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    Un monde plein de mystères,
    plein de magie et surtout plein d'aventures...

    Il est peuplé de créatures fantastiques. Certaines d'une beauté incomparable, d'autres aussi hideuses qu'inimaginables, beaucoup sont extrêmement dangereuses alors que quelques unes sont tout simplement adorables. La magie est omniprésente sur ces terres : des animaux pouvant contrôler la météo, des fleurs qui se téléportent, des humains contrôlant les éléments, des objets magiques permettant de flotter dans les airs...

    Dans ce monde, il y a le royaume d'Aryon. Situé à l’extrémité sud du continent, c'est un royaume prospère, coupé du monde. Il est peuplé d'hommes et de femmes possédant tous un gros potentiel magique, chacun vivant leurs propres aventures pour le meilleur comme pour le pire.

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    Ombres, spectres et bain moussant
    InvitéInvité
    Anonymous
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    Ombres, spectres et bain moussant
    Jeu 2 Jan 2020 - 20:45 #
    Des fois les choses pouvaient être simples. Aussi simple que de se déshabiller, s'enrouler dans une serviette et profiter d'un bon bain chaud. Les sources le permettaient et les douches de la Citadelle étaient certes chauffées en permanence, mais ce n'était rien en comparaison des thermes qui se trouvaient véritablement au pied de la montagne, dans le Bourg.

    Il était devenu difficile de décompresser depuis ma promotion et les émotions allaient et venaient, dans un débâcle qui m'échappait. Ici, la tranquillité, le repos et l'eau chaude coulaient à flot, tandis que je plongeais un orteil puis une jambe et bientôt mon corps tout entier dans l'un des bassins. À moitié immergée, je pouvais expérimenter la joie de ces deux températures qui se confrontaient : le froid de l'hiver montagnard enveloppant le haut de mon corps, la chaleur diffuse de sources chaudes baignant le bas.

    J'enroulai alors prestement la serviette autour de ma tête pour conserver mes cheveux à l'abri de l'humidité et disparaissais enfin jusqu'aux épaules sous la surface aqueuse, peu transparente en raison des volutes de fumée qui recouvraient l'eau claire. Persuadée d'être seule, je lâchai alors un long soupir de soulagement.

    Mais je n'étais pas seule et je ne le découvris qu'après avoir ouvert les yeux, alors qu'un homme sur le bord du bassin, en serviette lui aussi, me dévisageait à présent. Instinctivement, j'eus un mouvement de recul et, même si elles n'étaient pas visibles grâce à la vapeur, le réflexe de cacher mes parties.

    « - Q-qui êtes-vous et que faites vous ici ?! » demandai-je avant de me rendre compte de la stupidité de ma question.

    Il était là pour profiter des thermes, évidemment, tout comme moi. Il était encore tôt et pourtant en voilà un qui était assez matinal pour surprendre le Capitaine de la Forteresse dans sa tenue de naissance. Je jetai alors un regard vers la pancarte qui indiquait bien que le bassin était celui réservé aux femmes, mais affichai un regard horrifié. Impossible, m'étais-je trompée ?

    Saisissant maladroitement ma serviette, je l'immergeai à moitié pour couvrir mon torse et le haut de mes cuisses. Voilà qui était beaucoup moins confortable à présent... Dardant alors un regard mauvais vers le pauvre inconnu, je le mis en garde, espérant qu'il comprendrait mon embarras et resterait dans son coin de la piscine :

    « - Je suis le Capitaine en charge ici ! Si vous tentez quoi que ce soit, je m'assurerai que vous passerez vos prochaines nuits à l'ombre ! »
    Whiskeyjack CallahanLe glooby de toutes les femmes et la femme de tous les glooby
    Whiskeyjack Callahan
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    Re: Ombres, spectres et bain moussant
    Lun 6 Jan 2020 - 16:24 #
    Je vous vois tout de suite venir. Que ferait Whiskeyjack dans les thermes réservé aux femmes ? Question justifié. Et vous avez bien raison. Car je sais respecter ce genre de conventions qui sont propres à une société civilisé et intègre. Si tout le monde se permettait d’aller d’un bain à un autre, ou irait le monde ? Vers son inéluctable fin, vous le savez bien. Pour tout vous expliquer, ça commence comme la réaction première de n’importe quelle touriste de passage à forteresse. Des sources chaudes ? Des thermes ? Mais ça ne serait pas le genre de chose que chacun a toujours rêvé mais qui a toujours cru que c’était beaucoup trop loin et beaucoup trop cher ? Pas tant. C’est les charmes de la campagne, tout ce qui nous parait extraordinaire ; et donc cher ; est assez banal ici. Cela fait partie du paysage comme la neige et les montagnes. Mais en bon touriste de la capitale, alors que j’ai un moment entre deux missions d’importances ; car je suis un examinateur de la guilde impliqué dans mon travail, probablement l’examinateur de plus impliqué ; je me dégage le temps pour y tremper un doigt. Façon de parler. Et quel meilleur que moment que le matin, à la fraiche, après une belle nuit passer à la taverne à faire de nouveaux amis et vider les tonneaux de Monsieur Elliot, un tavernier sympathique qui propose des mousses agréables et des petits jeux anciens amusants. Il a certes une fâcheuse tendance à renverser des bières sur les autres, mais c’est la joie de croiser des gens sympathiques qui le met dans tous ces états.

    Je fais souvent cet effet-là aux gens.

    J’entre donc, je paie, évidemment, et on me désigne le vestiaire des hommes, vers lesquelles je me dirige tout naturellement. Parce que c’est la chose la plus naturelle à faire. Là, je n’y croise que succinctement un bonhomme que je salue amicalement alors qu’il essaie de rattraper la serviette qu’il vient de lâcher. De surprise. Bien sûr, je ne regarde pas si le monsieur est mieux doté que moi par la nature, chose que l’on a souvent en tête quand l’occasion se présente, mais qui n’est jamais très désagréable quand on perd dans le duel d’égo. Je n’ai pas de problème de ce côté-là. Il s’en va. Me laissant seul avec mon corps. Je vous vois bien avec votre petit sourire lubrique ; vous vous imaginez que Whiskeyjack s’adonne à des plaisirs simples et manuels dans des lieux publics ? Vous manquez sacrément de décence. Non. Je me contente de me désaper, de tout plier comme me l’a appris ma maman et de ranger dans le placard à ma disposition. Uniquement vêtu d’une serviette, si on peut appeler ça « être vêtu », je me dirige vers le bain le plus proche. Celui des hommes, donc.

    Pour être franc, je ne savais pas que les bains n’étaient pas mixes. En même temps, arrivant aux thermes pour homme, je découvre qu’il est désert, malgré la présence de l’autre homme dans l’établissement. Je ne réfléchis pas bien vite, parce qu’il caille un peu et que la température irradiant de l’eau stagnante est beaucoup trop tentante pour être laissé imperturbé aussi longtemps. Regard à gauche, regard à droite. Personne. Evidemment. J’amorce un petit plongeon. La chaleur de l’eau est très agréable. Revigorante même. J’en ressors à moitié, jetant les cheveux en arrière, l’eau dégoulinant sur mon torse de trentenaire baroudeur des plaines et des montagnes. Un peu échauffé, hein ? Je m’assois sur le bord, replaçant ma serviette partie toute seule à son poste de dissimulateur de mon honneur et j’écarte biens les bras, profitant du mixe de chaleur et de fraicheur du lieu. Et ce silence. Parfait.

    Pas si parfait. J’entends une discussion. Des gens qui viennent. Ça ne me dérange pas. Croiser des gens et pouvoir discuter, c’est tout de même sympathique. Ma réflexion des bains mixtes s’en voit conforter quand je vois apparaitre deux jeunes femmes semblant discuter d’un homme.

    -Il avait un sale regard. On aurait dû le dénoncer.
    -Ne t’inquiète pas. On a croisé la nouvelle capitaine. Elle va lui en faire baver…

    Leur regard s’arrête sur moi. Je me contente de lever le bras pour les saluer.

    -Bonjour, mesdames. L’eau est excellente.

    En excellent gentleman que je suis, j’évite tous les pièges de la perversité en esquivant toutes les zones charnels qui pourraient offusqués les demoiselles. Je réussis en constatant qu’elles ne semblent pas offusquées par ma présence. Au contraire, elles discutent à mi-mots entre elles tout en me lorgnant des regards concupiscents. Elles s’approchent tout en douceur.

    -Bonjour monsieur. On s’est déjà croisé, vous paraissez…
    -… impressionnant.
    -On me le dit souvent. Mais je ne crois pas non. Ou alors, ma réputation m’a précédé. Il est vrai que je suis plutôt à l’aise quand il concerne de lever les blondes, brunes, rousses et autres nectar désaltérantes.
    -Oooh.
    -Intéressant.
    -Et comment s’appelle cet intrigant personnage ?
    -Appelez-moi Jack. Et vous ? Vous êtes de la garde ? Vous parliez d’une capi …
    -De la garde ? Peut-être…
    -Vous aimez… les uniformes ?
    -C’est vrai que c’est plutôt jolis. Mais je me suis toujours demander comment vous arriviez à dormir avec.
    -Il suffit… de les enlever.
    -C’est loin d’être con, oui.

    Elles s’approchent beaucoup trop. Et vous savez ? Je n’aime pas beaucoup ça. Il y a quelque chose de pas net dans leur regard et leur attitude. Je n’ai pas eu vent de voleuses dans les thermes, mais ça ne saurait être étonnant. La société est tellement vile de nos temps. Et puis, je comptais prendre un bain tranquillement, pas être serré de si près. Je me lève profitant d’une ouverture.

    -Excusez-moi. Je dois…
    -Ouiii.
    -Bien sûr.
    -A tout de suite.

    Elles échangent un regard convenu que je ne comprends pas trop. En tout cas, elles me laissent partir et c’est dans un soulagement que je dirige vers d’autres bains où l’on sera plus tranquille pour apprécier les bains et ne pas à devoir déformer sa serviette. Et c’est donc comme ça que j’ai atterris dans les bains pour femme. Là, j’y trouve une femme et un homme. Mon homme. Enfin, façon de parler, hein. Ils se dévisagent drôlement, mais ils restent à bonne distance, ce qui est tout ce que j’attendais des thermes.

    -Madame. Monsieur. Ravis que l’ambiance soient un peu plus détendus ici. Il y a des jeunes gardes dans les autres thermes qui sont un peu trop collantes, si vous voyez ce que je veux dire. C’est tout de même plus agréable de pouvoir apprécier l’eau chaude dans une ambiance sympathique sans être entassé les uns dans les autres.

    Bref silence. On me dévisage. Je souris.

    -Appelez-moi Jack.

    Je m’installe sur le bord du bain, à mi-distance de monsieur et madame et puis je commence à faire la causette.

    -Vous venez souvent ici ? C’est quand même plutôt sympathique comme établissement. On pourrait y rester longtemps. Il manquerait presque de pouvoir boire un petit quelque chose, vous ne trouvez pas ?
    InvitéInvité
    Anonymous
    Informations
    Re: Ombres, spectres et bain moussant
    Jeu 16 Jan 2020 - 21:50 #
    L'individu étrange n'était pas parti, bien au contraire. En silence, il s'était installé dans le bain et me faisait face. Outrée, j'osais à peine le regarder, dans sa tenue aussi réduite que la mienne, si ce n'était qu'il semblait en être fier. Un individu pareil, ça méritait définitivement de finir au trou... et je m'en chargerais personnellement à ma sortie des bains. Sortie qui n'aurait su tarder si un second homme n'était intervenu entre temps.

