Ça y est, on y arrive. On commence à voir le bout du tunnel avec ce chantier de malheur. À l'extérieur, il restait encore les tas de tuiles et planches remplacées qui bloquent presque l'accès à la baraque. La façade est à moitié peinte, mais c'est qu'une histoire de finition avant que tout ce merdier ressemble à quelque chose. Aujourd'hui c'était jour de congé pour les ouvriers. Pourquoi? J'en ai longuement discuté avec m 'man. Ou plutôt c'est elle qui en a discutée avec moi. Elle a peur, et évidemment en fait. Ce taudis est en train de retrouver sa beauté d'antan, et nos souvenirs refont surface. Les bons, comme toutes les fois où père est venu en héros avec toutes ses trouvailles, l'odeur de la cuisine qui ne se mélangeait pas aux moisissures, à l'humidité ou l'odeur du bois cramé. On n'a jamais eu les ronds de faire quoi que ce soit pour cette piaule avant la rencontre d'Haru. Et il y a les mauvais souvenirs, ces connards de bandits, du feu, pas le mien, et du sang, celui de père. M'man n'a jamais réussie à enlever la trace au milieu du salon, alors on avait mis un tapis pour ne pas poser le pied dessus. Un moyen également peut être de moins y penser. Ça ne marchera jamais. C'est pourquoi l'ambiance est un peu mitigée, aujourd'hui.
M'man avait un tablier et à l'aide d'un pinceau refait les murs avec un pot posé sur un petit marche-pied. De mon côté, j'étais en train de monter les nouveaux meubles qui allait remplacer les anciens qui avaient déjà beaucoup trop donné pour la maison. S'il y avait une date d'expiration, on l'avait dépassé de loin. On était tous les deux un petit peu stressé parce que ça fait une petite semaine que j'ai faits parvenir ce courrier. Un courrier qui a été conclu par cette conversation que j'ai eue avec m 'man. Hors de question que cette maison redevienne insalubre, fantôme de son passé. De toute façon j'ai grandi, et le premier qui tente d'y pénétrer l'enceinte sera carbonisé sur place. Mais je ne suis pas tout le temps à la maison, et M'man commence à baliser à l'idée de se retrouver à la merci de potentiels bandits. Toujours silencieuse, ça commence à me préoccuper. J'ai terminé de monter la première étagère et m'en vais donc dans sa direction. Dos à elle, elle fait comme d'habitude. Mine que tout va bien, elle prendra même la peine de siffler quand j'arrive. Ha.
- Hey.
- Tout va bien, Flammèche.
- Tu pues l'inquiétude, j'préférais l'odeur de la peinture, tu vois.
- ...
Elle range son pinceau dans le pot. Et mets ses mains dans la poche centrale de son tablier. La tête baissée, j'aurai cru voir une enfant. Seule, démunie, impuissante. Mes bras autour d'elle, j'pose ma tête sur son épaule. J'avais déjà deviné c'qui lui arrivait.
- Père aussi me manque. Et aussi...
- Tais-toi, on avait convenu qu'on ne parlerai plus de ça.
- J'voulais juste dire que... Père serai content de savoir que sa maison a une deuxième vie, maintenant.
Tremblante, elle se retourne face à moi et enfonce sa tête dans le creux de mon torse. On passe tous les deux un cap. Celui du renouveau. Il est juste plus douloureux de le faire lorsque la famille est incomplète. Je serre l'étreinte brièvement puis j'relève son menton pour voir ses yeux, rouges et perlés de larmes.
- Tu sais qu'aujourd'hui on a de la visite, hein ?
- Oui, oui... Je vais aller préparer le thé. Tu crois qu'elle aimera le thé ?
- Tout le monde aime ton thé, m'man. Allez, dégage, j'vais faire un brin de ménage pour qu'elle puisse circuler dans la baraque.
Elle s'en va retirer son tablier et sort les ustensiles. Comme je disais, aujourd'hui on attend quelqu'un. J'ai connu son existence via de bouches à oreilles, une personne capable d'une magie étonnante. Moi qui pensait que cramer c'que je voulais me rendais la tâche facile, tu parles. Cette dame a un pouvoir au-delà de ça. Alors y a une semaine j'ai convenu d'un commun rendez-vous pour qu'elle puisse ramener ses miches directement ici, et voir c'qu'on peut faire pour que la maison soit "sécurisée" en plus d'être viable. Je m'attends à tout et à rien. M'enfin, j'inventerai pas son boulot c'est sur... Puisque cette fois-ci, je serai complètement inutile. Encore le matin, la saison Douce ramène sa tronche de plus en plus, les espaces verts de la capitale deviennent de plus en plus verdoyants et moi je me les caille moins du coup. J'ressens mon pouvoir grandir, vrai que pour l'instant je n'ai jamais ressenti une chose aussi enivrante. Ne jamais dire ça à Haru, elle m'égorgerait sinon. On ne s'est toujours pas vu depuis l'arrestation, peut-être qui lui faut du temps. En tout cas moi, j'en ai plus, entre ça mon boulot de chasseur et mon boulot pour la guilde, j'vais devoir me cloner si ça continue.
Alors que j'ai écarté les pots, cartons et autres bazar dans les coins des murs m'man revient avec la théière. J'rigole en devinant ce qu'elle veut.
- Arrête de rire et rends-toi utile !
- Ça va, ça va ... Ha !
Ma main sous le récipient, il faudra dix secondes avant que la théière en question siffle une fumé puis m'man reprend la tangente vers la cuisine. Elle prépare la nouvelle table, en posant des petits fours, son service à thé et des amuses-bouches. Prédatrice, elle me fixe en protégeant la pitance. J'lui coupe l'herbe sous le pied avant qu'elle ne sorte son discours de maîtresse de maison.
- Ca va, promis j'touche à rien.
Pour l'instant. Mon sourire va disparaître quand on toque à la porte. M'man me regarde, le stress monte chez elle mais pas chez moi. J'lui fais un signe de tête pour lui dire que ça va aller et j'me dévoue pour ouvrir la porte. Personne devant moi, puis j'baisse la tête quand je vois la petite demoiselle, les iris azur derrière un visage aux traits fins couvert par une petite capuche. Qui pourrai croire qu'une telle magie se cache dans une si petite chose ?
- Bonjour? Mademoiselle Gher j'présume ?
Plus qu'à espérer qu'elle ne flippe pas au vu de ma réputation. J'brûle des gens, mais je n'mords pas...
...Facile à comprendre non ?
