Le dressage ou l’art de la séduction

─ avec Carci

Levé dès les premiers rayons du soleil, je suis dans la petite cours de mon lotissement avec Asti. La Tsi’Ly, revêche, semble m’apprécier, ou plutôt me tolérer devrais-je dire, de plus en plus. Trottinant autour de moi elle me laisse lui gratouiller le museau quelques secondes avant de repartir, me montrant ostensiblement son arrière train. Ah ça, j’ai bien compris que c’est elle qui décide quand est-ce que je peux l’approcher !

Adopté depuis peu par un heureux hasard au Village Perché, l’animal au passé trouble n’accorde pas sa confiance si aisément. N’ayant aucune expérience dans le dressage de familier, Loupiac me considérant comme sa mère et Tarapaca étant une vraie glu, je dois m’avouer désarçonner face au caractère insurgé, voire même provocateur, de la femelle Tsi’Ly.

L’idée m’est donc naturellement venue de demander l’aide à Carci, dresseuse de Loutre géante à ses heures perdues, entre autre, lorsque je l’ai croisé à la petite fête de Jack. Quelle drôle d’histoire ça aussi, qui aurait cru que les événements prendraient cette tournure ?! Pauvre Jack, le voilà tout nigaud d’amour que la vie lui arrache ce petit bonheur avant même qu’il n’est pu déclarer sa flamme. C’est injuste quand on connaît le brave type, ça me donne presque envie d’ouvrir une agence matrimoniale pour lui trouver une petite perle qui saura lui faire oublier son malheur. Mais ça, personne ne pourra mieux le faire que le temps. Puis quoi ? Vous vous imaginez moi en entremetteur ? La bonne blague !

Les heures passent, Asti accepte que je lui mette le harnais contre quelques cookies Glooby. Une astuce que j’ai trouver pour qu’elle m’écoute. Elle me suis sans rechigner contrairement à nos débuts ensemble. Elle faisait sa rebelle mais ne m’a pas rejeté comme son dernier maître. Je crois qu’elle sait que je ne lui veut que du bien, en tout cas je ne cesse de le lui dire. J’essaie de me mettre à sa place, vous aimeriez vous qu’on vous attache et qu’on vous oblige à porter des charges sans rien en retour ? Les animaux ont beau répondre à un instinct primaire, il n’en reste pas moins qu’ils ont une conscience.

Toujours est-il que je me mets en route en ce début de matinée avancé, marchant devant Asti que je tiens par la bride, sachet de cookies en main. La carotte pour la faire se tenir à carreaux. Avant de retrouver mon amie dans sa grange, je passe d’abord par l’une des boulangeries les plus réputées de la Capitale. Il me semble que mon aventurière préférée a un petit faible pour les brioches à la cannelle, et quoi de mieux pour la remercier que de satisfaire les plaisirs de ses papilles gustatives ? Oui oui, il y a bien d’autres solutions je vous l’accorde. Mais celle là en est une qui lui fera d’autant plaisir je suis certain ! Et lorsque je sors avec les gâteaux ils semblent bien intéresser ma Tsi’Ly qui avance son museau sur la boîte, reniflant bruyamment avant d’éternuer. Je me ramasse une douchette de morve, ça me dégoûte. Posant la boîte, je vide un peu d’eau de ma gourde fontaine sur un tissu pour me nettoyer. J'en profite pour m'abreuver de quelques gorgées lorsqu'Asti en profite pour tenter d’ouvrir le paquet avec ses dents. C’est fou comme elle arrive à être délicate quand elle veut.

- Non ce n’est pas pour toi! Interviens-je juste à temps avant qu’elle n’attrape une des brioches.

- J’ai bien compris que tu aimes le sucré, mais il va falloir que tu sois un peu plus coopérative ! Et puis je ne sis pas sûr que ce soit bon pour toi tout ça ...