    D'apparence joviale, celui-ci brisa la glace en salutations, ne manquant pas de m'informer de la présence de subalternes dans les parages. Hum, rien de bon dans tout cela, par réflexe je m’enfonçai un peu plus sous l'eau, enroulée dans ma serviette trempée.

    Nullement gêné par la situation, visiblement, l'individu étrangement sympathique s'installa donc dans son coin du bain, faisant fi de l'environnement tendu entre l'inconnu et moi-même. Non, au lieu de cela, il préférait visiblement faire la causette...

    « - Écoutez je... » commençai-je, avant de m'interrompre, remarquant que la présence de ce nouvel arrivant mettait mal à l'aise celui dont le regard me semblait de plus en plus fourbe et malveillant.

    Intéressant. Avions-nous à faire à un homme qui était à son tour mis mal à l'aise par cette compagnie ? Non, ce n'était pas un souci d'antipathie, à vrai dire le dénommé Jack respirait une véritable bonté et, même sans le connaître, je pardonnais déjà son aspect bourru ; la facilité avec laquelle il s'était immiscé dans la situation.

    « - Effectivement, je viens fréquemment ici. Le matin, tôt, très tôt car les bains ne sont normalement pas aussi bondés... »

    J'adressai un sourire au gentleman, ne réfléchissant à mon geste qu'après l'avoir fait, comme si c'était tout bonnement naturel. Bon sang, dans quelle situation m'étais-je fourrée ? Devant moi, l'autre homme demeurait coi.

    « - Si vous voulez boire, il y a normalement de quoi faire, même si à cette heure la demande me semble étrange. Enfin, peut-être notre ami ici présent pourrait aller chercher des cruches de vin pour nous... »

    Et me laisser l'occasion de m'éclipser, de m'habiller et de l'attendre au retour, armée et prête à l'accompagner aux geôles. Frapper avant, connaître les motifs d'une telle perversion après. Non, je n'appréciais pas ce genre d'intrusion et beaucoup d'hommes ici se permettaient de faire des choses que l'on reprochait plus facilement aux femmes.

    « - Qu'en pensez-vous Jack ? D'ailleurs vous ne trouvez pas notre ami peu loquace... ? »
    Whiskeyjack CallahanLe glooby de toutes les femmes et la femme de tous les glooby
    Whiskeyjack Callahan
    Informations
    Re: Ombres, spectres et bain moussant
    Mar 28 Jan 2020 - 16:23 #
    -C’est vrai qu’il est pas très loquace. Un problème, mon gars ?

    Il nous regarde toujours avec ce regard quasi fixe, presque perturbant. Presque, parce qu’il me rappelle le regard vide de tous les potos des comptoirs qui ont bu un verre de trop ou qui se sont pris un râteau. Souvent les deux dans la même soirée. Ils ne savent pas trop ce qui se passe dans leur vie, comme si tout s’était arrêté et qu’il essaie de se remémorer quelque chose à quoi se rattacher. Sauf que bon, je ne vois pas de cruches à portée de main et je doute que le personnel laisse entrer le saoulard du coin. Pas que j’aime pas les saoulards, mais bon, ils sont gentils dans le fond, mais ils embêtent les serveuses qui ne demandent qu’à aller se coucher et c’est tout de même pas cool pour celles qui les ont servis pendant toute la soirée. M’enfin, c’est peut-être l’autre option. Il a fait une déclaration à la gonzesse et il s’est pris un mur. Bien vrai que c’est un sacré petit lot, mais je vous retiens tout de suite. Je ne m’autorise aucune liberté visuelle. Tout de même, les bains ne sont pas là pour se faire reluquer la boite à outils dans l’indécence la plus totale. La dignité, c’est important. Je n’ai fait que constater. Juste. Par contre, elle a pas l’air d’être dans l’attitude de la fille qui s’est fait dragué et qui a mis un gros stop au type. Bizarre. Doit pas être ça. Pourquoi rester immobile comme ça ?

    Puis la vérité éclate.

    Il doit avoir une attaque.
    Je m’élance soudainement vers lui traversant l’eau qui nous sépare, me préoccupant juste ce qu’il faut de ma dignité, parce que sauver des gens n’implique pas de tout lâcher pour autant. Pensez aux enfants. Le type me voit arriver en faisant les gros yeux. Je vois la peur dedans. La peur de mourir, mais on ne meurt pas en la présence de Whiskeyjack Callahan. Ah ça non. Un citoyen a le devoir de porter secours à son prochain, et j’en ai beaucoup. Arrivant à proximité de lui, je plaque une main puissante sur son torse qu’il a bien velu, ressentant son cœur. Plutôt palpitant même. Une passe une main sur son visage, ressentant le souffle rapide de sa respiration. Même de là, ça marche plutôt bien. Et puis, je l’ai collé un peu en arrivant, il est plutôt chaud. D’aucun dirait torride.

    -Excusez-moi, je pensais… que vous étiez souffrant.
    -Euh. Oui. J’avais… comme une crampe.
    -Au pied ? Ça s’est terrible. Ça fait un mal de chien. Moi, ça m’arrive souvent le matin, mais surtout quand je suis à la capitale. Ça doit être l’atmosphère, bizarre non ?
    -Oui. Peut-être.
    -Il y a quelque chose qui vous dérange ?
    -Vous pourriez… peut être … vous…
    -Ah ? Il faut que je m’éloigne !
    -Non ! Ce n’est pas ça.

    Il se rapproche de moi, me mettant une main sur mon épaule comme pour me dire un secret inavouable. Il peut me faire confiance, je trahis pas les gens qui placent leur confiance en moi. C’est compliqué quand tu as les confidences des deux parties, souvent, mais Jack, l’est un coffre-fort.

    -La femme. Là.
    -Oui ?
    -Elle me fait peur. Je crois que c’est une … Perverse.
    -Sérieux ?
    -Oui. J’étais chez les hommes. Elle est entrée. Je suis parti. Elle m’a suivi.
    -Bah ça alors !
    -Vous pouvez m’aider, monsieur ? on pourrait… l’attraper. Pour qu’elle ne fasse plus de mal.
    -Ah ouai, pour sûr. Ça tombe, elle détourne même les mineurs. Dégueulasse.
    -Je ne vous le fais pas dire.
    -On va l’attraper.
    -Merci, vous me faites plai… rendez un sacré service. Moi, c’est Michel.
    -Enchanté.


    Voilà, ça me met hors de moi. Les gens dégueulasses et sans aucune dignité, ça pullule de plus en plus de nos jours. Je lui claque virilement l’épaule en l’assurant de mon soutien d’un regard assuré. Je comprends mieux cette histoire d’aller chercher des cruchons de vin. Elle voulait certainement abusé de ma faiblesse pour porter atteinte à ma dignité. Mais que fait la garde ? A part harceler les honnêtes citoyens dans les bains, je veux dire. Rien. On est en sécurité nulle part. C’est vraiment ça le monde qu’on veut laisser à nos enfants ? Où les prédatrices se baladent en liberté. Heureusement qu’il y a d’honnêtes citoyens qui se lèvent contre l’immobilisme des autorités.

    Je retourne à ma place, adressant un sourire de façade à la perverse.

    -Il va bien. Il est même en super forme. Il a eu une crampe, mais c’est un gros dur, il s’en remettra.

    Du coin de l’œil, je vois mon nouvel ami s’approcher par l’autre côté, le regard braqué sur l’infâme succube lubrique. Le plan est en marche. Il faut endormir son attention. La faire parler. Et ça, j’ai plutôt du talent.

    -Et sinon, comment vous appelez-vous ? Que faites-vous dans la vie ? Vous aimez souvent prendre le bain avec des monsieurs ?
    InvitéInvité
    Anonymous
    Informations
    Re: Ombres, spectres et bain moussant
    Dim 2 Fév 2020 - 13:38 #
    La situation s'était complexifiée sans que j'en saisisse les tenants ou les aboutissants. Après avoir sauté sur l'homme douteux qui continuait à me regarder fixement, les deux hommes avaient partagé quelques mots. Probablement Jack qui essayait de le raisonner alors, de lui faire entendre raison pour le contraindre à quitter le bain. Quel homme.

    Et puis il s'en était venu de mon côté. Du coin de l’œil, je voyais l'inconnu quitter son gainage, probablement pour plus tard sortir du bain, averti. Jack s'était ainsi rapproché pour m'informer de l'état de l'homme et me faire froncer les yeux.

    « - Je pensais que vous l'aviez convaincu de partir ? »

    Ne comprenant pas là ce que comptait faire mon nouvel ami, je le laissais me poser des questions triviales et y répondais circonspecte. Est-ce que cela faisait partie de son plan ?

    « - Mon nom est Elina Von Andrasil, je suis Capitale de la Garde et j'aime généralement prendre mes bains seule, lorsqu'un pervers n'est pas en train de me reluquer. »

    À cet effet, je tournais mon regard vers... Où était-il passé ? Puis soudain, je sentis une main glisser sur ma bouche tandis qu'un bras me soulevait hors de l'eau. Surprise, tenant toujours ma serviette mouillée pour ne pas me révéler entièrement dévêtue, je me retrouvais tractée hors de l'eau. Je devinais rapidement l'identité de mon ravisseur, qui se fendit d'un :

    « - Merci pour le coup de main Jack ! »

    Impossible ! Est-ce que je venais d'être trahie par cet homme qui m'inspirait pourtant tellement confiance ? Me débattant tant bien que mal, j'essayais bien de me soustraire à l'étreinte de mon ravisseur, mais celui-ci tenait bon. Surtout lorsque je compris quel était son pouvoir : la colle qu'il secrétait à partir de sa peau et avec laquelle il venait de me badigeonner la bouche et les bras. Si bien que je ne pouvais pratiquement plus bouger ni crier à l'aide.

    Il continuait ainsi à me traîner vers l'extérieur, la porte de derrière des sources chaudes, tandis que je me maudissais d'avoir baissé ma garde. Voilà, maintenant j'étais fichue, emmenée par un pervers. Qui savait ce qui allait m'arriver ?

    Ah elle était bien belle la nouvelle Capitaine.
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    Re: Ombres, spectres et bain moussant
    Ven 7 Fév 2020 - 12:55 #
    Je suis un peu circonspect. Certes, le danger ambulant pour la santé et la morale publique qu’est cette « Elina » est arrêté grâce à l’aide de mon nouvel ami, mais il y met un entrain qui me surprend. Lui qui paraissait si effrayé par sa tortionnaire morale, presque en état de choc, le v’là qu’il galope comme pas permis, trainant sa proie sans grande douceur. En même temps, venant d’une personne aux passions si obscènes, n’hésitant pas à abuser de la crédulité des premiers venus par des mensonges éhontés, elle le mérite un peu. Capitaine de la garde ? Elle ? Jamais entendu parler. Me semble que c’est un type qui dirige. Un certain Noname. Tout le monde sait ça. Son baratin n’a pas réussi à passer les barrières de ma parfaite connaissance de la hiérarchie militaire d’Aryon. Les petites frappes ne sont pas très malignes du côté de la forteresse. Le froid, sans doute. Bref, l’affaire a été rondement menée.

    -Bon, Michel. Je pense que tu peux la laisser là. Je vais appeler de l’aide et on donnera ce criminel aux autorités.
    -Hein ? Non ! Il y’en a d’autres ?