Ce courrier est relativement bien tombé, je voulais me rendre à la Capitale pour faire un petit coucou à mon aventurière favorite et me rendre chez deux ou trois confrères pour acheter leurs derniers livres recensant leurs recherches. C’est important de se tenir au courant des dernières découvertes sur la magie et l’enchantement. Les enchanteurs de la Capitale sont plutôt prolifiques en la matière. Il faut dire que les clients ne manquent pas par ici, ils ont les moyens d’écrire et faire éditer leurs livres… Pas comme moi dans mon petit laboratoire à la Ville Aquatique. Cela pourrait changer bientôt, je l’espère même. Quant à savoir pourquoi ce client m’a contacté pour ce travail et non un des nombreux enchanteurs de la Capitale, c’est encore une autre affaire. Depuis que je me suis payé un pass pour les portails de téléportation, c’est plus simple de rejoindre la Capitale même c’est embêtant de devoir quand même prendre la navette entre la ville Aquatique et Grand Port… Quelques heures à la place de plusieurs jours, je ne dis pas non quand même. Cela me laissera plus de temps pour faire mon travail. L’échange de courrier était un peu évasif sur le sujet. Mon client a juste évoqué le besoin de renforcer une maison. Rien d’extraordinaire mais cela demande plus ou moins de travail selon son besoin… Une bonne discussion va s’imposer avant de commencer l’enchantement. Papier avec l’adresse en mains, je me dirige vers la maison où je dois exercer mon art. Arrivée, je constate que la maison est en plein travaux. Logique qu’il veuille renforcer tout ça maintenant. Je toque sans vraiment attendre. C’est un client, il est censé m’attendre. Un jeune homme m’accueille. Jeune homme de la taille d’une montagne plutôt. Je grimace un peu… Pourquoi faut-il que je me coltine un client au physique si proche de celui de cet enfoiré… Malgré tout, un client est un client.
En effet, monsieur Hidoru. Je viens pour votre enchantement.
L’air de rien, je commence à inspecter ce que je vois. La structure a l’air d’avoir eu besoin d’une sacré rénovation. Hidoru Jin m’invite à entrer. L’invitation s’accompagne de la proposition d’un thé pendant lequel on pourra discuter de mon travail. Je le suis profitant de l’occasion pour commencer vraiment mon analyse. Tout est presque neuf ici, c’est le bon moment pour faire de l’enchantement. La structure de la maison semble plutôt simple, à voir ce qu’il attend de moi. Arrivée à la table, je salue la femme qui sers le thé.
Bonjour, Madame. Merci à vous pour ce thé.
Je m’assoie sans plus de cérémonie. Je prend un biscuit en attendant ma tasse et questionne le jeune homme, assurément c’est avec lui que j’ai correspondu.
Vos courriers étaient plutôt évasifs concernant l’enchantement exacte que vous souhaitez pour cette demeure, que puis-je faire pour vous ?
Renforcer la structure pour résister à un assaut, à un pouvoir spécifique font partie des demandes relativement classiques. De temps en temps, on demande des sécurités contre les voleurs… Plein de choses sont possibles.
La donzelle rentre et aussi polie que mignonne salue m'man qui prépare les tasses de chacun. J'crois bien que c'est la première fois que je participe à ce genre de rendez-vous. Pas de primes, pas d'investigation, de recueils d'informations. Nope, que dalle. C'est presque gênant, ça doit sans doute se voir sur ma gueule, puisque là c'est n'est pas la garde qui vient avec des affiches de recherches, mais une personne avec qui je vais échanger sur ma propre vie et sur toutes les conneries qu'on a rencontré qui fait qu'on est obligé de rencontrer une personne de son calibre. M'man a la peau écarlate, complètement gênée aussi. J'sens qu'on va ramer. Elle la regarde taper un croc dans la bouffe comme si elle s'attendait à ce qu'elle régurgite le tout en l'insultant, mais évidemment, rien de tout ça. Elle profite de la bectance et du coup moi aussi. J'me retrousse les manches qui dévoilent certaines cicatrices de combat et dévore un biscuit en une seule bouchée. Ma mère sert les tasses, et Gher boit une gorgée attendant ma réponse. Je prends une grande inspiration. Au travail.
- Eh bien, comme vous l'avez sans doute constaté, on retape la piaule qui était en très mauvaise état depuis pas mal d'années depuis un événement assez...
Dégueulasse, injuste, merdique, une vraie saloperie.
- ... regrettable.
M'man tire la gueule et touille son verre. Paye ton ambiance. J'essais de pas en tenir compte et de reprendre la suite de c'que je disais.
- Hum, et donc, ma mère ici présente-
- Appelez-moi Miki.
Elle m'a coupée la parole en se présentant avec ton non confiant, c'est sorti beaucoup trop vite. Bizarre, jamais j'aurai pensé qu'une situation aussi simple la déstabiliserai. Un peu agacé, j'retente de poursuivre.
- ... Ma mère ici présente et moi-même aimerions éviter que ce genre d'incidents puissent se reproduire. Et j'ai appris que vous étiez la personne idéale pour ce genre de boulot.
J'essayais de parler poliment, mais on voit très bien que ce n'est pas quelque chose que je maîtrise, y a plus qu'a espéré qu'elle a bité au moins le sens des phrases qu'elle ramasse dans le pif. Vrai que je n'étais pas assez précis sur ce que je voulais faire exactement pour la baraque, sans doute parce que je ne sais pas de quoi elle est capable exactement. Ne voulant pas tourner autour du pot davantage, je prends une gorgée de thé pour faire plaisir à madame et me tourne à nouveau devant mon vis-à-vis.
- On aimerai que la maison soit renforcée aux attaques, magiques ou pas, et puis surtout...
Rien à dire de plus éloquent je ferme mon poing devant elle. Celui-ci prendra feu instantanément et illuminera la pièce comme le ferai un feu de camp. Le regard perdu dans mes cauchemars j'poursuis avec un ton un peu plus grave.
- Au feu...Mademoiselle Gher.
Pour éviter de calciner la nouvelle table et prendre une beigne de ma mère j'arrête ce petit spectacle et repose ma main sur le meuble. Les images de la mort de père et de l'état de la boutique après le passage de ses ordures ne m'ont jamais paru aussi limpides. En même temps en parler du sujet de la boutique fallait que je m'y prépare. Sachant que l'ambiance était loin d'une matinée crêpe, j'essaie de calmer le jeu.
- Désolé, ce rendez-vous nous fait resurgir pas mal démons qu'on essaie d'enterrer. Si vous avez besoin d'informations supplémentaires, hésitez pas à poser vos questions. On est là pour ça.
Tandis que je grignote un biscuit, le jeune homme commence à m’expliquer que la demeure est en cours de rénovation suite à un événement “regrettable”. Je ne cherche pas spécialement à avoir plus de détail, cela n'apporte rien à mon travail et ce n’est pas mes oignons. Même si je peux tout à fait imaginer la teneur de cet événement grâce au ton de Jin et la tension qui émane de mes deux interlocuteurs. Je souris doucement à la dénommée Miki essayant de paraître la plus chaleureuse possible pour la rassurer et faire baisser la tension que je sens dans l’air.
Enchantée de vous rencontrer Miki.
