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    Un monde plein de mystères,
    plein de magie et surtout plein d'aventures...

    Il est peuplé de créatures fantastiques. Certaines d'une beauté incomparable, d'autres aussi hideuses qu'inimaginables, beaucoup sont extrêmement dangereuses alors que quelques unes sont tout simplement adorables. La magie est omniprésente sur ces terres : des animaux pouvant contrôler la météo, des fleurs qui se téléportent, des humains contrôlant les éléments, des objets magiques permettant de flotter dans les airs...

    Dans ce monde, il y a le royaume d'Aryon. Situé à l’extrémité sud du continent, c'est un royaume prospère, coupé du monde. Il est peuplé d'hommes et de femmes possédant tous un gros potentiel magique, chacun vivant leurs propres aventures pour le meilleur comme pour le pire.

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    Tsi'Ly Con Carne
    Naëry WigLe Lynx conteur d'Origamis
    Naëry Wig
    Informations
    Tsi'Ly Con Carne
    Sam 11 Avr 2020 - 21:54 #
    Tsi’Ly Con Carne
    ─ avec Calixte

    Quelle mission des plus étranges ?! Qui eut cru que je finirais dans un livre à vivre les péripéties qui hantent cette chère Hel D. Gher. Au moins tout cela est fini, on s’en est sortie indemne. Du moins autant que possible. Même Apolline, pourtant Lucy seule sait que Calixte a bien essayé de la laisser dans le roman. Elle qui aime raconter des histoires elle aurait en vivre et poursuivre ces pages indéfiniment. En réalité, si on se dit toute la vérité, ça m’aurait bien embêté de la laisser, c’est qu’on s’attache à cet être, aussi grossier soit-il. Non, on s’attache au duo comique qu’elle forme avec Calixte.

    Après avoir enfin revu la lumière naturelle du jour, se dépatouillant dans les racines de l’Arbre Sacré, j’ai décidé de poursuivre l’aventure au Village Perché, proposant à mon acolyre de m’accompagner. Deux raisons : petit un, j’aime cette bourgade et ses habitants. Ils ont un côté déconnectés de la réalité, perché dans tous les sens du terme. Généreux, artistiques, je trouve cette ville reposante, c’est ressourçant de s’y poser. Et petit deux, j’aimerais aller au parc où un couple d’Aurelia Aquila – ces méduses volantes - est protégé et étudié par les vétérinaires de la bourgade. Méduses que nous avions capturé avec Carci, histoire de prendre des nouvelles et m’assurer de leur bonne santé.

    Et contre toute attente sur le trajet je fais la discussion avec Calixte, ce jeune homme m’intrigue et la mission que nous venons de vivre me pousse à en connaître davantage sur lui. Deviendrais-je social ? Est-ce Carci ou Luz qui a cette influence sur moi ? Ou juste Cal qui m’intrigue, allez savoir. Ici Loupiac est heureux, il vole et virevolte entre les branches, s’arrêtant de temps en temps pour picorer ou chantonner.

    - Comment en es-tu arrivé à devenir espion Cal?

    Première fois que j’use de diminutif pour le nommer, je crois qu’un lien amical se tisse au fur et à mesure d nos échanges. J’essaie d’en savoir plus sur son enfance, ses parents d’où viennent-ils ? A-t-il des frères ou sœurs ? Une compagne, ou un compagnon ? Traîne-t-il toujours Apolline partout avec lui ? (J’espère que ce n’est pas elle qui partage sa couche ! Cela serait vraiment très bizarre, et en même temps, n’est-il pas étrange de s’apprécier en tant que Psolie? Ou est-ce juste un manque d’ouverture d’esprit de ma part?) Et voilà, je recommence à me torturer l’esprit, je crois que je ne me serais jamais autant remis en question qu’en présence du blondinet, heureusement qu’il ne peut pas lire dans les pensées ! Je tourne soudainement la tête vers lui : tu ne sais pas lire dans les pensées rassure moi Cal ? Aucune réaction, ça ne doit pas être le cas.
    Préfère-t-il le chocolat chaud ? Thé ? Café ? Quelle est sa routine matinale ? Aime-t-il lire ? Ce qu’il aurait aimé manger en premier sur le buffet de Kev, Kerv, Kravitz là. Bref, un tas de questions digne des premiers échanges entre deux jouvenceaux. Affreux.

    L’air est frais en cette saison, que dis-je, on se les caille ! Je supporte bien mes chaussettes du solstice, mon visage est à moitié enrubanné dans mon chèche alors que les branches craques sous les pattes des rapidodos qui trottent à travers les arbres. J’entends un léger ronflement provenant du sac de mon compagnon, apparemment Apolline dort. Les âmes artificielles ressentent donc la fatigue ? Quel étrange concept quand on y pense.

    - Une âme artificielle a-t-elle était un être avant ? Tu crois que son âme peut réintégrer un autre objet si on détruit son « corps » actuel?

    Non pas que je lui suggère d’en faire l’expérience, juste une soudaine curiosité. Je dois avouer que m’éloigner de la Capitale et de mon quotidien me transforme quelque peu. Je suis plus expressif qu’à l’accoutumé. Comme si un poids quitte mes épaules et me libère un tant soit peu. J’ai toujours de la retenue face à l’espion, un air d’indifférence restant fiché sur les traits de mon visage.

    - Ça y est regarde, on arrive.

    Cela fait quelques jours que nous traversons la forêt pour enfin voir quelques habitations en hauteur, harmonieusement fondues avec la nature.

    - Faisons une halte, nous irons au parc dans la soirée. Y as-tu déjà mis les pieds ?

    C’est pas tout mais nous poser quelques heures ne sera pas du luxe ! Une vraie chambre avec un bon repas chaud seront les bienvenues. Le ciel est couvert, ne laissant filtré que de temps en temps quelques rayons du soleil qui vient réchauffer par intermittence le haut de mes pommettes. La mi-journée vient de passer depuis peu, je pense que nous trouverons sans difficulté de quoi nous sustenter.
    Nous grimpons pour rejoindre la ville perchée, et j’amène Calixte au Bamboo bleue, une petite échoppe qui sert de bons petits repas fait maison. Et avec une carte de thé assez vertigineuse. Ah moins que ce soit la hauteur qui donne cette impression … La serveuse nous accueil et finit par me regarder avec insistance.

    - Vous êtes déjà venu non?

    - Oui, il y a quelques lunes de cela. répondis-je flatté par ça mémoire.

    - Oui je me souviens de votre amie ! Carci…Fiona ? Une blagueuse hors paire, j’ai eu le droit à quelques de ses jeux de mots lorsqu’elle vous attendez. Enfin, c’était bien vous?

    Mon ego reboosté fut de courte durée. Une dragueuse hors paire plutôt cette Carci oui. Elle qui avait fuit le village attristé par cette femme qui lui a brisé le coeur s’est bien vite remise de sa séparation. Coeur d’artichaut que voilà.

    - Oui oui c’était bien elle. Carci-phiona. répété-je avec un sourire narquois. Dommage que la protagoniste en question ne soit pas là pour entendre son nouveau prénom.

    Enfin, je finis par commander un Chili Con Carne, j’avoue que j’ai faim, suivit par Cal.

    code ─ croquelune

    Calixte Alkh'eirDamoiseau
    Calixte Alkh'eir
    Informations
    Re: Tsi'Ly Con Carne
    Dim 12 Avr 2020 - 18:19 #
    Calixte avait dit oui. Oui au détour via le Village Perché au décours de leur quête à l’Arbre Sacré. Oui aux formulaires administratifs qu’il allait devoir remplir à son retour pour justifier de ne pas avoir repris illico le chemin de la Caserne de la Capitale. Oui aux interrogations taquines de Zahria en conséquence. Il avait dit oui à Naëry, et il avait l’impression d’avoir dit oui à bien plus. Était-ce vraiment raisonnable d’avoir dit oui aussi facilement et rapidement dans leur relation ? Mais si l’aventurier lui avait fait la demande, c’est qu’il était prêt, non ? En étaient-ils à ce stade ? Pouvaient-ils se le permettre ? Tiendraient-ils vraiment ces prolongations alors qu’ils étaient arrivés à un point plutôt confortable de leurs rapports ? Assumeraient-ils de les avoir sciemment acceptées dans le meilleur comme dans le pire ? Il s’était trouvé si heureux que le jeune homme lui fasse cette proposition, qu’il avait répondu sans réfléchir, juste avec le cœur. Et maintenant qu’il avait eu le temps de prendre un peu de recul, il ne pouvait s’empêcher de s’interroger. De douter. D’osciller entre la joie, l’excitation et la curiosité, entre la crainte, l’incertitude et la prudence. Calixte avait dit oui, et maintenant Apolline se faisait un malin plaisir de lui rappeler à grand renfort de métaphores salaces qu’elle leur apporterait les anneaux devant l’autel, puisque ça le mettait dans tous ses états. Et si l’espion pouvait assumer réagir de manière un peu disproportionnée à l’affaire, il assumait beaucoup moins les vérités décomplexées de l’âme artificielle, même enrobées dans du lubrifiant pailleté.

    Le trajet de l’Arbre Sacré fut néanmoins agréable, et beaucoup moins épineux que celui qui les avait menés au lieu de leur quête. Petit à petit, au cours des jours et des péripéties vécus au contact l’un de l’autre, les filaments abruptement tranchés de l’esquisse de leur relation retrouvaient comment se nouer. Pour tresser, peut-être finalement, un canevas plus honnête et plus solide. Petit à petit, l’habitude s’installa dans les gestes du quotidien, et une routine plaisante dans leur danse à deux. A quatre. Etonnante petite bulle que la leur, tellement incongrue de prime abord, et pourtant si fonctionnelle en réalité. Loupiac, bien que plutôt craintif de tempérament, avait finit par intégrer l’étrange duo dans sa sphère de circonvolution, et il n’était pas rare de le voir se poser sur la tête du coursier, ni de l’observer accompagner Apolline dans ses folles échappées. La petite trousse de cuir, bien que pas timide pour un cristal, accordait à présent une certaine sensibilité à leurs compagnons de voyage, modulant plus facilement ses propos en fonction du ton du moment. Et ça n’était peut-être pas évident à première vue, mais le rythme de ses remarques vulgaires et de ses pauses attentives était bien plus attentionné. Enfin, Naëry s’ouvrait davantage. Tel une sensitive que l’on aurait un peu brusquée, il se redéployait peu à peu.

    Comme il paraissait loin le temps où l’âme artificielle les liait principalement dans l’incrédulité et l’exaspération. Ils avaient d’abord parlé de la quête. Beaucoup. Parce que c’était un sujet facile, sans piège, et cocasse en y repensant. Puis ils avaient dérivé sur la précédente mission, avec plus de retenue, et de silences. Ils avaient évoqué Krysta, un peu. Dans un accès de mélancholie et de goût douteux, ils avaient renommé le centipède en origami du nom de la jeune aventurière. Et puis ils s’étaient approchés d’histoires plus personnelles. Prudemment, doucement, dans une curiosité bienveillante mais discrète. Puis de plus en plus assurée. Calixte avait évoqué son enfance au Grand Port. Sa famille Noble, si affairée à la Prévoyance. Les liens du sang si ténus contrairement à ceux qu’il entretenait avec les espions. Sa famille de cœur. Il avait relaté son parcours médiocre à l’Académie Militaire, les longues heures à travailler ce qui pour les autres semblait si aisé. Puis la convocation inattendue, improbable, au pôle d’espionnage. La rencontre avec Zahria ; puisqu’il semblait que le Maître-Espion actuel était aussi connu de l’aventurier. Zahria. Calixte avait peut-être passé deux ou trois journées à parler de Zahria. Son Maître-Espion, sa mentore, son amie. Sa sœur de cœur. Parce qu’il ne manquait pas n’anecdotes, ni de mots pour la femme au sourire félin. Et il avait d’ailleurs avalé de travers l’eau de sa gourde lorsqu’Apolline avait mis en lumière l’existence d’une relation charnelle entre l’aventurier et l’espionne. Calixte était bien au courant des conquêtes nombreuses de Zahria, et il n’en éprouvait aucune animosité, ni jalousie. Mais de savoir que Naëry, et Zahria… et où était Luz dans cette affaire ? L’ouverture sur toutes ces possibilités lui donnait des nœuds au cerveau.

    Ils avaient parlé de Naëry, aussi. Plus prudemment, peut-être. Parce que l’espion gardait encore une retenue pudique suite à Cette Fameuse Soirée, essayant de ne pas s’imposer à l’aventurier. Mais ils avaient évoqué ses années au temple de Lucy, suite à sa période d’amnésie. Et Calixte qui n’avait pas soupçonné l’homme d’être fervent croyant, en apprit bien plus qu’il aurait pensé. Ils évoquèrent ses quêtes comme aventurier, son amour de la nature, son lien avec Loupiac. Celui avec Luz. La collocation de celle-ci avec Zahria. Et le cerveau de Calixte recommençait généralement à faire des nœuds à ce moment-là, sous le rire sans gêne d’Apolline.

    Ils arrivèrent à la mi-journée au Village Perché, et le regard curieux de l’espion papillonna de découvert en découverte. Il n’était jamais venu dans le coin, et tout lui paraissait merveilleusement intéressant. Il faillit répondre à Naëry qu’il le rejoindrait plus tard pour aller au parc, tant l’appel de l’inconnu était grand. Mais Apolline lui glissa « pour le meilleur et pour le pire » et il s’emmêla dans ses mots, acquiesçant du coup à la halte proposée. Adressant un regard exaspéré à l’âme artificielle qui roulait de rire, il la laissa grimper sur son épaule et il suivit l’aventurier dans les hauteurs. La petite échoppe où ils arrivèrent était sans prétention, mais sa carte faisait saliver. Son regard se posa avidement sur la liste de thé qui n’en finissait plus. Tandis que Naëry commandait un chili con carne, il demanda un taboulé accompagné d’une boisson chaude.

    - J’ai vu Carci, il n’y a pas très longtemps, commenta Calixte alors que la serveuse s’éloignait dépitée.

