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    Un monde plein de mystères,
    plein de magie et surtout plein d'aventures...

    Il est peuplé de créatures fantastiques. Certaines d'une beauté incomparable, d'autres aussi hideuses qu'inimaginables, beaucoup sont extrêmement dangereuses alors que quelques unes sont tout simplement adorables. La magie est omniprésente sur ces terres : des animaux pouvant contrôler la météo, des fleurs qui se téléportent, des humains contrôlant les éléments, des objets magiques permettant de flotter dans les airs...

    Dans ce monde, il y a le royaume d'Aryon. Situé à l’extrémité sud du continent, c'est un royaume prospère, coupé du monde. Il est peuplé d'hommes et de femmes possédant tous un gros potentiel magique, chacun vivant leurs propres aventures pour le meilleur comme pour le pire.

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    Mon nom est Lux
    InvitéInvité
    Anonymous
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    Mon nom est Lux
    Sam 16 Nov 2019 - 15:28 #
    Je ne pouvais pas me vanter d’avoir beaucoup progressé dans mon enquête, mais aujourd’hui était un jour capital où j’allais peut-être avoir enfin trouver des pistes de réponses à mes interrogations. Un mois s’était écoulé depuis les funérailles de maman et j’avais commencé petit, posant des questions à des connaissances que je savais bercées dans la religion. Le culte de Lucy n’était pas si mystérieux, il n’avait même rien à cacher en temps normal, mais seule cette cérémonie à laquelle ma mère biologique avait participé, l’étape de sélection de la nouvelle Grande Prêtresse, semblait véritablement entourée d’énigmes. Était-ce alors la partie émergée d’une menace encore plus grande, un jeu bien caché par les religieux dont les apparences ne pouvaient être que trompeuses ou bien s’agissait-il de l’une de ces traditions dépassées qu’ont aussi certaines familles de nobles ? Je comptais, à cet effet, le duel comme archaïque et vain, mais toutefois quelque chose d’encore pratiqué qui expliquait quelques fois pourquoi des sangs bleus étaient balafrés ou estropiés.

    Toujours était-il que, de fil en aiguille, mes recherches m’avaient amenée vers des méthodes d’investigation un peu moins conventionnelles : après avoir épluché tous les livres de la Grande Bibliothèque au sujet du culte, j’en étais réduite à faire appel à des informateurs. Un informateur, en vérité, qu’on m’avait dit « particulièrement bon lorsqu’il s’agit de se faire oublier » ; je n’étais toutefois pas bien sûre de ce que le contact du contact de ma connaissance avait laissé entendre par là.

    Nous devions nous retrouver dans un des villages des plaines, un endroit fabuleux du nom de Berck particulièrement réputé pour son aspect miteux, ses rues sentant bon la fange et le foin et son troquet glauque et sale. Oui, mon contact m’avait donné rendez-vous dans une taverne au beau milieu de nulle part, dans laquelle je m’étais déjà installée en convenant d’une de ces fameuses tables que l’on retrouve dans tous les rades : celles un peu dans l’ombre, mais pas trop, qui vous permettent à la fois d’avoir une vue imprenable sur le reste de la pièce sans être vu. Et oui, derrière le comptoir se trouvait un barman qui, avec un chiffon sale, essuyait ses verres crasseux en assassinant ses clients d’un regard noir, même si ceux-ci pouvaient être comptés sur les doigts de la main. Un tableau, somme toute, très original et jamais vu ailleurs.

    Je n’avais pas poussé le vice jusqu’à me draper d’un cache-poussière à capuche qui aurait très bien pu me tomber sur les yeux et me couvrir la moitié du visage. Non et puis de toute façon je n’avais aucune raison de me cacher. Pour mon enquête, je me présentais systématiquement sous un nom d’emprunt : Lux, Lux Bocceli, inspiré d’un des surnoms que je tenais de l’époque où j’avais découvert mon pouvoir, à l’Académie.

    J’attendais donc sur cette table poussiéreuse et sale, une choppe de bière à la main, que l’informateur arrive. Je n’avais aucun élément me permettant de le reconnaître, mais apparemment je n’en avais pas besoin : il saurait me retrouver. J’espérais que l’affaire était sérieuse et que je ne m’étais pas déplacée pour rien, que ce n’était pas un de ces fichus pièges de bandits et qu’ils ne seraient pas dix à m’attendre dehors pour me faire les poches. Je n’avais rien sur moi de toute manière, j’étais totalement en civil avec, pour seule arme, mon poignard que je conservais attaché à mon mollet droit, sous mes chausses.

    Un certain temps passa, peut-être cinq minutes ou peut-être quinze, avant qu’un nouveau client ne pénètre dans l’établissement. Comme le barman conserva sa mine patibulaire, je compris que lui non plus n’était pas du coin et qu’il devait s’agir de l’homme que j’attendais. C’était un assez grand gaillard affublé d’une mine sombre encadrée par des cheveux noirs et une épaisse barbe mal taillée. Ses vêtements, communs et en mauvais état, laissaient entendre qu’il n’était pas de la haute et sa posture permettait de deviner qu’il n’avait jamais été membre de la Garde. Il pouvait aussi bien s’agir d’un malfrat que d’une petite frappe de la Guilde.

    En silence, l’homme marcha vers le comptoir, y posa un coude et commanda d’une voix trop basse pour que je puisse en entendre les sonorités. Puis, je le vis se retourner légèrement et sonder discrètement la salle jusqu’à ce que son regard croise le mien, occasionnant alors une lueur de compréhension pratiquement imperceptible au fond de ses yeux.

    Son verre servi et payé, l’inconnu se dirigea alors vers moi et s’attabla sans mot dire, me faisant à présent face. Finalement, comme il ne semblait pas disposé à briser le silence, je décidai d’entamer les présentations :

    « - Alors c’est vous, l’informateur dont on m’a vanté les mérites ? Vous pensez vraiment pouvoir m’aider à en savoir plus sur un évènement qui s’est déroulé il y a trente ans ?  »
    Vrenn IndraniSbire
    Vrenn Indrani
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    Re: Mon nom est Lux
    Lun 18 Nov 2019 - 15:31 #

    Assis à la table de cette taverne minable, dans ce bled infâme, j’jauge la nana qui me fait face. Droite, élancée, blonde, grosse cicatrice au visage. Elle respire pas la joie de vivre et la sympathie, mais en même temps, on n’est pas là pour ça, puis j’me méfie des gens trop sympathiques. Toujours l’impression qu’ils préparent une embrouille, j’crois. Enfin, j’me méfie des autres aussi, cela dit…

    J’me demande presque ce que j’fous là. Mais c’est ça, dans ma branche, on aime bien rendre service, pour peu que ça ait un intérêt. Là, en dehors de l’éventuelle bourse que j’pourrais toucher, on m’a fait comprendre que ce serait de bon ton de rendre service. Y’a des fois, comme ça, un boulot te trouve et tu peux jamais courir assez vite pour y échapper.

    Donc sur le chemin du retour d’une mission médiocrement intéressante d’Examinateur de la Guilde, c’que j’fais sur mon temps officiel, j’fais escale à Berck, un triste endroit pour des gens pas bien rigolos. D’après les rumeurs, ils se reproduisent entre eux et essaient de pas trop se mêler aux étrangers, qui sont quasiment des sangs impurs à ce stade.

    À voir le faciès un peu plat du tavernier et la tronche qu’il tire, j’suis pas loin d’y croire.

    Mais la vérité, c’est que tous les bleds moisis de la province se ressemblent, les gens s’y ressemblent et sont à peu près tous aussi cons. Y’a bien qu’à la Capitale que le niveau s’élève un peu, ou dans les autres grandes villes du Royaume. Sinon, c’est bas du front, pas bien agréable, et en plus ça sent pas bon. J’me note mentalement que j’suis p’tet de mauvais poil suite à ma mission d’examinateur, quand même, et de tâcher de faire un effort.

