- Hum ?
- Port en vue !!
- C’est inquiétant ça. Vraiment très inquiétant j’dirais. Parce qu’on est déjà à quai depuis une demi-heure, P’tit Chef.
- Ah.
- Le nid de pie c’est pas pour dormir.
- Oh ?
Louise soupire et continue à superviser le chargement des provisions par l’équipage. Elle a depuis longtemps abandonné l’idée d’tirer quelque chose du nain cuistot, en permanence en train de roupiller dans un coin en échappant aux corvées. En fait, il est si petit qu’on oublie sa présence. Ca lui est bien pratique, tiens ! En revanche, il fait la cuisine, et il la fait bien. Elle s’contente de ça et les autres aussi.
- P’tain c’qu’elle est lourde celle-là, de caisse ! » dit Vingt-deux en passant prêt d’elle, aidé par M. Ours.
- C’est parce qu’il faut muscler ces bras tout minces, mon p’tit bout. » Lui répond celui-ci, sourire aux lèvres.
Vingt-deux grimace et tire la langue. Ils sont suivis de prêt par le Jacquie et Allen, qui font tout deux rouler un tonneau d’alcool jusqu’au pont sans trop de difficulté. Une fois seule sur le quai, Louise vérifie que rien n’a été laissé en retrait et leur fait signe de ranger l’tout dans le compartiment inférieur du Glouton, leur navire. Elle file ensuite au comptoir avec une bourse de cristaux en poche afin de payer son dû, retourne sur ses pas quand les comptes sont réglés et rejoint son équipage. Une fois parés, ils larguent les amarres et filent voguer en mer afin d’y profiter du soleil couchant.
- Sérieux, elle était lourde j’vous dis ! On a acheté quoi, du plomb ?
- C’est bon Vingt-deux, arrête d’essayer d’te justifier. T’es une fiotte c’est tout ! Même la Capitaine l’aurait portée sans se plaindre.
- Pas sûr, elle est tellement p’tite qu’elle aurait raclé le sol avec. Ha !
- J’suis pas petite. J’grandis à mon rythme.
- On grandit pu à vingt ans, cap’tain. » Rétorque P’tit Chef.
- Et il sait de quoi il parle !
L’équipage se met à pouffer de rire grossièrement, à l’exception des deux individus visés par les remarques. S’qu’ils sont chiants, à toujours parler de la taille…
- Bon, j’vous laisse entre idiots. J’vais préparer la bouffe, bande de charlots.
- Tu nous prépares quoi d’beau ce soir ? » Demande M. Ours, visiblement intéressé.
- Tu verras en regardant ton assiette.
Le petit homme ouvre la porte donnant accès aux escaliers du niveau inférieur et disparaît rapidement de leur vue. Les autres matelots reprennent alors leur sérieux et s’attèlent à leurs tâches habituelles, non sans une pensée pour le repas du soir qui promet d’être sacrément faste. Outre le fait que les provisions manquaient ces derniers temps, l’équipage a pour coutume de s’organiser un copieux repas à chaque réapprovisionnement et cette fois-ci sera pas différente des autres. Même Louise ne peut cacher son impatience, bien qu’elle le dissiumule plus facilement que ses autres camarades gloutons. Elle n’attends plus qu’une chose : sentir l’odeur de la viande en train de cuir, découper la viande grasse et saignante, encore rouge…
- CAP’TAIN ?
- Roh merde, quoi encore ? » Râle-t-elle en entendant P'titchef hurler..
- Euh… Y’a une donzelle endormie dans la bouffe. »
- … Hein ?
Mes yeux s'entrouvrirent dans un même temps que je me redressais d'un bond, affligeant d'une balayette le rat géant qui m'embetait. Désormais sur mes pieds, genoux pliés prête à bondir pour coller une raclée à ces bêtes, je me sentis con. Très con. Un homme était par terre, assez grand, mat de peau, baton en main. Il lui manquait plus qu'un baluchon et je l'aurais pris pour un aventurier. Il jura en se frottant le haut du crâne, sans pour autant afficher d'air hostile. C'était un peu trop grand pour être un rat.
"- Euh... Bonjour ?"
Mon corps se détendit et je me penchais en avant, tendant ma main à l'homme que je venais de faire tomber. Il n'était pas seul sans la pièce. Une jeune femme s'y trouvait également accompagné d'un mec de la même taille, tout comme le moustachu à l'embouchure de la porte. J'étais quoi, un animal de foire que les enfants viennent observer avec leur cartable sur le dos ou quoi ? Genre c'est devenu un spectacle de dormir dans un garde mangé sur un navire ? Relevant le jeune homme du sol ce dernier esquissa un leger sourire.
(Allen) "- Et maintenant, tu vas nous dire d'où tu sors ? Il ne me rappelle pas qu'on ai acheté des esclaves pour les faire rôtir..."
Mes sourcils se froncèrent. Au vu du léger mal de crâne qui me prenait la tête lorsque je remuais trop vite, j'avais dû picoler un peu plus que ce que la nature voulait bien. D'où je sors hein ? Alors là, c'est une superbe question.. Main sur la tempe, je m'éfforcais de réunir tous mes souvenir pour avoir une explication cohérante.
"- Pour être honnête, j'ai claqué tous mes cristaux à la taverne. J'y ai passé un moment, jusqu'au petit matin j'crois bien. Puis en repartant j'ai croisé un jeune homme, grand blond, j'dirais beau garçon qui m'a proposé de me ramener à une auberge pour manger. Il me semblait pas hostile alors j'me suis dis "cool, de la pitance gratuite".
Ah ca, j'en ai acheté des litres d'alcool. Des tonneaux même. Il avait parlé d'une auberge montée sur un bateau, super cool en soit le concept. Mon regard bifurqua, tentant de détailler la pièce où je me trouvais. Des sacs, de la bouffe, une table .. Ca avait pas trop l'air d'être une auberge pour manger en fait.
"- Et j'crois que je me suis endormie pendant qu'il parlait..."
C'était l'histoire la moins crédible du monde. Et pourtant elle était vraie. Enfin, si mes souvenirs me trompaient pas.
"- Mais euh, on est où en fait, là du coup ?"
- Hahaha, c’est complètement fou cette histoire. Si ça c’est vrai, j’l’adore déjà cette donzelle ! » Commente M. Ours, hilare.
- En soit, c’est pas bien différent de c’qui est arrivé à P’tit Chef.
- Pas faux. » Répond celui-ci avant de retourner vaquer à ses occupations.
Un truc tourne pas rond pour Louise, dans cette histoire. La femme parle d’un jeune garçon blond, plutôt bel homme selon elle, qui lui aurait proposé de la ramener dans une auberge afin d’y manger. De qui peut-elle parler ? La médecin percute soudainement : s’agirait-il de cet idiot de Vingt-deux ?
- Ours, appelle Vingt-deux.
- Oué ? J’suis déjà là.
- Tu la reconnais ?
L’homme fronce les sourcils, se penche en avant et place sa main à l’horizontale sur son front, comme si cela l’aidait d’une quelconque manière à mieux percevoir le visage de l’inconnue. Après quelques secondes d’observation, il reprend une pose normale et hoche la tête.
- Nan, elle me dit rien. » Répond-t-il simplement.
- Merdouille, de qui elle peut parler alors ?
- Je lui ai adressé la parole ce matin, par contre. » Reprend Vingt-deux, le plus normalement du monde.
- Tu viens d’me dire qu’elle te disait rien et… RAH, bref.
Ca ne sert pas à grand-chose de demander à un guignol, qui ne sait ni lire ni écrire, de faire appel à sa mémoire ou à son intelligence. Et pourtant, va bien falloir que celui-ci explique la présence de cette jeune femme à bord…
- Pourquoi tu lui as adressé la parole ?
- Euh, bah parce que je voulais me la taper quoi. » Justifie-t-il, sourire aux lèvres.
- Pourquoi tu voulais la taper ?
- Nan nan, capitaine, me la taper.
