J’clopine un peu, la main sur les côtes, quand j’entre dans la baraque que le toubib utilise pour consulter ses patients. J’crois que j’ai aussi des contusions sur le nez, les pommettes, et une vilaine bosse sur le front, à la jonction avec les cheveux. Et un truc au torse, quand j’respire c’est assez douloureux. Pas cassées, sinon je marcherais pas aussi vaillamment.
Parfois, le travail, ça s’passe mal, et y’a pas de soigneur magique en ville. Ou, plutôt, pas le genre chez lequel un gars qui règle les problèmes de la pègre a forcément envie d’aller trop souvent. C’est que ça laisse des traces, ne serait-ce que dans les papelards qu’ils remplissent, à défaut de se souvenir de moi. Donc c’est bien de varier un p’tit peu.
Evidemment, on a nos propres médecins, généralement des tordus qui se cachent du système et mettent leurs talents à profit là ils seront moins jugés. Donc tous les casseurs de têtes, racketeurs, voleurs, et autres dealers vont se faire soigner par les joyeux bouchers, les violeurs en série, les déséquilibrés paranoïaques. J’trouve qu’on forme un beau petit monde.
Pourtant, tout commençait bien.
Ça fait quelques jours que j’file ce gars, un nouveau-venu qui essaie de se faire une place de choix parmi les gangs de la ville. Bon, rien de bien original jusque-là, tout le monde fait pareil. Nan, le souci, c’est qu’il y arrivait, et ça a commencé à titiller les barons. Ça, et les discours comme quoi il fallait changer les choses, rajouter davantage d’équité et de valeurs, et un tas d’autres conneries pour faire battre le cœur des médiocres pas foutus de couper une bourse ou des péripatéticiennes vieillissantes.
Le pire, c’est que ça marche, les gens commencent presque à y croire.
Faut dire que l’apparente absence de réponse des patrons interroge. C’est pas qu’ils font rien, c’est qu’ils y arrivent pas. Tous les négociateurs envoyés jusqu’à présent se sont fait retoquer gentiment, et les assassins ont tous échoué à des degrés divers et variés. Donc les tauliers ont fait appel à un indépendant, histoire d’arrêter de se salir les mains et de pas risquer de mauvaises retombées médiatiques si je me vautre.
J’étais plutôt en confiance, mais j’ai pas salopé le boulot pour autant.
Pourtant, là, j’suis dans la salle d’attente de la clinique. Quand j’respire, j’ai mal, et j’vois pas bien par l’œil droit. L’impression de m’être fait passer à tabac alors que le pire, c’est qu’il m’a pas touché, et qu’il m’a même pas vu. J’suis arrivé par derrière, surin en main, et au moment de le planter, y’a eu un genre d’onde de choc qui m’a éjecté contre un mur, puis dans un tas d’ordure juste en-dessous.
« Patient suivant ! »
J’regarde autour de moi. Mon tour, hé ?
Le vieil amas qui lui faisait face marmonna un borborygme de son cru. Probablement une gentillesse sur le temps ou sur l’éclat de sa chevelure – certainement pas une remarque désobligeante sur le peu de délicatesse dont Luz faisait preuve pour lui attraper le poignet et l’empêcher de viser son œil. La praticienne échangea un court regard avec la belle-fille de sa patiente. Les doses allaient devoir être augmentées et peut-être faudrait-il réfléchir à une prise en charge plus… Définitive. Ils n’avaient toutefois que peu de moyens et les officines proposant ce type de services ne versaient pas exactement toujours dans la sainte bonté. Il n’y avait pas meilleur sucre à casser que sur le dos d’épaves humaines décrépies. En particulier celles qui insistaient pour se fourrer des cuillères dans l’œil.
Elle finalisa son ordonnance d’un point d’encre et tendit le papier à la jeune femme. Elle arborait une expression inquiète et quelque peu abattue, mais Luz ne pouvait intervenir en rien sur les scrupules personnels. Non, la jeune femme ne toucherait pas immédiatement l’héritage. Peut-être aurait-elle dû y songer avant que sa conscience ne la taraude suffisamment pour échanger une nuque discrètement brisée dans les escaliers par une honnête consultation médicale.
Elle accompagna les deux femmes jusqu’à la porte, s’arrêtant pour sa part sur le seuil afin de lancer un long regard circulaire sur la salle d’attente. Par Lucy, qu’elle était fatiguée… La journée était loin d’être finie et bon nombre de gens s’agitaient encore tels des anguilles sur les petits fauteuils en cuir. Drôle comme chaque fois qu’elle réapparaissait à cette porte, chacun se faisait plus charmant dans l’espoir de damer le pion à quelques autres mourants. L’attente était réservée aux faibles et sans une attention de tous les instants, cette salle se transformerait rapidement en véritable guerre du « plus misérable ».
