mon chevet pendant que son père, Dan s'occupait de moi. Ils étaient tout pour moi, vraiment tout. J'avais perdu ce qui m'était le plus cher, mais j'avais gagné ce qui me faisait survivre. Et pour moi, pour l'honneur d'Aaron, j'allais pouvoir poursuivre sa quête d'héroïsme, sa quête pour le bien en purifiant le monde des atrocités qui avaient eu raison de lui. Je me tenais droit face à la fenêtre, assis sur un tabouret pendant que celle qui m'avait sauvée des griffes de la mort se tenait debout, devant moi. L'horizon affichait un soleil radieux qui venait tout juste de se lever. Les oiseaux criaient de faim, les animaux des habitations s'éveillaient eux aussi. Tous les matins, c'était la même chose pour moi, du moins, en général. Dan vérifiait les résultats des soins qu'il m'avait apportés, voulant me préserver plutôt qu'autre chose et Daena me rendait visite, mais aujourd'hui était une journée différente.
C'était l'une des rares occasions où je me laissais approcher, c'était le jour où Daena avait le droit de me couper les cheveux. Ne voulant pas me laisser ressembler à une bête barbare, Daena avait décrétée qu'une ou deux fois dans l'année, je la laisse me couper les cheveux et... J'ai jamais eu mon mot à dire. C'était étrange, mais de sentir sa main si douce dans mes cheveux me satisfaisait autant que de voir un soleil se coucher. Je me sentais bien, en paix avec moi-même et avec le monde qui m'entourait. Je laissais faire mon amie, l'écoutant murmurer quelques mots de cette mélodie qu'elle me chantait souvent. J'avais l'air d'un vrai gosse avec elle, mais je n'avais pas le choix. C'était comme si mon corps refusait de combattre envers mes sentiments et mes besoins. Je fermais alors les yeux une minute, écoutant son doux chant, mais écoutant aussi les mésaventures de Dan qui avait tout un tas de dette. Je fronçais les sourcils, penchant la tête vers la porte de ma chambre qui n'était autre que la cave qui servait aussi de laboratoire.
"Ne bouge pas ! Tu ne veux tout de même pas avoir un trou dans la tête, si ?"
J'écarquillais les yeux, légèrement choqué des propos de Daena. Elle me souriait. Elle avait toujours l'air si pure, même quand elle se foutait de moi. Je ne réagissais pas ou peu, détournant la tête du problème, revenant à ce soleil qui éclairait maintenant mon visage légèrement sali par différents boulots de la veille. Heureusement pour moi, aujourd'hui, était un jour de repos. J'avais réussi a terminé de lourdes quêtes ces derniers temps, ce qui mettait pas mal de beurre dans nos épinards, au sens littéral... Malheureusement, ma journée n'allait pas être vraiment reposante. Une fois de plus, j'entendais du monde se disputer à l'entrée de notre maison. Mon calme me perdait et tout ça, à cause des impôts. Je me relevais, Daena légèrement paniquée, tentant de me garder encore un peu. Elle avait largement terminé de me couper les cheveux, ce n'était plus si important.
"Vous rigolez ?! Vous n'allez tout de même pas me prendre ces vieilleries ? Elles ne valent rien !"
Des gardes venant récolter les impôts venaient une fois de plus déranger notre vie à tous les trois. Ces armes ressemblaient à des sabres plutôt anciens. Ils étaient la mémoire matérialisée des grand-pères de Dan et donc de la famille de Daena. J'attrapais ma bourse dans laquelle j'avais soigneusement rangé les cristaux fraîchement gagné, leur tendant celle-ci sans un mot. C'étaient la plupart de mes économies, mais si je voulais sauvegarder la mémoire des ancêtres à Dan, j'étais prêt à tout. Il avait tout sacrifié lui aussi, c'était sans doute le minimum acceptable pour un homme d'honneur. Les gardes partirent, plutôt fier de se retrouver avec un du rab de cristaux. Ils balancèrent les sabres que Dan rattrapa sans difficulté... Néanmoins pas indemnes.
"Les abrutis... Ils ont cassé la garde de cette lame et la base de celle-ci. Ça va me coûter une fortune ! Bordel, mais ce royaume..."
Dan avait travaillé toute sa vie auprès des riches. Préparant la plupart du temps des inventions toutes plus dingues que les autres. Je me rappelais étant petit de le voir toujours accompagné de ses plans, de ses instruments. Moi et Aaron se moquions souvent de lui comme n'importe quel enfant ayant été élevé dans la magie. Néanmoins, avec le temps, Aaron tenait un discours respectable sur les inventeurs dans son genre. La technologie était l'avenir pour lui, bon ou mauvais, il nous fallait la technologie et preuve de ses miracles, elles pouvaient nous rendre la vie comme elles me l'avaient permises. Je baissais les yeux, enroulant les lames de Dan dans un sac en toile, tapotant légèrement ma main sur son épaule.
"Je vais les faire réparer, ce n'est que du métal et du cuir."
"Nous n'avons plus d'argent ! Z, tu dois encore te reposer..."
"Tu m'as réparé, alors que je ne suis fait que de chair et d'os."