- Hein ? Mais j’comprends rien à ce que tu dis.
Ours et Vingt-deux échangent un regard discret, se rappelant que « ce » domaine n’est pas celui où leur innocente Capitaine brille le plus. Mieux vaut éviter de rester sur le sujet plus longtemps…
- En fait quand je l’ai vue elle était éméchée j’lui ai proposé de venir jusqu’au Glouton pour s’en mettre plein la panse. Pis une fois qu’on était presque arrivés, j’me retourne et elle était pu là. Elle a du s’endormir prêt de la caisse ou tomber dedans, chais pas trop.
L’explication « tient » la route ; du moins, elle tient la route parce que la concernée elle-même avoue avoir bien bu et suivit Vingt-deux de son plein gré… Heureusement pour lui, d’ailleurs, il aurait sans doute été privé de dessert si c’n’était pas le cas ! La jeune femme, quand à elle, semble totalement perdue et n’a sans doute pas la moindre idée qu’elle se trouve actuellement sur un bateau. Et pas n’importe lequel : un vieux navire de pirates !
- Vous êtes sur le Glouton, notre navire. Nous sommes en pleine mer à l’heure actuelle. » Lui annonce Allen, amusé par la situation. « Bienvenue à bord, si je puis me permettre ? » demande-t-il à la patronne, qui lui répond d’un simple geste de la tête.
- On est des pirates.
- Des pirates plutôt sympas. » ajoute Vingt-deux, toujours souriant.
Je me sentais un peu patraque depuis mon réveil. Etait ce l'alcool ? Ou probablement.. "nous sommes en pleine mer"... ? Hébétée, mon regard biffurqua de droite à gauche.. Non non non .. C'était pas possible... ? Et Rhésus.. ? Je l'aurais laissé sur le quai ? Le coeurl m'avait suivi à la taverne. Mais qu'est ce que j'en avais fais ?
"- C'est très gentil mais il faut que je retourne à terre... J'ai laissé une bête sur place. Il doit être affamé à l'heure qu'il est, s'il à pas déjà bouffé un ou deux gamins qui trainaient par là."
Ptit chef revint vers la Capitaine après s'être absenté quelques instants.
(Ptit chef) "- Cap'tain ! Y'a un monstre dans la cave !"
(Louise) "- Un monstre ?"
(Ptit chef) "- Une sorte de gros chat qui ronfle comme un bébé !"
"- Rhésus ?"
Ptit chef me regarda suspicieux et nous fit signe de le suivre. Quelques instants plus tard, nous nous retrouvions dans une cave, avec en effet, un gros chat qui dormait au sol, le nez dans une flaque d'un liquide bordeaux. Je fis quelques pas, dépassant les autres protagonistes et m'accroupis au sol à côté du Coeurl.
"- Abruti d'bouffeur de gloot ! Tu t'es endormi en buvant du pinard ?"
Sifflais-je en secouant l'animal. L'équipage échangea un regard. Tel maitre telle bête ? Le coeurl ouvrit les yeux et releva la tête pour me regarder. Il ouvrait la bouche et le refermait machinalement en tirant sa grose langue rapeuse.
"- Bah oui, on a la pateuse après une cuite.."
(Ours) "- Il est bourré ? Ahaha"
Je me mis à rire en lui tappotant la tête avant de me redresser vers l'équipage.
"- Je... euh.. Bon il n'est plus préssent de retourner au port, on dirait que ma bête affamée s'est joint à nous... Je vous dédomagerais pour ... Pour ça.."
Je fis un signe de main pour montrer le sol. Comment il avait fait cet abruti ? Il avait cogné sa tête contre le tonneau pour faire une ouverture ou bien ? Louise me fit un signe de tête pour sortir de lacave et remonter sur le pont.
(Louise) "- Comment t'appelles-tu ?"
"- Marie Madeleine. Mais tu peux m'appeller MMP... Ahlala.. Quel bordel, je suis vraiment désolée mademoiselle.... ?"
(Louise) "- Louise. Mais ne t'inquiète pas. Ca arrive à tout le monde de finir ivre dans un endroit inconnu. Je crois. "
"- C'est l'histoire de ma vie ! Vous comptez accoster d'ici combien de temps, je ne voudrais pas trop être le boulet dans le groupe ?"
Sur le pont, nous pouvions admirer la beauté de la mer et le clapotis des.. Bordel sa tangue de ouf. Ma main se plaqua sur ma bouche, réprimant mon mal de coeur qui s'exprimait dans un hoquet.
(Ours) "- Cap'taine ! Comme on a un nouveau membre à bord, je sors l'apéro ? J'crois qu'elle va en avoir besoin la donzelle ahaha"
Et pendant ce temps là, Rhésus, pété comme un coing zigzaguait sur le pont, tentant de courir après la chouette de Louise qui semblait le narguer en se posant à chaque fois juste assez loin pour ne pas qu'il ai le temps de la rattrapper.
Un second invité, en la « personne » de Rhésus, est désormais présent sur le rafiot ; et qui dit second invité dit une bouche de plus à nourrir. Barf, pas grave ! Les calles sont remplies de nourriture et d’alcool à en rassasier dix comme M. Ours, c’est pas une demoiselle épaisse comme un roseau et son animal alcoolisé qui risquent de faire la différence. Quoiqu’elle paraît pas si frêle que ça, à y regarder de plus près… Mais bref, rien qui puisse être inquiétant pour les réserves, en soi !
- Euh ouais, y’a d’l’idée Ours, sors l’apéro. Allen, Vingt-deux, vous prenez les tables et vous installez tout le tointoin comme d’hab – Sir Nestor Hemsworth descend de là ! – et toi Leborgne tu restes à la vigie. P’tit chef devrait pas tarder à nous apporter la mise en bouche.
- Et vous Cap’tain, vous faites quoi ? » Demande Vingt-deux sans la moindre once de méchanceté.
- Bah moi j’vous regarde faire.
- Ah. Ok.
- On va faire machine arrière pour te ramener à quai mais ça risque de prendre un peu de temps, on a une p’tite coutume ici quand on réapprovisionne le navire. » Dit-elle à Marie Madeleine une fois ses ordres donnés. Du coup on y sera demain très tôt dans la matinée. J’peux pas faire mieux, sinon les zigotos qui sont ici vont râler comme pas possible et moi, je vais devoir les supporter comme ça jusqu’au prochain abordage. »
“ Merdouille, c’est ptête pas une bonne idée de lui parler de ça” se dit Louise après coup. Bon, bah tant pis, maintenant c’est fait… Elle espère que cette petite explication ne perturbera pas la demoiselle, ce serait assez bête qu’elle n’ait plus d’appétit avec toute la nourriture qui l’attend !
Quelques minutes suffisent aux deux jeunes hommes pour préparer la tablée. Les assiettes et couverts semblent tenir en place malgré les légers remous de la mer et même les bouteilles d’alcool se dressent fièrement debout, n’attendant plus que d’être consommées. M. Ours, tout transpirant, s’approche alors des deux femmes et leur tend une choppe qu’il s’empresse de remplir de blonde. Les autres sont également servis, et P’tit chef vient bientôt les rejoindre sur le pont afin d’y déguster son verre. La capitaine, une fois assurée que personne n’a été oublié, lève sa bière le plus haut possible – pas bien haut, donc – et brise le calme ambiant d’un bruyant « AU GLOUTON ! ». Elle porte alors le liquide jusqu’à ses lèvres, imitée rapidement par ses matelots, et finit le tout d’une seule traite comme s’il ne s’agissait que d’une limonade. Elle pousse un grand soupir de satisfaction et essuie la mousse sur son visage, visiblement ravie.
- Bon bon bon. P’tit chef, tu nous as préparé un truc à grignoter avant l’plat principal ?
- Sûr. J’ai des pillons d’chantelune, des olives marinées au jus d’ribou, quelques tranches de jambon de Phobou – j’en ai pas trouvé beaucoup mais, ça devrait suffire –, du foi de coq de Léral, du saucisson de Gloot et j’vous ai aussi préparé quelques plats en salade, histoire de varier.
