Une petite missive discrète posée sur mon bureau de l'Académie. Une simple invitation à venir boire un thé au palais… Difficile de refuser une telle invitation même si je ne sais pas qui me fait mander. Peut-être sa majesté Allys pour discuter de la protection rapprochée de Hel Gher, son ancêtre. Je ne vois pas vraiment de raison autre pour une telle invitation. Difficile d'imaginer que le roi soit à l'origine d'une invitation à boire le thé… Non, je ne vois que sa majesté Allys pour émettre une telle invitation à mon encontre. Je me souviens encore parfaitement de notre discussion a coeur ouvert et surtout de son cadeau. Une montre que j'ai toujours sur moi rappel des mots rassurants de ma Reine.
Me rendre au palais en début d'après-midi est un peu compliqué. Mon ventre toujours plus rond et l'inconfort qui en découle me compliquent la tâche mais la joie de me retrouver à nouveau en tête à tête ma Reine me porte jusqu'au palais accompagné par ma fidèle chiraki. La missive au cachet royal suffit à me permettre de passer le poste de garde. Je hausse un sourcil en retrouvant mes camarades de la Garde Royale en armure complète avant de rire avec eux. Le nouveau Capitaine est un grand passionné de boîte de conserve visiblement. J'espère qu'il a pensé à celles et ceux qui n'ont pas la force nécessaire pour porter de telles armures. Me guidant sans difficulté vers la salle du trône où je pense pouvoir trouver ma reine, on me redirige vers un autre endroit du palais.
Geki sur les talons, j'arrive au lieu dit essoufflée et endoloris par cette marche jusqu'au et à travers le palais.Je m'immobilise devant la porte, une main sur le ventre et la seconde dans le dos. Geki frotte sa tête contre moi pour me réconforter.
Ça va ma belle.
Je toque à la porte avant d'ouvrir lorsque l'on m'y autorise. Raide comme un poteau et peu gracieuse, je m'essaye à une courbette pour saluer sa majesté.
Vous m'avez fait mander ma Reine ?
Je me redresse sans prendre soin de prendre une posture militaire. Je n'en suis plus capable actuellement de toute façon.
Cette fois, elle eut une pensée toute particulière à la jeune garde qui devait être maman. Elle n'était pas encore revenue vers elle. Comme elle semblait perdue, elle n'avait peut-être pas osé lui faire signe. Elle allait corriger ce détail, elle allait l'inviter en bonne et due forme à son heure du thé si bienfaitrice. En voyant la pluie torrentielle qui s'abattait dehors, elle choisit pour plus de confort un petit salon aux motifs un peu anciens qui invitaient au voyage, à la navigation. Elle se disait que c'était parfait pour une atmosphère détendue. Elle avait en plus prévu un thé bleu qui se mariait avec le lait de façon admirable, rien de très corsé pour une future maman. Tout serait idéal. Sa missive mit un certain temps à arriver. Allys avait également sans doute hâte d'avoir des nouvelles ce qui jouait sur sa patience. Une image lui revint. Elle se souvint quand elle marchait au pas de course avec la garde qui galérait derrière elle. Soudain, elle se lmeva et alors qu'elle était derrière presque la porte, elle s'ouvrit comme un miracle.
" C'est à point nommé, vous pouvez entrer, tout est déjà disposé. "
Le lait provenait d'un fournisseur régulier en produits naturels, il était réputé pour la qualité de ses produits. Il y avait néanmoins une entorse dans toute cette organisation. Les fioles ne contenaient pas un excellent lait entier, mais une potion d'un tout autre effet. Allez savoir comment ces deux potions étaient arrivées ici ! Mais elles étaient véritablement présentes. La reine prit soin de vite lui présenter la chaise et fit la connaissance d'un familier qu'elle n'avait pas encore vu.
" A force je vais réfléchir pour m'en prendre un familier. Comment se prénomme t-il ? Si vous avez le don pour ce genre de choses, j'avoue avoir quelques difficultés... Je pensais bien à vous, je suis heureuse que vous ayez pu vous libérer. J'aurais dû faire appel à un transporteur... à croire que j'aime vous épuiser, je m'en excuse. Comment vous portez -vous? "
Marcher de l'Académie au palais, c'est une formalité habituellement pour une garde royale comme moi. Mais avec un bébé qui pompe mes forces, la garde rapprochée et l'Académie, c'est une toute autre histoire. Essoufflements et douleurs sont mon lot commun depuis quelques semaines… Et cela s'intensifie de jours en jours avec tout ces trajet entre la maison et l'Académie. Mon déménagement de la Caserne a coté de chez Ryuji n'a été gouverné que par le bien-être du bébé, pas le mien… Je m'en mord les doigts maintenant que Ryuji est aux abonnés absents. Peut-être qu'un repli tactique vers la Caserne serait la meilleure possibilité… Une chose à laquelle je dois réfléchir mais après cet entretien avec sa majesté. Ouvrant la porte après m'être annoncée, j'ouvre la porte du salon pour découvrir une reine qui venait ouvrir la porte telle une servante. Un statut auquel elle ne devrait même pas pouvoir être comparée. Ma courbette est raide et peu gracieuse mais elle ne semble pas s'en offusquer m'invitant même tout bêtement à m'installer à table.
Merci votre Majesté. Votre invitation a partagé le thé avec vous est un véritable plaisir.
Je m'installe rapidement à la table bien plus heureuse de pouvoir me poser que je ne voudrais le montrer à sa Majesté Allys. Geki se couche sans plus de cérémonie que cela entre ma chaise et la reine. Protectrice comme pas possible depuis deux semaines, elle ne s'éloigne plus de moi. Je souris à mon hôte royale et m'excuse.
Mes excuses, elle est de plus en plus protectrice au fur et à mesure que la grossesse avance.
Je souris à ses interrogations concernant ma belle chiraki tout en me demandant quel genre de familier pourrait convenir à une reine aussi douce et attentionnée qu'elle.
Geki, c'est une jeune chiraki de presque sept mois. Du dressage avec les maîtres du domaine de la Caserne et du temps, tels ont été les maîtres mots de ses premiers mois.
Je flatte la tête de Geki qui l'a levée comprenant qu'on parlait d'elle. Les mots suivants d'Allys me font rougir, sa sollicitude envers moi est un honneur tout autant qu'une joie.
Cela est toujours un plaisir de partager un moment avec vous, votre majesté. Le guérisseur de la Caserne dit que je dois continuer à faire un peu d'exercice, marcher est la meilleure chose à faire selon lui. Vous n'avez pas à vous excuser.
Questionnée par Allys sur mon état de santé et sûrement sur ma grossesse, je me met à douter des raisons de ma présence ici. Peut-être cette invitation n'était qu'une simple invitation sans arrière-pensée…
Un peu fatiguée par le travail et le bébé qui grandit… Mais ça va… Cela ira mieux quand Ryuji reviendra de sa quête pour la Guilde, enfin, j'espère…
Plutôt que de m'apitoyer sur l'absence du père de ce bébé, je m'empare de la théière pour mettre le thé a infuser.
" Attendez de goûter au thé que je nous ai sélectionné. C'est un thé bleu cueilli près des zones montagneuses. Vous verrez il a une certaine douceur et un goût assez prolongé en bouche, c'est un véritable régal. Nous avons également du lait de ces régions qui est plus léger et consistant. Je ne voulais pas vous donner une boisson qui pouvait trop perturber votre grossesse... J'aurais trop peur de votre familier pour cela... " plaisanta t-elle en jetant un nouveau regard vers la petite créature.
La reine ignorait tout des méthodes de dressage. Un animal non dressé pouvait devenir un certain fardeau. Dans un sens, elle aimerait bien que son familier garde une part sauvage, une part mystérieuse en somme, mais c'était sûrement une décision inconsidérée. Elle n'avait jamais observé d'animaux sauvages dans leurs environnement, mais elle en était fascinée. Ils donnaient l'impression qu'aucune force ne pouvait les extraire, d'un libre arbitre total. Ils forçaient le respect et l'admiration. Le chiraki tout près d'eux était si mignon. Allys se doutait bien qu'à l'état sauvage, il devait être bien plus distant en veillant à ne pas s'approcher d'une présence humaine. Son souhait était sans doute tout bonnement impossible. Une bête non habituée à la présence humaine ne pourrait vivre ici sans être toujours encagée de crainte qu'elle ne s'en prenne à quelqu'un... C'était sans doute très idiot comme projet. Elle aurait été bien incapable de stopper une attaque de monstre, elle qui n'en avait jamais combattu. Elle mettrait ainsi ses gardes en danger...