Il affichait un sourire satisfait, bien que triste. Je ne pouvais pas faire mieux pour le moment et il fallait que j'enchaîne. Je devais me rendre chez le forgeron le plus proche. Si j'allais dans ma forge habituelle, le patron qui était un criminel me volerait sans doute à coup sûr les lames de Dan. Un connaisseur comme lui pouvait largement reconnaître ces épées de l'ancien temps. Je décidais de donner ma chance à une jeune forgeronne. Je n'avais jamais été la voir et je devais garder ma couverture de chasseur de primes. Ici pas d'écharpe rouge, pas de gant en métal doré, juste un être humain avec une épée géante et des sabres brisés. Le jour était à peine debout et les rues de la capitale étaient déjà pleines. C'était peut-être le jour de la Déesse pour la plupart des gens du royaume, il n'en restait pas un jour de travail pour tout un tas de monde. Des hommes gigantesques portant des tonneaux de bière d'une auberge à l'autre, des gamins défavorisés cherchant la victime parfaite pour attraper une pomme ou deux pour le petit-déjeuner et enfin, la forge que je cherchais.
Elle semblait presque vide, c'était sans doute une coïncidence ou peut-être que la Déesse existait vraiment, m'apportant la chance de ne pas avoir à côtoyer d'autres êtres humains. Je soupirais, prenant mon courage à deux mains pour négocier. Je ne savais pas vraiment à quoi m'attendre... On m'avait décrit le patron comme une jeune femme, mais c'était sans doute un leurre. J'imaginais bien plus un grand chauve baraqué façon gladiateur frapper de son énorme marteau différentes larmes pour aventurier. Je fermais les yeux, priant faussement une Déesse quelconque pour ne pas avoir à faire à quelqu'un d'ennuyant. J'ouvrais un œil, ne voyant personne à l'accueil. Je soupirais déposant le sac en toile avec les quatre sabres sur le comptoir, réajustant mon épée fermement fixée dans mon dos. Je frappais sur le bois du bar comme s'il s'agissait d'une porte, élevant légèrement la voix, prenant un papier sur lequel était marqué le nom du forgeron du coin. C'était pas trop le moment de se planter.
"Hey... Je cherche le forgeron... Laye ? Luye?"
Je déglutissais, prêt à faire des affaires. J'allais devoir utiliser tout mon charisme pour me sortir de cette merde. Autant dire que j'étais mal barré.
Jawilsia sur Never Utopia
Un bruit attira mon attention, la porte venait de s’ouvrir, il y avait même une voix. Un client, peut-être un truc sympa à faire. Je jetais par terre le fer que j’avais en main. J’étais plus à ça prêt hein. C’était déjà le bordel de toute façon. Je fis demi-tour, me prenant au passage une caisse et lâchant un juron. Enfin, je réussis à atteindre la porte menant à l’accueil. Le seul endroit à peu près propre de ma forge. Je souris boitant jusqu’au comptoir. Un jeune homme était là devant moi. Il avait pas l’air rassuré. J’avais les mains sales, les cheveux attachés tombant jusqu’en bas du dos, un vieux tee-shirt sale mit exprès pour l’occasion. Rien de bien présentable mais bon. J’étais pas connue pour ça. Lui non plus d’ailleurs n’avait pas l’air d’être en super forme. À la main, il tenait un bout de papier, et sur le comptoir, un sac de toile qui ne m’appartenait pas. Sans doute quelque chose à réparer.
- Salut, tu viens pour quoi ? Et de là par de qui ?
Je disais ça en pointant le bout de papier, la provenance était importante hein, car les aventuriers qui venaient ici avaient une réduction. Certains le savaient et en profiter bien. D’autre ne prenait même pas la peine de le signaler et passer à côté. Mais ça, c’était leur problème, moi ça me faisait des sous en plus. Et lui, peut-être était-il nouveau. Je n’en savais rien, et je n’aimais pas ça. C’est pas que ça a de l’importance pour moi tu vois. Mais j’aime tout savoir, c’est un principe important chez moi. Et je faisais ce qu’il fallait pour ça.
L'endroit sentait la poussière, le métal et l'odeur du Printemps. Tout était réuni pour obtenir un endroit sain de tout ce qu'il y avait de mal en ville. Les bagarres dans la rue, la misère ou même les dangers que le royaume cachait à coup de légendes et contes pour enfants. J'observais les lieux, remarquant différentes boîtes de matériaux légèrement rangé, du moins un peu plus que derrière le comptoir de la forge. C'est ici que je l'ai rencontré pour la première fois, elle n'avait pas l'air spécialement commode, pas l'air spécialement appliquée sur la façon de se présenter et portait un tee-shirt usé par le temps. J'avais même remarqué une petite tache sur sa joue. C'était bel et bien le forgeron. Je soupirais, espérant pouvoir extorquer une réparation gratuite à un petit vieux. D'un autre côté, elle était bien loin de l'image du grand forgeron chauve aux multiples cicatrices.
- Salut, tu viens pour quoi ? Et de là par de qui ?