- Super, ça d’vrait faire l’affaire. » Commente Louise, l’eau à la bouche. Bon bah, ramenez nous tous ça avec Ours et ensuite…
- Ensuite on bouffe comme des gros sacs ! » L’interrompt Vingt-deux.
La capitaine ne rajoute rien. Elle imite Vingt-deux qui s’est déjà attablé et invite leur nouvelle connaissance à faire de même. Quitte à devoir patienter, autant que ce soit dans la nourriture, l’alcool et la bonne humeur ! Rejoints rapidement par M. Ours, P’tit Chef et Leborgne, elle indique à ce dernier d’aller offrir une assiette au vieux – qui n’a toujours pas bougé – puis s’attaque elle-même au saucisson. La bouche pleine, elle s’adresse à Marie Madeleine pendant que les autres discutent comme à leur habitude.
- Du coup, tu faisais quoi là bas ? Au port, j’veux dire. T’y étais pas que pour te mettre une mine, si ?
Ce qui ne m'empêchait pas le moins du monde de me joindre à eux autour de cette table. Non parce que rien qu’en entendant l’appellation des pilons de chantelunes, voilà que mes jambes avaient failli se dérober sous mon poids. Alors je me retrouvais donc là, assise à côté de Louise. Cette étrange capitaine. Elle semblait si jeune entourée de ces hommes sans vergognes !.. Les capitaines, surtout des femmes ont généralement un grand pouvoir, un charisme qui dépote ou des formes de vigueurs pour maintenir un tel équipage. Note petite capitaine ne misait pas sur la dernière option. Enfin je crois pas. Regard de haut en bas. Elle à un jolie minois quand même. Mais alors devait-elle tout miser sur son pouvoir. L’invocation d’un Kraken ? Le pouvoir de faire tomber de la foudre ? Le-.... Oh tiens il a l’air bon ce saucisson.
“- J’étais de passage, après l’escorte de marchandises venant de la Capitale.. Mais de ce fait oui, passage à la taverne oblige. Je ne pouvais pas rentrer à la maison sans y passer, ce n’est pas dans mes habitudes…”-J'y ai dépensé la presque totalité de l'avance qu'on m'avait filé, rien qu'en boisson-.
(Vingt-deux) “- T’entend ça Ours ? Vous d’vriez bien vous entendre !”
(Ours) “- Pour commencer, elle peut t’apprendre à boire. Et surtout te montrer comment elle fait des pompes, elle.”
(Vingt deux) “- Hein ?”
(Ours) “- J’suis sûr le tonneau elle aurait pas eu de mal à le trimballer aha”
Mon regard se détourna des deux matelots qui se taquinaient. Si on parle de vérité, moi aussi j’avais des questions !
"- Et vous, un bateau pirate ? N’avez vous pas de problèmes à accoster au Grand port ? La réputation qu’on fait à des gens qui ont ce genre d’emblème n’est que peu reluisante quand même ! Même un gloot, aussi débile qu’il puisse être se ferait dessus en voyant l’étendard !"
(Allen) “- Arrête tu vas nous flatter !
Il me servit un nouveau godet. J’lavais déjà fini ? Mince, il voulait me saoûler la gueule pour que je sois une vulnérable jeune femme en détresse ? Ca se trouve c’était un plan de l’autre Blondinet pour abuser de moi; Il me fait des oeillades depuis tout à l’heure. C’est mes boobs qu’il matte là ? Je pris dans ma poche un dé avec lequel je jouais machinalement entre mes doigts, ce qui n’échappa pas à Allen.
(Allen) “- Tu joues aux jeux d’argents ?”
(Vingt-deux) “- Oh ! On s'fait un Strip Poker ? Allez cap’tain !”
“- Le Black Jack, vous connaissez ?”
Je fis un sourire à Louise. Si je voulais tirer des infos, peut-être avec le jeu ca serait plus facile ? Oh. Je ne voulais pas finir ligoté à la calle avec le blondinet qui s’agite autour.
Pendant ce temps, Rhésus avait changé de maître. Il se trouvait au pied de p’tit chef pour qui il avait désormais beaucoup d’admiration. Et surtout il avait compris que le petit homme mangeait comme un cochon et même si il cuisinait comme un dieu, on pouvait pas en dire autant de sa façon de manger.
- Crévindieu, bien sur qu’on connait ! Mais j’préviens de suite, on joue pas d’argent ici. C’est la règle sur l’rafiot.
- Vous êtes sur que vous voulez pas faire un strip-poker plutôt ?
- Non. Pis j’vois pas bien l’intérêt d’un jeu ou on doit retirer ses vêtements en perdant, personnellement. » Lui rétorque Louise.
A cette remarque, la plupart des regards masculins se portent instinctivement sur la nouvelle venue et cela n’est pas sans échapper pas à Louise. Quelques secondes sont malgré tout nécessaires pour que l’information circule correctement jusqu’à son cerveau, puis elle fait enfin le rapprochement dans un « Aaaaaah. » à peine dissimulé.
- Vous êtes des grands malades. Et puis pourquoi vous proposez jamais d’y jouer quand y’a que moi ?
- Ben euh. » Commence P’tit Chef.
- Disons que… » Enchaîne M. Ours.
- Comment dire, Capitaine. » Tente Allen.
- Bah vous êtes une gamine quoi. » Dit finalement Vint-deux, avant d’avaler un énième morceau de saucisson.
Louise inspire longuement et jette un regard furieux à son matelot. Celui-ci manque de s’étouffer avec sa nourriture lorsqu’il s’aperçoit de son erreur, puis se lève d’un bond avant de sortir de table.
- J’vais euh… A la cuisine pour euh, pipi. » Se justifie-t-il maladroitement.
- Non tu restes.
- Mais non. » Réplique-t-il, se mettant subitement à courir lorsque Louise sort également de table pour le poursuivre. Ils disparaissent l’un après l’autre dans les cales sombres et l’on entend plus parler d’eux pendant un moment. Pendant ce temps, le reste de l’équipage se tape un fou rire monstrueux auquel même Leborgne participe ; décidément, ce duo ne les lassera jamais…
- Ce qu’il est con quand même. » Commente Allen, essuyant une larme au coin de son œil. Bref, on peut pas parier d’argent, mais pourquoi pas jouer avec de l’alcool ? En attendant le repas, ça me paraît une idée sympathique.
- Oué.
- D’accord.
C’est ce moment que choisit Louise pour réapparaître, visiblement toujours irrité. Elle vient s’installer à table sans un mot puis place sa tête aux creux de ses mains, la moue boudeuse.
- Oh allez Capitaine, faites pas la tronche. » Tente Allen en espérant faire changer son humeur.
- Ferme-la et distribue les cartes.
- C’est des dés, actuellement. Et ceux de notre invitée, Marie Marlène c’est ça ? » Demande-t-il, sourire aux lèvres. Je peux ?
Sans attendre l’autorisation, il emprunte le dé de la demoiselle et le confie à Louise. Celle-ci regarde l’objet avec peu d’intérêt, mais finit tout de même par le prendre en main et l’y fait rouler.
- A vous l’honneur.
- C’est Marie Madeleine, qu’elle s’appelle. Et c’est pas l’invité qui lance les dés en premier, normalement ?
- C’est votre navire, tout de même.
- Bon. Bah on y va.
Trois premiers coups sont lancés. Louise obtient neuf et grimace. Elle enchaîne avec deux autres qui la ramènent à 17. Pas mal du tout, cela devrait être un bon début. Un peu moins énervée, elle fait glisser le dé jusqu’à leur convive.
- A toi.
Je pris un pilon. Bon dieu que c’était bon. Dans un “mmhmhmm” approbatif, je fis un signe de la main à p’tit chef, poing replié, pouce vers le haut, la bouche pleine. J’allais pas risquer de leur cracher dessus pour signaler que c’était bon tout de même. La capitaine apparaît de nouveau et reprend place à côté de nous, boudeuse. J’en profitais pour détacher une petite bourse de ma ceinture et la tendit à Allen pour qu’on ai plus de dés. Les dés, c’était ma vie. J’en avais toujours une ribambelle sur moi. On a jamais assez de dés. C’est comme l’alcool et le cul. Y’en a jamais trop.
