Une bière en main, seul à une table, voilà ma position pour l'instant. J'étais actuellement au village de pêcheur de Port-Thion. La vie était des plus tranquille dans ce genre d'endroit avec la même routine chaque jour. Les pêcheurs partaient en mer très tôt au matin, bien avant que le soleil ne se lève et revenaient quelques heures plus tard avec le fruit de leur cueillette. La récolte en cette saison était plutôt correcte, les filets étaient pleins. Les poissons aimant l'eau plus fraîche remontaient la mer jusqu'à grand-port et continuaient leur chemin vers le nord.
J'étais arrivé la veille, bien reposer. Je n'avais eu de quête depuis quelques jours. J'avais pu donc récupérer de ma fatigue dû à mes tatouages. Et d'ailleurs, eux aussi avaient bien récupérés. Il ne restait plus aucune trace du dernier combat. J'avais maintenant un quatrième partenaire et j’espérais bien l'avouer pouvoir voir ce dernier en action le plus vite possible. Mais nous ne sommes pas encore là ! La raison de ma présence est complexe. Alors que je revenais de Grand-port et que je rendais mon rapport à la guilde. Une dépêche arrivait sur le comptoir : à l'intérieur une requête pour des aventuriers d'après une rumeur des choses étranges se produisaient dans le dit-village où je me trouvais. Naturellement, la personne du comptoir m'avait engagé directement puisque j'étais d'après ces mots "disponible". Je vous en foutrais moi des "disponibles" Mais bon un contrat est un contrat ! Du coup me voilà. Heureusement pour moi j'avais pris les devants avant de revenir m'offrant même deux-trois jours de repos à la capitale, il faut dire qu'avoir accès au portail de téléportation cela vous permettait de gagner plusieurs jours de trajet.
Par contre juste avant de partir j'avais appris que je ne serais pas seule sur l'enquête, en effet on me collait un partenaire jusqu'au cas où il faudrait intervenir. L'orgueil aurait pu l'emporter sur tout, mais je ne suis pas ce genre de gars. Je sais que la nature peut-être très hostile à notre présence. Alors je pris sur moi. Il ne m'avait pas contre pas donner de nom, en réalité, je suis certain qu'au moment où il m'avait dit cela, il n'y avait encore personne de prévu. J'avais hâte je dois bien l'avouer de voir à quoi ressemblait cet autre aventurier. J'ai l'habitude de travailler seul sur presque toutes mes affaires. La seule fois où j'ai fait un duo c'était avec une femme dénommée Astrid et c'était pour me faire pardonner de lui avoir fait perdre son chat. Mais je m'égard, ce que je voulais dire c'était que j'avais hâte de voir ça façon de travailler...
Notre point de rendez-vous ? La taverne pardis! Où voulez-vous rencontrer quelqu'un si ce n'est à la taverne ? Voilà pourquoi j'étais assis sur une chaise, le dos contre le dossier et celui-ci contre le mur. Il était plus facile de voir les aller et venue des gens de cette position et cette aussi plus pratique car je pouvais déposer ma lance dans le coin histoire qu'elle ne traîne pas à terre. Mon arc lui aussi contre le mur. La seule arme que je portais encore était un couteau de chasse mais je me disais de plus en plus que j'allais me diversifier dans les armes. J'avais besoins d'armes de jet à court portée et peut-être d'un fouet. La cloche résonne à nouveau, voilà qu'une nouvelle personne fait son entrée. Était-ce l'homme où la femme que j'attendais ?
*Voyons voir qui nous avons là? *
En tout cas, je peux vous dire qu'il a une drôle de dégaine avec son habit rouge. C’est vraiment un gars à part, je ne parle pas du fait qu’il ait des oreilles ou une queue de chat. Ça je m’en fiche un peu à la limite ça me renseigne déjà sur une partie de son pouvoir. Je parle tout simplement de son look en général mais ce n’est pas bien de juger une personne sur son physique. Le ton sang de son vêtement fait contraste avec ses cheveux blancs. Il faut dire qu’il est tout à fait atypique.
– Ou … oui mon bon maître !!
Cela faisait près de trois jours que j’avais croisé ce dénommé Kasimodal. Le pauvre bougre errait sur les routes, seul, un peu comme un chien abandonné. L’idée m’était venue alors de le prendre sous mon aile, le temps de me divertir, et jusqu’à ce que sa simple vue me dégoûtât. Pour faire une description simple de ce malheureux bougre, il s’agissait d’un rebus, d’un pauvre hère destiné à une vie de solitude. Et par Lucy, qu’il était repoussant. Ne dépassant guère le mètre cinquante, sa tête macrocéphale, son bec de lièvre, ses yeux vitreux, ses bubons qui colonisaient sa face, le filet de bave suspendu à son menton … Sans compter les guenilles qui empestaient le caca boudin et qui n’avaient probablement pas été lavées depuis belle lurette. Bref, je m’étais pris de pitié pour sa monstruosité, et décidai d’en faire un petit animal de compagnie au moins pour un temps.