J'essayais de ne pas me démonter, gardant mon sang-froid. Clairement, elle n'avait pas le talent pour fidéliser sa clientèle avec un tel ton. Je déroulais délicatement le sac en toile, dévoilant quatre sabres. L'un d'eux était brisé, la lame d'un côté, la garde de l'autre et le manche semblait lui aussi avoir pris un coup. Un autre ne brillait plus, sans doute émoussé, les autres dans un état semblable. Plus je regardais ces armes, moins j'imaginais l'endroit d'où elles pouvaient provenir. Ayant vécu la plupart de ma vie auprès de chevalier au bouclier épais et à la lame effilé, j'avais du mal à accepter ses lames comme dangereuses, mais Dan y tenait tellement. Je plissais les yeux, les négociations allaient commencer.
"Je ne suis qu'un citoyen. Je n'habite pas vraiment loin d'ici. Dan Ler Saban est un vieil homme ayant travaillé toute sa vie pour le royaume tout entier. Je viens vous apporter ces lames. J'aimerais qu'elles soient réparés, de nouveau apte à être utilisées."
Mon regard fuyant se concentrait cette fois-ci sur la jeune forgeronne. Je devais la convaincre de me faire réparer ces antiquités et clairement, ça n'allait pas être un jeu d'enfant.
"En revanche... Il ne peut pas payer la commande, je viens donc demander l'aide d'une jeune forgeronne ayant certainement encore ses preuves à faire dans ce monde d'hommes. Je viens vous donner cette opportunité, Ler Saban pourra par la suite féliciter cette réussite publiquement, ce qui devrait ramener pas mal de clientèle dans votre forge..."
Je jetais un oeil futif à droite et à gauche, me rendant compte que l'atelier était relativement vide. J'enchaînais.
"...Du moins un peu plus de clientèle qu'à présent. On m'a confié que vous étiez l'une des meilleures du royaume, néanmoins, je ne vois pas foule d'aventuriers."
Bon, c'était clairement raté pour donner une bonne impression. Je déglutissais, presque nerveux. Il me fallait vraiment ces épées réparées. J'ajustais par habitude l'épée gigantesque que je portais dans mon dos, espérant qu'elle me porte chance, comme jusqu'ici.
Jawilsia sur Never Utopia
- Tu peux dégager.
Je me redressais de toute ma hauteur, la voix glaciale.
- Ici, on ne prend pas les gens de haut, si tu es là pour critiquer, sache que j’ai c’qui me faut et les clients qu’il me faut. Je travaillerais pas gratuitement, donc la prochaine fois, si y’a une prochaine fois, amène quelque chose.
Je pointais du doigt la porte lui indiquant la sortie.
- Et tu peux dire à ton sir machin truc, que j’ai déjà fait mes preuves et de loin.
Froide, direct, c’est ce que j’étais. Et encore, j’avais retenu les insultes ce qui était rare. J’étais de plutôt bonne humeur aujourd’hui à la base hein. Faut pas croire. Mais là, s’en était trop, si je commencer à accepter ce genre de demande, ça n’en finirait plus. Encore, quelqu’un qui est vraiment en dèche. Je l’aurais peut-être aidé. Mais même pas sûr. Alors un sir machin truc qui n’a prétendument pas les moyens de payer une pauvre réparation pouvait bien aller se faire foutre. Surtout pour réparer un truc pareil. Jolie ok, utile, pas si sûr.
- Tu peux dégager.
J'écarquillais les yeux, presque frappé par la dure nouvelle. Visiblement, je n'avais pas été aussi convainquant que possible. Je soupirais, posant mes pupilles sur le métal brisé.
- Ici, on ne prend pas les gens de haut, si tu es là pour critiquer, sache que j’ai c’qui me faut et les clients qu’il me faut. Je travaillerais pas gratuitement, donc la prochaine fois, si y’a une prochaine fois, amène quelque chose.
Le monde n'avait été que très rarement aussi amère pour moi. Dan avait passé sa vie à sauver la vie de tas de gens grâce à ses expériences. Pauvres, riches, boulangers ou même forgerons... Sa vie n'était pas si bonne et elles n'en valait presque pas la peine, pourtant, je me tenais là, bouclier face à son malheur. Il fallait que cette femme répare ces épées. Je n'avais pas les moyens pour elle et encore moins pour les autres forgerons de la ville. Je serrais les dents, sentant qu'elle m'invitait à sortir de son atelier. J'attrapais les restes des épées, cherchant déjà une raison de ne pas péter un plomb. J'en avais marre de ce royaume, de ces gens. À chaque fois que Daena enseignait aux enfants, elle ne recevait jamais de remerciements. À chaque fois que mon épée transperçait le corps d'un de ses monstres aux abords du village, je ne recevais pas de remerciements. À chaque fois que Dan inventait une nouvelle chose farfelue pour faciliter la vie aux habitants, il ne recevait jamais de remerciements... Tout ça devait changer.
Prêt à partir, je défaisais finalement mon sac, bien plus vigoureusement que la fois précédente, prêt à élever la voix. Je posais mon regard sur la forgeronne, presque furieux. Ça n'allait pas se passer comme ça.
"Vous doutez de mes valeurs, soit, à votre place, j'en ferais sans doute autant. Vous voulez priver un homme de faire retrouver le sourire aux plus démunis, là ça me dérange déjà plus. Vous allez réparer ses armes."