Je ne sais pas si elle est stressée par ma venue ici ou par la rénovation de cet endroit qui doit être plein de souvenirs agréable comme terribles… Sûrement un peu des deux. Le changement engendre presque toujours une certaine mélancolie. Cela m’a fait la même sensation lorsque j’ai déménagé mes affaires de mon ancien laboratoire vers le nouveau. Je reporte mon attention lorsque Jin reprend pour évoquer leur besoin de sécurité pour éviter de revivre les même événements que par le passé. Je comprend pourquoi ils ont été dirigé vers moi du coup. Mes runes d’enchantements global pour un bâtiment complet commencent à faire parler d’elles malgrés que je n’en réalise presque uniquement pour mes propres besoins.
En effet, je commence à comprendre pourquoi l’on vous a dirigé vers moi. J’aimerai avoir des informations sur les choses contre lesquelles vous souhaiteriez une sécurisation de votre demeure.
Renforcer une structure contre les affres du temps et des dégâts physiques est l’une de mes spécialités depuis le nombre d’années que je les emploient pour renforcer mon laboratoire. Ni une, ni deux, mon client me déballe la totale. Protection contre la magie et les assauts physiques… Aucune difficulté pour le second, nettement plus problématique pour premier… Le plus amusant vient de la suite de la liste et de la démonstration du jeune homme. Cela va être intéressant, une protection contre le feu. Je ne pourrais assurément pas ignifugé la maison entièrement mais je devrais pouvoir faire quelque chose pour eux. A la tête du jeune homme et de sa mère, je pressent que cette demande n’est anodine et même sûrement lié à l’événement regrettable qui a conduit à cette rénovation. Intuition confirmée par Jin qui m’invite tout de même à l’interroger si j’en éprouve le besoin.
Par rapport à ce que vous demander, j’ai tout d’abord quelques précision à vous apporter. Tout d’abord, il sera relativement aisé d’enchanter le bâtiment entier pour renforcer sa résistance mécanique aux affres du temps et autres assauts. En fonction des conditions d’exploitation, la rune peut néanmoins nécessiter un renforcement régulier. Cette demeure est-elle régulièrement prise pour cible ?
La rune de mon laboratoire nécessitait un renforcement presque tous les ans mais la structure était régulièrement mise à mal par mes échecs d’enchantements ou mes recherches. Si la demeure n’est pas plus sollicité que cela, un renforcement tous les dix ans devrait être suffisant.
D’un point de vue de la protection contre la magie, la situation est plus complexe. Renforcer la structure devrait être suffisant pour contrer nombres de magie pouvant affecter la structure générale mais il est impossible d’annuler complètement les effets de la magie ou de supprimer les pouvoirs comme la bulle protectrice du palais. Il m’est possible de renforcer spécifiquement les verrous, portes et fenêtres pour diminuer le risque d’effraction également.
Ce sont des choses standards, cela n'arrêtera pas un voleur obstiné mais cela lui compliquera assurément la tâche. Je doute qu’un voleur prennent le temps de forcer un verrou qui lui résiste au risque d’être repérer. Reste la problématique du feu…
Pour votre pouvoir, je ne vais pas pouvoir éliminer le risque que vous brûliez la maison. Toutefois, je peux augmenter la résistance de la maison à l'inflammation. Cela prendra plus de temps pour s’enflammer vous laissant le temps de réagir. Bien entendu, chaque meuble devra être également traité indépendamment en plus de la rune de la structure. Une protection absolue contre vos flammes seraient possible mais le coût n’en vaudrait pas la chandelle.
Ce genre de protection n’est réalisable que pour des personnes extrêmements riches comme la famille royale ou quelques nobles au fonds presque infinis… Fouillant dans mon sac sans fond pour retrouver mon carnet de note, je vérifie que cela leur convient toujours en plus de poser quelques questions.
Cela vous conviendrait-il ? Sera t-il possible de visiter la demeure dans le détail ? C’est un préalable nécessaire pour dessiner les runes de renforcement personnalisée. Des travaux sont-il a prévoir aujourd’hui ou puis-je travailler au calme ici pour la préparation ? Et pour finir, les runes vont devoir être tracée directement dans la matière, préférez-vous au sol ce qui peut aisément être cacher sous un tapis ou au mur ?
Je ne cache que rarement mes runes, j’apprécie leur ésthétique mais ce n’est assurément pas le cas de tout le monde. Et pour un bâtiment, la rune n’est pas minuscule. Pour cette maison, elle fera certainement un mètre de diamètre pour inclure la résistance physique et au feu.
Professionnelle, et ne manquant aucun détail, elle prend la parole pour me proposer les différents services qu'elle a dans son répertoire d'actions. Ouaw, c'était assez difficile de réaliser qu'une telle magie est possible, mais c'est le cas, et j'en ai le souffle coupé. J'sais que je ne pourrai pas rendre la maison invincible à toute effraction comme le palais, mais si on peut retarder l'échéance, ou avoir le temps de réagir grâce à ces protections, j'en suis le premier ravi. Il y a des choses à conserver, des vestiges de souvenirs qui méritent encore leurs places auprès de nous.
Dans tout les cas, mam'zelle Gher va devoir regarder la piaule pour se faire son avis et projeter ses futures idées.
- Ça m'va. Et toi m'man?
Elle pose rapidement son verre et cherche ses mots.
- O..Oui, vous êtes libre de visiter la maison, Jin vous guidera après le thé.
Nous restons quelques minutes, afin de profiter de la bectance et de terminer le thé de ma mère. J'en profite pour faire passer le temps sur son voyage, si tout s'est bien passé et tout le blabla pour faire défiler le temps agréablement et surtout pour que m'aman se calme une bonne fois pour toutes. C'qui va arriver, à la bonne heure. J'lui fais savoir que je suis fier d'elle du regard puis après avoir posé ma tasse de thé. Je me lève de ma chaise, talonné de Gher.
- J'vous invite à me suivre.
Je ne ferai que deux pas pour être au milieu de la pièce, difficile de reconnaître sa fonction avec tout le bazar autour. Mais c'était la pièce la plus grande de la baraque.
-Donc, ici vous vous trouvez dans la réception, c'est ici que j'accueille les clients pour discuter de la prime qu'ils veulent poser sur la tête de quelqu'un ou bien lorsque la garde se ramène pour m'emmener des affiches de recherches. Là où on a posé la table pour bouffer, tout à droite de la pièce lorsque vous entrez dans la maison, ça sera mon bureau. C'est l'endroit où je passerai le plus clair de mon temps. Suivez-moi maintenant.
On prend le couloir qui est au centre de la maison et présente deux portes de chaque côté.
- Sur la première porte à droite, c'est ma chambre, la deuxième la salle de bain et toilette. À gauche, c'est les archives de toutes les primes et autres affaires classées. La deuxième est dédiée à la chambre de ma mère, juste en face de la salle de bain du coup.