Elle me tourne dessus en me soufflant dessus, quel caractère je vous jure ! Assise, je suis incapable de la faire repartir. Je lui agite le paquet de cookies Glooby, seule son oreille tourne dans la direction du bruit. J’insiste, elle ne bouge toujours pas. J’aurais mieux fait de la nommer bourriquet ! Je viens en face d’elle et lui tends un biscuit posé dans le plat de ma main. Elle tourne la tête avant de revenir sur son geste et de gober le dit Glooby sucré. Ne se relevant toujours pas je lui en tends un autre, l’incitant à me suivre. Le spectacle semble amuser quelques passant qui se sont arrêtés, sourire aux lèvres, pour nous observer. Et personne pour me donner un conseil ? Apparemment non.
Asti accepte enfin de me suivre, je suis un peu ronchon par son attitude mais très vite la légèreté reprend ses droits, et la joie de revoir Carci me donne le sourire.

Ça fait un moment que nous ne nous sommes pas croisés juste tous les deux. On va pouvoir parler, surtout l’aventurière. Me faire un topo de ses dernières aventures, autant sur le terrain que sentimentales. J’arrive à la grange une trentaine de minutes plus tard, je sais que les propriétaires sont très appréciés par la jeune femme. J’ai assez de brioches pour eux aussi, juste l’apparence qui est un peu moins présentable depuis qu’Asti à écrasé une partie de la boîte en essayant d’y fourrer son museau gourmand.

- Carci tu es là? demandé-je en tapant sur la grande porte de son dortoir après avoir attaché Asti non loin.

Cette dernière s’ouvre sur un K’awill des plus heureux de me retrouver, sa grosse langue vient parfaire ma toilette du matin. Ah ça, ça ne m’avait pas manqué ! Plus discret mon Chantelune virevolte autour de mon amie en guise de bonjour avant de se poser sur son épaule. Tarapaca, quant à lui, se glisse sur sa cheville pour ensuite rester collé sur le mollet de Carci. La boîte que je tiens manque de se renverser, je la rattrape de justesse avant de chuter sur les fesses poussé par la Loutre géante. Très vite détourné de la bonne odeur des brioches, l’animal sautille maintenant devant Asti qui s’agite au bout de sa muselière.

- Lâche la si tu veux, ils vont faire copain copain avec K’awill. m’enjoins Carci.
- T’es sûre ? Elle a tendance à être fuyarde, je ne voudrais pas qu’elle se perde.

L’aventurière s’esclaffe de rire.
- Oooh c’est mignon, le beau gosse ténébreux est une maman poule ! Ou veux-tu qu’elle se perde ici? me dit-elle en me montrant l’immensité du domaine. Puis K’awill veille, allez t’inquiète, laisse la courir un peu!
- Okay okay ..

Je lâche Asti qui, ni une ni deux, part en courant vers les champs, la Loutre à sa suite. Une boule au ventre m’incite à la rappeler, je prends sur moi pour ne rien dire et observe sa réaction. Elle finit par faire demi-tour pour tourner autour de K’awill, je crois bien qu’ils jouent au chat et à la souris. Et Asti, de part sa fine carrure face à la Loutre géante, s’amuse à piquer des sprint avant d’attendre son compagnon. En fait, elle le nargue clairement. Un sourire de soulagement se dessine sur mes lèvres avant que mon attention se reporte sur la brune.

- Regardes ce que je t’ai apporté!

Pas le temps de le lui montrer qu’elle se jette dans mes bras dans un câlin des plus amicales.

- Oui oui, toi aussi tu m’as manqué Carci. dis-je avec lassitude alors qu’au fond, je suis bien heureux de retrouver ce grand bout de femme.

Je finis par m’écarter, grand sourire aux lèvres.

- Bon tu vas me laisser te montrer ce qu’il y a dans ce paquet?!

Je lui présente les brioches à la cannelles, ses yeux s’illuminent. Sans demander son reste l’aventurière géniale attrape la pâtisserie pour la fourrer dans sa bouche en lâchant un « mmmmmmmh » de contentement. Je l’accompagne, croquant à mon tour dans le gâteau moelleux. C’est vrai que c’est un délice !

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Le dressage ou l’art de la séduction

─ avec Carci

J’écoute Carci avec le sourire faire une éloge de ma compagne, il est vrai que la famille Weiss n’est pas des plus à plaindre côté finances. Si elle connaissait mes origines elle hallucinerait. Je suis presque sur le point de lui révéler ma lignée, fort heureusement elle enchaîne sur le fait que bientôt, elle sera Saphir. Je la félicite et le lui souhaite. Il est vrai que Saphir est la reconnaissance d’un excellent aventurier. Ça n’apporte rien de plus, Saphir ne paye pas mieux mais pour le prestige et pour l’égo, ça fait du bien. Et on sait que l’on peut faire confiance à un Saphir, ses capacités à répondre aux plus difficiles missions sont reconnues. Pour ma part je ne me suis jamais vraiment poser la question, advienne que pourra.