Lui, pensait déjà sincèrement qu’il allait passer le reste de ses jours avec moi. NAÏF QU’IL ÉTAIT !!! Parce que oui, il était aussi intelligent que gracieux. Probablement attardé mental, j’avais l’impression d’avoir affaire à un gamin âgé de dix ans. L’imbécile gobais tout ce que je racontais.
– Sais-tu, mon très fidèle et dévoué Kasimodal, que je suis ni plus ni moins que l’héritier de ce vaste Royaume ?
– Je ne savais pas, maître !
– Par Lucy, tu pues ! Fais donc silence et épargne mon flair des vapeurs malodorantes qui émanent de ta bouche.
– A vos ordres, mon prince !
C’est amusant.
– Sais-tu, mon bon Kasimodal, que chaque homme ou femme arpentant ce pays, est doté d’un pouvoir particulier ?
– Oui mon prince.
– J’aimerais connaître le tien.
Nous marchions au bord d’une route, et ce petit monstre parut tout fier et excité de me montrer ses talents. Et je ne fus pas déçu. Kasimodal semblait viser un arbre situé non loin de nous. Il agita sa main, et un éclair en surgit le temps d’une demi-seconde pour aller fracasser l’arbre tout entier qui fut foudroyé sur place. Il ne restait plus qu’une forme rachitique, brûlée et fumante de ce chêne innocent … Mon coeur bondit dans ma poitrine. Kasimodal était ainsi doté de facultés pour le moins exceptionnelles. Un claquement de doigts, et c’en était fini de ma pauvre carcasse. Il fallait donc rester prudent avec ce genre d’énergumène et lui fausser compagnie au plus vite. C’est mon instinct qui parlait.
– Reparle-moi donc de cette quête, mon loyal et très indispensable Kasimodal …
Quelques heures plus tard, je me retrouvai seul sur la route. J’avais simulé l’attaque importunée d’un dragon invisible pour le faire déguerpir comme un flèche. J’étais débarrassé de lui, au moins. Cet idiot m’avait donc parlé d’un quête étrange au sujet d’une affaire étrange dans un coin paumé de la côte. En effet, cet empaffé de Kasimodal m’avait inscrit malgré moi pour un requête locale. Seigneur. Ce genre de bêtises n’arrivait qu’à moi. Alors je n’eus pas le choix : direction Port-Thion pour régler une histoire dont j’ignorais les tenants et aboutissants.
Le rendez-vous avez été fixé à la taverne du coin, d’après mon ex-camarade bossu, avec un autre aventurier paraissait-il. J’entrai dans l’établissement, qui empestait le houblon. A l’odeur je devinai que la majeure partie de la clientèle était constituée de marins. Les autres étaient certainement des locaux. Comme quoi, avoir du flair c’était utile. Néanmoins, quelqu’un se dégageait fortement du lot.
Un jeune homme plutôt grand et mystérieux, attablé non loin. Son odeur était particulière, un peu plus « bestiale » que celle des gens alentours. Je captais également une effluve plus champêtre, et plus boisée, ce qui signifiait qu’il passait beaucoup de temps dehors, à voyager, là où les autres clients sentaient plutôt le poisson pourri (une odeur particulièrement agréable pour moi, me demandez pas pourquoi), ou le foin. C’était probablement lui, mon partenaire. Vêtu d’une légère protection, d’habits sombres, je remarquai tout de même les quelques tatouages qui décoraient son épiderme, ainsi que ses longs cheveux bleus, et surtout ses yeux de braise incandescente. Pas banal. Naturellement, j’allai jusqu’à lui et m’installait en face de lui tout en lui adressant un sourire carnassier.
– Tu dois être mon partenaire du jour, je gage ? Appelle-moi Migiwa, j’suis enchanté ! Pour la faire courte, disons qu’un cloporte de la pire espèce m’a inscrit malgré moi sur cette fameuse requête … Je n’ai donc aucune fichue idée de ce qui m’attend. Donc si tu as les infos, je dis pas non pour les avoir !
Lorsqu’un serveur arriva ua niveau de notre table, je fis claquer mes griffes et commandai un grand verre de lait. J’étais maintenant suspendu au lèvres de cet aventurier, tout en dégustant mon lait, non sans ronronner bruyamment.