"- Ne les écoutes pas, tu es très mignonne. Comme un p'tit Gévaudan"
Vas-y c’te poisse. Je lance un jeu, et c’est moi qui me prend une branlée. Premier jet, mes trois dés font un total de 10. Alors j’en relance deux, et là, deux dés de 2. 14 Points. Sérieusement. C’est Ours qui se mit à rire en premier.
(Ours) “- La chance du débutant, notre cap’tain à le cul bordé de nouille on dirait!”
Ours leva son verre à la santé de son capitaine avant d’en boire une gorgé hilare. C’est le moment que Vingt-deux avait choisi pour réapparaitre. Il revint sur le pont, en tanguant légèrement. Une corde enroulée autour de son cou, débraillé, le pantalon froissé… Allen se trouvait à ma droite, je me penchais alors vers lui en chuchotant, pendant que les autres matelots alpaguent leur confrère pour se moquer de lui.
“- Elle lui a infligé une .. une “correction”?...
(Allen) “- Oui, fermement. Il l’a bien mérité faut dire.”
“- Et donc tout le monde.. avec la capitaine.. ?”
(Allen) “- Hein ? Non non tu te méprends!” Allen se mit à rire en faisant signe de ses deux mains pour contester mon quiproquo. “Elle est bien trop naïve sur le sujet!”
Ah. Ouf. je commençais à croire que j’avais affaire à un bateau Gang-bang. Cette fois, tout le monde s'apprêtait à jouer à la partie, la première étant pour tester, histoire de. Vingt deux s’approcha alors de la table et posa son pied sur un tabouret. Ainsi positionné, il nous surplombait tous.
(Vingt-deux) “- J'annonce ! Comme il n’y a pas de strip Poker, il y aura un gage pour le perdant !
(Louise) “- De quel type ?”
Je sentais le coup foireux venir. Ils allaient surement me mettre à la calle pour me faire ramer ou me revendre sur le marché noir ensuite pour se faire des cristaux ? Qu’adviendra-t-il de Rhésus ? Allaient-ils en faire un paté en croute de coeurl.. ?
Vingt-deux tendis les mains devant lui, comme pour saisir deux grosses pêches invisibles.
(Vingt-deux)“- On peut éventuellement miser le fait de toucher les boo-...”
(Allen) “- Un événement de notre passé que personne ne connaît ?” Coupa le jeune homme.
(Ours) “- Plutôt d’accord avec Allen. Bien que me faire peloter peut être drôle, je préférais que ca viennent de quelqu’un d’autre que de toi ahaha”
"- Ca me va. Comme ça vous m'expliquerez peut-être comment votre petit équipage à fait pour voir le jour ! "
Ils m'intéressaient tout de même. Pis j’voulais pas trop que la capitaine soit contrariée et fasse appel au Kraken. Je lance les dés. Premier jet, 10. Je relance deux dés. 7. Total 17.
“- Qui dit mieux ?”
Marie Madeleine semble s’être fait sa place dans l’équipage. Les matelots l’apprécient tous et même si elle a l’air un peu sur la réserve, elle s’intègre plutôt bien. On pourrait croire qu’elle a toujours fait partie de la boutique ! Louise s’en voit rassurée : elle n’aurait pas aimé se coltiner une pimbèche râleuse ou une timide maladive comme il en existe des milliers sur Aryon... MMP, c’est une femme d’un genre peu commun et ça plait bien aux pirates. Surtout à Vingt-deux, mais celui là n’est pas très difficile en affaires faut dire.
Vu que les jeux d’argents ne sont pas autorisés à bord, Allen propose une règle un peu insolite mais amusante. Désormais, le perdant devra raconter une anecdote sur lui-même que les autres ne connaissent pas. Voilà qui est intéressant ! Évidemment, l’invitée est celle qui a le plus à y gagner car elle ne connait absolument rien de la vie de ses hôtes. Voilà une façon bien originale de découvrir la vie des personnes avec qui on partage sa graille.
Elle est d’ailleurs la première à jeter les dés et obtient un dix-sept. Pas mal. P’tit Chef, lui, score à quinze et tire une grimace.
- Y’a pas que le score qui est petit, pour toi. » Plaisante Vingt-deux tout en lançant à son tour. Dix-huit.
- Gros score. On dirait que quelqu’un a quelque chose à compenser… » Réplique Allen, provoquant l’hilarité générale.
- A moi ! » Dit Louise.
Elle obtient un misérable treize et semble se décomposer. Allen éclate de rire et pose une main sur son épaule qui se veut rassurante pendant que M. Ours et Leborgne jettent leurs dés. Dix-neuf chacun ! Voilà qui mérite un bon petit « tape m’en cinq » bien viril. Finalement, le premier lieutenant est le dernier à lancer et obtient un dix-sept. Louise roule sous la table, les autres rigolent de plus belle.
- On peut pas faire lancer Sir Hemsworth ? » Propose-t-elle en dernier recourt.
- Il a pas de bras, ça risque d’être compliqué. Aller Capitaine, soyez pas mauvaise joueuse ! On vous écoute tous.
- J’vous retiens avec vos idées à la con. Bon…
Résignée, elle décide de tenir parole. Après avoir puisé dans sa mémoire pendant une dizaine de secondes, elle prend une grande respiration et commence à expliquer sa petite histoire. Elle aurait un jour rencontré une garde qui patrouillait seule à la Capitale et qui l’aurait prit pour une petite fille égarée. Bien qu’elle avait déjà seize ans, la femme ne l’a jamais crue et a décidé de la raccompagner jusqu’à chez elle en lui tenant la main. Après l’avoir confié à sa parente, elle lui avait fait la morale comme à une enfant de huit ans et demandé à la mère de faire plus attention à l’avenir.
Terminant son anecdote, elle s’empare de la choppe la plus proche et boit son contenu – de la bière -en une lampée. L’équipage est toujours hilare, sauf Vingt-deux qui semble difficilement contenir un rire.
- C’est bon, moque toi si tu veux j’suis pu à ça prêt. » Lui dit-elle, visiblement un peu vexée. Sinon P’tit Chef, la cuisson du coup c’en est ou ?
- J’retourne voir après la prochaine partie. Normalement ça devrait pu tarder, on va pouvoir passer à table.
L'équipage répond pas un "Aaaaah.." commun à l'annonce de cette bonne nouvelle. Pas que l'apéritif est mauvais, tout le contraire, mais l'odeur qui s'échappe depuis tout à l'heure des cales donne l'eau à la bouche...
“- A quel âge as-tu pris le commandement de ce navire d’ailleurs ?”
Questionnais-je alors la capitaine, en prenant un bout de ce magnifique saucisson. C’était le moment de lui demander nan ? Ca mettrais une lumière déjà sur son âge actuel, à moins qu’elle ne l’ai eu a ses douze ans, genre, pour fêter l’arrivée de ses menstru ? “Tu es une vraie femme maintenant ma chérie ! Va voguer sur les mers entourées de valeureux mâles!” . Une dernière partie, et on aurait le plat suivant ! Plutôt une bonne nouvelle car mon ventre, rien que de sentir les victuailles en train de cuir se sentait aussi joyeux qu’un coq de léral qui aurait trouvé sa dulciné poulette. Un dernier lancé de dé alors hein ! Les dés s'abattent alors tour à tour. Louise cette fois nous fait part d’un beau 17. Il fallait sauver l’honneur après tout ! Ours la suivait de près avec un 18. Puis mon tour, un 20. Wouh pas mal. Et puis là, c’est le drame. P’tit chef nous fait 22. Outch ! Pour le jeu, Leborgne, Vingt-deux et Allen lance tout de même leur dés réalisant un 15, un 20 et un 19. Mais le résultat était là. Vingt-deux secoua alors sa main machinalement dans un sifflement moqueur. P’tit chef lui soupira et pris une rasade de son verre. Cul sec.