" Il est né en captivité ou en pleine nature ? J'avoue ne pas m'être rendue très souvent en forêt, mais j'adore observer les créatures évoluer... Un futur projet sans doute. "
Sa créature avait l'air si gentille, si affectueuse. Une sorte de petite peluche qui faisait office également de chien de garde.
" Oui je comprends comme les efforts sont difficiles, nous sommes toujours tentées de rester dans notre confort en attendant que le moment vienne, mais pour vous mieux vaut rester en forme. Geki doit vous faire marcher, c'est une bonne chose que vous l'ayez eu maintenant, même si j'espère que cela ne vous fatigue pas trop. Avez-vous revu le père de l'enfant ? "
Elle se souvenait que c'était aussi un sujet d'angoisse pour la jeune femme, qu'elle se demandait s'il était prêt à s'engager dans sa paternité. Au moins par contre elle était suivie par un guérisseur, cela semblait sérieux et rassurant. Justement elle l'évoqua par la suite en disant qu'il n'était pas revenu de sa quête. La jeune femme devait porter bien des soucis sur ses épaules, meixu valait engager sur une autre discussion.
" Et vos recrues comment se portent elles ? Tout se passe bien ? Avez-vous eu des cas plus difficiles que les autres ?
Voyant que la jeune garde s'était installée et avait jeté un regard vers la théière, elle chercha à la devancer en disant :
" Attendez, attendez, il faut rajouter une dose de lait pour que le mélange soit parfait et bien mélanger."
La reine se sentit pressée et versa les contenus des fioles sans vraiment les regarder. Elle aurait pu voir que le contenu ne ressemblait pas à une consistance compact mais bien à une consistance bien plus liquide. Autrement les liquides avaient une apparence blanche tout comme le lait.
" Voilà, maintenant, il nous patienter. Alors quels seront les prénoms de vos enfants ? Dites moi, je veux tout savoir... "
Elle espérait que sa montre lui avait insufflé un peu de ténacité dans cette épreuve vers l'inconnu. Mettre au monde ses premiers enfants c'était revêtir un rôle qui vous suit toute une vie. C'était une belle aventure, mais une aventure où chacun ne peut partir qu'avec peu de bagage autre que celui de sa propre enfance... La reine se demandait à quoi ressemblait cette garde dans ses plus tendres années. Avait-elle eu une enfance agréable ou plutôt déplaisante ?
Je souris à la Reine à la description de ce qu’elle me décrit le thé qu’elle a choisit pour nous. Quelque chose d’exceptionnel que je n’aurai certainement jamais goûté de ma vie autrement. Je la remercie de se montrer si gentille avec moi et de veiller à ce que la boisson soit idéale pour moi et mon bébé. Posant une main sur la tête de Geki, je rassure la Reine.
A moins d’avoir une arme entre les mains, vous ne risquez rien à lui faire une caresse. C’est un véritable nounours.
Geki peut paraître impressionnante, et c’est pour cela qu’elle est ma parfaite partenaire, mais c’est un véritable amour. Toujours douce et protectrice envers moi, certainement la meilleure amie de la renarde. La question de la reine me fait hausser un sourcil, est-elle aussi ignorante que cela pour ignorer les particularités des familiers.
Elle est née en captivité, c’est un mystère magique. Parfois, on trouve un oeuf dans les nids des animaux sauvages. Il n’éclot que lorsqu’on lui donne un nom. Comme un bébé, je crois qu’il identifie ensuite la première personne vue comme sa maman. C’est totalement différent des animaux dans la nature, mais tout aussi passionnant. Je vous accompagnerai avec plaisir si mon état me le permet ma Reine.
Une sorte de safari en somme. Cela devrait être possible avec une bonne organisation et quelques connaissances de lieux intéressants. Je connais bien la forêt et la montagne proche de là où j’ai grandie mais c’est loin. Si cela vient à se faire, on devrait pouvoir trouver quelque chose de plus proche.
Evoquant mon état de santé et ma forme physique, elle corrobore les conseils du guérisseur. Je me sent génée que la reine elle-même se montre si soucieuse de mon bien-être. A moi, une simple garde du royaume....
J’envisage tout de même de trouver un animal de trait et une carriole pour faire le gros des trajets, cela devient compliqué certains jours de me rendre à l’Académie…
Un projet qu’il faudra bien mener à bien un jour avant que je ne soit complètement incapable de me déplacer correctement… Interrogée sur le père du bébé, je me renfrogne un peu lâchant juste que Ryuji est absent pour une quête. Me rendant compte que mon comportement n’est pas adéquate en présence de sa Majesté, je me décide à compléter.
Le père est partie en mission pour la Guilde des Aventuriers. Cela va faire deux mois qu’il n’est pas rentré chez lui, je commence à me demander s’il ne lui serait pas arrivé quelque chose.
Un passage vers la Guilde devrait surement me rassurer. Après tout, personne n’aurait l’idée de me prévenir s’il lui été arrivé un truc. J’aimerai savoir si ce bébé va avoir un père ou pas du tout… Allys ayant vue mon embarras décide de changer de sujet pour embrayer sur mon nouveau poste à l’Académie. Cela est beaucoup plus simple de parler de cela.
Tout se passe pour le mieux. Il y a un ou deux jeunes qui sont plus turbulents que d’autres mais ils prennent tous la bonne voie. Ils vont bientôt subir leur premier exercice en situation réelle. On va bien s’amuser avec les autres instructeurs.
Une petite escorte sur les routes de campagne. Une bonne façon de les mettre à mal. Cela va être amusant pour moi, je vais juste les observer et rire. Prenant les devants pour préparer le thé et éviter à ma reine de s’abaisser à ces basses tâches, elle réagit au quart de tour pour assurer la suite de la préparation. Moi qui voulait éviter qu’elle s’abaisse aux besognes de serviteur… Là voilà qui ajoute le lait à l’eau chaude. Avant de me questionner sur le prénom du bébé. Enfin, des bébés selon ses dires… Encore une fois, elle pense que j’attend plus d’un enfant !
A vrai dire… Je n’y ai pas réfléchie, le papa est absent alors j'attendais son retour pour voir avec lui… Mais si c’est une fille, je pense essayer de convaincre Ryuji de l’appeler Leya… J’aime bien ce prénom. Vous pensez toujours que j’en attends plusieurs ? J’ai un si gros ventre que ça ?
Je souris à Allys, j’accorde beaucoup d’importance à l’avis de ma reine. En tant que souveraine qu’en tant que femme. La montre qu’elle m’a offerte est un réconfort pour moi, et le petit mot, un phare qui éclaire mon chemin de futur maman. Je baisse les yeux vers la table n’osant pas la regarder.
Je voulais vous remercier pour votre cadeau également. Cela m’a fait beaucoup de bien… Surtout votre petit mot. Merci votre majesté !
Rougissant, je masque mon embarras de me montrer si familière avec la reine du royaume en inspectant la théière.
Cela devrait être bon, non ?
En tout cas, il dégage un si bonne odeur qu’il serait difficile de résister à un tel parfum. La théière en main, je l’approche de la tasse d’Allys avant qu’elle ne décide de le faire elle-même.
Je peux vous servir ? Il sent si bon que j’ai hâte de le déguster.
" Je me demandais si vous l'aviez eu dès les premiers jours. Vous avez eu être émue de le voir ainsi attachée à vous en effet c'est un vrai nounours."
Ses poils avaient une grande douceur, ils étaient pour le moment assez fins du fait de son jeune âge. Il avait tout d'une grosse peluche. La reine se remit à sa place après lui avoir adressé un dernier regard.
" Si lors d'une journée vous sentez que ce n'est pas faisable, n'essayez pas de trop en faire. Prenez donc un peu de thé, posez vous dans ces cas précis."
La nouvelle qui suivit n'était vraiment pas réjouissante. Un père absent. Avait-il fui ses responsabilités ? Lui était-il arrivé quelque chose ? La reine se mordit la lèvres en cherchant à lui adresser son regard le plus confiant. Elle n'était pas la mieux placée sur ce genre de sujet. Elles changèrent de sujets pour emboîter sur des nouvelles plus positives.
" J'imagine que vous avez toute sorte de recrues des plus ou moins faciles à orienter. S'ils sont jeunes c'est peut être comme vous dites qu'ils évoluent et cherchent leurs voies. Les exercices en temps réel se tiennent dans la Capitale ? Il s'agit d'un parcours ? "
Leya c'était un prénom plutôt joli. La jeune garde semblait rester sur l'idée d'avoir un enfant. Dans un sens si le père était absent.. sa situation serait plus aisée avec un seul enfant.