Oh diantre, quelle était cette odeur immonde… ? Un homme d’apparence un peu plus vieux qu’elle s’était levé. Dans un sale, très sale état. Elle le jaugea d’un œil critique tout en l’invitant à entrer dans son cabinet. La trentaine, peut-être, brun, barbu. Avec l’air –et l’odeur- de celui qui vient d’être passé à tabac dans une montagne d’ordures. Une fragrance de bière rance, peut-être… ?
Elle lui désigna le support sur lequel il devait s’asseoir et lui fit signe de se déshabiller.
Elle eut un vague sifflement admiratif lorsqu’elle aperçut l'état de son torse. Un hématome commençait à y fleurir avec moult virulence.
Cela relèverait du miracle s’il n’avait pas écopé d’un sérieux traumatisme crânien. Quel genre de métier entraînait des contusions de cet acabit… ? Elle posa le bout de ses doigts sur la partie violacée de son torse, précautionneuse dans son contact et concentrée dans sa tâche.
Elle releva les yeux sur lui, un sourire à présent amical sur les lèvres.
En calbut’ dans la pièce, j’laisse le doc’ m’ausculter. Chacun son boulot, après tout. La rouquine palpe, pose des questions. Ça serait presque agréable si ça faisait pas un mal de chien. J’endure stoïquement, parce que c’est par là qu’il faut passer si j’veux pas casquer pour une potion de grands soins, un truc qui coûtera un bras et me fera dormir une journée. Même si j’vais p’tet devoir y passer quand même.
C’est que, j’ai pas abandonné l’idée de réussir le contrat : il paye archi bien, et maintenant, c’en deviendrait presque personnel. C’est comme un casse-tête à résoudre, y’a un côté de défi. Faut identifier son pouvoir, comment le contrer, et procéder avec le plan. Les gens avec des pouvoirs, c’est les plus dangereux, mais c’est aussi mes préférés, et c’est bien pour ça. Sinon, on tombe dans le train-train, on s’ennuie, on s’encroûte.
« Dans l’ordre ? »
J’m’arrête quelques secondes pour réfléchir.
« J’ai mal à chaque respiration, au nez et au niveau de la cage thoracique. J’vois pas bien de l’œil droit, pas comme s’il était fermé, mais un genre de flou. »
J’passe la main devant le gauche, et j’confirme d’un hochement de tête.
« Ouais, c’est pas terrible, et j’en ai plutôt besoin. J’ai mal à la tête, un peu, mais c’est p’tet plutôt les conséquences du reste, j’sais pas. Et pour les p’tites coupures et bosses, à la limite, on s’en fout. »
J’me retiens de reculer quand elle palpe l’énorme hématome que j’commence à avoir sur les côtes. Ça changera rien, et ça fera juste durer le bouzin plus longtemps. Fêlées, comme il me semblait. Les choses font qu’on commence à reconnaître les petits bobos du quotidien, quand on travaille dans ma branche. Aussi bien pour les donner que les prendre, au demeurant. Plaisir d’offrir, joie de recevoir, huh ?
« Ouais, sale journée. Désolé pour l’odeur, d’ailleurs. C’est l’erreur bête, j’suis tombé dans les escaliers, droit dans un tas d’ordure. Vous savez comment c’est. »
L’escalier se fait appeler Alfonso, et il est grand, bien découplé, avec une crinière blonde un peu comme un lion. J’me demande si c’est pas le métal du couteau auquel il a réagi. En tout cas, j’espère que c’est pas un genre de bouclier absolu au danger, parce que ça va compliquer salement ma tâche. Poison peut-être ? Avenue à explorer.
Au moins, j’ai pas menti pour le tas d’ordures, j’ai vraiment été éjecté dedans. Evidemment, Alfonso a senti que son pouvoir avait réagi. Il s’est retourné, prêt à faire face à la menace toute relative que j’représentais à ce moment-là. A travers les déchets, j’l’ai vu se rapprocher de moi, petit à petit, mais son regard perdait en attention. Mon pouvoir à l’œuvre, ça. Il commençait déjà à m’oublier. Même si c’était douloureux, physiquement et pour mon ego, j’me suis enfoui dans les ordures, pour pas qu’il me voit.
Le couteau rangé dans mon petit sac sans fond, j’ai creusé jusqu’à être au niveau d’une couche qu’avait pas dû voir la lumière du jour depuis quelques semaines. Dégueulasse, putain. Et quand Alfonso a écarté une planche de bois moisi pour dévoiler mon visage, il n’avait pas la moindre idée de ce qui se passait, ou même pourquoi il était en train de creuser une montagne de poubelles.
« Bonjour, vous allez bien, monsieur ?
- Ouais, ouais, ça va…
- Vous avez besoin d’aide ?
- Nan, ça va aller, merci.
- Vous êtes sûr ?
- Ouais, oh, c’est bon, hein.
- Bon, bon, pas la peine de s’énerver. »
Il m’a adressé un sourire contrit, puis il est reparti.
