Tes nuits de sommeil pouvaient même parfois se montrer dangereuses, lorsque les terreurs nocturnes étaient de la partie. Tu gesticulais, tu bougeais bien trop jusqu’à heurter tes membres contre le mur et te provoquer maintes blessures involontaires qui venaient faire bien mal le matin venu. Blessures que tu encaissais. Tu ne pouvais pas vraiment faire autrement, après tout. Tu dormais. Comment pouvais-tu gérer ce qui se passait quand ton esprit était enfoncé dans le sommeil, et quand les cauchemars et terreurs nocturnes venaient perturber ce fameux sommeil ? Enfin… contentes-toi d’être présentement réveillée. Et ne pas penser à ce qui aurait pu se passer pendant cette longue nuit où ce n’était pas le cas.
Il fallait respirer profondément et se lever de ce lit qui était le seul endroit où tu pouvais encore ressentir un minimum de sécurité. Comme les bras de ta sœur qui te berçaient quand tu étais plus jeune. Ce temps-là te manquait, tu voulais le retrouver, la retrouver, mais tu savais que plus jamais tu ne retrouverais ce moment que ta faiblesse était venue foutre en l’air. Tu étais faible. Tu l’avais reconnu au bout d’un moment, tant de temps passé à te voiler la face et penser que ce n’était qu’un optimiste trop plein, mais ce n’était rien de plus qu’une faiblesse qui avait foutu en l’air la vie de ta sœur. Qui avait poussé tes parents à l’envoyer si loin de toi. Une faiblesse que tu détestais, que tu regrettais, mais que tu ne pouvais pas changer. C’était le point central de ta personne, n’est-ce pas ? Bien trop faible pour seulement exister. Mais tu respirais. Tu existais.
Tu avais fini par te lever et te préparer pour aller travailler, brosser tes longs cheveux et les laisser tomber en cascade sur tes épaules, masquer les longues oreilles caractéristiques de ta famille, ces oreilles qui frémissaient si souvent quand l’angoisse prenait le dessus. Bien trop souvent, à bien y penser. Tu vivais dans l’angoisse, dans la peur, dans l’ombre. La lumière semblait être un terrain interdit que tu ne pouvais même pas explorer. Enfin. Tu secouas la tête en te disant que tu devais te dépêcher pour ne pas être en retard. Tu ne l’étais jamais, en retard, bien au contraire, toujours bien trop à l’heure tellement que ce n’était même plus de l’avance. Seulement, tu ne pouvais pas t’empêcher de craindre de ne pas être à temps. Ainsi, tu enfilas rapidement une légère veste avant de fermer à clé la porte de ce petit loft. Il n’était pas super, ce n’était pas la meilleure des qualités, mais c’était tout ce que tu pouvais te permettre d’avoir avec ton pauvre salaire. Tu ne te plaignais pas, c’était déjà bien de te retrouver dans la capitale. Là où elle se trouvait.
Tu avais pu la voir, l’apercevoir, en tant que dragon miniature, arborant ce bleu devant ses yeux, sans pour autant l’approcher, sans être en mesure de dépasser la culpabilité qui tuait ton cœur et ton âme, cette culpabilité qui demeurait, plombait ton moral et ton être. Pas à pas, tu t’étais rendue sur ton lieu de travail, où les bêtes t’attendaient. Elles t’avaient sauvé de ce mutisme. Tu ne pouvais pas expliquer comment, tu savais seulement que les côtoyer, les rassurer, les aider et les soigner, c’était ce qui t’avais permis de reprendre doucement la parole, de parler après plusieurs mois sans prononcer quoi que ce soit. Tu leur avais murmuré quelques mots apaisants et puis des phrases, tu avais été là pour les bêtes avant et après opérations. Seulement pour qu’elles ne soient point seules. Même si tu n’avais pas besoin de parler pour les comprendre.
Tu flattais le dessus de la tête d’un dragon de cerisier qui se réveillait doucement. Il avait été très malade et le cabinet médical dans lequel tu te trouvais. Un léger soupir s’éteignit sur tes lèvres alors que tu t’occupais de ce petit être qui se réveillait d’une anesthésie générale suite à petite opération pour le remettre sur pied. Ton rôle était de le calmer, de le rassurer et tu excellais dans ce rôle. Lorsqu’il se rendormit, tu décidas d’aller te promener légèrement. Ça faisait un bon moment que tu étais en train de t’affairer à tes tâches habituelles dans ce cabinet, tu pouvais bien prendre un moment de pause, non ? Un moment pour te promener, pour respirer. Enfin, ça, c’était sans prévoir ce groupe de jeunes adolescents qui semblaient trouver bien amusant l’idée de bousculer une jeune femme dans la rue. Tu te retrouvas donc entourer de quatre jeunes bien plus forts que toi, et ton cœur s’était mis à battre la chamade. Si rapidement, la respiration également si haletante. Tu finis rapidement par te retrouver volant dans les airs, tournant quelques fois autour d’eux avant de t’en aller te percher dans les branches basses d’un arbre plus loin. La vie était dangereuse et épuisante. Une larme roula sur la joue de ce petit dragon que tu étais.