    Des Carci « phiona » il ne devait pas y en avoir cinquante milles, d’autant plus qu’il avait croisé les deux aventuriers au stand de l’Au Rit Gamin lors du festival du Solstice.

    - Elle m’a donné des conseils pour élever le loutron, poursuivit-il avec un sourire. Celui que j’ai heu… récupéré Cette Fameuse Soirée. C’est une fille, d’ailleurs. Le loutron, pas Carci. Enfin, Carci si, aussi. Du coup on l’a nommée Kaname.
    - Sacré cours de dressage, ajouta Apolline en s’amusant à tourner autour de Loupiac. Toutes sortes de choses se sont dressées ce matin-là.
    - Elle est de très bon conseil, continua-t-il en levant les yeux au ciel.
    - Et elle a très bon goût : ce petit kimono t’allait très bien. Quand est-ce que tu la revois pour lui rendre ? J’ai des projets avec Shushu.
    - Apolline…
    - Ah ! Tu comptes garder le kimono !? T’as bien raison, c’est juste ce qu’il faut pour éviter de passer la soirée en solitaire. Et vu le charme de la donzelle poivre et sel, t’en as p’tet plus besoin qu’elle !

    Dans un grognement plaintif, Calixte posa sa tête sur la table en bois. Il savait qu’il aurait dû laisser l’âme artificielle dans le livre d’Hel D. Gher.
    Naëry WigLe Lynx conteur d'Origamis
    Naëry Wig
    Informations
    Re: Tsi'Ly Con Carne
    Ven 17 Avr 2020 - 16:07 #
    Tsi’Ly Con Carne
    ─ avec Calixte

    Ainsi donc Calixte connaît Carci ? Le monde est petit.

    - Tu as bien fait, même si K’awill est un véritable pitre il est sacrément bien éduqué.

    C’est alors qu’Apoline commente ce « cours » à forte dose de sous-entendus. Comme à son habitude me dirait vous, sauf que cette fois elle ne compare l’expérience aux siennes, non non, cette fois ça concerne Cal et Carci. Je crois que c’est la prmière fois que je prête une oreille attentive aux souvenirs de l’âme artificielle.

    - Et donc avec Carci ? Tu as joué les « Fameuses » aussi ? Avec son Kimono ? Heureusement que c’est ample comme tenue non? Dis-je malicieusement.

    J’en demande davantage au blondinet, qu’il me raconte un peu leur rencontre et surtout leur relationnel. Carci est un sacré phénomène, et bien que son attirance pour la gente féminine ne soit pas tabou – pourquoi le serait-elle me demanderez-vous – elle ne se prive pas non plus des plaisirs moins, œstrogènant.  

    - Comment va Psolie? finis-je par lancer. Ça fait un moment que je ne l’ai pas croisé, j’espère qu’elle ne m’évite pas.

    Autant crever l’abcès dès à présent, bien que je garde une réserve sur les intentions de Calixte, cette histoire, la Fameuse Soirée comme il l’appelle, est passée pour moi. La mission que nous venons de quitter -nous venons littéralement de sortir de celle-ci – a eu le bénéfice de me refaire découvrir le jeune homme maladroit et doux avec qui j’ai pu explorer les souterrains d’Aryon. Et ce garçon là, je l’apprécie plutôt bien. Sans compter sur Apolline qui a eu l’heureux rôle de nous rabibocher.

    Je bois le fond de mon thé maintenant froid, trop absorbé par les réponses de l’espion et par ses mimiques trahissant son embarras, j’en ai oublié de finir ma boisson. La serveuse a l’amabilité d’attendre la fin de notre débat animé avant de venir débarrasser nos assiettes.


    - Tout s’est bien passé?
    - Oui, excellent le Chili, vous pourrez félicitez le cuisto.
    - Je le ferai avec plaisir. Je dois vous avouez que nous avons changé un ingrédient de la recette, mais nous n’avons pas encore eu le temps de changer la carte. J’ai oublié de vous prévenir ...

    Ajoute-t-elle me défiant du regard. Voyant mon étonnement et ma passivité elle finit :

    - Il s’agit d’un Chili con Carne végétarien.
    - Fort bien, et bien il est toujours aussi bon. Cependant méfiez-vous des clients qui ont des allergies à l’avenir, ça peut-être dangereux pour eux.

    Je ne sais pas pourquoi je sens une certaine rancune de la part de la demoiselle. Est-ce vis-à-vis de Carci ? Les aurais-je interrompu au mauvais moment la dernière fois ? Ou l’absence de nouvelle de mon amie la rend elle ronchon ? Et donc vengeresse à mon égard ? Au dernière nouvelle la Pie est plutôt accro à Lin.

    J’hausse les épaules au regard interrogateur de Calixte avant de lui proposer de me suivre.

    - Veux-tu dormir ici après la visite du parc ? Il y a un portail de téléportation qui peut nous ramener rapidement à la Capitale sinon, mais il ne faudra pas trop tarder je ne pense pas qu’il soit disponible la nuit, hors urgence.

    Traîner ici ne me pose aucun soucis, mais peut-être le jeune homme avait d’autres chats à fouetter, la Garde est sûrement affairée à de nombreux cas.

    code ─ croquelune

    Calixte Alkh'eirDamoiseau
    Calixte Alkh'eir
    Informations
    Re: Tsi'Ly Con Carne
    Sam 18 Avr 2020 - 11:28 #
    Au ton malicieux de Naëry, inattendu au vu du sujet, Calixte releva la tête. Tout pile au moment où on leur ramenait leurs commandes. De doux arômes se dégageaient des plats, et l’espion ne se fit pas prier pour dégainer ses couverts.

    - Ils ont tenté une partie de jambes en l’air, mais visiblement ni l’un ni l’autre n’en avait le manuel, répondit Apolline en tournant cette fois-ci autour de la tasse fumante du coursier. Vous auriez pu nous demander, on vous aurait guidé avec Shushu.
    - Alors, premièrement, rien de ce type n’a été tenté, et deuxièmement, je ne veux pas savoir le genre de relation que vous entretenez avec Shushu, grimaça Calixte avant de prendre une bouchée de taboulé.
    - Et qui a parlé d’amener leurs intimités à être, précisément, intimes ?
    - Je… C’était un concours de circonstances ! s’écria l’espion en rougissant légèrement. J’avais dû aller te repêcher, Kaname avait failli se noyer, Carci s’était ouvert la main, K’awill ne tenait pas en place…
    - Bien vu le coup du strip tease !
    - Je me changeais ! J’étais trempé ! Et c’est l’unique raison pour laquelle Carci m’a prêté son kimono, ajouta-t-il rapidement à l’adresse de Naëry avec un regard implorant.
    - Et le magnifique short rouge bien moulant dans lequel tu as failli perdre tes bijoux de…
    - Comment se déroule votre repas ?

    La serveuse leur adressait à présent un regard suspicieux. Et si l’aventurier répondit que tout était parfait, l’espion hurlait intérieurement. Pourquoi avait-il dit « oui », déjà ? Ah oui. Parce qu’il avait parfois tendance à réfléchir un peu trop avec son cœur. C’est-à-dire ne pas réfléchir du tout.

    - J’ai fini dans la rivière à cause d’Apolline. J’étais trempé, Carci m’a prêté son kimono. Et m’a appris à m’occuper de Kaname pendant qu’Apolline et Shushu faisaient des trucs ensemble, insista-t-il auprès de Naëry en levant sa fourchette comme une arme. Fin de l’histoire.

    La trousse de cuir éclata de rire et partit faire semblant de pourchasser Loupiac.

    - Carci est très chouette, reprit Calixte avec moins de véhémence. Et Psolie va bien. Même si elle va un peu moins à la Guilde dernièrement, avoua-t-il. Je…

    Quoi dire ? S’excuser à nouveau ? Cela n’effacerait pas ce qu’il avait fait, ni ce qu’il avait failli faire. Cela ne réparerait pas leur relation à tout jamais marquée par cette Fameuse Soirée. Et il n’y avait pas raison de s’attacher aux excuses comme au messie. Il n’était pas sa place de décider du pardon. Alors quoi ? Eviter d’y référer ? Faire comme si de rien n’était ? Était-ce seulement possible ? Alors que quelque chose se retissait entre eux deux. Enfin, avait-il seulement le choix ? Naëry paraissait prêt à mettre les deux pieds dans le plat, et y sauter joyeusement.

    - Bien sûr que je t’évite à la Guilde, grommela finalement Calixte en soupirant. La dernière fois qu’on s’y est croisés ne nous a pas vraiment réussi. Et avant de se revoir pour la quête…

    Haussant les épaules et laissant sa phrase en suspens, il finit l’assiette devant lui. Le plat était vraiment très bon, mais c’était à peine s’il avait pu en profiter, entre Apolline et Naëry. Imitant l’aventurier, il passa ses mains autour de sa tasse de thé.

    - Je ne suis pas fier, de ce que je t’ai… amené à vivre, cette Fameuse Soirée, poursuivit-il en levant le regard vers celui de son camarade. Et je pensais que ça serait plus simple si l’on ne se recroisait pas. Pas du tout. Suite à ça.

    Et comme il n’avait su se soustraire aux yeux acérés de l’homme, il semblait que ses pas ne pouvaient l’en éloigner. Il prit une gorgée de thé. Même refroidissant, il était excellent. Décidemment, c’était une bonne adresse. Naëry savait comment charmer ses papilles.

    - Mais je suis reconnaissant d’avoir pu faire cette quête en ta compagnie. Et que heu… tu m’aies proposé de faire ce détour avec toi. Sans m’abandonner comme une vieille chaussette au pied de l’Arbre Sacré une fois la quête terminée, je veux dire, se dépêcha-t-il de finir avant de replonger dans sa tasse de thé.

    Les notes rosées à ses joues étaient toujours d’embarras, mais pas pour les mêmes raisons que plus tôt. Un peu plus loin, Apolline chuchotait quelques plaisanteries au chantelune qui l’écoutait avidement.

    - Et puis ça m’avait manqué de…
    - … profiter de ta délicieuse compagnie, poursuivit le jouvenceau en s’approchant davantage de la table. Plus les minutes passaient, et plus sa chair semblait s’enflammer. Il n’avait qu’une envie : retirer ses vêtements qui devenaient une nouvelle fois trop inconfortables et laisser son camarade se saisir de sa…
    - APOLLINE ! hurla Calixte qui venait de comprendre ce qu’elle racontait à Loupiac.

    Il se jeta sur la table pour l’attraper, mais l’âme artificielle l’esquiva dans un rire joyeux. Le chantelune s’envola pour éviter cette nouvelle agitation, retournant sur l’épaule de Naëry. Après avoir failli renverser une partie de la vaisselle à terre et s’être violemment cogné le coude contre un rebord, l’espion mit finalement la main sur la trousse habile de ses mots et de sa vitesse de rotation, et la fourra tout au fond de son sac. Elle serait certainement sortie beaucoup trop rapidement à son goût, mais il y avait tout de même quelque chose de jouissif au geste de l’y balancer.

    Rencontrant le regard amusé de l’aventurier, l’espion se saisit de sa tasse pour la finir enfin. Et pas du tout pour se cacher derrière. Il ne savait pas trop si c’était toujours le rire d’Apolline qu’il entendait, ou si c’étaient ses oreilles qui sifflaient suite à l’action.

    - Tout s’est bien passé ?

    Revenue sur ces entrefaites, la serveuse ramassa leurs assiettes tandis que Naëry lui répondait, laissant Calixte se remettre de ses émotions. Distraitement, il écouta l’échange entre les deux, et nota que la jeune femme paraissait à présent plus que dépitée : elle était prête à en découdre. Avec curiosité, il adressa un regard interrogateur à l’aventurier qui haussa les épaules d’incompréhension et lui demanda s’il souhaitait dormir au Village Perché par la suite. Et honnêtement, à partir du moment où l’espion lui avait dit « oui » pour le détour, il n’était plus à quelques jours près. Ni quelques « oui » près. Quoi qu’il arrive, on lui demanderait des comptes.

    - Ca me va bien, de passer la nuit ici, répondit-il. Il faudra juste que je fasse un saut à la Caserne locale pour voir s’ils ont besoin que je ramène des choses sur la Capitale avant de rentrer. Mais c’est mon seul impératif.

    Parce que bon, quand même. Il se leva pour suivre Naëry qui se dirigeait vers le comptoir et ils y réglèrent leur repas sous l’œil noir de leur serveuse. Elle daigna tout de même tendre au coursier un plan en papier lorsqu’il le lui demanda.

    - Qu’as-tu en tête pour la suite ? Tu avais parlé d’un parc… ? poursuivit-il avec curiosité en jetant un coup d’œil à la carte.

    A la pensée de partir explorer ces lieux qu’il ne connaissait pas et qui paraissaient merveilleux, l’espion recommençait à trépigner d’impatience. Il y avait tellement de nouvelles choses à voir et à découvrir ! Et quel drôle de mode de vie, d’être constamment perché dans les arbres ! Voilà qui offrait tout un panel de nouvelles opportunités.

    - Le parc a l’air énoooooorme ! Y a un lieu d’exposition aussi, le Grand Atelier ? Y a peut-être des Ukiyo… T’aimes l’art, Naë ? demanda-t-il sans prêter attention au diminutif employé spontanément. Une tour d’astronomie ! Tu crois qu’on peut la visiter ? L’arbre doit être gigantesque ! Et… mais oui ! c’est là qu’il y a la Grande Bibliothèque !

    Il leva son regard plein d’anticipation vers Naëry.

    - On va où ?!
    Naëry WigLe Lynx conteur d'Origamis
    Naëry Wig
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    Re: Tsi'Ly Con Carne
    Lun 27 Avr 2020 - 17:10 #
    Tsi’Ly Con Carne
    ─ avec Calixte

    Le duo comique ferait un tabac s’il se met à faire des représentations, vraiment. En tout cas moi je prends plaisir à voir Apolline taquiner Calixte qui, indéniablement, finit par rougir devant l’impertinence de la trousse. Je laisse le gringalet se justifier, le fixant de plus belle sans l’arrêter outre mesure. Il sort les rames, je finis par acquiescer à sa réaction.