    J’entends la question. Mmh. J’goûte ma bière. Au moins, elle est bonne.

    « Ça peut s’faire, ça dépend du contexte. »

    C’est sûr que trouver le meurtrier dans une maison-close de la Capitale, c’est peine perdue : ça bouge trop vite. Mais dans certains autres cas, ça peut être jouable.

    « J’ai quelques contacts parmi la Garde, si y’a besoin. »

    Y’a toujours des gens prêts à se laisser graisser la patte, comme il se doit.

    « Mais c’est pas pour ça que t’es là, j’me goure ? Nan, j’ai aussi des amis un peu partout ailleurs. J’garantis rien, là, comme ça, mais j’peux creuser, si ça vaut le coup. »

    J’me sens mal à l’aise, dos à la salle, surtout qu’elle passe son temps à regarder ce qui se passe derrière moi, donc ça me stresse. Finalement, elle se décide à prendre la parole, alors que ses mains enserrent sa pinte.

    « C’est pour une mort au sein de l’Ordre de Lucy. »

    Uh-oh. Voilà qui devient assez intéressant. J’fais un rapide inventaire mental. Premier cercle, rien, j’connais personne qui y soit directement. Deuxième cercle, quelqu’un qui aurait de l’influence ou pourrait m’introduire ? Ouais, j’suis quasiment sûr que j’ai ça. Et j’suis à peu près certain que j’ai entendu dire que le Culte de Lucy trempait pas forcément uniquement dans la religion, mais aussi dans des affaires un peu plus limites. Rapport à l’influence qu’ils ont, ça. J’crache dans la sciure qui recouvre une partie du sol.

    « Lucy, y’a trente ans ? Putain. »

    J’m’arrête quelques instants.

    « Ça coûtera plus cher, j’pense. En frais opérationnels. Et j’peux rien garantir, faudra probablement graisser des pattes. »

    Au-delà du fait que j’ai pas le choix, la mission semble assez intéressante, surtout si elle permet de foutre le pied dans la porte du Culte. On sait jamais ce qu’on peut y trouver, après tout.

    « J’vais voir ce que je peux faire, mais il me faut davantage d’informations. Toutes les informations possibles, d’ailleurs. Prénom et nom de la victime, évidemment, histoire détaillée si possible, parce que si c’est vieux d’une demi-vie, il restera plus grand-monde à qui causer. Et tout ce qui peut servir. Signes distinctifs, description physique, et cetera. »

    J’bois la moitié de mon godet. Allez, balance.
    InvitéInvité
    Anonymous
    Informations
    Re: Mon nom est Lux
    Mer 20 Nov 2019 - 22:07 #
    Des contacts parmi les gardes ? Je ne pus contenir un léger rétrécissement des paupières à cette assertion avant de redevenir totalement placide pour ne rien dévoiler de ma condition de Garde. L'individu semblait malin et, même s'il était là pour répondre à ma demande, je m'en méfiais toutefois comme de la peste. Je me contentai de me limiter au strict nécessaire en guise d'informations et lui dévoilai la raison de sa présence, ce qui ne manqua pas de le surprendre quelque peu.

    Je ne dis rien lorsqu'il mentionna un possible gonflement des prix, je me conservai pour la suite lorsque vint la nécessité pour lui d'en savoir plus. Il voulait connaître mon histoire et je comptais bien la lui servir, largement taillée et résumée, mais véridique dans les faits.

    « - Ma mère est entrée au sein du Culte peu après ma naissance. Après une grossesse non désirée, elle ne pouvait s'occuper de moi et souhaitait rentrer dans les Ordres, elle m'a donc confiée à son frère. Elle ne donna plus aucune dès lors et disparut à l'occasion de la cérémonie de nomination de la Grande Prêtresse qui s'est déroulée il y a tout à fait trente ans. Je n'ai appris que très récemment les raisons de sa « mort » et souhaite savoir ce qui a emporté ma mère alors. »

    Je marquai un temps d'arrêt : était-ce suffisant ou devais-je poursuivre ? Le visage de mon interlocuteur n'exprimait aucune émotion et ne me permettait pas de savoir s'il voyait clair dans mon jeu ou non. Finalement, dans l'optique de montrer que j'étais bien dans le même camp que lui, je rajoutai une nouvelle semi-vérité :

    « - Naturellement, la Garde n'a pas souhaité me renseigner lorsque j'ai mis le doigt sur les meurtres survenus à l'occasion de la cérémonie et l'absence d'investigations à l'époque. Je dois donc emprunter des moyens dérobés aujourd'hui et c'est pour cette raison que... Enfin, voilà. »

    Je bus une gorgée de la bière que je n'avais pas touché jusqu'à présent : le goût était infecte, à l'image de l'endroit, même si mon informateur semblait toutefois s'en délecter. Je supposais donc qu'il avait l'habitude de traîner dans des rades où on sert ce genre de jus de chaussette.

    Au bout d'une minute, comme il ne dit rien et semblait toujours m'écouter, en attente d'informations complémentaires qui tardaient à venir, je rajoutai enfin :

    « - Avant de venir vers vous, j'ai quand même épluché par mal de registres à la Bibliothèque. J'ai appris beaucoup de choses sur le Culte, mais rien qui ne me permette d'y voir plus clair sur cette cérémonie qui existe pourtant depuis une éternité. C'est comme si tout ce qui la concernait était automatiquement passé sous silence. »

    Le bonhomme afficha alors un air contenté, signe que je venais de toucher une corde sensible. Visiblement, il appréciait le mystère et le défi qui l'attendait, et peut-être se satisfaisait-il de comprendre qu'il était mon dernier atout ?

    « - J'vois, » dit-il, toujours dans un demi-sourire. « T'as frappé à la bonne porte, même si ça s'ra pas de tout repos, c'est sûr. Et pas gratuit, ça non, mais j'te ferai pas payer avant d'avoir quelques résultats à t'mettre sous la dent. Considére ça comme un gage de confiance. »

    J'opinai du chef, bien qu'assez peu convaincue. Le gaillard semblait assez bon négociateur et je me doutais que je devrais payer le coût de sa confiance tôt ou tard. Mais apparemment ça n'était pas encore à l'ordre du jour et je pouvais me reposer sur lui cette fois-ci.

    « - De toute façon, il n'était pas prévu que je vous dédommage dès aujourd'hui. Mais je pense en effet que vous ferez le nécessaire et, dans ce cas, il va de soi qu'une rémunération conséquente sera à la clé. »

    À ces mots, le sourire de mon partenaire disparut, mais la lueur cupide qui éclairait son regard continua à briller. Au fond, ce n'était pas que ses intérêts financiers qu'il souhait servir, même si ses raisons personnelles d'enquêter sur le Temple m'échappaient.
    Vrenn IndraniSbire
    Vrenn Indrani
    Informations
    Re: Mon nom est Lux
    Lun 25 Nov 2019 - 15:58 #

    Le résumé, c’est que la thune va rentrer. Ça m’semble bien être un minimum, d’ailleurs, et puis j’crache pas sur un peu de défi, quand ça a l’air rigolo. Par contre, un truc vieux de trente ans dans le Culte de Lucy… Le turn-over doit pas être si important, les seules vraies morts, c’est l’intronisation des prêtresses. Vrai qu’on considère ça comme acquis alors que ça doit pas forcément l’être. J’me demande s’ils tirent à pile ou face pour savoir qui a la faveur de la déesse, ha.