- Et bien figure toi que je l’ai adopté au Village Perché encore. Elia, tu sais la vétérinaire, était en charge de la soigner. La Tsi’Ly était maltraitée par son ancien propriétaire, on a participé à sa chirurgie avec Cal. C’était pas beau à voir. Enfin bref, du coup elle est méfiante, normal. Elle semble cependant me faire assez confiance pour me suivre, juste tête de mule. J’aimerais bien en faire ma monture, mais qu’elle l’accepte tu vois. Je ne veux la forcer à rien. Et vu comme ta Loutre Géante est bien dressée, ben je me dis que tu peux me prêter main forte ? Non?

Loupiac se cale dans mon cou, comme il a habitude de faire. Je sens sa respiration se détendre, il s’assoupit. Parfois j’oublie que c’est un animal nocturne, je l’amène partout. En même temps ce serait compliqué de le laisser, il ne supporte pas que je parte sans lui. Comme Tarapaca, ce Glooby me suis partout, et à mon insu. Un vrai pot de colle, j’vous jure ! Il use de sa magie d’invisibilité pour se glisser dans mes affaires ni vu ni connu, et hop je me retrouve avec cette grande limace dans les pattes. Je pouvais pas me retrouver avec un loupain, beaucoup plus classe non ? Bon je dis ça, mais maintenant que je l’ai, je me vois mal me débarrasser de ce petit animal gluant multicolore.

- Et au fait Carci, il s’est passé quoi avec K’awill?

Elle regarde, un voile passe sans ses yeux, elle attend que je précise ma question. Pourtant ça ne m’a pas échappé, je vois bien à leur façon de s’observer que quelque chose leur manque, ils ont perdu de cette complicité qui fait d’eux le duo inséparable. On sent bien que K’awill tente de communiquer avec sa maîtresse et que cette dernière tente de le comprendre, en vain.
Un peu à contre coeur elle me raconte sa mission, et le lien qui s’est brisé.

- Tu as raison, je suis certain que ça reviendra. Il vous faut juste un peu de temps.

Du moins je l’espère de tout cœur. Ce ne sont pas que de simple animaux, lorsque vous partager un lien particulier avec eux, si ce dernier se rompe, c’est comme si vous perdiez une partie de vous. Il faut alors réapprendre à vivre sans.
Je sens la limage monter sur mon pantalon, je l’attrape pour le poser sur mon sac. Je déteste la sensation de sa bave sur moi, ça me dégoûte.

- Reste sur la toile Tarapaca, je te l’ai déjà dit.

Il fait un espèce de ronronnement et s’exécute. Je lui tapote le haut du crâne, un large sourire se dessine sur sa bouche. Ça me fait rire quand il fait cette tête.
J’appelle Asti, et contre toute attente elle revient vers nous. Dis donc, je ne m’attendais pas à ça ! Elle reste à distance de nous, immobile, nous observant. Le point positif, elle ne fuie pas. K’awill arrive plus lentement et vient se blottir contre sa maîtresse. Je sors un fruit de ma sacoche pour le tendre vers la Tsi’Ly. Elle adore les fraises en particulier, mais je les garde pour servir de récompense lors du dressage.

- Alors, on commence par quoi, Maître Carci?

Je lui fais un clin d’œil, envoyant la mirabelle à mon familier qui, lentement, s’en approche, la renifle, et la mange tout en gardant un œil sur nous. Je me rattache les cheveux, les mèches tombant autour de mon visage.

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Le dressage ou l’art de la séduction

─ avec Carci

Nous prenons le temps de discuter tandis qu’Asti et K’awill gambadent un peu plus loin, jusqu’à ce que Carci nous ramène au vif du sujet : le dressage de ma Tsi’Ly.

- Comment ça lui donner des gâteaux toutes les deux minutes n’est pas bon pour elle ? plaisanté-je.