" Je le suspecte ... excusez moi d'y apporter autant d'insistance, mais je le trouve effectivement plutôt volumineux. "
Elle ne se voyait pas dire qu'elle ne voyait qu'un enfant juste pour la rassurer. Allys se dit que de toute façon qu'elle dise cela ou son contraire ; la situation n'allait plus changer à présent. Elle espérait que tout se déroule bien pour elle et que son époux soit de retour bientôt. La reine se focalisait sur cette nouvelle et sur sa préparation du thé. Elle se réjouissait d'avoir un moment een retrait avec cette garde avec qui elle avait précédemment échangé. Elle était soucieuse, mais bien mieux que lorsqu'elles avaient échangé dans la salle du trône. C'était peut-être qu'une simple impression. D'autres ennuis étaient apparus, mais elle semblait mieux vivre sa grossesse.
" J'apprécie beaucoup ce prénom ... Vous comptez l'écrire avec un y ou un i tréma, j'avoue plus apprécier le y... C'est un nom très doux pour votre petite fille."
Les mains liées l'une avec l'autre, elle observait son invitée droite sur sa chaise avec le corps légèrement vers l'avant. Elle lui fit un léger clin d'oeil comme si elle avait été touchée que son cadeau ait l'effet escompté. Il était bien loin d'être magique, mais il était porteur de bons sentiments. Elle était satisfaite qu'elle ait pu l'encourager de cette façon. La jeune femme échappa à la petite gêne qui l'habitait en proposant un service. C'était une parfaite conclusion à cette autre bonne nouvelle.
" Vous pouvez la garder pour qu'elle puisse vous guider autant qu'elle l'a fait pour moi... Je ne résiste plus, je vous souhaite une bonne dégustation."
Le liquide dégageait une si bonne odeur. Le thé semblait plus sucré que d'habitude. La chaise lui semblait être très grande... d'ordinaire elle avait sa propre chaise pour être au même niveau que tout le monde. En face d'elle, il y avait une autre enfant ... C'était comme si elles avaient remonté le temps sans qu'elles en aient la moindre conscience. La seule chose que Allys savait, c'était qu'elle n'avait pas assez salué l'autre petite fille. Elle voulut descendre de sa chaise en sautant, mais elle manqua de tomber... Finalement remise sur ses deux pieds, elle tendit la main.
" Bonjour" fit elle en faisant la révérence. " Tu viens... j'veux de bonbons... Tu... ne désires pas rester ici ?"
Elle devait faire attention à sa manière de parler, elle le savait bien. On lui disait assez. Actuellement Allys avait 6 ans et une furieuse envie de courir dans les couloirs à la recherche de quelque chose d'amusant à faire...
Parler de mes apprentis Gardes me fait sourire, ils sont jeunes et fougueux. Et aussi un peu trop impatient mais j’était certainement pareille à leur âge. Le désir de faire ses preuves est impérieux à cette période de leur formation. Je ne me fait pas trop de soucis pour eux, bien formés, ils feront de bons Gardes, peut-être même des Gardes Royaux pour certains.
Une escorte, une unité pour escorter une personne et une seconde pour essayer d’enlever la personne. Comprendre comment fonctionne les groupes de brigands est une part importante de leur apprentissage. Connais ton ennemi, et la victoire sera tienne. L’exercice devrait leur plaire, ils vont pouvoir montrer qu’ils ont bien retenus leurs leçons.
Les jeunes sont demandeurs de tels exercices et c’est une bonne manière pour nous d’évaluer leurs progrès. Hormis la charge d’organisation, c’est un bon outil d’apprentissage. Passant au sujet du prénom de mon bébé, j’interroge la reine sur son impression que je puisse attendre plusieurs bébés. Ce qu’elle confirme sans ambages. Une chose est sûre, depuis que je suis enceinte, je vois plus de femme enceinte dans la rue et clairement, j’ai l’impression d’avoir un ventre énorme par rapport à la plupart…
A force, je commence à me dire la même chose… Deux bébés… Pourvu que ce ne soit pas plus. Surement avec un y, j’aime bien cette écriture.
Remerciant la Reine pour ses attentions envers une simple Garde, je me sens mal à l’aise d’être ainsi traitée. Ce n’est pas dans l’ordre normal des choses qu’une Garde comme moi soit invitée à prendre le thé avec la Reine simplement pour parler de ma grossesse… Je souris en versant le thé dans les tasses alors qu’Allys confirme ses encouragements pour l’avenir. Reposant la théière, je prend ma tasse, essayant de ne pas commettre d’impair protocolaire. Même il s’agit d’un moment totalement informel, je suis quand même en présence de ma Reine… Je prend le temps de sentir les effluves du breuvage, un délicieux mélange floral et fruité qui émoustille mes narines sensibles. Prenant une gorgée, je déguste les arômes du thé mélangé au lait. Je ferme les yeux un instant pour savourer l’instant. En rouvrant les yeux, une petite fille aux cheveux noirs me regarde.
Contente d’avoir une amie pour jouer avec moi, je bats des pieds. Pieds qui ne touchent pas le sol avec cette grande chaise. Ma tête dépassant à peine la table, je reprend la tasse devant moi juste pour boire le thé que ma maman ou sa maman nous a donné. J’ai pas envie de me faire gronder par papa encore une fois parce que maman s’est plaint que j’était partie jouer avec l’épée en bois. J’ouvre de grand yeux ronds lorsqu’elle descend de sa chaise pour faire une révérence après avoir manquée de se faire mal. Je descend à mon tour me tenant à l’accoudoir pour ne pas tomber et prend la main tendue de la petite fille. Je me demande où maman à dénicher une petite fille comme elle. Certainement encore une fois pour me montrer comment une gentille petite fille doit se comporter. Un grand sourire se dessine sur mon visage à l’idée de partir chercher des bonbons ! Je prend sa main dans les deux miennes toute contente de la tournure des choses.
Des bonbons ! Tu sais où en trouver ?! Attends…
Gardant sa main dans les miennes, je jette un oeil autour de nous et surtout écoute. Pas de mamans à l’horizon !
Pas de mamans ! On va pouvoir aller chasser les bonbons ! Moi, c’est Aube, et toi ?
Une partenaire de bêtise, il n’y a que ça de vrai ! Les bonbons, c’est bien mais on peut aussi s’amuser à les réclamer en faisant peur !
Viens, on va se maquiller pour faire peur à ceux qui donnes pas de bonbon !
Riant, je l’entraine main dans la main en direction de la porte sans vraiment prêter attention au fait que ce n’est pas ma maison.
- Mini-Aube:
" Ouais, ouais tu sais, je sais même où y a des gâteaux et tout... T'aimes le chocolat ? Si t'es gentil, t'aimes le chocolat" faisait Allys en riant.
Quelle bonne idée de lui avoir lu une histoire sur un royaume sauvé par des héros mangeurs de chocolat qui tiraient leurs pouvoirs de cetet substance douce et sucrée. Allys avait retenu une chose... le chocolat c'est bon, la preuve même dans les histoires, ils le disent. Le citron c'est tellement amer que c'est forcément pour les méchants. A ce train là, le future royaume allait ressembler à des champs de chamallow, des rivières de caramel et des lacs de chocolat. Dans la tête d'Allys, il n'y aurait en cet instant aucun problème. Elle avait une envie folle de sucré, mais c'était pas drôle de partir seule. Soudain elle réalisa une chose : la petite fille semblait chercher uen menace... Courageusement, elle se planqua derrière.
" Quoi attends.. T'as vu quelque chose ?"
Elle soupira de soulagement en entendant qu’elle craignait les parents. Les siens étaient souvent occupés, les seules personnes qu'elle pouvait faire tourner chèvre c'étaient ses nourrices et les serviteurs à plein temps. Elle inspira, prit une posture digne et se remit face à la petite fille.
" Enchantée.. oui enchantée... je suis la princesse Allys... "
Allys prit les bords de sa large tunique pour s'incliner. Elle voyait des gens le faire souvent et avait tendance à copier ce qu'elle voyait. La petite fille trouvait cette posture élégante et avait déjà une vraie allure de princesse. Si on oubliait la maladresse lors de la descente de la chaise, elle était déjà pointilleuse dans certains de ses gestes. Aube semblait prête à courir et l'idée plaisait à Allys. Elle prit même les devants en cherchant à la doubler et à prendre les commandes de cette escorte folle. Elle s'arrêta d'un seul coup.
