Cette demande fut dire sur un ton las, et Arthorias ne put s'empêcher de soupirer. C'était bien le cinquième serrurier qu'il voyait aujourd'hui et il ne voyait toujours pas qui pourrait faire l'affaire.
Depuis son entrée en fonction, il cherchait activement quelqu'un de confiance pour refaire certaines serrures du palais, ces dernières étant soit vieillissantes soit tout simplement perdues.
Il existait encore des pièces pour lesquelles les clés avaient été perdues ou alors à l'inverse, étaient bien trop nombreuse au gout du capitaine.
Il avait donc fallu chercher quelqu'un de compétent et de suffisamment éloigné de la ville pour ne pas tremper dans les différentes affaires de la pègre locale. Un serrurier loin de la capitale et compétent, une denrée pas si abondante qu'on voulait bien l'avouer. Pire, il avait fallu plusieurs semaines d'envoi de missive pour avoir suffisamment de candidat et donc mener à ce jour de rencontre.
L'officier se tenait dans son bureau, la lumière de l'après midi ayant transformé ses cheveux long en cascade d'or qui tombaient délicatement sur son armure ouvragée.
Le bureau était à l'image de la garde royale, et devant l'officier se tenait un imposant bureau en bois massif gravé aux armoiries royales.
Arthorias observa de façon pensive l'étagère en face de lui, se demandant s'il finirait par trouver la bonne personne, pour le moment il avait encore des doutes sur la moralité de bien des artisans
Il ne fut tiré de ses pensées que lorsque Ciaran toqua à la porte pour lui présenter le dernier candidat
Sax avait cru à un miracle.
En recevant la lettre, elle s’était demandé si Owain s’était souvenu d’elle, étant le seul garde non hostile à son égard, mais il était tout à fait possible que ses petites annonces a fait son petit effet. En tout cas elle était aux anges depuis cette nouvelle.
Et elle s’était préparée à l’entretien comme si elle partait en guerre.
Ses cheveux roux coiffés à la perfection, les lèvres luisantes, elle s’était présenté avec l’une de ses plus belles robes de travail, simple mais suffisamment chatoyante pour faire son petit effet. Si la langue pouvait fourcher, la serrurière espérant que son apparence lui donnerait un air digne et confiant. Elle avait pu récolter peu d’informations sur la personne qu’elle allait rencontrer, connu chez les tabourets comme un homme froid en service et qu’il était marié (ils étaient aussi commères qu’elle).
Ne sachant à qu’elle sauce elle avait être mangé, elle attendit son tour et suivant le garde qu’il l’emmena voir son supérieur, elle se demanda combien il avait pu voir de candidats jusqu’à présent. Lorsqu’elle traversa le seuil de la porte, elle arbora un sourire solaire. La première chose qu’elle nota, ce fut ce bureau imposant, presque autant que l’homme de l’autre côté. C’était donc ça la prestance d’un capitaine. Avec un peu de chance ce bureau pourrait te sortir de l’impasse en cas de pépins. La rousse fit une révérence et déclara :
« Je vous remercie de me proposer cette opportunité de me présenter. »
Et elle le pensait. Sax attendit à une distance raisonnable d’être convié à s’asseoir pour s’exécuter.
C’était une chance inouïe, surtout qu’elle aurait une bonne raison de rencontrer les hautes sphères sans se faire courser.
Le capitaine, remis une mèche de cheveux rebelle en place, faisant un effort pour passer outre les cas qu'il avait eu avant.
Rester professionnel, cette jeune femme valait peut être mieux que les autres
D'un geste de sa main cuirassée il lui fit signe de s'asseoir devant, lui, la fixant d'un œil, l'autre caché par ses cheveux d'or
L'officier passa un oeil sur le dossier devant lui.
-Mademoiselle Saw... Sax Saw. J'espère que le voyage n'a pas été trop dur.
Rebecca devait déteindre sur lui, car il adoptait un ton froid, même s'il voulait être un minimum sympathique.
-Je pense que vous savez pourquoi vous êtes là, mais je me permet de vous le rappeler.
Il pris une petite inspiration, ce n'était que la sixième ou septième fois aujourd'hui qu'il faisait ce discours
-Le palais à besoin d'un nouveau serrurier, le dernier s'étant montré trop laxiste à mon gout.