(P’ti chef)“- J’aurais dû m’tirer pour aller r’tourner la graille vain dieu.”
(Ours et Vingt-deux, en coeur) “- Une histoire ! Une histoire !”
(P’ti chef)”- Alors ! Ca remonte à y’a pas si longtemps, lorsque j’avais encore une bonne poignée de ch’veux sur la tête…”
(Allen)”- Imaginez le avec une queue de rat et des rouflaquettes” Nous lâche Allen en se penchant sur Louise et moi. Alors, plissant les yeux, je tentais de me plonger dans le récit du cuistot, avec quelques années de moins, et cette coupe de cheveux… Beau garçon, j’imagine ?
(P’ti chef)“- J’tenais une cuisine avant vous savez ! Et bien, croyez le ou non, un jour, un diamant brut est rentré ! Une femme, une reine, des yeux émeraudes magnifiques, des jambes galbées comme jamais, des cheveux de jais qui…”
(Vingt-deux) “- Elle faisait ta taille ? ahahaha”
P’tit chef lui jette un os de poulet pour le faire taire, néanmoins, il ne nia pas pour autant.
(P’ti chef)“- “A l’époque, on avait pas les moyens d’acheter de la pitance de qualité, alors on ach’tait de la viande de Globack et de feupagnol qu’on faisait passer pour de la viande de Coq léral et de Ptidodo” -Un “ooooh” général devant cet affront fait à la cuisine- “Et donc c’te belle ribaude, elle avait flaché sur mon bourguignon de globack, pensant manger un met de grand cuisinier !” On était tous suspendu à ses lèvres, hochant la tête. “Elle en a repris, encore et encore, me faisant la conversation pendant des heure et des heures, gloussant à mes blagues...Ah quelle soirée.”
“- Et ensuite ? Que s’est il passé ?”
(Ptit chef) “- Bah. Elle a été prise d’une chiasse pas possible et elle est partie en courant. Le restau a fermé suite à ca.”
Indignation générale
(Vingt-deux) “- Mais… Tu l’a pechô au moins ?!”
P’tit chef se lève, haussant les épaules pour se rendre en cuisine.
(P’ti chef) “- Bah non. Elle avait le feu au cul mais pas pour les mêmes raisons.”
On se regarde tous comme des cons avant de rire. C’était pourri comme histoire… Bon, à qui le tour maintenant ? J’essuyais la larme qui me coulait de l’oeil avant de reporter mon attention sur Louise.
“- Tu as de sacré phénomène dans ton équipage.. Ou l’as tu trouvé celui la ?”
Visiblement, l’invitée semble friande des anecdotes de l’équipage. Elle n’a d’ailleurs pas hésité à poser une question à Louise après qu’elle ait terminé la sienne, curieuse de savoir à quel âge la demoiselle a prit le commandement de son navire. Celle-ci n’a pas vraiment le temps de répondre à la question que l’autre partie est déjà commencée, mais elle tâche malgré de glisser un petit « Dix-huit. » pour satisfaire la curiosité de sa camarade.
P’tit Chef perd haut la main, ayant dépassé le score de vingt-un à cause d’une relance de trop. L’équipage, comme d’habitude, est très moqueur et le nain se voit contraint de passer à table. L’histoire qu’il raconte, si elle est hilarante, n’a en revanche pas le mérite de mettre en valeur ses protagonistes et tous garderont sans doute l’image de la pauvre femme victime de maux de ventre en tête… Le narrateur hausse les épaules et s’en va en direction des cuisines pour continuer sa tâche, apparemment très peu affecté par la réaction de ses compagnons. Marie Madeleine profite d’ailleurs de cette courte pause pour succomber une fois encore à sa curiosité, et Louise ne peut que sourire face à l’intérêt qu’elle porte à son équipage.
- C’est mon père qui a r’cruté cet équipage. Et d’ailleurs, P’tit Chef a été récupéré dans une caisse de nourriture alors qu’il était en train de dormir. Ca me rappelle vaguement quelqu’un, maintenant qu’on en parle. » Glisse-t-elle sans subtilité, moqueuse.
- Il paraît qu’il était fauché comme pas deux et qu’il comptait mettre fin à ses jours en allant s’jeter à la mer. Et il a finit par s’endormir dans une caisse, on l’a récupéré avec Jacob. Haha. » Fait remarquer Ours, l’un des plus anciens sur le navire.
- C’est bien ça. » Confirme Leborgne pour sa première intervention de la journée.
- Bon, dernière partie !
Louise semble enjouée. Elle glisse les dés en direction de Vingt-deux qui les lance aussitôt et obtient un honorable seize. Allen est le suivant et fais moins bien que son camarade avec un quinze. Louise vrille en voyant son score : quartorze !
- Merdouille, pas ça Zinedine !
Zinedine c’est le clodo qui distribue des coups de boules sur les quais lorsqu’il a un peu trop bu.
- Dix-huit ! Haha ! » S’amuse M. Ours, satisfait.
Leborgne obtient un dix-sept. La capitaine serre les dents : il ne reste plus qu’une seule personne, une maigre chance d’éviter une autre anecdote… MMP récupère les dés, lance et…
- Oooh !
- Pas mal. » Commente Vingt-deux en haussant les sourcils.
- Non mais moi je joue pu à votre jeu, c’est finit. » Râle Louise, irritée.
- Soyez pas mauvaise joueuse Capitaine. En plus, vous qui disiez qu’on joue pas au Strip Poker avec vous…
Les joues de la concernée se teintent de rose tandis qu’elle fixe Allen. Elle espère qu’il ne l’imagine pas un seul instant… Bref.
- Aller, l’anecdote !
- Ouais. Bon. Bah c’était dans mon ancienne vie encore une fois, avec ma mère. On était parties faire des emplettes et on s’rend dans cette boutique ou y’a pas mal de jolies robes... Quoi, ça pose un problème que j’aime les jolies robes ? » Dit-elle à Vingt-deux qui commence déjà à rire. Du coup la vendeuse nous alpague assez vite – reprend-t-elle – et propose de nous aider à choisir, parce que ma mère c’est pas trop ça niveau goût. L’truc c’est que cette femme était persuadée que j’étais une môme et arrêtait pas de m’apporter des vêtements de gamine, et ma mère validait en pensant que c’était adapté. Du coup ce jour là j’suis repartie avec une garde-robe d’enfant vu que la matrone a insisté pour que j’achète la moitié des trucs qui m’étaient proposés. V’là tout.
- Mais en fait vous avez passé seize années de votre vie à être une enfant, et quatre autres à être considérée comme tel ? » Constate M. Ours.
- C’est l’idée ouais.
Quelques rires sont audibles, mais l’anecdote perce beaucoup moins que la précédente. L’effet de surprise en moins, sans doute… P’tit Chef choisit ce moment pour surgir avec un premier plat en main, une sorte de gros jambonneau fumant entouré de salades, cornichons et tomates en vinaigrette.
- En entrée, ce sera un gigot de Ptitdodo ! » Annonce-t-il fièrement.
- Tu nous as encore fait une entrée pour vingt-personnes…
- On est deux de plus aujourd’hui, ça sera pas de trop. Et puis quand vous verrez le plat principal, votre estomac fera un peu de place vous inquiétez pas !
(Allen) “- Et donc toi Marie, d’où viens tu ? Car tu commence un peu à nous connaître mais nous ne savons rien de toi mis à part ton penchant pour l’alcool et… ”
(Vingt-deux) “- Et les beaux mecs!”
(Allen) “- J’aurais plutôt dis “les situations coquaces” !”
“- Oui c’est vrai. J’habite à la Capitale, mais je suis aventurière, je passe la plupart de mon temps sur les routes ou en mission pour la guilde.”
(Louise) “- Et t’es spécialisé dans un domaine particulier ? Chasseur de prime, mercenaire .. ?”