" Rire.... et courir... c'est pas facile... "
Après avoir un peu toussé, elle mit ses mains en visière pour rechercher une pièce bien spéciale... la chambre de sa mère. Elle avait plein de maquillage, elle pouvait bien en prêter un peu. Cette après midi, elle était partie en cérémonie donc elles avaient le champ libre. Sa respiration étant revenue, elle prit Aube par les épaules pour la mettre en face d'elle.
" ... J'ai une idée. Ma mère a plein de maquillage, elle est pas là en plus... mais sa chambre est gardée.... Je pars devant et tu rentres ...? Viens, c'est par là ! "
Comme elle trouvait qu'elles évoluaient vite ainsi, elle lui prit la main en souriant puis se remit à faire la course avec elle à nouveau. Elle courait vite, il faudrait qu'elle lui dise de faire la course plus souvent avec elle. Arrivées près d'un bout de couloir, elle étendit les bras, l'arrêta puis plaça un doigt sur sa bouche.
"Schhh je reviens tout de suite"
Elle se décolla d'elle puis partit vers eux en demandant de l'aide. Comme ils ne bougeaient pas et semblaient se demander ce qui se passait, elle fit mine de pleurer puis se mit à courir. Les gardes hésitaient sur la conduite à tenir. L'enfant n'était pas d'ici, c'était sûr. Elle devait être l'enfant d'un dignitaire en visite au château. Une fille de noble si jeune perdue dans les couloirs. Après une longue discussion qui laissait le temps à Aube de passer derrière eux, les deux partirent. L'un rejoignit la pièce où la reine prenait le thé, l'autre chercha à retrouver cette fille disparue. Sauf que Allys connaissait bien le château, elle était rentrée dans une pièce assez proche et n'eut aucun mal à revenir vers la pièce. Un boudoir.. Elle passa une autre porte pour tomber sur la chambre de ses parents qui avaient bien changé... Surtout les portraits..
" Aube...Aube, t'es là... ? T'es où ? ... Tu te caches ? Attention, je vais te trouver !! "
Voilà Allys qui se met à courir vers le lit, saute dessus pour voir en dessous. Elle était la tête en bas à vérifier si cette cachette était occupée sans vérifier dans un autre endroit de la pièce. Elle allait sans doute avoir uen belle frayeur car Aube n'était pas là... Le maquillage était toujours disposé près d'un miroir dans sa salle de bain. Il était assez en évidence pour que la reine n'ait pas à chercher pour se repoudrer rapidement.
- Mini Allys:
Du chocolat ! Rien que pour cela, le risque de voir maman me tomber dessus en vaut la peine ! Et puis, c’est elle qui m’a amené ici donc c’est sa faute, pas la mienne. Je ris lorsqu’elle se présente comme une princesse. Papa m’a dit que je devrait protéger la Reine un jour. Une reine, c’est une grande princesse non ? Alors, je bombe le torse comme mon papa et m’annonce fièrement.
Princesse, je vous protégerai jusqu’à ce que les bonbons aient raison de moi !
Une déclaration difficile à terminer sans éclater de rire. Courant à travers les couloirs tout en riant, je m’amuse beaucoup avec Allys sans vraiment prêter attention à ce qui m’entoure, c’est juste une grande maison pour la petite fille que je suis. Rapidement, Allys s'arrête un peu essoufflée. Je pose une main sur son dos pour essayer de l’aider à reprendre son souffle, c’est sûr, elle n’a pas l’habitude de courir dans la forêt. Une fois sa respiration plus calme, là voilà qui semble chercher quelque chose à la façon d’un chasseur. La chambre de sa maman est gardée ? Qui a une chambre sous surveillance ? Une personne sacrément importante certainement mais si Allys dit que c’est celle de sa maman, il n’y a pas de raison que cela soit un problème d’aller emprunter du maquillage. Le plan qu’elle m’annonce est simple et machiavélique pour des enfants de 6 ans mais cela me fait sourire.
Super, on fait comme ça ! Allons nous maquiller !
Pleine d’entrain, j’emboite le pas à Allys en direction de la chambre de sa maman. Courir à travers les grands couloirs de sa maison est amusant, surtout quand les gens s’écartent sur notre chemin. A un bout de couloir, elle me fait signe de m'arrêter et me pousse contre le mur, un doigt sur la bouche. Bien plus proche de moi qu’aucun autre enfant jusqu’à maintenant, je peux entendre son coeur qui bat la chamade d’excitation. C’est si drôle de faire la course dans les couloirs et de jouer aux espions qui entrent discretement dans les pièces gardées. Invitée à attendre un instant, je passe juste la tête sur le coin pour la regarder éloigner les Gardes de la porte. Trop facile, les adultes sont vraiment trop faciles à berné ! En un instant, je suis de l’autre côté de la porte. Je divague un instant dans le salon impressionnant pour la fillette de la campagne que je suis. Je passe une main sur les fauteuils tout doux et carrément moelleux tout en cherchant le maquillage. Maquillage absent dans les lieux… Je décide alors de tenter ma chance dans la pièce à côté où un grand lit trône. Je fixe un instant les portraits en me disant qu’Allys ressemble beaucoup à sa maman. Le bruit de la porte me fait sursauter. Je me cache rapidement derrière un rideau au cas où ce ne soit pas Allys mais un Garde ou même la Reine. Mais rapidement, je comprend que c’est ma compagne de jeu et qu’elle me cherche maintenant. Je met une main devant ma bouche pour ne pas rire juste parce que c’est drôle de la laisser me chercher. Le bruit du lit m’indique qu’elle a sauté sur le lit, je passe un oeil entre les deux rideaux pour la regarder faire. La tête penchée sur le côté du lit à l’opposée de moi, la tentation est trop grande de lui faire peur. A pas de renarde, je quitte ma cachette et me précipite vers le lit. Je me jette dessus et sur ma copine en grognant telle un renard affamé. J’éclate de rire en atterrissant amusée par la surprise d’Allys.
Trève de plaisanterie princesse, les bonbons nous attendent ! Il faut nous maquiller, il est où le matériel ?
Assise en tailleur sur le lit, je balaye la pièce du regard sans trouver le nécessaire. Heureusement, Allys me montre le nécessaire à maquillage dans la salle de bain attenante. Je regarde le maquillage de sa maman ne reconnaissant pas grand chose, ma maman n’a même pas la moitié de tout ça !
Olala ! Il y a plein de chose trop chouette !
Je prend un petit flacon rouge en main et l’ouvre. L’odeur me fait grimacer et me tire “pouah, ça sent pas bon” mais la pâte rouge me donne une idée. Je verse un peu de cette pâte sur mes doigts et l’étale sur plusieurs mèches de mes cheveux blancs. J’en étale ensuite autour de ma bouche avant de me tourner vers la jeune fille. Je dresse mes bras telle des pattes monstrueuse et grogne.
Regardes, je suis une renard-garou !
La princesse Allys roula au sol comme l'aurait fait un espion préoccupé d'être perçu à jour. Elle passa sa tête et désigna de son doigt la salle de bains avant de s'y introduire en riant. Allys ramena toute triomphante la boit de maquillage qu'elle renversa en partie sur le lit histoire d'avoir une vue globale. Le butin semblait plaire à son amie, ce qui lui procura un énorme sourire. Elle aimait plus que tout ravir son entourage. Aube s'était saisi du flacon rouge, un flacon que sa maman utilisait souvent. Ce beau rouge vif était aussi son préféré... Elle avait entre ses mains un pinceau noir dont sa main se servait pour faire le contour de ses yeux.... Du moins c'était ce qu'elle pensait, mais c'était si difficile... Allys cherchait à faire tout comme elle, mais elle ne parvenait qu'à mettre le pinceau soit à côté soit à moitié dans l'oeil aussi elle se décida à faire des traits au hasards en prolongeant ses yeux. Les lignes n'étaient pas vraiment droites. Ses yeux avaient un air vaguement égyptien... égyptien avec une mise en forme maladroite. Elle vit Aube aussi se prendre au jeu et se métamorphoser... Elle se mit à faire de grands yeux... elle allait l'imiter et se mettre du sang aussi au niveau de la bouche...
" Ohhhh non renard garou !... j'ai pas de pattes mais ... tu veux me faire des dents pointues... ?" Elle avança son menton tout en tendant le pinceau incertain qui lui avait fait un tracé hasardeux. La princesse ne s'était jamais maquillée mais avait toujours un regard admiratif envers sa maman. Ses doigts n'hésitaient même plus à répéter un tracé exact. Elle avait une vague idée de ce qu'elle voulait être....