    Il parait soudainement stressé. Je le comprends. Elle n’a pas agi seul ? C’est un réseau ? Malédiction ! Les brebis galeuses sortent en meute on dirait. Je pense aux deux impertinentes. C’était donc ça ! Elles font parties de ce groupuscule honteux. Elles se présentaient comme des gardes. Sous le couvert de l’autorité, elles sont capables de manipuler n’importe qui pour parvenir à leurs fins. Diabolique. Et c’est bien leur capitaine, leur chef, qu’on a choppé. Décidemment, les recoins de la Frontière cachent de bien sombres individus. Cette CABALE perverse a fait l’erreur de tomber contre bien plus fort qu’elle. Moi. Pour ceux qui n’avaient pas compris. On entend du bruit, justement. Les bruits de luttes ont dû attirer l’attention.

    -Il faut se planquer avant que quelqu’un n’arrive !
    -T’as raison Michel, on va nous tomber sur le râble !
    -La porte ! vite !

    J’aide mon collègue d’infortune, constatant avec surprise son pouvoir. Plutôt utile. C’est bien ma veine.

    -C’est pratique ça.
    -Oui, plutôt, pour Kid… attraper les criminels.
    -Vous êtes de la garde ?
    -C’est ça. Je suis espion.
    -Aaah. D’accord !
    -Vous faites quoi vous ?
    -Je suis aventurier.
    -Chouette boulot.
    -C’est plaisant, oui.
    -Et c’est quoi votre pouvoir.
    -Je fais tomber des pianos ?
    -Ah bon ?

    Je m’étends pas sur le fait que je le maitrise assez mal et que c’est un peu totalement par hasard, mais y a-t-il vraiment besoin d’un pouvoir pour bien faire son boulot ? Non. Regardez-moi. Il suffit d’être sympa en toute circonstance et le destin t’offre des alliés de poids. On est arrivé à la porte et Michel l’ouvre d’une main. Puis soudainement, on est interpellé de derrière.

    -Vous ! Qu’est-ce que vous faites à la capitaine ?!

    Je jette un coup d’œil par-dessus mon épaule. C’est ces deux complices de toute à l’heure. Elles se précipitent dans notre direction. Michel me presse et on passe à trois de l’autre côté. Alors qu’on s’apprête à fermer la porte, elles arrivent sur la poignée et un duel de force s’engage. L’une essaie de passer une épaule dans l’encadrement de la porte, mais je la repousse du plat de la main. Tirant de toutes nos forces, on finit par fermer la porte et Michel balance des pelletées de sueurs collantes sur les bords de la porte pour la faire tenir. Ça semble tenir malgré les coups de l’autre côté, ce qui me permet de regarder où on est. C’est un peu les coulisses de l’établissement. Il y a du matériel, des armoires et un long couloir menant vers ce qui devraient être la partie privée et administrative de l’établissement.

    -Dépêchez nous. Ma colle ne dure que quelques minutes !
    -Ah ouai ? Sacré contrecoup à la validation.
    -Validation ?
    -Oublie.
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    Re: Ombres, spectres et bain moussant
    Dim 9 Fév 2020 - 13:34 #
    Inutile de lutter dans cet état. Enfin, j'avais pu espérer que les deux jeunes Gardes qui m'avaient reconnue me porteraient secours, mais c'était sans compter sur l'aide que Jack apportait consciemment à mon ravisseur. Étrangement, même si je ne connaissais l'homme que depuis une quinzaine de minutes, la trahison de ce-dernier me heurtait profondément. C'était comme un coup de poignard enfoncé soudainement dans mon coeur par un ami qui m'était cher. Était-ce encore un ami ?

    Peut-être comptait-il faire volte-face, tôt ou tard. Peut-être que tout cela n'était qu'un plan de sa part pour retracer l'origine du mal, les raisons pour lesquelles l'inconnu s'en prenait à moi à présent. Si c'était ça, et ça devait être cela, alors cet homme était un génie. En plus d'être très sympathique, assez pour me venir en aide dans cette enquête soudaine qui m'était tombée dessus...

    Mais attendez, c'était tout de même moi le dindon de la farce dans tout cela ? À moitié dénudée, je luttais tant bien que mal, sentant le contact de la peau du criminel sur mon corps affaibli ; un véritable supplice. Il ne me restait qu'à espérer que mon compagnon savait ce qu'il faisait et agirait tôt ou tard.

    Une fois à l'extérieur, je captais leur conversation, comprenant que la colle cesserait de faire effet à un moment et que je pourrais me rebeller. Quel intérêt avait donc cet homme à enlever un capitaine, toutefois ?

    « - Mgnmhnnn... !

    - Ferme-là ! Reste tranquille et tout va bien se passer, » chuchota une voix dans mon dos.

    Bien, l'homme ne semblait pas serein. Peut-être que la présence imprévue de mon futur sauveur l'obligeait à revoir ses plans. En tout cas, viendrait un moment où...

    Blom.

    Passage au noir.

    J'ouvrai finalement les yeux après un sommeil sans rêve, le crâne douloureux et les cheveux tâchés de sang séché ; on avait dû m'administrer un coup assez puissant sur la tête au sortir des thermes. Je découvrais, en cherchant à bouger, que j'étais visiblement pieds et mains liés à un anneau situé au centre de la cellule sombre et crasseuse dans laquelle on m'avait jetée. Où étais-je à présent ? Et où étaient mes ravisseurs ?

    Écartant les doigts, je fis naître un orbe au creux de ma main pour m'éclairer et m'assurer que les menottes ne bloquaient pas la magie. Bien, ça pouvait encore être un acte isolé qui n'avait rien à voir avec la Garde.

    « - I-il y a quelqu'un ? À l'aide ! » tentais-je de crier, d'une voix brisée.

    Et puis un puissant rayon de lumière dévora la pénombre, faiblement éclairée par mon orbe faiblard, lorsque la porte qui me faisait face s'entrouvrit légèrement.

    « - Jack, c'est vous ? »

    J'espérais.
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    Re: Ombres, spectres et bain moussant
    Mer 12 Fév 2020 - 11:39 #
    -Et là, j’espérais vraiment qu’il n’ait qu’une paire ! Parce que j’avais quand même misé ce que j’avais dans mes poches et que je voulais pas que mon pote paie à nouveau toute la tournée du bar. Faut dire, quand il a bu trois bières, il peut pas s’empêcher, sous prétexte d’aller commander une planche de charcuterie, d’aller payer toutes les consommations jusqu’à maintenant. C’est sympa, mais c’est relou. M’enfin, de toute façon, il est repéré à l’avance et les taverniers habituels connaissent la combine. Il se fait débouter proprement. Bref, j’avais tout misé. Il me sort la paire maitresse en gardant qu’une carte comme pour me mettre la pression. Un sacré salaud. J’aligne ma double paire. Il tente un vieux bluff crasseux, mais je me laisse ne pas avoir, foi de Whiskeyjack. Et il balance. Juste une carte seule. Pas d’évolution de figure. J’ai soufflé un bon coup, j’étais pas passé loin de la banqueroute.
    -Ahah, sacré Jack.

    Vous vous demandez sans doute qu’est ce qui se passe là. Des choses normales. Je suis sur mon tabouret, au comptoir d’un rade que je ne connais pas, mais qui a le chic de servir des chouettes gnoles qui te réveille ton homme en cette belle matinée frigorifique. Le patron est sympa avec un petit accent du coin et les habitués sont calmes, puisqu’ils dorment, cuvant la nuit pour la plupart. Il n’y a que les travailleurs de l’aube qui animent le bar. Deux artisans qui se sont levés aux aurores, une patrouille de la garde qui passe faire fonctionner le petit commerce et un commerçant de passage qui prend toujours une chambre à l’étage. Bonne ambiance. Des petits verres, mais qui réchauffent tendrement le cœur et le corps. C’est ce qu’il faut.

    Vous vous demandez d’où vient ce passage du coq à l’âne ? C’est parce qu’il n’y a pas grand-chose à en dire. La mission est accomplie. La criminelle a été embarquée par l’espion et quelques-uns de ces collègues, parfaitement déguisé en malfrats peu recommandables. C’est fou comment les espions ont un talent fou pour se faire passer pour n’importe qui. On s’est infiltré dans la partie privée des bains où il n’y avait pas grand monde à cette heure ; trop tard pour mettre en marche les thermes, trop tôt pour le boulot administratif. Au pire, ils étaient en pause, ce qui m’avait justement fiat pensé à en prendre une dans un bar que j’avais repéré la veille en allant justement dans un autre. Comme quoi, le monde est bien fait. Bref. Une fois sortie, on a attendu les forces de l’ordre camouflé et ils ont embarqués la dangereuse criminelle en me disant qu’ils allaient bien s’occuper d’elle. Ils se sont demandés qui j’étais. On a un peu discuté et ils m’ont proposé de les rejoindre plus tard. Whiskeyjack ? Espion d’Aryon ? Ça me parait plutôt drôle. Ça doit être un boulot d’Elite réservé aux meilleurs éléments du royaume, au casier judiciaire vierge de la moindre incivilité, parce que c’est important, la probité.

    Un taff pour Jack, quoi.

    -Bon, c’est pas tout ça, mais si on traine trop, on va se faire emmerder par la capichef.
    -La ? Votre supérieur est une femme ?
    -Ouaip. La Capitaine Von Andrasil. Ça ne fait pas longtemps qu’elle a obtenu le poste.

    Décidemment, ces criminels sont bien renseignés.

    -C’est drôle, j’ai croisé une femme aux thermes qui prétendait être cette capitaine.
    -Ah ? Pas souvenir qu’elle va souvent aux thermes.
    -De toute façon, ce ne devait pas être elle. C’était une perverse qui squattait dans les bains des hommes.
    -Ah ouai ? Les gens n’ont aucun scrupule, quand même.
    -Heureusement, un esp… garde est intervenu et a réussi à la maitriser.

    J’ai bien manqué de révéler le rôle de Michel. Michel qui peut être un pseudonyme, une couverture pour ses missions d’espionnage, certes, mais tout de même. Ça ne se fait pas de briser la couverture des gens. Surtout quand ils ont confiance en moi. La confiance, c’est sacré.

    -Ah bah ça prouve bien que c’était une imposture. J’en connais pas beaucoup des gens qui arriveraient à capturer la capitaine sans se faire énucléer dans la seconde. C’est pas une fragile, la capitaine.
    -M’étonne pas. On ne donne pas ce rôle à n’importe qui.
    -Ouai, genre Wendy.
    -Qui ?
    -Non, rien, une pique totalement gratuite.
    -C’est toujours plaisant quand ça reste bon enfant.
    -Evidemment. Allez. Bonne journée !
    -De même !

    Qu’ils sont sympas, ces gardes. Je paie mon coup, je salue les gens, et je mets aussi les bouts. Direction ? Un coin assez paumé du patelin. Ce qu’il y a de plus mal famé pour une petite ville de campagne aussi haut dans le nord. Pas trop le genre des quartiers chauds de la capitale, donc plutôt une promenade. Mais en même temps, c’est bien là qu’ils mettraient une planque des espions. Enfin, si j’étais Maitre-Espion, c’est ce que je ferais.
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    Re: Ombres, spectres et bain moussant
    Mer 19 Fév 2020 - 21:14 #
    Plaquée contre le mur, habillée par un fin vêtement de lin qui m'avait été jeté au visage par mon geôlier, je frissonnais à présent. La chute brutale de température, déjà fraiche à cause de ma tenue légère et de l'humidité ambiante, m'avait avertie que la nuit venait de tomber et le bouillon qui m'avait été servi par l'homme resté anonyme n'avait pas suffit à me réchauffer.