“- Pour être honnête, tant que ça paie, je fais toutes les missions sans distinctions..”
Enfin toutes, non. J’avais ma fierté quand même ! Je n’allais pas prendre une mission de type “remplacer Yvonne” la danseuse dénudée favorite du cabaret des oies sauvages! Y’avait des limites à ma bonne volonté quand même. Ptit Chef se leva en marmonnant quelque chose et se rendit de nouveau en cuisine, talonné par Rhésus qui avait fait de lui son nouveau meilleur ami. Le pti-dodo englouti je passais ma main sur mon ventre. C’était super bon mais alors, je savais pas si il me restait encore de la place.
“- C’était super bon… Mais j’ai plus faim maintenant je crois”
(Louise) “- Ah non, tu as embarqué sur c’bateau, va falloir lui faire honneur !”
La pirate me lança un petit sourire pendant que de l’autre côté, on pouvait entendre le chef revenir les mains pleine. Il posa son plat sur la table.
(Ptit chef) “- Coq léral à la moutarde et ses petits légumes du soleil”
(Ours) “- Rassure nous, c’est pas du Globack que tu vas essayer de nous vendre comme du coq léral ?”
Questionna alors le marin, en faisant écho à l’histoire que nous avait raconté le cuistot. Ce dernier rigola et fis non de la tête en commençant à servir tout le monde. Dont moi. Mon assiette était partie et revenue seule devant moi.Mais bon. Vu cette magnifique deur, je ne me fis pas prier longtemps. Vingt-deux apporta un petit tonneau d’alcool de lucol bleu et nous servit également tour à tour, pour accompagner le plat. Une tuerie. Un verre, puis deux. J’avais déjà bien bu avec ce que m'avait servi Ours précédemment.
(Ours) “- Marie, toi qui à l’air de passer une bonne partie de temps à la taverne, ne connais-tu pas une bonne chanson pour changer notre répertoire ? Leborgne, il se démerde bien, mais on les connaît que trop bien ses chansons maintenant !”
“- Et bien, vous connaissez la chanson de la jeune fille d’la cariole ? De René ?
Beaucoup trop enthousiaste, je me mis debout devant la table. Leborgne avait entre temps récupéré son accordéon et attendait que je lui signe l’air pour se caler dessus. Lorsqu’il fut prêt, je me lançais, avec tout l'entrain et l’assurance de quelqu’un qui avait déjà bu un verre de trop.
[Tu peux la chanter avec la chanson de Renaud, "La jeune fille du metro"]
C'était une jeune noble simple et booonne,
Qui n’demandait rien à persooonne,
Un soir sur le quai y avait presse, ‘presse ‘presse
Un jeune garde osa, je l'confesse, ‘fesse ‘fesse
Lui passer la main ... sur les chev'euuux,
Comme elle était gentille, elle s'approcha un peu...
Mais comme elle craignait pour ses rooobes,
A ses attaques elle se dérooobe,
Sentant q’qu'chose qui la chatouille, ‘touille ‘touille
Derrière son dos, elle tripatouille, ‘touille ‘touille
Et tombe sur une belle paire... d'tonfa
Que l'jeune homme utilisait, pour caler son braaas..
En voyant l'émoi d'la d'moiseeelle,
Il s'approcha un p'tit peu d'eeelle,
Et comme en chaque homme, tout de suite, ‘suite ‘suite
S'éveille le Fenrir qui l'habite, ‘bite ‘bite
Le jeune homme lui sortit.. son insigne
Et lui dit j’suis en'assignation et j'me rend à la vigne
La cariole continue son voyaaage,
Elle se dit c'jeune homme n'est pas saaage,
Je sens quelque chose de pointu, ‘tu ‘tu
Qui d'un air ferme et convaincu, ‘cu ‘cu
Cherche à pénétrer... dans mon coeur,
Ah qu'il est doux d'aimer, quel frisson de bonheur...
Ainsi à Aryon quand on s'aiiime,
On peut se le dire sans problèèème,
Peu importe le véhicule, 'cule 'cule
N'ayons pas peur du ridicule, 'cule 'cule
Dites lui simplement... je t'en prie,
Viens donc à la maison manger une part de Gloot frît...
Je fis une courbette pour saluer le public en délire. J'crois que l'alcool me montait à la tête
- J’adore. Haha. » Commente simplement M. Ours tout en applaudissant.
- Jamais entendue celle-là.
- Une autre, une autre ! » Réclame Vingt-deux, visiblement convaincu par la prestation de leur invitée.
- Montrez moi aussi ce que vous savez faire, je ne vais pas être la seule à chanter de la soirée tout de même ?
- C’est pas faux ça. Capitaine, une petite chanson pour nous ?
- Bonne idée, ça fait longtemps. » Fait remarquer Allen.
- Pourquoi pas ouais.
La jeune Louise ne s’fait pas prier et monte énergiquement sur la table, sa pinte toujours à la main. Elle en engloutit une grande lampée avant d’essuyer la mousse sur son visage à l’aide de sa manche, puis fait signe à Leborgne de commencer à jouer. L’homme, instinctivement, devine la musique qu’elle a choisit et en entame les premières notes. La capitaine s’éclaircit alors la voix, puis :
- C'est un fameux bateau qui f’ra pu d’vieux os, hissez haut ! ♪
HISSEZ HAUT ! » Répète un cœur improvisé.
- Ce vieux rafiot ! Dix huit nœuds quatre cents tonneaux, j’fais pas l’fier quand il s’met à prendre l’eau. ♪
L’équipage éclate de rire, mais la chanson reprend rapidement.
- Tiens bon la vague et tiens bon le vent, hissez haut ! ♪
HISSEZ HAUT !
- Ce vieux rafiot ! Pour Lucy toujours droit devant, nous irons jusqu’à un bon bistrot. ♪
- Je pars pour de longs mois en laissant Margot, hissez haut ! » Reprend Vingt-deux. ♪
HISSEZ HAUT !
- Ce vieux rafiot ! D’y penser j’avais le cœur gros, ça ma mit l’cafard pour l’apéro. ♪
Tous se mettent à chanter, Marie Madeleine les imite alors.
Tiens bon la vague et tiens bon le vent, hissez haut ! HISSEZ HAUT ! Ce vieux rafiot. Si Lucy s’en mêle droit devant, nous irons jusqu’à un bon bistrot ! ♪
- On prétend que là bas l’alcool coule à flots, hissez haut ! ♪
HISSEZ HAUT ! Ce vieux rafiot !
- De la bière pour quelques cristaux, j’en ramènerai plusieurs tonneaux… ♪
- Yeah !
Louise s’incline pour saluer son public lorsque celui-ci se met à applaudir. Elle avale alors une énième gorgée d’alcool tout en titubant, faisant un voyage express de la table jusqu’au sol lorsqu’elle s’approche un peu trop du rebord. Bien que légèrement ivre, Allen se rapproche d’elle pour lui demander si tout va bien et l’aide à se remettre debout. Elle grimace un peu.
- Aie. J’me suis blessée à l’arrière de la tête j’crois. Mais ça va aller ! » Le rassure-t-elle, hilare.
- Pavés d’unicorne aux échalotes avec sa sauce au poivre et purée de pomme de terre.
P’tit Chef, s’étant absenté à la fin de la chanson, réapparait avec des nouveaux plats en mains et les dépose à l’emplacement de chaque personne.
- J’ai pensé que quelque chose de léger pourrait faire du bien, après ce que vous venez d’avaler.
- On a pas la même définition de léger, j’crois.
- Aller, vous aurez bien un peu d’place pour ça ? Y’a le fromage et le dessert qui arrivent, après.
Mon coeur manqua un battement alors que mes joues devinrent légèrement plus rosies.
(Vingt-deux) “- Oh ! Marie ! Oh oh ? Tu veux du pinard encore ?”
“- Je euh..” Détournant le regard du chef, ma tête pivota vers Vingt-deux qui me fixait la bouteille à la main.