" Je veux être une chauve souris !!! " fit elle en battant les bras dans le vide. . " Mais pour un renard garou... t'as pas de griffures... attends je vais t'en faire... ne bouge pas, surtout ne bouge pas hein d'accord ? " répéta t-elle comme ses parents auraient fait.
La jeune Allys avait la manie de ne pas rester en place, surtout s'il y avait une nouvelle personne à saluer ou qu'elle s'ennuyait. la présence de cette nouvelle amie était parfaite. Elle lui fit des petites cicatrices sur le front, les bras après avoir entendu son accord. Jamais elle n'aurait imposé quoi que ce soit. Elle prit une poudre noire et tendit le poudrier à Aube en représentant son visage.
" Dis tu peux m'en mettre ? "
Elle préférait qu'on la maquille plutôt que se tromper. Maquiller les autres était plus amusant surtout que son amie était plutôt rigolote ainsi. Une fois qu'elle se trouva assez poudré et qu'elle avait des dents blanches.. Elle sauta hors du lit pour ouvrir la penderie.... Non c'était beaucoup trop grand.... Elle prit une robe de chambre noire... pour ne pas qu'elle traîne trop par terre, elle tint sa traîne en se cachant un peu dedans.
" Je vais te manger !!" fit elle avant de vaciller. Elle se reprit avant de sourire et d'apporter à Aube la capeline de sa mère. " Tiens ! Elle est toute blanche comme tes oreilles" La princesse lui offrit la capeline comme un présent de haute valeur. Un genou posé à terre, la tête baissée, elle avait tout l'air d'un serviteur. Elle adorait l'idée de ce changement de rôle. Allys savait mieux que personne où trouvaient les objets même si c'était curieux.... jamais elle n'avait vu certains vêtements. Après tout sa mère avait tellement de choses... elle ne s'inquiéta pas de ces quelques changements.
" Allons chasser !! "
C’est une super trouvaille cette pâte rouge ! Dans mes cheveux, on dirait du sang séché, parfait pour passer pour une vilaine renarde-garou ! Cela devrait partir facilement en me lavant les cheveux, comme ça maman ne râlera pas quand je rentrerai à la maison. Plus important, je m’amuse à présenter mon personnage de renard-garou à Allys. Elle aussi a commencée à se dessiner des choses sur le visage. Je penche la tête sur le côté, perplexe. Par contre, quand elle me tend le pinceau pour lui dessiner des dents, je m'exécute avec joie. Rien de mieux que de se maquiller l’une l’autre.
Des dents ! De grandes dents bien effrayantes alors !
Je m’amuse avec le pinceau, c’est bien plus drôle que d’écrire ! Je m’applique de mon mieux pour lui faire des dents effrayantes, enfin j’essaye… Le résultat est… pour le moins surprenant… Un mélange entre des dents de canard et de lion, je dirai. Vraiment, le pinceau, c’est pas mon truc… C’est tellement mieux les épées de papa ! Je ris lorsqu’elle m’annonce vouloir être une chauve-souris. Elle va être une sacrée chauve-souris ! Je bondit sur mes pieds lorsqu’elle évoque des cicatrices.
Mais oui ! Un renard-garou, ça se bats, c’est méchant ! Donc ça a forcément des griffures !
Je pars dans un fou-rire alors qu’elle essaye de me faire rester en place pour dessiner. Je suis certaine qu’on va faire peur à tout le monde ! Je la laisse dessiner les marques sur moi avant de prendre la poudre qu’elle me tend. C’est tellement drôle, à chaque coup de tampon, elle devient de plus en plus sombre. Joueuse, je me met également quelques coups par-ci par-là, parce qu’un renard-garou, c’est pas tout propre ! Maquillée, Allys saute du lit et ouvre en grand la penderie de sa maman pour sortir un vêtement noir. Je ris lorsqu’elle s’essaye à me faire peur en s’enroulant à l’intérieur Plus amusée qu’effrayée, je plaque mes mains sur mes joues en faisant semblant de crier. Je descend du lit lorsqu’elle me tend une cape toute blanche en se positionnant comme un chevalier servant. D’un coup toute timide, je l’interroge.
T’es sûre que ça va pas fâcher ta maman ? Je voudrais pas que tu sois punies par ma faute.
Elle est tellement jolie cette cape, sa maman doit l’aimer quand même… Et puis, ce n’est pas le but qu’elle soit punie après… Ma maman serait mécontente si je donnais ses vêtements à mes copines.
Le problème de la cape réglé, Allys propose que l’on parte en chasse de bonbons. Enfin, c’est le meilleur moment que voilà ! Pleine d’entrain, je m’avance en courant vers la porte mais m’immobilise la main tendue vers la poignée.
Mais attends ! Les gardes ! Comment on sort maintenant ?
Une chose est sûr, les gardes ne vont pas nous laisser sortir aussi facilement que l’on est entrées… Je me tourne vers Allys, espérant qu’elle a une idée en tête pour que l’on puisse sortir et aller chercher des bonbons et du chocolat. Je fait rapidement le tour des différentes pièces à la recherche d’une idée ou même d’un passage secret grâce à ma truffe si sensible.
" Vas y, vas y, vas y !" encourageait elle en serrant ses poings en levant sa tête presque de manière trop forcée. Elle se sentait déjà comme la plus belle. Elle chantonnait tout en gardant les lèvres closes pour ne pas risquer une dent loupée. Allys était convaincue d'avoir une dentition parfaite, elle avait totalement confiance dans les talents d'Aube. De toute façon, elle pourrait se regarder ensuite dans le miroir comme maman.
" Tu crois que les renards garous, ils aiment quand même les chauves-souris...? " demanda t-elle en fermant les yeux. Autant demander les choses avant d'avoir un combat imprévu, maman disait souvent " Allys, tu as rien oublié ? " Pour le coup, elle voulait savoir si cette créature en avait contre la sienne. " Je peux voler ... et je verrais tout pour toi. Les méchants et tout. Tu te bats et hop moi je... " La princesse lui sauta dessus pour faire semblant de mordre son cou en riant. Elle posa sa main solennellement comme lorsque des personnes prêtaient serment avec sa voix sérieuse. Sa petite voix faisait trop enfantine... On lui disait qu'elle était mignonne... Oui, mais elle voulait avoir la même classe que ses parents. Elle voulait qu'on se taise quand elle parlait comme une vraie reine respectée.
Allys cligna des yeux malicieusement en prenant sa plus grosse voix en toussant avant " les achève". La voix était limite risible et n'aurait pas fait trembler même un gloot en bas âge. Il y avait encore du chemin à parcourir avant que cela soit impressionnant. Tout ce qui comptait c'était la conviction d'avoir réussi pour la jeune enfant convaincue d'avoir une voix autoritaire précoce. Son amie était vraiment géniale son fou rire était contagieux au point que ses cicatrices ressemblaient à des dents de scie, dans un sens... Elles pouvaient avoir été de profondes entailles, donc rien d'irréaliste. Au moment de mettre la poudre, Allys s'imaginait un petit visage tout noir comme la nuit. Elle imaginait qu'elle allait pouvoir se camoufler partout, mais alors absolument partout. Son déguisement faisait impression, même Aube semblait se prêter au jeu, ce qui donna envie à Allys de surjouer en agitant ses bras. Elle aurait même eu envie de prendre son élan pour sauter sur le lit, mais il fallait être sérieuse tout de même. Elles avaient des déguisements à faire. "On ne pouvait pas passer son temps à faire n'importe quoi" aurait dit son père. Il fallait se focaliser sur leur objectif. Allys était concentrée à sa tâche et remit la capeline à Aube comme on aurait remis une épée à un futur chevalier.
" Au nom du pouvoir.. que j'ai... tu es un renard garou... TOUUUUUT puisssant"
La capeline tombait bien, elle lui allait bien même. Allys en était toute fière. Son amie souleva un problème gênant que Allys balaya en bougeant doucement la main comme si elle éloignait cette inquiétude.
" On va lui ramener... elle a plein de trucs. Elle aura pas le temps de le voir"
Allys était une petite futée. Elle savait trouver des excuses dès lors qu'elle jugeait un acte comme étant peu impactant... A six ans tout pouvait sembler sans gravité : porte une robe blanche un jour de pluie, installer ses peluches dans le couloir pour le garder, emporter de la nourriture dans sa chambre ou encore tenter de marcher le long des murets en marche arrière. Les bonnes comme les mauvaises idées se côtoyaient comme de sœurs sans que l'on puisse réellement les distinguer. D'ailleurs rien que le fait de se maquiller sur un lit paraissait une bonne idée. Les couvertures semblaient encore se rappeler de la poudre noire que portait Alyss ou encore de ce liquide rouge qui ornait les cheveux d'Aube. Le maquillage était réellement une mauvaise idée. Sans même prendre le temps de ranger le maquillage, elles étaient déjà devant la porte... Allys eut ce réflexe de jeter un coup d’œil à la chambre au dernier moment, soupira avant de finalement ramasser leur forfait dans la salle de bains. Ranger, c'était vraiment la partie la moins agréable.