Tu t’étais endormis dans cette ruelle, avant qu’elle ne devienne bruyante. Il faut dire que manger t’assoupissais toujours. Comme si c’était la seul chose qui te faisais t’assoupir. Je te rappelle que t’es narcoleptique mon garçon… Enfin, tu le sais depuis le temps, tu as même finit par intégrer ta maladie comme une partie de toi. En même temps, avec la découverte et la compréhension de ton pouvoir tu ne pouvais plus nier que ces moments d’errance onirique et astral faisait partie de toi. Tu t’étais éclipsé pendant des mois dans la forêt, tu avais quitté la garde, tu avais tout plaquer pour fuir ton passé et avancer. Au final la Tour magique qui t’avais transformé au point que personne ne te reconnaisse avait été un grand bénéfice, un pivot incontournable qui t’as permis de sortir de ton carcan de ressentiment. C’est l’évènement qui a libéré tes épaules d’un lourd fardeau, qui a ouvert tes yeux sur une perspective nouvelle, qui t’as fait changer de visage, au sens propre comme au figuré du coup ! Pourtant ce choix que tu avais fait, tu venais à le regretter parfois quand tu revenais à la capitale et que sous la forme d’un petit animal spectral, tu épiais Balor et Yunaelle.
La noble avait elle fait le choix de se présenter à sa famille avec cette apparence nouvelle, nombres de rumeurs la fustigèrent d’imposteur cherchant à s’accaparer le statut et la richesse de la jeune Aldrah porté disparus dans la tour en ruines. Toi tu n’étais personne, vraiment qu’un grain de sable dans la botte du monde. Alors tu avais fais ce choix de vaquer à une nouvelle vie. Tu avais quitté ce cocon malsain qui t’empêchais de grandir. Cette caserne pleine d’imbéciles et de prétentieux. Pourtant tu te rappelais encore de l’émotion que tu avais ressenti cette nuit-là en quittant la chambre qui t’avais accueilli et offert une sœur de cœur. Tu te rappelles quand tu l’avais croisé en sortant. Le visage taquin d’Aube voyant sortir un homme et une femme de sa chambre, ce sourire ampli de nostalgie que tu lui avais adressé. Et ses quelques murmures glissé à son oreilles alors que tu glissais dans ses mains un bracelet en cuir.
-Adieu la renarde, on se reverra ! Je t’ai tout rendu tu pourra pas me traiter de voleur !
Puis tiré par Yunaelle tu la suivait, quittant ce couloir que tu haïssais de tout cœur en murmurant à la demoiselle :
-C’est Aube ma seule amie ici … C’est une commère et je suis sûr qu’elle a souillé mon lit plus d’une fois… Mais elle est comme ma sœur !
Un dernier regard en arrière de la part du duo puis le rêve tourna au ténèbres avant que mes yeux ne s’ouvrent sur une ruelle de la Capitale. Je commençais à la connaitre maintenant, je l’avais arpenté tant de fois lors de patrouilles. Tu étais perché là, sur une branche d’un arbre, branlant dangereusement. Et à peine réveillé que voilà qu’on te caillassait. Des gamins débiles qui pensait s’amuser cruellement avec un pigeon ? Ils devaient être bien déçut de voir leurs efforts vains et ses pierres me traverser de part en part. Pourtant des petits couinement me parvinrent. Était-ce moi ? Non je ne souffrais pas, alors qui ? C’est seulement en entendant l’un des bourreaux s’étonner de ma présence que ma confusion se mua en curiosité et je me retournais vers un petit dragon miniature placé derrière moi, triste cible de cet assaut ignoble. Le petit dragon couinait et eux ils rigolaient, ils rigolaient. C’était clairement des monstres. Tout ceux qui s’en prennent à plus faibles qu’eux le sont. Ils étaient exactement comme ces relique du passé que tu avais fui. Exactement comme ceux la même que tu exècres au plus haut point. Et ce qui est drôle, c’est que tu n’est plus aussi passif et frustré que le gamin que tu étais encore quelques mois auparavant. Ce qui est drôle c’est que tu es un homme maintenant tu as grandi, tu as muri ! Ton corps inanimé se lève alors que le petit dragon de cerisier que tu es laisse sont sourire spectrale s’agrandir. Un son de damné vrille les tympans des délinquants qui se tournent vers ton corps inanimé mais debout face à eux. Le son du métal frottant l’air vint glacé le sang des trois garnements et l’instant d’après la lance du somnambule que tu es vint se ficher à la base de la branche sur laquelle tu es posé avec le petit dragon. Un seul signe, vint terminer d’effrayer les gamins qui surement allèrent pleurer auprès de la garde, une menace silencieuse mais compréhensible. Deux geste pour affirmer que le dragon étai ta proie, un autre pour les menacer de mort. Ce que tu ne comptais pas faire évidemment. Mais bon ta petite démonstration de force à suffit à les faire fuir et tant mieux tu étais trop fatigué pour te battre !
-Suis moi petit dragon on doit partir !
Et tu sautes, en toi-même en fait… C’est un peu deep ! Puis rangeant ta lance tu réceptionnes le dragon miniature et le petit dans tes bras tu te mets à courir vers un lieux que tu sais calme, et où tu pourras apporter quelques soin à la créature.