La fête du Soltice était passée depuis quelques temps et des choses avaient changés au sein de la hiérarchie des espions. Notre ancien maître avait laissé sa place pour une personne que je connaissais que trop. Au moins, j'avais eu le droit de renouer les contacts avec elle... Cette personne était Zahria. Cependant la jeune femme en avait profité pour nous présenter une nouvelle recrue possédant l'un des pouvoirs des plus étranges que j'avais pu observer et noter dans mes notes. Sinon je l'aurai oubli alors que ma qualité d'espion me force à retenir la moindre information...

Pourtant, je me retrouvais en ce jour de saison froide afin de voir la capacité de ce "Vrenn" dans la collecte d'information, de sa furtivité et sa capacité d'action... Cependant, je ne me souvenais plus  de son visage, du ton de sa voix ou même de sa carrure si j'en oubliai les paroles de mon mentor. J'avais accepté sans trop me soucier tout en me souvenant de mes dernières paroles à mon associé. De nous retrouver dans une taverne proche des arènes de la capitale afin de mener une enquête sur des livraisons illégales d'un produit qui peut devenir dangereux : de la MORICIA.

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Mais bien avant de se retrouver dans la taverne pour retrouver notre nouvel recrue, j'avais dû me préparer dans l'une des meilleures planques qui étaient à ma disposition : ma propre chambre familiale avec ses multiples cachettes. Je me devais d'éviter ma famille militaire pour me préparer à traverser la ville, car la villa Dragmar se trouvait proche du conservatoire. Je m'étais donc lever bien avant l'aube et après avoir simplement allumé d'une bougie, j'ouvris l'une de mes malles à double fond afin d'enfiler une tunique et un pantalon de bonne fortune ainsi qu'une veste puis dans un sac rempli de ma tenue fine d'espion avec mes Katars. Puis je partis afin de traverser la ville à pied sans réveiller personne...

À cette heure, seuls certains gaillard vivaient ainsi que certains gardes. J'en avais connu certains, espionner d'autres durant mes formations. J'évitais un maximum de les approcher et me pressais de rejoindre l'une des planques Ouest de la capitale... Pourtant, je m'arrêtais durant quelques minutes sur le pont de la route XVI afin de m'évader quelques instants de la réalité au rythme du courant... Je sortis de mon rêve éveiller pour reprendre ma marche tout en observant le ciel qui se bleutait peu à peu. Je n'allais pas réussir à me préparer avant l'arrivée de mon cher "disciple" du jour et je prie une démarche rapide...

J'arrivais enfin proche de notre point de rendez-vous, une simple taverne légèrement abîmé par le temps mais relativement bien entretenu quand j'aperçus enfin le gérant qui travaillait déjà d'arrache-pied pour rendre le lieu accueillant en préparant les tables extérieures malgré la fraîcheur du matin qui repoussait la plupart des commerçants fainéants à entretenir la devanture de leur magasin. Je fis rapidement le tour du quartier afin de me repérer dans l'espace, me souvenir des planques proches de cet endroit et des personnes qui commençaient à se réveiller pour cette journée nouvelle. Mon regard se posait sur eux par moment afin d'observer et de tenter de me rappeler du visage de "Vrenn"... Avant de m'énerver intérieurement car je me souvenais plus de la tête de ce disciple. J'allais devoir le graver dans ma mémoire, c'était la honte de ne pas se rappeler d'une tête.

Je devais me calmer et je demandais la permission au propriétaire de m'asseoir sur l'une des tables ainsi que de passer une commande de thé chaud. Le tavernier simplet me souriait tout en me demandant d'attendre quelques minutes... Ce que je fis avant de recevoir ma commande... Il ne me restait qu'à attendre.

Le travail n’attend pas, c’est bien quelque chose qui n’a pas changé depuis mon passage en taule et tout ce qui a suivi. L’avantage, c’est que j’suis plus obligé de me pointer le matin à la Guilde pour faire mon boulot d’Examinateur, ou ne pas faire, dans certains cas. Ça, c’était quelque chose qui me ralentissait pas mal, d’être obligé d’avoir une vie de jour pour justifier les rentrées d’argent, le paiement des factures, et me constituer des alibis. Ça marche… marchait plutôt bien. Tsah.

Après la grande réunion découverte des espions, les premières missions ont pas tardé à tomber. Ils ont l’air assez occupé, les collègues, et ça va être mon cas aussi. J’sens que Zahria va vouloir rentabiliser son investissement jusqu’au bout. J’range toutes les pensées inutiles dans un coin de ma tête pour me laisser le loisir de les mâchouiller plus tard, si jamais j’arrive pas à dormir du sommeil du juste. M’enfin, jusqu’à présent, j’avais pas trop de soucis dans ce registre.

Nan, les premières missions qu’elle va me refiler vont davantage viser à évaluer mes capacités. Certes, j’ai un beau palmarès à mon nom, et la potion de vérité fait foi sur ce que j’ai pu babiller des événements, mais reste qu’il vaut mieux me voir en action pour repérer les points sur lesquels je suis un peu léger. En tout cas, c’est la justification qu’on m’a donnée. Puis, soi-disant que mes méthodes seraient pas forcément acceptables pour le Royaume, que j’peux pas tout me permettre comme j’faisais avant…

A les entendre, on croirait que j’ai semé une colline de cadavres à travers tout le continent, alors que j’faisais ça proprement, et uniquement quand y’avait pas de meilleure solution. Bon, p’tet aussi comme expédient, cela dit, ou en légitime défense, là où j’aurais juste pu me faire oublier, quitte à perdre de précieuses heures. Bon, j’veux bien admettre que mes méthodes pourront leur sembler non-conventionnelles. Mais d’un autre côté, c’est aussi l’occasion d’apprendre, pour eux comme pour moi.

Voilà, garder un état d’esprit positif. C’est pas parce que c’est des pisseux qu’ont à peine la vingtaine que j’vaux forcément mieux qu’eux, avec mon expérience et mes talents. Ha.

Ce coup-ci, c’est avec Blood que j’pars en ballade. C’est un truc en rapport avec de la drogue, de la moricia. Ça fait partie des commerces qui disparaîtront jamais, ça, comme l’alcool et le plus vieux métier du monde. Et, pour le coup, j’ai beau me creuser la soupière, j’ai pas souvenir d’avoir entendu parler d’un coup comme ça. Ils sont p’tet nouveaux, sur le marché, ou alors sont rudement bien couverts par un ponte. Ça arrive. Mais l’arrivée d’un nouveau vendeur se solde généralement par des guerres de territoire, et c’est dans ces moments que j’trouve un emploi. Trouvais. Bordel.

C’est à côté des arènes, là où tout le monde va pour s’agiter, se défouler, mais surtout parier, à mon avis. Légaux ou illégaux, les paris brassent une belle quantité de thune, et ironiquement tout tombe presque dans la même poche. Un grand classique, j’suis sûr que le gouvernement fait pareil, et que j’vais pas tarder à l’apprendre, si jamais j’réussis à pas taper sur les nerfs de mes petits camarades.

J’retrouve Blood dans un café pas loin, en train de commander son thé. J’me pointe juste à temps pour entendre la commande, alors j’ajoute la mienne.

« J’vais prendre un café, s’il vous plaît. »

Puis j’tire la chaise, et j’m’asseois en face de l’espion.

« Tu m’remets, ou pas du tout ? J’suis ton nouveau copain. On devait plonger dans le grand bain, tout ça, tout ça. »

Les personnes défilèrent devant moi alors que la matinée commençait à s'installer dans le ciel. J'attendais un homme qui avait déjà fui ma mémoire par son physique, sa voix ou encore son caractère... Seulement mes souvenirs n'étaient pas totalement éteints envers mon disciple, je revoyais la scène qui avait eu lieu dans le bureau de mon mentor afin de nous fixer diverses missions : La cabale ainsi que l'espionnage des hautes têtes de la garde... Cependant, Zahria, les deux gosses et Calixte étaient facilement visibles dans ma tête.

Je profitais de ma solitude à cette table afin de sortir mon carnet afin de relire mes notes sur cette personne surtout son nom et prénom ainsi que le surnom qu'il avait choisi, lui même... Mais je préférai le mien sur mes notes : l'espion oublié : Vrenn Indrani. Je relis et me força de retenir les caractéristiques physiques écrits. C'est alors qu'une personne s'approcha finalement de ma table et correspondant parfaitement aux détails sur le papier. Il me parla et sa voix s'imprégna de nouveau dans ma mémoire et reforma les fragments oublier du passé. Mon camarade espion était enfin là.

Je lui souris d'un coin des lèvres tranquillement tout en remettant mon carnet dans son emplacement dans mes affaires et en l'invitant à s'asseoir :

"- Maintenant que tu viens d'arriver, oui je me remets de mes souvenirs perdus. Assis-toi donc Vrenn, je t'invite avant qu'on commence ton travail."