" ... Les gardes j'en sais rien... moi. Tu crois qu'on peut sortir ...."
Les personnes du château s'était bien gardées de lui communiquer une telle information. Elle ne connaissait pas de passage secret, pire on lui avait juré qu'il n'en existait pas. Bien entendu, l'affirmation était fausse, mais il suffisait de brouiller les pistes pour que l'intuition de la petite princesse ne s'éveille pas.
"Oh... et si on faisait semblant d'être un adulte !! Non... Ou non... non plus... "
Un passage secret était pourtant présent dans cette pièce. Dans la salle de bains, il y avait un passage qui n'avait pas été ouvert depuis longtemps. L'humidité avait pris place, il y avait une vague odeur de fleurs très odorantes. Il avait été construit par un roi adepte de la flore qui, par pure fantaisie, avait voulu décorer un couloir jamais emprunté de la plus jolie des façons. Tout le monde lui avait pourtant dit que c'était inutile. Il s'agissait de fleurs aimant l'obscurité. Elles étaient comme le le phénix, elles grandissaient de façon autonome, mouraient. Lors de leur mort, elle dégageait une odeur forte chargée de pollen qui régénérait ses congénères. Elles émettaient une faible lueur qui permettaient de deviner les marches sans être réellement forte. Une lumière bleutée hantait les couloirs comme une lueur spectrale sans que le long miroir, entrée du passage, ne la reflète. C'était un miroir assez large qui couvrait le mur au fond de la pièce. Sur le cadre de ce miroir avaient été sculptées des fleurs pareilles à celles présentes dans le couloir que ce miroir gardait. Le seul moyen d'accéder à ce passage était de pousser pour actionner une porte tournante... et ainsi poursuivre dans un couloir étroit et sinueux son voyage jusqu'aux cuisines du château.
Si Allys dit que cela ne posera pas de problème à sa maman, je me range à son avis et enfile la capeline. Je suis maintenant une terrible Renard-Garou ! On va bien s'amuser maintenant… enfin si on trouve un moyen de sortir sans se faire attraper par les Gardes postés dans le couloir. Papa m'a montré comment on peut mettre hors d'état un grand soldat mais il m'a bien dit que je ne dois pas le faire sans une très bonne raisons sinon je serai punie… Pas sûr qu'il soit d'avis que des bonbons soient une raison suffisante. Allys semble ne pas avoir pensée à ce détail elle aussi. Elle propose de faire semblant d'être des adultes mais se ravise tout de suite. Me creusant la tête, une idée émerge venue tout droit des histoires que me racontait maman quand j'étais petite.
Il y a pas un passage secret ? Il y a toujours des passages secrets dans les histoires de princesse !
Un palais de princesse sans passage secret, c'est juste pas possible ! Même si Allys ne paraît pas convaincu, je m'approche des murs, truffé de renard-garou en avant. Je longe les murs sniffant les odeurs comme lorsque je sort chasser le lapin. Rien dans le boudoir, rien dans la chambre. Je passe sans attendre espérant trouver le passage secret de cette maison de princesse. Passant à toute vitesse le long des murs, je m'immobilise lorsqu'une odeur imprévue me chatouille la truffe. L'odeur a l'air de venir du grand miroir, enfin des bords. Ma truffe ne me trompe jamais ! Cette odeur ne vient pas de la salle de bain.
Allys ! J'ai trouvé le passage secret !! Derrière le miroir.
C'est qu'il est joli ce miroir avec ses fleurs sculptées ! Le miroir, c'est un grand classique des histoire de maman. Curieuse, je cherche le moyen d'ouvrir le passage en m'appuyant sur le verre. Il doit y avoir un truc à tourner dans le décor ! D'un coup, alors que je me dresse sur la pointe des pieds, le miroir se dérobe sous mon poids. Surprise, je m'étale par terre dans ce qui doit être le passage secret tant recherché. Je me relève à toute vitesse mécontente de m'être tournée en ridicule devant ma nouvelle copine. Dans ce couloir sombre, l'odeur est beaucoup plus forte. Je me tourne vers Allys et lui prend la main tel un preu chevalier venant sauver la princesse.
Allons-y, a nous les bonbons !
Je l'entraîne avec moi dans le couloir sombre. Rapidement, de petites fleurs émettant une petite lueur bleutée apparaissent un peu partout. Je renifle plus précisément une fleur reconnaissant l'odeur qui nous a guidée ici. M'amusant beaucoup, je longe le couloir étroit jusqu'à ce qu'un truc nous bloque le passage. Invitant ma copine à se taire, je plaque mon oreille contre ce qui me semble être du bois. Pas de bruit… J'essaye de pousser sur le panneau pour l'ouvrir comme le miroir juste avant mais n'arrive à rien…
Il doit y avoir un levier quelque part. Maman dit que c'est toujours comme ça dans les passages secret.
Je farfouille au hasard sur les bord du panneau à la recherche d'un truc pour l'ouvrir. A la limite de ce que je peux atteindre, je sens un bout de bois qui dépasse. Sans ménagement, je tire dessus et le panneau s'entrouvre en raclant le sol. Après un rapide coup d'oeil, je pousse le lourd panneau et m'avance dans ce qui ressemble à un garde-manger.
" C'EST VRAI !!! Oh t'es trop forte... ! " Elle voulut foncer avec son vêtement beaucoup trop ample et manqua de se casser la figure. Ses pas firent une légère pirouette avant de progresser vers le miroir. Aube était déjà sur la pointe des pieds en train de tenter d'activer un mécanisme. Le miroir se met soudain en mouvement, mais trop rapidement pour qu'Allys puisse réagir... Aube finit au sol emportée par son mouvement. Elle avait peut-être mal après une chute pareille... Allys en eut le coeur serré, elle allait lui demander comment elle allait, mais Aube avait déjà oublié sa chute. Elle était même prête à progresser et tel un chevalier lui tendait la main. Allys la saisit en riant. A l'intérieur de ce couleur, tout semblait merveilleux : un vrai passage magique comme dans les contes de fée. Allys ralentissait la mission, elle voulait graver ces images dasns sa tête. La bouche ouverte, elle était fascinée par ce spectacle " mais c'est.. trop joli .. regarde.. mais Aube attends.. on a le temps... ah oui les bonbons... ah non mais regarde... c'est juste trop beau. " Elle altérait entre les moments d'admiration et de focalisation sur la mission. Encore heureux qu'Aube était là pour la recadrer sinon elles auraient progresser à un rythme défiant l'allure des escargots. Ce fut à nouveau Aube qui les sortit du passage en tirant sur un levier.
" T'es mon passe-partout ! T'es la plus... oh mais on est dans la cuisine ! C'est super, on va pouvoir aller voir les serviteurs, tu vas voir, ils sont chouettes..... Tu crois que y a des bonbons ici...? "
Allys était déjà partie à escalader un plan de travail pour atteindre le fameux placard.
" Tu viens m'aider... je suis trop... petite...? "
Rien dans les placards... Elle savait à présent que les serviteurs avaient dû les déplacer ailleurs... pire ils se l'étaient répartis sans en donner. Il était temps de réclamer vengeance.
" Viens ! Faut qu'on trouve notre trésor ! Grâce à ton super flair !!! "
Ce ne fut pas le flair d'Aube qui les alerta mais l'oreille d'Allys. Quelqu'un marchait dans le couloir. Allys mit la main sur les lèvres en entrainant Aube. Elle rigolait déjà... c'était d'une discrétion frôlant le zéro absolu lorsqu'elle ouvrit subitement la porte séparant le couloir de la cuisine pour surprendre une aide cuisinière venue chercher des ingrédients.
" Où sont les bonbons ??? Sinon... heu... je suis une chauve souris !!! Grrr et j'ai un renard garou féroce ... qui a faim.. oui très faim alors faut donner et vite ! "
Faire des bêtises et manger des bonbons, les deux meilleures choses au monde du haut de mes six ans. Trouver un des passages secret du château est amusant, on prend la fuite comme des princesses. Les décors sont jolis mais j’oblige Allys à avancer, si on traîne trop, quelqu’un va manger tout les bonbons à notre place. Après un dernier obstacle, nous débouchons directement dans la cuisine qui par chance est vide pour le moment. Connaissant bien les lieux, Allys se précipite vers un placard en annonçant qu’il devrait y avoir des bonbons là. Grimpant sur un plan de travail pour atteindre le placard, Allys réclame de l’aide. Je me précipite pour l’aider en la poussant afin qu’elle puisse monter dessus.