(Vingt-deux) “- Eh beh, ne rougie pas ainsi quand je te parle tu vas finir par me troubler là !”
Je ne répondis pas, posant une main sur l’une de mes joues. Il avait raison, j’étais rouge comme une un lucol rouge ! Le plat posé sur la table, Ours prit la relève et prit l’assiette du capitaine, puis de tout l’équipage. Je le regardais couper la viande avec une rare délicatesse.
(Louise) “- Si tu veux, après le repas tu pourras aller dormir dans ma cabine, tu dois être fatiguée non?”
“- Oh non ne t’inquiète pas, je peux dormir avec les matelots !”
(Vingt-deux) “- J’ai un hamac deux places ! J’peux partager !”
(Louise) “- Elle aurait plus de place avec Ptitchef dans ces cas là !”
L’unicorne passa de travers. Dormir avec.. Rien que d’y penser, je fus prise d’une nouvelle bouffée de chaleur. Merci les hormones. Je me mis à rire et repris d’une voix assurée pour cacher ma gêne;
“- Ahaha De toute manière, qui à dit que je souhaitais dormir hein ? La nourriture est bonne et il fait bon y vivre sur ce navire !”
Enfin j’dis ca, mais quand on aurait fini le tonneau de pinard, j’suis sûre d’un truc, c’est qu’on allait rouler sur le pont. D’ailleurs, j’étais pas malade, c’est étrange ? Était-ce l’alcool qui me faisait passer l’envie de faire une offrande aux dieux de la mer ?
“- Dites-moi, c’est normal si je vomi pas ?”
(Allen) “- Eh, je dirais parce que la nourriture est bonne ?’
“- Non non ! Enfin si elle est bonne, mais je suis malade en mer, généralement, et là…”
(Louise) “- Ah ca ! C’est grâce aux Olives au jus d’ribou ! Ptitchef met dans sa sauce des feuilles de “Mer-oklm” ca réhausse le goût !”
Mon regard s’attarda de nouveau sur ptichef. Quel homme, en plus d’être un grand nourricier, il avait fait passer mon mal de mer… Ce dernier, sentant mon regard se pencha vers Ours pour lui marmonner un truc. “Ca m’manque de sel c’truc là, file moi le pot la bas”... Il parlait de moi ? J’en étais sûre leur regard étaient maintenant dans ma direction. Je détournais alors la tête vers Allen et Louise alors qu’Ours se penchait sur la table pour chopper le contenant. Il avait capté comment je le reluquais ? Oh mon dieu détournons les yeux. Le plat achevé, je m’avachis un peu plus sur mon tonneau et bu de nouveau un verre.
(Vingt-deux) “- Accrochez vous les amis, c’est mon tour ! Cette chanson, elle est pour vous...” Vingt deux venait de se lever de sa table et fis un clin d’oeil dans notre direction à Louise et moi. Ca devat être pour sa capitaine. Une chanson d’amour ?
[La boiteuse, air de la chanson ici]
"- Quand la boiteuse s'en va au marché"
(Avec l'équipage!) "- Quand la boiteuse s'en va au marché"
"- Elle n'y va jamais sans son épée"
(Avec l'équipage!) "-Elle n'y va jamais sans son épée"
[Tout le monde en coeur]
"- Et elle va sur la Place commerçante
Tortillant des naches, gueulant comme une croulante
Ah, jamais on a vu, non jamais vu
Un si beau bois que celui de la boiteuse
Ah, l'on ne verra plus, reverra plus
Une boiteuse avec une si belle jambe de bois
Sur l'air du tralalala, Sur l'air du tralalala
Sur l'air du tralalalalalalalala"
"- Quand la boiteuse s'en va en mission"
(Avec l'équipage!) "-Quand la boiteuse s'en va en mission"
"- Elle n'y va jamais sans son smilodon"
(Avec l'équipage!) "-Elle n'y va jamais sans son smilodon"
[Tout le monde en coeur]
"- Et elle s'en va, le long de la frontière
Tortillant des naches, marchant comme une guerrière
Ah, jamais on a vu, n'a jamais vu
Un bois si entret’nu que celui de la boiteuse
Ah, l'on ne verra plus, reverra plus
Une boiteuse avec une si belle jambe de bois
Sur l'air du tralalala, Sur l'air du tralalala
Sur l'air du tralalalalalalalala"
"- D’la Capitale jusqu'au Village perché"
(Avec l'équipage!) "-Et du Grand Port jusqu'à l’arbre sacré"
"- Elle est connue de tous les Taverniers"
(Avec l'équipage!) "- Elle est connue de tous les Taverniers"
[Tout le monde en coeur]
"- Et elle s'en va, sur les routes marchandes
Tortillant des naches, s’prenant pour une tisserandeu
Ah, jamais on a vu, n'a jamais vu
Un bois si bien sculpté que celui de la boiteuse
Ah, l'on ne verra plus, reverra plus
Une boiteuse avec une si belle jambe de bois
Sur l'air du tralalala, Sur l'air du tralalala
Sur l'air du tralalalalalalalala"
"- Quand la boiteuse va s’battre à Gueule Cassée"
(Avec l'équipage!) "- Quand la boiteuse va s’battre à Gueule Cassée"
"- Elle est grand’ pote avec tous les blessés"
(Avec l'équipage!) "- Elle est grand’ pote avec tous les blessés"
[Tout le monde en coeur]
"- Et elle s'en va, flâner le long des stand
En montrant sa prothèse à tous ceux qui l’demand’
Ah, jamais on a vu, n'a jamais vu
Un si beau bois que celui de la boiteuse
Ah, l'on ne verra plus, reverra plus
Une boiteuse avec de si belle jambe de bois
Sur l'air du tralalala, Sur l'air du tralalala
Sur l'air du tralalalalalalalala"
Très belle chanson d’amour en effet ! J’applaudis accompagné de l’équipage hilare. Même Rhésus semble content de sa soirée. Il est où d’ailleurs ? Tournant la tête, je le cherchais du regard avant de le trouver derrière ptitchef qu’il suivait comme son ombre, en espérant avoir du rab. C'est le moment que je choisis pour me décider à aller au toilettes, tentant de me lever maladroitement.
"- J'en peux plus faut que j'aille au toilettes.. Vous en avez par ici où faut que je fasse par dessus bord ?"
(Louise) "- Faut descendre, tu veux un coup d'main ?"
(Allen) "- Capt'ain j'suis pas sûr que vous soyez dans un meilleur état que..."
La capitaine s'était levée en titubant et avait passsé son bras sous mon épaule, dévisageant son second "j'suis une grande fille" aurait-elle pu lui envoyer. Titubant ensemble, nous abandonnions le navire pour descendre dans le bateau.
- Euh ouais, c’est par là j’crois. J’y vois plus rien, y fait fichtrement sombre ici.
S’qu’il est difficile de porter une personne qui a picolé. Encore plus quand la personne en question fait quatre têtes et une quinzaine de kilos de plus que soi, et que la pièce est si sombre qu’on y percevrait difficilement une vache à un mètre d’la figure. Le fait d’être alcoolisé soi-même n’aide pas non plus, faut dire. Barf, ça lui apprendra à vouloir jouer les malines… Allen avait bien tenté de la prévenir, mais le pauvre s’est fait directement rembarrer en un seul regard. La capitaine est déjà têtue en temps normal, mais avec quelques verres dans le cornet, elle devient rapidement imbuvable – sans mauvais jeux de mots.
- Pas UN SEUL foutu de m’aider ! » Maugrée-t-elle tout en descendant précautionneusement les marches qui conduisent à l’étage inférieur.
… Et de mauvaise foi.
- On arrive, c’est juste là. » Lui annonce-t-elle en approchant d’une porte. Voiiiilà.