    J'avais compté trois visites depuis mon réveil, espacées par des plages horaires assez similaires si je me fiais à mon instinct. La première fois avait été une découverte, lorsque l'homme que je pensais être mon sauveur était en réalité un de mes ravisseurs. Leurs visages étaient camouflés et leurs tenues noires et amples, mais je reconnaissais celui-là comme différent de l'homme des bains : il était nettement plus gros et plus petit. Une peur effroyable s'était emparée de moi, quand je pensais à quel point j'étais à la merci de mon geôlier avant qu'il ne dépose le plateau repas. Ce fut aussi sûrement car il nota mes frissons que je reçus, à sa deuxième visite, de quoi me couvrir.

    Entre temps, je m'étais habituée au faible éclairage de mon orbe malingre et mon regard avait eu le temps de faire le tour de la cellule ainsi que de ce que je pouvais percevoir de l'extérieur : le début d'un couloir derrière la porte en fer et le ciel depuis la lucarne au-dessus de moi. L'endroit était étrangement similaire aux geôles de Forteresse, ce qui me poussa à imaginer qu'il devait s'agir d'un fortin désaffecté...

    La troisième visite avait été celle d'un autre homme qui m'était encore inconnu, d'allure plus trapue. Habillée de la même façon, il avait été le seul à m'adresser la parole jusqu'alors, lorsque je m'étais risquée à poser des questions sur l'endroit où j'étais et qui ils étaient eux.

    « - Là où vous irez demain, vous n'aurez plus besoin de le savoir. »

    Je devinais aisément, depuis, que les ambitions de mes agresseurs étaient de me faire disparaître. J'étais toutefois soulagée de voir qu'ils me traitaient avec une forme de respect, sans abuser de ma personne et en restant à l'écart. Les plateaux repas n'étaient pas copieux, mais au moins la nourriture était comestible. J'avais connu pire.

    Je passai la nuit à chercher un moyen de me libérer de mes chaînes, envisager une ouverture, mais les sbires restaient sagement près de la porte lorsqu'ils me rendaient visite et les mailles étaient solides et la chaîne trop courte. Mon pouvoir ne m'était d'ailleurs pas d'une grande utilité... Ah si seulement il pouvait être un poil plus offensif, des fois.

    Je ne pus donc qu'attendre que mon heure ait sonné et cela ne tarda pas à arriver. Avant même le lever du soleil, la porte grinça à nouveau sur ses gonds et les deux hommes entrèrent pour me saisir et libérer mes menottes des chaînes clouées au sol. J'essayai vainement de me débattre, causant du tracas à l'un des geôliers qui écopa d'un coup dans la lèvre et d'une douleur vive entre les cuisses, mais fus rapidement maîtrisée par un coup de poing sous le sternum.

    Ils savaient où frapper donc... Je commençai à nourrir des craintes sérieuses quant à l'identité de ces individus. Mais je n'en fus sûre que lorsque je fus sortie à l'air libre, frissonnant à cause du vent glacial, mon regard se déposant sur le paysage autour de moi. Je connaissais cet endroit. Et je savais, avant même de voir son visage ricanant, qui était le commanditaire de mon enlèvement.

    « - Gildan, ordure !

    - Allons, allons, Capitaine. Ce sera Lieutenant Gildan pour vous. »

    L'homme s'était tenu à la sortie, à proximité de son cheval et d'une charrette qui était probablement destinée à me porter à mon épopée finale. Son air goguenard voulait tout dire, si bien que je perçus l'index qu'il glissa sous mon menton comme un outrage plus grand encore. De son autre main, cependant, il dévoila un papier froissé qu'il tendit devant mes yeux ; je reconnus rapidement le sceau et long message que j'avais moi-même écrit il y a plusieurs nuit de cela.

    « - Quelle chance que j'aie intercepté votre messager il y a quelque jours. J'aurais pu être démis de mes fonctions sans même m'en apercevoir.

    - J'aurais dû me douter que vous tenteriez un coup pareil... Vous n'en sortirez pas indemne, sachez le, d'autres sont au courant !

    - Oh, bien sûr que si... J'ai tout prévu voyez-vous. Je sais même à qui faire porter le chapeau, grâce à l'intervention de ce gros nigaud aux thermes. Le Capitaine du Blizzard, enlevée dans son apparat le plus simple par un pervers et disparue à tout jamais... Qui pensera réellement que votre cadavre est perdu quelque part dans le Grand Nord ? »

    Tendant les bras, l'homme éclata d'un rire tonitruant dans l'immensité déserte et neigeuse qui entourait le fort. La route ne se trouvait pas très loin, mais personne ne s'aventurait jamais dans ces terres, trop proches de la frontière.

    Je jugeai cependant l'ahuri en silence, me sentant idiote de m'être laissée avoir par un tel énergumène. Mais il n'en avait visiblement pas terminé :

    « - Évidemment, je serai celui qui a trouvé le responsable de votre odieux crime. Cela me vaudra probablement une mutation dans le Sud, voire peut-être mieux, une promotion...

    - Continuez, vous vous fourrez le doigt dans l’œil jusqu'à où je pense. »

    L'expression du mécréant passa rapidement de la félicité à l'ennui suite à ma réponse. D'un signe de la main, il invoqua un de ses gorilles, ne tardant pas à me faire payer mes paroles d'une coup bien placé dans la pommette. La lèvre coupée, je libérai après quelques secondes d’égarement une giclée de sang.

    « - Bâillonnez-la et faites-la monter... J'en ai trop entendu, » maugréa-t-il insidieusement avant de se retourner vers son cheval et l'enfourcher maladroitement.

    Je ricanai malgré le tissu qui vint aussitôt comprimer ma bouche, puis le sac en toile qu'on me vissa sur la tête. Et bientôt je me sentis transportée, pieds et mains liées, sur la charrette où je fus jetée et aussitôt recouverte de ce qui devait être une bâche.

    Ainsi dissimulée, je me résignai à attendre mon heure, uniquement consciente du temps qui passait grâce au trottinement des chevaux de trait et aux défauts dans la route qui secouaient mon corps à chaque bosse. Le convoi faisait route vers le Poste-Frontière où jamais personne ne contesterait les ordres du Lieutenant et chercherait à inspecter le contenu de sa voiture. Alors il passerait outre, jusqu'au Nord, où ils me tueraient ou me laisseraient probablement livrée à moi-même, s'ils décidaient de n'avoir aucun scrupule.

    À ce moment là, j'étais perdue.
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    Re: Ombres, spectres et bain moussant
    Ven 21 Fév 2020 - 15:25 #
    C’est à ce moment-là que je t’interviens. Sautant du toit d’où j’observais les criminels, j’effectue un petit salto au passage avant d’atterrir les deux pieds dans la charrette à quelques centimètres d’Elina. Tout était calculé. Je balance mon poing avec puissance dans le conducteur que j’envoie valdinguer sur le côté, manquant de peu de se faire briser le bras sous le poids d’une roue. Je sors mon surin et je plante proprement le gros bras sur le siège passager tout en me saisissant des reines et que je lance les chevaux dans un galop bien matinal. Le chef et les autres sont surpris et me poursuivent. C’est sans compter sur mes alliés qui surgissent des ombres, armes en mains et arrêtant mes poursuivants. Au bout d’une minute sans voir personne à l’arrière, je ramène les chevaux au pas et je passe à l’arrière, enlevant la bâche d’un grand coup et puis passant une main ferme sous la peau délicate d’Elina. Je lui enlève son sac de toile et nos regards se croisent. Il n’y a pas besoin de mots. On se rapproche. Ses lèvres ont tant besoin de chaleur. Elle passe un bras dans mon dos. Nos souffles s’accélèrent. Nos yeux se ferment. Je sens son souffle sur mon nez. Et… et …

    Vous espériez que ça se passe comme ça ?
    Dommage.

    ***

    La vérité, c’est que je suis arrivé au lieu-dit pile à l’heure. C’était une ruelle sombre à la file de deux autres ruelles moins sombres mais pas plus sûr. J’ai croisé deux types qui m’ont jeté des regards mauvais et j’ai dû savater le deuxième parce qu’il cherchait ma bourse d’un peu trop prêt. N’est pas examinateur qui veut. L’argent, c’est important. Ça paie les coups. Sans argent, la fête est moins folle et ça serait quand même sacrément chiant. J’avise les quelques portes. Rien ne bouge. Rien ne semble vivre, même. Puis, au bout de cinq minutes, il y a une porte qui s’entrouvre et une petite vieille laisse passer sa tête en me jetant un regard perplexe. Je la salue.

    -Bonjour. Belle journée, n’est-ce pas ?

    Ses sourcils se froncent. Elle sort de quelques pas, regardant dans la rue comme si elle s’attendait à trouver une bande de gros bras suivant leur chef un peu trop charismatique. Je m’approche d’elle avec le sourire. Elle recule tout de suite à l’abri de sa maisonnette. Je lève les mains pour montrer que je n’ai rien dedans. Toujours montrer qu’on a pas d’armes, c’est important.

    -N’ayez crainte.
    -Vous … êtes avec les gens… là ?

    Elle doit parler des espions. Ça me surprend dans un premier temps, mais au final, c’est normal qu’elle soit au courant. On cache jamais longtemps les choses aux vieilles dames. Elles en ont vu suffisamment dans leur vie pour comprendre avec peu de mots et d’indices. Et puis, elles sont plus souvent du bon côté de la loi, alors, quand on est un espion, c’est l’assurance d’avoir une allié de poids qui saura préserver le secret. Et fournir des tartes pour le gouter de temps en temps, et ça, c’est agréable. Je lui réponds sur le ton de la confidence, agrémenté d’un clin d’œil complice.

    -Oui. Je suis avec ces gens-là !
    -Il y a eu… un grand bruit. Une bagarre. Il y a une trentaine de minutes.
    -Vraiment ?

    Une bagarre ? Malédiction. Se pourrait-il que la criminelle ait réussi à s’échapper ? Je tourne la tête vers la porte que la vieille me montre du doigt et je m’en rapproche. En l’examinant de plus près, je constate qu’effectivement, elle ne tient plus sur ses gonds. Je dégaine ma lame et la vieille retourne se barricader. D’un coup de pied puissant, j’expédie la porte à l’intérieur et j’entre. Après une entrée sale, mais sans rien de surprenant. Les pièces suivantes expriment davantage ce qu’à constater la vieille. Tout est sens dessus dessous. Les tables sont renversées. Tout a été mis par terre. Il y a plusieurs corps gisant au sol. Je m’approche des deux plus proches pour constater qu’ils ont été poinçonnés proprement et sans aucune chance d’en réchapper. Un travail de professionnel. Derrière, trois autres corps. Un autre cadavre sous un amas de débris, puis un corps inconscient. Et enfin, Michel, mon pote, allongé contre une table renversé, le sang coulant sur une partie de son visage. Je me précipite sur lui. Son pouls est faible, mais il vit.

    -Allez ! Michel ! Réveille-toi !

    Je lui tapote les joues. Je sais plus si c’est ce qu’il faut faire, elle est loin ma formation « Sauveteur-Secouriste du Travail ». Ça doit être ça, parce qu’il bouge dans son demi-coma. Je lui soulève la paupière. Reflexe pour la fermer. Il est conscient. Une autre paire de baffe et il secoue lentement la tête en grognant. Allez, Miche. Arrêter de rêver.