Voilà, ma mémoire était revenue à la normale et je me permis d'appeler le serveur afin que l'homme brun puisse prendre une boisson chaude avant de partir aux informations sur le trafic des plantes. Il allait mener les actions avec ma personne comme aide secondaire, je voulais voir sa façon d’enquêter de peut-être s'infiltrer et dans le pire des cas, se battre.

Je saisis donc des rapports écrits par mon propre paternel sur des arrestations effectuer sur des hommes arrêter avec de la Moricia pour un but non médécinal... Je les posais devant mon  associé afin qu'il en prenne part des diverses informations : le nom des suspects attrapés, leur localisation de vie ainsi que des détails concernant les vendeurs... Je lui avais fixé un rendez-vous dans ce quartier, car il figurait sur la plupart des notes et une question tomba sur l'ancien criminel :

"- Comment vas tu procédé pour ton enquête ? Je t'écoutes et je peux répondre aux diverses questions ou mises à disposition de la garde pour nous avancer."

Je parlais doucement afin de ne pas attirer l'attention et j'attendais qu'on soit tranquille sans autres personnes autour de nous. Qu'allait donc être sa réponse ou ses potentielles interrogations afin de l'aider dans sa mission ?

Le café brûlant posé devant moi, j’consulte rapidement les notes mises à ma disposition par la Garde. Enfin, à la disposition de Blood, et qu’il me prête gentiment pour pouvoir évaluer si j’suis un incapable, ou le bon plan que Za… Ombre a si bien vendu. Et, pour le prix de ma vie, j’vivrais assez mal d’être incompétent. Ça serait mauvais pour mon ego, en fait, alors que j’me suis toujours plutôt bien sorti de ce genre de trucs, en tout cas, quand j’étais de l’autre côté de la barrière.

En tout cas, c’est vachement plus professionnel que ce dont j’ai l’habitude. Moi, c’était plutôt à l’instinct, en connaissant deux ou trois têtes dans le lot, et en partant de là pour improviser un plan qui tenait à peu près la route. J’aime pas cette sensation d’être un amateur. Au pire, j’m’y reprenais à plusieurs fois, avec mon pouvoir. Enfin, il m’assistera et m’évaluera, alors ça devrait aller…

J’avale ma boisson chaude, gorgée par gorgée, et j’tourne la dernière page du dossier, alors que le trafic se fait un peu plus présent dans la rue et dans le café. Le patron court partout, avec un torchon coincé dans sa ceinture, et sert les petits déjeuners demandés par ses clients. Certains, sûrement des artisans ou des ouvriers, commandent un noir et un jaune, et versent assez peu d’eau dans leur pastis, pour pas le noyer. Bah, chacun son rythme, hein.

« C’est le coin des arènes, alors le mieux, c’est encore de se pointer avec tout le monde. Du coup, les spectateurs et les travailleurs. Autant dire qu’on va acheter des places pour pouvoir se promener tranquillement à l’intérieur, et constituer d’éventuelles cibles potentielles pour les vendeurs de moricia. »

Ça, c’était la partie facile. En plus, on verra p’tet des morceaux du spectacle, aux frais de la princesse, et ça, c’est toujours sympathique. Enfin, j’ai pas encore regardé le programme du jour. Faut savoir joindre l’utile à l’agréable, après tout, pour pas devenir fou. C’est ce que j’faisais, mais la liberté dont je dispose maintenant est considérablement intérieure, il faut bien le reconnaître.

« Ensuite, l’objectif va être de provoquer un contact avec… »

J’me mets à feuilleter le dossier, à la recherche des personnes déjà identifiées jusqu’à trouver celle que j’cherche.

« … lui. Aeryn truc-bidule. Son pouvoir est identifié et pas menaçant, et le gars en lui-même semble pas présenter un grand danger. Donc c’est la cible idéale pour commencer à remonter la pelote. Et provoquer le contact, c’est pas d’aller le voir pour lui poser des questions, qu’il pourrait éviter ou quoi. Enfin, c’est possible de faire ça quand on veut procéder de manière plus… percutante. »

Ou quand on n’a pas le temps, quoi. Le gars, on le ramasse la nuit quand il rentre chez lui, on le traîne à l’ombre, et on le chatouille comme il faut, avec les moyens dont on dispose, jusqu’à ce qu’il décide de parler. L’avantage, c’est que le lendemain, il se rappelle de rien. C’est vache, l’alcool, hé ? Ouais.

« Mais là, on va juste se faire passer pour des clients. Normalement, il devrait nous approcher de lui-même. C’est son boulot, après tout, de repérer les prospects. »

J’jette un œil à mon collègue, qui sera mon second, et qui a priori me collera au cul tout du long de la mission. Ça va pas du tout.

« C’est possible de ressembler moins à un militaire en permission, ou pas ? J’dis pas qu’il leur vend jamais, mais ça pue le soldat, là. Et s’il est prudent, on finira gros-jean comme devant. »

Enfin, c’est un espion, il en est sûrement capable.

« Bref, une fois qu’on a établi le contact, on peut commencer à le travailler au corps, essayer de trouver des noms, des fournisseurs. Au besoin, on revient plusieurs fois, jusqu’à avoir tout ce qu’il faut pour passer à la personne suivante de la liste, vers le haut. Et on se renseigne en dehors, auprès des informateurs ou des indics, pour boucher les trous. En général, c’est comme ça que j’procède quand j’veux casser un réseau ou la mainmise d’un gang sur un produit ou un territoire. »

Ça fait bizarre, d’expliquer comment j’bosse. J’ai jamais eu besoin de le faire jusqu’à présent, en plus. Enfin, j’espère que ça lui ira, à Blood.

J'étais assis à cette table en compagnie de Vrenn tout en consommant une petite collation chaude de cette matinée froide comme de nombreux habitants d'Aryon, cependant la vérité sur nos agissement étaient plus sombre et surtout pour défendre le pays... Nous étions levés bien tôt pour cette réunion et la mise au point sur notre mission : trouver l'origine des ventes d'une nouvelle drogue. C'était le jour du grand plongeon pour le nouveau venu et j'en avais sa surveillance.

Après lui avoir tendu les infos de mon père et qu'il l'est visionné, mémorisé enfin j'espère. J'attendis d'entendre ses paroles afin de réagir et j'en profitais pour y boire mon thé encore chaud. Au bout de quelques minutes, la langue de Sbire se délia afin de m'exposer sa principale idée qui me fit sourire du coin des lèvres. Se joindre à la foule en simple civil pour assister aux divers spectacles qui allaient avoir lieu ce jour : généralement c'étaient des spectacles comme des pièces de théâtres anciennes, des reproductions de combat de guerriers oubliés ou encore des chasses aux seins des arènes... De quoi attirez les foules en grands nombres ainsi que les escrocs, voleurs en tout genre.

Puis il sortit la fiche d'un des guetteurs des revendeurs de Moricia qui avait pu être identifié : Aeryn Tripoin. La garde n'avait jamais pu l'arrêter car il n'avait jamais eu de cette plante sur lui mais les personnes arrêter avec cette plante l'avait décrit à la perfection... Seulement, Vrenn semblait avoir un manière différente de s'infiltrer afin de remonter vers les vendeurs en lui soutirant des informations avec l'alcool et la violence. Son pouvoir lui permettait ses actes, ce furent mes premières pensées et au bout de quelques secondes Sbire me fit revenir dans une réalité plus acceptable en se faisant passé pour des spectateurs.

Alors que j'allais enfin rouvrir mon bec juste au moment où j'allais donner mon accord sur sa façon d’agir pour cette mission qu'il jugea ma posture trop militaire, trop droite ainsi que ma tenue... C'est vrai que lors de la réunion des espions, j'avais mis ma cuirasse ainsi que mes autres protections. C'était donc ça mon image dans sa tête... Il allait devoir la changer. Avant que je puisse finalement en placer une, Sbire me résuma sa façon de penser afin de démanteler un réseau... Zahria n'avait pas recruté un idiot et j'en souris.

"- Pour revenir au début de ton monologue.

Oui, nous allons voir les spectacles pour être au plus proche de cette personne. De plus, les divertissements vont plaire à tous et attiré les foules : des reproductions de batailles antiques. Nous avons encore de longues minutes avant l'ouverture des portes, cependant on n'ira pas les premiers afin de ne pas attirer l'attention sur nous afin de se fondre dans la masse. On ne sera pas forcément côte à côte... Au moins, on va élargir nos chances de tomber sur ce guetteur.

Comme tu as pu le deviner, nous allons devoir agir sur de longs termes avec la possibilité que la garde agisse en arrêtant d'autres personnes en possession de drogue. Nous allons devoir remonter tout le réseau. Au moins, Ombre a trouvé une personne plus habile que les deux gamins sur ce domaine. Pour finir, la seconde méthode sera employé en cas d'échec. Au faite, connais-tu les effets de la Moricia sur le corps en cas de consommation ?