Pour ce que de du jeune homme qui venait de s’asseoir, je ne peux vous donner que mes premières impressions. Vu son sourire, je suis sûr qu’il aime jouer à des jeux dangereux voir mortels. Sa façon de se mouvoir jusqu’à moi m’avait aussi appris que son pouvoir lui avait causé une hybridation, d’où sa queue ses oreilles. La façon dont il avait traité cette personne que je ne connaissais pas était une indication intéressante sur la façon dont il considérait les gens. Il se pensait supérieur à la plupart des gens, très certainement comme un noble se pensait supérieur à la populace... Pourtant il n’avait pas l’air d’être le genre de personne à sortir faire des tours en calèche dorée juste pour se faire voir. Enfin ça ce n’était purement qu’un avis superficiel, je ne connais pas son mode de fonctionnement...
“En effet je suis ton partenaire. Enchanté de te connaitre, moi c’est Red”
Comment ça un cloporte l’avait inscrit ? Depuis quand les crustacés savaient inscrire des gens pour des missions ? Oh, il parlait d’une autre personne ? C’est bien ce que je disais ! Il se prenait pour une sorte de gros matou qui avait la main mise sur ce qu’il l’entourait. Mais cela je pouvais encore faire avec... Ce qui me laissait coi c’est que du coup, il était venu sans rien connaître de ce qu’il l’attendait. Nous allions peut-être devoir chasser un Tanhiwa des côtes ou encore affronter une monstruosité chantante. Enfin il y avait peu de chance que cela arrive vu l’endroit mais ne sait-on jamais. Quand on partait en quête, mieux valait être préparé à tout. Or ici, j’avais visiblement l’impression que ce n’était pas le cas. Il fallait donc que je lui explique la raison de notre présence.
“Eh bien voilà ce que je la guilde m’a transmis. Tout près d’ici à environs kilomètres au sud de notre position, ce trouve un bosquet qui sert de cimetière aux gens d’ici. Depuis quelques temps, les gens ont remarqué des traces de griffures sur les pierres tombales, de plus les tombes ont été retournés et les cadavres partiellement mangés. “
Je le laissais digérer toutes les informations que je venais de lui transmettre. Si je remplissais sa coupe trop vite, il allait exploser le pauvre. Je bus une gorgée de ma bière en le regardant boire son lait en ronronnant... Les seuls animaux que je connaissais qui ronronnait en buvant du lait c’était les chats et encore normalement le lait que nous buvions chaque jour n’étaient pas bon pour leur digestion car il était traité. Mais bon étant humain de base cela ne pouvait pas s’appliquer à notre jeune ami.
“On nous demande donc de vérifier dans un premier temps les faits et ensuite de juger par nous-même de la marche à suivre. S’il s’agit de personne vandalisant les tombes alors la quête devra retourner à la Garde mais s’il s’agit d’autre chose nous avons l’ordre d’y mettre un terme. As-tu des questions ? ”
Il en savait maintenant autant que moi. Mais qui sait j’ai peut-être oublié l’un ou l’autre détail et si une question lui venait en tête. Autant qu’il me la pose de suite.
En tout cas, il fut bien aimable de me faire un topo sur la situation. Des tombes profanées, des cadavres dévorées, des traces de griffures … Tout laissait à penser qu’une ou plusieurs créatures prenaient un malin plaisir à perturber le sommeil des morts. En tout cas, Red n’avait pas plus d’informations sur le sujet. C’était un peu maigre, mais il est certain que nous ferions l’affaire. Tout à fait dans les cordes d’Aventuriers chevronnés. Car si je n’en étais peut-être pas un, au moins mon partenaire l’était. Pas la moindre peur dans ses paroles. Il avait l’air serein au sujet de l’affaire qui se profilait. Confiant, en tout cas. Après m’avoir demandé si j’avais des questions, je répondis.
– Non, tout est clair pour moi. Nous avons affaire à des rigolos de service, ou des bestioles charmantes. Puisque tout est dit, je te propose que nous nous rendions immédiatement sur place. Inutile de prendre racine ici, d’autant plus que j’ai pas l’impression qu’on est les bienvenus ici …
Au fur et à mesure que je parlais, je baissai d’un ton. Les regards méfiants autour de nous se mirent à fleurir avec abondance. C’était la première fois que je sentais une telle hostilité dans un établissement d’accueil comme une caverne. Mais bon. Beaucoup de villages détestaient la venue d’étrangers, cela signifiait pour eux le bouleversement de leurs habitudes. Et on savait tous à quel point les gueux étaient tatillons sur leur train-train quotidien. Je fis signe à Red de nous lever, mieux valait ne pas traîner ici trop longtemps. Nous sortîmes de la gargote, et tombâmes nez à nzaz avec un vieillard, aux sourcils épaix, à la barbe bien taillée, et surtout plutôt bien habillé. Se tenant droit devant nous il nous dévisageait.