    -Michel ! Tu m’entends ?
    -Mmmmh … oui… Jack ?
    -C’est moi ? Qu’est-ce qu’il s’est passé ?
    -Sais… plus… N’allait… commencer… à s’amuser.
    -L’interrogatoire, ça ?
    -Euuh…. Oui. Si on veut. Puis deux types sont entrés. Z’ont tué Fado et Krug. S’est battus… trop fort. Partis avec… la fille.
    -Qui étaient-ils ?
    -Sais pas… fort.
    -Ne t’inquiète pas Michel. On va te sortir de là. Je vais prévenir la garde !
    -Non… pas… pas la garde.
    -Il le faut Michel. Je sais bien pour ta couverture, mais tu vas mourir sinon. Pense plus large et pas que t’as seule personne.
    -Qu’est... tu… aaaaah… merde… maaaal.

    Il commence à perdre connaissance. C’est pas bon. Je me précipite à l’extérieur et je tape à la porte de la vieille qui entrouvre sa porte.

    -Ouiii ?
    -Il faut prévenir la garde ! Vite ! Des gens ont besoin d’aide ?
    -Ah ça oui. Ils sont pas nets dans leur tête.
    -C’est parce que ce sont des agents infiltrés, évidemment.
    -Ah ? Je vais envoyer mon petit-fils. Lirmin ! Va chercher la garde !
    -Oui mamie !
    -Merci, vous êtes gentilles.
    -C’est rien. Vous m’avez l’air sympathique.
    -Merci.

    Je retourne à l’intérieur et je fais en sorte de bander la blessure de Michel en attendant les secours. Quand la patrouille arrive, ils bouclent le coin et prennent en charge les blessés. Comme c’est moi qu’ai prévenu les secours, ils m’interrogent brièvement avant de me laisser tranquille. J’ai prétexté que je connais Michel et on qu’on s’était donné rendez-vous, en toute innocence. Ça leur suffit. Ils interrogeront Michel le moment venu. Moi, je serais déjà là. Sur la piste de la perverse. Faut dire que des types qui s’attaquent à une cellule des espions, c’est que c’est pas des rigolos, il y a quelque chose d’important là-dessous. Une fois mis de côté, j’en profite pour interroger quelques voisins. Sont pas très causant, voulant surtout me parler des pratiques douteuses des espions, mais je préfère ne pas trop en dire. Une couverture reste une couverture. On ne sait pas qui est dans l’affaire, même si elle est compromise vue l’état de l’escouade. Certains ont aperçu les deux hommes. On me confirme qu’ils ont capturés la perverse et que les deux types avaient l’air très menaçant et de savoir exactement ce qu’ils avaient à faire. Ils l’ont mise dans une charrette et sont partis vers le nord.

    Je retrace la route qu’ils ont prises avec lenteur. Parfois, il n’y a pas de témoins. Souvent, ils ne se rappellent plus trop. J’écume quelques bars pour me rafraichir, manger un morceau, mais continuer à parler et à chercher des infos. De fil en aiguilles, la piste m’amène vers l’extrémité nord, voire même la campagne. Pas grand-chose de ce côté. Le dernier témoin, trappeur, m’indique toujours le nord.

    -Ya quoi là-bas ?
    -Rien. A part le poste-frontière.

    Ah. Cette histoire devient vraiment bizarre. Ce sont des gardes ? Mais pourquoi auraient-ils surinés des espions ? Et puis pourquoi ne pas l’amener à la garde de la ville ? Pourquoi aller au nord ? C’est louche. Mais je ne suis pas homme à baisser les bras. Michel compte sur moi, son ami, et les amis, c’est important de les aider dans les moments difficiles. Je retourne sur mes pas sur la fin de l’aprèm, direction la garnison locale. J’y retrouve mon sous-officier avec ses gardes qui m’avaient l’air bien sympathique. Je les accoste et ils me reconnaissent volontiers. Comme ils allaient s’en mettre un coup, je les accompagne volontiers. Faut bien s’hydrater. Une fois servie, on s’intéresse à ce qui nous dérange présentement.

    -Vous avez entendu l’affaire dans les quartiers nord ?
    -Ouaip. C’est une autre escouade qui s’en occupe. Ces types sont bizarres. Des témoins disent que c’est des détraqués.
    -Oh ? Après, ce n’est pas parce qu’on se comporte différemment qu’on est bizarre. Ils avaient peut-être une bonne raison. Ou une belle double vie.
    -Oui, possible. T’étais là ?
    -Ouai, je les ai retrouvés. C’est le groupe qui a pas pris en charge celle qui se faisait passer pour votre capitaine ?
    -Ah ouai ? T’avais pas dit que c’était des gardes ?
    -C’est ce qu’ils m’ont dit.
    -On les connait pas, nous. La capitaine t’as dit ? Encore plus bizarre.
    -Qu’est-ce qu’il se passe ?
    -Garde ça pour toi, mais personne l’a vu depuis un moment. Ça commence à se poser des questions.
    -Attends… ça serait vraiment elle ?
    -Non, Jack. C’est pas possible. Elle se serait pas faite capturé si facilement, je te l’ai dit.

    Je lui donne une description sommaire de à quoi elle ressemble. Le visage du sous-officier s’obscurcit à mesure que je la décris.

    -Ouai… ça colle plutôt bien à la capitaine en fait. Mais… mais comment elle se serait faite capturée ?
    -Ou alors… ce n’est pas elle. Peut-être que … c’est sa sœur ! Ou sa cousine ?
    -Je suis pas au courant qu’elle ait une sœur. T’en sais quelque chose toi ?
    -Non, sergent.
    -Moi non plus.
    -Après, comme la gonzesse, c’était quand même une sacrée perverse, ça tombe, c’est bien sa sœur, mais elle n’en parle pas, parce qu’elle ça fait mauvaise réputation d’avoir une sœur comme ça. Surtout qu’elle se fait passer pour elle. Et comme elles se ressemblent.
    -Ah ouai Jack. Ça, ça colle bien. Drôle.
    -ça tombe, les types qui l’ont coffré, c’est des hommes de mains de votre capitaine pour qu’ils s’occupent des facéties de sa sœur.
    -Ouai… ça se tient. Et là, il y a une personne tierce qui intervient pour enlever la petite sœur et faire pression sur la capitaine…
    -Capitaine qui part à leur poursuite, ou qui se rend à leur menace et qui, donc, disparait sans prévenir !
    -… Tout colle parfaitement Jack. T’es un génie !
    -Le problème, c’est que les kidnappeurs de la fille, ils sont partis en direction du poste-frontière.
    -Sérieux ? Ça, ça pue, par contre. Tu n’insinuerais pas que c’est un truc en interne ? Genre des types qui ne peuvent pas la sacquer.
    -C’est possible ?
    -C’est pas impossible… Elle est devenue capitaine récemment. Il y a peut-être des gens qui n’aiment pas ces méthodes. Ou qui n’arrivent pas à cacher leur incompétence comme pour le précédent.
    -Du coup, vous allez faire quoi ?
    -Nous ? Aucune idée. Je vais avoir du mal à dire que le responsable, c’est un type de la garde. V’là l’ambiance. Ça va mettre des plombes à convaincre.
    -Il faut agir vite, pourtant !
    -Bah ouai…
    -Je vais y aller.
    -Sérieux, Jack ? T’es un aventurier. Pire, un examinateur. T’es sympa, mais t’es pas le type pour faire ça.
    -Ouaip. Mais je suis libre de mes actions. Je peux agir.
    -C’est vrai… J’espère que tu as tort dans ton raisonnement. Mais tout colle bien. Dingue, non ?
    -C’est loin le poste-frontière ?
    -Une journée à pied. La moitié à cheval.
    -Argh. Ça va mettre une plombe.
    -Attends ! Je peux m’arranger pour le cheval. T’attendras prêt de nos écuries. Je ferais en sorte de t’en passer un.
    -Merci, c’est gentil. J’en prendrais soin.
    -Je me doute bien. On fait ça ?
    -On fait ça.
    -Je soutiendrais l’enquête. Si on a du nouveau, je te contacterais.
    -J’espère que j’ai tort.
    -J’espère aussi.
    -Allez.

    Et on y va. Je fais un tour dans ma piole pour le minimum vitale, rallonger le bail de la proprio et retourner du côté de la forteresse et attendre mon heure. C’est déjà le soir, mais j’attends plusieurs heures dans le froid jusqu’à un cheval arrive enfin à sortir de là, deux gardes à la bride. Je connais l’un des trouffions de mon pote sous-off. Il me tend les rênes en jetant des regards autour.

    -La capitaine est toujours pas revenue. Ça garde l’information précieusement. Les officiers sont sur les dents, ça a été plus long que prévu.
    -Merci mec. Je vais faire tout mon possible pour la retrouver.
    -Merci, t’es un chic type, Jack.

    C’est une belle bête, fraiche et dispo. Je la monte avec l’assurance du cavalier amateur et je pars sur un trot assuré jusqu’à quitter les limites de la ville. Le chemin est pas compliqué. C’est tout droit. On ne peut pas se perdre. Une fois que j’ai du champ, je pars sur plusieurs séances de galop, histoires de ménager ma monture et de ménager mon fessier, aussi, parce que la cavalcade dans ces conditions, c’est pas trop mon dada. Ohoh. Rigolo. Bref. Je me guide à la lumière de la lune pendant quelques heures avant de tomber sur une lumière sur le bord de la route. Sympathiquement, je m’en approche, puisque je suis un peu fourbu, et je trouve une grosse charrette avec un petit feu avec un bonhomme à coté, buvant dans un godet, un fut de bière à ses côtés. Mon sang ne fait qu’un tour.

    -Bonsoir messieurs. Puis-je partager votre feu ?
    -Ah bah, oui. C’est que la nuit est froide. Et puis, vous m’avez l’air sympathique. On se connait pas ?
    -Je ne crois pas non. Vous êtes ?
    -Ash Hespebay.
    -Hespebay ? Vous seriez pas brasseur ?
    -Exactement. Vous êtes ?
    -Whiskeyjack Callahan.
    -Whisk… Jack ? Mais je vous connais ! On m’a déjà parlé de vous.
    -Ah oui ? En bien, j’espère.
    -Bien sûr. On m’a dit que vous étiez un grand gouteur de bière.
    -Ah bah c’est pour ça que je vous connais. J’ai gouté certaines de vos productions. Genre la Route Ash. Celle-là, elle est bien bonne.
    -Ah, merci, c’est vrai que c’est ma plus grande fierté.
    -Et vous faites quoi dans le coin ? Pas trop de taverne, non ?
    -Je prends contact avec des petits producteurs perdus pour tester de nouvelles matières premières pour mes brassages. Le Nord est une région rude, mais il y a certains produits qui peuvent donner des choses intéressantes.
    -Ah ouai ? Comme quoi ?
    -Ahah. Secret professionnel ! Nous verrons à la dégustation !
    -Ah bah d’accord.
    -ça vous dirait de gouter mes dernières inventions ? J’ai quelques futs sur lesquels j’ai besoin de retour d’expérience.
    -Je suis votre homme !
    -Je n’en doutais pas.

    Ce fut ma seule erreur.

    On a testé des trucs. Beaucoup. C’était bien. Agréable. Des trucs légers. Des choses plus fortes. Ça aurait pu passer, mais quand au petit jour, Ash m’a proposé des alcools un peu plus forts qui n’avaient rien à voir avec la bière, j’aurais dû dire non. Mais comment dire non aux distillations expérimentales d’Ash Hespebay ? Quand on fait de la bonne bière, on doit faire des alcools forts sympathiques.