    « Par contre, je souhaite participer à l’investigation, ajoute presque négligemment l’inconnue. »

    Ah. Ça veut me traîner dans les pattes et inspecter la qualité de mon boulot, on dirait. Ou…

    « Pourquoi ? Pas confiance ou trop curieuse ? Ou t’as succombé à mon charme, p’tet ? »

    On sait jamais. J’perds rien à la titiller, de toute façon, c’est elle qu’a l’air d’avoir besoin de moi. Et ça m’en dira possiblement davantage sur elle. Elle manque pas un battement de cœur avant de répondre, visage neutre.

    « Manque de confiance, malgré les assurances qui m’ont été fournies, et curieuse des méthodes employées pour parvenir au résultat. Et m’assurer que mon investissement est utilisé à bon escient, évidemment.
    - ‘Vous inquiétez pas, les réputations tombent rarement de nulle part. »

    J’adresse un signe au tavernier, qu’il me remette la même. L’autre picole pas trop, p’tet distraite par l’enjeu, encore que j’ai connu des portes de prison plus jouasses. Reste un dernier sujet à aborder, celui du pouvoir. Sinon, j’suis pas près de me faire payer. Ça m’était arrivé, une des premières fois, la nana m’avait totalement oublié, et elle trichait même pas. Pas moyen de toucher mon salaire, du coup. J’me suis contenté de rentrer chez elle par effraction et de me servir, il restait plus que ça à faire.

    « Et faut que j’te prévienne. D’une, si tu veux participer à mon enquête, j’vais te tutoyer comme collègue. »

    Pousser les limites, toujours pousser les limites quand on peut. J’continue sans attendre de réponse.

    « Et deuzio, probablement plus important, j’te conseille de prendre des notes. Mon pouvoir fait que j’ai tendance à sortir de la tête des gens. Tu penses p’tet que t’as une bonne mémoire ? Ca changera rien. Donc écrit de façon fiable pour toi, et reconnaissable, que j’bosse pour toi là-dessus. Sinon… sinon c’est chiant, y’a juste à savoir ça. »

    J’lui tends un bout de parchemin et une plume que j’puise dans un de mes petits sacs sans fond. Elle peut bien faire du code, une signature rigolote, ce qu’elle veut, tant qu’elle se rend capable de croire ce qu’elle va gratter à la plume.

    « Il n’est pas possible de le désactiver ?
    - J’ai jamais trouvé comment, en tout cas. »

    Et j’suis même pas sûr que j’le voudrais. A force, j’me terre dans mon anonymat comme sous une bonne couette, et le sentiment d’impunité qui va avec est devenu une sale habitude par moments, j’ai l’impression.

    « Il va me falloir quelques jours à secouer quelques arbres, fouiner à droite à gauche, histoire d’avoir un début de piste à suivre. Tu seras pas avec moi pour cette partie-là, pour tout un tas de raisons. Ça peut être des gens qui veulent pas être vus, connus, des gens qui doivent quelque chose, ce genre de trucs. »

    Genre des types que j’vais extorquer ou faire extorquer. C’est un p’tit monde dans lequel j’vis, et bien balaise est celui qui doit rien à personne. D’ailleurs, généralement, c’est le chef, et il doit rien à personne parce que personne peut le forcer à quoi que ce soit. Une position agréable, si on aime bien vivre en regardant par-dessus son épaule en permanence pour les couteaux tirés.

    « Bien sûr, dès que j’ai un début de concret, j’te contacte… »

    La voix baisse et se tait quand j’me dis qu’on va devoir mettre ça en place.

    « On peut passer par notre ami commun. J’lui laisserai une lettre pour toi. Tant qu’on y est, on peut aussi faire des présentations un peu plus formelles. J’m’appelle Vrenn. T’es pas obligée de l’écrire pour t’en rappeler. Et toi, chère employeuse ? »

    J’pose ma question avec une pointe de moquerie, parce que j’ai hâte de ce que j’vais entendre. Les quelques jours à creuser servent aussi à en apprendre davantage sur mon employeur, après tout.

    « Mon nom est Lux. Lux Warren. »

    ***

    Quelques jours plus tard, à la Capitale, il pleut comme vache qui pisse. Blotti sous un porche, j’regarde les gouttes tomber en attendant ma très chère employeuse et maintenant éminente collègue histoire qu’on trouve ce dont elle a besoin. Le vieux Jehan a la réputation de connaître beaucoup de gens, mais d’être assez dur en affaire, et surprenant dans ses demandes. Mais ça devrait être instructif.
    InvitéInvité
    Anonymous
    Informations
    Re: Mon nom est Lux
    Sam 30 Nov 2019 - 16:51 #
    Que faisais-je là, en réalité ? Aucune idée, mais j'avais reconnu mon écriture, quelque chose dont je ne me souvenais pas. Cette lettre, était-ce moi qui l'avais réellement écrite ? Assurément, je lisais avec confiance les arabesques de mes « F » et mes « P », persuadée que jamais personne ne serait parvenu à les répliquer. Bon, mais à qui avais-je à faire alors ?

    En tout cas, il y a avait bien une chose que j'avais noté et qui ne trahissait pas que j'étais bien la signataire d'un tel acte : Je me suis présentée comme étant Lux Warren, ne donne jamais ton vrai nom.

    D'une logique implacable dans ma façon de penser : je devinais par cette identité secrète que je ne pouvais non plus faire totalement confiance à mon interlocuteur. Celui qui avait un don pour se faire oublier, avais-je alors écrit. Et ça, je m'en souviendrais...

    Le temps n'était pas au beau fixe et les nuages lourds d'humidité déchargeaient à foison leur fiel aqueux sur les pauvres têtes des habitants de la Capitale. J'avais prévu ma nuit à la Caserne dès lors que Raymond m'avait donné le tuyau et il me suffisait à présent de rejoindre le point de rendez-vous ; un endroit oubliable et oublié de la ville, quelque chose à l'image de celui qui m'attendait, abrité là pour se protéger du vent. Suspicieuse, je le rejoignis après quelques secondes d'hésitation, prenant place sous le porche, quand bien même la capuche de mon cache-poussière me couvrait déjà le sommet du crâne.

    « - C'est vous, c'est ça ? Celui dont parle la lettre...

    - C'est moi et, comme on travaille ensemble, on va s'tutoyer si ça t'gêne pas. »

    Je détaillais le bonhomme du regard, comme j'aurais pu le faire la fois précédente. Tout cela était bien étrange et pourtant j'avais le sentiment qu'il y était habitué. Du coin de l’œil, je zieutai rapidement le bout de papier avant de rehausser le regard : non, il était fidèle aux descriptions que j'en avais fait. Soit...

    « - Très bien. Apparemment tu es le contact de notre ami commun, celui qui va m'aider à en savoir plus sur toute cette histoire avec le Temple. Tu as une idée de ce qui va suivre ? »

    L'étranger resta silencieux ; je ne connaissais même pas son nom et si je l'avais su un jour, il ne figurait cependant pas dans la lettre. Je restai impassible, dans l'expectative, puis finalement le gaillard me fit signe de le suivre.

    « - J'ai un informateur qui pourrait avoir des pistes à nous mettre sous la dent. Moi j'l'appelle par son prénom mais d'autres l'connaîsent plus sous l'nom de Jéjé les Bons Tuyaux, si ça t'parle. Comme t'es là, c'est l'occasion d'aller le questionner à deux : j'poserai les questions et toi t'auras juste à avancer, rien de compliqué.

    - Ah car c'est à moi de payer pour tes magouilles ? Je pensais juste régler une fois tout cela fini.

    - C'toi qui a tenu à tremper d'dans hein. D'toute façon les frais opérationnels auraient été compris dans l'prix à la fin. Pourquoi, t'as pas de quoi payer ? » demanda le bougre, stoppant sa marche et me dévisageant froidement. Je commençais à déceler, dans son expression de distance et d'indifférence, une cicatrice découlant de son vécu. Il n'en restait pas moins patibulaire à ce moment précis.