J’crois que j’peux comprendre pourquoi les gens l’aiment bien. C’est un peu instinctif, il me rappelle Jack par certains côtés.
J’prends une brusque inspiration en poussant un hoquet de douleur quand Weiss me remet le tarin en place d’un coup sec. A travers les larmes qui m’emplissent les mirettes, j’me rends compte que j’respire déjà mieux, sans gros sifflement.
« … Merci ? »
Elle le contourna pour mieux fouiller dans ses étagères. Cela n’aurait tenu qu’à elle, son patient partirait pour trois jours de convalescence avec une potion bien carabinée à s’avaler cul sec. Il semblait pourtant désireux d’esquiver une part de ses questions et de quitter fissa son cabinet. Peut-être dans sa manière de se trémousser ou de cacher ses grognements de douleur dès qu’elle avait l’heur de laisser trainer ses mains… Elle lui jeta à la dérobée un regard suspicieux. Rixe de rue ? Sa chance avait tourné et la totalité de ses fonds avaient été absorbés à une table de jeux douteuse ? Ou peut-être…
Elle attrapa délicatement trois flacons annotés d’une étiquette vieillie. Elle déposa le tout sur son plan de travail, et l’air de rien, commença à s’affairer tout en creusant quelques-uns de ses soupçons :
Elle se tourna vers lui, lui tendit le troisième flacon ainsi qu’un verre en terre cuite :
Tactile et compatissante, elle ne put s’empêcher de poser avec douceur sa main sur son épaule, un tranquille sourire réconfortant sur les lèvres :
Elle attira à elle l’un des tabourets avoisinants. S’installa à proximité de son patient, déballant tout en même temps ses bandages et ses mixtures désormais prêtes. Son ton prit des allures de compassion murmurée, invitant l’étrange inconnu à se confier s’il le souhaitait :
J’clopine encore, la main sur les côtes, quand j’entre dans la barraque que le toubib utilise pour consulter ses patients. J’ai vachement mal à l’épaule gauche, dès que j’fais un mouvement de travers. Un peu de sang dans les cheveux et la barbe aussi. J’me suis bien tapé le crâne contre le mur. Après, les coupures à la tête, ça saigne souvent beaucoup, mais c’est anodin, généralement. Là, j’saurais pas dire. La mâchoire qu’a morflé aussi, lors du choc. Putain, il m’a pas loupé, ce con.
En tout cas, la salle d’attente est aussi blindée que l’autre fois, y’a une semaine. J’attends tranquillement mon tour, en me remettant de mes émotions. J’sais pas bien pourquoi j’ai décidé de revenir ici, plutôt que d’aller dans les bas-fonds. Enfin, si, j’ai une assez bonne idée, en réalité : y’a un bon rapport qualité-prix, comme ça fait un moment, Weiss se rappellera pas, et puis elle était plutôt sympa. Et, surtout, ça risque pas de se savoir que j’me suis fait croûter par ma cible, encore une fois. Elle est trop loin du milieu.
Nan, là, j’avais à nouveau bien travaillé. J’utilise ce qui reste de mon esprit légèrement embrouillé pour refaire le fil des événements, voir où j’me suis planté.
Après les soins du docteur Weiss, ça allait effectivement mieux. Bon, j’ai pas pris autant de repos, pasque personne a le temps de glander autant, et que ça serait pas sérieux, évidemment. De toute façon, ça suffisait pour faire illusion à la Guilde, me reposer dans mon beau bureau d’examinateur à noircir du parchemin et relire des rapports, et ça suffisait aussi pour la filature d’Alfonso. Il a toujours la côte, d’ailleurs, au point que ça en devient gênant. Mais il s’est calmé un peu, semble plus précautionneux. Ce qui me facilite pas la tâche.
J’crois que comme il a l’impression que y’a moins d’assassins sur son cul, et qu’il a pas reçu d’offres commerciales, n’est-ce pas, haha, de la part des patrons de la pègre, il se demande sur quel pied danser. C’est sûr que si les chefs sont pas contre lui, toute une partie de la réthorique s’effondre. Mais le reste marche quand même, juste un peu moins vite. Et l’assassin en question est pas vraiment au top de sa forme.
J’tousse brusquement, et ça m’fait un mal de chien.
La p’tite vieille à côté de moi me jette un regard désapprobateur. Clair que j’fais pas rêver, avec les tifs collés par un liquide sombre qu’est p’tet du sang ou p’tet de la bière, et ma gueule de déterré. Alors qu’à voir sa tronche à elle, elle mérite davantage la tombe que moi. J’essaie de lui sourire, mais ça doit pas rendre terrible, pasque j’ai du mal. Elle détourne les yeux. C’est ça, connasse, occupe-toi de tes rhumatismes et laisse-moi mes menus tracas d’un mètre quatre-vingt dix.