J'attendis quelques secondes une potentiel réponse de Vrenn concernant cette sorte de fougère tout en relevant mes manches et on ôtant les bandages qui s'y trouvaient afin de dévoiler de multiples cicatrices plus ou moins récentes de différentes tailles causé par moi ou des agresseurs passés. Non pour me suicider mais pour activer mon pouvoir. Comment allait être sa réaction face à ses multiples marques ? J'attendais de la voir tout en répondant avec calme à ma question précédente :

"- Selon des experts, elle apaise l'esprit tout en créant une forte dépendante en cas de fortes consommation. Avec des cicatrices pareilles, j'ai mes changes mais faut juste que j'aille me changer un peu, car la c'est vrai que je ressemble trop à un homme bien dans sa peau et non en dépressif.

Nous avons une planque à deux pas d'ici, si tu veux te travestir comme mon frère d'arme. Elle sera notre base d'opération après cette journée... Je vais te la montrer après ce petit déjeuné.

Au faite, tu dois te demander pourquoi Blood ? J'ai lu durant mon enfance d'ancien texte concernant une ancienne légion s’appelant ainsi car tous les membres possédait une magie en lien avec le sang. Mon pouvoir agit avec mon sang... Je vais pouvoir me faire passer pour un dépressif.

Bon on va se changer ?"

Je déposais une belle paire de cristaux à notre table avant de me lever pour nous diriger vers l'une des maisons proche des arènes : notre futur planque et base d'opération.

Bon, au moins on est d’accord sur la façon de procéder. C’est vraiment trop risible, de s’dire que j’faisais déjà le boulot d’espion, mais pour le tout-venant qu’avait quelques cristaux en poche, alors que maintenant, j’le fais pour la Couronne. Et faut pas que j’me craque trop, sinon le jugement assez favorable pour me laisser la vie sauve risque de prendre un autre tour, si j’suis considéré pas assez efficace, ou décidément toujours dangereux…

« La moricia, juste vite fait, de loin. J’ai toujours évité de toucher à ces trucs. Trop risqué, j’pouvais pas prendre le risque de prendre la pente descendante. »

N’empêche que je me fumerais bien une clope, et ça ressemble bien à la même chose. J’étouffe l’envie dans l’œuf en m’concentrant sur ce qu’il a à me raconter. Faire gaffe à ça. J’voudrais pas finir comme les drogués que j’ai si souvent malmenés au fil des années, ça serait drôlement con. Et j’en parlerai à Zahria, aussi, qu’elle fasse gaffe. Blood a p’tet pas si tort.

« Ok, je vois, pour la moricia. J’devrais pouvoir me faire passer pour un client occasionnel, alors. »

C’est que j’ai le teint un peu palot, après le temps passé à l’ombre, au trou. Alors qu’avant, j’étais bien hâlé et tout, quand je faisais des missions au grand air. M’enfin, ça va vite revenir, et j’pourrai à nouveau passer pour quelqu’un qu’est sorti de chez lui au cours du mois précédent. J’laisse mon petit camarade régler l’addition, et j’le suis jusqu’à la planque en question des espions.

Ça m’étonne pas qu’il y en ait disséminées dans toute la ville. Et probablement dans les autres bleds, la Ville Aquatique, le Village Perché, du côté du Temple et de la Forteresse, aussi. J’allais pas aussi loin, mais j’étais pas aussi riche, ni actif dans tout le Royaume, juste la Capitale, après tout.

La planque est un bâtiment impossible à différencier des autres. Il sort une clé anonyme et entre dans une pièce qui l’est tout autant. Y’a un coin avec quelques banquettes étroites, pour dormir, un p’tit feu pour cuisiner, et des rations dans les placards que j’ouvre sans ménagement pendant qu’il se change. C’est là qu’est le plus intéressant, à mon avis. Des tas de fringues, et ça couvre vraiment tout : y’a du costume de noble, des hardes de mendiants, et toute la gamme dans l’intervalle. Y’a même des coloris variés, pour certaines tenues, en tout cas pour faire de l’extrêmement voyant, ou au contraire du discret, en noir et nuances de gris sombre.

Y’a même plusieurs tailles, qui doivent correspondre aux mensurations des espions que j’ai déjà vus, Ombre, Damoiseau, et Blood. Et des trucs plus petits, probablement pour les deux gamins. Et plus gros, pour si on veut se rembourrer ou pour d’éventuels colosses. Mais, surtout, pour les deux sexes, avec du maquillage et des perruques, pour ceux qui veulent se grimer de façon un peu plus poussée. Y’a pas de doute, c’est des professionnels, et c’est davantage fourni qu’au grand théâtre. J’le sais, j’y étais. Ha.

Quand Vaelin ressort dans une tenue qui tranchera vachement moins, il me regarde d’un air surpris et m’enjoint à me servir dans tout ce qui est mis à disposition. J’me contente de hausser les épaules, et d’une pensée, mon déguisement magique change intégralement ma tenue, pour me rapprocher de la sienne. C’est de bonne facture, mais assez usé, surtout au niveau des coudes, et ça s’effiloche légèrement au bout des manches, ce genre de détails qui font dire que ça allait bien, mais que les temps sont durs.

« J’ai moi-même quelques atouts dans ma manche, dont des vêtements qui peuvent s’avérer plutôt utiles. En toute modestie, évidemment. Une simple pensée me permet de passer de cette tenue, plutôt sérieuse, à… »

J’me retrouve tout à coup accoutré en fier noble militaire de la Couronne, costume cintré, tresse en or, médailles épinglées sur la poitrine et épaulettes rutilances, avec des bottes montantes. La seconde d’après, une capuche déchirée me couvre la tête, dans un tissu d’un marron dont on sait pas si c’est la couleur initiale ou juste des couches et des couches de crasse superposée. Puis j’reviens à ma tenue propre mais usée, avec un p’tit sourire en coin.

« Bref, pas mal de possibilités, tant que j’suis imaginatif. Tu devais perdre un peu de sang, d’où ton sobriquet, je présume ? T’auras l’air plus fatigué que moi, ça m’semble très bien. On se signale comment, si jamais on le trouve ? Ou on fait chacun de notre côté ? »

Au moins l'avertissement sur les effets de la plante trafiqué semblait marcher comme moyen pour stopper l'envie de fumer de Sbire... Je devrais tenter cette méthode avec Zahria pour la faire arrêter de fumer. Peut-être que j'y arriverai un jour ou pas. Mais il s'agissait d'un jeu entre mentor et disciple que d'un vrai exercice. On finissait notre petit déjeuné avant de prendre la direction de la planque.

La baraque était simple en apparence extérieur et pouvait ressembler à n'importe quelle maison du coin, le style était identique et rien ne pouvait la différencier d'une autre. Je fouinais dans mes poches afin d'y sortir la clé de l'endroit pour qu'on puisse y pénétrer avec le nouveau espion... Depuis combien de temps, l'endroit n'avait pas servi car la poussière s'entassait sur les divers meubles et notre présence avait perturbé les rongeurs qui s'y trouvaient.  Calixte aurai certainement pris un moment pour tout nettoyer : un bon maniaque. Je le ferrai à un moment, pour l'instant une autre mission m'attendait : changer de vêtement...

Au moins, malgré la poussière, les tissus entreposés étaient encore en parfait état malgré les déchirures de certains... J'en pris un usé avec des trous et laissant apparaître mes bras mutilés, mon niveau de vie avait baissé jusqu'à cause des vêtements mais en me regardant dans le miroir, je paraissais encore trop heureux de vivre. Dans un coin de la bâtisse, Vrenn me parlait d'un de ses atouts : un objet lui permettait de changer de tenue sans la moindre difficulté... Au moins, il n'avait plus à s'en faire sur ce point. Attend, c'est une armure de garde royale qu'il arborait en ce moment avec ses teintures dorés.

Pratique, mais j'en perdrais le plaisir de préparer ma mission si tout était simplifié par la magie.

Je me mis à chercher au niveau de la cheminée et je faillis bénir Lucy en voyant la présence de charbon dans la cheminée... Au moins, la teinture allait être parfaite et allait me permettre de créer un personnage avec l'ensemble de ses éléments : un homme usé et stressé travaillant avec le charbon. J'appliquais le charbon mon cuir chevelu en laissant des mèches blanche et la tâche dura un bon mment pour que le résultat me plaise... Puis je fis le nécessaire pour le reste. Je demandais quand même un avis, même s'il devait s'en moquer :

" - Travailler au charbon doit rendre ce résultat. Sinon pour communiquer en cas de contact, un simple signe suffira. Si l'autre n'arrive pas à le percevoir, on agira en solitaire jusqu’au soir. Après on avisera. Prêt ?

Il fallait bien commencer à un moment ou un autre, la mission initiale. Est ce qu'il devait encore faire des ajustements ? Peut-être. J'attendis que personnes soient présentes pour sortir pour me rendre à l'arène en comptant le nombre de cristaux afin de me payer l'entrée et garantir le nombre nécessaire au cas où. Peut-être que j'allais être un bon client pour notre proie...J'attendis que mon camarade sort pour refermer la planque et de reprendre la direction des arènes en prenant un air stressé... Par moment, je faisais exprès de me gratter aux bras avec frénésie pour entrer dans mon jeu d'acteur... Comment se comportait Sbire ? Je regardais rapidement derrière moi pour l'observer.