Je cherchais dans ma poche, trois pauvres cristaux ayant à une valeur bien mince pour reforger quatre lames. Je soupirais en détachant péniblement l'épée que je portais dans mon dos, ramenant la garde vers mon visage, la lame vers le bas. Cette épée était tout depuis toujours. Elle était la lame traversant les ténèbres pour mon frère, elle était tout ce que je pouvais représenter aujourd'hui. Elle était l'héroïne et moi, simplement son serviteur. Il me fallait ces lames coûte que coûte. Je fermais les yeux, posant mes lèvres sur la garde, pensant fort à l'erreur que j'allais sans doute faire. Je déposais finalement mon épée contre le comptoir, l'air presque vide et touché me venant naturellement.
"Je vous laisse celle-ci qui est une épée de combat qui a une certaine valeur. Elle appartenait à un guerrier de la garde, donc une fois ramenée à cette fameuse garde, vous pourrez en tirer un prix dépassant largement le prix de la refonte totale des quatre épées. Je vous la laisse. Dans moins d'un mois, je reviendrais la chercher avec son mentant exact."
Je détachais ma main du manche, prêt à faire se sacrifice qui me coûtait vraiment cher. Dan avait le droit d'être heureux, du moins être moins malheureux et je comptais y mettre du mien. Peu importe s'il me fallait affronter des hordes de monstre sans cette épée pour la racheter, peu importe le nombre de nobles abominablement insupportables qu'il allait falloir escorter, j'allais récupérer cette épée.
"Ne la revendez pas avant un mois et je vous donnerais bien plus que ce que je vous dois à présent. Je vous en prie."
Je tentais alors de soutenir un regard fier et fort, mais je me sentais déjà affaiblie par cette lourde décision que je venais de prendre.
Jawilsia sur Never Utopia
Sa demande était valable. Oui, avec une épée pareille, j’avais largement de quoi rembourser le travail que je devrais fournir. Un travail si simple. Mais, un homme qui se sépare de son épée…. C’est jamais bon signe. Loin de là. J’attrapais l’épée, la passant au-dessus du comptoir. Une bonne épée bien équilibrée. Cependant sur la lame, on pouvait constater quelques petits crans. Dangereux. Oui, en général, cela montrait la fatigue d’une lame. Ils étaient encore presque invisible mais, c’était suffisant. La posant à plat sur le comptoir, je poser mon ponce et mon index de part et d’autre du tranchant. Je me concentrais légèrement et le métal se modifia légèrement. Je remontais le long de la lame, de la garde à la pointe affutant d’un geste l’épée, rééquilibrant le métal pour solidifier la lame. Ce fut rapide, une trentaine de seconde maximum. D’un geste, j’attrapais la garde, levé l’épée et l’abattit sur un morceau de bois traînant par terre. Il se coupa en deux net. Parfait. Lentement, je reposais l’épée du côté du jeune homme.
- Bien, je vais écouter ce que tu as à me dire. Surtout, comment compte tu gagner l’argent nécessaire pour payer cette épée.
Je souris légèrement.
- Un homme de lame qui s’en sépare… À ta dégaine, tu ne fais pas partie de la garde donc comment tu vas faire ?
Je joignis mes mains.
- Sache que moi aussi j’ai mes contacts, et je finirais par savoir si tu me mens ou pas.
La jeune forgeronne semblait plutôt intéressée de la situation. Elle attrapa mon épée et littéralement de ses mains, elle l'honora d'une seconde vie. C'était comme de voir une déesse de la forge transformer un bout de métal en une lourde lame. J'étais surpris. Je la prenais une simple pyromane, mais au lieu de ça, elle travaillait elle-même le métal à la force de son esprit. Après avoir réglé son compte à une pauvre planche de bois, elle me souriait enfin. Elle devait être comblée de pouvoir poser la main sur cette épée qui sans le savoir, n'avait jamais été approchée par quelqu'un d'autre que moi en plusieurs mois. Je soupirais, appuyant mon pouce dans ma main nerveusement, malaxant doucement mon poignet.
- Un homme de lame qui s’en sépare… À ta dégaine, tu ne fais pas partie de la garde donc comment tu vas faire ?
Elle n'était pas la dernière des imbéciles. Elle me l'avait fait comprendre assez rapidement. Elle était si jeune pour une forgeronne, pourtant, je ne pouvais pas douter de ses "contacts". Je baissais la tête, passant mon regard sur son atelier, découvrant divers matériaux, mais si peu d'outils. Je plissais les yeux, passant mon regard à travers sa fenêtre observant la capitale se réveiller tout doucement, reprenant la parole.
"Sans doute en abattant le roi, la reine et leurs enfants en acceptant ce contrat à huit chiffres."
Je me retournais, un regard toujours aussi froid que précédemment. Je n'avais pas envie de donner mes plans à n'importe qui. Dan et Daena avaient besoin de cet argent et je ne pouvais pas être un poids de plus... Et je n'avais pas envie de tuer un concurrent quelconque dans mon domaine. Je fixais à présent les épées de Dan, toujours déballées sur le comptoir.
"Ou peut-être que je vais faire comme n'importe lequel de vos clients, escorter la moindre lady sur mon chemin, protéger n'importe quel banquier pour venir saisir des biens."
Je m'approchais du comptoir délicatement, continuant de fixer cette jeune femme.