Du coup, en l’observant, et parfois en lui jetant des trucs, genre dans les bars, ou du haut d’une maison, j’suis à peu près sûr que son pouvoir repousse le métal. Facile, du coup. J’me suis procuré un couteau en céramique, le genre qu’a l’air à peine utilisable pour couper du beurre chaud, mais qui en fait tranche salement dans le vif. J’les trouve juste un peu fragile, et manquant de flexibilité, mais pour ce que j’veux en faire, il peut bien casser après avoir passé les côtes, ça m’en toucherait une sans faire bouger l’autre.
Inutile de préciser que ça n’a pas marché davantage que l’autre fois. Même plan de départ, presque la même conclusion.
Pendant que j’suis perdu dans mes pensées, la porte s’ouvre.
« Patient suivant ! »
J’regarde autour de moi. Mon tour, hé ?
Elle ouvrit donc la porte de son bureau avec entrain et n’attendit guère qu’il se lève pour retourner à la préparation de ses ustensiles. Peut-être aurait-elle dû, car sa surprise fut assez prononcée en constatant l’état de ce nouveau patient. Elle le dévisagea durant quelques secondes interminables, cherchant à comprendre quelle violence passablement motivée et entêtée avait fait de cet homme un splendide reste de steak humain. Elle espéra furtivement qu’il ne soit pas marié. Sa pauvre épouse risquait la crise cardiaque en croisant son visage tuméfié au détour d’un couloir.
Elle l’invita à prendre place sur son tabouret d’auscultation, un instant étonnée par le léger mouvement qu’il avait amorcé une fraction de seconde avant son geste. Bon. Encore un type décidé qui n’avait que peu de temps à perdre en bavardage et en soin. A tous les coups, il allait rejeter toutes ses propositions de repos et de potions à guérison longue, prétextant que le temps était de l’argent, et que l’argent ne se perdait guère en flotte pailletée douteuse. Pas de chance pour lui, les types de ce tempérament était sa spécialité.
Elle lui offrit l’un des plus beaux sourires à sa disposition et s’assit en face de lui pour procéder aux soins énoncés.
Il faisait encore nuit dans la Capitale. Les commerçants s’éveillaient d’un pénible sommeil et le ressac des échoppes s’ouvrant progressivement commençait à peine à raisonner dans les rues. Marchant d’un pas vif pour s’épargner le froid matinal, Luz regroupa les pans de son manteau sur sa silhouette. Parfois, elle maudissait ces satanés horaires qui la privaient d’une matinée de flemmardise dans son lit. Cela n’était toutefois là que le luxe et le plaisir de se plaindre, car elle n’avait à vrai dire aucune obligation financière de travailler constamment.
Un long soupir en nuage glacé sur les lèvres, elle rentra la clé de métal dans la lourde serrure de son cabinet. L’aurore adressait tout juste quelques rayons à son encontre lorsque le claquement de semelles à quelques mètres d’elle l’alerta. La porte grande ouverte, à demi passée dans l’entrée, elle retourna un regard surpris vers l’origine du bruit.
C’était un homme. Un nouveau patient, de toute évidence – peut-être ? Il lui évoquait vaguement quelque chose. Probablement croisé dans la foule qui passait constamment par ces rues, chassa-t-elle l’idée d’un haussement d’épaule.
En tous cas, il était en fort mauvais état.
J’clopine toujours, la main sur les côtes, quand j’arrive dedans la baraque que le toubib utilise pour consulter ses patients. Elle commence super tôt, vu qu’elle est arrivée en même temps que moi, et qu’il fait encore passablement nuit dehors. Comme les fois précédentes, ça s’est bien passé, y’a un p’tit goût de reviens-y, donc j’le fais. Puis, toujours les mêmes problématiques liées à la discrétion. Et, enfin, j’ai envie de revenir.
La fois d’avant, j’ai balancé un autre mensonge sans le moindre effort. La chute dans les escaliers, évidemment, un beau classique pour les femmes battues. On a taillé le bout de gras tranquillement, pendant qu’elle s’occupait de mes blessures. C’était douloureux, mais en même temps, j’avais déjà mal. Quelques jours plus tard, j’ai pu reprendre mon boulot nocturne, et recommencer à cogiter.
Cette fois, j’ai essayé d’attaquer de suffisamment loin pour que son pouvoir se déclenche pas. Y’a pas d’absolu, dans ce monde de merde, même si certains sont plus gâtés par Lucy à la loterie de la naissance. Lui, il est grand, beau, musclé, avec un pouvoir puissant. Moi, ça pourrait être pire, donc j’me plains pas. Puis j’l’ai pas encore prouvé, mais j’suis probablement plus malin que lui.
Un geste malencontreux me fait pousser un grognement de douleur, et j’amende ma pensée précédente : ‘’Peut-être plus malin que lui’’.