Enfin, j'arrivais au niveau des entrées de l'arène afin de pouvoir entrer dans l'amphithréatre, il y avait des gardes de régulières à l'entrée pour surveiller les allées et venues en protégeant les guichets. Au moins, ils ne me reconnaissait pas car l'un d'eux m'abordait afin de me juger du regard.

"-Monsieur, vous êtes sures d'avoir les moyens de payer l'entrée ?

Je répondis d'une voix assez faiblarde pour paraître intimidé tout en baissant les yeux.

- Oui, monsieur. J'ai économisé des mois entiers pour me permettre d'assister aux spectacles du nouveau millénaire.

Je sortis ma bourse afin de montrer les cristaux que je possédais. Bizarrement, le garde eut un geste déplacé en prenant cinq cristaux sur les dizaines que je possédais... Son nom allait être marqué dans mon rapport, mais je laissais faire pour le bien de ma mission sans protester.

"- Votre droit de passage. Allez bonne journée.

Il me laissait passer fier de son geste... Je retiens mon envie de le remettre dans le droit chemin pour aller payer ma place. Comment allait donc se passer l'entrée pour mon collègue nettement plus loin que moi ? Allait-il être racketter aussi ?

J’regarde Blood se préparer, et force est de reconnaître qu’il maîtrise son sujet. Son truc avec le sang est pratique pour devenir un peu plus pâlichon, maladif. Si j’avais eu la foi, j’aurais appris à me servir des trucs de maquillage pour faciliter pas mal de choses, mais avec mon pouvoir, ça s’est en réalité jamais avéré vraiment nécessaire. Et il a pas totalement tort quand il dit qu’on risque de perdre ses talents à force de se reposer trop sur la magie. J’le sens déjà avec mon rossignol noir, donc j’m’entraîne encore avec du matériel plus classique, en mode dégradé. Les déguisements, c’est pas pareil, c’est une tournure d’esprit, après tout. Un costume, c’est une histoire, rien de plus, rien de moins. Faut juste savoir la raconter par tous les moyens disponibles.

A l’entrée, il passe sans encombre, en allongeant de mauvaise grâce le bakchich demandé par le garde. J’suis un peu plus loin derrière, l’air aussi mal sapé que lui, mais moins crado, quand même. J’paye mon dû, et j’fais tomber un cristal de plus sur le comptoir, puis j’regarde soigneusement ailleurs pendant qu’il l’empoche. Et dire que c’est ça, mes nouveaux collègues, putain…

Enfin, j’vais pas faire la jeune vierge effarouchée, ça a toujours marché comme ça, depuis que le monde est monde, hé ?

A l’intérieur, y’a déjà pas mal de monde. Les festivités doivent attirer du peuple, puis doit y avoir des trucs impressionnants à voir. Ce sera l’occasion de profiter un peu du spectacle en attendant d’être contacté par Aeryn. Alors qu’on circule à l’intérieur, on reste éloigné l’un de l’autre, tout en se gardant plus ou moins dans le champ de vision, des fois qu’il se passe un truc.

J’m’accoude finalement à une balustrade, et j’me roule une clope en regardant ce qui se passe en bas, dans l’arène. Un fier guerrier est en train de danser avec un énorme chat avec des dents longues comme mes avant-bras. Avec sa lance, il le pique, et s’écarte prestement pour éviter les bonds et les coups de pattes du félin, pendant que la foule encore éparse l’acclame de temps en temps. Il constitue un genre d’apéritif, j’suppose. Donc ça doit être sa famille, ses amis, et les mordus qui le matent.

J’laisse distraitement courir mon regard sur les gens, en tâchant de repérer si y’a des vendeurs, des preneurs de paris illégaux, des coupeurs de bourse. J’note les gamins qui se faufilent. ‘Sont bien là. Mais ils ciblent plutôt les touristes, les gens qu’ont pas l’air d’habitués. Ces derniers justement sont regroupés en petits groupes, échangent des avis sur les cotes, les nouvelles, j’sais pas bien quoi d’autre.

Pas d’Aeryn Tripoin.

J’écrase ma cigarette sur la balustrade, et j’fous les mains dans les poches pour déambuler vers le bar.

« Bonjour, Monsieur.
- Un whisky, siouplaît.
- De suite. »

J’m’appuie au zinc, et j’fais tourner l’alcool de mauvaise qualité dans mon verre avant de le descendre cul sec et d’en prendre un second. Il est encore tôt le gamin, donc ça pique un peu. Mais faut ce qu’il faut pour attirer l’attention sur soi, surtout quand mes voisins sont au café ou, à la rigueur, à la bière. J’me gratte le bras négligemment, signe des amateurs de piqûres et de gens qu’ont une sensation de manque.

J’ai pas vu le manège qu’a dû s’opérer, avec quelqu’un qu’a prévenu Aeryn, mais il vient de se poser à côté de moi. Marrant qu’il ait pas choisi Vaelin. Il a p’tet l’air trop pauvre. Il ressemble à la description, en tout cas, et se contente d’une bière.

« Sacrées cotes, qu’il entame en jetant un regard vers moi.
- Ouais, ‘paraît.
- Vous vous intéressez pas aux paris ?
- Si, si, mais j’suis pas d’ici, alors j’connais que les têtes d’affiche.
- Ah ? Venez d’où ?
- Grand-Port.
- Oh, donc plutôt le Massacreur ou Kriga ? »

J’ai un sourire ironique. Bordel, c’est qui, ces pelés ?

« On fait rarement grand-chose sur ces cotes. J’cherche les p’tites moins connues.
- Hahaha, c’est vrai. Un conseil à me donner si j’y vais ?
- ‘Sûr. L’Ours. Tout jeune, quatorze ans, mais dans trois, quatre ans maximum, il crève le plafond.
- Je note, je note… »

J’avale mon second whisky.

« Et vous, un conseil pour la Capitale ?
- Hm. J’évite de trop parier. Pas bon. »

J’grogne un signe d’assentiment en me grattant le bras.

« Ca démange ?
- Ouais. Un genre de condition médicale, si vous voyez. »

Sourire chafouin chez lui.

« Je vois. Je connais un très bon médecin, au besoin.
- Les trop bons médecins sont trop chers.
- Vous inquiétez pas.
- J’demande à voir, alors.
- Bien sûr. Faut que je le prévienne, on peut se retrouver plus tard ?
- ‘Sûr. Où ?
- On vous trouvera. »

J’incline la tête, et quand il s’est carapaté, j’m’étire de tout mon long, en espérant que Blood capte le signal.

En regardant par dessus mon épaule, je pus voir Sbire passer avec le même problème avec ce garde... J'enrageais intérieurement de ne pas pouvoir l'emmener pour rackette ou mieux en compagnie de mon père afin qu'il se fasse redresser sur le droit chemin à la manière Dragmar... Mes muscles s'en souviennent encore trop souvent. Dur d'être son fils par moment. Au moins, il restait dans un coin de ma tête pour plus tard.

Sans plus parler, on se dispersa avec Vrenn dans deux coins différents des arènes. J'optais pour la partie des gradins tandis qu'il se rendit au niveau de la taverne et on semblait couvrir les lieux les plus fréquentés de l’esplanade.  On pouvait y voir des guerriers entrain de s'exercer sur le sable et je pouvais entendre certaines personnes commencer à vagabonder entre les gens pour y prendre les paris sur les futurs combats... Je n'y connaissais rien et je refusais d'y participer tout en dévoiler mes bras remplis de cicatrices... Les minutes passèrent et rien de bien passionnant se produisit à mon égard hormis certains regards plein de dégoût. S'il connaissait mon pouvoir, ses pauvres gens pourraient comprendre.

Je pouvais toujours avoir en vue le petit nouveau afin de le juger. Mon frère d'arme en avait pas confiance. Je lui donnerai une partie de la mienne après cette mission, de tout façon la chef l'avait déjà intégré à notre famille. Puis un homme restait proche de Sbire et je ne pus discerner s'il parlait ou non. Puis vint un signe de l'ancien aventurier afin de me prévenir qu'il avait pu nouer un contact avec notre cible... Je me levai après que la cible se soit éloigné.

J'approchais tout en maintenant ma couverture de dépressif. Je l'abordai tout en commandant du vin miteux des bas quartiers coûtant pas cher tout en questionnant mon acolyte :

"- Tu as pu nouer un contact avec la cible ? Qu'est ce qu'il t'as dit ?

J'attendis son rapport tout en en buvant un gorgée du nectar.... dégueulasse... pour le finir d'un seul coup. Même l'alcool de la garde passait mieux. Mais je voyais parfaitement que ça allait être Sbire le noyau de l'affaire et qui permettrait de nouer des contacts avec les fournisseurs. J'allais certainement être son ombre et il venait à peine de finir que deux hommes épais m’expédièrent du chemin afin de retrouver Vrenn.