Alors ! Il y en a ?
Je trépigne d’impatience à l’idée que l’on ait enfin les bonbons tant convoités. Mais non, rien. Quelqu’un les as déjà pris pour les manger ! Redescendant, Allys déclare la chasse ouverte, il est temps de reprendre notre dû !
En avant ! Allons reprendre nos bonbons !
La guerre est déclarée ! Qui que ce soit, nous lui reprendrons notre dû, il est l’heure de faire parler les monstres ! Je sourit en montrant les dents à ma comparse. Je m’avance vers la porte prête à chercher l’odeur du sucre lorsque des bruits de pas retentissent derrière cette dernière. Tout aussi hilare que la jeune fille, je m’avance à ses côtés. Je bondit avec la reine dans le couloir en grognant pour accompagner sa tirade. La cuisinière sursaute en criant. Lâchant son panier, elle porte une main à son coeur.
Mon dieu… Il ne faut pas faire ça les enfants, mon petit coeur ne résistera pas.
La vieille aide de cuisine n’a pas l’air décidée à nous donner des bonbons comme réclamer… Je grogne encore une fois pour marquer le coup.
Des bonbons ! Rendez-nous les bonbons !
Mes longues oreilles blanches tressautent tellement j’ai envie de rire. Ramassant son panier, la vieille dame nous sourit avant de pointer le bout du couloir.
Il y a des biscuits tout chaud par-là. Sa majesté reçoit une dame pour le thé, nous avons encore fait trop de biscuits.
Je regarde Allys du coin de l’oeil. Des biscuits, c’est pas des bonbons mais c’est bien aussi… A mon avis, nous devrions aller empocher ce butin avant que l’on ne nous le vole. Je m’avance dans le couloir pour aller vers les biscuits promis en reniflant et grondant tel la renarde-garou que je suis.
- Mini-Aube:
" Nina... t'es pas drôle... "
Aube n'avait pas encore pris le pas de course, elle aussi devait trouver que cet échange était sans doute un peu facile. Allys gonfla les joues en tentant de trouver un autre compromis. Sa mère détestait qu'elle vole si on la prenait sur le fait, elle risquait encore une leçon de savoir-vivre épuisante. Elle oscillait entre la domestique et Aube sans savoir quoi décider. C'était affligeant.
" Les invités arrivent quand ?"
La zone de risque se définissait ainsi : le lieu, le temps et le degré à prendre un tel risque. Si les biscuits étaient encore chauds, c'était sans doute parce qu'il n'était pas prévu qu'ils soient de suite dévorés..
" Les invités seront présents sous peu, mais vous avez encore le temps pour en prendre un. Rien ne sera vu si vous le faites dès à présent"
Encore mieux voilà que l'on soutenait leur action, non il y avait anguille sous roche, nécessairement. Comme elle y réfléchissait, elle songea à un fait évident. S'il n'y avait plus de plat à biscuits, personne ne saurait rien... Allys partit devant avec cette idée en tête, elle était toute contente de cette idée pas discrète pour un sou. Pour elle, tout était limpide, il fallait faire disparaitre les preuves dont le plateau. Son remerciement rapide n'avait pas dû arriver aux oreilles de la domestique, mais qu'importe... Elle jeta un regard au dessus de son épaule pour savoir si son acolyte la suivait bien, il ne manquerait plus qu'elle la perde dans les couloirs.
"Aube !!!! Viens !! Va plus en avoir !!"
Question de vie ou de mort, il fallait arriver avant les invités et les griller sur ces délicieux biscuits. Elle s'en faisait la promesse, ils n'en auraient aucun. Elle se sentait néanmoins un peu moins vive plus le temps passait, mais elle ne réfléchissait pas trop. Sa faim devait être trop forte. Elle agrippa le châle de son amie pour avancer d'un seul bloc vers les biscuits, quitte à renverser les personnes sur leur passage. Tel un fenrir en pleine charge, rien ne les stopperait jusqu'à leur objectif. Allys lâcha son amie près du plateau et s'en accapara en disant :
" Vite cachons le !! Tu as une idée ? "
Comme quelqu'un venait, Allys l'attira pour se cacher sous une table. Au moins, elles pourraient réfléchir plus tranquillement. Une autre solution se présentait. Si elles les mangeaient... y aurait plus de trace... Ils étaient si chauds, la domestique n'avait vraiment pas exagéré. Ils avaient l'air si bons.
" ... On mange ce qu'on trouve...? "
Des cookies, c’est un moindre mal… J’ai une préférence pour les bonbons mais s’ils sont encore chaud, cela devrait faire l’affaire pour sauver la domestique d’une attaque de monstre plein de hargne et de gourmandise. Mais ma copine la chauve-souris ne semble pas certaine de son coup, c’est vrai qu’on va se faire disputer si on nous attrape en train de chiper les cookies de la reine et ses invités. Mes oreilles se plaquent sur ma tête de déception à cette idée. Finalement, la domestique rassure ma comparse, on devrait pouvoir les chiper avant l’arrivée des invités. Et il ne faut pas plus pour qu’Allys reparte telle une furie dans le couloir. C’est qu’elle courre vite la petite noble quand elle le veux mais je n’ai pas de mal à la suivre après tout Père me fait courir derrière lui tous les jours depuis de nombreuses années.
Mais oui, je suis là !
Je pouffe de rire en zigzaguant entre les gens qui circulent dans les couloirs. Personnes qui essayent tant bien que mal d’éviter les deux petits monstres qui sèment la zizanie dans tout le palais… La situation empire pour les pauvres gens lorsqu’Allys m’attrape par le châle pour foncer tout droit sans faire attention. Monstre jusqu’au bout des pieds, on file à vive allure jusqu’au trésor légitimement dû après tout nos efforts. Allys est la première à se ruer sur le plateau. Alors que je m’apprête juste à en prendre pour les cacher dans mes poches, elle prend carrément le plateau me demandant où le cacher. Faisant de grand yeux ronds au vampire, je cherche une cachette correcte. Le temps de me retourner, elle a disparu… Des bruits de pas se rapprochant, je me jette sous la table pour me cacher derrière la nappe qui déborde largement, presque jusqu’à toucher le sol.
J’étouffe un rire en retrouvant mon amie sous la table. Je m’assoie par terre à côté d’elle et renifle la bonne odeur des cookies tout chaud. Je crois qu’on est bien sous cette table pour manger des cookies en fait. Idée visiblement partagée par Allys qui m’interroge à demi-mot sur la possibilité de manger notre butin.
Premiers arrivés, premiers servis. C’est la dure loi des Terres Gelées !
Pour illustrer mon propos, je m’empare d’un des nombreux cookies tout chaud. Je croque dedans sans honte et sans faire attention aux bonnes manières que Mère veut me voir faire preuve en public. De toute façon, est-ce que ma copine compte comme du public ? C’est ma copine après tout… Croquant mon cookie, j’entend une porte s’ouvrir puis se fermer délicatement, mes oreilles se dressant au passage. Des pas retentissent et, rapidement, des chaussures brillantes apparaissent au pied de la table. Je retiens mon souffle comme si cela pouvait changer quelque chose. Je perçois un soupir puis le tintement de la vaisselle que l’on prépare. D’autres pas à nouveau puis une voix d’homme.
Cela faisait bien longtemps que les biscuits n’avaient pas disparus sans laisser de traces….
Bien longtemps en effet, je me demande bien qui a bien pu les prendre en l’absence de sa majesté la princesse…
Il ne faut pas chercher bien longtemps, le palais regorge de mystères.
Une femme, plutôt jeune, j’en suis sûre ! Je vois ses pieds dans ses escarpins de ma cachette, ils ne sont pas tout fripés comme ceux des anciens du village… Coquine jusqu’au bout, j'engloutis mon reste de cookie en une bouchée avant de m’allonger par terre pour essayer de regarder à l’extérieur de notre cachette. Je zieute la scène qui s’offre à moi alors que la menace s’éloigne. Une jolie femme blonde vêtue d’une jolie robe légèrement bleutée portant un large plateau et un homme lui aussi tiré à quatre épingles qui lui tient la porte. J’ai jamais vu des gens aussi joliment habillé ! Je veux la même robe plus tard ! Non plus jolie même ! Ma queue s’agitant de gauche à droite, je commente.