On continue d'avancer jusqu'au bout du couloir puis on arrive dans une pièce partagé en deux; une cuisine ouverte donnant sur un petit salon, plus intime.
- Vous arrivez à l'arrière boutique. C'est ici que m'man et moi-même restons pour être loin du travail. Il y'aura seulement la cuisine et un espace détente.
C'était les premières pièces entièrement restaurées pour qu'on puisse grailler à notre convenance. La cuisine était assez simple, il prenait l'angle sur le mur du fond et le mur de droite avec plusieurs placards qui donne sur la fenêtre pour évacuer les fumées et autres vapeurs. Katon était sur le canapé du petit salon - gauche du coup - a tapé un roupillon. J'me retourne vers Gher les mains dans les poches.
- Voilà. Ah, j'oubliais.
Effectivement la partie la plus importante de mon boulot. On remonte le couloir et j'sors un trousseau de clés. De toute, je saisis celle qui est dorée pour entrer dans les archives. D'un double tour, nous entrons dans la pièce moyennement grande, avec cinq casiers en long de chaque côté et un coffre dans le fond au centre du mur. Trois rouages à chiffres dont m'aman et moi-même connaissions le code. Il arrivait jusqu'à la hanche et une manivelle circulaire permettait de l'ouvrir. Tout le pognon d'Haru et le mien s'y trouvait, enfin c'qu'il en reste.
- Si on pouvait faire en sorte qu'on ne puisse pas l'ouvrir contre ma volonté. C'est la pièce la plus importante de la baraque. V'voyez...
J'prend un ton grave et nous enferme dans la pièce, un petit cristal de lumière tamise la pièce qui était plus obscure que les autres. Posé contre l'un des casier je jette un regard méfiant.
- ...Il est possible que la destruction de cet établissement avec moi à l'intérieur soit la convoitise de certains criminels qui m'en veuillent de les avoir enfermés en taule. J'suis pas très aimé des gens, vous savez. Et sa serai sympa pour moi et surtout ma mère qu'ils ne puissent pas arriver à leurs fins.
D'un signe de tête, j'ouvre la porte et nous retournons au salon.
- Voilà, la protection contre les flammes ne doit pas être forcément total, mais au moins que nous puissions intervenir. Même si normalement tout devrai bien se passé tant que je suis dans la maison. On peut vous laisser faire un tour. Voici la clé pour les archives.
La sortant du porte clé, je lui tend en main qu'elle saisit par ses dextres minuscules et agiles. M'man lit le journal, lunettes sur le nez et n'a pas l'air d'être parmi nous, sans doute qu'elle voulait trouver un moyen de s'extirper de ses mauvais tourments. La Reine était en première page, mes pensées vont vers Haru, encore une fois. Et surtout son corps contre le mien. D'une rapide secousse de la tête j'me tourne vers mon invité.
- Il y a autre chose que j'peux faire ?
Parfait, si les conditions explicitées leurs conviennent, je vais pouvoir me mettre au travail. Il y a pas mal de travail qui m’attend mine de rien. Je finis toutefois de prendre le thé avec mes hôtes pour discuter et essayer de les mettre un peu plus en confiance, surtout Miki qui semble avoir plus de mal que son fils. Une fois la discussion et le thé terminés, le jeune homme m’invite à le suivre pour une visite de la maison. Je prend le temps de sortir un calepin pour prendre quelques notes, en particulier la disposition des pièces et leur fonction principale, histoire de peut-être renforcé l’enchantement dans certaines pièces plus que d’autres… La structure de la maison est assez simple, la rune ne devrait pas être trop complexe à tracer, bien qu’il faille combiner deux magies… Alors que la visite s'achève, il prend le temps de revenir vers ses archives m’ouvrant la porte pour l’occasion afin de me demander un autre enchantement.
Protéger la serrure d’un coffre par un enchantement d’exclusivité est possible mais je n’ai malheureusement pas le matériel nécessaire avec moi. Il s’agit d’une manipulation assez lourde nécessitant un certain matériel que je n’ai qu’à mon laboratoire.
Pour un tel travail, il aurait fallu me prévenir à l’avance, j’aurai peut-être pu préparer quelque chose mais là, ce n’est pas possible. Puis revient le sujet des risques liés à son pouvoir et à de possible mauvaises intentions purement humaine.
Je ferais de mon mieux pour renforcer votre demeure. Si vous le souhaitez, je peux diminuer légèrement la puissance de l’enchantement pour renforcer bien plus cette pièce, elle pourra ainsi servir de refuge à votre mère en cas de besoin.
Avoir un fils chasseur de prime ne doit effectivement pas aider à vivre sereinement, je peux comprendre le besoin d’avoir un endroit où se réfugier en cas de besoin. Je n’ai pas supprimer les enchantements de mon ancien laboratoire accolée à ma maison en partie pour cela. Sait-on jamais, il est toujours utile d’avoir un bunker. Revenant jusqu’à la pièce principale, Jin accepte les conditions lié à la résistance au feu, il semble satisfait de gagner un délai pour protéger sa maison du feu qui l’anime ou que l’on pourrait employer contre eux. Je prend la clé tendue en souriant à mon client.
Je vais me mettre au travail pour créer la rune qui renforcera la structure globale dans un premier temps. Si vous pouviez libérer un espace de 2 mètres par 2 au centre de la pièce pour que j’y appose la rune une fois celle-ci prête, cela serait parfait. Je peux m’installer sur la table ?
Cela me fera largement assez d’espace pour travailler sans être gênée par du mobilier. Une fois l’autorisation de m’installer à ma guise obtenue, je m’installe sortant plusieurs livres, plume et autres. Même si ces runes adaptatives sont une de mes créations, il est toujours utile de prendre les anciens travaux en références pour la structure interne liée à une magie particulière. Faisant des aller-retours entre les livres et mon calepin, je construis petit à petit la rune. Par moment, je trace une partie de la rune dans l’air à l’aide de ma plume de lumière. Cela me permet de juger de la faisabilité d’un tracé à taille réelle, ce qui peut être bien différent du tracé sur papier… Grâce à l’organisation assez simple de la maison, la rune principale est prête après presque deux heures de travail. Il faudra encore construire les runes pour les verrous et les meubles principaux mais cela peut attendre que je finisse la rune principale. Quittant la table avec mon modèle, je m’adresse aux deux habitants des lieux.
Je vais tracer la rune, si possible, je vais vous demander de ne pas bouger pendant l’opération, le moindre défaut pour causer une réaction qui endommagerait significativement les fondations.
Evitons de leur dire que cela n’est que le cas le plus favorables et qu’il y a plus de chance que la maison soit juste pulvérisée…
Je vais utiliser une encre que j’ai mise au point, cela risque de fumer par moment, n’ayez aucune crainte, ce n’est pas dangereux.