– Vous êtes tous les deux les Aventuriers venus pour régler le problème du cimetière ?
– Euh … Oui.
– Je m’appelle Marco, et je suis le fossoyeur de ce village. C’est moi qui ai posé cette requête à la Guilde. Le cimetière est un peu plus haut, sur cette corniche. Si vous voulez bien me suivre.
Le vieil homme pris les devants, silencieux comme un mort. Alors qu’il se murait dans un silence mystérieux pendant que nous marchions, je tentai d’ouvrir le dialogue.
– Pas très sympathiques, les habitants de Port-Thion.
– Hm.
Quoi ? Un simple grognement en guise de réponse ? Il était sérieux celui-là ? Rien ne nous obligeait concrètement à lui venir en aide. Avec des caractères comme ceux-là, évidemment que ce maudit village paraissait lugubre. Je lançai un regard agacé en direction de Red. Peut-être qu’il souhaitait dénouer la tension qui s’était installé depuis dix minutes ...
Un homme nous attendait à l’extérieur. Plutôt bien portant, nous indiqua être l’homme du cimetière. Celui qui enterrait les morts à jamais, le passeur des tombes, le fossoyeur... Vous remarquerez l’effet dramatique que cette suite de mot provoque... Bref, cet homme était celui qui nous avait fait quémander. Bien lui pourrait répondre aux questions que je me posais. Nous suivions donc notre employeur si je puis dire. Le deuxième aventurier essaye d’entamer le dialogue...Je dois dire que cela ne fonctionne pas très bien, il faut dire que les mots de mon compagnon ne sont peut-être pas bien choisis. Je haussais les épaules en guise de réponse à son regard.
“Dites-moi Marco, depuis quand êtes-vous le gardien du cimetière ? “
“Je dirais plus de 30ans maintenant, mon père l’était avant moi, je n’ai fait qu’hériter de sa tâche. “
“Je vois et dans tous les souvenirs que vous avez, est-ce que vous avez déjà vu quelques choses de similaires à ce qui se produit ? “
L’homme continua à marcher en marmonnant dans sa barbe. Cherchant probablement dans sa mémoire.
“Non, pas que je m’en souvienne, nous avons déjà eu de divers problèmes comme des tombes abimées ou des pilleurs mais jamais les morts n’avaient été profané de la sorte de mon vivant ! C’est pour ça que j’ai fait appel à la guilde...”
“J’ai entendu dire que certain corps avait été mangé... ? Si c’est réellement le cas, pourrais-je voir l’un des corps ? “
“Vous êtes sûr, ce n’est pas quelques choses de beau à voir...”
“Oui, cela nous permettra de s’imaginer à quoi nous avons à faire...”
L’homme se remura dans son silence après nous avoir adressé un “d’accord” Nous conduisant près d’un petit bâtiment de pierre qui devait être l’endroit où l’on prenait soin des morts avant de les mettre en terre. Attenant à celle-ci une petite chapelle en l’honneur de Dame Lucy, notre déesse. Plus loin on devinait aisément les croix et la pierre servant de dernière demeure au corps des défunts. Il ne faisait pas encore noir mais cela ne devrait plus tarder.
“Faites attention à l’odeur en entrant, cela risque de vous faire vomir si vous avez le nez sensible”
De ce côté-là, je n’avais pas de soucis par contre je ne savais pas ce qu’il en était pour mon ami avec son pouvoir d’hybridation.
“Tu vas savoir y entrer ? “
Dis-je en suivant notre guide dans le petit établissement.
Marco nous conduisit jusqu’à un petit bâtiment en pierre, collé à une chapelle consacrée à Lucy. Notre guide nous avertit : l’odeur de décomposition risquait d’être forte. Red se tourna vers moi et demanda :
– Tu vas savoir y entrer ?
– Pas de problème. L’odeur de la pourriture n’est pas une « mauvaise » odeur pour moi. Il m’arrive même de me frotter la tête dans des carcasses d’oiseaux morts pour tout te dire. Et me demande pas pourquoi, je n’en ai pas l’ombre d’une idée.
– Vous êtes un drôle d’Aventurier, commenta Marco de son ton monocorde.
– Et vous, vous êtes beaucoup trop calme !