    - Tu as bien fait, nous avions besoin de temps, autant toi que moi. Maintenant faut plus te biler pour ça, si t'as besoin de revenir à la Guilde n’hésite pas. Et puis je n’y passe pas ma vie, te stresse pas.

    L’espion finit par se jeter sur l’âme artificielle, je n’ai pas trop compris pourquoi, ne prêtant plus attention à ses bavardages licencieux.
    Loupiac se pose sur mon épaule, nous observons tous les deux les lascars faire leur show. Je me croirais presque dans un remake de Tom et Jerry. Version adulte à ce que j’entends.
    Je me lève pour régler la note du repas, soulageant ma bourse de quelques dizaines de cristaux noirs. Calixte me rejoint, il étudie le prospectus touristique du village perché tout en acceptant distraitement de rester une nuit de plus dans ce lieu.

    Et soudain l’espion se transforme en Bisounours, on dirait un gosse qui vient de recevoir le plus beau des cadeaux. Il découvre les lieux visitables et s’extasie, je souris devant son enthousiasme, j’ai presque envie de lui ébouriffer la touffe en mode « bon garçon ». Dans son exaltation l’usage d’un « Naë » sort tout naturellement, surnom qui passe totalement inaperçu tellement j’ai l’habitude que l’on m’appelle ainsi. Je tâche de répondre à toute son excitation.

    - Je ne suis pas indifférent à l’art oui, mais je dois t’avouer ne pas connaître les Ukiiii … os ? écorché-je le nom.

    Mon enfance au sein de la Noblesse m’a permis d’avoir une petite approche de l’art, cependant ce n’était pas un domaine d’étude prioritaire pour mon paternel qui préférait m’envoyer m’entraîner et affûter mon esprit au stratagème. Je suis d’ailleurs loin d’exceller dans cette discipline.

    - Si tu aimes les livres la grande bibliothèque devrait te plaire, la libraire est un peu froide mais connaisseuse, elle se nomme Eva et est aidé par un gamin, Kip, assez drôle et maladroit. J’y suis resté bien deux heures la dernière fois, il a eu le temps de faire tomber un bon nombre de bouquins.

    Je marche, nous éloignant du restaurant pour trouver l’auberge sur une autre plateforme. On traverse une passerelle suspendue qui bouge légèrement sous notre démarche.

    - Et bien on va faire en sorte que la tour d’astronomie soit ouverte au public que nous sommes pardi!

    Les vétérinaires, s’ils sont bien là, pourront peut-être nous y aider ? Oh et puis il n’y a pas de raison que ce soit fermé au public. Je n’ai jamais vu de peuple plus accueillant et ouvert que celui de ce village. En tout cas au vu du programme demain ne sera pas un jour de trop dans les parages.

    - Commençons par nous trouver une chambre, et après nous passerons à la caserne pour que tu puisses régler les affaires professionnelles. On pourra alors profiter tranquillement de la soirée au parc.

    Je m’arrête à une bicoque pour y acheter des graines, j’en mets quelques une dans ma main pour mon Chantelune qui vient y picorer, gazouillant de contentement.
    Une dizaine de minutes plus tard nous voilà dans l’auberge, je réserve la seule chambre disponible, mais « avec vue imprenable sur les cimes de notre magnifique forêt » dixit le propriétaire des lieux.

    - Ça te dérange qu’on dorme ensemble ou tu préfère qu’on trouve une autre pension?

    Le choix appartient à Calixte, après tout, cela faisait des jours que nous passions nos nuits ensemble, une de plus …

    Après avoir laissé le garde régler l’hébergement sous son insistance, nous allons à la Caserne, suivant les indications de l’aubergiste à qui nous avons demandé la route.

    - Je me demande s’ils ont des montures spécifiques pour se déplacer plus rapidement d’arbre en arbre ...

    La classe si la police du coin se déplace à dos de dragon. La Reine des Dragons en pâlirait de jalousie. J’attends mon coéquipier dehors, profitant des quelques rayons du soleil qui arrivent à se faufiler à travers les branchage. Puis le temps s’étire, je me demande ce qu’il se passe. Les soldats ont-ils tant de requêtes que ça à demander à l’espion ? J’attends encore quelques minutes avant d’entrer dans la Caserne pour y découvrir un Calixte pourchassant une Apolline au plus haut de sa forme. Les sentinelles semblent s’amuser de la scène, j’y mets un terme en attrapant la trousse qui ne s’attend pas à me trouver sur sa route.

    - Allez viens Cal, si tu as fini allons au parc.

    Un gars ne trouve rien de mieux que de siffler à cette annonce comme si je venais de donner un rendez-vous galant au blondinet. Évidemment les autres troufions s'esclaffent à cette raillerie non verbale. Je me retourne vers eux, lasse.

    - On ne m’avait pas dit que la garde du Village Perché n’était qu’un ramassis de clown, heureusement qu’il ne se passe pas grand-chose ici.

    Puis je quitte les lieux, indifférent, laissant derrière moi quelques hommes vexés par ma remarque. A ce qu’il paraît, il n’y a que la vérité qui blesse. Vous êtes pas d’accord ?


    code ─ croquelune

    Calixte Alkh'eirDamoiseau
    Calixte Alkh'eir
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    Re: Tsi'Ly Con Carne
    Mer 29 Avr 2020 - 20:26 #
    Ils reprirent leur route, et Calixte en profita pour noyer Naëry d’informations sur les Ukiyo. Son enfance peu chaleureuse au Grand Port avait au moins eu le mérite de le verser dans un grand panel de domaines, et la nécessaire polyvalence d’espion n’avait fait que consolider ses connaissances diverses et improbables sur tout un tas de sujets. Rares étaient ceux qui le passionnaient vraiment, mais sa curiosité usuelle ne rechignait pas à en apprendre tout de même davantage lorsque ces derniers s’offraient à lui. N’était-ce pas, d’ailleurs, Luz qui appréciait le pinceau des Ukiyo? N’en avait-il pas aperçu une oeuvre dans l’une des pièces de la médecin en allant rendre visite à Zahria? Ils s’engagèrent sur une passerelle suspendue, et Calixte perdit le fil de ses pensées pour revenir à un émerveillement plus immédiat. Restant quelques secondes au bord de celle-ci, il observa avec attention le vide sous-jacent, les constructions adroites s’élançant de part et d’autre, et les citoyens habitués vaquant à leurs affaires indifférents à tant de beauté et d’ingéniosité. Quelques visiteurs, rares, appréhendaient plus ou moins sereinement les structures suspendues. Le sourire aux lèvres, le coursier fit quelques pas sur les planches de la passerelle, observant avec curiosité le léger balancement de celle-ci. Puis il se mit à courir en rigolant. La brise filtrée par le feuillage épais et persistant était douce contre son visage, les mouvements rythmés de la passerelle suspendue avaient quelque chose d’hypnotique sous ses pieds, et il y avait une certaine liberté à pouvoir se déplacer ainsi, dans les airs mais pas vraiment, d’arbre en arbre.

    - Wiiiiiiiiiiiiii, s’écria-t-il en rigolant.
    - On l’a perdu, déclara Apolline qui à son premier aller-retour en courant sur la passerelle avait finalement décidé de sauter sur l’épaule de l’aventurier. Heure de la mort cérébrale: treize heure quinze.

    Ivre d’allégresse, le soldat fit encore deux allers-retours le temps que le reste du groupe n’atteigne tranquillement l’autre côté de la passerelle. Alors que Naëry s’arrêtait pour acheter quelques graines pour Loupiac, Calixte se pencha par-dessus la rambarde délimitant l’espace d’évolution autour de l’arbre près duquel ils se trouvaient. Un peu plus loin, il pouvait déjà apercevoir la structure martiale de la Caserne du Village Perché, et il se demanda si ses collègues utilisaient des montures volantes pour patrouiller. L’aventurier l’interpella et ils reprirent leur évolution sur le chemin s’enroulant autour du tronc imposant, afin de s’élever vers les cîmes. Une dizaine de minutes plus tard, ils arrivèrent à une nouvelle adresse du calepin de Naëry, où ce dernier s’occupa de demander une chambre tandis que Calixte papillonnait d’un coin à l’autre du hall d’entrée de l’auberge, admirant la vue sur laquelle elle donnait.

    - Oui, non, okay, répondit-il distraitement en revenant au comptoir alors que son camarade lui demandait si ça le dérangeait de partager la chambre. Oui ça me va de partager. Non ça ne me dérange pas, poursuivit-il plus clairement pour la réceptionniste qui lui adressait un regard perplexe. Je paie, je paie, insista-t-il auprès de l’aventurier en chassant sa main et sortant sa propre bourse de cristaux. Comment est-ce qu’on peut accéder à la Caserne? demanda-t-il à la femme derrière le comptoir. Je ne vois pas trop quel chemin emprunter pour accéder à son… ses arbres.

    A l’aide du plan qu’il avait toujours entre les mains, on lui montra comment se rendre au fief militaire, et ils quittèrent l’auberge pour prendre la direction de celui-ci. Le trajet fut assez bref, et l’espion rigola franchement lorsque Naëry se posa la même question que lui: y avait-il des patrouilles volantes? Laissant l’aventurier patienter hors des murs de la Garde, le coursier s’engouffra d’un pas sautillant et le regard curieux dans l’antre de ses collègues forestiers. Malgré son aspect sévère, le lieu était d’une élégance boisée et d’une ingéniosité remarquable. Il ne semblait cependant pas que des montures ailées évoluaient dans le coin, dommage. Il eut rapidement fait de se présenter au poste de contrôle, et d’être redirigé vers le pôle administratif. Où on lui appris qu’effectivement il y avait bien quelques courriers et colis au bureau de poste qui attendaient un aller vers la Capitale. Bifurquant vers celui-ci, il récupéra dans son grand sac sans fond les diverses missives et les quelques paquets, et tendit son poignet à la soldate tenant le registre sur son insistance.

    - Et voilà! s’exclama-t-elle en finissant de tracer à l’encre des lettres rondes sur sa peau. Mon adresse perso si tu veux que j’te montre certains points d’intérêt du Village Perché. Et mon numéro de chambre à la Caserne, mais j’y suis moins. Ma coloc a déjà tendance à y ramener trop de monde.
    - Cool!
    - Et puis si tu cherches juste de la compagnie aussi, n’hésite pas! Voire si tu cherches un lieu tranquille pour poser tes valises ce soir… T’es venu tout seul ou avec d’autres soldats?
    - Oh il a une chambre déjà, fit Apolline qui visiblement était revenue sur son épaule. A l’auberge. Avec son “ami”.
    - Ah heu. Peut-être que ça n’était pas une bonne idée finalement…
    - Quoi que l’exclusivité ne semble pas trop être le credo de la maison. Après faut aimer les pratiques un peu particulières. Les travestissements, les animaux, les origamis…
    - APOLLINE!

    Elle sauta dans un rire de son épaule et fila à la six-quatre-deux vers la porte de sortie, et il s’éclipsa comme un voleur en lui courant après sous le regard pantois de la soldate. De toute façon, son éventuel rencard venait très certainement de tomber à l’eau. Ils passèrent en trombes devant le duo de gardes surveillant les allées-venues qui avaient visiblement capté une partie de la conversation, et leur course-poursuite fut finalement arrêtée par Naëry qui récupéra la trousse de cuir toujours hilare. Jetant un regard mauvais à l’âme artificielle qui en profitait pour se lover contre l’aventurier, il lui répondit un “oui” distrait alors qu’ils se remettaient en route pour le parc. On siffla derrière eux, et son camarade adressa quelques mots aux soldats dans leur dos, mais l’espion n’y prêta guère attention, les yeux toujours rivés sur Apolline. C’est qu’elle lui aurait souri, narquoise, si elle avait pu. Détachant finalement son regard de la trousse, il le posa sur la silhouette de Loupiac, visiblement à son aise dans l’espace aérien du Village perché. Il était bien mieux ici que dans les galeries sous l’Arbre Sacré, ou dans les pièces lugubres de l’histoire de Hel D. Gher.

    S’éloignant peu à peu du centre névralgique du Village Perché - qui était tout de même bien moins nerveux que celui de la Capitale ou du Grand Port - ils suivirent les panneaux indicatifs jusqu’à arriver à l’une des entrées du parc. Le trajet les avait fait redescendre au pied des arbres, et l’espion sentait déjà que des courbatures se feraient certainement sentir à la fin de la journée, à force de dénivelés. Un large écriteau mettait en avant un plan détaillé du parc et de ses points d’intérêt, ainsi que des règles à respecter dans ce lieu protégé. Un peu plus loin, des stands raccords avec le paysage forestier avaient été disposés, et proposaient visiblement quelques activités aux passants, touristes, et autres promeneurs. Sur des établis savamment agencés, ce qui devait être des oeuvres d’art avaient été disposées.

    - Eh là, vous! les interpella un vieille homme grisonnant.

    Et comme il n’en fallait pas plus pour flatter la curiosité en exergue de Calixte, il n’hésita pas à s’approcher.