    En guise de réponse et pour m'éviter mille mots, je sortis de ma poche une bourse bien dodue de cristaux, consciente que je prenais un risque certain en montrant cela à un escroc potentiel. Pouvais-je seulement me faire confiance ? Cela eut toutefois l'effet escompté et le bonhomme reprit la marche.

    Après une quinzaine de minutes passées à vagabonder dans les ruelles désertiques du Quartier Est, nous arrivâmes plus au nord dans un endroit légèrement plus animé malgré le temps pluvieux. Des boutiques s'alignaient maladroitement dans un désordre de matériaux bon marché d'un côté comme de l'autre de la rue et je suivis mon camarade de près. Finalement, celui-ci bifurqua sur sa droite, rejoignant le boui-boui d'un restaurateur exotique et s'enfonçant aussitôt dans l'arrière boutique.

    Sur ses talons, je découvris une partie du magasin qui n'était pas visible au public et qui n'avait plus rien à voir avec l'activité de base du traiteur : cela ressemblait à un cabinet de médecin et nous étions vraisemblablement dans une sorte de salle d'attente.

    « - Prépare toi à aligner les cailloux, Jéjé crachera rien s'il pense qu'on est pas sérieux. » m'annonça le gaillard taciturne tout en toquant à la porte en fer qui séparait les chaises sur le mur qui nous faisait face.

    L'écho des coups légers ne donna d'abord aucune réponse, puis après un temps qui parut infini le pan d'acier se souleva et laissa s'infiltrer un rayon de lumière jaune baignant dans une épaisse fumée blanche. Mon compagnon entra le premier et je le suivis une fois de plus, les sourcils froncés, pénétrant dans un océan d'odeurs de tabac où il nous attendait là, confortablement sur son siège, un épais bureau en bois le séparant de nous.

    Jéjé les Bons Tuyaux. L'imposant, massif, terriblement obèse, Jéjé les Bons Tuyaux.
    Vrenn IndraniSbire
    Vrenn Indrani
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    Re: Mon nom est Lux
    Sam 7 Déc 2019 - 12:22 #

    Quand on entre, il lève les yeux de son bureau massif en acajou. Le truc est couvert de parchemins, des petits, des grands, des bien écrits, des mal écrits, et la majorité est codée aec un système que Jéhan est le seul à connaître. C’est ses notes, sa base de travail, ce sur quoi il se base pour déduire tout ce dont il a besoin pour tisser les liens entre les événements et sentir dans quel sens le vent souffle. J’ai déjà eu recours plusieurs fois à ses services, et lui aux miens. J’suis à peu près sûr d’ailleurs qu’un papelard porte mon nom, mais tant que personne d’autre tombe dessus…

    Il nous adresse un sourire de requin, qui plisse la peau autour de ses petits yeux porcins. Une nuance de bleu pâle assez surprenante d’ailleurs, dans son visage bouffi. Il croise les boudins qui lui servent de doigts devant lui, et nous observe tranquillement tandis qu’on s’asseoit dans les deux sièges à disposition. J’sais que y’a un service d’ordre capable d’entrer à tout moment si nécessaire, mais personne s’en prend à Jehan : il est neutre, et il n’aime que l’argent, mais surtout il évite de froisser les gros.

    « Bonsoir, installez-vous, installez vous. »

    Sa voix est riche et grave, presqu’au point de résonner dans les cages thoraciques de ceux qui l’écoutent. L’avantage d’avoir du coffre, j’suppose.

    « C’est pour le Temple, que j’dis.
    - Même pas une petite présentation ? »

    J’ai un sourire qui touche pas mes yeux.

    « Est-ce vraiment nécessaire ? Parce que si c’est le cas, on n’est p’tet pas à la bonne adresse, hein. »

    Il a un petit rire.

    « C’est vrai, c’est vrai. Je sais tout de la jeune femme, Lux Warren, ainsi que du jeune homme, que nous ne nommerons pas. Mais ce n’est pas mon genre de divulguer des secrets. Ou, en tout cas, pas gratuitement. »

    Nous y voilà. J’jette un coup d’œil à ma voisine, stoïque, qui observe le gros informateur. Va être temps de montrer que t’en as dans la bourse, ma jolie.

    « Justement. Le Temple.
    - Aaaah, le Temple. C’est compliqué, complexe, et assez peu rémunérateur, d’aller chercher des informations sur son fonctionnement interne, au-delà de ce qui est de notoriété publique. »

    J’fais un signe de tête, mais Lux a suivi le sous-texte. Elle dépose une petite bourse sur la table, légèrement entrebaillée pour qu’on puisse voir l’éclat des cristaux qui s’trouve dedans.

    « J’ai pu retrouver la trace de quelqu’un qui pourrait être disposé à servir d’informateur. Disons que j’ai les moyens de le convaincre d’être dans de bonnes dispositions à votre égard, même si au final cela ne dépendra que de vous. »

    Une nouvelle bourse rejoint la première. Il reste silencieux. Avec un soupir, la nana en rajoute une troisième. Il sourit à nouveau, avec autant d’émotions que la première fois.

    « C’est l’histoire d’un homme. Enfin, un jeune garçon d’abord. Orphelin, il a été recueilli par une matronne qui s’est soigneusement occupée de lui jusqu’à ses cinq ans environ. Enfin, soigneusement… Disons qu’il avait quelque part où dormir et un repas chaud par jour. Puis un homme est arrivé, a donné une bourse pas si différente des vôtres et la femme et est reparti avec le garçon. Ce dernier a ensuite commencé à jouer à de nombreux jeux assez drôles pour un enfant. »

    J’sais pas pourquoi, j’sens que j’sais vers où cette histoire va.

    « Vols à l’étalage, coupage de bourses, intrusion dans des propriétés privées… Puis quand sa taille est davantage devenue un handicap –le gaillard faisait bien deux mètres à seize ans-, il a été… comme diraient les nobles, réorienté vers une autre filière. »

    Casseur de têtes, j’suppose.

    « Donc il a appris à se battre, tout en sachant déjà se déplacer tout à fait discrètement. Pour abréger, il est devenu assassin, et a eu une carrière assez courte d’une quinzaine d’années, mais très fructueuse. Il s’appelait Nathanaël, mais on le connaît désormais sous le nom de Frère Nathan. Il travaille au comité d’organisation du choix de la haute-prêtresse de Lucy, à la Capitale. »

    Un point d’entrée, donc.

    « Tout ça était bien entendu il y a une quarantaine d’années, c’est maintenant un homme d’un certain âge. »

    Jehan ramasse les trois bourses et les fait tomber dans un des tiroirs de son bureau avec un air tout à fait satisfait.

    « Je ne vous accompagne pas jusqu’à la sortie, vous trouverez bien. Attention à la marche en sortant, et au plaisir de faire affaire avec chacun d’entre vous. »

    Congédiés avec nos informations et un peu moins d’argent, on sort sans un mot, des fois qu’il ait moyen de nous écouter. J’espère que Lux est contente, parce que même si ça a coûté un prix certain, l’information vaut son pesant d’or. Ironiquement, il n’y a pas la moindre marche jusqu’à la sortie, signe de l’humour tordu de Jehan, et j’sens que la nana est un peu perturbée par ça.

    « Bon, plus qu’à rencontrer ce Nathanaël, pas vrai ? »

    Enfin, plus qu’à… Disons qu’il faudra le convaincre.