    J’ai pas vomi. Je tiens à le préciser. Mais avant midi, entre l’alcool et le manque de sommeil, ça tapait sérieusement dans ma caboche. Et puis, les mélanges, ça fait mal. On a essayé une quinzaine de boissons différentes. Heureusement que Ash avait du fromage, du pain et du saucisson, ça se serait vraiment mal fini. J’avais un boulot, une mission, mais j’ai perdu du temps ici. Je l’avoue. Je confesse. Mais enfin, c’était le destin. C’était une rencontre rare, privilégié avec un producteur investi et passionné. Beaucoup me jalouseront quand je le raconterais.

    Bref.

    C’est quand le soleil se couche que je sors de mon coma nauséeux. Ash n’est pas non plus en grande forme, mais il a récupéré pas mal d’avis et c’est ce qu’il voulait. Mon cheval a bien profité de la pause et il boude une heure avant de repartir. Je fais mes adieux à Ash et on promet de se revoir lors de l’une de ses dégustations. Ça sera agréable. Et d’ici là, il aura perfectionné le brassage numéro cinq et sept. Ils vont être tellement bons. J’en salive alors que je remonte sur mon cheval. Après, de là à dire que je suis frais et dispo, il y a un cap. Je suis quand même un peu fatigué et ça cognait bien, ses petites spécialités. Je privilégie la sécurité à rapidité. De toute façon, si j’arrive en pleine nuit, je vais pas faire grand-chose d’intéressant. Je passe donc une grande partie du reste du voyage au pas, ou au trot, faisant bien gaffe à ne pas me planter sur le bas-côté. Ça serait con. Prudence et mère de Sûreté. Je crois. Une expression bizarre, quand même.

    Bref. Parce que ça commence à faire long, ce poste.

    J’arrive au poste frontière à l’aurore. Il y a un quelques bicoques à côté. Dont une taverne, évidemment. Ma monture est fatiguée, mais pas exténué. Je mets pied à terre pour me requinquer dans la taverne avec une bonne bière. Juste une, hein, parce que j’ai du travail. Et c’est quand je sors et que je retourne vers ma monture que je me fais aborder par quelques gardes. Je les salue jovialement.

    -Bonjour messieurs. Vous allez bien ?
    -Bonjour monsieur. Bien. Merci. Et vous ?
    -Un peu fatigué, mais ça va.
    -Vous avez fait bon voyage ? Vous êtes aventurier ?
    -Exactement ! Je suis de la guilde !
    -Ah ? Pourquoi vous êtes sur un cheval de la Forteresse alors ?

    Il y a comme un blanc. Ils sont bien sympathiques, mais mon absence de réponse leur fait froncer les sourcils. Main sur son épée, le chef s’avance lentement.

    -Pas de geste brusque, mon brave.

    Problème en vue. J’ai des gens à sauver, moi ! Pas le temps d’expliquer, j’enfourche rapidement ma monture et je pars au galop.

    -STOP ! STOP ! ALERTE !

    L’est quand même un peu fatigué, mon cheval, je tiens la distance sur les gardes, mais ça va pas durer longtemps. La bête va rechigner à aller plus loin. Au bout d’une minute, je regarde derrière moi pour jauger de la distance et je fais pas gaffe que ma route croise celle d’un petit convoi avec une charrette et quelques cavaliers. Mon cheval tourne in-extremis pour passer à côté, mais moi, qui n’étais pas prêt, je suis expulsé et je voltige dans la bâche recouvrant la charrette. Je tombe sur quelque chose de dur qui me fait assez mal. Et je me débats comme je le peux, enlevant la bâche et découvrant un corps avec un sac sur la tête.

    Coïncidence, non ?

    Je l’enlève et je découvre le visage de celle que je recherche. Facile pour Jack. Avachi de tout son long à côté de moi, je m’aperçois rapidement que j’ai une main dans un endroit incongru qui ne sied pas vraiment à la situation. J’enlève rapidement, me promettant d’essayer de l’y remettre quand la situation saura opportune. Je m’aperçois bien vite que des types me pointent des armes dangereuses dans ma direction avec l’envie de s’en servir, retenu par l’incompréhension de ce qui vient de se produire. Et puis, les gardes qui me poursuivaient arrivent, essoufflés. Et là, ils disent des choses étranges.

    -Ah ! Vous l’avez arrêté. Ce voleur… Mais… pourquoi la capitaine est ligotés dans cette charrette ?

    Décidemment, ils confondent tous la capitaine avec sa sœur, dingue. Un instant, je plonge mon regard dans le sien. Il n’y a pas besoin de mots, je pense. On est proche. Elle est frigorifiée et son corps aurait bien besoin de chaleur. J’ai un bras dans son dos. Nos souffles sont rapides. Je ferme mes yeux. Je sens son souffle tout proche. Et … et …
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    Re: Ombres, spectres et bain moussant
    Lun 24 Fév 2020 - 23:49 #
    C'était comme si un train venait de passer, emportant avec lui mes dernières pensées claires.

    Un choc soudain et puis je m'étais retrouvée avec un poids sur moi, cognant l'un de mes genoux et plaqué sur ma poitrine. Le temps de comprendre qu'il s'agissait d'une personne qui venait de sauter dans la charrette, je me retrouvais avec le visage de Jack devant mes yeux, une fois le sac sur ma tête prestement retiré.

    Pas le temps d'analyser la situation, un homme se portait à notre niveau et helait l'homme des bains, le désignant comme un voleur avant de s'apercevoir de ma présence. Du bâillon sur ma bouche, de mes pieds et poings liés.

    « - Qu'est-ce que... » commença l'officier tout en reculant légèrement sur sa monture, avant de porter sa main à sa ceinture pour en défourailler son épée, replacée pour la course.

    Mes yeux tentaient difficilement de percer à jour mon environnement, si lumineux, car une masse flou m'obscurcissait la vue. Je ne compris qu'après que c'était le visage extrêmement proche de mon ami Jack, qui ne tarda pas à libérer ma parole.

    « - J-jack... vous êtes venu me sauver...? »

    Il en avait mis du temps mais... il avait honoré sa promesse. Quelle promesse d'ailleurs ? C'était flou tout ça, mais je savais qu'il viendrait. Toutefois le moment n'était pas aux chaleureuses retrouvailles.

    Un bruit de galop soudain m'informa que le Lieutenant Gildan, acculé, prenait la tangente plutôt que de vouloir assumer les faits et sa cuisante défaite. Coup du sort ou non, mais nous étions à moins d'un kilomètre du Poste-Frontière et son plan avait failli grâce à l'intervention du brave homme et des soldats à sa suite.

    Les deux gorilles qui accompagnaient le traître n'eurent pas la chance de pouvoir prendre leurs jambes à leur cou, arrêtés aussitôt par les épées tirés des hommes qui avaient suivi l'officier à qui je devais en partie ma délivrance.

    Irrémédiablement, Jack avait dû quitter mes côtés pour me laisser la possibilité de sortir de cet endroit confiné et me remettre, difficilement, sur pieds avec l'assistance d'un garde et l'offre bienvenue d'un épais manteau pour me couvrir. La fatigue et les effets secondaires du coup que j'avais reçu sur la tête commençaient à me rattraper, mais il fallait agir. Me précipitant vers le Sergent qui supervisait l'arrestation des hommes de main du Lieutenant, je l'obligeais à se désintéresser de sa tâche actuelle pour se tourner dans ma direction comme je venais vers lui.

    « - Mon Capitaine !

    - Gildan... Il s'est enfui ?

    - Oui, je...

    - Écoutez moi bien Sergent, je veux que vous lanciez tous vos cavaliers disponibles à sa poursuite, maintenant ! Cet homme est un dangereux criminel qui a attenté à ma vie et souhaitait faire porter le chapeau à mon ami Jack, venu à mon secours. »

    À ces mots, nos deux regards croisèrent celui du héros qui nous salua poliment tout en restant à distance.

    « - Nous pensions que c'était un voleur, nous...

    - Qu'est-ce que vous ne comprenez pas dans « maintenant », Sergent ?

    - Désolé, oui, tout de suite Capitaine Von Andrasil. »

    Aussitôt l'homme se retourna et alpagua un de ses subalternes pour lui confier la missive de rentrer au fort et réunir tous les hommes nécessaires, probablement avec zèle car le pauvre homme détala comme un lapin sur le dos de son destrier.

    Même si j'avais confiance en les capacités des Patrouilleurs, je me doutais que ce gredin de Gildan devait avoir une porte de secours. Il me faudrait probablement partir à sa recherche personnellement par la suite... mais l'heure n'était pas à une nouvelle épreuve. Je devais rapidement retourner à Forteresse pour être auscultée par un médecin et prendre du repos. Oh, cela aurait pu être bien pire, mais j'avais tout de même manqué de connaître mes derniers instants dans le froid glacial du Grand Nord.

    Jack patientait toujours près de la charrette, discutant joyeusement avec l'un des Gardes. Tout soupçon semblait déjà levé avant même que je n'en aie donné l'ordre et, arrivant aux côtés de mon sauveur, je dispensais le troufion pour me retrouver en tête à tête avec lui.

    « - Veuillez m'excuser, ce n'est pas une tenue acceptable pour un Capitaine, mais au moins ont-ils eu la décence de m'offrir un vêtement.. »

    Je dévisageai l'homme qui m'avait sauvée, arborant un sourire naïf. C'était fou comme il m'inspirait une confiance simple et un curieux sentiment de plénitude, de sécurité. Je n'avais jamais connu ça avec personne, c'était presque surnaturel. Sans me poser trop de questions, je pris son bras et l'entraînais vers la route.

    « - Que diriez-vous de faire quelques pas jusqu'au Poste-Frontière ? Là-bas je suis sûre que nous trouverons de quoi vous ressourcer, vous semblez avoir eu une courte nuit... »

    Mes pieds nus frôlaient l'herbe fraiche et mouillée par la rosée verglacée du Nord, le froid me frigorifiait mais je m'étais habituée à force. Par chance, il y avait peu de vent.

    Du coin de l’œil, je remarquai le petit contingent de soldats qui nous emboitait le pas et bientôt l'officier qui se porta à notre niveau.

    « - Souhaitez-vous de l'aide, Capitaine ?

    - Nullement, je suis très bien avec mon ami Jack. Poursuivez et annoncez notre arrivée, faites nous couler deux bons bains chauds et préparer de quoi nous rassasier. »

    J'espérais que ce bain-là connaîtrait une fin moins mouvementée, toutefois je rêvais d'une bonne part de fromage et d'une meule de pain frais. Probablement sortirait-on un ou deux saucissons de sanglier pour l'occasion, même si je n'en étais pas friande ? J'imaginais cependant que les spécialités du terroir plairaient à mon ami, avec qui je me retrouvai bientôt seule.

    Le silence nous entoura, laissant la brise seule le perturber. Et puis, comme je me sentais reconnaissance du courage de cet homme qui avait dû accomplir maintes épreuves pour me retrouver malgré les embuches certaines de ce rat de Gildan, je me tournai vers lui et rivais mes yeux dans les siens. Puis mes mains se portèrent autour de son cou pour me permettre de délicatement déposer un baiser sur sa joue gauche, pileuse.