    - Ah ça fait plaisir de voir des jeunes comme vous profiter des atours du parc! Nuls doutes que c’est un endroit tout à fait charmant pour les rendez-vous, ah ah ah!
    - Oui, oui. C’est très charmant! Je ne connaissais pas, c’est mon ami qui voulait venir.
    - Votre ami, hein? Il a bon goût.
    - Oui, je trouve aussi. Qu’est-ce que c’est que ça?
    - Ah, vous avez l’oeil! On organise une vente au profit de diverses associations caritatives. Là vous avez les stands de l’orphelinat du quartier sud, juste après celui des compagnons de Lucy, ensuite celui des aides pour personnes âgées… mais le mieux c’est que vous fassiez le tour!
    - D’accord. Et ce sont des œuvres que vous vendez?
    - Oui, le Grand Atelier nous a généreusement légué certaines pièces. La plupart sont ici, mais une vente aux enchères est prévue dans deux jours pour les oeuvres les plus remarquables. Bien sûr les bénéfices seront alors répartis entre les différents organismes de charité.
    - Vous êtes bien organisé.
    - Vous pourriez passer! Les bourses bien garnies ont souvent gain de cause, mais c’est une expérience intéressante, surtout à deux. Et il y aura du beau monde! De la Noblesse!
    - Oh je pense qu’on sera repartis avant.  
    - Que de passage pour votre voyage, hein?
    - Oui, on était à l’Arbre Sacré, avant de venir.
    - Ah oui, souvent c’est le trajet que font les jeunes gens comme vous. Avec un détour par le Temple, aussi. Et le Grand Lac. Ca me rappelle ma jeunesse et ma douce Léonnie… Soixante ans de mariage, vous savez! Mais tenez: il faut absolument que vous participiez à ceci avant de repartir!
    - Qu’est-ce que c’est?
    - C’est une loterie dans le cadre de notre évènement. En échange de la somme que vous souhaitez donner, on tire au sort un numéro de lot dans cette boite. Evidemment, tous ne sont pas gagnants. Mais vous tenterez bien l’affaire? Je suis certain que ça vous portera bonheur dans votre relation.

    Et Calixte n’avait aucune idée de ce que ses relations avaient à faire là-dedans, mais il était tout de même intrigué. Et joueur. Et le monsieur avait l’air sympa. Et il était bon pigeon. Un peu en retrait, il entendait distraitement Naëry et Apolline discuter, mais il ne prêta pas attention à la teneur de leurs propos. Déposant quelques cristaux dans la main de l’homme face à lui, il piocha sous ses consignes un bout de papier avec un numéro.

    - Dix-neuf, annonça-t-il.
    - Jackpot! Vous remportez une exceptionnelle statue de Glooby! Regardez donc: de la belle pierre, deux mètres d’envergure. De quoi rhabiller votre intérieur avec classe. Je savais que vous alliez avoir la main heureuse!
    - Oh. Cool! Mais je n’peux pas la mettre à la Caserne…

    Instinctivement, il tourna la tête vers Naëry.

    - Mais je peux vous donner son adresse? Elle sera tout aussi bien chez lui.
    - Oui, oui, bien sûr. Je comprends tout à fait, et je n’en attendais pas moins. Difficile de garder trop de choses personnelles dans les dortoirs de la Caserne, hein. Surtout aussi volumineuses. Mais elle sera parfaite chez votre ami. Et vous pourrez tout de même en profiter à loisir.
    - Exactement! répondit-il en tendant un bout de papier avec l’adresse de l’aventurier.
    - Voilà, je vous donne le bon au cas où il y aurait un soucis avec la livraison. N’hésitez pas à faire le tour des associations caritatives. En vous souhaitant une bonne promenade et une bonne fin de voyage à tous les deux.

    Heureux de sa conversation avec le vieil homme sympathique, Calixte fit quelques pas pour rejoindre l’aventurier qui commençait effectivement à faire un tour des stands.

    - Tiens! fit-il avec un grand sourire à son camarade en lui tendant le bon intitulé “Naëry Wig & Calixte Alkh’eir”. Elle sera bien dans la cour, non? Sinon je la proposerai à Zahria et Luz. Ca donnerait aussi pas mal devant la clinique?
    - Bourreau des cœurs, commenta Apolline hilare. Papi va être tout triste d’apprendre que tu proposes déjà de mettre son cadeaux chez deux autres nanas, alors que votre voyage n’est pas encore terminé.



    Note:
    Naëry WigLe Lynx conteur d'Origamis
    Naëry Wig
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    Re: Tsi'Ly Con Carne
    Mar 5 Mai 2020 - 10:16 #
    Tsi’Ly Con Carne
    ─ avec Calixte

    Oui, un véritable gamin qui, au-delà de courir partout, a cette crédulité flairée à cent pas de là par les marchands et autres commerciaux. Je laisse le garde papoter avec l’un d’eux, j’entends vaguement parler de caritatif, et je dois avouer que, bien que sensibilisé sur les nécessitants de par ma foi en Lucy et les pratiques du Temple qui m’a recueilli, je ne suis pas un grand passionné du laïus que peuvent tenir certains bénévoles.

    Apolline, restée à mes côtés, en profite pour taper la discussion.

    - Et sinon beau gosse ténébreux, t’as déjà testé avec une trousse de compét’ ? J’suis sûre que j’peux te faire découvrir de nouvelles choses.

    Elle aurait des sourcils je suis certain qu’elle les agiterait au dessus d’un regard salace.

    - Non merci Apo, je suis désolé de briser ton coeur mais … Tu n’es pas mon genre.
    - Arf, tu viens de détruire ma vie ! Comment vais-je faire pour survivre sans ton amour ? Se plaint-elle dans une lamentation théâtrale.
    - Sérieux, c’est quoi ton genre ? J’savais pas qu’t’en avais un. Presque ça m’étonne t’vois.
    - Quoi tu crois que je saute sur tout ce qui bouge ?
    - Beeeen … C’est pas l’cas ?

    J’hausse les sourcils, résigné.
    - Non pas vraiment …

    Bien sûr des aventures j’en ai eu.. Jamais rien de bien sérieux avant Luz. Et pas autant qu’on voudrait m’en attribuer. Quant au genre … toujours consenti !

    - Et sinon le p’tit blondinet là il te plaît pas ? insiste-t-elle.

    Je me contente de rire avant de parcourir une allée ornée de stands d’exposition. Au bout de quelques pas à peine je me stoppe devant l’un d’entre eux, je crois bien avoir trouvé ses fameuses peintures Ukiyo. Du moins une toile. Je demande confirmation à la femme qui se jette sur l’occasion pour m’expliquer d’où vient cet art et ce à quoi servira les fonds récoltés suite à la vente de tout ce qu’elle expose. De quoi me faire fuir. Je l’arrête dans son élan d’explications en achetant l’œuvre et en espérant faire un heureux. L’artiste roule l’estampe et la range dans un tube en bois pour la protéger.

    Le futur bénéficiaire de ce présent arrive quelques secondes après, me tendant un papier. Mais qu’est-ce qu’il me présente là ?!

    - Je rêve où c’est une statuette de Glooby ?
    - Pas vraiment une statuette … Corrige Calixte qui commence à se dandiner.

    J’hausse les épaules avant de reporter mon attention sur un autre stand.
    - Oui oui ramène-le si tu veux. Mais pourquoi le faire livrer on ne peut pas le récupérer directement ?

    Ça doit faire quoi, un demi mètre tout au plus. A ce moment là je ne me doute pas une seconde que je me fout le doigt dans l’oeil jusqu’au coude. Car le machin que je viens d’accepter mesure deux mètres de haut ! Voilà pourquoi on ne peut pas le récupérer « nous-même » ! Mais ça, je ne peux le deviner puisque ma question reste sans réponse, Calixte étant déjà reparti aux papillons. Et une image, croyez-moi, c’est trompeur !

    Je flâne, suivant le garde qui passe d’un stand à un autre, s’émerveillant de chaque création. Je réponds par des « mmh mmh » à ses exclamations sans réellement prêter attention au contenant excité de ses paroles. Je suis davantage concentré sur Loupiac qui me communique télépathiquement sa joie de voler ici, virevoltant tantôt au dessus des branches, tantôt au ras du sol. Il faut dire que cette forêt est sa maison, c’est ici que je l’ai trouvé. Avec un pincement au cœur je songe que pour son bonheur il me faudrait peut-être le laisser ici. Saura-t-il seulement se débrouiller seul ? J’hésite avant de proposer à ce petit familier qu’il puisse rester vivre ici en toute liberté. Une pensée de panique qu’il me partage l’envahit, il vient alors se poser sur mon épaule, piaillant pour ne pas que je l’abandonne. Lui caressant la base du coup je le rassure aussitôt, je n’ai pas du tout envie de le laisser et je suis heureux de l’élever. Sa réaction me rassérène, il semble parfaitement heureux avec moi.

    Je finis par rejoindre Calixte, Loupiac reste blotti dans mon cou. J’arrache le jeune homme d’une vente d’une sculpture affreuse à mes yeux pour l’enjoindre à continuer jusqu’au parc.

    - A ce rythme nous n’arriverons jamais à destination Cal!

    Une légère déception pointe dans son regard avant de céder de nouveau la place à l’enthousiasme de découvrir la végétation luxuriante du bois aménagé. Si le nombre de tourtereaux autour de nous ne me saute pas aux yeux, la remarque qu’Apolline glisse à l’oreille de Calixte ne m’échappe pas.

    - Glisse ta main dans la sienne, je sais que tu en meurs d’envie.

    Ce qui a pour effet de faire rougir son interlocuteur qui range ses dites mains dans ses propres poches. A l’entrée un prospectus biodégradable nous est remis avec, en son sein, la description des divers faunes et flores que l’on y croise. La femme nous explique alors que le papier peut-être planter dans une serre se trouvant à l’Ouest du parc, une graine se cachant dans les pages pourra ainsi croître dans la terre, nourris par le reste des feuilles remplis de nutriments pour la bonne croissance du végétal.

    - Ingénieux. commenté-je.

    J’en profite pour demander si Elia et Elvann, les vétérinaires du Village, sont présents, et s’il est possible d’apercevoir les Aquilas, ces méduses que nous avons capturés avec Carci pour leur préservation.

    - Il me semble qu’Elia est là oui, à la clinique installée en bout de parc. Mais celle-ci est interdite au public. Je la préviens tout de même de votre visite.

    Usant d’un cristal de communication elle s’exécute, et nous entendons clairement la doctoresse nous autoriser à l’y rejoindre. Sa voix semble agacée, allez savoir si c’est par notre présence ou non …
    La femme d’accueil rajoute sur le plan du parc une croix pour nous indiquer le lieu vétérinaire, et nous remet un badge supplémentaire.

    - Bonne visite! s’exclame-t-elle alors que nous foulons le premier chemin qui se présente à nous.

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    Calixte Alkh'eirDamoiseau
    Calixte Alkh'eir
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    Re: Tsi'Ly Con Carne
    Jeu 7 Mai 2020 - 23:43 #
    Ils s’enfoncèrent sur l’un des sentiers balisés du parc, et Calixte se mit à trottiner joyeusement à côté de l’aventurier. Enfin, à côté. A côté dans un rayon de quelques mètres lui permettant d’appréhender toutes les merveilles s’offrant à ses sens. Et lui permettant d’éviter distraitement les couples rares, mais réguliers, qu’ils croisaient. Sous sa peau, il pouvait sentir le bourdonnement sourd de l’allégresse. Ils allaient visiter la clinique vétérinaire. Ils allaient aborder la face cachée du parc du Village Perché. Sans qu’il n’ait besoin d’utiliser ses compétences d’espion pour y accéder. Découvrir ces hommes et ces femmes travaillant dans l’ombre pour le bien-être de la faune et le plaisir des randonneurs. Enfin, rencontrer « Elia », mais c’était tout comme. Et peut-être que Calixte s’emballait un peu, mais après tant d’émerveillement il était difficile de retrouver une once de résonnement réaliste. Sa curiosité était en exergue, et cela faisait un petit moment que toute notion de retenue décente l’avait quitté pour le laisser papillonner à droite et à gauche avec la candeur d’un enfant découvrant les facettes fascinantes du monde. Enfin, d’un grand enfant. D’un enfant majeur.

    - Des arums de saison froide, aussi dites « désir ardent », lut-il sur le prospectus entre ses mains tout en se penchant au-dessus d’un bosquet de fleurs. C’est vrai qu’elles ressemblent des organes génitaux féminins, remarqua-t-il en tapotant du doigt la spathe couleur crème la plus proche.
    - Quel timide doigté, commenta l’âme artificielle sur son épaule. Je te montrerai d’autres techniques.
    - … tu n’as pas de doigt, Apolline.
    - Et tu manques fort d’imagination si tu penses que cela me limite. D’ailleurs, tu remarqueras qu’en dépit de ton absence évidente de poitrine, ça ne t’empêche pas de mettre des sout…
    - Elle est rigolote ta balle, monsieur.

    Se taisant, la trousse et l’espion se tournèrent vers la petite bouille qui les regardait avec intérêt. La petite fille devait avoir une dizaine d’années, et était habillée comme si elle partait en camp militaire. Ses vêtements étaient clairement un uniforme, un lourd sac-à-dos était harnaché à ses frêles épaules, et elle se tenait bien droite, tenant en main des couronnes de fleurs hivernales avec la détermination de celle prête à affronter le monde et le conquérir. S’il avait été un peu enivré, le coursier aurait aisément pensé que la remarque fluette venait de Naëry plutôt que de cette sérieuse enfant.

    - Je suis la plus rigolote de ses trois balles, affirma solennellement Apolline.
    - Tu as trois amoureuses, monsieur ? demanda l’enfant en fronçant les sourcils. Maman dit qu’il y a des gens qui ont plusieurs amoureux.
    - Quoi ? Non ! Je n’ai pas trois amoureuses !
    - C’est vrai. Peut-être plus. Y a Carci, Luz, Rebecca, Wendy, Zahria…
    - Non, non, non, pas du tout ! s’écria-t-il avec un regard paniqué vers Naëry à la mention de la médecin et colocataire de sa sœur de cœur.
    - T’as raison, il pourrait être jaloux. Ça laisse pas beaucoup de place pour les amoureux.
    - C’est aussi ton amoureux, le monsieur ?
    - NON ! Personne n’est amoureux de personne !

    La petite fille lui adressa un regard peu convaincu. Il savait qu’il aurait dû laisser Apolline dans le livre de Hel. Il semblait que le rouge était la nouvelle couleur permanente de ses joues pour la journée. L’enfant s’intéressa à l’aventurier, observant attentivement sa posture nonchalante et le chantelune virevoltant de temps à autres au-dessus de sa tête. Et Calixte se crut enfin débarrassé de celle-ci jusqu’à :

    - C’est vrai qu’il a plus l’air très amoureux, ton amoureux. C’est parce que tu en as beaucoup trop.
    - Je lui ai toujours dit qu’il était trop ambitieux en la matière.