    Mais j’sais généralement trouver les bons arguments.
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    Re: Mon nom est Lux
    Sam 14 Déc 2019 - 12:40 #
    Je restai hébétée de l'entretien. De son début surtout, cherchant et recherchant dans ma mémoire ce qui avait pu faire fuiter mon identité secrète auprès d'un tel homme. J'avais le sentiment d'avoir un pied dans la mafia à présent et cela ne me plaisait guère, mais il fallait faire avec. Qui sait ce que Johan ferait de l'argent que je lui avais versé, derrière ; rien de bon pour la Garde en tout cas. Mais je devinai qu'il n'était pas évident de neutraliser un tel homme et découvris pour la première fois qu'en m'étant lancée dans cette aventure, j'avais fait une croix sur la légalité de mes actes, sur la mise en évidence de preuves potentielles pouvant incriminer le responsable de la mort de ma mère biologique.

    J'étais pieds et poings liés au final même s'il n'en paraissait rien, lorsque je suivais mon comparse qui semblait bien avoir quelque chose derrière la tête. Tandis qu'il me posait cette dernière question, je voyais bien luire dans son regard une forme de curiosité morbide et dans son comportement quelque chose qui reflétait un intérêt personnel.

    « - Oui, si ce n'est que le comité dont parlait notre informateur a été réformé il y a trente ans, après la dernière cérémonie... »

    Je m'étais documentée en amont. Et là nous possédions un grand nombre d'informations sur l'individu, mais rien qui nous permette de savoir où le trouver. Notre meilleure option était donc de se rendre directement au Temple en espérant trouver le bonhomme.

    J'informai l'inconnu, dont je peinais toujours à me remémorer le nom, de l'état des choses, l'invitant finalement à faire le voyage le lendemain car la journée était bien avancée et les routes du Sud n'étaient pas forcément sûres de nuit. Même si les sentiers des montagnes étaient autrement plus périlleux et si je les empruntais quotidiennement, j'ignorai les aptitudes de mon compagnon en matière de combat, face à une meute de Wargs.

    « - Si j'ai bien compris, je t'oublierai à nouveau si nous nous séparons. Je propose donc passer la nuit ensemble à l'auberge. Dans une chambre avec des lits séparés, évidemment. Il serait regrettable que mes souvenirs d'aujourd'hui s'évaporent dans la nature : à ce stade-là, je ne sais pas si je parviendrais à te croire, ni même à croire une lettre écrite de ma main.

    - Ouais, ça m'va. J'connais un établissement pas loin d'la Porte du Temple s'tu veux. J'connais le propriétaire, il nous f'ra un prix. »

    Me questionnant en pensées sur la nature de cette offre avantageuse, j’acquiesçai sans faire de vagues. À présent, je semblais avoir mis un pied dans un lac d'ennuis et je me voyais déjà continuer à avancer jusqu'à barboter, l'eau au niveau des épaules.

    Le temps de se rendre à l'endroit décrit par le gaillard, une bonne heure était passée et le soleil commençait progressivement à s'éteindre au-dessus de l'horizon. Une lumière orangée baignait les maisons en briques du quartier sud de la Capitale et ce fut véritablement à côté de la porte sud que nous trouvâmes « l'Auberge du Temple ».

    « - Le hasard fait bien les choses... » murmurais-je alors que j'emboitais le pas à mon comparse, déjà passé dans l'entrée.

    La baraque ne payait pas de mine, aussi bien à l'intérieur qu'à l'extérieur, et le visage patibulaire du tenancier n'inspirait pas confiance, ni ne respirait la joie de vivre d'un gentilhomme fortuné. C'était comme si la lie des Bas Quartiers s'était donnée rendez-vous ici il fut un temps avant de disparaître, ne laissant qu'un établissement vide, triste et maussade.

    « - C'que j'peux faire pour vous ? »

    Je laissai mon compagnon œuvrer. Celui-ci s'approcha du comptoir derrière lequel le gérant se tenait, usant de son cure-dent pour se nettoyer le dessous des ongles, avant de le remettre dans sa bouche. J'affichais une mine dégoutée, mais bien heureusement son regard n'était pas rivé sur moi.

    « - Salut Perry. 'Nous faudrait une chambre pour c'soir 'vec deux lits.

    - Deux lits ? Mmh... » jaugea le bonhomme tout en me zieutant par dessus l'épaule du brun. « Oué, j'ai ça... Ça vous f'ra cinquante cristaux noirs chacun. »

    Je restai stoïque, mais mon comparse sourit. Non loin, sur l'épais comptoir, se trouvait un bloc-note et une plume qu'il saisit alors tous deux et utilisa pour griffonner des mots que je ne pouvais lire depuis ma position. Il arracha sitôt une des feuilles et la fit glisser jusqu'à l'aubergiste.

    D'abord sceptique, le gusse écarquilla ensuite de grands yeux, le visage crispé et la bouche tordue.

    « - J'pense qu'on peut s'arranger, t'en dis quoi ? Tu nous fais ça gratos pis j'dirai rien et aux aurores on s'ra partis. »

    Immobile pendant une bonne minute, le gérant demeura coi avant de finalement se retourner difficilement et saisir une clé dans une petite boite en bois fixée au mur, derrière lui.

    « - Troisième chambre à droite. Que j'vous revoie plus.

    - T'en fais pas, c'comme si tu nous avais jamais rencontrés. » ricana mon camarade avant de partir en direction d'une porte, à droite du bar.

    Je le suivis sans faire de cas et ne me permis qu'un seul commentaire, lorsque nous arrivâmes devant la porte de nos quartiers pour la nuit :

    « - Ce n'est pas la première fois que tu lui fais le coup, n'est-ce pas ? »
    Vrenn IndraniSbire
    Vrenn Indrani
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    Re: Mon nom est Lux
    Dim 22 Déc 2019 - 12:36 #

    La question n’appelle pas vraiment de réponse, alors je me contente de hausser les épaules avec un p’tit sourire moqueur. L’ironie, c’est qu’elle va probablement se demander si elle m’a déjà payé plusieurs fois, ce qui a pu se passer d’important qu’elle aurait pu oublier… Une saine paranoïa, m’est avis, quand on traite avec des sales types. Et pourtant, j’suis plutôt du côté de ceux qui sont réglos dans leurs traitements.

    En tout cas, la chambre est basique, deux lits qu’il est possible de coller si on le souhaite, un bassin d’eau, une fenêtre dont la vitre n’a pas dû être lavée depuis quelques années, ce qui n’est pas plus mal vu que y’a pas de rideau, et un genre d’armoire de rangement dont on va pas se servir. J’pense pas non plus qu’on va rapprocher les lits, vu le pyjama quasiment intégral que Lux porte. J’hésite à expliquer que j’dors exclusivement nu, mais elle a pas l’air très rigolote.

    « Tu penseras à te réveiller suffisamment souvent dans la nuit pour regarder mon doux visage, hein ? J’veux pas me retrouver avec un poignard entre les côtes au petit matin. »

    Ça pourrait arriver bien plus que j’veux y croire. Raison numéro un : elle a le gros des informations dont elle a besoin, et mon expertise vaut p’tet pas le risque de se trimballer avec un mec manifestement pas net comme moi. Raison numéro deux : elle dort profondément, se rappelle pas de moi, me plante. Raison numéro trois : elle est somnambule.

    Ouais, bon, okay, j’avoue que j’exagère un peu. Toujours est-il que j’dors jamais que d’un œil, surtout en charmante compagnie.

    D’ailleurs, elle a écouté mon conseil, parce qu’elle incline sont oreiller contre le mur de sorte à toujours me garder dans son champ de vision. Elle se méfierait de moi ? Voilà une excellente décision, hé.

    « Bonne nuit, Lux, à demain.
    - Oui, bonne nuit. »

    J’sens que j’arrive déjà à faire fondre la glace, mes grands talents humains.

    ***

    Le lendemain matin, on a tous les deux le visage un peu creusé par les cernes, mais globalement, c’était pas si pire. Elle a l’air un peu désorientée en ouvrant les yeux et en m’apercevant, mais ça passe assez vite. Après qu’on se soit tous les deux débarbouillés, j’la regarde bien en face.