    « - Je vous suis grandement reconnaissante, Jack. Vous êtes vraiment un ami de grande valeur. »
    Whiskeyjack CallahanLe glooby de toutes les femmes et la femme de tous les glooby
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    Re: Ombres, spectres et bain moussant
    Lun 9 Mar 2020 - 14:06 #
    -Oh, vous savez, mademoiselle, c’est bien normal. Avec ce qui s’est passé dans les thermes et quand j’ai compris qui vous étiez, tout mon être voulait vous sauver. Je garderais silence de ce qui s’est passé. Ça vaut mieux pour vos réputations.

    Parce que un, avoir une sœur exhibitionniste et mythomane, ça doit pas être de nouveau repos. Quand je parle des thermes, un garde à portée de voix hausse les sourcils et me lance un regard interrogateur. Je me contente de lui faire un clin d’œil bien de chez moi, histoire de lui signifier qu’il en saura pas plus. Whiskeyjack est une tombe. Personne n’évoquera les frasques de la petite sœur de la capitaine. Il s’en retourne à son escouade à faire des messes basses. J’espère que la capitaine n’aura pas à trop souffrir de cet épisode fâcheux. C’est qu’on aimerait bien que la garde reste belle et impressionnante comme dans les yeux de nos chers concitoyens.

    On finit par arriver au Poste-Frontière et je me sépare de la petite sœur, pour un temps, il parait. Elle doit sûrement être convoqué par sa grande sœur qui a dû affronter des milliers d’épreuves pour la retrouver. C’est beau l’amour familial. On me ramène vers une salle d’eau pour me débarbouiller un peu. Pas parce qu’il y a un bain après qu’on n’apprécie pas une peau sur le visage, surtout après un long voyage. Puis, on me dirige vers les cuisines ou je peux prendre un morceau, parce que mon ventre crie famine. On me déleste de superflus que je me porte, me laissant juste mes fringues, histoire d’être à mon aise dans le Poste-Frontière. On me regarde avec un mélange de respect, de bonté et de jalousie. Comme si j’avais obtenu un statut que beaucoup aimeraient avoir. Vous savez, Whiskeyjack Callahan est un homme de l’ombre. Les lauriers, c’est pas trop pour moi.

    -Vous vous sentez mieux ?
    -Oui. Parfait.
    -Nous allons vous amener aux quartiers des officiers. Un bain vous y sera versé…. En sa compagnie.
    -Ah tant mieux. Je peux vous dire qu’un bon bain chaud, ça ne va pas faire de mal. Et puis, c’est encore plus agréable quand c’est en compagnie d’une jolie femme, non ?
    -J’ai cru comprendre… que vous aviez déjà fait cette expérience…
    -Ah ça oui. Mais bon, je peux pas trop vous en parler, ça relève de la sphère privée. Je pense que vous comprendrez.
    -Bien sur.
    -Tout ce que je peux dire, c’est que ça a été un bain plutôt sportif. J’en fait rarement des comme ça.
    -J’imagine.
    -On y va ? C’est pas que je veux vous presser, mais la perspective de ce bain et nous ce qui entoure, ça m’excite un peu.
    -Oh.

    Parce qu’il parait qu’il va avoir à manger aussi. Eau chaude. Boisson. Nourriture. Bonne compagnie. Que rêver de plus. C’est le sourire aux lèvres qu’on m’amène dans un secteur où rares sont les admis et j’en fais partie. On me juge sur mon passage. On parle de moi. L’important, c’est de ne pas trop y prêter attention. C’est un coup à attraper la grosse tête. On me fait entrer. Une belle table avec quelques mets gras et salé. Deux gros bacs d’eau fumante. Deux paravents et du mobilier pour se mettre à son aise. Je suis seul. Je remercie mon escorte d’un clin d’œil.

    -Je devrais en avoir pour une heure ou deux.
    -Ah.
    -Faut bien profiter de tout ce que la vie nous propose, non ?

    Deux heures de repos, c’est honnête, non ? Je pique une tranche de saucisson avant de passer derrière un paravent et de me désaper tranquillement. Nu comme un ver, j’en ressors et je vais chercher un petit plateau pour y mettre quelques victuailles et je déplace une chaise pour y placer le plateau juste à côté de mon baquet. J’y trempe le doigt de pied. A point. Je rentre doucement pour pas tout éclabousser et j’apprécie la chaleur qui entoure mon corps tout en graillant ce que j’ai à portée de main. Je suis en plein dans ma réflexion quand j’entends une porte claquée. La voilà. J’ai le réflexe soudain de me lever par respect, puis je me rappelle que ça ne se fait pas forcément dans ce genre de circonstance, alors je cache ce que je peux cacher et je retourne dans mon eau.

    -L’eau est excellente, ma chère. Et les vivres sont très bonnes. Tout ici n’est que délice. Merci beaucoup. Je trinque à sa santé et je lui lance un clin d’œil aguicheur. Pourquoi ? Pour éviter le scandale. Ne pas oublier qu’elle est un peu lubrique et un jour, Gégé m’a dit qu’avec ce genre de personne, il vaut mieux les provoquer, ça les refroidit tout de suite et on évite les scandales. Ça serait quand même con que ça jase sous les chaumières.
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    Re: Ombres, spectres et bain moussant
    Ven 10 Avr 2020 - 19:47 #
    Il semblait que quelque chose n'avait pas été correctement compris, mais peu importe, je profitais du moment avec mon sauveur, trempant un orteil dans mon bain avant de m'y plonger en me découvrant, espérant bien que le regard de mon partenaire n'était pas trop indiscret. Bah, de toute façon il avait eu l'occasion de reluquer tant qu'il voulait durant mon enlèvement... même si cela m'aurait étonné de sa part. C'était un gentleman qui pensait à mon bien-être.

    Naturellement, je ne me souciais donc pas de la direction prise par ses yeux au moment où je m’immergeais, mais repensais plutôt à son clin d’œil, à certaines choses qui me laissaient pantoise et couvraient mes joues d'un ton rose que je ne connaissais que trop bien ; là était un des problèmes d'avoir une peau aussi blanche que la mienne.

    « - Vous avez raison, la température de l'eau est idéale... » fis-je tout en lui rendant son signe avant de laisser mes bras trouver leur place sur les rebords du bac.

    L'homme s'était visiblement arrangé pour avoir de la nourriture à portée, sur une chaise, chose à laquelle je n'avais pas pensé. Malheureusement, je n'étais pas encore rétablie et il m'avait été difficile d'avaler autre chose qu'une minuscule part de fromage insipide à pâte dure, fameuse production des environs. Je désespérais donc de me rassasier moi aussi.

    Et puis j'eus une idée folle.

    Me relevant sans trop prêter gare à la surprise de mon ami, j'enjambais le rebord une fois, puis deux, et me glissais devant lui dans la large baignoire qui avait assez de place pour deux. Ainsi, ma main pouvait atteindre le chaise et ce qui y était diligemment posé.

    « - Vous permettez ? »

    C'était rhétorique, évidemment, mais je ne tenais pas à fâcher mon compagnon en piquant dans son assiette sans le prévenir. Une seconde plus tard, je jetai déjà mon dévolu sur une tranche de pain que je recouvrai habilement d'un peu de pâté. J'enfournai aussitôt, appréciant un long moment la teneur en gras de la bouchée, avant d'ouvrir les yeux à nouveau et les porter sur l'homme en face de moi.

    « - Pardonnez-moi, voilà des jours que je n'ai pas mangé quelque chose de consistant, je n'ai pas pu résister... »

    Un certain silence régnait, mon invité ne savait probablement quoi dire et je me trouvais soudainement très rude, ayant envahi son bain et pioché dans son repas. Mes habitudes de soldat qui ne convenaient parfois pas à la convenance. Toutefois, je me plaisais assez à me retrouver dans cette position... il était vrai que je voyais Jack comme un ami, mais certaines pensées envahissaient mon esprit à présent.

    Après un instant passé à mastiquer une seconde bouchée et enfin finir ma tartine, je le dévisageai, hésitant plusieurs fois entre ce que je devais dire. Et puis je décidai de laisser les choses suivre leur cours, on n'a qu'une seule vie après tout :

    « - Cela va vous paraître étrange, mais pour je ne sais quelle raison, vous me donnez envie de me confier à vous. J'ai beaucoup apprécié votre geste vous savez, tous les efforts que vous avez fait pour me sauver... Cela m'a fait penser à certaines choses que j'ai longtemps préféré laisser de côté. C'est bête. »

    Oh bon dieu, dans quoi m'étais-je fourrée ? Je rougissais à vue d’œil à présent, incapable d'assumer ma propre fragilité. Était-ce digne d'un capitaine, de parler ainsi de telles choses secrètes avec un inconnu, pratiquement ? Peu importe, je continuais :

    « - Je n'ai pas connu d'homme depuis très longtemps, j'ai toujours fait passer ma carrière avant les histoires d'amour. Parfois j'y réfléchis et je me questionne : j'ai peur d'être passée à côté de ma vie. Je pensais être assez forte pour rester seule, mais vous venez de me prouver que j'avais besoin de quelqu'un à mes côtés... quelqu'un pour partir à ma recherche lorsque je n'arrive pas à me sauver moi-même. Mais je n'ai personne. »

    Je bougeai mes jambes suite à cela, les ramenant vers moi et laissant plus d'espace à celui dont j'avais envahi la baignoire soudainement. Je me sentais honteuse, mais autant aller jusqu'au bout.

    « - Je vous considère comme un ami Jack, un ami proche. Et... vous me plaisez : vous êtes bel homme et certainement doué d'un certain charme et de quelque chose d'autre qui m'échappe. Je sais, tout cela va bien vite, mais laissez moi finir ! Je ne veux pas gâcher quelque chose... » dis-je tout en plaçant ma main sur le rebord et en la rapprochant de celle de mon interlocuteur, toujours coi. « Si cela vous va, j'aimerais vous inviter à aller boire un verre, manger un bout, un soir. Votre amitié m'est précieuse et je comprends si mon acte cavalier vous gêne, d'autant plus que j'ai des obligations et un emploi du temps... incertain. »

    Ce n'était probablement pas le meilleur moment pour jouer à Roméo et Juliette, avec ma récente prise de poste et toute la paperasse à abattre. Et puis les fêtes du solstice approchaient, peut-être que ce serait l'occasion de me décoincer un peu et de se prévoir un temps après cela ?

    « - Mais passée la période des fêtes, cela devrait s'arranger et j'espère que vous souhaiterez toujours me revoir. Rien ne presse, de toute façon, n'est-ce pas ? Ce n'est pas comme si l'un de nous allait mourir demain ! » ponctuai-je en un rire aigu, quand bien même j'étais passée à un cheveu de la mort ce jour-ci.

    Déstabilisée par ma propre entreprise, je me surpris soudainement à ne plus pouvoir regarder celui que je voyais encore comme un ami, peut-être plus que cela, dans les yeux. Jugeant alors le temps opportun pour quitter la pièce et le laisser réfléchir à ma proposition, je sortis du bain en essayant de dévoiler le moins possible et récupérai la serviette à côté de mon bac. Je l'enroulai prestement autour de moi et me dirigeai finalement vers la sortie, osant un dernier regard en arrière, balayé par une mèche de cheveux mouillée.