" - Dégages d'ici le cul-terreux... Retournes admirer le spectacle...
- Pardonnez moi, messieurs.
- T'as osé me parler, vermine."

Je me tus tout en m'éclipsant afin de retourner à ma place afin d'observer de loin mon camarade... Je sentais qu'il s'agissait des hommes de notre cible afin de continuer leur trafic. J'aurai bien voulu leur rentrer dans le lard si je n'étais pas en infiltration. J'espère que Vrenn pourra progresser vers les meneurs ou seulement acheter de La Moricia pour avoir une preuve pour affiner la suite des opérations.

J’ai fait un rapport sommaire à Blood. C’est qu’on a vite été interrompu par deux gars qui doivent faire le service d’ordre. Quelqu’un d’optimiste supposerait qu’ils vont me vendre directement. Si ça me paraît pas impossible, j’me dis à côté qu’ils auraient pas tenu aussi longtemps dans les arènes s’ils vendaient au premier connard qui pose des questions, et que ma couverture est pas vraiment si travaillée. J’sors une clope que j’roule en marchant avec eux, et ils me regardent d’un air évauateur. Déjà une drogue, c’est pas déconnant d’en ajouter d’autres, pas vrai ? Un bon point pour moi.

J’suis évidemment séparé de mon comparse et contrôleur, mais il va surveiller de loin et me servir d’ombre, de couverture, de filet de sécurité. Enfin, j’espère qu’il va pas me laisser dans la merde si j’y tombe, en tout cas. J’suppose que ma promotion en leur sein doit entraîner une certaine méfiance. Je réagirais comme ça, personnellement, à leur place, en tout cas. Mais j’ai un sale caractère et une saine paranoïa, il faut bien l’avouer.

J’suis amené jusqu’aux chiottes, qui sont évidemment vides au moment du spectacle. Ils vérifient quand même toutes les cabines. J’gage que Blood est juste dehors, et qu’il écoute à la porte.

« Alors, ça cherche un toubib ? »

J’aspire une grande bouffée que j’inhale et que j’garde quelques instants dans mes poumons avant de la souffler avec un plaisir non-dissimulé.

« Ca se pourrait, ouais.
- Vous êtes déjà allé voir un médecin ?
- Ouais, il m’a déjà prescrit des trucs, j’cherche à reprendre le même traitement. »

J’fais un clin d’œil à celui qui parle, tandis que l’autre se contente de me toiser avec les bras croisés sur sa poitrine.

« Ecarte les bras, qu’on te fouille.
- Quoi ? Mais non… »

L’autre s’avance, et j’sens que le rapport de force brute est pas forcément en ma faveur. Mais ça serait bizarre de pas résister un peu, alors j’le fais gentiment. J’écope d’un coup de poing dans les côtes que j’sens bien passer, par contre. C’est pour le travail. J’sers les dents mais j’réussis pas à totalement ravaler le hoquet de douleurs. Qu’est-ce qu’on ferait pas pour le réalisme, hein ? Non. J’ai vraiment eu mal.

Du coup, j’écarte effectivement les bras et il passe ses mains sur mes poches, mon corps.

« Vous allez juste me dépouiller, c’est ça ? J’vais appeler la Garde et…
- Tais-toi, idiot, on vérifie juste que tu es pas contre nous. »

Contre eux ? Donc y’a pas que la Garde dans cette catégorie ? Bon à savoir.

« J’veux juste le médoc’, que j’grogne. »

Quand il m’annonce le prix, j’le regarde avec un œil incrédule, puis son pote.

« C’est le tarif, à prendre ou à laisser.
- J’sais même pas la qualité de ce que vous vendez.
- Tu verras en consommant. Tu prends ou pas ? »

J’trépigne sur place, d’un pied sur l’autre.

« Ouais.
- Bon. »

J’allonge la thune, c’est un peu raide mais j’me ferai rembourser, de toute façon.

« Si j’ai besoin de vous retrouver ?
- On te trouvera.
- Je vais devoir payer l’entrée de l’arène à chaque fois ? Je suis pas sûr de… »

Son copain lui lance un regard équivoque.

« Demande Josef, à la taverne derrière l’arène.
- D’accord. Merci. »

Ils ouvrent la porte, sortent sans un mot de plus, et bousculent Blood qui attendait à la sortie. Ils doivent même pas le reconnaître. Les pauvres ont cette faculté à être invisibles, après tout, qu’on pourrait presque leur envier, s’ils étaient pas, justement, pauvres.

Les deux gaillards, qui m'avaient bousculé auparavant, m'avait déjà oublié pour se concentrer sur mon camarade. Ils discutèrent un peu et Vrenn avait très bien jouer le jeu du drogué : mieux que moi en tout cas. Certainement à cause de la drogue qu'il consommait comme la maîtresse-espionne. Je devrais peut-être arrêter d'embêter Zahria en lui volant son tabac... Peut-être un jour. Pour l'instant, je restais concentrer sur la mission en observant la direction prise par les trois bonhommes : les toilettes. Drôle d'endroit pour une rencontre sauf pour les brigands, on dirai.

Je les suivais de loin pour me rapprocher au plus proche de leur discussion tout en subtilisant une bouteille d'alcool tout en m'appuyant contre la paroi du mur d'entrée. J'écoutais la conversation en gouttant rapidement le nectar infect... Comment pouvait-on boire ça par litre entier ? Néanmoins, je pris la peine de l'avaler pour éviter d'attirer les regards : l'alcool des pauvres ne pouvait être bu que par les pauvres. La discussion autour des locaux s'orientaient sur une fouille de Sbire afin d'éviter de le suspecter d'appartenir à une bande ou à la Garde. Je vois. Déjà des informations importantes, ses types faisaient parti d'un groupe possédant des rivalités sur cette drogue nouvelle...

Cependant en vue du comportement des ours et des bruits, Vrenn s'était pris un coup et j'allais devoir intervenir... Je gardais toujours un objet quelconque assez tranchant pour m'ouvrir la chair afin d'activer mes pouvoirs. Le calme était de retour dans les toilettes et la discussion continuait jusqu'à une vente du produit. Les deux hommes semblaient vouloir sortir et je fis exprès de passer devant la porte. De nouveau, je me faisais bousculer par ses gaillards et ne semblaient pas me reconnaître... Ses idiots. J'attendis quelques minutes le temps de voir les hommes partir avant d'engager la conversation avec Vrenn.

" - Alors racontes-moi !"

J'attendis la fin de toutes les explications possibles pour réfléchir à une façon d’agir. Selon moi, plusieurs options s'offraient à nous. Et je partageais mes idées au Sbire :

" On a plusieurs option face à nous :
- soit on joue sur la durée en devenant complice avec ses truands pour gagner leur confiance et entrer dans les hautes sphères de leurs bandes. Enfin toi, moi je suis invisible à leurs yeux.
- soit on en arrêtes un pour lui soutirer des informations sur leur vendeur... De préférence celui qui t'a donné la drogue...
- soit on tente avec le tavernier...

Trop d'option, certaines sont rapides d'autres sur la durée. Tu ferrais quoi de ton point de vue ? C'est toi qui mènes la mission, je ne suis qu'une arme de tes décisions pour avancer ici et juger tes capacités.

J'attendis sa réponse.

On s’cale vite fait avec Blood dans un coin pour échanger. J’lui raconte vite fait ce qui s’est passé, pour qu’il soit sur le même niveau d’information que moi. Et il suggère les différentes marches à suivre. J’suis forcément éminemment d’accord, et ça dépend comment on veut gérer les choses. Moi, j’avoue qu’à ce stade, j’irais p’tet brutaliser le repéreur, pour avoir des données supplémentaires, en tablant sur le fait qu’il m’oublierait bien vite, mais c’est p’tet pas la peine pour le moment, surtout qu’on est deux, et que y’a pas besoin de ça, en théorie, quand on est de la Garde.

« Devenir complice, ça prend trop de temps. J’faisais ça au début, c’est interminable, surtout pour monter les échelons. Et, paradoxalement, c’est presque plus dangereux que d’arriver et taper sur tout le monde. Pasque tu marches sur les plates bandes des uns et des autres, que si t’es trop bon, les médiocres t’en veulent, et à la fin, ceux qui sont censés être tes alliés essaient de te suriner dans une ruelle. Bref, j’recommande pas trop, sauf si on n’arrive pas à chopper les patrons. »

Tout ça m’est vraiment arrivé, y’a une bonne quinzaine d’années. J’avais pris une demande pour effacer un gang rival, et j’avais failli canner comme ça. Tu parles d’une histoire de merde.

« Puis en tant que complice, on serait coincé en bas de l’échelle trop longtemps, ça pue. »

Et j’ai autre chose à foutre, surtout pour une mission dans laquelle j’dois faire mes preuves pour montrer que les talents dont j’dispose peuvent être utiles pour le Royaume et pour ma chef, Ombre première du nom.