– Si vous le dites …
Marco nous avait bien fait de nous mettre en garde. Une fois à l’intérieur un parfum nauséabond nous prit les naseaux. Pour moi, c’était largement supportable. Tant qu’il ne s’agissait pas de citron ou d’agrumes, mon odorat pouvait tout supporter. C’était une pièce bas de plafond, dépouillée, avec en guise de meuble une simple chaise au fond à droite, une espèce de table d’opération au centre, où se trouvait un corps recouvert d’un drap blanc, ainsi qu’une armoire du côté gauche de la salle, contre un mur, et regorgeant d’ustensiles propres à la profession de fossoyeur. Pourtant il y avait quelque chose qui clochait, ici. Et malgré moi, je me couvrai le visage. Ce qui n’était pas normal. Il n’y avait pas que l’odeur de la pourriture. Il y avait autre chose. Marco dévoila ce qui cachait le grand tissu : un cadavre très largement décomposé, et très largement grignoté. Il lui manquait même une partie du visage, ce qui n’avait rien de commun. Marco ne disait rien, e nous regardait faire notre travail.
Mais moi, je n’étais pas trop intéressé par le corps pour l’instant. De toute façon je n’avais aucune idée de la créature pouvant dévorer des dépouilles de cette manière. Ce qui m’obnubilait, c’était l’autre odeur. Plus insupportable pour moi que le parfum fétide ambiant. Et je la suivis jusqu’à l’armoire, identifiant clairement sa nature : des produits chimiques très puissants. J’en avais la larme à l’oeil. Pourtant, l’armoire ne renfermait aucune fiole, aucune bouteille, juste des instruments. Alors cela venait de l’autre côté. N’écoutant que mon instinct, comme d’habitude, je marchai avec détermination vers Marco et dégainai mon katana pour le mettre en joue. Surpris et apeuré, le fossoyeur leva les mains au ciel d’un regard implorant !
– Mais qu’est-ce que …
– Qu’est-ce que vous cachez, ici ? Red, tu ne le sens peut-être pas à cause de l’odeur du cadavre qui recouvre tout, mais il y a quelque chose derrière l’armoire. J’ai senti très clairement la présence de produits chimiques. Pourtant un fossoyeur n’a pas l’habitude d’avoir un labo comme local de travail, je me trompe ?
– Je ne vois pas de quoi vous parlez !
– Menteur ! Si on défonce ton meuble à rangement, que risque-t-on de découvrir ?
En guise de réponse, Marco fit la grimace tandis que la pointe de ma lame lui piquait la peau. Aucun mot ne sortit de sa bouche, cet énergumène taciturne nous cachait des trucs. Restait à découvrir quoi exactement.
J’entrais alors à mon tour dans la bâtisse, l’odeur de mort était on ne peut plus présente. Il était difficile d’y respirer normalement tellement cela vous montait au nez. La mort ça a tendance à ne pas sentir le frais et encore moins quand l’espace est exiguë. Je parcourais la pièce, des yeux cherchant un défaut ou quelques choses qui clochait sans rien trouver. Je mis donc devant le drap sous lequel reposait le corps. Marco, à côté de moi, enlevas alors le tissu blanc, le faisant glisser jusqu’au pied de la dépouille. Et bien par Dame Lucy quel spectacle atroce, le corps avait été grignoté voir complètement rogner à plusieurs endroits. Le visage de notre chère morte n’avait plus rien d’humain, la décomposition était déjà bien avancée et on pouvait même voir des larves d’insectes déjà à l’œuvre.
Migiwa ne semblant pas très intéressé par la dépouille c’est moi qui devais faire l’inspection de celle-ci. J’emprunta à notre fossoyeur deux de ses ustensiles à savoir un écarteur et une pince. Je me servis de ceux si à une main car j’utilisais l’autre pour me couvrir la bouche et le nez. Le professionnel ne m’aida aucunement surement pour ne pas me gêner outre mesure. Sur les os de notre victime des traces caractéristiques de morsures. La chose qui l’avait dévoré avait une dentition presque humaine. Il y avait aussi les traces de griffures sur les quelques parties pas encore trop amochées du corps.
C’est alors que je vis la lame de l’aventurier sortir de son fourreau pour aller se mettre juste à quelques millimètres de la peau de notre accompagnateur. L’homme-chat m’expliqua alors qu’il sentait des produits chimiques de l’autre côté de l’armoire. Sans détour, je pris le pas et décida de pousser la dite-armoire pour soulever ce mystère. Pendant mon effort, le visage du vieille homme semblât encore prendre une dizaine d’années.
“Et bien si je m’attendais à ça...”