    « Tu t’souviens ?
    - Oui, c’est bon.
    - T’es sûre ? J’veux pas de saloperies pasque t’as pas confiance.
    - Je n’ai pas confiance depuis le début.
    - Bon point. »

    Au moins, l’aubergiste se rappelle de la femme, donc il ergote pas plus que ça quand on se sert au petit-déjeuner, avant de partir sans payer. J’pense qu’il est même assez soulagé, et qu’il a dû brûler ce que j’ai écrit sur le parchemin hier soir pour être sûr de pas laisser de traces. Bientôt, tout ça ne sera qu’un mauvais souvenir, puis plus de souvenir du tout…

    Une fois dehors, il fait frisquet mais un temps superbe. Et j’me résigne à l’inévitable : va falloir chevaucher. C’est que le Temple est pas la porte à côté, et qu’aucun de nous n’a visiblement de pass pour permettre de se téléporter au plus près. Va vraiment falloir que j’en achète un, ne serait-ce que pour m’épargner la souffrance intense de devoir fréquenter ces animaux de malheur.

    J’endure stoïquement, quand Lux choisit les chevaux après m’avoir demandé si j’sais monter. J’ai presqu’envie de répondre que non, pour avoir la paix, mais j’me sens pas non plus de trotter à côté d’elle pendant tout le putain de trajet. M’est avis que j’changerai d’avis d’ici quelques heures. Elle récupère un hongre qui m’semble beaucoup trop gros, tandis que j’ai une jument dont le responsable des postes m’assure qu’elle est absolument placide, et qu’elle s’appelle Miel.

    J’aime ni le miel, ni les chevaux, elle s’appellera donc Connasse.

    J’monte en selle et on s’met en route, toujours sans décrocher un mot. J’sens qu’on doit pas rigoler tous les jours, avec Lux. J’pense que faut détendre l’atmosphère, mais c’délicat de parler de trucs personnels quand on est sur un boulot qui demande surtout de la discrétion. Et j’ai même pas eu le temps de creuser tout ce que j’voudrais.

    En tout cas, à voir comme elle est à l’aise, contrairement à moi, sa stature et la carrure de ses épaules, ça pue le militaire ou le paramilitaire à plein nez. A tous les coups, j’ai tiré une garde. J’pèse les bons et mauvais côtés. Le bon, c’est que c’est clairement pas légal, ce qu’on fait, donc j’ai de quoi la faire chanter. Le mauvais, c’est qu’elle a pas vraiment de raison de m’apprécier. J’me résouds à être un peu plus discret qu’à mon accoutumée, surtout que les criminels ont pas le monopole quand il s’agit de tuer des gens et de vouloir effacer des preuves.

    ***

    Quand on arrive enfin au Temple, j’ai le cul en compote et le dos en miettes. Connasse était finalement pas si casse-couilles, même si on a manifestement tous les deux mal supporter la présence de l’autre. On laisse les canassons au relais de poste, et on admire la vue : des colonnes imposantes, un flux de gens ininterrompu qui vient cracher sa piécette et sa prière à la con, et des prêtres qui circulent parmi la foule. Sûrement ceux qui ont perdu à la courte paille et doivent se trimballer dehors avec un sourire au lieu de rester à l’intérieur avec un vin chaud.

    « Bon, on devrait pas tarder à en savoir davantage, heh ? Plus qu’à trouver notre bonhomme. »

    Elle hoche juste la tête, concentrée sur la tâche à venir.

    « Le plus simple, c’est d’y aller franco, que j’assure. »

    On se pointe à l’accueil du temple où, après un peu de queue, on arrive devant un frère de l’Ordre. Il doit avoir à peine la vingtaine, l’air aimable malgré un énorme nez epaté.

    « Bonjour, mon frère.
    - Bonjour, pèlerins.
    - Nous cherchons le frère Nathan, vous pourriez nous indiquer où le trouver ?
    - Là, comme ça, je ne saurais pas dire. C’est pour ?
    - Une lettre à lui remettre en mains propres, avec des nouvelles d’un vieil ami commun. Ça lui fera plaisir.
    - Ah ! »

    Il griffonne quelques mots sur un bout de parchemin qui traîne à côté de lui, c’est mal écrit et quasiment inintelligible.

    « Quand vous entrez dans le temple, prenez la deuxième à droite, il y a un secrétariat. Ils pourront sûrement davantage vous aider.
    - Merci, c’est bien aimable.
    - Que la Bénédiction de Lucy soit avec vous.
    - Et vous donc. »

    On incline tous les tête en signe de déférence, et on se mêle à la foule des débiles qui vont prier.
    InvitéInvité
    Anonymous
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    Re: Mon nom est Lux
    Mer 25 Déc 2019 - 19:01 #
    Tout le long du voyage, mon comparse ne m'avait pas semblé bien à l'aise sur sa monture, tout autant que la pauvre Miel n'avait pas forcément plus apprécié son coursier et avait affiché un regard penaud au moment où nous dessellions. Toutefois, laissant les chevaux derrière, nous avions pu nous entretenir avec un prêtre du Temple et obtenir les informations nécessaires pour retrouver le fameux « Frère Nathan ».

    Billet en main pour le secrétariat, nous finissions de monter une volée de marches assez raides et rentrions enfin à l'intérieur du monument soutenu par les grandes colonnades qui en faisaient tout le tour. Aussi bien que le bâtiment était imposant de l'extérieur, il était aussi vaste à l'intérieur et le fameux secrétariat était en réalité un bureau circulaire fiché au bout d'un couloir qui, sans pour autant bloquer l'accès aux étages supérieurs, imposait un passage obligé par le guichet derrière lequel une jeune femme en toge s'épanchait sur un feuille de papier.

    Saisissant le bout de parchemin que mon camarade avait récupéré auprès du prêtre, je m'avançai en direction de la secrétaire et me présentai brièvement. Nul doute que si j'avais pu utiliser ma réelle identité, elle m'aurait indiqué directement le chemin pour pouvoir m'entretenir avec celui que nous recherchions, toutefois j'étais contrainte à poursuivre mon petit jeu en la présence du malfrat.

    « - Bonjour, je me nomme Lux Warren et avec mon camarade nous souhaiterions nous entretenir avec le Frère Nathan. »

    Transmettant le morceau de papier, je lus aussitôt une forme de désarroi sur le visage de la jeune femme.

    « - Le frère Nathan est occupé. Peut-être puis-je lui transmettre un message ?

    - Malheureusement c'est une affaire assez pressante. N'est-il pas possible de le voir actuellement ? »

    Un malaise s'était installé et je sentais bien que la secrétaire commençait à perdre ses moyens ; nous dérangions. Et peut-être cela avait-il à voir avec l'aspect de mon collègue et les regards qu'elle lui portait frénétiquement.

    « - Désolée, il est en communion avec la Déesse toute la journée et a fortement interdit qu'on le dérange. Laissez une note, je la lui transmettrai dès que possible. »

    Je frappai légèrement du poing sur la table ; je voyais clair dans le jeu de l'hôtesse d'accueil qui usait de l'administratif pour nous refuser ce rendez-vous. Il était clair que nous n'avions pas l'air bien fréquentables, d'autant plus que la position de Nathanaël était assez haute à présent dans l'Église, toutefois il m'apparaissait inutile de perdre autant de temps. Je retrouvai toutefois mon sang froid, ultimement, et demandai du papier et un crayon à la blonde.

    Aux grands mots, les grands moyens : écrivant quelques bribes énigmatiques sur le parchemin, je m'assurai que notre contact ne se débinerait pas ce soir, lorsque nous le rencontrions. J'indiquai donc une heure plus tardive dans un rendez-vous à la taverne la plus proche : celle qui faisait face au Temple, en réalité, et où nous avions laissé nos bêtes.

