Après cette mission de chercher un oréouille pour la Première Ministre, la capitaine Dorago m’a explicitement dit que je devais patrouiller vers la place commerçante pour surveiller les environs. Donc je le fais, mon épée double dans le dos, Lucy à mes pieds prête également, je quitte le bastion de l'Île Rocheuse. Le temps était clément et finalement, c’est peut-être une bonne idée de quitter la caserne pour la journée. Je fais un petit crochet chez ma mère qui habite non loin. La maisonnée n’a pas bougé depuis que je suis toute petite et je rentre en m’annonçant à ma mère. Elle avait la cinquantaine passée, elle avait toujours le charme de sa jeunesse. De longs cheveux blonds, elle s’amuse toujours à mettre une sorte de couronne sur la tête avec quelques fleurs, sa tenue était élégante pour une citoyenne de la ville. Mon père, le feu Saphir Hellsen, avait eu de nombreux cadeaux pour ses quêtes. Des nobles lui ont donné de nombreuses toilettes pour ma mère et depuis elle ne les quittent plus. Ce qu’on pouvait retenir de ma mère Kaïa ? Sa gentillesse, sa spontanéité et sa discrétion. Elle était beaucoup appréciée dans le quartier et même si beaucoup ont pensé que je serai aventurier plus tard pour suivre les traces de mon père, personne n’aurait douté que je serai au service de sa Majesté. J’embrasse alors ma mère et lui fait une accolade chaleureuse quand je la retrouve dans la cuisine.

-  Bonjour Maman !  
- Oh Bridget ! Qu’est-ce que tu fais ici ?
- Je dois patrouiller à la place commerçante et j’en profite pour faire un petit détour à la maison.  
- Je vois et ta petite Lucy a encore grandi !

Ma catosorus saute dans les jambes de ma mère et réclame quelques caresses.

- J’ai surtout un problème pour la rendre féroce !  
- Tu sais quand on voit la maîtresse, c’est difficile de croire que tu es une terrible guerrière !
- Tu ne m’as jamais vu sur le front à Forteresse. Ici, c’est bien différent, c’est calme et...  
- Moins dangereux ! Tu sais… je suis contente que tu restes ici.
-  Je sais Maman. Je ne veux pas finir comme la Capitaine Van Andrasil.
- Ce qui est arrivé à ta camarade Elina… c’est le risque de ton travail. Elle a fait ça pour vous protéger. Tu aurais fait pareil.
- Oui… C’est vrai mais je ne me sens pas l’âme de devenir Capitaine !    
- Reste Lieutenant comme tu l’as choisi et va patrouiller dans la ville, elle ne sera que plus sûre !
- Tu me mets à la porte ?    
- C’est ça, allez va travailler. On se retrouve à notre repas hebdomadaire.
-  Oui, oui, je m’en vais !  

Je l’embrasse une dernière fois sur la joue pour quitter la maison et retrouver le chemin de la place commerçante. Je fais quelques salutations à des amies à ma mère. Ici, tout le monde se connaissait et par défaut moi aussi. Plutôt reconnaissable de mon armure légère, ma longue chevelure, l’épée et maintenant le Catosorus. Je passe devant la boulangerie et je sens la douce odeur de brioche à la cannelle. Bon allez un petit détour, ça ne fait pas de mal ! Je rentre dans la boutique, commande deux brioches et paye à la vendeuse avant de ressortir la bouche déjà pleine.

La suite fut calme, aucun trouble et j’arrive enfin sur la place commerçante. C’était bientôt l’heure de pointe et l’odeur de nourriture émane entre les étales D’ailleurs au stand de brochettes de Gloot, il y a une file d’attente monstrueuse. La viande serait très tendre malgré la débilité de l’animal. Je n’ai jamais eu le courage d’attendre pour goûter. Je passe dans d’autres allées quand soudain j’entends un appel à l’aide. Je cours en direction de la voix quand je trouve une dame élégante par terre, hurlant au vol. Je me redresse et trouve la voleuse possible.

- Lucy ! On y va.  

Je suis la jeune femme blonde à la tenue violette. Je bouscule de nombreuses personnes sur la route. Les gens s’écartent quand j’hurle de se pousser. Le bruit de mon armure fait même fuir certains mais j’ai l’impression de ne jamais réussir à rattraper mon retard. Elle essaye de quitter la place centrale et part dans l’une des rues. Je la poursuis encore et encore…

- ARRETEZ-VOUS ! C’est un ordre !  

Mais comme simple réponse, elle continue de courir. Moi qui manquait de sports… je suis servie !

La voleuse avait de bonnes jambes et la perspective de l’attraper me fait sourire plus que je le devrais. Elle ne compte pas se laisser faire aussi facilement et ça rend le challenge plus attrayant. Un peu de sport ne me ferait pas de mal et pour Lucy également. J’avoue que je ne m’étais pas préparé pour une telle activité et mon armure n’est pas la plus adaptée. Mon catosorus était dans mon dos, elle n’arrivait pas à se faufiler entre les jambes des passants sans se faire écraser, elle était encore petite.