C’est vrai, je plaide coupable, lorsque l’animal fait sa tête de mule et que j’ai vraiment besoin de l’attacher, je cède et lui donne une friandise. Comment ne pas craquer devant sa bouille aussi ?
Par réflexe lorsque la situation exige toute mon attention, j’attache mes cheveux pendant que mon amie part chercher le matériel nécessaire au dressage. Elle revient avec une selle de cheval, peut-être un poil étroite pour le dos d’Asti, quoique, ça reste à voir.
En fine pédagogue l’aventurière utilise K’awill comme modèle à ma protégée. Cette dernière, attentive, observe à une distance respectable ce que la brune fait à sa monture. Sans attendre la loutre géante se dandine devant nous et surtout devant la Tsi’Ly. Il fait un très bon complice à nos affaires celui-là !

Carci le rappelle pour lui retirer l’objet de cuir et me le tend afin que je fasse de même. Encouragé par les deux compagnons je m’exécute, et à mon grand étonnement Asti se laisse faire. J’attache les brides avec délicatesse et à peine ai-je terminé que l’animal part faire son tour, se pavanant à son tour. Carci rit de bon cœur face à la désinvolture de la Tsi’Ly et un large sourire me fend le visage.
C’est maintenant que les choses se corsent. La brune me demande d’attraper la bride pour faire marcher Asti à mes côtés. Je m’approche doucement tout en lui parlant de façon réconfortante. Elle ne bouge pas et m’observe. Au moment où je lève ma main pour prendre la lanière, Asti se recule puis trotte un peu plus loin.

- Tu es sûre je ne sors pas les gâteaux à la rescousse? tenté-je de négocier.

Bien sûr, Carci refuse en se moquant gentiment de moi. Je tente une nouvelle fois ma chance, cette fois K’awill vient près de moi et se laisse câliné et promené par mes soins. Qui aurait cru que la loutre est si maline ? Car par curiosité, jalousie ou confiance, je ne sais laquelle de ces qualités, Asti finit par revenir vers moi et marche à côté de K’awill. Ce dernier finit par s’éclipser, la tsi’ly commence à le suivre avant que je ne l’appelle doucement, attrapant sa bride doucement. Victoire ! Elle s’arrête brutalement. Je ne tire pas sur les rênes et tente de la convaincre de me suivre. Elle s’assoit, obstinée.
C’est vrai que je lui ai donné cette mauvaise habitude de l’appâter avec des friandises, et je crains qu’elle n’attende que ça maintenant.
Je regarde Carci avec un appel à l’aide silencieux.

- Que me conseilles-tu ôôô Maître des Loutres?

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Le dressage ou l’art de la séduction

─ avec Carci

Je ne suis pas certain qu’Asti comprenne tout ce que Carci lui dit, mais je reste persuadé qu’à force d’entendre notre langue les familiers finissent par en reconnaître certains mots. Du moins c’est l’impression que j’ai avec Loupiac. Ce dernier se pose d’ailleurs sur la croupe de la Tsi’Ly, elle ne bronche pas, tourne la tête vers le chantelune qui lui sifflote une mélopée. Ça n’a pas l’air de déplaire à la monture qui, suite au discours de l’aventurière repart faire un tour.

Je souris à la remarque de la poivre et sel avant de répondre à sa question.
- Oui quelques quêtes, notamment une bien étrange où Calixte et moi sommes restés coincés dans un livre à en combattre l’auteure. Je me demande encore si c’était bien la réalité ou un rêve ...

Elle me demande des nouvelles du Garde et un léger pincement au coeur se fait sentir.

- Oui au Grand-Port. Je tais tout ce qui s’est passé entre nous mais ne peux m’empêcher une petite réflexion. J’entends souvent dire que les femme sont mystérieuse mais je dois t’avouer que Calixte est un grand mystère pour moi, je ne sais plus comment me comporter avec lui ...

Et avant que mon amie ne m’interroge plus encore Asti revient, elle semble prête à écouter la leçon du jour. Je tends de nouveau le bras vers sa bride tout en lui parlant, elle se laisse faire et à ma demande, suit mes pas. K’awill semble content et trotte à nos côtés, dandinant de son illustre postérieur. Je caresse l’encolure d’Asti après un tour sans accro, Loupiac vole autour de la loutre géante tandis que Tarapaca joue les troubles fête.

- Tarapaca content ! Tarapaca trouver gâteaux ! Tarapaca ...