    Il se demanda s’il serait malvenu de sa part de fourrer la trousse de cuir dans la bouche de la petite fille pour les empêcher de discuter de sa vie amoureuse fictive, et puis il se rendit à l’évidence que l’âme artificielle y prendrait certainement un malin plaisir et qu’il finirait lui-même derrière les barreaux pour pratiques déviantes sur mineur au vu du contexte. Et s’il ne doutait pas de l’amour de Zahria pour lui, elle aurait tout de même sa tête pour les méandres administratifs en découlant. Ou sa dignité. Enfin, ce qu’il en resterait. Il soupira :

    - Il va très bien, mon « amoureux », ne t’en fais pas.
    - Il irait encore mieux avec cette couronne.

    … d’où ça sortait cette histoire de couronne ? Il était vraiment en train de se faire pigeonner par cette petite fille à la coiffure impeccable et aux épaules droites sous son lourd sac-à-dos ?

    - Oh oui, ça lui rendrait tellement le sourire, à ton amoureux, renchérit Apolline.
    - Et à tes amoureuses. Il faut bien traiter ses amoureuses aussi.

    … elle était vraiment en train de le pigeonner.

    - Une seule, finit-il par abandonner, bon pigeon.
    - Deux, négocia-t-elle déterminée.
    - J’ai un seul « amoureux » ici.
    - Mais il faut que vous soyez accordés, sinon ça n’a pas de sens.

    Fichtre qu’elle était rude en affaires. Sous les encouragements de l’âme artificielle, il finit, incrédule, par tendre quelques cristaux à la petite fille en échange de deux couronnes de fleurs. Elle irait loin, cette petite. Et Zahria allait bien rire lorsqu’il lui ferait son rapport.

    - Comment tu t’appelles ?
    - Diane Misarthe, répondit l’enfant avec enfin l’esquisse d’un sourire, avant de s’éloigner promptement vers un autre couple passant non loin.

    Songeur, l’espion la regarda approcher le duo. Avant de reprendre son chemin et de rattraper Naëry qui l’avait un peu distancé sur le sentier et l’attendait à quelques pas. Sur son épaule, l’âme artificielle faisait joyeusement un laïus sur l’accord parfait entre les fleurs adroitement agencées des couronnes et sa blonde chevelure. Arrivant rapidement à la hauteur de l’aventurier, il posa l’une des deux couronnes sur les mèches brunes de celui-ci, et attacha la seconde à son propre sac-à-dos. Intrigué par ce nouveau couvre-chef, Loupiac s’approcha de l’ornement floral, avant de se poser sur la tête de Naëry, au cœur de celui-ci. Et Calixte rit à l’image improbable ainsi offerte. Pendant quelques secondes, il caressa l’idée de sortir son cadre magique pour immortaliser celle-ci et la montrer à Luz, puis il décida finalement contre.

    Ils reprirent enfin leur route, Naëry lui faisant justement remarquer qu’il allait finir le porte-monnaie assoiffé s’il continuait à distribuer ses cristaux tous les cents mètres, et l’espion haussa les épaules. C’était une possibilité tout à fait probable. Mais bon. Il ne leur restait plus beaucoup de jours à tenir d’ici leur retour à la Capitale, en terrain connu. Et au pire, d’ici là, il irait échanger quelques services contre quelques cristaux. Ils poursuivirent leur route en discutant des impressionnants méandres végétaux autour d’eux, et Calixte fit tout de même attention à ne pas trop s’éloigner de son camarade. Peut-être qu’ainsi, en présence de l’aventurier, aucune petite fille sauvage postée entre les hautes herbes n’oserait lui sauter dessus. D’ailleurs, maintenant qu’il avait arrêter de papillonner béatement, il se rendait compte que…

    - C’est marrant, y a plein de couples dans ce parc, nota-t-il en observant deux demoiselles partageant un pique-nique à visible connotation romantique. Tu crois que y a des journées à thème ? interrogea-t-il Naëry en lui lançant un regard curieux.

    Ils bifurquèrent sur un chemin contournant le volumineux tronc d’un arbre, et purent apercevoir à une centaine de mètres la façade végétalisée d’une large structure. Arrivaient-ils à la clinique ?
    Naëry WigLe Lynx conteur d'Origamis
    Naëry Wig
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    Re: Tsi'Ly Con Carne
    Mer 13 Mai 2020 - 23:46 #
    Tsi’Ly Con Carne
    ─ avec Calixte

    Le parc s’adapte parfaitement à la nature luxuriante qu’offre la forêt, et c’est agréable de constater que les créatures de celui-ci se sont adaptés au lieu plutôt que l’inverse. Je laisse Calixte papillonner, suivant nonchalamment la route. Intérieurement je suis admiratif de toutes les espèces que nous croisons, autant végétales qu’animales si on y prête bien attention. Émerveillement partagé avec mon ami, même Apolline gratifie la balade de quelques commentaires innocents. Fait assez rare pour le souligner. Une chouette hulule, j’adore ce son qui me rappelle quelques escapades nocturnes lors de mon arrivée au Temple. L’animal logé dans le jardin de Soeur Martha, marquant de son chant la nuit tombante. C’était un moment de quiétude pour moi, posé au milieu des végétaux, écoutant les sons que m’offraient la nature.

    Quelques pas me séparent du blondinet en grande conversation avec une enfant. Je me demande bien de quoi ils parlent. Partageant le sens de l’ouïe avec mon Chantelune je peux aisément entendre leur conversation. Je reste stoïque jusqu’à ce que l’espion revienne vers moi, me gratifiant de la couronne de fleur.

    - Alors comme ça Luz est l’une de tes amoureuses?

    Il me regarde paniqué, je souris en lui donnant une tape à l’épaule.Le rouge à ses joues s’estompent avec beaucoup de lenteur. Lorqu’il me demande si le parc organise des journées à thème je hausse des épaules. Il faudra le demander à Elia au pire, mais je doute que ce soit le cas. Il a toujours été réputé pour son côté romantique, attirant de nombreux couples des villes alentours. A ce qu’il paraît nombre de demandes en mariages se font ici. Le cadre bucolique n’y est pas pour rien il faut l’avouer.

    - Oh regarde!

    M’exclame-je en arrêtant le jeune homme d’une main sur le torse. Geste qui n’est pas une première.

    - Ce n’est pas un slime là-bas?

    Je lui montre le pied d’une Lanth Airne qui s’ouvre doucement avec le noir tombant de la nuit. L’animal en question est tapi dans l’ombre, l’espion ne le voit pas. Je tends le doigts dans sa direction, n’osant avancer de peur de le faire fuir. Calixte plisse des yeux, me fait signe qu’il ne l’aperçoit toujours pas. Je l’attrape par l’épaule, le colle à moi rapprochant son profil du mien pour qu’il adopte le même angle de vision que moi.

    - Là tu le vois?

    Sa main frôle la mienne, je sens la chaleur qui s’en dégage. Je tourne le visage vers le sien, qui se retourne également vers moi. Seul quelques centimètres nous séparent et je peux aisément percevoir le trouble dans ses yeux.

    - Ben quoi? demandé-je en fronçant les sourcils.
    - Et les lèvres rosées de l’espion s’avancèrent, attirées par la pulpe envoûtante de l’aventurier qui, de sa belle paire de ...

    Apolline vole après un parfait lancé de son propriétaire. Plus loin, un bâtiment. Je reprends la route comme si de rien était, un sourire énigmatique aux lèvres.

    La clinique vétérinaire s’adapte bien au paysage. De nombreux lierres recouvrent la surface des murs, camouflant en partie l’annexe du parc. Nos passes nous permettent de pénétrer l’enceinte, mais avant même que nous passions la porte une voix nous sommes d’arrêter un animal.
    Un magnifique Tsi’Ly fait alors son apparition, courant dans notre direction. Sans réfléchir je me mets en travers sa route, bras en l’air pour me faire plus imposant. L’animal ralentit, son regard se campe dans le mien avant qu’il ne bifurque brutalement. Ce peu de temps suffit à Elia pour lancer une fléchette anesthésiante dans le croupion de l’animal qui, quelques pas plus loin, s’écroule, langue pendue.

    - Qu’elle est coriace ! s’agace la vétérinaire. Oh ! Bonjour Naëry ! Tu tombes à pic, aidez moi à la déplacer s’il-vous-plaît.

    Mettant l’animal sur une planche, on pousse celle-ci jusque l’intérieure du bâtiment, dans une salle d’opération. Quelques blessures n’échappent pas à nos regards, je demande à Elia ce qu’il s’est passé.

    - Un mauvais propriétaire. Je ne sais pas encore ce qu’il lui ai arrivé exactement, mais elle a subi de mauvais traitement juste parce qu’elle n’écoutait pas. Si je retrouve le type je lui ferais regretter de s’en être pris à elle!

    Bizarrement, je la crois sur parole. Je lui demande où est son frère, Elvann. Elle me confie non sans un regard noir que ce dernier est en congé. Je sens qu’il y a anguille sous roche mais je n’insiste pas.

    - Vous allez m’assister, je vais avoir besoin de main supplémentaires pour l’opérer. Un fragment de lame est logé dans son flanc, et ça commence à s’infecter. Il faut que je la lui retire.

    Je regarde Calixte alors que la plaie de la Tsi’Ly n’est vraiment pas belle à voir. Nous nous mettons en place, toute euphorie enfantine disparue. Les ordres d’Elia sont secs mais précis. Nous voilà devenus instruments de son expertise.

    code ─ croquelune

    Calixte Alkh'eirDamoiseau
    Calixte Alkh'eir
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    Re: Tsi'Ly Con Carne
    Dim 17 Mai 2020 - 12:06 #
    Calixte ne savait pas trop s’il était particulièrement lent du ciboulot ou si les révélations lui venaient toujours à des moments incongrus. Comme habillé d’un kimono avec une belle aventurière lui ajustant ses sous-vêtements. Ou comme dans le bureau du Maître-Espion pendant que celui-ci finissait son couscous après lui avoir refilé une fameuse trousse de cuir restée stockée dans son tiroir pendant beaucoup trop d’années. Ou comme dans l’atmosphère fiévreuse d’une identité dévoilée, d’un secret et d’une condition. Ses yeux s’attardèrent sur les lèvres de Naëry, étirées dans un sourire énigmatique, et, le souffle suspendu, il se détacha de la chaleur de l’aventurier pour tourner résolument la tête vers le fouillis de végétation où il venait d’envoyer paitre Apolline. Ironiquement, son regard se reposa sur le slime profitant toujours de l’obscurité protectrice de son environnement. Et, bientôt, de celle de la soirée s’avançant. Les rayons bravant le couvert végétal se faisaient de plus en plus rares, et l’atmosphère se rafraichissait doucement. Le chant mélodieux de Loupiac attira son attention, et il observa le chantelune ramener vers lui l’âme artificielle toujours hilare. Drôle d’amitié que celle qui s’était nouée entre le familier et la trousse de cuir. Plus étrange que sa relation avec Naëry ?

    Une ombre passa dans ses prunelles, et Loupiac lâcha Apolline au creux de ses mains. Le rire de cette dernière s’estompa pour se muer en une appréciation tendre qu’il n’était pas certain de vouloir affronter. Finalement, les taquineries c’était bien plus endurable que la pitié sensible.

    - On refait dans le mélodrame… fit l’âme artificielle alors qu’il la reposait sur son épaule.
    - C’est un thème récurrent, habitue-toi. Ça vient avec le profil, les costumes, et le jeu, commenta-t-il sarcastiquement.
    - Calixte…

    Suivant Naëry à distance de quelques pas, il montra son propre pass aux gardiens de la clinique vétérinaire végétalisée. Hésitant à répondre à Apolline – ou à s’excuser, car il ne pouvait s’en prendre qu’à lui-même de cette nouvelle situation impossiblement navrante – il fut néanmoins interrompu dans son choix par du mouvement au coin de son champ de vision… et la silhouette folle d’un tsi’ly leur fonçant dessus. Ou, tout du moins, fonçant vers la sortie. Mais droit sur Naëry qui semblait avoir décidé de s’interposer. Ecarquillant les yeux, Calixte franchit les derniers pas le séparant de l’aventurier, et tandis qu’il saisissait de sa sénestre l’épaule de ce dernier, il s’emparait aussi de l’une des billes en argile de sa ceinture, prêt à les y faire fusionner tous deux au besoin. Le temps d’un souffle, le regard de la créature affronta celui de l’homme, puis elle changea brutalement sa trajectoire. Temporairement soulagé mais continuant à observer le tsi’ly avec prudence, le coursier lâcha finalement l’épaule sous ses doigts lorsque la créature s’effondra sous l’action d’une fléchette anesthésiante. Une femme – Elia, vétérinaire, apparemment – vint à leur rencontre, reconnaissant immédiatement l’aventurier, et les mettant à contribution. Ils ne furent pas trop de trois pour déplacer l’animal et l’amener à l’intérieur du bâtiment, dans une salle visiblement préposée aux soins.

    Et aux soins ils allaient apparemment participer. Le regard d’Elia n’aurait souffert de contradiction, et sous ses ordres précis ils se mirent à la tâche. Aucun des deux hommes n’avait l’habitude de pareille situation, mais Naëry avec l’expérience de s’occuper d’un familier, et Calixte celle d’avoir été succinctement formé par Wendy à la médecine, ainsi que celle de l’avoir assistée à l’infirmerie. Dans les salles d’opération. Et dans celles des urgences. La vétérinaire aurait pu tomber sur bien plus piètre aide, et elle s’en rendit visiblement compte, adaptant ses commandes à leurs capacités. A six paires de mains, l’affaire leur prit tout de même une bonne heure – et une dose supplémentaire d’anesthésiant – le temps d’ouvrir la chair de manière la moins traumatique, extraire le bout de lame logé dans le flanc, effectuer un débridement et parage propre, de nombreux points de suture, et un emplâtre à la fois antalgique et cicatrisant. Le temps, aussi, de s’assurer de l’absence d’autres sévices. Ce qui n’était pas le cas. Ils notèrent quelques dermabrasions en zébrures signes de flagellation, et quelques cicatrices suppurant sur ce qui avaient dû être des brûlures par mégots. La crinière du tsi’ly était emmêlée et pleine de parasites, signe de négligence. Ils pansèrent l’ensemble des plaies et s’attelèrent à offrir une meilleure hygiène corporelle à la créature endormie lorsqu’Elia se rendit soudainement compte de l’heure avançant bien plus rapidement que ce qu’elle avait escompté.