    « - Si vous pouvez lui remettre ceci. Merci beaucoup pour votre aide, » dis-je avant faire volte-face et emprunter la sortie, sans même attendre mon compagnon.

    Nous passâmes le temps à l'auberge, buvant peu mais assurément. Les heures s'égrainaient et plus ça allait, moins je supportais le visage ricanant de mon compère qui ne devait pas plus s'amuser de ma compagnie, assez sobre pour ainsi dire. J'étais encore loin de lui faire confiance et mon caractère taciturne l'emportait sur ses tentatives de discussion ; ça ne l'empêchait pas de continuer à parler, néanmoins.

    « - T'sais jouer aux cartes ?

    - Non.

    - Et les dés ?

    - Non plus. »

    Ramassant les deux jeux qu'il avait visiblement sortis d'un sac sans fond, l'inconnu décida de continuer à jouer avec mes nerfs en tapotant du bout des doigts la surface de la table, entre deux gorgées de la bière âpre et tiède qui nous avait été servie.

    Puis, alors que je commençais à perdre foi, un gaillard en toge d'une soixantaine d'années, le crâne dégarni et clairsemé de longs cheveux blancs, entra enfin dans le troquet. Comme il dardait des regards tous azimuts, nous sûmes tous deux que c'était notre homme. Levant ma choppe dans sa direction, je lui indiquai notre position et attendis patiemment que le diacre s'attable ; il semblait particulièrement tourmenté et engagea directement la conversation :

    « - Qui êtes-vous et comment avez-vous eu ces informations ? »

    J'aurais pu lui répondre, mais je laissais l'honneur à mon compagnon qui était bien meilleur lorsqu'il s'agissait de jouer avec les gens.

    « - T'en fais pas, on n'est pas venus pour casser ton joli tableau du gentil Frère Nathan. On a juste quelques questions à t'poser, c'est tout. »

    Je m'avançai sur la table, refermant le cercle des conversations qui seraient à présent tenues ici, secrètement. Le pauvre homme semblait bien loin de l'assassin que l'on nous avait dépeint à première vue... mais rapidement son comportement changea et son anxiété sembla disparaître pour laisser, à la place, une expression plus froide, plus dangereuse.

    « - Je suppose que si je coopère, vous ne direz rien, c'est ça ?

    - Ouep.

    - Et qu'est-ce qui peut m'assurer de votre bonne foi ? Je sais encore reconnaître un autre casseur de têtes quand j'en vois un. »

    Son regard était à présent profondément ancré dans celui de mon partenaire. Leurs quatre yeux communiquaient quelque chose qui m'était étranger : un langage que je ne comprenais pas assez, étant étrangère à ce milieu. D'ailleurs Nathanaël semblait l'avoir remarqué, car il ne m'accordait aucune sorte d'attention.

    « - Rien, mais tu peux être sûr que si tu nous réponds pas, on ira balancer tout c'qu'on sait aux autorités. P't'être bien que ça sera pas moi qui l'ferai... » répondit mon compagnon tout en me désignant du bout du menton. « Mais on n'a pas tous les mains tâchées de sang à cette table. »

    Voilà que j'étais à présent au centre de l'attention et que les deux gonzes me reluquaient : le frère Nathan plus que l'autre et il ne mit d'ailleurs pas longtemps à être convaincu par la véracité des paroles de mon comparse. L'homme adopta alors une posture différente, plus confortable sur son siège.

    « - Je vois ça... Dans ce cas, qu'est-ce que vous voulez savoir ? »
    Vrenn IndraniSbire
    Vrenn Indrani
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    Re: Mon nom est Lux
    Jeu 26 Déc 2019 - 16:33 #

    Au moins, le gars a de la suite dans les idées. Faut croire que les trente ou quarante berges dans les ordres ont pas retiré des instincts qui ont dû lui être appris depuis la plus tendre enfance. Donc il sait dans quelle situation il est, et réagit de la façon la plus pragmatique possible. Un bon point pour lui, parce qu’on évite de perdre du temps dans des sous-entendus vagues et des menaces indistinctes. Nan, on parle bien, on parle vrai, et on parle court.

    « On cherche des informations sur la cérémonie de sélection de la prêtresse. Plus spécifiquement, celle qu’a eu lieu y’a trente ans, et sur laquelle t’as bossé, Nathanaël.
    - N’utilisez pas ce nom. »

    Il se raidit et jette un regard discret autour de lui. Je hoche gentiment la tête. Pile la réaction que j’voulais voir.

    « Pas de souci, Frère Nathan. »

    Rassuré que personne n’ait montré signe d’avoir entendu, ou même qu’il y avait quelque chose à entendre, il pose ses avant-bras sur la table, et, continuant de me regarder, il souffle.

    « Vous voulez savoir quoi ? Y’a pas grand-chose à dire qui ne soit pas public. »

    J’adresse un signe vers Lux Warren, et Nathan comprend bien la dynamique à l’œuvre. Il se tourne donc vers la jeune femme et lui adresse un sourire qu’il a dû apprendre à l’Eglise, parce qu’on croirait vraiment voir un vieux prêtre sympathique, avec le côté gentil grand-père, qui te regarde avant de te donner sa bénédiction, son pardon, et tout le tremblement. Bien loin, donc, du regard perçant voire menaçant auquel on a eu droit au début.

    « Lors de la précédente occurrence du choix de la haute-prêtresse, dans la liste des candidats, il y avait une certaine Madden. »

    Elle donne une description physique qui pourrait quasiment être elle à ce stade. D’ailleurs, Nathan s’en rend bien compte, et la jauge une nouvelle fois. Son regard se fait plus lointain, un peu brumeux. Comme s’il cherchait activement dans ses souvenirs.

    « Elle est morte pendant la sélection. Je voudrais les détails.
    - Ah. Tout ça pour ça ? Le processus de sélection est, comme vous le savez probablement, variable. Bien évidemment, il se base toujours sur la chance afin de déterminer la véritable élue de Lucy. Et… »

    J’lui coupe la parole assez sèchement. Le numéro du patriarche de Culte m’impressionne pas des masses, et j’reconnais les mimiques du menteur patenté.

    « Hé, tu peux arrêter d’essayer de nous la fourrer, s’il te plaît ? Qu’on perde pas notre temps davantage.
    - Comment ça ?
    - Tu mens mal, j’sais pas si t’as perdu le coup d’main ou si t’as jamais été bien bon, mais personne y croit, à ton truc de prêtre assagi et recueilli dans les ordres. Donc tu balances ce que tu sais, histoire qu’on puisse tous rentrer chez nous. Pigé, Nathanaël ? »

    On s’affronte légèrement, mais entre ma trentaine et sa soixantaine, il aurait pu être un assassin légendaire que le temps l’aurait rattrapé quand même.

    « Ou tu veux qu’on parle de tes exploits à qui de droit ?
    - Non, non, c’est bon, répond-il en se passant la main sur le crâne. Effectivement, il y a eu une Madden dans le Culte, qui était ici-même. Elle ressemblait d’ailleurs de façon troublante à la jeune femme ici présente, donc est-ce que… ?
    - C’pas toi qui poses les questions, tu te contentes d’y répondre.
    - Bon, bon… J’étais bien au comité de mise en place de la sélection, à un poste haut-placé, en prime. Puis, un soir, un noble est venu me voir. Il disposait des mêmes… informations que vous, voilà.
    - Celles selon lesquelles t’étais en réalité un…
    - Oui, oui, shhhh… »

    Nouveau coup d’œil aux alentours, mais nous n’intéressons évidemment personne.