"Je ne me sépare pas vraiment de cette épée, je reviendrais la chercher et vous n'avez pas à vous en faire pour vos cristaux, vous les aurez en temps et en heure. Au vu de vos talents avec le métal, j'imagine que vous n'êtes pas médium à la place, mais laissez moi vous rassurer, dans un mois, j'aurais cette épée et bien que vous ayez de nombreux contacts, je vous assuez aussi que je ne mens pas."
Je baissais la tête, passant mes doigts sur le plat d'un des sabres, la chaleur ambiante de la boutique commençant à devenir un peu pesante. Je reprenais la parole, essayant d'en apprendre plus sur la forgeronne. Je n'avais déjà pas envie de confier mon épée à qui que ce soit, mais encore moins à une inconnue dont je ne savais rien.
"Ce talent, vous l'avez depuis longtemps ? Il ne me semble pas vous avoir vu à la capitale, pourtant, j'y ai passé toute ma vie. Nouvelle dans le domaine ?"
Il me fallait sa version de son histoire avant de m'informer sur elle en secret, si jamais cette jolie jeune femme se transformait en garce infâme en refourguant mon épée à la garde sans que je puisse avoir mon mot à dire. Je me posais sur un tabouret en bois en face d'elle, prenant un air un peu plus détendu.
Jawilsia sur Never Utopia
- EVAAAAA AIDE MOI
Un homme grand et fort se tenait devant la porte, il entra à grand pas tenant un sac de toile dans la main. J’emballais les épées brisées de mon premier client les poussant vers celui-ci pour faire de la place et l’homme déposa tout, ouvrant le sac sur le comptoir.
- Jordan… La prochaine fois que tu rentres comme ça je te tue.
Il sourit faussement gêner, il savait que c’était pour déconner. Plus ou moins.
- Désolé, mais t’es la seule qui peut me sauver, je pars dans trois heures pour une mission, tu peux me la réparer ?
Il ouvrit le sac et fit tomber sur le comptoir une large épée, brisé en plusieurs morceaux. Je fronçais les sourcils.
- Ta foutu quoi encore ?
- On s’entraîner, je pense qu’elle était fragilisée depuis la dernière mission.
Je hochais la tête.
- T'a bien de la chance que ça arrive pendant un entraînement. Repasse dans deux heures ça sera fait.
Il sourit et sortie en promettant de la bière en plus du paiement. Parfait, ça c’est ce que j’aimais. Je me retournais vers mon premier client attrapant les morceaux d’épée au passage les faisant fondre dans mes mains. Oh bien sûr, ce n’était pas chaud, mais il fallait la refaire entièrement sinon elle garderait une fragilité. J’en fis une boule que je malaxais doucement. Tout bien re mélanger, faire en sorte que le carbone et l’acier soit correctement distribué. Je repris la parole.
- Désolé, il est un peu trop expressif. Bien, je suis pas vraiment nouvelle hein. Ça fait presque 4 ans que je fais ce métier. J’étais aventurière avant, mais j’ai dû prendre une retraite anticipée.
Je souris encore attrapant un lingot sous le comptoir. Tranquillement, j’en coupais une tranche avec mon doigt. La quantité manquante pour compléter l’épée. D’un geste, je l’ajoutais à la boule de métal actuel. C’était un peu lourd mais c’est pas comme si ça changeait de d’habitude.
- Bien, du coup, tu te doutes que prendre ton épée, ça m’fait chier vue que tu t’en sers pour vivre.
Ouais, je le tutoyais, et alors ? Tu vas faire quoi ? c’est pas comme si j’avais des titres, et lui non plus. J’suis qu’une rustre et parler joliment c’est pas pour moi, ou alors pas longtemps.
- Donc j’te propose un truc. Tu m’aide jusqu’à midi. Faut que je range l’atelier derrière je viens de recevoir une livraison et j’galère. En échange, je te reforge les épées avec les mêmes détails qu’auparavant mais de façon à ce qu’elle soit solide. T’en dis quoi ?
J’attendais sa réponse. En vrai, c’était pas chère payer, mais comme pour moi le travail n’était pas si conséquent, je n’avais pas besoin de beaucoup. Et puis c’est pas comme si je manquais d’argent pour vivre. Lentement, je posais la boule de métal sur le comptoir et commencer à refaire l’épée de Jordan. Celle-là, serait rapide à faire.
Les négociations avaient payé. Les épées de Dan étaient sauvées, il ne me manquait plus qu'à sauver la mienne. J'observais alors tranquillement débouler sans discrétion un client de la jeune femme. Je découvrais son prénom, mais surtout sa bonté. Elle n'avait pas été très douce dès le départ avec moi, mais à cette époque, qui pouvait se payer le luxe de l'être. Je me décalais, laissant le pauvre homme ainsi que son épée se présenter à la maîtresse des lieux. Je gardais néanmoins un œil sur les bouts de l'épée du malheureux, complètement brisée. Il donna la raison qui n'était qu'un simple entraînement, mais j'en doutais. D'un autre côté, ce n'était clairement pas mes affaires. Je préférais laisser s'en aller l'homme, observant cette balle de métal qu'obtenait Eva après un simple mouvement. Son pouvoir était stupéfiant.