    Profitant d’être à trois, ils transférèrent le – ou la, visiblement – tsi’ly dans un box de repos adapté. Alors que la vétérinaire paraissait vraiment dépitée de devoir reporter la fin des soins pour la créature afin de pouvoir réaliser son tour du soir dans de bonnes conditions, Naëry se proposa pour les terminer. Il ne restait, après tout, qu’à démêler la crinière et y passer le peigne fin puis la lotion préparée spécialement par la soigneuse pour la débarrasser des parasites. Le regard trainant sur les papiers éparpillés dans le bureau d’Elia, Calixte proposa d’aider celle-ci à faire son tour. Visiblement soulagée – bien que pestant toujours contre les maitres maltraitants, les journées passant trop vite, et l’absence d’un certain frère – la vétérinaire confia les produits de soins – et anesthésiants, au besoin – à l’aventurier et donna une large caisse remplie d’une multitude de boites à l’espion. Attendant qu’elle raccompagne Naëry au box de la tsil’y, le coursier garda les yeux résolument tournés vers les affiches de prévention épinglées aux murs. Puis sur les documents du dessus du bordel du bureau. Entre une encyclopédie de pharmacopée et une pile de factures, une missive attira son attention. Dont la contenance avait tout de confidentiel, et traitait visiblement du financement d’un projet appelant à la discrétion. Mais si la jeune femme ne souhaitait pas que des étrangers tombent dessus, il ne fallait pas qu’elle les laisse trainer dans son bureau. Pour faire tout de même bonne figure, il s’éloigna de la table ensevelie de papiers, et partit attendre Elia près de la porte.

    - Allez, dis-moi, l’incita Apolline sur son épaule.
    - Moi, répondit-il d’un ton sans timbre, avant de sourire légèrement au rire aisé de l’âme artificielle.
    - Non mais, vraiment, insista-t-elle lorsque son amusement s’estompa un peu. Allez, trois adjectifs ou mots. Par ordre croissant d’importance.

    Il se mordit la lèvre.

    - Bête. Aveugle. Surpris.
    - Mmm. Décontenancé, perdu, un peu rapide en besogne ?
    - Ca fait plus que trois mots. Critique, considéré, juste.
    - Je t’embrasse le rectum. Rigide, découragé, dramatique ?
    - Je t’ai connu des insultes plus imagées. Consterné, respectueux, résigné.
    - Résigné de ?
    - Prêts ? fit la voix d’Elia qui enfilait des gants et s’armait d’une besace en lui indiquant de la suivre. J’ai dit à Naëry de nous rejoindre lorsqu’il aura fini. On en sera certainement aux aquilas à ce moment-là.

    Suivant sagement la vétérinaire, il sortit à sa suite dans le parc en plein air aménagé pour les créatures restant sous l’observation étroite des soignants. Accompagnant Elia dans sa tournée de soins du soir, repas, et étude succincte, le coursier apprit que les animaux gardés ici ne requéraient pas nécessairement des soins médicaux. Certains relevaient plus d’une prise en charge sociale, ayant perdu leur maitre pour diverses raisons, et ne pouvant retourner dans la nature sans phase d’acclimation préalable. Voire jamais, pour certains trop habitués à l’homme. La clinique avait d’ailleurs un partenariat avec des refuges animaliers au sein du Village Perché. D’autres animaux étaient là dans un souci d’observation et d’aide à la reproduction de l’espèce. Et certains, encore, étaient présents pour l’étude de leurs capacités remarquées ou attribuées.

    - Elvann et moi on prend soin d’eux, et on est ceux qui les observons dans leur milieu naturel. Mais on a aussi une équipe dédiée à l’étude des produits dérivants des animaux. Evidemment, pour du travail de terrain, faut pas compter sur elle. Les aquilas sont d’ailleurs là pour observation, on pense qu’elles ont des propriétés pouvant faire avancer la médecine.
    - Du coup vous faites des prélèvements sur ces animaux ?
    - Ils aimeraient bien, l’autre équipe. Mais jamais sans mon consentement, ou celui d’Elvann. Et tant qu’on n’en sait pas plus déjà par l’observation, pas question de leur faire du mal pour rien. Passe-moi la boite de la dryade.

    Fouillant dans la caisse, il baissa ses lunettes de jour – Elia préférait ne pas perturber les créatures par l’utilisation des lampes magiques, et chaussait elle aussi périodiquement ses propres lunettes dans les ténèbres s’épaississant – sur ses yeux afin de trouver la bonne étiquette et tendre la boite adéquate. Restant derrière la barrière de bois sur indication – ordre – de la vétérinaire qui préférait qu’il ne s’aventure pas sur le territoire de la dryade, il observa avec curiosité et prudence les mouvements mesurés, précis et professionnels de la femme.

    - Résigné de ?

    Il eut un reniflement sardonique.

    - Complexe, attachement, distance.
    - Distance de ?
    - As-tu vu tous les feux follets attirés !? s’exclama Elia en revenant vers eux.

    Il ne pouvait voir l’éclat de ses yeux, mais celui de sa voix lui suffisait pour comprendre la passion animant la vétérinaire. Il ne put s’empêcher de lui rendre un grand sourire et d’acquiescer. Ils se remirent en route, et l’espion interrogea la soigneuse sur son parcours qui, apparemment, n’avait pas toujours été au Village Perché. Même si c’était là son lieu d’ancrage. De zones en zones, de boites en boites, d’anecdotes en anecdotes, leurs pas les menèrent enfin à l’enclos naturel des aquilas, et Calixte se prit à la contemplation des méduses volantes. Elles évoluaient avec sérénité dans les bras sombres de la nuit, dans un ballet langoureux et poétique. Fascinant. Hypnotisant.

    Récupérant cette fois-ci un carnet de notes et une scribouilleuse, Elia lui fit signe de rester là où il était tandis qu’elle s’avançait davantage pour mieux observer les lyriques créatures. S’accoudant à la rambarde de bois, l’espion regarda la vétérinaire se mettre au travail.

    - Distance de ? lui chuchota à nouveau Apolline.

    Le bruit des feuilles balayées par la brise nocturne, ainsi que celui des animaux vaquant à leurs occupations, tapissait le silence installé entre les murs de végétation, mais ça tenait plus de la ouate que du capharnaüm, et même l’âme artificielle avait ainsi trouvé de bon ton de, justement, baisser le ton.

    - … toi non plus, tu n’sais pas lâcher l’affaire.
    - Distance de ?
    - Tu sais très bien.
    - Distance de ?

    Au-dessus du parterre végétal, les deux aquilas évoluaient en circonvolutions, donnant l’impression de danser l’une avec l’autre. Comment faisait Zahria, pour tout séparer ? Pour tout cumuler. Pour associer l’amitié, la sensualité et l’indépendance. Pour respecter l’intégrité et le désir, les valses prudes et les tangos lascifs. Zahria, formidable Zahria. Dont les mœurs matoises, l’esprit agile et l’attitude féline lui manquait soudainement tant en conseils avisés, qu’en présence solide. Habituelle. Réconfortante. Une aquila changea soudainement de sens d’évolution, et sa compagne vira aussitôt de direction, comme mue par le même instinct. Le même accord. Comment faisait Luz, pour tout accepter ? Pour tout rechercher. La concupiscence dans sa globalité, sans limite mais sans vice. Dans la plus grande tolérance, ambition et maitrise. Dans la discrétion aussi. Des partitions ajustées et des souffles accordés. Luz, admirable Luz. Présente dans le sillage de la Maitre-Espion comme le phare vigilant au milieu de l’océan. Eclairant, abritant, attirant. Fidèle. Accessible. Une aquila frôla Elia qui retint à peine une expression de surprise, et Calixte sourit pensivement.

    - Distance de ?

    De la chaleur du corps, de l’attention. Des enjambées confiantes, pouvant très certainement le mener jusqu’au bout d’Aryon sans hésitation. De la posture nonchalante, pourtant pleine d’émotions en s’y attardant. De la carrure athlétique, entretenue sans fard pour le travail mais recelant de milles mystères éludés. Des épaules décidées, solides mais parfois si aisément influençables, sanguines. Des mains attentives, capables et agiles, qu’il était certain de pouvoir saisir sans aucun doute. De la mâchoire peu loquace, réservée, pouvant se montrer si agréable malgré tout. Des lèvres finement dessinées, parfois aussi avares en émotions que la posture, parfois si vives dans celles-ci. Des mèches sombres, mettant en exergue les traits habilement ciselés sous-jacents, dont les plus rebelles ne demandaient qu’à être rabattues d’un mouvement de la main. Des yeux perspicaces, perçants, dénotant de la nonchalance de façade. Des iris au mordoré fascinant, lacs d’or où il pouvait s’aventurer jusqu’à la noyade. Du parfum musqué, aux notes si particulières, qu’il n’aurait pas dû noter.

    - De l’attirance. Physique. Sentimentale.

    Il y eut une brève pause où ils observèrent les aquilas virevolter.

    - Ca fera vingt-cinq cristaux pour la consultation du damoiseau fleur bleue, conclut Apolline.

    Il rigola doucement.
    Naëry WigLe Lynx conteur d'Origamis
    Naëry Wig
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    Re: Tsi'Ly Con Carne
    Sam 23 Mai 2020 - 9:55 #
    Tsi’Ly Con Carne
    ─ avec Calixte

    Groggy par l’anesthésiant la tsi’ly renifle lorsque je la caresse. Je pensais que Cal resterait s’occuper de l’animal avec moi, il préfère prêter main forte à Elia quant à la paperasse à ranger. Loupiac, posé sur la porte du box, nous observe, penchant la tête aux douces paroles que je murmure à l’animal blessé. Comme mû par l’empathie de la situation, le chantelune chante d’une mélodie que je ne lui ai jamais connu. Cela semble affecter la tsi’ly qui, râlant sous le contact de ma dextre, finit par en apprécier l’effleurement. Je continue de lui parler, avec toute les bonnes intentions qui guident chacun de mes geste, lui expliquant l’intervention et les soins que je finis de lui apporter. J’ai bien conscience qu’elle ne comprends pas ce que je lui raconte, mais l’intention que je mets dans mes paroles suffit à apaiser le familier rejeté. Je lui fais sentir la lotion avant d’en appliquer sur sa crinière, son poil maintenant démêlé est doux sous mes doigts, j’en profite pour les laisser glisser sur sa joue. Son œil m’observe avec intensité, je la sens sur le qui-vive, la confiance que j’instaure semble la tenir immobile.

    Je ne sais combien de temps s’est écoulé lorsque je quitte l’écurie, je ferme les yeux pour visualiser le plan gardé par Calixte que nous avez donné la femme à l’accueil. Me situant par rapport au souvenir de la carte, j’emprunte le chemin partant vers l’Est pour rejoindre l’enclos des Aquilas. Je suis ravi de pouvoir les revoir, les trouver n’avait pas été une mince affaire. Doux souvenirs que ceux évoquant ma rencontre avec Carci. Celle qui a su me débarrasser de ma carapace muette. S’en est suivie de ma rencontre avec Luz qui m’a libéré d’un poids, continuant cette lente transformation sociale. Vient alors la disparition de Calia pour troubler mon apaisement apparent. Je chasse cette pensée d’un revers de la main, comme si une mouche est venue m’importuner. Je n’avance pas vraiment dans mes recherches, il est clair que je ne me suis pas encore adressé aux bonnes personnes. Une idée traverse mon esprit, Calixte n’est-il pas en contacte avec Zahria ? Ne peut-il pas m’aider à soustraire quelques précieuses informations auprès de la métisse ? Je balaye à nouveau l’air, l’heure n’est pas au complot. Comme si une bulle autour de ma tête vient d’éclater, j’entends Loupiac savourer la venue de la lune, la brise mouvoir les feuilles des végétaux, et les animaux nocturnes saluer la venue de la nuit de leurs petits cris enchantés. Ne te perds pas dans tes pensées Naë, reste connecté à ce monde. Je respire à grande goulée, attrapant mes lunettes de jour pour continuer à marcher dans la noirceur nocturne.

    Des éclats de voix me parviennent, je ralentis ma marche, arrivant à pas feutrés vers mes compagnons. Il me semble reconnaître le timbre de Calixte, chuchotant quelques mots à l’intention de l’âme artificielle. J’arrive, un seul mot me parvient, sentimentale. La trousse le taquine alors en réclamant la rémunération contre son écoute. L’espion est-il mal ? Sûrement cache-t-il ses troubles et ses peines en la présence d’autrui, c’est ce que nous faisons tous, non ? Je me racle la gorge pour signaler ma présence, évitant de faire peur à qui que ce soit. Manque de chance je fais sursauter les deux acolytes, Apolline commence à m’incendier, très vite stopper par le propre agacement d’Elia face au tintamarre que ma présence vient de provoquer.

    - Oui pardon ! Je ne voulais pas vous surprendre! chuchoté-je prestement.