Ils sont partis, enfin, je crois… Mais elle était jolie cette dame, je veux la même robe quand je serais grande ! Juste pour être belle comme elle, le reste du temps, c’est pas pratique.
Contente, je viens reprendre un cookie sur le plateau en m’asseyant face à Allys, ma queue dépassant allégrement hors de la cachette.
" Tu viens de là bas ...? Des terres gelées ?
Comme elle s'était collée contre son amie, son maquillage noir marqua la joue d'Aube. Elles avaient un de ces look franchement, un vrai défilé de mode. Son talent pour les bêtises avait dû même être détecté. Les domestiques les suspectèrent directement. Sa mère était absente alors c'était elle par voie de nécessité. Elle ne pouvait vraiment pas être discrète. Quoi qu'elle puisse faire, on savait que c'était elle. Dans un sens, il valait mieux qu'elle en porte le chapeau. Elle imaginait déjà les rumeurs disant quel faute elle avait commise. Dans son cerveau d'enfant, elle murissait une certaine culpabilité. Elle s'effaça vite face à la réaction d'Aube qui voulut se mettre en tant qu'observatrice. Leurs rôles d'espionnes revenaient. Allys crevait d'envie de lui demander ce qu'elle voyait. Comme elle lui parlait de robe, elle voulut passer la tête. Elle était si impatiente qu'elle fit un "où ça ?" La domestique si joliment vêtue voulut se retourner et ne vit qu'un pan de la nappe retomber. Elle ne chercha pas à en savoir plus. Effectivement, cette robe bleue lui allait si bien même si la petite se disait qu'en rouge elle serait encore plus ravissante. Allys se sentait bête d'avoir manqué de discrétion, ses joues pouvaient en témoigner. Elle avait honte et le cachait en mettant un doigt sur ses lèvres. Il était bien tard pour marquer un silence qu'elle venait de briser, mais tout était dans l'intention, n'est ce pas?
" ... J'ai eu chaud... je suis d'accord, elle est belle, mais en rouge c'est bien aussi. Tu préfères le bleu, toi? "
Sauf qu'elle n'avait pas conscience que la queue de la renarde dépassait de leur cachette, la domestique en portant ses plateaux marcha sur ce qu'elle prit pour une partie de la nappe. De son côté, la petite reine sentait comme des picotements sur ses bras, ses jambes. Bientôt, elle ne serait sans doute plus si petite que cela.
Oui, la dure loi des Terres Gelées, le monde des monstres tous plus sanguinaires et violents dont me parle régulièrement père. Manger ou être manger ! C’est toujours aussi simple chez les animaux. Et je suis à moitié un animal donc ça s’adapte bien à moi. Surtout quand ça m’arrange pour manger des cookies. Alors que les adultes discutent à quelques pas de nous, Allys se tasse contre moi et me questionne à voix basse sur mes origines.
Non, quelle idée. Il n’y a que les méchants qui vivent là-bas ! Père me dit toujours que c’était son rôle d’amener les criminels dans les Terres Gelées, il y a vu plein de monstres gigantesques et méchants !
J’aimerai bien aller voir tout ça un jour ! Les histoires de père sont passionnantes, je veux voir les monstres plus grand que les montagnes qui peuplent mes rêves depuis. Les adultes semblant partir, je me couche par terre pour regarder de l’autre côté. Les deux adultes sont à l’autre bout de la pièce près à la quitter. La robe de la jeune femme me fait envie. Toute simple et d’un joli bleu, elle est si jolie sur elle. Mes commentaires attirent rapidement Allys qui manifeste son intérêt bruyamment. Alors que la jeune fille passe la tête sous la nappe, la jeune femme tourne son regard vers nous. Je me recule d’un coup pour me cacher en même temps qu’Allys. Prenant un coolie pour calmer l’excitation du risque d’être découverte, j’écoute Allys qui me donne son impression sur la robe.
C’était pas loin oui ! Oui, rouge, c’est trop près de la couleur de mes yeux, c’est pas beau !
Un jappement mémorable m’échappe lorsque qu’un poids lourd écrase ma queue. Le poids disparaît aussi rapidement que je jappe à cause de la douleur. Je ramène ma queue devant et masse la zone douloureuse les larmes aux yeux. La nappe se soulève presque aussi rapidement laissant apparaître le visage de la jeune domestique à la robe bleue. Elle fronce les yeux en nous voyant avec le plateau.
Sortez de là toutes les deux ! Qui vous a autorisé à manger les cookies du thé de la sa majesté la reine ?
Mine boudeuse, je quitte la cachette à quatre pattes avant de me relever. Prête à lever les yeux sur la domestique, je constate que je suis finalement presque aussi grande qu’elle. Et elle fait de grands yeux tout ronds.
Oui ?
Je baisse les yeux et me regarde. Ah… Le sol n’était pas aussi loin de mémoire et mon ventre, pas aussi rond… Il me faut un instant pour commencer à remettre les choses à leur place. Une vérité me frappe comme un mur lorsque les pièces se remettent en place dans ma tête. La petite fille avec qui j’ai joué pendant la presque heure passée, c’était Allys… La reine Allys… Mon dieu, qu’est-ce que j’ai fait. Penaude, je passe une main sur mon visage et me tourne vers mon “amie” du jour, ma reine.
Ma Reine… Veuillez accepter mes plus plates excuses pour tout ce qu’il s’est passé sous lors de notre rajeunissement.
Me penchant vers la domestique, je lui souffle à l’oreille quelques mots pour la forme.
Peut-être que vous devriez filer là.
Elle sursaute, surprise qu’on lui adresse la parole. A croire qu’elle n’a jamais croisé un des membres de la famille royale alors qu’elle travaille au palais… En fait, c’est peut-être le cas vu la taille du palais...
" T'es une guerrière, une vraie guerrière" répéta t-elle en lui souriant sincèrement.
Dans la tête d'Allys tout comme une reine transmet son pouvoir, un homme courageux ne peut transmettre que les mêmes valeurs à ses enfants. Plus tard Aube serait pareille tout aussi vaillante, elle en était persuadée. Même son allure intrépide l'inspirait, elle avait voulu l'imiter en bien moins discret. Décidément, elle n'avait pas été digne de la guerrière près d'elle. En voyant que les deux amies venaient de se faire découvrir, Allys eut le réflexe de planquer un peu tard le forfait de leurs actes. Leurs bouches et leurs vêtements présentaient toujours les marques de ce délicieux goûter, mais qu'importe. Elle n'avait pas encore été assez rapide. La petite reine ressortit de sous la table en sentant chacun de ses picotements s'intensifiaient jusqu'à se dissiper. Elle était sans doute restée trop longtemps sous cette table. Tout d'un coup ce fut comme une sorte de bond dans le temps toutes ses connaissances lui revinrent ainsi que les souvenirs de ces quelques minutes. La reine en rougit presque en ne regrettant nullement ces moments d'innocence loin de ses tracasseries royales... mais elle allait éviter de dire ouvertement qu'être un enfant quelques heures lui permettait de se sentir plus légère. C'était comme une sorte de respiration. Allys respira doucement en s'étirant. Elle avait l'impression d'avoir rêvé.. Ce n'était absolument pas le cas de la domestique en face d'elle ni d'Aube d'ailleurs.
" Vous n'avez pas à formuler d'excuses après tout la mission a été un succès que je sache, n'est ce pas" fit-elle en lui faisant un mystérieux clin d'oeil comme si la petite fille au fond d'elle la remerciait silencieusement. Ses mains se croisèrent sur son ventre, elle ne put rire en songeant... que ce qu'elle avait pris pour la chambre de sa mère était la sienne... que donc elle s'était volée elle-même. Elle se mit à faire un petit rire nerveux. " Vous ne vous imaginez pas tout ce qu'il faut entreprendre pour se voler soi-même, c'est un comble. Bon courage à vous pour ce prochain heureux événement... Et si vous voulez des biscuits, vous savez que j'en mettrai de côté en souvenir de notre belle.. rencontre". Quelque part elle n'avait jamais vu Aube de cette façon, c'était comme la connaître à nouveau. Elles avaient été sur un pied d'égalité le plus complet et avaient partagé des moments simples. C'était d'une si grande fraîcheur. " Si vous souhaitez... allons nous promener pour digérer... cette aventure". La reine s'était tournée vers elle en l’attendant avant de poursuivre davantage vers les jardins du palais... Mieux valait repartir de façon naturelle et non terminer cette journée par des excuses... Ce ne serait pas faire honneur à leurs moments passés.