- Désolé, il est un peu trop expressif. Bien, je suis pas vraiment nouvelle hein. Ça fait presque 4 ans que je fais ce métier. J’étais aventurière avant, mais j’ai dû prendre une retraite anticipée.
J'hochais la tête, acquiesçant à ce qu'elle disait. Elle était plus ou moins comme moi, mais cette "retraite anticipée" avait piqué ma curiosité. Pour une fille avec ce genre de caractère, s'arrêterait ? Elle ne semblait pas le moins du monde à se laisser traîner dans la boue. Je voyais déjà Eva à l'époque comme une vraie meneuse d'hommes. Je fermais les yeux, m'appuyant de nouveau au comptoir, dos à elle. Les gens se pressaient dehors, la journée avait bel et bien commencée.
- Donc j’te propose un truc. Tu m’aide jusqu’à midi. Faut que je range l’atelier derrière je viens de recevoir une livraison et j’galère. En échange, je te reforge les épées avec les mêmes détails qu’auparavant, mais de façon à ce qu’elle soit solide. T’en dis quoi ?
Maintenant que les présentations étaient plus ou moins faites, Eva me proposait à présent un deal plutôt intéressant, bien que cachant sans doute une arnaque. Lui faire réparer toutes ces lames pour une demie journée de boulot, c'était parfaitement insensé. J'ouvrais un œil, tournant la tête vers elle, n'hésitant que très légèrement avant de passer derrière le comptoir, me posant face à elle.
"Marché conclu."
J'ouvrais un œil, tournant la tête vers elle, n'hésitant que très légèrement avant de passer derrière le comptoir, me posant face à elle. C'était un bordel sans nom. Des lames à droites et à gauches, des gardes d'épée à réparer partout, des caisses de matériaux empilées les unes sur les autres. Je plissais les yeux, fronçant les sourcils.
"Ah... Elle était donc là l'arnaque."
Je souriais légèrement, craquant mes doigts, étirant mes bras avant de commencer ma tâche. Tout faire en une demie journée allait être tendu. Il me fallait bien une journée complète de boulot, mais au final, si ça n'avait pas été dans cet atelier, mes habitudes m'auraient fait passer cette journée dans des tavernes à la recherche d'un ou deux nouveaux contrats. L'argent était tout pour moi et pour ceux que je pouvais considérer comme ma véritable famille à présent. Et puis si je partais comme un voleur, n'aidant pas correctement Eva, Daena allait me le faire payer pendant encore toute une semaine. Réorganisant lentement, mais sûrement les caisses de matériaux, j'élevais la voix pour atteindre Eva, continuant de lui poser des questions histoire d'en savoir plus sur elle. Quitte à rester bloquer, je voulais des informations sur elle. Et puis comme ça, je n'aurais pas à enquêter sur elle pour savoir si je pouvais faire de sa forge, un plan B en cas de coup dur.
"Alors. Une jeune femme, seule depuis quatre ans à la capitale. Ex-aventurière avec un certains caractère. Tout ça m'explique peut-être pourquoi c'est un Enfer d'organisation. T'es sûre de toujours t'y retrouver ici ?"
J'envoyais une simple pique. C'était ce que je faisais de mieux dans le social. En espérant que mon interlocuteur ait un minimum de sens de l'humour pour pouvoir discuter avec un être humain plus de cinq minutes. Il y avait de tout ici... De l'acier, de l'argent, même un peu d'or. Je m'occupais alors de trier, rien de bien passionnant à raconter de ce côté-là. Moi ce qui m'intéressait, c'était cette femme. Je comptais y aller doucement avant de creuser dans sa vie.
"Pourquoi ne pas embaucher un gosse de la rue ? La plupart ont besoin d'argent et tu ne sembles pas vraiment en manquer d'après la vue que j'ai sur ton matériel à l'arrière. Un apprenti pourrait te gérer au moins les stocks, te laissant garder la forge d'une main de fer, si je peux m'exprimer ainsi."
Tout ça me donnait déjà quelques indices sur la raison pour laquelle elle s'était arrêtée d'être aventurière. Je préférais garder mes théories pour plus tard, au lieu de dire une bêtise dès maintenant et perdre l'objectif que je m'étais fixé dans cette discussion.
Jawilsia sur Never Utopia
- J’ai jamais dit qu’il y avait rien à faire.
Je ris doucement refixant la lame de Jordan. L’épée été finie. Il n’y avait plus qu'à attendre son retour. En attendant, j’avais du travail. Les quatre lames du jeune homme. Oui, ça serais pas une mince à faire de les reproduire à l’exactitude. Je réunissais les morceaux reconstituant les lames alors qu’il commencer à parler. Il me fit rire, ouais c’était l’bordel, mais j’avais pas le temps de ranger moi. Avec tous ces gens qui me faisait bosser tout le temps…
- Ouais t’inquiètes, limite à force je retrouve mieux quand c’est le bordel.
Du bronze, vraiment, pire idée du monde. Fragile, stupide, limite des reliques mais alors pour le combat c’était pas ouf quand même. Je soupirais mémorisant les motifs à refaire avant de faire fondre la première lame. Il allait manquer un peu de bronze. Et pour ça, je devais aller dans le bordel. Je me levais donc pour fouiller à l’arrière. Boitant tranquillement entre les caisses pour récupérer ce que je cherchais. Un p’tit lingot de bronze. Un des rare que j’avais vu que j’en utiliser une fois tous les dix ans. Il parla encore. Une vraie pipelette. Je réfléchis quelques secondes à sa question avant de répondre.