    Deux masses fluorescentes se meuvent devant nous dans une danse hypnotique. Les aquilas ne sont plus aussi timides que lors de notre rencontre. Elia me demande des nouvelles de la tsi’ly, je l’informe que celle-ci s’est endormie à la fin des soins. Mon attention se reporte sur les méduses aériennes, je questionne la vétérinaire sur le régime alimentaire de ces dernières, leur mode de vie et si les scientifiques ont pu faire d’intéressantes découvertes sur leurs éventuelles propriétés médicinales. C’est dans un discours passionné qu’Elia nous apprend que les aquilas, insectivores, ont un mode de fonctionnement similaire à leurs cousines marines. Elles semblent être monogames et lorsqu’elles trouvent un partenaire, ne le quittent plus. Ce qui est le plus intriguant et le fluide phosphorescent qui serait à l’origine de qualités de régénérescence, une caractéristique non négligeable pour la médecine et le soin de nombreuses maladies de détérioration massive des cellules. Fascinant. Pour le moment aucun prélèvement n’est effectué car elle ne sais pas d’où provient le liquide et cela risquerait de blesser les cubozoas, ce qui est de loin la dernière chose qu’elle leur ferait.

    Nous reprenons notre route en silence, Apolline par dans une digression sur les pics de bonheur lorsqu’elle se heurte à un hérisson, ce qui nous vos les foudres d’Elia qui se retourne d’un mouvement sec, attrapant la trousse de cuir tu bout des doigts pour la tendre à son détenteur dans un "Pouvez-vous tenir votre … amie!" On échange un semblant de regard à travers nos lunettes avec l’espion, j’imagine sans mal le pourpre envahir ses joues, tandis qu’il range la fautive de se trouble dans son sac avec plus de délicatesse que je ne lui en ai connu.

    Certains végétaux sont splendides, éclairant la nuit par leur beauté croissante, allant du globlue au lhumi nœud, en passant par la lux-ianuam ou encore la lumis sylvatica, pour finir avec une lhant airne. Le parc se teinte alors de nombreuses couleurs, les lunettes de jour étant inutile à leur approche. Bien évidemment, Elia se fait un plaisir de nous décrire cette flore qui ravie nos pupilles.

    Avant de quitter le parc, je demande à la vétérinaire si je peux repasser voir la tsi’ly le lendemain, question à laquelle elle répond par l’affirmative, et s’il nous ai possible de passer par la tour d’astronomie malgré l’heure tardive. Encore une fois cela ne pose pas de problème, elle connaît bien l’astronome qui hante les lieux et lui passera un coup de cristal de communication avant notre arrivée.

    Calixte semble terrer dans un mutisme mélancolique, lui pourtant si enthousiaste quelques heures plus tôt. Je ne prononce guère plus de mots, habitué au paisible silence. Arrivant à la tour, l’astronome se fait une joie de nous raconter l’histoire de l’arbre. Lorsque le tronc se découvre pour laisser place à une vue imprenable sur la voie lactée, nos yeux s’illuminent d’admiration. Un énorme télescope permet d’observer les constellations avec plus de précision. Il nous montre Ankaa que je connais sous le nom de l’étoile du voyageur, indiquant le Sud quelque soit la saison. Il nous parle alors de l’astrologie qui découle de l’étude des étoiles. Science inexacte, il s’amuse à nous décrire nos signes.

    - Savez-vous sous quelle constellation vous êtes nés?

    Jouant le jeu, je lui révèle ma lune de naissance.

    - Je suis né lors de la 1ère lune de la saison douce de l’an 972.

    Ce n’est peut-être pas grand-chose mais j’en apprends davantage à l’espion à mes côtés.

    - Vous êtes Sagittarius ! Symbolise le retrait de soi, la timidité, la ténacité ainsi que la sensibilité.

    Quelqu'un qui me connaitrait bien dirait sans nul doute que cela me correspond. N'est-il pas vrai que nous trouvons toujours une correspondance avec ce genre de généralité ? L'homme tourne le télescope en direction du Sud-Ouest pour m’en montrer la constellation correspondante. Il fait de même avec mon ami qui se voit gratifié de la remarque d’Apolline. Se rappelant sa naissance, l’âme souhaite également connaître son signe et c’est avec légèreté que je la taquine à son tour. Le scientifique finit par nous laisser seuls profiter du spectacle. Allongé à même le sol, les bras derrière la tête et les yeux rivés vers les étoiles, je viens briser le long silence qui s’est installé d’une seule phrase.

    - Tu sais si un jour tu as besoin de parler, je ne fais pas payer les séances de psy moi. Je souris sans un regard pour mon compagnon, avant de rajouter. Je ne garantie pas le résultat par contre.

    Cette fois mon visage se tourne vers le jeune homme dont la faible luminosité lunaire révèle le trouble au fond de son regard. Je me remets à contempler les cieux, soucieux.

    code ─ croquelune

    Calixte Alkh'eirDamoiseau
    Calixte Alkh'eir
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    Re: Tsi'Ly Con Carne
    Dim 24 Mai 2020 - 13:06 #
    Un bruit dans son dos, sonore comme le fracas du ressac contre la coque d’un bateau dans le silence vespéral du parc, le fit sursauter. Calixte tourna vivement la tête, et ses doigts posés sur la rambarde glissèrent contre celle-ci dans le frottement paniqué de la surprise. Distraitement, il nota la brûlure sous sa main. Se découpant nettement dans l’obscurité grâce aux lunettes de jour, Naëry avait fini par les rejoindre. Lui laissant le temps de reprendre contenance, Apolline se lança dans l’énumération d’une remarquable liste d’injonctions peu flatteuses à l’adresse de l’aventurier les ayant déstabilisés. Profitant du moment pour se retourner et aviser la paume de sa senestre qui le lançait, le coursier nota qu’il s’était légèrement blessé. Le bois râpeux avait entamé une petite morsure à son mouvement brusque, laissant la chair à vif sur deux petits centimètres. Il aurait largement le temps de s’en occuper plus tard. La voix agacée d’Elia surplomba celle de l’âme artificielle, et le silence reprit ses droits, une fois que l’aventurier se fût excusé. Ce qui, en d’autres circonstances, aurait amusé Calixte. Car ça n’était pas vraiment la faute de Naëry de les avoir surpris en pleines messes-basses. Mais il ne dit mot, se contentant d’observer les mouvements fluides et éthérés des aquilas, pensif. La vétérinaire revenue à leurs côtés, elle profita de la présence de l’aventurier pour s’enquérir de la santé de la tsi’ly, et échanger quelques informations sur les étranges méduses volantes, qui étaient apparemment sous ses soins depuis que Carciphona et Naëry s’étaient occupés de les lui ramener.

    Ils reprirent leur chemin, et Calixte laissa son regard se promener tout autour d’eux. Avec l’avidité de l’homme assoiffé appréciant l’oasis, mais la distraction de celui s’efforçant de trouver la solution à un problème épineux. Le parc, de nuit, revêtait un autre visage. A la fois plus spectral et plus contrasté que de jour, son singulier rehaussement en technicolor soutenu par certaines plantes ou animaux, dont les ténèbres mettaient en exergue certaines lignes plutôt que de les camoufler. Comme ce bosquet de woodles précoces, dont la brise timide agitait les clochettes, libérant dans l’air une poudre scintillante, relevant les reliefs adjacents d’une douce lueur. Comme ces motifs en phosphorescence, évoluant prudemment dans les branchages à quelques mètres d’eux, dénotant la présence de curieux flokis. Il y avait là tout un monde en clair-obscur, fascinant et intrigant. Dont Elia leur faisait passionnément le tableau, et que l’espion avait bien du mal à apprécier dans sa totalité, l’esprit résolument ailleurs. Il ne perçut d’ailleurs l’agacement de la vétérinaire que lorsqu’elle lui tendit Apolline. Echangeant par habitude un regard avec Naëry, il s’empressa de récupérer l’âme artificielle et de replonger celle-ci dans les abîmes de son sac-à-dos. Même s’il savait qu’elle ressortirait bien vite, n’en faisant après tout qu’à sa tête, il ne put s’empêcher de se sentir un peu coupable de l’enfermer à nouveau.

    Ils poursuivirent leur promenade bucolique agréablement guidés par Elia, jusqu’à regagner l’une des extrémités du parc. En dépit de l’heure ne rajeunissant pas, ils n’étaient pas les seuls à profiter de cette facette enchanteresse des lieux, et ils croisèrent quelques groupes se donnant aussi à l’émerveillement végétal nocturne. Il remarqua que la vétérinaire prenait soigneusement note de ces visiteurs tardifs, probablement pour des questions de sécurité. Et peut-être même de surveillance de tout acte malencontreux pour la faune et la flore locale. Finalement, elle les mena à l’orée d’un chemin permettant de regagner le centre du Village Perché, et Naëry l’interrogea sur la possibilité d’aller profiter de la tour d’astronomie. Possibilité que Calixte avait complètement oubliée. Clignant des yeux de surprise, il se sentit partagé entre la curiosité et la panique. Lucy seule savait lorsqu’une opportunité similaire se représenterait, et il était réellement intéressé par la visite du singulier bâtiment. De l’observation des étoiles en fine compagnie. Des informations succinctes que ce lieu, si discret, pouvait lui apprendre. Il était pressé, aussi, de quitter la présence de Naëry. Qui lui rappelait l’inadéquation de ses pulsions naissantes. Qui lui ordonnait de fuir. Car à choisir, le coursier préférait encore la fuite à la complaisance inappropriée.

    - Je veux voir les étoiles ! chuchota l’âme artificielle qui était revenue sur son épaule, tandis que l’aventurier et la vétérinaire continuaient leur conversation.
    - Apolline…
    - Toi, tu auras des étoiles comme personne n’en a…
    - … quoi ?
    - Quand tu regarderas le ciel, la nuit, puisque j’habiterai dans l’une d’elles, puisque je rirai dans l’une d’elles, alors ce sera pour toi comme si riaient toutes les étoiles. Tu auras, toi, des étoiles qui savent rire !

    Il regarda la trousse de cuir. Et rit doucement.

    - D’accord, tu as gagné. Par curiosité, c’est le Vieux qui te fournissait tes lectures, ou tu fais des tours à la bibliothèque de la Caserne ?
    - Y a pas grand-chose à part des manuels sur le maniement d’objets phalliques à la Caserne. Sale histoire.

    Naëry se tourna vers eux, et ils se turent. Après un bref « au revoir » à Elia, ils prirent le chemin de la tour d’astronomie. Ils mirent quelques minutes à atteindre le sommet de l’arbre immense l’abritant, et l’astronome les accueillit avec bienveillance. Et une passion toute commune à celle de la vétérinaire. Y avait-il seulement des âmes non passionnées qui travaillaient au Village Perché ? En tous cas, il était agréable d’être aussi chaleureusement reçu. Même si Calixte avait bien du mal à rester en phase avec cette curiosité qui lui était pourtant coutumière, il se délecta de quelques informations données par l’astronome passant tour à tour des objets d’observation, au fonctionnement de l’observatoire, aux étoiles actuellement observables, aux notions plus nébuleuses d’astrologie. Et bien qu’il jouât aussi le jeu de donner sa date de naissance, il n’entendit que d’une oreille distraite la bonne-aventure de l’homme, et n’en imprima quasiment rien. Le regard levé vers les étoiles, semblant si proches, si nettes, à cette hauteur et dans un ciel si parfaitement dégagé, il se complût dans cette contemplation simple, hypnotique. Dépourvue de tenants et aboutissants. Naïve. Sincère.

    Afin de limiter la tension qui commençait à s’installer dans son cou forcé en extension, Calixte finit par s’assoir, puis s’allonger à même le sol, pour poursuivre son observation indolente de la voûte céleste. Il y avait quelque chose de rassurant au scintillement persistant des étoiles du firmament. De chaleureux. La perspective sereine d’un espoir. La douce pensée de possibles. Et peut-être était-il naïf de se perdre sciemment dans l’immensité astrale, mais il était bien décidé à profiter de cette pause temporaire dans les élucubrations de ses songes, et dans le maelstrom de ses émotions.

    - Adieu, dit le renard. Voici mon secret. Il est très simple : on ne voit bien qu’avec le cœur. L’essentiel est invisible pour les yeux.
    - Vas-tu me dessiner un mouton ? sourit-il doucement.

    Du mouvement à ses côtés interrompit une nouvelle fois leur échange, et il se retint de tourner la tête. Brièvement, il ferma les yeux. Comme il était ridicule qu’il fût capable de savoir au bruissement particulier des vêtements, aux effluves légères du parfum singulier, à la présence familière hérissant le poil de sa peau, que Naëry s’était allongé à quelques centimètres de lui, pour profiter du spectacle stellaire. Le temps de quelques secondes, il s’astreignit au contrôle. Puis, mû par un instinct plus fort, il pivota légèrement le visage pour laisser courir son regard sur les traits de l’aventurier. Dans l’obscurité de l’observatoire, simplement éclairé de la lueur lointaine des étoiles, défait de ses lunettes de jour, Calixte ne pouvait apprécier qu’une ligne approximative de la silhouette de son camarade. Et pourtant, s’il écoutait sa mémoire, tout comme son cœur, il savait exactement le tracé que suivaient ses yeux. La courbe des reliefs. La fabrique des tissus. Le grain de la peau. La couleur des lèvres qui s’entrouvraient. Il détourna le regard alors que Naëry prenait la parole.

    Le timbre était calme, amical. Peut-être un peu amusé même. Mais aux oreilles de Calixte, il résonna dans le silence de la nuit comme un offensive, une accusation. Ses doigts se crispèrent contre les lattes du parquet, et la brûlure de sa blessure se rappela brièvement à lui. Qu’avait-il entendu, Naëry ? Qu’avait-il perçu de la conversation entre l’espion et l’âme artificielle ? Qu’avait-il compris de celle-ci ? Un froid insidieux se saisit de ses poumons, pour diffuser un peu plus à chaque respiration pénible. Une ombre s’installa sous le voile inquiet de ses cils, et il se mordit la lèvre. Quelle étrange reviviscence du contraste de cette Fameuse Soirée, dans des conditions tellement différentes. Vraiment ? Les battements affolés de son cœur, coffre-fort incandescent de ses sentiments inappropriés, contre l’insensibilité de la tétanie s’installant à chaque souffle un peu plus jusqu’à chacun de ses doigts. Vraiment ? Le choix, et l’illusion du choix, encore. Vraiment ? Avouer, se taire, faire taire. Vraiment ? Avec, un nouvelle fois, un aventurier à la fois trop perspicace et pas assez négligent pour laisser tomber l’affaire. Pour être tu. Vraiment ? Apolline avait eu raison, il refaisait dans le mélodrame. En était-il vraiment surpris ? Entre le profil, les costumes et le jeu…

    Il ne put étouffer les prémices d’un rire, et il plaqua les mains sur son visage, se coupant de toute connexion au regard mordoré de l’aventurier. Et les notes claires, mi-incrédules mi-peinées, une pointe hystériques, ricochèrent le temps de quelques secondes contre les parois arrondies de l’observatoire, avant de s’envoler et s’étioler sous la voûte nocturne. Il sentit Apolline se caler contre lui, et il décala ses doigts pour les amener dans ses mèches blondes.