Weiss me permet de rentrer à l’intérieur, sans doute ravie d’avoir déjà un patient alors même qu’elle est en train d’ouvrir. J’pénètre directement dans la salle d’examen, en gardant une main pressée contre mon flanc. Ça sera pas beau à voir, en tout cas : le projectile acéré que j’lui ai envoyé dans la gueule est revenu deux fois plus vite sur moi, et c’est vraiment par chance qu’il a fait que tailler le long des côtes. A vue de nez, les poumons sont pas percés, mais j’ai du mal à m’en rendre compte, pasque pour une raison inconnue, alors que la lame était déjà derrière moi, j’ai été projeté contre un mur. Deux fois.
Un truc en rapport avec l’énergie cinétique ? Un genre de repoussoir absolu de danger ?
Quand j’écarte ma main, elle est poisseuse de sang, et mes vêtements sont encroûtés dans la plaie. Ça va pas être la fête, de les retirer, puis de désinfecter. Respiration chevrotante. Au moins, la jolie rouquine sait ce qu’elle fait. Elle prépare d’ailleurs rapidement toutes ses affaires. J’sens déjà qu’elle va me demander si j’ai passé une sale journée. J’pense que ça ira sans dire, encore que ç’aura été une sale nuit, cette fois ?
Elle va probablement en parler à la Garde. Va falloir la dissuader, ou arrêter de venir dans un avenir proche, j’suppose. Juste le temps qu’elle oublie, évidemment. J’peux donner un faux nom, aussi, si nécessaire. Pendant qu’elle commence son travail, à inspecter l’ampleur de la besogne qui l’attend, j’garde les yeux fixés sur ce qu’elle fait, pas effrayé pour un sou par la vision de mon propre rouge.
« Sale journée, que j’entame. »
Un peu raide, pour sortir le couteau de l’escalier : y’a rarement des armes qui frottent contre les os pour les raboter. En tout cas, dans mon immeuble, c’est pas ça.
« Vous commencez tôt, docteur Weiss. Beaucoup de travail ? »
J’tressaille alors qu’elle tâte la plaie.
Elle lui sourit. Le gars avait l’air assez détendu, pour un type sur le point de mourir. Un choc traumatique peut-être ? Elle lorgna l’arrière de son crâne avec l’air de ne pas y toucher, juste pour s’assurer qu’aucun hématome douteux n’y fleurissait. Alors, la suspicion gagna quelques échelons dans son cœur. Elle plissa les prunelles. Une rixe de rue… ? Il n’avait pas la tête d’un homme qui avait passé la nuit à parier et à boire. Ni même la tête d’une victime gratuite. Ces constatations étaient pour autant subjectives et il n’en fallait souvent guère plus qu’un malencontreux échange de regard pour s’attirer les foudres d’un malandrin dans une ruelle sombre. A moins qu’il n’ait trempé dans quelques affaires plus obscures…
Luz haussa intérieurement les épaules. Contrairement aux apparences, elle n’avait cure du passif de ses patients. C’était à peine si elle se souciait du taux de criminalité de la Capitale. Tant qu’aucun mal n’était fait à ses proches, qu’importait ce que les gens faisaient de leur vie… Elle n’était pas là pour décider s’il était préférable d’avoir une humble vie de travailleur pour nourrir ses gamins ou s’il valait mieux suriner tranquillement un ou deux riches passants à l’arrière d’une boutique. Elle s’assit donc à ses côtés, un léger soupir sur les lèvres.
Il lui rendit un drôle de regard, et Luz crut judicieux de se fendre d’un sourire rassurant.
Enfin, plutôt ses poumons en l’occurrence. Et un ou deux bouts de chaire supplémentaires, à voir l’entaille. Mieux qu’une coupe de printemps ! Elle s’affaira, armée d’une pince et d’alcool fort, tâchant de son mieux de dégager l’horrible plaie dans un premier temps.
Elle releva les yeux vers lui, désormais un tantinet amusée :
Elle laissa volontairement planer un silence, la mine interrogative, cherchant à obtenir un nom à mettre sur ce visage. Peut-être était-ce la relative lueur tamisée des lieux ou la fraicheur matinale, mais il lui paraissait présentement tout à fait sympathique. Un brin de compassion naissait même dans sa poitrine, toujours prompte à considérer ceux qui venaient s’échouer entre ses mains avec une grâce d’infirmière tout à fait déplacée.
Elle griffonna plusieurs lignes cursives sur une feuille qu’elle lui tendit, non sans prendre le temps de lui fournir plusieurs explications supplémentaires. Elle se para finalement d’un franc sourire renard, le vert de ses prunelles teintés d’une étincelle un tantinet plus taquine.