- Oh, j’en ai déjà pris quelques-uns, l’souci, c’est que j’ai rien à leur apprendre en dehors d’la gestion. Du coup, j’les envoie vers d’autres forgerons assez rapidement.
Je repris la boule de bronze et en ajouter un peu du lingot que je possédais, la malaxant tranquillement, je commençais à lui faire prendre la forme de la lame, ce fut rapide, avec les détails, sans aucune fissure, mais je devais aussi refaire la garde.
- Elle valent quoi pour toi ces épées ? Pour que tu y tienne tant ?
Ouais, une question comme ça, moi aussi j’aime savoir des choses. Et je ne parlais pas d’argent. L’argent n’est rien pour les lames, mais des épées aussi vieilles ne pouvaient pas posséder une affection due au combat. Nostalgique, je regardais ma vieille épée accrochée au mur. La seule qui n’était pas à vendre ici. Me concentrant, je commençais à faire la garde en attendant sa réponse.
Trier, trier, trier encore, trier. Rien n'avait plus d'énervant pour moi que de ranger un lieu qui ne m'appartenait pas. Je m'arrangeais toujours pour avoir tout en ordre chez moi pour ne pas me retrouver face à ce genre de situation plus qu'ennuyante. Il fallait dire que toute ma vie, mon père nous formait pour accomplir nos rêves et l'un des miens était de suivre Aaron, devenir un aventurier et donc se contenter de peu d'affaires. J'avais gardé ce principe depuis mon arrivée chez Dan, traînant une simple épée partout. J'écoutais toujours attentivement Eva, répondant à ma question assez simplement pendant qu'elle bossait sur les épées. Après avoir répondu, elle semblait vouloir faire connaissance elle aussi.
- Elle valent quoi pour toi ces épées ? Pour que tu y tienne tant ?
J'haussais un sourcil, passant ma tête à travers la porte de l'accueil, deux lingots de fer dans les mains.
"Assez pour ne pas avoir envie d'annoncer à leur propriétaire qu'elles sont brisées à tout jamais."
Envoyant un regard insistant sur la jeune forgeronne, je réfléchissais à ma réponse, essayant de faire un effort à mon tour. Elle avait été sympathique avec moi et je devais au moins lui rendre.
"Disons que ces épées appartiennent à une personne à qui je dois tout. Il m'a sauvé la vie alors que c'était pas gagné. Depuis, je fais en sorte d'être à leur service. Néanmoins les quêtes ne rapportent que très peu de cristaux en ce moment. D'où ma présence ici, les poches vides."
Je retournais à mes affaires, toujours aussi attentif à ce qu'elle pouvait répondre, repensant tout même à notre situation financière. Il fallait dire que depuis une petite semaine, mon boulot n'était plus aussi arrangeant que d'habitude. J'escortais, je chassais et tout ça pour une poignée de cristaux et plus comme une bourse bien remplie. Le monde commençait doucement à devenir de plus en plus sauf pour les plus riches d'entres nous. La ville devait faire quelque chose, mais comme dans chaque gouvernement, les aides n'étaient que des façades pour rassurer et anesthésier les bêtes que nous étions. Je soulevais deux casses pleines de lingots, passant derrière le comptoir, près d'Eva pour poser derrière elle les fameuses caisses.
"Le fer est sans doute l'une des matières qu'on te demande le plus, tu devrais les poser ici. Tu gagneras en confort et tu doubleras sans doute ta vitesse de travail, donc tes profits. Et tu gagneras aussi en oxygène accessoirement."
Je toussais légèrement, la poussière de la réserve devenant vraiment étouffante. Eva n'avait pas l'air si fatiguée que ça. Son don était si puissant, sans doute même bien plus que le mien. D'autres clients rentraient. Pour ne pas attirer l'attention sur moi et pour éviter que l'un d'eux me reconnaissent en tant que chasseur de primes, je retournais dans la réserve, essayant de ne pas toucher à la jeune femme. J'avais pas envie d'être transformé en épée orientale. J'attendais qu'elle termine avec ceux-ci, apportant encore une autre caisse d'une matière différente, retournant auprès d'elle pour l'installer, jetant un coup d'œil à son travail. Elle semblait si douée pour créer. Restant sans en avoir conscience, les yeux rivés derrière elle sur les lames, je me réveillais l'esprit grâce à une délicieuse odeur de crêpes au caramel dans le quartier. Je priais à présent pour que mon ventre ne grogne pas, l'odeur envahissant littéralement le quartier. La matinée était si belle.
Jawilsia sur Never Utopia
- Ouais comme d’hab, on risque notre vie, mais comme il s’passe rien il baisse le prix. Le jour où y s’passera quelque chose, on aura rien de plus en retour.