Mes mises en garde faites, je pose mon modèle par terre au niveau de l’espace dégagé avant de récupérer le pot d’encre et une plume de shalupin dans mon sac. J’agite mon encre pour bien la mélanger en évaluant la quantité d’encre à ma disposition. Je risque de ne pas en avoir assez, il faudra que j’en prépare un peu après cette rune… A genou, je commence à dessiner les cercles concentriques de la rune. Au fur et à mesure que l’encre est déposée sur le sol, un léger fil de fumé s’en échappe tandis que l’encre creuse la matière pour imprimer le dessin définitivement. Dessiner la rune au sol est presque aussi long que de la préparer pour ne pas faire d’erreur et assurer le résultat correct. Mais lorsque je fini de tracer le glyphe d’activation, l’ensemble du motif se met à briller. Je sens le sol légèrement trembler tandis que la magie fait son oeuvre. Je prend le temps de refermer mon flacon puis de m’étirer laissant le temps à tous de se stabiliser. Après avoir rangé mon matériel, je me concentre sur mon pendentif pour m’ouvrir à sa magie et m’en imprégner. Mes pupilles prennent une teinte couleur ambre tandis que s’offre à moi l’image rémanente de la magie que je viens de créer. La structure principale est représentée par une sphère constituée de plusieurs rubans portant de nombreux symboles magique. Dans toute la pièce, de fines lignes brillantes circulent sur le sol et les murs marquant le renforcement global. Laissant couler la magie, je prend le temps d’inscrire l’image dans mon livre mémoire avant de la présenter à Jin.
Voici à quoi ressemble la magie de la rune lorsque l’on essaye de la visualiser. Comme vous pouvez le voir, elle couvre bien la totalité de la structure de la pièce.
Je me suis rendu compte que cela à un effet significatif sur mes client que je leur montre à quoi ressemble la magie quand on peut la voir, même s’ils ne la verront jamais eux-même. Alors que je montre le livre, mon ventre gargouille… Cela fait un moment que je suis sur cette rune, il doit largement être l’heure que j’aille me trouver de quoi manger un peu avant de reprendre.
Évidemment, sinon on m'engagerai pas pour traquer des cambrioleurs qui ont dévalisé des coffres réputés inviolables. J'acquiesce silencieusement de la tête, et me prépare à me faire tout petit pour la suite des événements. J'l'imagine déjà entrain de sortir des rayons lumineux de ses panards en récitant une langue inconnue en augmentant les chances que j'finisse aveugle si je zyeute un peu trop longtemps dans sa direction. À son explication, je comprends que l'enchantement serait quantifiable et que se concentrer un peu plus sur la salle des archives - la plus précieuse finalement - sera protégée davantage. Il fallait faire des choix, et j'peux pas me permettre de perdre tout ce pognon si tout s'effondre. Comme a dit la donzelle, ça sera aussi le dernier repli pour m'man si sa part en cacahuète. L'envisager, me serre déjà la poitrine. Avec sa douce et petite voix elle me propose de commencer les hostilités en libérant la table ainsi qu'un espace vraisemblablement nécessaire pour commencer l'opération. En bon p'tit soldat et parce qu'évidemment j'bite rien à ce qu'elle fout je m’exécute, aidé par ma mère en récupérant le service et les autres assiettes. Ce sera remplacé par une tonne de livres. Étant pas le pro' de la lecture, j'abandonne assez vite à l'idée de lire les intitulés, et aussi parce que j'ai la flemme.
- Installez-vous mam'zelle, faites comme chez vous.
Comme j'avais fais un peu de ménage pour libérer la pièce, il y a assez d'espace pour qu'elle puisse bosser. Curieux, j'prends une chaise, m'assied, et contemple son travail en n'espérant pas la déranger. J'me prends d'une certaine fascination, ses iris bleus survoler le bouquin à une vitesse folle, toujours aussi agile, sa main danse en même temps sur un petit carnet. On avait l'impression que rien d'autre existait à part sa petite bulle; la création de quelque chose qui me dépasse complètement. Par moments elle utilisait une plume de lumière, j'en ai une mais je ne l'ai jamais utilisé. Comme un sale gamin, mon sourire me trahi de plus en plus, assis en califourchon sur la chaise les bras croisés sous le menton, posé sur le dossier. Comme le début d'une chorégraphie, j'profite du spectacle. Intrigante, fascinante, magique, sont les adjectifs qui constituent cette petite demoiselle qui a l'air de connaitre son travail sur le bout des doigts. J'avais envie de la bombarder de questions, curieux de tout savoir comme d'habitude. M'man était adossé au mur, jouant avec ses doigts pour évacuer le stress, le regard perturbé par ce phénomène ô combien singulier pour nous, les débiles de la Capitale.
La nana s'interrompt, et porte son croquis jusqu'au centre de la pièce. On se regarde avec m'man lorsqu'elle nous parle des enjeux de la construction de la rune et des conséquences qui peuvent avoir si on moufte un peu trop de l'arrière-train. Silencieusement, comme si nos voix pouvaient déstabiliser l'opération, nous acceptons évidemment les consignes de Gher. Dire que je n'avais pas d'appréhension serai mentir. Mais son calme et son professionnalisme me réconfortent un peu. Elle dirai pas des conneries pour nous faire flipper quand même? Effectivement de la fumée crache pendant qu'elle dessine ses cercles sur le sol, genoux à terre. J'hausse un sourcil, essayant de biter au moins un Brock de c'que j'vois comme un apprenti enchanteur qui découvre le métier. Et évidemment....
... J'comprend quedalle.
La rune commence à briller, j'me crispe. Je sens le stress de ma mère prendre la totalité de la pièce comme si on s'en prenait à l'un de ses enfants ou pire, sa nouvelle collection de tasses de thé. Tout était neuf et on pige rien à ce qui se passe. Elle poussera un cri de sursaut quand le sol se met à trembler.
- Qu'est-ce qui se passe?!
- Tout va bien, m'man.
En vrai dire j'en savais rien, mais qui dit magie puissante, dit aussi réaction puissante. Mes yeux vont ensuite se perdre dans ceux d'eux l'enchanteresse, ambre, mystique. J'vais me perdre dans certains souvenirs me déconnectant un peu de la situation. Mais brièvement cependant, cette rune posée va ruisseler telle une source infinie de magie partout dans la baraque. Et elle nous demande de pas bouger?! Prenant sur moi, j'm'accroche à la chaise comme je peux pour éviter de faire une connerie.
Lorsqu'elle se relève, j'conclus qu'on peut enfin bouger et m'en vais la rejoindre. Tenant son bouquin j'zyeute la rune en question. Il était alors difficile de me retenir:
- Bordel de merde c'est fascinant.