La blonde renverse quelques poubelles sur le parcours, l’odeur était infect et je pose directement ma main contre mon nez. Il faudrait sincèrement revoir le système de collecte par ici. Je saute par dessus l’obstacle et continue ma chasse. Elle comptait me faire tourner en rond combien de temps. Je tombe sur mes hommes en train de régler un autre problème.

- Poussez-vous !  
- Mais Lieutenant !
- Poussez-vous je vous dis !  

Puis les voilà qui s’écartent devant moi et j’entends une autre voix au loin.

-  Black, venez avec moi, les deux autres, prenez l’autre direction.

On arrive devant le vendeur qui hurle qu’une femme lui a volé un foulard. Elle compte se faire une garde-robe maintenant en plus de son ventre ? Si j’avais mon arbalète, ça ferait longtemps que j’aurai lancé un carreau de foudre pour l’arrêter ou même un piège mais avec les autres personnes autour, je pourrai faire plus de dégâts autre chose.

- On ne doit pas la laisser plus d’avance, Black. Du nerf !  
- Je fais ce que je peux, mon Lieutenant !
- C’est pas assez !  

Je vois sa silhouette tournée à droite et prenons le même chemin. Je compte sur mon autre groupe pour qu’on l’attrape en tenaille. J’attrape ma lame retour qui était dans la petite besace dans mon dos et vise au loin, le câble avec du linge. Par chance, il pourrait se casser et la gêner dans sa course. Lame retour dans la main, je vise au mieux les câbles. Le couteau arrive à toucher l’un d’entre eux (Dé : Oui) et une longue ligne de vêtements tombe sur la fuyarde. Je sais que ça la ralentit qu’un peu mais je continue encore de lui courir après.

-  Mais arrêtez vous !

Comme si elle allait se rendre aussi facilement… Ma lame revient aussitôt dans ma main et je saute par dessus les vêtements tombés au sol. Lucy fait des zigzags sur le sol et accélère presque pour essayer de mordre le mollet de la femme.

Des tonneaux nous foncent droit dessus, j’essaye tant bien que mal à esquiver l’un des tonneaux que je me prends l’autre qui se trouvait juste derrière en plein dans le genou me faisant tomber au sol. (dé : Non). Mains à terre pour éviter de m’éclater le nez au sol, je vois sa silhouette prendre encore plus de l’avance et folle de rage, je finis par me relever cassant le tonneau proche de moi.

- Elle va me le payer cette maudite femme...  
- Lieutenant, mais elle est trop loin maintenant
- Bougez-vous, tant qu’elle n’a pas quitté la ville, on la poursuit quoi qu’il arrive.  
- Okay…

De nouveau sur mes jambes, je pars à sa poursuite encore et encore. Je choisis un autre raccourci pour essayer de la prendre à revers. Elle se croit maligne mais je vis ici depuis des années et ce n’est pas à moi qu’on va me faire ces coups-là, j’ai aussi mes atouts dans ma manche. J’attrape le cristal de communication et appelle l’officier Pesquet, je me concentre quelques secondes, pense à mon second et celui-ci attrape rapidement mon esprit.

- Pesquet, prenez une escouade et direction la place commerçante.  
- La cible ?
- Une jeune femme blonde, tenue violette, grande.  
- Ça ne m’aide pas beaucoup.
- Allez au nord de la place commerçante, faites des binômes, vous allez finir par nous trouver mais aussi la fugitive.  
- Nous arrivons alors.

Du soutien, voilà ce qui me manquait avec une dizaine de personnes en plus sur elle, nous allons peut-être l’attraper. Elle ne me nargue depuis tout à l’heure mais elle ne sait pas sur qui elle est tombée. Je débouche sur un autre grand axe quand je retrouve la femme qui essaye de prendre d’autres vêtements pour la confondre.

- Elle est là !  

Prenant à gauche, je bouscule encore quelques passants sur mon chemin et Lucy arrive encore à tenir le rythme malgré tout. Il y a un peu plus de passants ici et c’était peut-être la chance à mon catosorus de se faufiler.

- Vas-y, file !  

Mon familier, pleine d’énergie, me dépasse et court à toute vitesse vers la cible. Je la vois passer sous les jambes des habitants et même elle se rapprochait dangereusement de la voleuse. Je lui donne un message télépathique de continuer de la poursuivre, il ne faut pas qu’elle nous échappe encore !

Mais qu’est-ce qu’elle a fait encore celle-là ? Oser voler la bourse d’un garde sous mes yeux ? Elle a du culot cette voleuse et si elle croit qu’elle peut nous narguer indéfiniment, elle peut se mettre le doigt dans l’oeil ! Elle continue de courir pour s’enfuir et j’essaye de traverser la foule qui essaye de récupérer la bourse qu’elle a envoyé valdinguer.

- N’y touchez pas !    