Derrière l’entrée secrète, un petit labo clandestin était installé...diverse fioles remplies de liquide était disposé un peu partout. Les produits chimiques que notre ami avait sentis se trouvait en dessous de la table et pas besoin de mettre mon nez tout près pour savoir ce que c’était.
“Je ne suis pas spécialiste mais je dirai que notre ami ici présent utilise ces produits pour les empailler. Si tu te demandes comment je le sais...c’est que j’ai travaillé dans une tannerie. Ce qu’il fait n’est pas trop hors la loi mais je ne suis pas sûr que les familles du village apprécient que l’on joue avec leurs morts sans leur autorisation. De plus, je crois maintenant savoir pourquoi d’un coup, il y a eu ses pillages qui n’en sont pas...L’odeur que tu déprécies mon chère Migi’ attire nos des mangeurs de corps, des goules. ”
Un frisson me parcouru l’échine du dos. Pas que j’en avais peur, c’était simplement que ces cadavres ambulants étaient pour moi contre nature. Un mort cela doit rester dans sa tombe et ne jamais en sortir. Du moins pas avec une tête pareille.
“Je te propose que l’on enferme dans le labo en bloquant la sortie. Une fois cette histoire nous l’amènerons au village où il devra s’expliquer. “
Ces produits attiraient vraisemblablement des goules, des créatures mangeuses de chait en putréfaction. Cela expliquait très certainement les pillages de tombes, selon Red. Il avait on ne peut plus raison : voilà pourquoi les tombes se retrouvaient retournées. Dans son délire, ce timbré de Marco avait éveillé une drôle de malédiction sur Port-Thion. Je n’avais jamais eu affaire à des goules, mais c’étaient des monstres plutôt retors qui usaient bon nombre de stratagème pour manipuler les vivants et arriver à leurs fins. On disait même qu’elles pouvaient jeter de puissants sortilèges … Mais cela restait à voir.
– Espèce de timbré … keuf ! T’as raison, Red. On va l’enfermer dans son labo. Ses comparses se chargeront de le juger.
Une quinte de toux due aux odeurs du laboratoire me firent pendant une seconde baisser ma garde. Le fossoyeur profita de cette baisse de garde. Levant la paume de sa main en ma direction, il fronça les sourcils et adopta une nouvelle expression sur son visage : celle d’un psychopathe désirant en découdre.
– Arrière, Aventuriers !!
Une bourrasque de vent démentielle me balaya en arrière, direction le labo. Toutes les fioles volèrent en éclat, libérant de nouvelles effluves irrespirables pour moi. Jusqu’à présent, Marco avait gardé son sang-froid, mais il nous montrait un tout nouveau visage maintenant … Ainsi donc, son pouvoir se rapprochait plus ou moins de la manipulation du vent, ou bien une magie de répulsion. Cela restait encore à définir. Sa fureur se lisait sur lui, et avant que je n’eusse le temps de dire « ouf », ce gredin s’était lancé dans les escaliers vers l’extérieur. Je tentai de me relever malgré ma tête qui tournait, mais ce fut impossible. Pris d’un vertige extrême, mes naseaux et l’intérieur de mon crâne étaient comme enflammés. L’odeur de ces produits étaient en train de réduire ma tête en bouillie. Je cherchai Red du regard et lançai en toussant :
– Faut le rattraper ! Je te rejoins … keuf … J’dois juste reprendre mes esprits …
Je rampai face contre terre, m’empêchant de respirer pour gagner le plus vite possible la sortie, sans même regarder si mon compagnon s’était lancé à la poursuite de Marco. Je devais lui prêter main-forte le plus vite possible, surtout si des goules étaient impliquées dans cette sinistre affaire …
Le jeune homme en rouge trouvait mon idée correcte, il faut dire que je me voyais mal surveiller le taxidermiste et les probables goules en même temps. L'homme-chat eu alors une toux ce qui profita à notre coupable. Usant de sa magie innée, il nous repoussa d’un coup, utilisant son pouvoir pour nous propulser contre l’armoire et les produits chimiques. Ceux-ci tomber à terre, libérèrent leurs effluves malsains dans la pièce. Ce qui pour moi ressemblait qu’a une forte odeur acide et agressive devait pour notre matou ressembler à un poison à haute-concentration surtout qu’il ne supportait pas ce genre d’odeur dès le départ.
Mon compagnon se trouvait à terre et faisait un effort surhumain pour rejoindre la sortie. J’avais deux solutions, ou je laissais Marco s’en tirer et j’aidais Migiwa ou bien je suivais le premier et laissais le second en plan. Ma décision fut prise quand l’aventurier s’adressa à moi.
“Très bien je pars devant, mais ne traine pas, je crains que les odeurs relâcher à l’instant, ne pousse les goules à nous attaquer plus vite que prévu.”