Je me retourne ni une ni deux vers le Glooby qui se trimballe avec le sachet de cookies à son effigie. Bien évidemment, ça n’échappe pas à la tsi’ly qui, d’un lèchement de babine, se jette en même temps que moi sur le petit animal.

- Non Asti!

Elle relève la tête dans un mélange de surprise et de mécontentement. Connaissant son trouble passé je l’ai toujours chouchouté, ne voulant la traumatiser plus encore. Peut-être mon erreur première réside là. Elle s’assoit, boudeuse, mais ne mange guère de cookies. Deuxième victoire.
Je retire le sachet que je range à nouveau dans mon sac – que j’attache fermement pour empêcher Tarapaca d’y refourrer le museau – avant de féliciter la tsi’ly d’une longue caresse.

- C’est bien Asti, je suis fier de toi. Je t’en donnerai à la fin de l’entraînement, comme Carci l’a promis.

Exercice suivant, monter l’animal. Comme précédemment l’aventurière géniale montre l’exemple avec K’awill, montant sur son dos et tout deux nous font une magnifique démonstration digne d’un défilé militaire. Ma monture rechigne tout d’abord, je dois longuement lui parler, la faisant remarcher à mes côtés avant qu’une tentative ne réussisse.
C’est sans compter sur un mammifère dont personne ne s’attendait à voir la présence qui se jette dans les pattes de la tsi’ly partant en courant, cabrant de peur par cette masse qui vient de faire son apparition.

Rodéo time les amis, je crois que je n’ai jamais fait de si belles figures de toute ma vie pour finir avec un beau soleil la tête la première dans une botte de pailles. Heureusement qu’elle était là celle-là, je ne sais comment j’aurais fini sinon !

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Le dressage ou l’art de la séduction

─ avec Carci

C’est avec étonnement que je découvre Calixte auprès de Carci, vient-il parfaire le dressage de Kaname ? A peine le salué-je qu’il retire un brin de paille de ma tignasse dans un rire. Je souris devant son amusement. Avec le garde je préfère ne plus me poser de questions et agir à l’instant T sinon je ne saurais comment me tenir. Il a fallu que la mort se mêle de notre relationnel pour rapprocher à nouveau le jeune homme de moi, sa déclaration vite oubliée depuis que son comparse n’est plus. Dans un pacte silencieux nous ne faisons aucune référence à ce qu’il s’est passé ni à cette Fameuse Soirée, ni à son écho une saison plus tard. Toujours est-il que je suis ravi de le voir, surtout avec ce petit sourire. Le temps semble commencer son travail sur le cœur de Calixte, à moins qu’il se soit encore perfectionné dans l’art du mensonge.

Carci s’emballe sur les relations du garde, une Lieutenante blonde c’est cela ? Ce n’est pas la première fois que je vois le jeune homme s’attirer les attentions de concubin/es pour des raisons professionnelles. A moins qu’il ne souffre réellement de SAMA : Syndrome Aiguë du Manque d’Affection.
Contre toute attente Asti vient vers nous, d’abord méfiante, avant de renifler la tignasse du blond. Elle semble se souvenir de lui et de son aide pour l’opération et le gratifie d’un coup de tête pas très délicat avant de s’éloigner rapidement. Je souris devant son agissement, tout n’est pas perdu avec elle !

- Apolline m’a fait un léger débrief sur votre séance de « dressage ». Il me tarde d’en connaître tous les détails! dis-je à l’intention de Carci tandis que Cal lève les yeux aux ciel, exaspéré.

Je note que cette fois, il ne rougit pas. Ah ! J’ai parlé trop vite, une légère teinte rosée colore ses joues quand il me fixe. Je souris de plus belle avant de suivre l’aventurière dans la grange. Asti, Loupiac, Kana et K’awill restent ensemble, c’est la récré pour eux. Je demande au Chantelune télépathiquement de veiller sur la marmaille et de me prévenir en cas de problème. On s’installe à la mezzanine sur une vieille banquette tandis que notre hôte part en cuisine chercher de quoi nos abreuver. Carci revient avec trois verres de … Lait ?

- Aromatisés fraise vanille ou chocolat ? Qui veut quoi?

Un large sourire fend mon visage, je suis le premier à prendre la parole en choisissant le lait à la vanille. Je pose les cookies Glooby sur la table pour accompagner ce moment « en-cas sucré ».