    - Les hommes ont oublié cette vérité, dit le renard. Mais tu ne dois pas l’oublier. Tu deviens responsable pour toujours de ce que tu as apprivoisé. Tu es responsable de ta rose, murmura la trousse.

    Calixte reprit une grande inspiration, s’assit, et tourna les yeux vers Naëry. Son travail d’espion prendrait toujours préséance sur tout le reste, tant qu’il aurait confiance en son – ou en l’occurrence sa – Maitre-Espion. Mais ceci ne relevait pas du domaine de l’espionnage. Et à choisir entre la complexité bienheureuse des mensonges et des omissions, et la sincérité des échanges malhabiles, n’avait-il pas déjà pris sa décision, une fameuse soirée de saison fraiche ?

    - Merci, finit-il par commencer à dire doucement, en plongeant son regard ambré dans celui aux éclats mordorés. Je vais retourner vers l’auberge. Seul, pour le trajet, si tu le veux bien. Je vais avoir besoin d’être seul.

    Parce qu’à la mesure de ses propres batailles, il ne réussissait bien que la fuite. Et il était bien plus prompte à la lâcheté de celle-ci, qu’au courage des affrontements directs. Bien plus vifs, bien plus intimes, bien plus révélateurs.

    - Parce que si ce jour peut être aujourd’hui, autant en finir.

    Etonnant comme la notion qui avait germé – sciemment, inconsciemment c’était certainement une autre affaire – à peine quelques heures plus tôt se trouvait déjà à l’orée de ses lèvres. Alors qu’il était usuellement si avare de détails personnels de sa vie en la présence d’autres personnes. Mais à part les espions, qu’il considérait comme sa famille, et Luz – magnifique, attentive, bienveillante, instruite à leurs us de l’ombre – avait-il déjà eu amitié si complexement intime ? Il avait pensé finir sur le ton de la pluie et du beau temps, car après tout, cela relevait du même acabit. Mais les mots sortirent avec le raclement tout particulier de la réticence :

    - Je suis attiré par toi. Physiquement. Sentimentalement.

    Etrange écho de sa conversation avec Apolline. Moins amusant cependant.

    - Je ne compte rien en faire, c’est inapproprié, poursuivit-il sans lâcher le regard de l’aventurier. Mais j’ai besoin d’un peu de temps. Et de distance relative.

    Il tourna les yeux vers les trésors de la voûte céleste, que rien ne semblait ébranler. Repassant les bretelles de son sac-à-dos, il saisit la trousse de cuir pour la replacer sur son épaule et se releva pour aviser l’issue du bâtiment de l’observatoire.

    - Je comprendrai que tu aies aussi besoin de temps, et de distance. Même infinis, finit-il par conclure le regard toujours perdu parmi les étoiles du firmament.

    Où était-elle l’Ankaa ? Etoile du sud, celle qui guidait indéfectiblement les explorateurs aventureux ou égarés. Ses yeux trouvèrent en une fraction de seconde l’étoile étincelante, joyaux parmi les joyaux, et il ne perdit pas plus de temps pour prendre la fuite. Car après tout, c’était bien dans la fuite qu’il excellait. Le choix, et l’illusion du choix.

    La fraicheur de la nuit, dénudée de l’atmosphère protectrice d’une quelconque bâtisse, l’embrassa d’une étreinte revigorante, et poussé par une agitation motrice miroir de celle de ses pensées et de ses émotions, il se mit à courir. Se laissant guider par les quelques cristaux de lumière éclairant les rues principales du Village Perché, il passa de planche en planche en grandes enjambées, se rattrapant ici et là lorsque sa maladresse se rappelait à lui. Finalement, lorsqu’il parvint au centre de la ville s’assoupissant peu à peu, le rose aux joues de sa course folle mais libératrice, il s’arrêta. Son regard se posa sur la silhouette de l’auberge où ils avaient réservé une chambre. Son cœur battait encore à tout rompre, mais il y avait une fièvre salvatrice à avoir mis en lumière l’ombre qui avait commencé à s’installer dans ses pensées. Même si, s’il s’attardait à la réflexion mélancolique, il ne donnait pas forcément très cher des restes de la relation entre Naëry et lui-même, que sa vie semblait prendre un malin plaisir à saccager.

    - Tu es responsable de ta rose, conclut Apolline sur son épaule.
    - C’est le temps que tu as perdu pour ta rose, qui fait ta rose si importante, fit-il pensivement avec un léger sourire. C’est vraiment ça, les termes ?
    - Aucune idée. Mais ça sonne bien. Même si à choisir, j’aurai choisi un autre champ lexical.
    - Le public visé n’est pas tout à fait le même.
    - J’en serai pas si sûre. Même si tu as l’intelligence émotionnelle d’un pré-adolescent.

    Il rit doucement et se remit en marche, vérifiant qu’il avait bien son cristal de communication au besoin.

    - Tu crois que la Grande Bibliothèque ferme la nuit ?
    - Tu crois que j’pourrai avoir une scribouilleuse ?
    - … demain matin.

    Ils prirent toute de même la direction de la Grande Bibliothèque, dont les grandes façades surplombaient les habitations perchées, et étaient visibles à plusieurs couples de centaines de mètres plus loin.
    Cette nuit, Calixte ne rentrait pas à l’auberge.
    Naëry WigLe Lynx conteur d'Origamis
    Naëry Wig
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    Re: Tsi'Ly Con Carne
    Ven 29 Mai 2020 - 10:38 #
    Tsi’Ly Con Carne
    ─ avec Calixte

    Interdit.

    Je reste interdit face à tes révélations, figé, glacé, ébranlé.

    Interdit.

    Il m’est interdit de te révéler le trouble que tu viens d’éveiller en moi, interdit de te retenir, de te faire souffir plus encore.

    L’onde de choc que tu viens de libérer me coupe le souffle, je t’écoute, silencieux, passif, stoïque. Je te laisse prendre les commandes, choisir ton combat. Il n’est pas étonnant de te voir emprunter le chemin de la fuite, ce n’est pas la première fois après tout. Un vague écho de la Fameuse soirée résonne en moi. Tu quittes les lieux.

    Je retrouve ma mobilité, je m’assois. Ma senestre retrouve mon front pour en masser la tempe de manière concentrique. Une longue expiration marque la reprise de vie en moi. Voilà pourquoi je ne me liais avec personne, voilà pourquoi la carapace est d’autant plus importante à vêtir, au-delà de me protégé, je protège les autres de par mon absence. Depuis le retour de mon passé loin sont partis mes préceptes.

    Premièrement, ne touche pas à tes aiguilles.
    Deuxièmement, maîtrise ta colère.
    Troisièmement, ne te laisse jamais, au grand jamais, tomber amoureux. Car alors pour toujours à l'horloge de ton cœur la grande aiguille des heures transpercera ta peau, tes os imploseront, et la mécanique du cœur sera brisée de nouveau.


    Loupiac chante toujours le son de l’innocence tandis que la tempête déferle dans ma tête. Que faire ? Lui courir après ne mènera à rien, que lui dire ? Mon cœur appartient à Luz ? Il le sait déjà. Ta présence m’est importante ? Ça ne ferait que le blesser davantage. Alors je le laisse dans le noir de la nuit, dans le noir de la confusion où son cataclysme vient poursuivre ses méfaits jusque dans mes entrailles.
    Tu aurais voulu faire aigle royale, ou goéland majestueusement cool, mais au lieu de cela tu as fait canari stressé empêtré dans ses soubresauts.

    Mes yeux retrouve le calme céleste, je m’y perds longuement, que j’aimerais être une de ses étoiles. La vie semble tellement paisible là-haut. Je finis par me lever, l’immobilité ne fait qu’accroître mon malaise. J’ai besoin de marcher, de faire taire toutes les contradictions qui assaillent ma cervelle. Mon chantelune vient se poser sur mon épaule, son gazouilli me ramène à l réalité avec difficulté. Je suis obligé de me concentrer pour le voir, un voile attaque ma vue je suis dans une autre dimension. Allez Naë, respire, écoute les bruits alentours, ressens les relents des ténèbres, l’endormissement du Village Perché. Mais rien y fait, je suis inéluctablement rattrapé par mes songes. Cal, tu viens de lâcher sur moi une véritable bombe. Le temps est ton affaire plus que la mienne. De quoi ai-je peur ? De toi, enfin de moi sans toi. La dynamique de notre duo basée sur le mélodrame ferait fuir quiconque a du bon sens. A croire que je n’en ai pas. Luz, ma douce Luz … Que faire ?

    Je manque de me prendre une branche, l’alerte stridente de Loupiac a réussi à me ramener dans cette étrange temporalité. Et si tout ceci est un mauvais rêve ? Malheureusement je sais que ce n’est pas le cas. Marcher ne m’aide guère plus à rester les pieds sur cette terre. Comment oublier l’histoire de quelques heures ? Ce soir, je ne rentrerai pas à l’auberge, laissant Calixte dans les méandres de ses chimères. Je crois me souvenir qu’Eva garde sa grande bibliothèque ouverte pour les noctambules dont je fais parti, elle-même en proie à l’insomnie.
    Ce soir Loupiac est pour moi le phare qui m’évite de couler par le fond contre les côtes mal éclairées de mon esprit. Il m’éclaire régulièrement de son chant cristallin révélant à mes yeux la route escarpée à emprunter. Je ne sais vraiment comment je suis arrivé devant l’antre de la connaissance, je suis certain que la lecture va faire taire le tumulte de mon esprit. Y trouverai-je un mode d’emploi sur les coeurs brisés ? Comment les réparer en douceur ?

    Lorsque j’entre des murmures résonnent, je vois que je ne suis pas le seul que le marchand de sable à oublier de gracier. Je m’éloigne jusqu’à ce que je reconnaisse la voix d’Apolline. Alors à l’inverse, je m’approche discrètement, écoutant indiscrètement ce que le tandem échange.

    - Quand je panique la mécanique de mon cœur déraille au point que je me prends pour une locomotive à vapeur dont les roues décollent dans les virages. Je voyage sur les rails de ma propre peur.
    - C’est ton cœur de chair et de sang qu’il faudrait réparer. Et pour ça, tu n’as besoin ni de docteur ni d’horloger. Il te faut soit de l’amour, soit du temps - mais beaucoup de temps.

    Et du temps, c’est ce qu’il m’a demandé. Je fais demi-tour, laissant ce lieu à ses occupants, je suis de trop ici. A la porte je m’arrête. Non, après tout Calixte a dit ce qu’il a sur le coeur, courage ou inconscience, je m’élance à l’assaut de ses craintes. Je déboule à côté de leur table, l’espion me roule un regard mi-incrédule, mi-accusateur.

    - Je n'aurais jamais cru que ce soit si compliqué de garder à ses côtés les personnes que l’on aime.

    Mon regard plonge dans le sien à la recherche d’un réconfort dont l’absence le fait souffrir.

    - Si tu as peur de te faire mal, tu augmentes les chances, justement, de te faire mal. Regarde les funambules, tu crois qu’ils pensent au fait qu’ils vont peut-être tomber lorsqu’ils marchent sur la corde raide ? Non, ils acceptent ce risque, et goûtent le plaisir que braver le danger leur procure. Si tu passes ta vie à faire attention de ne rien te casser, tu vas terriblement t’ennuyer, tu sais…

    Mes yeux se détournent du blond pour retrouver la petite trousse de cuir. Depuis quand est-elle devenue sage ? A qui s’adresse-t-elle ? Autant à son poulain qu’à moi, je le crains.
    Je résume tout ce maelstrom en un seul mot, reportant toute l’intensité de mon regard sur le garde des rebondissements.

    - Luz ...

    Et il le sait. Un subtil hochement de tête approuve la sentence, fatale, de son coeur. Je l'effleure de toutes mes forces, il m'est fleur de toutes les siennes. Je le laisse dans cet abysse de désarroi pour retrouver les agitations d’un sommeil houleux dans le matelas trop grand de la chambre réservée par Calixte.
    Il doit rester quelques rêves d’enfant cachés sous mon oreiller, je tenterais de ne pas les écraser avec ma tête lourde de soucis d’adulte.

    _______________

    Le lendemain mes yeux piquent du manque de sommeil. Je quitte l’auberge tôt, avec toutes mes affaires. Je laisse une note au groom de nuit pour qu’il le donne à Calixte lorsqu’il viendra récupérer les siennes. De ma petite écriture oblique je lui signale ma présence au parc retrouver Elia et la tsi’ly. Et mon départ pour la Capitale en suivant. A lui de voir s’il veut m’y rejoindre ou tracer sa route.

    C’est ainsi que quelques heures plus tard je retrouve le portail de téléportation avec la promesse d’adoption d’Asti, ma future monture qui reste en observation encore deux jours dans la clinique vétérinaire. Mon intérêt pour la faune et la flore a mis en confiance Elia qui n’a eu de cesse de m’obliger à donner régulièrement des nouvelles de l’animal une fois à mes côtés, et surtout, ne pas hésiter à la joindre à la moindre questions sur la tsi’ly.
    Un dernier regard sur le Village en espérant apercevoir la silhouette de l’espion, cette silhouette si banale pour les autres devenue si unique à mes yeux. Loupiac s’endort dans le creux de mon cou, je disparais dans le portail.

    code ─ croquelune

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    Re: Tsi'Ly Con Carne
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