Je partis donc à la poursuite de l’homme âgé. Montant les escaliers 4 à 4 et ne m’arrêtant que juste au niveau de la porte. Vu son pouvoir celui-ci pouvait très bien m’attendre de l’autre côté et me sonner avant de me laisser là et attendre que les mangeurs de cadavre fassent leur salle besogne. Ne sachant pas bien ce qui m’attendait dehors je vis appel à mon pouvoir pour faire apparaitre deux de mes amis : Un loup blanc d’un mètre au garrot avec les pointes des oreilles noires et une panthère étoilée de couleur noir d’un bon mètre soixante-dix de haut. Une fois invoquer, j’attendis que le canidé me donne le feu vert grâce à ses naseaux.
*Air, mauvais*
"Je sais, préparez-vous à devoir vous battre…Morro sur ma gauche, Bagheera sur ma droite.”
Je sortis mon arc plutôt que la lance, je me débrouille bien aux deux et j’ai l’habitude de changer d’arme en cours d’escarmouche. Alors l’arme à distance était souvent celle que je privilégiais pour des raisons plus qu’évidentes. Dehors un silence de mort c’était abattu comme annonçant l’arrivée prochaine d’une force obscure. Mes amis à poils, se mirent en position protégeant mes flancs de par leur présence. Ma flèche déjà encoché par sécurité, l’arc déjà légèrement tendu. L’air était vicié et même moi ça je le sentais. Ce qui était bizarre c’était l’absence de Marco dans les parages. Je sais que j’avais pris du retard surtout avec l’apparition des deux bêbêtes mais la situation semblait encore une fois s’aggraver.
Je passais à côté de tombe ouvert, regardant si l’homme n’avait pas décidé de jouer les morts pour me tromper. Mais rien, le néant total, pas le moindre signe.
*Bag’ … Mo’ Sentez-vous quelques choses ? *
C’est la panthère qui réagit à la question.
*Sang, beaucoup de sang...humain et putride…*
“Bien retournons sur nos pas, je pense que la personne que nous poursuivions est tombé dans une embuscade. “
Sur ces mots, je me mis à faire le chemin inverse en direction de la porte. J’espérais que Migiwa n’était pas trop dans un sale état et qu’il avait pu revenir vers la porte sans encombre...
En reculant en position assise au sol, mon dos rencontra le mur, qui me forçait à affronter cet homme inconnu, que je pourchassais depuis toujours inconsciemment, qui me poussait à arpenter le monde, à la recherche du moindre indice le concernant. L’homme-hibou s’apprêtait à abaisser son arme, lorsque je décidai de réagir … Je bondis comme l’éclair, comme me le permettaient mes réflèxes et ma vitesse de chat. Surpris par l’attaque, l’homme tomba au sol tandis que je lui tailladai de le visage à l’aide de mes puissante griffes. Je déchiquetai son masque noir, espérant découvrir quel genre d’homme se cachait derrière … Mais au fur et à mesure de mon attaque, je sentais un vide. Et pour cause, l’assassin n’était plus là … Paniqué et alarmé je regardai autour de moi : je savais que ce bougre pouvait aisément se dédoubler … Là résidait son pouvoir … Et il en avait usé le soir de la mort de Tokugata. Une forme inconnue s’avançait vers moi. Cette fois je repris mon katana en main, prêt au combat … Mais au lieu de l’homme-hibou, ce fut une créature à la peau décharnée, décomposée qui se ruait sur moi en hurlant. C’était donc cela. Une goule ! Et tout ceci n’était qu’un mirage … La légende disait vraie, ces monstres mangeurs de chair putréfiée savaient user de toutes sortes d’artifices magiques pour duper ses proies.
La goule fonçait droit devant moi, prête à m’attaquer, certainement pour laisser mon corps pourrir et finalement le dévorer. Peu réjouissant, donc. La lame de mon katana dansa et trancha aisément cette créature de part en part. La goule tomba découpée au sol, et la brume verte se dissipa, révélant le laboratoire de nouveau au grand jour. Il fallait maintenant retourner auprès de Red. Nous étions dans le pétrin si d’autres goules venaient à se manifester. Je pris les escaliers qui menaient dehors, là où la nuit régnait désormais. Je retrouvai Red, accompagné par une grosse panthère et un loup gigantesque. D’où sortaient-ils ? Mes poils se hérissèrent à leur vue, tant ces animaux semblaient puissants, mais je compris vite qu’ils étaient aux ordres de l’Aventurier. Une fois en face de mon partenaire, je déclarai :
– Je suis tombé sur une goule, en bas, il va falloir être très vigilant ! Et Marco, où est-il ? Tu l’as retrouvé ?