- Ça se passe bien au Grand Port? demandé-je à Cal.

Je dois avouer que son absence dans mon studio se fait ressentir, je m’étais habitué à la semi-colocation et à nos échanges, bien que ces derniers temps il s’agissait surtout de le réconforter. Et bien que je n’excelle pas dans cet art, loin de là, il semblerait que j’ai tout de même réussi un tant soit peu cette mission.

Soudain je vois un cookie se lever tout seul, Carci ne manque pas de le remarquer dans son entrain habituel :

- Bon sang tes cookies sont enchantés ! Ils volent Naë !

Un petit croc apparaît comme par magie, émiettant le bout du biscuit. Je comprends tout de suite ce qu’il se passe.

- Tarapaca ! Ça suffit ces gâteaux ne sont pas pour toi!

Il apparaît de ses couleurs bariolées avant d’engloutir le reste de la galette et tenter une fuite des plus lentes.

- Pas fâcher Tarapaca, pas fâcher!

Comment s’agacer contre cette bouille ? Carci éclate de ce rire si communicatif ce qui nous vaut de la rejoindre.

- Tu as vraiment une éducation en carton Naëry ! Tout à refaire! Me taquine-t-elle.

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Le dressage ou l’art de la séduction

─ avec Carci

J’écoute Calixte raconter sa calme vie au Grand Port. Après tous les tourments qui le poursuivent s’isoler loin des visages qui lui rappellent la mort de Ruth ou encore ceux qui lui rappellent des sentiments à sens unique semble être la solution la moins extrême. L’amour nous éloigne quand la mort nous rapproche. Résumé d’une complexité relationnelle qui nous a toujours rattaché.

Et à côté Carci, une joie de vivre simple, sans fioriture, toujours optimiste avec une pointe d’insouciance feinte. Une boule d’énergie avec qui il est difficile de ne pas se lier d’amitié.

Je regarde mes deux compagnons à tour de rôle, écoutant d’une oreille distraite leur conversation, observant les expressions de leur visage, la joie sur l’un, une nouvelle quiétude sur l’autre. Je tâche de graver cet instant dans ma mémoire, oubliant les tracas du quotidien. Je sais bien que l’on me voit peu en ce moment, depuis que Tarapaca et Calixte m’ont révélé quelques informations sur la Cabale je me raccroche à ses quelques mots comme une bouée de sauvetage pour retrouver Calia. Je mène mon enquête, dans l’ombre de la Guilde et de la garde. J’avance en terrain inconnu, à pas feutrés. Quelques indices, parfois des voies sans issue. Je ne désespère pas, je suis sur que je tiens le bon fils. Je vais juste à la pêche aux informations, et lorsque j’en aurais appris davantage j’ai fait la promesse secrète de retrouver Zahria pour les lui révéler. Ne pas la trahir tout en sauvant ma sœur. Je commence à comprendre que la Cabale est un groupuscule obscur mais je n’ai pas encore saisi le but de cette organisation. Il me faut connaître les raisons de Calia de vouloir les trouver pour mieux la retrouver. Une vengeance ? Un kidnapping ? Ou les rejoindre de son plein gré ? Je crains tout comme j’espère que cette dernière solution se vérifie. Cela voudrait dire qu’elle va bien, mais … l’illégalité n’est pas pardonnable pas à Aryon.

Ça y est, je digresse. Je ramène mon esprit à l’instant présent, et Loupiac m’y encourage à grand appel de détresse dans mon esprit. J’entends le tonnerre et le Chantelune, aussi peureux soit-il, garde son poste à la surveillance des autres familiers. J’écoute Carci jusqu’à ce que quelques dizaine de secondes plus tard Loupiac m’alerte de l’agitation au rez-de-chaussée. Dans sa panique je ne comprends pas tout, il vient jusque nous dans un chant affolé, virevoltant entre nos têtes.

- Loupiac calme toi ! Que se passe-t-il?

