V a l e n t i n a

Tu es née quelque part il y a 23 ans, d'une mère qui était cuisinière, et d'un père qui était pécheur. Tu n'as pas connu tes parents, évidemment, sinon la vie aurait été bien trop clémente avec toi. Mais tu as une photo d'eux, cachée bien au fond de ta bibliothèque. Il t'arrive même parfois, les soirs où tu te sens seule, de la regarder et de te demander ce qu'ils penseraient de toi. C'est mignon, mais t'en sais rien. Alors tu finis toujours par la ranger.

La vérité, c'est qu'on t'as retrouvée errante près du port. Tu étais sale, et à peine vêtue. Tu n'avais ni mangé ni bu depuis deux jours. Et tu avais seulement 5 ans. C'est jeune. Très jeune. Ça s'est passé un soir, avant la tombée de la nuit. Une bande de mercenaires rentraient de leur mission, transportant ce qui semblait être un corps. L'un d'eux était trop alcoolisé, et a trébuché sur une rame. Mais c'était toi. Ils ont finit par te trouver au milieu des filets et des barriques, en hypothermie. C'est pas vrai, mais qu'est-ce que tu fous là toi ? Ils t'ont immédiatement secouée pour te ramener à toi même, et ni-une, ni-deux, t'ont pris sous leurs ailes pour courir jusqu'à leur guilde.
En vérité, tu t'en souviens à peine. Mais tu te souviens parfaitement du regard que t'as lancé cet homme, grand, et armé, quand il t'as vu. Qui peut abandonner une fillette dans cet état ?! Tous te fixaient comme si tu venais d'un autre monde. Mais cet homme lui, te fixait avec douceur et horreur à la fois. Son nom était Alexander Di Constantino, il était chasseur de tête. Ses mains étaient encore couvertes de sang, et son visage mal rasé reflétait le nombre de verres qu'il avait du boire avant de te voir. Pourtant, il t'a souris. Et il t'as immédiatement adoptée.

Les mercenaires t'ont sauvé. Ils t'ont appris à te battre. Tu avais les joues rouges, les cheveux courts et tu jouais comme un garçon. Tu gagnais toujours. Et ton père était très fier de toi. Tu as appris la lecture, l'écriture, et même le théâtre. Et puis très tôt, tu as commencé à voler.

C'est comme ça qu'un jour tu es rentré par effraction chez des personnes dont l'identité t'étais encore inconnue, mais qui faisaient pourtant parti du commencement de ta vie. Tu as trouvé des bijoux dont une bague, avec ton nom gravé dessus. Une photo d'eux. Et de l'argent. Tu as tout pris. Et avant de partir, tu les as regardé dormir. Comme ils avaient l'air heureux sans toi. Était-ce toi qui t'étais enfuis, ou bien était-ce eux qui ne voulaient plus de toi ? Peut importe. Cela importait peu. Qu'ils vivent heureux.

Tu as continué ta vie entourée de ta véritable famille, avant d'un jour choisir de quitter ta ville natale pour prendre le large. Tu avais envie d'un nouveau départ. D'une nouvelle vie loin de ton quotidien morose. Tu t'es installée dans un petit appartement au centre de la capitale. Tu devais te ranger. Tu devais arrêter de voler. Te faire des amis. Grandir.

Personne ne te connaissais. Personne ne savais que tu faisais parti de cette « classe » de la population. Voleurs, assassins... Tu as dû renier ce que tu étais vraiment. Mais pas pour rien. Pour toi. Et pour eux, qui souhaitaient que tu aie un meilleur avenir. Un avenir qu’on aurait pas besoin de voler. Un avenir aussi rayonnant que tous les trésors du monde.

Alors tu as finis par penser à intégrer une guilde. Tu a rangé de côté tes vieilles habitudes. Tu as compris que mentir ne t’amènerais à rien. Que tu pouvais avoir confiance en quelqu’un d’autre que toi. Et tu t’es fais des amis, des compagnons de routes. Sans jamais raconter ton histoire. Mais toujours en écoutant les-leurs.

La suite, tu l'écriras, Valentina. Tu voleras des mots, tu les cachera dans tes livres. Et du moment que personne ne s’en doutera, tu pourras vivre. Impunie, et heureuse. Repentie.

Mais Valentina... Tes yeux ne trompent personne. Tu sais manier l’épée, le poignard, le fusil. Tu sais parfaitement faire une filature sans te faire repérer. Tu sais assassiner, kidnapper, voler. Tu enfouis tans de mensonge au plus profond de toi, que tu finiras par exploser.

Ouvres les yeux Valentina. Et contemple tes amis. Ils sont là pour toi.