Je soupirais en posant l’épée devant moi. Fini. Sur les trois autres, deux étaient en bon état, mais je décidais de retravailler les lames histoire de les renforcer. Pile au moment où il débarqua avec deux caisses de lingot de faire. Les plus utiles celon lui. Rater, le fer, je le faisais fondre avant, pour créer de l’acier. Beaucoup plus utile. Mais bon, je le laissais faire, ce fut sa remarque sur l’oxygène. Putain oui, y faisait chaud. Surtout à l’arrière. Je me levais.
- Merci pour le fer, attends. Dois y’avoir une fenêtre derrière normalement.
Ouais, je l’ouvrais jamais et alors. Je suis habitué moi. Je boitais jusqu’à l’arrière avant de commencer à déplacer la pile de caisses contre le mur de gauche, essayant de ranger en même temps. Peu à peu, une fenêtre se découvrit. J’enlevais une dernière caisse avant de la pousser. Rouillé, jamais utilisé, elle grinça et je dus forcer pour l’ouvrir dégageant un léger souffle d’air. Je souris satisfaite.
- Voilà, ça devrais être mieux là.
Je retournais tranquillement à l’avant pour m’occuper des clients. Rapidement. J’avais déjà du travail ils devraient donc patienter. Comme partout d’ailleurs. Ils repartirent vite après avoir laissé leur matériel. Que de la réparation aujourd’hui. Rien de bien intéressant. Je repensais au jeune homme qui travaillait derrière moi. Visiblement, sa vie n’était qu’une galère. Et comme la mienne, elle allait mal finir. Ça finit toujours mal dans ce genre de cas. Terminant les deux lames, je lâchais.
- Si jamais un jour tu l’sens pas pour une mission, pour une raison quelconque, vient travailler ici. J’pourrais sans doute te dépanner un peu.
Ouais, j’pouvais pas faire plus. Mais bon, c’était déjà pas mal. Peut-être que lui n’aurait pas les mêmes problèmes que moi.
Je décelais de plus en plus une certaine douceur chez Eva. Au premier abord, j'avais pensé croiser la route d'une forgeronne au cœur de pierre envoyant valser n'importe quel inconnu, mais cette femme ressemblait de plus en plus à Daena. Daena en version bien plus brusque... Je l'observais du coin de l'œil, la regardant faire, ouvrant la fenêtre pour faire respirer son atelier et clairement, il en avait besoin. La poussière se faisait repousser par l'air de la fenêtre, directement vers l'entrée de la boutique. Je m'apercevais néanmoins de quelque chose d'assez curieux. Eva boitait d'une jambe, ce qui une fois de plus, attisait ma curiosité. Je détournais la tête, recommençant à travailler à l'arrière-boutique quand elle reprit la parole, m'achevant de mystères.
- Si jamais un jour tu l’sens pas pour une mission, pour une raison quelconque, vient travailler ici. J’pourrais sans doute te dépanner un peu.
Par-dessus une offre, j'y voyais presque une leçon de vie. Clairement, elle semblait plus sage que moi et j'avais peut-être à apprendre de cette jeune femme. Je décidais de ramener une fois de plus une caisse de matériaux en tout genre, le posant sur le comptoire, m'assurant qu'aucun client pouvant me reconnaitre allait débarquer dans la boutique. Presque amusé, je lui adressais un léger sourire.
"Oh, donc c'est comme ça que tu me vois ? Comme quelqu'un qui recule devant son devoir ?"
Je passais ma main dans mes cheveux, baissant la tête, mon regard, cette fois-ci dirigé vers ses jambes. Je poussais alors ma curiosité peut-être trop loin, reprenant la parole avec une voix bien plus posée.
"C'est ça qui t'es arrivé ? Une mauvaise mission ?"
Je croisais les bras, attendant son récit. Si elle avait quelque chose à m'apprendre, c'était sans doute à cet instant précis. Bien sûr, à l'époque, j'étais au courant des dangers de mon métier, surtout quand je prenais des contrats de prime. Le monde semblait si beau du point de vue du royaume. Le gouvernement n'était pas parfait, mais faisait de son mieux, le taux de criminalité n'était pas si élevé et le boulot ne manquait pas ou peu. Mon regard revenait à son visage, essayant d'y trouver une émotion quelconque, peut-être de gêne ou en tout cas, quoi que ce soit m'indiquant que j'allais trop loin cette fois-ci.
Jawilsia sur Never Utopia
- C’est pas une question de devoir. T’es pas garde. Donc c’est à toi de choisir ce que tu fais ou pas.
Je soupirais et le regarder dans les yeux, il avait les bras croisés attendant la suite.
- C’est bien une mission qui a mal tourner. Un trajet normal et cours. Mais ont été un peu fatigué. Ça aurais du bien se passer. Ça a pas été le cas. On a eu un mort et moi je suis handicapé à vie. Va pas gâcher ta vie pour de l’argent. Et celle des autres. SI tu crève, ça touchera forcément quelqu’un qui devra vivre avec. Et souvent, sans même pouvoir t’enterrer.
Oui, nous on avait pu le faire, mais ce n’est pas le cas de tout le monde. Loin de là. Je retournais à mon travail. Je terminais d’une voix douce.
- Donc si jamais, ne tente rien d’impossible, y’a toujours une autre solution.
Oui, la mort n’en est pas une loin de là. Je me re concentrais sur l’épée terminant la lame puis attaquant la garde, j’aurais bientôt fini. Du moins, je l’espérais.