En somme nous cherchons quelqu'un de compétent et apte à engager des travaux important sur beaucoup de serrures du palais
Arthorias laissa l'annonce faire le tour de la pièce avant de reprendre, s'appuyant un peu plus contre le dossier de son fauteuil, croisant ses mains devant lui pour appuyer son menton dessus.
-Je suis plutôt regardant sur les gens admis ici, alors même si j'ai un dossier sur vous sous les yeux j'aimerai que vous me parliez un peu de vous, et sans penser à un piège quelconque, je suis là pour évaluer si vous correspondez à nos attentes, inutile donc de paniquer.
Bon vu que la serrurière était dans le bureau du capitaine de la garde royale, à l'intérieur même du palais, il comprendrait tout de même quelques cafouillage
Il tenta même un très discret sourire pour l'encourager...
Le tabouret avait raison, le capitaine était de glace.
Pas un regard vers sa jupe ou sa poitrine, Sax en était presque vexée mais elle ne montra rien. Elle mettait son honneur de femme de côté et elle continua de sourire. Les efforts valaient la chandelle.
Assise, la rousse écouta le blond lui décrire la mission qu’il pourrait lui confier, même si elle demandait de temps à autre si une mèche aussi contraignante n’était pas un handicap au combat. Elle ne fit cependant aucun commentaire et hochait la tête de temps à autre, bien concentré sur ses paroles. Elle le regarda si dans ce dossier il était noté la fois où elle a voulu voler quelqu’un et qu’elle s’était faite engueulée par la porte puis par son père. Instinctivement elle se toucha l’épaule qui la brûlait à cette pensée. Ce n’était pas ce qu’elle était.
Sax était une femme qui voulait se marier avec un bon parti pour aspirer au bonheur, c’était peut-être pire.
Mais elle ne perdit pas sa bonne humeur. Peut-être poussée par le léger sourire de son interlocuteur, elle décida de répondre avec conviction, comme elle savait si bien le faire :
« Je suis serrurière depuis beaucoup de temps malgré mon jeune âge. Je suis connue pour parler aux portes et connaître les besoins qu’elles ne veulent jamais avouer. J’ai aussi ramené un présent pour vous montrer l’étendue de mes talents. »
Elle se pencha légèrement pour attraper son sac et elle y sortie une clé et un cadenas. La clé était d’une complexité rare, taillé avec précision et des éléments qui pouvaient tourner et s’enfoncer. Même si le cadenas semblait simple, on pouvait voir via un hublot un travail digne d’un horloger. Elle était fière de cette création et elle le ramenait à chaque fois d’un entretien un peu plus poussée. La jeune femme posa les deux éléments sur la table délicatement et avec un sourire fier elle ajouta :
« Un petit avant-goût, n’hésitez pas à le manipuler ! »
Le charme opérerait devant cette pièce d’orfèvre, les ampoules et les jours de travail en valaient la chandelle.
Avait-il trouvé quelqu'un de fiable ? Difficile à dire mais son instinct lui disait qu'il y avait peut être une chance de trouver quelqu'un de fiable.
Laissant, l'espoir fou d'en avoir fini de côté, l'officier pris le présent dans ses mains, recevant la clé et le cadenas dans ses mains gantées de fer pour mieux l'observer.
Il finit même par se résoudre à les enlever, défaisant adroitement les attaches de son armure pour toucher l'objet à l'aide de ses vraies mains.
Voilà quelque chose que peu de candidat avait pensé à faire.
Arthorias n'était pas un expert, mais il était clair que le travail était minutieux et précis, le genre de chose qu'on ne voit que rarement.
Montrant un réel intérêt, il joua avec les mécanismes avant de finalement reposer le tout sur la table, hochant la tête pour lui même.
-Impressionnant mademoiselle...
Ce n'était qu'un début mais son ton se faisait moins glacé, toujours un peu froid mais la température se rapprochait des positifs.
Mais l'évocation du fait de parler aux portes le fit s'arrêter.
-Vous parlez aux portes ? Expliquez-moi ça ?
Voilà bien quelque chose qu'on ne lui avait jamais sorti... Parler aux portes...
Si c'était bien ce qu'il pensait, cela pourrait s'avérer utile, enfin à voir en fonction de la personne. Loin de la considérer comme folle, il se pencha légèrement sur son bureau, dégageant son regard vairon pour la fixer de ses deux yeux
Les questions de sécurité ne manquaient pas, mais cela attendrait