Elle se mordit la lèvre inférieure, réfrénant l’évidente curiosité qui embrasait ses traits. Il lui était étrangement familier, et cette simple impression suffisait à rompre soudainement la digue qu’elle érigeait traditionnellement entre elle et ses patients. Puisque son esprit semblait reconnaitre en lui une nuance rassurante et familière, il lui devenait impossible de ne pas s’investir. Elle s’appuya donc contre son bureau, les mains innocemment positionnées sur le rebord en bois de celui-ci dans un simulacre de détente. Surtout, ne pas avoir l’air d’un félin convoitant le pelage froissé d’un charmant lapin.
Avec un peu de chance il mordrait à l’hameçon. Point compte double s’il répondait par la nature de son métier.
J’observe tranquillement pendant qu’elle fait son examen. Vrai que j’me suis pas loupé, ce coup-ci. Et tranquillement, c’est tout relatif. J’ai mal. Mais Weiss sait ce qu’elle fait, alors j’ai juste à serrer les dents quelques instants supplémentaires, et ça ira mieux. Au moins, avec les fringues prises dans la plaie, j’en fous pas partout. Mais ça va p’tet pas durer, après tout. Puis, bon, elle est pas trop curieuse, pour le moment. Ça ressemble à du bavardage sans vraiment de but, juste pour que j’me préoccupe pas de ce qu’elle farfouille à mon côté. Ça distrait, quoi.
« Tôt le matin, hé ? Ouais, ça m’étonne pas. Le temps que le gars décuve, se rende compte qu’il s’est fait faucher sa bourse, ses bijoux, ses objets de pouvoir… Qu’il aille vomir un peu partout, puis qu’il comprenne qu’il s’est battu ou quoi, et qu’il débarque ici… J’veux bien croire que ça devient une heure chargée d’urgences, ouais. »
J’croise son joli regard vert.
« M’endormir dans la rue ? Nan, certainement pas. La rue, c’est dangereux, après tout, et même en étant salement alcoolisé ou quoi, faut survivre et rentrer chez soi avant de pouvoir se détendre. Trop d’histoires sordides qui le prouvent. »
Et auxquelles j’suis pas forcément étranger, j’veux bien l’admettre. Après tout, j’ai fait mon lot d’attaques sur saoûlards. Mais, en même temps, j’vois pas pourquoi j’agresserais un type en pleine possession de ses moyens alors que j’peux attendre quelques heures et le cueillir quand il voit flou et est incapable de marcher droit. J’veux dire, faut être pragmatique, dans mon métier. Et comme disait Pépé, y’a pas de petit profit.
« J’dirais bien que j’prends pas de corps étrangers, mais vu ce que j’viens de prendre au côté, ça semble pas être totalement indiqué, et j’m’en voudrais de ment… Aïe. »
Le hoquet de douleur est sorti tout seul, par surprise. Autant pour l’aspect viril et insensible. Enfin, elle a dû en voir d’autre. Puis, merde, l’alcool et fouiller la plaie, j’peux pas dire que ce soit le meilleur moment que j’aie passé de ma vie. Donc quand, après les explications sur le repos que j’dois prendre tombent, j’écoute d’une oreille distraite. Comme à mon habitude, j’obéirai qu’aux prescriptions qui m’arrangent, et j’vais me doser de médicaments comme un putain de canasson histoire de tenir le coup.
Après tout, la Guilde serait p’tet pas hyper réceptive si j’expliquais pourquoi j’suis arrêté quelques jours le temps de guérir. Et j’veux pas aller à la Garde pour déposer une plainte ou quoi, ça foutrait la puce à l’oreille pour des activités légèrement répréhensibles. Le mieux, c’est d’apparaître le moins possible dans les endroits où mon nom devrait pas s’trouver. Donc un toubib indépendant, ça va. Le livret des crimes non-résolus, ça le fait vachement moins.
Quand Luz Weiss propose le petit-déjeuner en attendant que la journée s’emballe, j’dois dire que j’suis assez motivé. Déjà parce que sa charmante compagnie me change de l’autre que j’dois buter sans y arriver depuis des semaines. Et ensuite pasque j’ai la dalle, à force d’avoir couru toute la nuit à droite à gauche, avant de me faire casser la tronche. Puis bon, vu le boulot que j’ai à faire à la Guilde aujourd’hui, j’peux bien glander ici un peu... J’dirai que y’a eu un accident de charrette. Ou que j’étais là mais qu’ils m’ont oublié, hé.
« Avec plaisir, un café, le plus fort possible, si ça ne vous dérange pas, Docteur Weiss. Et je prendrais bien quelque chose à grignoter aussi, encore que les croissants ne font pas partie des prescriptions faites sur l’ordonnance ? »
C’est qu’il faut que j’refasse mon sang, donc que j’évite l’alcool, que j’bouffe de la viande, tout ça…
Y’a un truc, aujourd’hui, dans le bureau. Elle doit s’ennuyer, j’suppose, à voir toujours les mêmes vieillards venir pour leurs rhumatismes. Donc un peu de chirurgie militaire, ça doit lui donner l’impression de faire de la vraie médecine, peut-être. Un peu comme si j’me retrouvais à jongler avec des couteaux au cirque alors que j’peux faire… tellement plus.