Pendant que je parlais, une brume fine et volatile de couleur verte commençait à raser le sol tout autour de nous … Je ne le remarquai même pas mais lentement, elle se transformait en un énorme nuage vert et menaçant …
Je retrouvais mon compagnon d’arme pu après, celui-ci avait son sabre en main et semblait s’être battu avec une goule dans le couloir. La situation empirait donc au fur et à mesure que la nuit s’installait. Si les goules étaient déjà de sortis cela voulait dire que l’escarmouche n’allait pas tarder. La réaction de Migiwa face à mes deux boules de poils fut assez amusante car même s’il avait vite compris qu’elles n’étaient pas ses ennemies, la réaction quant à leur vue avait été plutôt drôle, du moins de mon point de vue. C’est vrai que voir surgir un loup d’un mètre au garrot et une panthère d’1 mètres 70 c’était quelque chose.
“Pour la goule, si elle était seule c’était très certainement une éclaireuse ou l’avant-garde. Dans le deuxième cas le groupe ne doit pas être important, dans le premier par contre...”
Je répondis ensuite à sa question sur Marco.
“il s’est volatilisé comme un obscuris. Bagherra me dit qu’elle a sentis du sang et de la putréfaction, mais je ne sais même pas si c’est le sien ou s’il est ressenti. De plus, il pourrait bien être partit tout comme être mort... Mais comme je n’ai pas vu de cadavre ni de trace de lutte... “
Une fumée ne mit alors à ramper jusqu’à nous, une fumée verdâtre et de toute évidence impure. Celle-ci n’indiquait rien de bon, elle respirait la méchanceté et la pourriture. Cela devait être une astuce des goules pour se faire moins repérer en général sauf que l’on n'était pas des villageois lambdas. D’un geste fluide de la main, j’indiquais à mes créatures de reprendre la formation adoptée jusque-là.
“Bien puisque c’est à nous de juger s’il est nous devons agir ou si on passe le relai au garde, je vote pour l’action.”
Des ombres commençaient à se faire voir dans le nuage et elles n’avançaient pas comme des humains, ma première flèche se perdit dans la brume avec un son de chute à sa suite. Bien une de moins, mais combien pouvait-ils être et surtout que nous cachait encore cette brume. La question, la plus importante étant est-ce que qu’il pouvait faire apparaître autre chose que cette nuée.
Ma réponse m'arriva assez vite, voila que débarque les ennemies, cinq goules d'une laideur insupportable, avec leur peau verdâtre à même leurs os. Si ça s était pas une créature immonde alors je ne sais pas ce c'est pas ce qui pourrait en être une! Pas le temps, de discuter les voilà qui fonce sur nous 4. Pour l'instant, elles sont en supériorité numérique mais je rétablie le score grâce à une flèche bien placée qui traverse le crâne de celle qui c'était mise en tête de la petite horde. Bah le temps d'en bander une autre, je prends donc ma lance. Ordonnant pas un geste à Bagherra, de prendre celle qui est le plus à l'extérieur possible. Celle-ci s’exécute et se jette sur l'assaillant crocs et griffes dehors. Son l'élan et la masse du félin font que le non-mort est écrasé et surtout réduit assez vite à néant par les pattes acérés de la panthère. Morro quand à lui bien que plus petit, utilise le même stratagème, il l’élance mais rouler son adversaire et l'achève au sol facilement. Il ne reste donc que 2 goules pour deux aventuriers. La mienne arrive sur moi, ça bouche dégoulinante de bave, j'évite l'attaque frontal et lui enfonce mon pique dans l'arrière du crâne, la laissant tomber à terre, la gueule la première dans la boue. Migiwa aussi en a fini avec la sienne. Nous regardons au alentour, le nuage verdâtre se dissipe et plus rien de nous attaque.
Je demande à mes deux compagnons si ils ressentaient encore quelques choses et ils me renvoyèrent tout deux une réponse négative. Nous restons encore une dizaine de minute pour voir si ce n'est pas juste un technique de adversaire mais rien. Nous retournons donc dans le petit village sans Marco qui à disparut sans laisser de trace.
Même s'il est tard, nous réunissons tout le monde sur la place principale. Et nous leur faisons un résumé sur ce qui venait de se passer. Les créatures, le pourquoi du comment. Inutile de dire que le passage sur ce que faisait le croc-mort dans son atelier fut particulièrement déplaisant. Enfin voilà notre quête terminé le semi-chat et moi nous nous disions au revoir le lendemain. Moi retournant vers la capitale et lui vers je ne sais où!
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