    « Enfin, je me retrouve dans la même situation, mais on me demande de faire en sorte que Madden échoue… tragiquement à l’épreuve. Et voilà.
    - C’est tout ? Que j’demande.
    - Oui. Je n’ai pas eu le choix. C’est d’ailleurs la dernière fois que j’ai fait une chose pareille et…
    - Epargne-nous le laïus sur le misérabilisme, s’il te plaît. Déjà parce qu’on y croit pas, et ensuite parce qu’on en a rien à foutre. C’était qui, ce noble ?
    - Je sais pas.
    - Menteur. Tu te renseignes toujours sur tes commanditaires. »

    Il me fixe d’un air buté, et je roule des yeux. Evidemment que je fais pareil, et qu’on le fait tous, sinon on fait pas long feu.

    « Un noble, du nom de Klaus von Andrasil. Je ne l’ai jamais revu, ni n’ai eu de nouvelles.
    - Bah tu vois, quand tu veux, Frère Nathan. »

    Du côté de Lux, ça a l’air un peu tendu, et l’annonce du nom a manifestement rappelé quelques souvenirs. Hé, comme quoi, j’ai bien fait mon boulot.

    « Besoin d’autre chose, Lux ? »

    Elle secoue la tête en signe de négation, et j’me tourne à nouveau vers le frère.

    « C’est bon, dégage. On restera en contact si nécessaire.
    - Hein, quoi ? Mais non ! J’ai payé ma dette, vous ne devez p…
    - On doit pas quoi ? Qu’est-ce que tu vas faire ? »

    Il se tait brusquement, en sachant qu’il n’a pas le dessus dans la discussion. Moi, je sais pertinemment que si j’ai besoin d’informations ou d’influence dans le Culte, je vais revenir lui sonner les cloches jusqu’à avoir ce que j’veux. Il est encore jeune, il devrait être utile quelques années.

    Une fois débarrassés de lui, j’décale ma chaise pour faire bien face à mon employeuse.

    « Besoin d’autre chose ? D’aller régler le compte du Klaus ? »
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    Re: Mon nom est Lux
    Ven 27 Déc 2019 - 0:57 #
    Je restais secouée par la conversation qui venait de se terminer. Encore sous le choc, d'avoir entendu ce nom qui n'était plus apparu depuis le décès de ma tante, j'avais rapidement retrouvé le chemin de notre chambre commune. La question de mon partenaire était restée en suspens jusqu'alors, mais il avait bien été contraint de me suivre s'il ne voulait pas que je perde la mémoire. Et mon geste, impulsif, m'aurait bien valu de tout oublier s'il n'avait pas agi ainsi.

    « - Klaus Von Andrasil... »

    Le truand me dévisageait en fermant la porte derrière lui, son regard était énigmatique. Il montrait qu'il saisissait quelque chose, mais qu'il ne voulait pas l'avouer. Au lieu de cela il semblait insistant pour que je lui dévoile ce que je savais, mais je n'y étais pas obligée. J'avais payée pour cette information, non ?

    Assise son mon lit, je saisis aussitôt des feuilles et une plume qui étaient à l'origine à disposition sur la table de nuit de notre chambre dans l'hypothèse de réclamations à destination de l'aubergiste. Couchant sur papier les derniers évènements qui s'étaient déroulés depuis notre départ de la Capitale, je fus toutefois interrompue par l'énergumène.

    « - J'sens que tu m'as pas tout dit, mais y'a des trucs qui trahissent. Enfin, j'ai juste besoin de savoir si tu veux lui faire payer à ce Klaus qui a tué ta mère.

    - Je ne sais pas ! Je ne sais plus... »

    Je passai encore deux bonnes minutes à écrire, jusqu'à ce que je remarque ma joue humide peu après qu'une goutte d'eau ne soit venue frapper le papier. M'essuyant maladroitement, je tentais tant bien que mal de dissimuler ma faiblesse. En vain. Les yeux rougis par les larmes qui affluaient à présent, je m'arrêtai un instant sur mon compère, toujours dans l'expectative. À quoi bon, au point où j'en étais ? Autant dire toute la vérité...

    « - Ce Klaus, comme tu dis, c'est mon père. »

    Pas de grande surprise du côté de l'auditoire, l'homme devait se douter que Lux Warren était un nom d'emprunt depuis le début et ça ne me surprenait pas non plus. Mais ce n'était que le début des révélations :

    « - Mon véritable nom est Elina Von Andrasil et je suis Lieutenant de la Garde. Et dire qu'à la base je voulais juste savoir dans quelles circonstances ma mère était morte, mais à présent je me retrouve devant un meurtre commandité par mon propre père, sans aucune preuve tangible ! »

    J'eus un rire nerveux et incontrôlé. J'aurais dû savoir depuis le départ qu'une telle entreprise ne m'apporterait que des ennuis. J'avais eu réponse à mes questions, mais à quel prix au final ?

    « - Tu voulais savoir ce que je comptais faire ? Moi-même je n'en ai aucune idée ! J'aimerais mettre ce pourri derrière les barreaux, le faire payer pour ses crimes, voilà ce que je voudrais faire. »

    Progressivement, je retrouvais mon calme, usant de méthodes de respiration préconisées avant une bataille pour évacuer le stress. Malgré cela, je n'avais pas les idées claires, mais ce fut une suggestion de la part de mon camarade de chambrée qui souleva les premières pistes pour la suite.

    « - J'en ai vu passer, des gars comme lui : ton père. S'il a pu retrouver la trace de c'mec et l'faire chanter pour qu'il s'en prenne à ta mère, c'est qu'il doit avoir d'autres merdes au cul. Peut-être qu'on peut pas l'inculper pour sa mort à elle... » fit-il, laissant volontairement sa phrase en suspens comme un pousse-au-crime.

    Il attendait que je confirme son idée et, à force de ressasser celle-ci dans mon crâne, elle me semblait gagner en vraisemblance. Non, c'était bien sûr ça.

    « - ...Mais on peut le faire prendre pour d'autres crimes.

    - Bingo. »

    Requinquée, renouvelée par cette justice prometteuse qui nous permettait enfin de voir le bout du tunnel, je me redressai alors, sans réelle raison. Comme si j'étais motivée à partir dès maintenant à la chasse aux informations. Nous pouvions retourner voir Jehan ou consulter les archives de la Garde à la Capitale, voir ce qu'elles pouvaient nous dire sur cet homme que je connaissais à peine et qui était pourtant mon géniteur. Rien ne coûtait d'essayer... il fallait tenter.

    Malheureusement nous avions déjà passé deux jours ensemble et il nous faudrait remettre cela à plus tard. Je convenais donc d'un deal avec le maraudeur : celui de débuter cette enquête chacun de notre côté et de se retrouver dès les premières pistes.

    Désormais, une poignée de main scellait notre alliance et, même si je savais qu'une facture salée m'attendrait in fine, je n'avais jamais semblé plus convaincue de faire un bon investissement. Je devais venger la mort de ma mère, même si je ne l'avais jamais connue, et combattre les ordures comme mon père était une des raisons pour lesquelles je m'étais enrôlée dans la Garde.

    Plus tard dans la soirée, je restais assise sur mon lit alors même que mon camarade s'endormait, imprimant chaque détail, chaque étape de notre recherche, couchant noir sur blanc ce que j'oublierais le lendemain. Je me pris même à regretter de devoir oublier cette aventure, mais j'avais appris à composer avec le pouvoir de mon compagnon. J'espérais que ma future moi serait aussi clairvoyante que je l'étais alors, car cela faisait beaucoup d'informations à assimiler.

    Et je me couchais enfin, mettant un terme à cette rude journée. Seulement pour me retrouver seule le lendemain, sans savoir où j'étais et ce qui m'avait amenée jusqu'ici. Avec pour seuls souvenirs quelques feuilles de papier.
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    Re: Mon nom est Lux
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