Enfin, quand j’arrive à buter mes cibles, s’entend.
« J’crois pas m’être présenté, d’ailleurs. Vrenn Indrani. Désolé, avec la douleur, et les soins immédiats… merci de m’avoir pris tout de suite d’ailleurs, hein… »
Hm. Confus. Doit être que j’ai mal.
« Examinateur à la Guilde. Faut que j’y aille pour le milieu ou la fin de matinée quand même, quoiqu’il y a rien de très urgent à faire. P’tet dire que j’suis malade et que j’peux pas venir. »
Mécaniquement, j’sors ma plaque d’Aventurier, davantage par habitude que par besoin de prouver quoi que ce soit. T’façon, elle me croirait, ou en ferait mine, vu qu’elle évite de trop fourrer son nez dans ce qu’elle sent être privé.
« Et vous, Docteur Weiss, à part vous lever tôt pour gérer le cabinet, vous avez des rêves ? Comme ceux des Aventuriers qui veulent voir du pays, vivre des sensations fortes ? »
Le café est encore brûlant, et bien noir, alors j’croque une bouchée de croissant.
« Après, c’est vrai que c’est pas pour tous les caractères, que j’dis en haussant les épaules. J’voulais pas dire que c’était pas impressionnant de soigner les gens, hein. Ça serait de mauvaise grâce de ma part de m’en plaindre. Juste la bougeotte de l’horizon, quoi. »
Ouais, j’ai vraiment aucune envie d’aller bosser.
Avec un aplomb tout à fait dénué de pudeur, elle longea du regard sa blessure, jaugea de l’épaisseur de sa silhouette, contourna ses épaules, sa mâchoire, et revint ancrer le vert ombrageux de ses prunelles dans celles de son patient. Oh, il semblait encore bien vif pour un homme à demi mort, et elle pressentait avec l’expérience d’un instinct féminin armé qu’il ne restait pas insensible à ses subtiles incitations.
Elle eut un regard équivoque à l’égard de sa blessure. Ce n’était toutefois pas ainsi qu’il pourrait continuer à voir du pays : le paysage était fortement limité six pieds sous terre. Elle se redressa et se dirigea vers la cuisine attenante à son bureau, en partie masquée derrière un rideau qu’elle chassa habilement du poignet. Fort heureusement, le café était encore bouillant, tout juste lancé avant qu’elle ne s’attache à recoudre son patient. Elle y rajouta finalement une cuillère de café plus corsée et revint déposer la précieuse tasse en face du dénommé Vrenn Indrani.
Elle grimaça, volontairement théâtrale, et trempa les lèvres dans son propre café. Un frémissement la prit au contact du liquide, et la tranquillité du moment lui rappela ses préoccupations premières.
Elle avait prononcé son nom, lentement, de la même manière que l’on se délecte de la saveur acidulé d’une friandise. Les paupières à demi closes, elle lui jeta un regard de jeune chatte tandis qu’elle décroisait le galbe soyeux de ses jambes pour s’avancer jusqu’à lui. Il avait le regard sombre, très noir. Ce détail l’intrigua. Car après tout, il n’était pas davantage que ce qu’elle espérait le plus de lui en cet instant : un corps tangible. Elle se demanda brièvement de quelle nature était la matière cachée derrière ce visage, et s’il lui serait possible de débrunir ce regard.
Sa main vint courir sur la sienne, remonter sensiblement sous l’épaisseur du tissu dont il s’était à nouveau recouvert, retroussant négligemment sa manche sous l’affront léger de ses ongles sur sa peau. L’homme n’était pas farouche, et ce premier test eut valeur de confirmation : il ne se dérobait nullement à son contact. Et puisqu’il acceptait de servir d’offrande à ses plaisirs, la demoiselle ne comptait nullement se gêner pour réclamer son dû. Ah, que la médecine était une activité grisante… Debout face à lui, sa main libre vint s’arrimer dans le crin sombre de ses cheveux, incitant son visage à se relever vers le sien, elle qui le surplombait.
Elle se pencha d’une courbe féline, et la robe de lin serrée à sa taille remonta sensiblement sur ses cuisses dans un froissement de tissu, soulignant par la même la forme arrondie de sa poitrine. Elle se coula dans la cambrure de sa posture, n’ayant aucun scrupule à s’installer tout bonnement sur lui, la pulpe de ses doigts froids glissant sur la chaleur de sa peau nue. Sous eux, la chaise exprima son mécontentement lorsqu’elle se plaqua contre lui d’une subtile cambrure des reins, les prunelles d’une malignité délicieuse et suave. Oh peut-être le chahuterait-elle un peu. Probablement la faute de ses airs de mauvais garçon. En tout bien tout honneur, elle n’était pas du tout mécontente de sa trouvaille !
Mais pour l’heure, sa bouche et sa langue avaient le goût du café.