« En arrêter un, ça ferait suspect, surtout si on fait ça officiellement. J’suis pas opposé à en coincer un dans une cave quelques heures pour qu’il parle, mais c’est jouer un jeu risqué, et on m’a fait comprendre que c’était pas tout à fait autorisé dans le cadre de notre activité officielle, sauf exception… Et que y’avait beaucoup de formulaires à remplir le cas échéant. J’préfère prévenir direct’, les formulaires à rallonge, j’faisais ça à la Guilde et ça me gonflait déjà pas mal. »

Surtout que Lou Trovnik rigolait pas là-dessus, fallait tout remplir correctement, sinon on était bon pour tout recommencer, pendant que le reste du boulot continuait à s’accumuler à côté. Son œil de vautour loupait pas une croix, une lettre, une ligne. Le pire, c’était le formulaire A2 quand il fallait le coupler avec le 2B et le 9S, une vraie purge de références croisées à s’en arracher les cheveux. D’ailleurs, c’était à cause de ça qu’Alex en était devenu chauve, à force. Une fois, il y a passé une semaine avant d’y arriver correctement.

« Du coup, j’préconise d’aller faire un tour à la taverne, p’tet en soirée. Ils m’auront probablement oublié depuis, mais ça posera pas problème. Tu veux garder le costume super pauvre ? Ou essayer de monter en gamme pour qu’on soit ensemble, cette fois ? Ca m’paraîtrait mieux. On pourra regarder comment ça se passe, et éventuellement faire une descente de gardes pour coffrer tout le monde. Ça les rendra un peu nerveux. »

Enfin, ça, on avisera quand on y sera, j’ai envie de dire, suivant la manière dont ça s’passe. Le chef y sera probablement pas, mais si on choppe un lieutenant, ça suffira largement.

J'avais omis des hypothèses au nouveau afin d'avoir son opinion pour les possibles manières qu'on pouvait utiliser afin d'avancer dans notre enquête sur cette nouvelle drogue qui contaminait peu à peu la capitale. Il ne fallait pas qu'on ne la laisse se diffuser à travers le pays... C'est pour cette raison que l'ancien maître espion m'avait demandé d'attendre des nouvelles de la régulière afin de commencer à agir en tant qu'espion.

Les réponses de Vrenn arrivèrent vite et était satisfaisant. Infiltrer notre groupe allait prendre trop de temps surtout qu'on commencerai au bas de l'échelle et l’ascension allait prendre plus de temps que pour les arrêter directement. Seulement faire disparaître l'un des deux colosses allait nous coller des problèmes. Il n'était pas idiot et connaissait les grands principes.. Nous allions nous attaquer à la taverne pour enquêter... Mais pas dans cette tenue.

"- D'autres spectacles ont lieu durant la soirée et il serai peut-être temps de se refaire une beauté... Ça évitera les ennuis et surtout d'être séparer. Retournons à la base et essayons de monter de gammes, mon déguisement n'était pas assez sophistiques pour être un bon consommateur."

J’entrouvris la marche afin de prendre la direction de notre planque. J'avais laissé une marge entre mon binôme tout en me questionnant sur la suite des opérations. Je recroisais de nouveau le garde corrompu qui allait bientôt passer un très mauvais quart-heure avant la fin de cette mission. Il fallait juste que je me change rapidement. J'étais enfin arrivé à notre base afin de retirer mon déguisement grotesque pour redevenir Vaelin Dragmar et de retrouver mes cheveux argentés... Le sbire arriva quelques minutes après. Cependant, il me revit sortir en tenue militaire.

"- La ronde va bientôt changer et je n'ai pas envie de voir l'autre raclure en profiter de nouveau... Il va aller passer quelques heures dans un trou avant. Ne t'inquiète pas sur la sûreté de la mission, j'étais de garde à cette endroit plusieurs fois."

La vérité était de nouveau sortie de ma bouche sur la suite des événements. J'emmenais de force le garde corrompu dans l'une de nos bases tout en lui faisant garder ses poches pleines des billets des pauvres citoyens dont les miens. Ils allaient certainement passer des mauvais moments en compagne de nos supérieurs. Après je repris la direction de notre planque tout en passant proche d'un petit parc parsemé d'un bassin avec plein d'oiseaux dedans. Quand on voit un oiseau sur un lac, c’est un signe. Pourquoi je pensais à ça ? Qui m'avait donc donner cette expression pourri déjà ? Ma petite soeur je crois.

J'étais de retour à la base et je pris le temps de mieux me préparer en me teignant de nouveau les cheveux d'une couleur plus claire. Je pris également le temps de mettre une tenue plus courtoises tout en arpentant une paire de lunettes des plus simples : au moins je restais plus présentable que la première fois.

"- Prêt pour le second round ?"

J'attendis sa réponse tout en en retournant pour la troisième fois en direction de cette arène afin de poursuivre l'enquête, cependant cette fois-ci nous allions devoir passer la porte arrière. Nous allions devoir appliquer les conseils des deux gaillards et laisser faire notre camarade.

J’retiens un ricanement quand Blood décide d’aller redresser le garde qui se livre à un peu de racket à l’entrée des arènes. Il essaie de corriger l’humanité dans son ensemble, ou quoi ? Faut être pragmatique, les gens sont ce qu’ils sont, et si ça paraît pas déconnant de vouloir empêcher les crimes violents et les trucs trop crapuleux, un gars qui fait les poches des touristes puis rentre chez lui pour nourrir sa femme et ses enfants, c’est quand même pas dramatique.

Enfin, j’suppose que pour avoir choisi d’être garde, et l’être de génération en génération comme ç’a l’air dans sa famille, faut être bien éduqué, et par éduqué, j’veux bien dire fanatisé. J’creuserai, tiens, pour savoir s’il est complètement un zélote avec un idéal de justice absolue et totale, ou s’il fait un peu la part des choses. Franchement, à sa place, j’me serais pas donné la peine. A la place, j’aurais attendu le garde à la sortie du boulot et j’lui aurais cassé les genoux avant de prendre sa bourse.

Mais bon, y’a plus le droit de régler les problèmes de cette façon. N’empêche qu’il aurait pas recommencé tout de suite, avec déjà quelques jours de rééducation, voire quelques mois s’il a pas de quoi se payer une bonne petite potion. Ça l’aurait calmé un peu, et lui aurait p’tet fait passer le goût de la légère illégalité. P’tet qu’il aurait totalement sombré, d’ailleurs, pour se maintenir en fonds. Ç’aurait été marrant. Si les gens se rappelaient de moi, j’aurais fait ça pour recruter, tiens. Une bande de gardes hargneux et désespérés, quoi de mieux pour prendre le contrôle des bas-fonds ?

Blood revient mieux sapé, moins style clochard vagabond, et avec des cheveux d’une autre couleur. Ils ont de la ressource, les gens qui peuvent pas se faire oublier d’un claquement de doigt pou le meilleur et pour le pire, les espions, hein. Moi, mon problème est plutôt inverse, mais ça devrait pas être trop gênant pour cette partie de l’investigation.

« Objectif, chopper un lieutenant, ou en tout cas un genre de gradé de la taverne de l’arène, et le coffrer. A partir de là, on devrait pouvoir faire tomber tout un pan du traffic, voire même remonter d’un cran, si y’a moyen de chopper l’utilisation d’une potion de vérité. »

C’est un vœu pieu, j’ai bien saisi que celle qu’on m’a filée était déjà exceptionnelle. Ça simplifierai juste vachement les choses.

On entre sans problème dans l’arène, et avec une nouvelle note de frais pour notre chef bien-aimée. C’est elle qui se démerde avec ça, après tout. A l‘intérieur, le public a changé. C’est moins pauvre qu’en journée, ce qui semble logique : le soir c’est les gens qui bossent, et les heures auxquelles y’a les spectacles les plus intéressants. En journée, c’est les désoeuvrés, les décalés, les drogués des paris. Et on se mêle justement plus à ces gens-là, maintenant. L’objectif, c’est de taper plus haut, plus cher, plus rémunérateur.

On jette qu’un regard rapide aux gradins et au bar, sans reconnaître nos copains. Bon, j’m’en doutais un peu. Puis on se dirige vers la taverne qui s’trouve un peu plus loin dans le grand terrain de l’arène. C’est là qu’on devrait trouver de quoi travailler davantage.