M'man reste sans voix, derrière mon épaule à contempler ce truc sur la page. Et dans ce moment de fascination et de silence, un ventre gargouille au milieu. J'hausse un sourcil à notre invitée avant de sourire. On est vraiment des sauvages de faire bosser des gens sans bouffer. Miki Hidoru lira dans pensées encore une fois.
- Oh ! Mais vous avez faim ?! Allons dans le salon, je vais préparer quelque chose.
N'osant dire un mot, mais voyant bien que la fringale est écris sur son visage, j'affiche un sourire carnassier alors que mon regard brûlant n'a toujours pas quitter l'océan qui se trouve dans ses yeux.
- On mange quoi m'man? Que j'dis, malicieux.
- Des pommes de terre fondantes cuites dans un bouillon, et ensuite gratinées à la crème d'oignon doux et au fromage avec des tranches de jambon cru ! Allez vous installer, je m'occupe de tout. Attention à Katon il dort encore sur le canapé.
- Bien reçu. Alors, demoiselle Gher?
J'en salive déjà. Sa pupille se dilate et sa bouche s'ouvre à moitié. D'un signe de la main vers le couloir je lui indique de s'installer et ne s'en privera pas pendant que je la talonne. M'man était déjà en cuisine, préparant déjà le repas. Ouvrant le four en terre cuite, elle en extirpe deux brioches chaudes pour ne pas mettre notre mal en patience. Katon se lève, salivant déjà tout comme nous, installé sur un canapé d'angle, neuf comme tout le reste et avec une table basse sur un tapis acheté à la place commerçante. Au milieu de la pièce, une table, neuve également avec quatre chaises de chaque côté, et une chaise en début et en fin de table. J'lui propose de s’asseoir, en mettant sous son nez l'assiette qui propose la viennoiserie chaude. Le pain est doux, moelleux, réconfortant.
~~~
Un peu plus tard, le repas est enfin servi, l'odeur des patates, du fromage et de la charcuterie vont baigner dans la pièce pour notre plus grand bonheur. Gher ne se fera pas attendre attaquant la bouffe comme si la famine l'avait ravagée. D'un rire nerveux, j'me sert avec le pichet un verre de pinard.
- On peut dire que c'était pas une fringale de pacotille. Ça vous pompe de l'énergie ce genre d'intervention j'présume? J'espère qu'on vous a pas mis en danger.
Et pis un cadavre de jeune donzelle dans mon salon tout neuf, sa gêne surtout.
Le moment où la magie se met en place est toujours impressionnant pour des personnes qui n’y sont pas habituées. Miki semble même avoir un peu eu peur pendant un instant avant que son fils n’essaye de la rassurer. Il n’y a véritablement rien à craindre, je suis sûre de mon coup mais cela est une chose qu’ils ignorent. Profitant d’un petit instant, je profite de ma dernière création pour recréer une image de la magie et la montrer à mes clients qui manifestent un certain enthousiasme en voyant cette représentation. Seul ombre au tableau, mon ventre qui gargouille me faisant rougir. Miki réagit immédiatement en annonçant qu’elle va préparer un petit quelque chose pour manger.
Ne vous embêter pas, je …
Jin coupe court à mes protestations en demandant le menu à sa mère. Rougissante, j’accepte finalement leur proposition de manger avec eux. Ce n’est pas dans mes habitudes de m’imposer ainsi à la table de mes clients, premièrement parce que c’est eux qui viennent chez moi généralement, et aussi parce qu’ils ne prévoient que rarement cela. Je suis le jeune homme jusqu’à la cuisine et m’installe comme lui à la table sans trop savoir si je dois proposer mon aide ou non à Miki. Je ne sais jamais si je vais insulter la maîtresse de maison ou non en proposant mon aide… J’avise le glooby aux couleurs de feu qui se réveille à l’arrivée de la nourriture. Sûr qu’il s’entendrai bien avec Misuto, aussi gourmand que lui.
Après un bon repas nécessaire, Jin m’interroge sur l’énergie que me prend l’enchantement des objets. Je lui souris un peu gênée de sa sollicitude avant de lui répondre.
L’enchantement en lui même, rien du tout. Le plus fatiguant est de garder une bonne concentration le temps de construire la rune puis de la dessiner. Une erreur est vite arrivée et ne pardonne pas quand l’on travaille avec la magie. Plus la rune est grande, plus cela est fatiguant car il faut plus de temps pour la dessiner sur l’objet.
Beaucoup de personnes sous-estime l’énergie que cela prend de se concentrer autant parfois pendant plusieurs heures… Ne pas manger le matin avant de partir pour travailler aussi il faut dire. Le repas terminé, je m’excuse auprès de Jin et Miki.
Je vais vous laisser pendant une petite heure, avant de continuer, je dois aller faire quelques achats pour refaire de l’encre permettant le tracé des runes magiques. La rune principale a consommée plus d’encre que je le pensait.
Il est toujours délicat d’estimer avec précision quelle quantité d’un produit va être employée avant d’arriver sur le chantier… En personnalisant la rune, la quantité d’encre augmente drastiquement avec la complexité du plan. Saluant mes clients, je leur propose de préparer le terrain pour la suite des travaux d’enchantements.
Avant mon retour, je vous propose de réfléchir aux meubles que vous souhaitez absolument renforcer contre le feu. Cela nous fera gagner un temps précieux si vous pouviez y réfléchir dès maintenant.
Je tracerai les runes à la chaîne et nous en finirons plus vite ainsi. Je m’incline devant mes clients avant de les abandonner pour quelques emplettes. Fruits d’Ambrosia, sang d’anguilles abyssales ne sont qu’une fraction des ingrédients nécessaires que j'achète dans diverses petites échoppes de la Capitale. Revenu chez les Hidoru, je m’installe à l’extérieur pour préparer ma mixture. Usant de mon petit foyer que j’emporte partout, je chauffe les ingrédients liquides avant d’ajouter un à un les ingrédients solides. Un épais filet de fumée à l’odeur âcre s’échappe pendant un moment, d’où le fait de m’installer à l’extérieur. Pour finir, je filtre le tout pour mettre uniquement la partie liquide en flacon. Revenant à l’intérieur avec mon flacon, je laisse le reste refroidir à l’extérieur.
L’encre est prête, nous pouvons reprendre. Je propose de commencer par les meubles, il va falloir les manipuler histoire de cacher la rune pour l’esthétique.
Je finirais par le travail sur les verrous qui nécessite moins de manipulation.
La p'tite donzelle part faire ses courses et on se retrouve que tous les deux avec Katon dans le salon. La pression retombe, traduite par un long soupir de m'man qui part s'asseoir sur le canapé. On a une petite heure pour discuter et se mettre d'accord sur les meubles à protéger en priorité. J'nous sers deux verres de vin puis les posent sur la table basse avant de la rejoindre à ses côtés. En faisant une flamme avec mon index, Katon se précipite dessus pour la regarder indéfiniment. Fin du spectacle, j'me retourne vers ma mère qui avait déjà bu le verre cul sec. Un peu découragé de savoir c'qui va pas, je lui fais savoir.