Comme si les gens vont m’écouter quand ils voient des cristaux à terre. En tout cas, le soldat lésé est devenu blême, c’était sa paye du mois et le voilà sans le moindre de sous. Lucy décide de passer cette foule et de subtiliser quelques billes au passage, je pourrai au moins lui rendre ça à l’homme qui essaye à tout prix de rattraper le maximum avec ses collègues. Je la vois monter les marches du temple de Lucy. C’est bon, elle était coincée, elle ne peut plus s’échapper. J’avais du mal à me frayer un chemin mais j’arrive à la hâte devant la porte du temple. Je ne pouvais me permettre de rentrer à la sauvage dans l’édifice, il y avait des règles même chez la garde.

- Ouvrez !    

Je tambourine la porte quand enfin l’une des soeurs ouvre la porte. Je la reconnaissais pour l’avoir côtoyée plusieurs fois ici même.

- Soeur Marie Madeleine, avez-vous vu quelqu’un rentrer ?    
- Oh Lieutenant Alnilnam, non pas du tout. Un soucis ?
- Vous êtes sûre ? J’ai vu une femme blonde avec une tenue violette assez cintrée, rentrée dans ce temple !  
- C’était il y a longtemps ? Vous savez que nous accordons le pardon.
- Oui je le sais, je le sais ma soeur. Laissez moi rentrer dans le temple, je dois jeter un coup d’oeil.    
- Comme vous voudrez mais n’oubliez pas de faire votre prière avant de sortir !
- Oui, je n’oublierai pas.    
- Bien.

Je passe le seuil de la porte, observant les environs. Quelques soeurs sont venues voir le spectacle. Il était peu courant d’avoir autant de bruit dans le temple et j’essaye de voir où elle aurait pu aller. Je reconnaissais quelques années, il y avait aussi quelques nouveaux visages mais toujours pas de fille blonde.

-   Lucy, essaye de trouver son odeur.  

Elle n’a pas eu le temps de prendre vraiment la trace mais au moins, je la vois se promener un peu partout dans la nef pour essayer de partir dans un couloir.

- Soeur Marie Madeleine ! Vous êtes vraiment sûre que vous n’avez croisé personne ? Je sais que chacun mérite le pardon mais le vol est un délit et...    

Lucy me passe un message télépathique, elle avait trouvé quelque chose et là voilà en train de foncer vers une des soeurs.

-  Toi…    

Je pars à sa suite, faisant tomber le petit présentoir. Une bruit métallique se fait entendre.

- Mais vous l'avez cassé !

Me précipitant vers la religieuse que Lucy avait soi-disant repérée, je fus arrêtée par quelques fidèles qui se trouvaient là. Le ton monte venant à être hostile contre ma parole. Mais qu’est-ce qu’ils se passent ici ? Ils n’ont pas compris que c’est pour faire mon travail que je fais ça même si j’ai dérangé leur sérénité dans ce lieu sacré. J’essaye de chercher de l’aide face à des soeurs qui me connaissent, ça fait des années que je rôde par ici et depuis que je suis en charge aussi du secteur, elle savent très bien ma manière de faire. Mais je ne vois aucune assistance de leur part. Le message était donc clair, ma présence n’est plus voulue mais une soeur finit quand même de venir à ma rescousse. Je ne la connaissais pas mais au moins elle avait fait de bon coeur.

- Dégagez d’ici.
- Oui, vous souillez ce temple avec vos armes.
- La Garde… elle se croit toujours supérieure avec leur armure.
- Ils n’ont que ça à faire, vous ne respectez pas Lucy en faisant ça !
- Je...  
- Partez !

Je voulais leur répondre qu’ils ne connaissent pas, ils ne connaissent pas ma foi pour Lucy, notre déesse mais ça ne servait à rien d’affronter des fidèles de ce genre. Ils avaient leur préjugés bien ancrés et ils n’ont fait attention à ma tenue de Garde. J’appelle Lucy par un ordre télépathique et elle revient aussitôt à mes pieds. Je me tourne vers Soeur Marie-Madeleine et présente mes excuses avant de me diriger vers la grande porte.

- Oui partez, que Lucy accepte votre pardon.
- Ces Gardes, ils ne sont bon que pour écouter les ordres de toute façon.
- Ce sont les petits chiens de la Couronne.

Serrant le point pour essayer de me calmer, je pousse la porte et me retrouve sur le perron. La lumière du jour m’éblouit quelques instants mais je m’adapte rapidement. La porte se ferme tout doucement derrière moi et je descends les quelques marches pour retourner sur la grande place. Mes hommes finissaient leur ménage et se tournent vers moi quand je finis d’être à leur hauteur.

- Alors Lieutenant ?
-  Rien du tout, une mauvaise piste.  
- Oh...
-  Partons d’ici, nous ne sommes pas les bienvenue.  

Quelques personnes nous lancent des regards noirs et nous nous séparons pour retourner chacun dans son secteur. Prenant la direction de l’Ile Rocheuse, je décide que je ferai un crochet par chez ma mère, ça me fera du bien. Sur le chemin, je passe à la boulangerie, achète quelques douceurs avant de reprendre la route.

- Sale journée Lucy hein...    

Le catosorus se frotte à mes jambes pour me réconforter. Allez, Bridget ne pense plus à ça… demain sera un autre jour.