Cette taverne, c’est l’usine. C’est immense, et c’est pas là qu’on trouve un service personnalisé. Les gens, hommes comme femmes, qui bossent là ont pas de temps à perdre à discuter avec les clients pour créer du lien. Ils envoient des bières et du pinard, et parfois plus fort, à qui-mieux-mieux, sans prendre davantage de temps que celui d’encaisser avec une voix revêche en attendant la fin de leurs heures de travail. Parfois, un micro-sourire peut venir éclairer leurs visages, pour peu que y’ait un pourliche suffisamment conséquent, et encore…

On s’pose d’abord dans un coin d’où on peut observer à peu près toute la salle, avec une boisson chacun. J’ai pris une bière légère, ça occupe un moment sans avoir de commander davantage, et ça tape pas, c’est mieux pour le travail. Et j’jauge la foule, à la recherche de mes deux loustics, mais plus ça va, et plus j’me dis qu’on les trouvera pas comme ça. Et si y’a une magouille, c’est sûr qu’au moins un des barmans trempe dedans, donc c’est chez eux qu’il faudrait demander Josef ?

Enfin, rien ne presse, encore.

« Alors, longtemps que tu fais c’boulot, Blood ? »

Ma nouvelle tenue m'avait monté un peu en galons dans les classes sociales, je ne ressemblais plus à un pauvre prêt à se suicider mais à un travailleur. La facilité de changer d'apparence et de se faire oublier pouvait être facile quand on sait rester discret à longueur de journée. Je pris ou ne cachait aucune arme sur moi hormis ma bague piégé afin de pouvoir m'entailler les vênes et activer mon pouvoir en cas de soucis. Vrenn quand à lui, n'avait pas pris la peine de se changer. En même temps, son don était des plus pratique pour se faire oublier de tous... Je plains Zahria par moment pour se souvenir de cet homme à chaque seconde. Lisait-elle aussi ses notes tout les soirs ou l'enfermait il quelques part ? Nul ne le sait hormis elle.

J'en rigolais intérieurement tout en entrant plus facilement et sans devoir payer le garde corrompu qui avait "disparu". Au moins, j'avais résolu une partie facile du problème. La foule était plus aisé que dans la matinée et surtout plus nombreuses pour assister aux spectacles plus variés, plus spectaculaire. Avec mon compère, on arriva facilement à se faufiler dans la masse plébéienne. Seulement notre objectif était d'aller à la taverne de l'arène. Deuxième point d'accès de l'arène. Un problème pourtant se présenta à nous : le monde.

Chaque personne présent dans ce bâtiment semblait noyer leur habitudes dans les différentes boissons vendus des plus basiques au pire tord boyaux qui existaient dans le pays. Mais la plus rare des denrées fut de trouver une table libre entre le passages des serveurs et des autres clients qui cherchaient également un coin où s'asseoir. Finalement, ce fut Sbire qui trouvait la place... En plus, elle était bien placé au milieu de cette amas de monde, on pouvait chacun observer de notre côté les diverses personnes qui arpentaient les locaux.

Seulement, aucune des têtes ne me revenaient sur les individus vus plus tôt... On allait devoir attendre et j'en profitais pour passer commande d'une boisson sans alcool. Vrenn profita pour bosser une question concernant le boulot. Calixte n'avait pas encore confiance à cet homme. Personnellement, j'étais plus ouvert à la discussion et cet homme avait la confiance absolu de notre mentor :

" - Depuis de nombreux années déjà comme Damoiseau, nous avons appris ensemble sous la tutelle d'Ombre. D'après l'ancien, c'est ma propre jumelle qui avait joint mon dossier pour rejoindre l'ordre. Elle n'a jamais su que j'en fais parti. J'adore mon métier et je ne m'en passerai jamais pour l'instant car notre cité n'est pas sûr... Regarde simplement le garde de ce matin. Beaucoup trop profitent de leur statut pour faire profit sur les plus faibles.

Et toi ? Pourquoi nous avoir rejoint ? En guise de rédemption de tes crimes passées ? Ou pour Ombre ?

Je souriais à mes questions tout en buvant doucement ma boisson servi avec un sourire forcé de la servante... Je pouvais lire la "joie" de son travail sur sa tête. C'est alors que je vis un individu des plus intéressant entrer dans la taverne : l'un des deux balourds qui m'avait bousculé plus tôt et qui s'étaient enfermé dans les toilettes plus tôt. Je fis un léger signe à mon acolyte pour indiquer la présence de notre indice pour avancer dans cette enquête. Il partit en direction de l'un des fonds de la taverne pour rejoindre une autre personne aux formes généreuses : une femme... Cependant, il ne semblait pas d'une amourette car celui-ci semblait nerveux tout en présentant une légère sacoche rempli de cristaux. Bizarrement, plus aucun serveur ne passait dans leur secteur et les rares autres clients furent repousser par d'autres personnes hormis le tavernier alors qu'il ne bougeait pas de son comptoir depuis le début... Louche cette histoire. Au moins, je pense qu'on avait trouvé notre proie : cette femme

Bon, donc l’équipe actuelle appartient à Zahria, quoi. C’est elle qui les a formés, que ce soit Damoiseau ou Blood. J’me demande si l’ancien maître-espion a fait exprès de faire en sorte que ce soit elle, le mentor, pour solidifier une future promotion à son poste. Si le loustic est aussi malin et sournois qu’ils le prétentent, ça paraîtrait pas impossible. J’aurais bien voulu le rencontrer et lui taper la causette, à l’occasion, par simple curiosité. Pour jauger, autant que faire se peut, le personnage. Ça doit être intéressant, quelqu’un qu’a touché à toutes les saloperies du royaume pendant des années.

Mais il est plus là, et j’sais pas si même Ombre a des informations sur l’endroit où il est parti couler des jours paisibles. Ça s’trouve, la retraite d’espion, c’est un couteau entre les côtes et un remerciement écrit de la reine. Ça serait vicieux, mais efficient.

« Moi ? J’ai pas réellement eu le choix, tu sais. Après, un boulot ou un autre, j’suis pas à ça près. J’faisais déjà les mêmes missions, mais pour les criminels, plutôt que pour la Couronne, c’est apparemment la seule différence à laquelle j’aurai droit. La rédemption… j’suis pas très religieux. Mais j’suis appliqué et j’essaie de faire le taf du mieux possible. Que ce soit ici ou… avant. »

Pas grand-chose d’autre à dire. J’suis un peu une feuille au milieu de la rivière. J’suis juste parti dans un autre bras de l’eau vive alors que j’aurais pu m’échouer dans la fange d’un bras mort. Ça s’est juste pas joué à grand-chose, et si y’a vraiment une Déesse Lucy de la chance, on peut supposer que j’en ai eu. Mais c’est à la fin de la foire qu’on compte les bœufs, et j’attends de voir si j’finis comme le maître-espion, les pieds dans l’eau avec un cocktail et une mignonne peu farouche sous chaque bras, ou juste un accident de plus sur le bord de la route.

Une de nos marques rentre, et commence à taper la discute à une nana genre… pulpeuse. Elle doit avoir mon âge, ou probablement un peu plus, mais est assez bien conservée, faut le dire. Elle dénoterait presque avec l’ambiance actuelle. Presque seulement, pasque y’a un paquet de gens extrêmement bien sapés, genre costume, robe de soirée, tout ça. Nous, on se fond davantage dans la masse, faut pas se leurrer, et c’est parfait comme ça.

Blood a vu la femme comme moi. C’est donc notre prochaine étape.

On attend tranquillement que le gorille vendeur finisse de filer ses cristaux et se garde sa maigre part, à voir la gueule de la bourse, puis se tire. Ah ça, c’est toujours les gens du haut qui gardent le gros du pognon, dans les gangs comme dans la société de manière générale, hé ? Elle range l’argent dans son opulente ceinture, et ce coin du bar devient à nouveau praticable et circulable, quand elle passe dans l’arrière-salle. Cuisine ? Avant que la porte se ferme, on voit un petit escalier qui monte à l’étage. Bon, ça doit être là que les choses se font, alors.

Et là où y’a l’oseille, y’a généralement les pontes.

« On y va ? »

Blood acquiesce. La seule question qui reste, c’est comment. On pourrait tenter au culot, mais jamais le tavernier nous laisserait. On pourrait revenir avec la garde, mais m’est avis qu’ils ont touché des pots-de-vin et qu’ils savent parfaitement que c’est ici que ça se passe. On pourrait y aller comme des espions. J’me sens pas de passer invisible et de circuler au milieu de la pièce, par contre, trop de risque de tamponner quelqu’un, ou qu’ils aient des protections en place.

On finit nos boissons, et on sort. La bière était bonne, même si le prix était cher. La pièce à l’étage a pas forcément de fenêtre, mais on peut toujours rentrer par ailleurs. Y’aura des gens pour protéger, en haut, aussi.

« Tu préfères passer par la cuisine en écartant ceux qui y bossent, ce qui attirera l’attention, ou directement par la fenêtre là ? »

Le battant est fermé, mais ce sera pas un souci pour moi.

« J’pense que la fenêtre, c’est encore le mieux. Et j’vois à peine au travers, grâce à la lumière. Laisse faire le professionnel. »

D’un coup, j’suis plus à côté de lui. Ma téléportation m’a amenée dans la pièce, heureusement vide, mais sinon, j’aurais réglé le souci sans trop de difficultés. J’lui ouvre et j’lance une corde pour le hisser rapidement à l’intérieur. Va être temps d’aller fouiller un peu.