A peine ai-je prononcé la question qu’un grand fracas se fait entendre, dans un parfait ensemble nous nous retrouvons tous trois debout, prêt à intervenir. En bas K’awill est étalé sur le dos tandis que la petite Kaname se retient tant bien que mal agrippée sur la poutre. Comment a-t-elle atterrit là ? Asti s’agite en bas, je la vois se positionner sous la petite Loutre prête à servir d’amortisseur. Je sens son anxiété de là, et comme réponse à ce nouveau lien elle me fixe quelques secondes avant de se re-concentrer sur l’animal funambule. Un coup de tonnerre et le drame se produit. Asti bande les muscles tandis que K’awill d’un saut de gazelle dont je ne lui connais pas rattrape Kaname d’un prodigieux réflexe.
K’awill se vante de sa prouesse, je suis rassuré de voir que le gros pataud va bien. Il n’est pas le familier de Carci pour rien celui-là ! Asti se rapproche, renifle Kaname s’assurant de sa bonne santé. Elle s’ébroue en signe d’indignation et souffle sur K’awill comme pour le sermonner. Je souris devant ses comportements aux allures humaines. Asti serait-elle une maman poule ? Une vague d’attendrissement pour la Tsi’Ly m’envahit tandis qu’elle me fixe à nouveau, consciente de mon ressenti.

Un nouveau coup de tonnerre bien plus impressionnant encore s’abat sur la grange, perforant le toit. Par réflexe nous baissons la tête avant qu’une poutre ne se brise. Le noir déjà présent semble happer la lumière émise de nos orbes magiques, et la pluie pénètre de ses chaudes gouttes de saison chaude. S’en est trop pour Loupiac qui vient se cacher dans le col de mon haut, tremblant. Je prends l’animal dans mes mains pour le rassurer avant de le caler dans le cou.

- As-tu une bâche Carci? demandé-je déjà en train de décaler ses affaires pour leur sauvegarde.

Ni une, ni deux, la poivre et sel attrape une nappe en toile cirée que nous mettons sur la partie cuisine.

- Tarapaca peur!

Mon Glooby qui s’est fait discret dans les bras de Calixte est de nouveau invisible je ne sais où.

- Montre toi Tarapaca que je te récupère!

Chose qu’il fit rapidement, étonnant venant de sa part. Je le prends sur mon épaule en lui sommant de bien s’engluer. Il me glisse à l’oreille pas si discrètement que ça :
- Tarapacaca peur sur tapis CarciFiona

Je regarde le tapis, effectivement le Glooby a relargué un reste de cookie digéré sur la carpette de l’aventurière.

- Attention où vous marchez ! préviens-je amusé.

Soudain la pluie cesse, le noir continue son œuvre tandis qu’un froid étrange envahie la pièce. Tous les familiers s’agitent et un son lugubre envahie ma tête dans un souffle Le dernier de la lignée .... Mon Talisman d’indépendance chauffe avant de retrouver une température normale comme le reste de la grange, les orbes lumineuses éclairent à nouveau l’endroit de toute leur intensité, la grisaille reste, après la surprise l’incompréhension :

- Vous avez entendu comme moi?

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Le dressage ou l’art de la séduction

─ avec Carci

Tout se passe tellement vite. L’annonce sur naturelle, la disparition de nos familiers, la découvert de la goule. Mes camarades sont les premiers dehors, je les suis de quelques pas avant que Carci ne s’élance, seule, en avant. Pas besoin de couvrir les côtés, j’aperçois déjà les masses recherchées près de la bête cadavérique.
Calixte coure arme en main tout comme l’aventurière. J’accélère alors que mon amie se positionne accroupit, la créature en ligne de mire. J’attrape ma dague à l’approche de la monstruosité, car il faut le dire, une goule ce n’est pas beau à voir ! Ni à sentir d’ailleurs. Chacun d’un côté Calixte et moi nous apprêtons à porter un coup lorsque le corps élancé de l’animal s’écroule.

Le tir rapide de l’aventurière a fait mouche, en plein entre les deux yeux. Je suis impressionné par sa rapidité, moi dont le tir à distance n’est pas la point fort. Il faudra peut-être qu’elle me donne des cours après celui du dressage d’Asti. Asti ! La Tsi’Ly renifle avec défiance le cadavre de la goule avant de tirer la langue, écœurée. Cal est déjà prêt de Kana dont les soubresauts rassurant réveillent son corps du sommeil artificiel. Loupiac ne bouge toujours pas, je me précipite, la boule au ventre ne cesse de grandir. Je prends le Chantelune entre mes mains, son petit torse bouge sous sa lente respiration. Je suis soulagé mais son coma m’empêche de me rasséréner totalement.
Du coin de l’oeil j’entrevois Carci qui félicite K’awill dont la bonne humeur revient à la charge, s’encensant d’avoir tenue tête à l’animal évitant à nos petits compagnons de se faire dévorer.