- Bon, qu'est-ce qui se passe.
- C'est ... compliqué, Jin.
Quand elle m'appelle par mon prénom, c'est que ça va pas du tout.
- C'est quoi qui est compliqué? M'man écoutes, la maison va redevenir aussi belle qu'elle le fut autrefois, on a une personne qui est capable de la protéger des infractions avec une protection renforcée pour la salle des archives. J'ai beau chercher j'pige pas pourq-
- J'ai peur Jin !!!
Sa voix raisonne dans toute la pièce. Katon se glisse derrière mon dos, un peu flippé du hurlement en question. Elle me détourne le regard puis pose ses yeux dans le fond de son verre, vide.
- Quand ces gens sont arrivés, ils m'ont tout prit. Notre argent, nos trésors ramenés par ton père. Et puis ton père. Et ensuite c'est ta sœur qui disparaît.
Elle qui m'avait juré de plus parlé de Nara, j'en avais presque l'impression qu'elle n'avait jamais existé. Mon cœur tabasse ma poitrine, mais j'reste silencieux.
- J'ai peur de tout perdre à nouveau. Tout ce que nous avons construis.
D'un geste réconfortant, j'essuie ses larmes à l'aide de mon pouce avant de dégager sa frange devant ses yeux. D'un ton grave et blindé, mes yeux deviennent incandescents avant de prendre la parole.
- Les choses ont changées. Père n'est plus là, mais moi j'suis là. Et aux dernières nouvelles je fais parti des personnes les plus plus dangereuses pour le quartier, la résidence, la ville. Aucune personne n'en sortira indemne de la maison si ils tentent quoi que ce soit qui peut te nuire ou nuire notre chez nous.
Un peu rassurée, elle relâche pression, et pose sa main sur mon genou.
- Et pour Nara, je recommencerai les recherches quand la maison sera terminé.
- Jin, non...
- Ce n'était pas une proposition, maman. Je la retrouverai et la ramènerai ici.
Elle me prend dans ses bras, se lovant dans mon cou alors que je serre l'étreinte. Ça fait des années qu'on ne l'a pas vue. J'me demande si elle est vivante ou non. Ce que je sais en revanche c'est que c'est une Hidoru, et les Hidoru sont débrouillards. Ses mains derrière mon dos, elle empoigne ma chemise de toutes ses forces, crispée d'une douleur inconsolable dans sa poitrine.
- Elle me manque tellement, Jin.
- A moi aussi.
Nara, on a fait les 400 coups ensemble. Puis tout bêtement parce que père m'emmenait à l'aventure avec lui - sans elle - on a commencé à ne plus se parler. Ce n'est pas faute d'avoir proposé à père de nous accompagner. Mais il a toujours refusé. Une erreur de sa part ? Possible, mais le rendre coupable ne change rien à la situation. Aryon n'est pas si grand que ça, et je jure de la retrouver. Dans cette vie ou dans l'autre. On reste une bonne minute, l'un contre l'autre, lui laissant le temps de se remettre de ses émotions et embrayer la mission que Gher nous a confié. Elle s'écarte doucement de moi, et d'une main sur l'épaule je lui affiche un sourire chaleureux.
- Allez, on a une mission maintenant, j'ai affronté pas mal de choses assez dangereuses, c'est pas des meubles qui vont nous faire trembler si ?
- Haha... Tu as raison, Flammèche.
Voilà qui est mieux. Avec plus de courage et d'entrain, on se met au boulot. Le poing sous le menton, on réfléchit aux meubles qui doit être protégé en premier lieu. Mon estomac me dit la cuisine, ma fainéantise me dit mon lit et mon avarice me dit le bureau. Il y aussi le placard à médocs dans la salle de bain, et le placard de m'man qui contient pleins de souvenirs. Des affaires père, de Nara, des photos de famille. Un grand merdier que mère ne veut pas se séparer, ce que j'comprends bien entendu. En revenant dans la première pièce j'vois Gher, revenue de sa course et prépare un curieux truc. Une grosse fumée se balade au-dessus du récipient, même moi qui connais très bien les fumées - pour cause mon pouvoir - ça ne me dit rien qui vaille. Elle entre avec un flacon et m'man retrouve sa joie d'antan en l'accueillant comme il se doit. L'enchanteresse ajoute qu'il faudra manipuler les meubles pour éviter d'avoir une rune au milieu d'un meuble qui pourrait ruiner l'esthétique. Bon, au travail !
- Bon j'vais devoir porter les meubles, j'imagine.
- Allez, rends toi utile pour notre invitée !
- Tu vas m'aider j'te signal.
- Moi ? Ta pauvre et vieille mère ?...
- Arrêtes avec tes salades.
- Grr ! On a qu'a commencer par la salle de bain, le placard et fixé au mur. Il n'y a donc pas besoin de faire quoi que ce soit.
- Feignasse.
- Silence.
Alors qu'elle s'occupait de l'enchantement, je poursuis en levant les lits pour que les runes soient faites en dessous ou bien derrière la tête de lit. Même chose pour les placards que je pivote pour permettre de poser une protection sur le dos. Pour le bureau, faudra que je le couche sur le côté pour qu'elle puisse fabriquer la rune et passer en dessous. Faut dire que déplacer tout ce bazar était un peu fatigant. J'm'en vais revoir Gher, pour lui parler de la cuisine.
- Pour la cuisine, comme les meubles sont fixés, faudra réfléchir à la question. Cela vous convient ? Ménagez-vous surtout.
Ouais, parce que maintenant que je l'ai vue à l'oeuvre, je sais qu'elle bosse comme une acharnée. J'aimerai éviter qu'elle nous fasse une syncope dans la foulée.
Mon retour armé d’une fiole pleine de mon encre magique se fait au meilleur moment. Mes hôtes semblent être arrivés à se mettre d’accord sur les meubles qu’ils souhaitent protéger. Et au moins, Miki semble de bien meilleure humeur au point de se moquer de son fils qui va devoir jouer de ses muscles pour m’aider. Cela me fait rire, c’est une situation qui fait monter un brin de jalousie en moi. J’aurai aimée pouvoir batailler ainsi avec ma propre mère… Mais ça, c’est une chose qui n’arrivera certainement jamais. Après avoir acquiescé à la proposition de commencer par la salle de bain, je suis le jeune homme après avoir pris un de mes pinceaux, un pinceau fin pour tracer les plus petites runes possibles. Cela n’est qu’une longue opération sans grand intérêt que de tracer mes runes augmentant la résistance au feu, le tout à la chaîne. La rune est relativement simple à tracer pour une “enchanteresse géniale” comme moi. Cela est juste long et sûrement plus fatiguant pour Jin qui manipule les meubles uns à uns. Il travaille d’arrache-pied pour préparer les meubles puis les remettre en place une fois la rune tracée. Lorsqu’il revient vers moi après être passé dans la cuisine pour la préparation pour me faire part de la situation et s’enquérir de ma fatigue.