A chaque instant, nous devions nous montrer prudent afin de pouvoir progresser au sein de cette mafia naissante dans notre capitale. j'accompagnais Vrenn afin qu'on obtienne des informations sur l'origine ainsi que les vendeurs. On avait des visages et des noms du bas de l'échelle mais on cherchait les gros... La chance était peut-être de notre côté aujourd'hui vu les événements qu'on allait voir dans la taverne. Mais le duo qu'on formait devait attendre que le groupe dévoile des choses intéressantes.

On en profitait pour parler de notre vie concernant l'espionnage pour ma part et lui sa vie passé de délinquants. Il faisait désormais notre travail par obligation plutôt que pour servir la couronne. Nous avions chacun nos raisons de tout façon... J'aurai bien voulu dialoguer plus longtemps avec afin d'en découvrir plus sur notre nouveau camarade et rassurer mon frère d'arme. Mais les tournures à l'intérieurs changea notre attention avec l'apparition d'une femme qui semblait diriger les brutes qui m'avaient ignoré ce matin. Elle partit dans l'arrière boutique tandis qu'on remarquait tout les deux, la présence d'un escalier...

Intéressant et Sbire m'invita à aller dehors pour nous rendre au pied d'une des fenêtres arrières du bâtiments afin qu'on puisse s'infiltrer. Par contre, j'avais mal jugé la hauteur pour s'y rendre et l'ascension allait prendre un peu plus de temps... Avant de me rendre compte que mon partenaire s'était déjà volatilisé pour réapparaître à l'ouverture en me lançant une corde lisse. Un bon exercice pour le rejoindre. Il fallait vraiment que je procure des obejts magiques un jour, ça pourrai m'être utile.

Je m'attendais à y trouver une chambre, c'était généralement le cas dans les tavernes. Cependant, la réalité était nettement différente, nous étions dans un bureau bien entretenu au premier abord. On allait devoir le fouiller et j'ouvris le premier tiroir pour y découvrir des carnets. J'ouvris pour y découvrir des comptes... J'étudiais en détail le document et je fus déçu : un simple livret des comptes du tavernier. Je fouillais les autres, idem des plus anciens.... Mais à chaque ouverture du tiroir, un petit claquement se fit entendre avec des sons différents. Bizarre.

Je testais diverses dispositions sans découvrir les raisons, je me mis même en dessous des tiroirs tout en parlant à Sbire :

"Je pense qu'il y a quelques choses de cacher dans ce meuble, écoute le bruit qu'il fait en tirant les divers tiroirs. Mais j'ai déjà connu d'autres systèmes moins développé comme un double fond mais aucun indice.

J'attendais ses remarques ainsi que ses découvertes. Mais une voix se fit entendre, celle d'une femme.

... surtout que personne vienne me déranger."

Je fis signe à Vrenn de se cacher tandis que j'utilisais ma bague piégé afin d'encaisser ma paume de main et créer une lame de sang. On devait se cacher mais on allait pouvoir l’interroger si c'était la même femme que tout à l'heure. Je me mis directement dans un coin caché de l'ouverture. C'était la même et lorsqu'elle ferma la porte. Je lui sautais dessus discrètement et plaqua ma lame de sang sous sa gorge et l'autre sur son visage afin de lui masquer sa bouche. Je l’empêchais de parler tout la forçant afin qu'elle me suive. Vrenn s'était à toi de jouer, mon regard lui disait que c'était à son tour d'âgir.

C’est le bon plan, que Blood se foute derrière elle et me laisse interroger. De toute façon, elle pourra pas se rappeler de moi, alors que si on est contraint de prendre la poudre d’escampette un peu vite, sans l’emmener directement au trou, ça risque de compliquer les choses pour lui. Nan, ce qu’il faudrait, c’est mettre la main sur les documents planqués dans le bureau, et pouvoir s’en servir comme base. Parce qu’il faut pas se leurrer, elle parlera pas.

« Que voulez-vous ? Des cristaux ?
- Ouais, que j’réponds. »

Elle attrape doucement la bourse dans sa ceinture, celle-là même que le gorille lui a filé un peu plus tôt, et me la lance. J’l’attrape, et son poids est plutôt réconfortant, tout comme la couleur des cristaux à l’intérieur. Merde, si j’avais su, j’serais venu faire des prélèvements ici avant, dans mon ancienne carrière. Mais c’est maintenant qu’il faut se concentrer.

« Vous avez des ennuis, qu’elle reprend.
- Ah bon ?
- Vous n’avez pas l’air de savoir dans quoi vous venez de vous fourrer.
- Sans doute pas, on n’est pas de la Capitale.
- Imaginez la Frontière. Y’a le Fenrir, oui ?
- Vous êtes un fenrir ? A d’autres.
- Non, non, simplement des béhémots.
- Ben tiens.
- Vous verrez. J’espère que vous savez dormir que d’un œil, et que vous courrez vite.
- Ouais, ouais, c’est ça. »

Elle a pas du tout peur. Ils doivent vraiment faire partie d’un gros morceau, j’suppose. Grand bien leur fasse, la plus grosse mafia du Royaume, c’est l’état, alors j’attends de voir. J’pourrais m’inquiéter pour Blood, mais elle le reconnaîtra jamais, et elle m’oubliera bien vite, malgré tous ses efforts.

« Allez-y, courrez, tant que vous pouvez.
- Nan, d’abord, tu vas nous dire comment ouvrir les tiroirs cachés du bureau.
- Ah. Très drôle. Si je crie, y’a dix hommes qui montent pour vous tuer.
- Si tu cries, tu meurs. »

J’lui jette un regard indifférent, et Vaelin appuie un peu plus sa lame sanglante sur sa gorge, faisant perler une goutte qui lui coule jusqu’à la clavicule.

« Que voulez-vous ?
- J’ai déjà répondu. Les tiroirs.
- Bonne chance. »

Ouais, merci, connasse. Pendant que Vaelin la tient en respect, j’examine le meuble, avec mon rossignol noir à la main. J’passe ma main sur toutes les surfaces, en appuyant dans la région dans laquelle il a identifié le double-fond. Rien. La serrure pourrait marcher de façon différentielle, peut-être ? J’introduis l’objet magique dans chaque trou, et j’le sens prendre une forme fixe à chaque fois. J’tourne dans un sens, puis dans l’autre, sans rien détecter de particulier.

Le pire, c’est si c’est un verrou magique. Là, on sera pas prêt de l’ouvrir, putain.

J’retourne vers la femme, qui me regarde avec un sourire tranquille, un brin moqueur quand même. Hé, il faut ce qu’il faut pour prendre l’ascendant psychologique.

« File la clé, on gagnera du temps.
- Quelle clé ?
- Ouais, joue l’ingénue. »

J’commence à fouiller ses poches, l’intérieur de ses vêtements. J’pelote un peu involontairement au passage, m’enfin, hein, on va pas s’en plaindre, surtout vu ses formes. Elle avait qu’à me filer ce que j’voulais, au fond, et si elle se raidit, ça lui fait pas de mal d’être un peu plus mal à l’aise. Dans sa tête, elle se dit sans doute que ça pourrait salement déraper assez rapidement. Si elle savait…

J’sors finalement un ensemble dépareillé de clés. On n’a pas le cul sorti des ronces, hein… Y’en a une qui fait vachement davantage réagir mon sceau magique, cela dit, donc on va p’tet gagner un poil de temps. J’l’insère un peu partout, et le tout petit cristal magique serti dedans clignote jusqu’à ce qu’un tiroir et son double-fond s’ouvrent.

Dessous, y’a une pile de parchemins et, en les parcourant rapidement du regard, ce qui semble être des suites d’opérations comptables. Ça devrait suffire pour la coincer.

« Rien qui vous intéressera ici.
- Nous, probablement pas, mais notre parrain… Enfin, vous verrez bien assez vite. »

J’ramasse le tout dans mon sac sans fond, et j’fais signe à Blood. Il raffermit sa prise sur le cou de la femme, coupe la circulation, et elle tombe au sol, inanimée, au bout de quelques instants.

« Elle se rappellera que t’es venu voler des documents, nan ?
- Elle n’a pas vu mon visage, et pensera normalement que nous appartenons à un gang rival. C’était le but en nommant un parrain ?
- Ouais. De toute façon, on a assez pour la ramasser, mais on veut plus haut. J’pense pas que les opérations comptables suffiront. Il nous faut juste de quoi lui coller un sérum de vérité dans le gosier, et ça ira tout seul ensuite. »

Il hoche la tête. On pouvait difficilement faire mieux, vu les circonstances.

« Allez, on s’arrache, histoire de pas être dans le coin quand elle émergera. »

Puis Zahria se démerdera avec sa documentation, hein. Et ce qu’elle veut en faire : garder sous le coude au cas où, ou bien agir et provoquer une descente de la Garde histoire de calmer tout ce beau monde.