    « - Merci encore, Jack. Si vous me cherchez, je serai dans ma chambre... mais ne tardez pas trop, je sens déjà le sommeil m'envahir et je ne saurais tenir une conversation de plus ce soir, si intéressante soit-elle. »
    Whiskeyjack CallahanLe glooby de toutes les femmes et la femme de tous les glooby
    Whiskeyjack Callahan
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    Re: Ombres, spectres et bain moussant
    Ven 22 Mai 2020 - 18:01 #
    Parce qu’avant que tout s’arrête avant même que ça ne commence vraiment, il y a eu un début. Un vrai. Et la leçon de l’histoire, c’est que la vie est une pute. Elle te fait miroiter des choses que tu n’as jamais pensé avoir et elle te le retire au dernier moment avec la plus grande cruauté. Parce que tu ne sais pas si ça aurait marché. Tu vivras avec le doute. Mais pour l’heure, je vais vous raconter cette belle tranche de vie.

    Je suis resté coi un instant, glissant petit à petit dans mon bain jusqu’à ce qu’à ce que je me mette à faire des bulles juste en dessous du niveau de l’eau. Qui commençait à devenir tiède. C’est dire que j’ai gambergé un coup ou que l’eau n’était plus aussi chaude pour ma température corporelle. Si vous voyez ce que je veux dire. Faut dire que je ne savais pas où me mettre. Une fenêtre s’est ouverte. On était là, puis j’ai pu entrouvrir les pensées complexes et les doux rêves de la femme qui a passé du temps avec moi. Je me disais que c’était la petite sœur, vous savez, celle qui mène une vie secrète. Et puis non. Je ne pense pas qu’on peut être mythomane à ce point, surtout face à un esprit averti tel que le mien. Et de fil en aiguille, j’ai eu cette révélation. C’est la capitaine. Elina. Les sœurs se sont inversées. Vrais qu’elles se ressemblent beaucoup. Et j’ai pu comprendre la complexité de la personne à chaque mot qu’elle m’a offert, chaque réflexion qu’elle m’a confié. Je l’ai sauvé en sauvant sa sœur. C’est ce qu’elle m’a dit. En toute humilité, je l’ai sauvé d’un bien grand mal et pour cela, elle m’est reconnaissante et malgré ce qu’on peut dire sur les capitaines de la garde, elle n’a pas hésité à m’ouvrir son cœur. J’ai sa confiance. Elle a la mienne. Presque naturellement. Parce qu’elle parlait vrai, c’était certain.

    C’est pour ça que je reste un plus longtemps dans mon bain. Presque con. J’avais la tête à rire et à passer un bon moment cordial, mais ça a été la douche froide. Pas désagréable. Comme s’il y avait quelque chose de plus fort et de plus précieux qu’une amitié soudaine. La confiance mutuelle. Quelque chose qui te réchauffe le cœur sans que tu saches trop pourquoi. On se connaît à peine, mais c’est comme si on se connaissait déjà beaucoup trop pour que ça ne nous touche pas. C’est nouveau. Et je me sens fébrile. Tellement fébrile que je sursaute quand on frappe à la porte et qu’un garde passe la tête pour savoir si j’ai terminé. Par la force des choses, on m’incite à sortir. On me laisse la dignité de me rhabiller sans être scruter sous tous mes bons profils et je prends mes frusques avant de sortir. C’est à peine le midi et on me pousse à prendre une décision. Il serait temps de partir, parait-il. Un cheval et quelques équipements m’attendent à la grande porte en récompense de mes services rendus, mais il manque quelque chose.

    On s’est quitté trop brusquement.
    Et puis, quelque chose m’appelle. Quelque chose dans ma cage thoracique me pousse à la voir une dernière fois comme si ne pas le faire serait la plus grosse erreur de ma vie. Je l’écoute et je m’éxécute. Surtout que c’est la première fois que ça me le fait. Je demande ses quartiers, on me répond en me donnant une direction tout en me jetant un regard menaçant. Parait-il qu’elle se repose. Les derniers jours ont été harassants. Juste une minute. Juste une seconde. Juste un regard. Et ça me suffira. Et le poids sur ma poitrine s’en trouvera alléger. Je fais la distance qui me sépare d’un pas de moins en moins décidé au fur et à mesure que j’arrive à destination. Les doutes m’assaillent comme autant de charognards sur ma carcasse chancelante dans le grand désert de ma vie. Au loin, l’oasis. Mais serait-elle mirage ? Peut-être que je fais une erreur ? Peut-être que je vais la déranger ? La fatigue aurait-elle déformé ses propos ? Aurait-elle baissé ses défenses succinctement ? J’ai peur. C’est bête, non ? J’en viens à me demander si je vais pas tourner les talons et retrouver la confiance des tavernes et des habitués. Mais même pour les gens comme ça, il y a le goût de l’aventure. La peur de l’aventure est aussi grande que son envie d’y participer. Et parfois, la balance penche du bon côté. Sans dire lequel. Ça, je me le dis alors que ma main vient s’enrouler autour de la poignet de sa porte. Je tends l’oreille. Pas un bruit.

    Soyons fou.

    J’ouvre la porte.
    Mon cœur se met à battre à deux cents à l’heure, et je sens chaque palpitation résonner dans tout mon cœur. Pour un peu, il serait capable de jaillir de mon corps et de s’écraser lamentablement sur le sol tellement il y va fort. La pièce est sombre. Pire. Il y fait un noir total. La faible lumière du couloir en révèle peu. La bienséance me dit qu’il faudrait que j’en reste là. Elle doit dormir. Ou sinon, il faudrait se contenter de rester là et de lui faire ses adieux. Mais bordel, j’ai toujours ce poids sur ma cage thoracique. Pousser par une adrénaline folle, j’entre et je ferme la porte derrière moi. Ma respiration que je tentais de contrôler jusque là échappe totalement à mon contrôle. Impossible de respirer par le nez. Mon souffle est court. Abrupte. Il n’y a aucun bruit et je n’entends que ça. J’ai l’impression de faire un boucan de tous les diables, mais le pire des diables, c’est celui qui m’a pris au corps. Je fais trois pas avec la fragilité d’un nouveau né. Quelques centimètres à la fois pour ne pas buter contre quelque chose. Et puis j’entends quelque chose. Un autre souffle. J’ai un moment l’impression que c’est un écho du mien. Non. C’est un autre. Quelqu’un d’autre. Il s’approche. Régulier. Le pas de quelqu’un qui connaît les lieux les yeux fermés. Je suis paralysé et heureusement, car j’ai envie de prendre mes jambes à mon cou. Ce qui, à la vue de l’expression, est assez débile, il faut l’avouer.

    Le souffle s’arrête. Un mètre. Je m’imagine le sentir sur mon visage. C’est peut être le cas. Plus rien ne bouge. C’est comme si on attendait quelque chose. J’ai la gorge sèche, mais je sens que je dois dire quelque chose. Je suis l’intrus après coup. Je fais dire un truc, mais aucun son ne sort de ma bouche. La deuxième fois n’est guère mieux et ma tentative finit dans un souffle étranglé. Puis j’y mets tout mon cœur.

    -Elina…

    C’est le bout du monde. J’en vacille presque. Rien d’autre ne bouge. J’ai l’impression d’avoir fait une gaffe. J’ai envie de partir. De m’excuser. D’effacer tout cela de ma mémoire. J’ai été fou. J’ai été con. J’aurais mieux fait de rester à ma place. Je pars sur un « désolé » bien dégueulasse quand je sens son doigt sur mes lèvres, m’incitant au silence. Elle s’est approchée avec la discrétion du félin. Je le sens alors. Vraiment. Son souffle. Sur mon menton. Je baisse imperceptiblement la tête et je m’imagine la regarder dans les yeux là ou je ne vois rien. Mais je sais que je vise bien. Son autre main vient se poser sur ma poitrine. Je rate l’arrêt cardiaque d’un cheveu et je ne sais pas si je la rassure de sentir autant de pulsation dansant sous sa peau. Avec une précision chirurgicale comme si le moindre geste plus rapide que la lenteur d’escargot conduirait automatiquement le monde à s’effondrer sur lui-même, je lève mes mains dans sa direction. Vers son visage. Ma main gauche touche le but en premier. Le premier contact est timide. Bref. Je l’éloigne un instant après, mais elle penche la tête pour reprendre le contact et me redonner la confiance qui me manquait tant. Je prolonge le geste, glissant sur sa joue, l’auriculaire venant se glisser sous son menton, le pouce remontant au niveau de son œil. Ma main fébrile  saisit presque son visage. Son souffle se fait plus fort. Je la sens s’avancer soudainement. Ma main passe dans son cou puis dans son dos tandis qu’elle vient se coller à moi, blottissant sa tête et ses longs cheveux parfumés sous mon menton. Ses mains viennent glisser dans mon dos tandis que je referme ma prise avec mon autre main. Ah non. Elle glisse aussi ses deux jambes entre les miennes et se laisserait tomber si je ne la retenais pas. De toutes mes forces. Et puis je me rends compte d’un truc.

    Elle n’a pas de pyjama.

    Elle redresse sa tête et je fais l’inverse. Nos souffles s’entrecroisent. S’entremêlent. Même dans l’obscurité, j’arrive à voir ses yeux. Ils s’entrecroisent. Ils s’entremêlent. Nos lèvres s’entrecroisent. S’entremêlent. Elles ont un goût d’Ambriosa. Puis nos langues. Et je ne vais pas vous faire un dessin. Nos mains s’agitent. Explorant nos dos mutuels tandis que nous goûtons aux lèvres de l’autre. Petit à petit. Lentement. Feuille par feuille. Puis la chaleur torride des lieux aidant, les choses s’accélèrent. Il n’y a pas besoin de mots. Et il n’y a pas besoin d’en dire plus. Tu crois que je ne t’ai pas vu, Invité ? Tu t’attendais à plus ? C’est tout ce que tu auras.

    Vicelard.

    C’est le soir que l’on en finit. A mes côtés, le sommeil a fini par la saisir. Chacun son tour. Il est temps de partir. Car s’il n’y a pas eu besoin de mots, il n’y a pas besoin d’adieu déchirant. C’était une parenthèse. Chacun en est bien conscient. Chacun à ses responsabilités. Nous ne vivons pas dans le même monde. C’est cruel. Je me lève et je viens tirer les rideaux un petit peu. Le soleil couchant du nord vient projeter une lumière blafarde sur la pièce. Je récupère mes vêtements, faisant le tri au milieu des siens avant de retourner auprès d’elle. Elle est si belle. Rouler en boule sur le côté de son lit, blotti contre là ou j’étais. Son visage transpire la sérénité. Et ses poils de barbes et sa moustache bien entretenue. Tout comme son torse velu. Et ses muscles de bûcherons. Mais ? Ca ne serait pas Georges ?!

    Non, je déconne. C’est bien Elina.

    Je m’assois à ses côtés, contemplant un instant son visage. J’ai envie de la toucher. De l’embrasser. De la cajoler. Mais pour le bien que cela procure, cela ne rendrait que plus difficile la tache. Je me rhabille. Et je prends un bout de papier un crayon pour lui laisser un mot. Quelques lignes.

    Elina,

    Merci d’être toi. Merci pour ta confiance. Merci pour le bonheur que tu m’as procuré. Je serais heureux de partager un nouveau moment avec toi. Autour d’un verre. Entre nous. Quand le temps le voudra. Quand nos responsabilités le permettront. Je viendrais à toi à mon retour dans le nord. Et je t’attendrais à la Capitale.

    Avec toute mon affection.

    Jack

    Je glisse le papier sur sa table de chevet et je le regarde une dernière fois. Je soupire, puis je me lève. Avec la plus grande discrétion, je me glisse à l’extérieur et je refermer la porte sur cette aventure. A ce moment là, j’étais bien loin de savoir où elle me mènerait.
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    Re: Ombres, spectres et bain moussant
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