La médecine, ça résout pas mal de problèmes, huh. Ça éclaircit aussi les idées. On se sent plus léger, malgré la douleur des soins, un peu vidé, aussi. Mais ça permet d’aborder les questions sous des angles nouveaux, de se poser et de reconsidérer les choses. J’me dis que j’ai tout pris à l’emporte-pièce, trop encroûté dans mes habitudes alors que j’me targue d’avoir un esprit pratique, lucide, et pragmatique, pour le travail. Mais à quelque chose, malheur est bon, on va pas se mentir. J’regrette aucunement d’être venu un certain nombre de fois dans ce cabinet.
Quelques jours plus tard, j’ai pas attendu. J’ai suivi ma cible dans une taverne. Puis j’ai empoisonné chaque putain de tonneau de la putain de cave, avec une dose propre à assommer un cheval. Faut savoir faire les choses en grand, parfois, pour que ça marche enfin. Une chiasse cosmique s’est annoncée pour tout le monde à l’intérieur, sauf moi qu’avais soigneusement pas bu une goutte, évidemment.
J’aurais pu mettre plus agressif, mais j’voulais pas non plus me retrouver avec trente cadavres sur les mains, ç’aurait pas vraiment été net et sans bavure.
Alfonso a suivi les autres. Il s’est vidé dans la ruelle, puis a titubé jusqu’à chez lui. J’ai toujours rien bité à son pouvoir, mais le poison fonctionne. J’devrais aller tout empoisonner chez lui, en fait. Il en cannerait, et ce serait affaire résolue. Bizarre que personne d’autre ait essayé, pourtant. Doit y avoir autre chose derrière tout ça… Et j’vais pas essayer de savoir. Nan, affaibli comme il sera dans quelques heures, ça se règlera proprement, et ce sera marre.
Il rentre dans sa piaule, surveillée comme toujours par quelques sbires qui se sont mis à son service. Ils sont pas au niveau, de toute façon. C’est des laissés pour compte des autres gangs, ou des dalleux qui pensent sentir le vent tourner. La plupart des bosseurs un peu sérieux attendent de voir si les barons ont donné le dernier mot ou pas, et leur silence laisse présager que non. C’est censé être moi, d’ailleurs.
J’me hisse sur un toit, et j’saute jusqu’au bon bâtiment. Ça fait bien longtemps que j’ai soudoyé la nana de la chambre de bonne pour qu’elle laisse sa fenêtre ouverte, la nuit, qu’elle tapine dans les rues de la Capitale ou pas. Une fois, y’avait un client, mais elle l’a rapidement fait taire avec les techniques dont elle a le secret. J’envisage d’ailleurs d’essayer pour moi-même, à l’occasion.
Mais aujourd’hui, c’est vide.
J’pousse la porte palière, et j’descends l’escalier grinçant jusqu’à la chambre d’Alfonso. Plusieurs heures qu’il est rentré, soit il est accroupi aux chiottes, soit il dort en se cramponnant le bide, plié en deux. Dans tous les cas, pouvoir béni par Lucy ou pas, merde, ça devrait aller. J’ai rangé tous les couteaux dans mon sac sans fond, des fois que ce soit les armes qui déclenchent des réactions automatiques.
Mon rossignol noir ouvre facilement sa porte d’entrée. Il est en position fœtale sur le canapé. Il se retourne en entendant le bruit, se fige quand il me reconnaît pas. Puis il essaie de se lever. La ficelle lestée à un bout que j’ai en main le cueille au menton, mais le gaillard est une véritable armoire à glaces. Il réussit à presque me tomber dessus. Je le repousse, et j’sens son pouvoir m’éjecter contre un mur dans le même temps.
Putain, j’ai mal à ma blessure, qui se rouvre.
Du coup, cette fois, c’est moi qui m’étale sur lui. La corde s’enroule autour de son cou, trop vite pour qu’il puisse mettre son poignet entre. Et j’sers. Bordel, que c’est long d’étouffer quelqu’un. Il se débat. C’est infini. On ahane tous les deux, on crache, on feule, puis il se calme finalement. Son pantalon est souillé, sa langue bleue, et ses joues rouges.
J’reprends mon souffle plus calmement maintenant qu’il a expulsé son dernier.
Puis j’le pends dans son salon, à une poutre, avec trois coups de couteau dans le dos, pour bien signaler sans ambiguité ce qui s’est passé.
Avec tout ça, faut que je retourne chez le toubib. La docteur Weiss, spécifiquement. Et pour être tout à fait honnête avec moi-même, j’espère bien un traitement proche de celui de la dernière fois. Mais si y’a une vague reconnaissance dans son regard, je ne bénéficie pas cette fois des faveurs de la précédente.
Bon. Il reste la pute qui habitait au-dessus de chez Alfonso, hein.
Ça me coûtera moins cher, en plus, sans le prix de la consultation.