Asti se rapproche, pose son museau sur le Chantelune. Puis elle pose sa tête sur la mienne alors que je suis toujours accroupi en train de murmurer des paroles réconfortantes à l’oiseau. Je relève le visage, un lien de confiance se créé entre la Tsi’Ly et moi, une attache forte dont je promets l’existence en posant délicatement ma main sur son doux mufle. Elle ferme les yeux, je fais de même, un sentiment de quiétude partagée nous parcours. Dans ma main un frisson suivit d’un tressautement. Loupiac se réveille, enfin ! Je porte son plummage à mon visage pour le câliner. Il chante d’incompréhension mais me rend l’affection.

Je me relève et regarde l’ensemble de notre groupe.
-  Et bien … Plus de peur que de mal. Beau tir Carci.

Je donne un coup de botte dans la jambe de la goule morte. Asti s’ébroue d’agacement et K’awill grogne encore contre la créature.
- Je ne pensais pas en croiser si près, c’est inquiétant. Il va peut-être falloir signaler cet incident pour déclencher une surveillance et s’assurer qu’il s’agit là d’un cas isolé.

D’un air entendu Carci et moi opinons de la tête, la Guilde se chargera de ça.

- En attendant, que faisons nous de cette puanteur ? On le brûle ?

La pluie disparate n’empêchera pas le feu de prendre si on l’allume avec un bon comburant. La paille sèche protégée dans la grange devrait bien aider. Reste à déplacer le corps certes, maigre, néanmoins à la lourde ossature.

- K’awill, Asti ? Est-ce que vous pouvez me ramener le draps dans la grange?

Je visualise clairement le dit tissu servant de couchage à la loutre géante dans ma mémoire visuelle accrue. Ni une ni deux K’awill s’empresse de s’exécuter, avec, étonnamment, la même fougue pour Asti.

- Toujours serviable ce K’awill. glissé-je doucement à sa maîtresse.

Loupiac s’envole, d’abord maladroitement avant de reprendre de l’assurance. Je me retourne sur mon ex compagnon d’aventure.

- Kaname va bien?

Je gratifie la bébé loutre d’une gratouille sur la tête, ses joues rebondies étire ses lèvres dans – ce qu’on pourrait croire – un sourire.

Les deux autres montures reviennent avec le drap convoité, et lorsque l’animal de Cari voit ce que j’en fait je sens son désarroi.
- Moi plus dodo? s’inquiète-t-il.
- Ne t’inquiète pas K’awill, je te reprendrai un couchage bien douillet avant ce soir.

Je le sens attristé, je viens lui caresser la truffe en lui promettant d’arranger tout ça.
- Ton drap va nous permettre de transporter le corps pour le faire disparaître de ce monde, c’est une aide très précieuse K’awill que tu nous offre!

Il remue l’arrière train comme il sait si bien le faire, il suffit juste de trouver les bons arguments pour le rassurer. Un peu de crème dans le sens du poil et hop ça repart. C’est dans des situations comme ça qu’on peut voir à quel point un familier et proche de son propriétaire.

Je pose le tissu a côté de la goule avant de poussé le corps à coups de pied dessus. Attrapant l’extrémité du linceul je tire pour déplacer le corps, Calixte vient à mon aide tandis que Carci déblatère et nous guide vers un lieu assez désert pour mettre le feu au cadavre.

Autant vous dire qu’une goule ça empeste, une goule en feu ? Abominable. Si nous voulions danser autour du feu de joie l’odeur dégagée nous en à vite dissuader !

Asti, plus sereine, reste proche de nous et vient régulièrement me donner des coups de museau. Un jeu s’instaure entre nous, une nouvelle complicité née d’un événement des plus inhabituelle qui aurait pu très mal se terminer.

- Alors Kana, montre moi les nouveaux tours que tu as appris? Demandé-je un peu plus tarde lorsque la lourde besogne fut derrière nous.

code ─ croquelune