Je peux tracer la rune à l’intérieur, cela fonctionnera tout aussi bien. J'essaierai de les placer dans un coin peu visible pour les cacher au maximum.
Cela ne sera pas forcément simple dans certains cas mais cela ne sera pas impossible avec un peu de persévérance.
Tout va bien pour moi Jin. C’est vous qui avez le travail le plus physique pour le moment. Faites une pause pendant que je fini ces runes dans la cuisine, c’est la dernière pièce après tout.
Après cela, les serrures ne seront qu’une formalité permettant de conclure mon travail. Finissant la dernière rune de la chambre de Miki, je passe dans la cuisine pour continuer. Dans cette pièce, tracer les runes est une entreprise moins aisée nécessitant souplesse et dextérité. A elle seule, cette pièce me prend autant de temps que le reste de la maison. Une fois cette partie du travail terminé, je reviens vers la pièce principale prête à continuer mon oeuvre.
Voilà qui termine la protection contre le feu de votre demeure. Je sais que cela vous paraît très abstrait mais croyez-moi, c’est efficace.
Je me dépèche de finir mes quelques tracés pour augmenter un peu la résistance des verrous. Cela va les rendre plus dur à ouvrir mais cela rassurera les deux habitants. Portes, fenêtres… Les runes sont tracées en une petite dizaine de minutes. Finalement, je range mes différents outils et livres dans mon sac-sans-fond tout en discutant avec Jin et sa mère.
Et voilà, je ne pense pas qu’il soit possible de faire mieux sans dépenser une fortune pour un gain ridicule. Vous voulez peut-être faire un test des runes ralentissant la combustion des meubles ou de celles renforçant les verrous ?
Les clients aiment tester les enchantements, cela les rends plus réels pour eux. Je peux comprendre ce besoin de ressentir les effets d’une magie qu’ils ne peuvent voir auparavant.
Pour ce travail, ma prestation s’élève à 200 cristaux gris pour les divers enchantements réalisés.
Un coût relativement limité compte tenu du nombre de runes tracées dans la maison. Disons que je fais un prix vu la quantité et le fait que cela me donne une excuse pour aller voir Carciphona.
Il se passe des heures, et j'vois bien que la cuisine était la partie délicate du boulot. Mais la p'tite donzelle se dégonfle pas et n'hésite pas à se surmener pour arriver au bout de la manœuvre. Quand bien même malgré cela elle me demande de faire gaffe à mon tour. C'était presque attachant, les bonnes et les mauvaises personnes, je les remarque. Pas besoin de la côtoyer davantage pour dire qu'elle fait partie du bon camp. Petite, toute menue, mais elle en a sous le capot. Écoutant son dernier conseil, j'souffle un coup en allant chercher un verre d'eau tandis qu'elle termine son chantier magique. Chantier magique, j'pensais pas dire ça un jour tiens, hé. M'absentant dans l'autre pièce, Sa Majesté Miki Hidoru n'en fout toujours pas une. Ne voulant pas se sentir coupable, nageant dans le déni profond, elle claque le journal en tournant une page et remonte ses lunettes.
- J'ai fais à manger, je te signal.
- J'ai rien dis.
- Oui, mais tu penses fort.
- C'est toi qui le dis.
- Zut, Flammèche.
- Non.
- Zut, deux fois. Alors?
- C'est bientôt terminé, de c'que j'ai compris.
Gher revient et nous assure que l'enchantement contre le feu est enfin terminé, vrai que c'est abstrait et de se dire que des dessins gravés sur le plancher ou derrière les tiroirs pourraient protéger la baraque des incendies intempestifs. Mais soit, j'lui fais une confiance aveugle et sa réputation n'est pas fondé sur de simples spéculations ou arnaques, sa carrière ne serait pas aussi pérenne et j'aurai vu le truc arrivé. Ou pas, enfaîte? D'un signe de tête satisfait, je la laissais retourner au travail, avec malheureusement l'impuissance de faire que ce soit pour le moment. Porte après portes, fenêtre après fenêtre, elle fait opérer son pouvoir d'un doigt de fée et d'une précision chirurgicale. C'est complètement dingue, je m'en lasserai jamais de la reluquer bosser. D'ailleurs ça fait déjà une bonne partie de la journée qu'elle est là ! Finalement la dernière intervention fut la plus rapide par rapport à tout ce qu'elle a entrepris et reviens vers la table qui lui a servi d'établi jusque-là. Elle récupère ses affaires, range précautionneusement ses outils et encore une fois, j'me contente d'observer.
Et c'est là qu'on arrive à la partie plaisante. Le test.
D'un sourire d'enfant voulant faire une bêtise, j'me rapproche d'un des murs de la pièce. J'respire, m'attendant au pire, tandis que m'man croise les bras sous sa poitrine tapant du pied nerveusement. Gher n'affiche pas le moindre doute et reste aussi impassible qu'on le peut être. Ma main ouverte, elle prend entièrement feu. La rapprochant doucement vers le mur j'attends quelques secondes. À cette température, une tache noire de cramée devait déjà apparaître.
Mais rien, quedalle.
- Génial...
Éteignant la flamme d'un revers de la main, j'me retourne vers notre prestataire à qui je peux lui être entièrement reconnaissant. Enfaîte non, techniquement j'lui dois du pognon. Et la facture est plutôt copieuse. L'investissement d'Haru ainsi que mes économies rentrent fort heureusement dans le devis demandé par l'intervenante. Rester plus qu'à rincer.
- Bougez pas, j'ramène votre pognon.
Retournant dans la salle des archives, j'tente de forcer l'entrée. Génial. De plus en plus satisfait j'récupère la clé dans mon trousseau et m'en vais récupérer l'argent. Le coffre est devenu beaucoup plus léger d'un coup. Faudra le remplir à nouveau. Mais j'devrai bientôt partir en mission avec Mad' incessamment sous peu. Faudra juste se serrer la ceinture, quoi. Fièrement, avec la bourse en main j'dépose son dû dans les mains de notre invitée.
- Beau boulot. Au plaisir de vous revoir. Si jamais vous passez à la guilde, j'y serai peut-être. Sinon hésitez pas à revenir si vous avez besoin de mes services. J'vous le souhaite pas, quand même.
En général, quand on m'appelle c'est que ça ne va pas du tout. Elle me répond d'une petite révérence que m'man et moi-même retournons de la même manière. Lui ouvrant la porte désormais, elle quitte le Bureau de Primes sans trop de cérémonies. Fermant le battant derrière elle, j'me retourne devant ma marâtre et tendre mère avec qui j'ai envie d'être un calvaire ce soir:
- Jin !!
- C'est bon, ça va... j'ai compris.