Louise laisse Marie Madeleine entrer dans les sanitaires comme une grande et la prévient qu’elle retourne à l’étage continuer à boire avec les camarades. Elle remonte difficilement les marches, même seule, mais finit par atteindre le pont après quelques minutes d’efforts. Lorsqu’elle arrive, M. Ours vient de terminer une chanson et l’ambiance est désormais beaucoup plus légère. Seul Allen et Leborgne ont la parole et débattent de l’efficacité – ou non - de la nouvelle méthode pour effectuer le fameux nœud cabestan. Passionnant. Ou pas.
- Pfiuh, j’commence à fatiguer. » Dit la Capitaine en s’approchant de son tonneau.
- Y’a d’jà une bonne partie de la nuit qu’est passée. On arrivera dans quelques heures. » Lui dit Vingt-deux, peu intéressé par la discussion en cours.
- D’acc’ ! Bah c’est une bonne nouvelle.
- (…) Non parce qu’à moins d’être nyctalope, l’ancienne méthode, elle est pas facile à effectuer dans l’obscurité. Avec celle-là, aucun soucis !
- S’qui sont chiants à parler de nœuds. HEY, Allen ! Vous avez rien de mieux à faire que d’parler de ça ? Oh merde d’ailleurs maintenant que j’y pense, l’est ou Nestor ? Et Rhésus ?
- Euh, Rhésus est retourné avec P’tit chef. Ils sont partis chercher le dessert vu que tout le monde a refusé le fromage. Sir Nestor Hemsworth est perché là haut, dans le nid-de-pie.
- Cool. Tout va bien alors.
- Tout va bien, Cap’tain.
Louise se sent toute patraque d’un coup. La nourriture, plus le fait d’avoir dépensé pas mal d’énergie certainement. Elle a beau être la plus jeune, il semblerait qu’elle ne soit pas parmi les plus coriaces lorsqu’il s’agit de tenir l’alcool et rester éveillé jusqu’à pas d’heures. Devrait-elle aller se coucher et abandonner Marie au milieu de cette bande de poivrots ? Le mieux est au moins de l’attendre avant de prendre congé… Elle se contente de s’étendre sur la table, la tête au creux de ses bras. Il faut tenir. Juste un peu… Un tout petit peu.
Elle finit par s’endormir au bout de quelques secondes. C’était une mauvaise idée !
Lorsqu’elle se fait réveiller par le cri des mouettes, Louise constate qu’elle a été déplacée prêt de la barre et qu’une couverture a été posée sur elle. Le jour s’est déjà levé et les cotes sont apparentes au loin, bien qu’encore éloignées. Mince, il semblerait qu’elle se soit bel et bien endormie…
La demoiselle repousse doucement Sir Nestor, installé contre elle, puis s’étire paresseusement. La matinée est encore fraîche ; par précaution, elle décide de garder la couverture sur elle – parce que c’est très doux, aussi – et s’approche des escaliers menant au pont, constatant que la table et les tonneaux sont toujours présents à leur emplacement de la veille. La nourriture et les plats, en revanche, ont été débarrassé et le sol nettoyé. Rhésus dort calmement devant la cabine du Capitaine, là ou Marie Madeleine a sans doute été installée, et le duo Allen / Vingt-deux est quand à lui déjà au pied d’œuvre.
- Salut Louise. » Lui dit Allen, en plein nettoyage de rambarde. M. Ours t’as porté jusqu’en haut hier. On s’est dit que tu voudrais être réveillée avec le soleil.
- Salut. Marie est dans ma piaule ?
- Ouep.
- Cool. J’ai pas pensé à lui dire qu’elle pouvait dormir là bas. Vous avez bien fait.
- Bah à vrai dire, elle était tellement torchée qu’elle aurait oublié. C’est nous qui l’avons conduit quand on a terminé y’a quelques heures à peine.
- Quoi ? Mais vous avez pas dormi vous deux ?
- Si si, tout juste deux heures. » Lui dit Vingt-deux, occupé à astiquer le pont.
- On s’est fait quelques jeux d’alcool hier quand Leborgne et M. Ours sont partis se coucher. Une vraie rasade. Marie est super douée.
- Vous êtes des grands malades. » Constate-t-elle, elle-même encore un peu fatiguée par sa courte nuit.
- C’est elle la malade. Elle nous a mit K.O comme jamais. Mais ça fait du bien !
- Tu m’en diras tant.
(Vingt-deux) “- Mais c’est pas possible d’avoir le cul bordé de nouilles comme ca !”
(Allen) “- C’est le jeu, allez hop fait nous un beau cul sec..”
Les dés dévoilés, je venais de lui foutre une nouvelle rouste. Allen s’en tirait pas si mal pour l’instant, il arrivait à s’épargner pas mal de cul sec, en revanche Vingt-deux.. Il buvait presque à tous les tours, le pauvre! Mais bon joueur, souvent, je l’accompagnais car je ne buvais pas assez à mon goût! C’est dur d’avoir de la chance! Je ne savais pas combien de temps ca avait duré, ni combien de millilitres, de centilitre, que dis-je ! De litres j’avais bu, mais une chose était sûre, le jour commençait à pointer le bout de son nez.
“- C’est magnifique !..” Déclarais-je en levant le nez de la table pour regarder l’horizon.
(Vingt-deux) “- Pas autant que ..”
“- Tu crois que si j’vomis par dessus bord, ca va attirer les poissons ? On pourra s’en servir pour faire un brunch ?”
(Allen ) “- Aha non, ne te donne pas cette peine, nous avons assez à manger sur le navire !”
Je me redressais tout de même, me levant de mon assise, me provoquant un léger vertige. Il était déjà si tard. Enfin si tôt. Peut-être pourrais je arriver à me glisser dans le hamac de Ptit-chef ? Ours soti de nul part et arriva près de la table.
(Ours) “- Vous êtes encore là vous! Allez oust, allez dormir un peu. J’vous réveille à une heure décente. Va falloir qu’on astique le rafiot.”
(Allen) “- Nous attendions ton arrivée, afin de ne pas laisser le navire sous surveillance, évidemment.”
Allen sourit et vint se poster à mes côté, suivi par Vingt-deux pour m’amener à la cabine de leur capitaine. Bon, dès qu’il partirons je mettrais à exécution mon plan. Un escalier plus bas, me voici dans la chambre de Louise. Je m'assois, aller, juste deux minutes. La porte se ferma, et mon corps tomba lourdement sur le lit.
“- Mortecouille, cette lumière…”
Ouvrant les paupières, je découvrais l’endroit ou je me trouvais. Dans un sursaut, je roulais hors du lit et me rétamer sur le sol. J’étais où encore ? Mains sur le front, je scrutais des deux côtés. C’était clairement pas le Hamac de Ptit chef, j’avais dû sombrer plus vite que prévu. Dommage. Mains au sol, je me relevais comme un vieux soulard qui aurait pas désaoulé. En vrai, c’était totalement le cas. C’est fou comme on est bien par terre. J’ouvris alors la porte, pour sortir sur le pont et trébucha sur un truc mou. Un truc mou qui grogne ? A quatre pattes sur le plancher, mon visage pivota pour regarder quel était cette chose.
“- Tain’ Rhésus ! … J’tai pas fait mal au moins ? ..” Le coeurl se redressa, m'obligeant à rouler sur le côté et vint me renifler avant d’expirer de manière étrange.“- Ouai bon ca va, ne me juge pas. Je sais que je pues la tease hein. Mais je te rappelle qu’on t’as trouvé ivre mort hier, tu n’es pas en droit de me juger hein..”
Comme fier de lui, le familier me mit un coup de langue sur la joue avant de se hisser sur le pont. Raaaaah dégueux. Je me relevais alors, et pris sa suite. Trop de soleil. Trop de bruit. Trop de..
“-Pouaaaah sacré gueule de bois..”
Clignant des yeux, je tentais de m'accommoder au mieux et rejoins Louise qui était déjà sur le pont, elle regardait l’horizon. Ah tiens, mais c’est le grand port non ? Les hommes s’activaient sur le pont, en repliant les voiles. La manoeuvre pour amarrer le bateau allait commencer.
“- Bonjour.. Eh bien, sacrée aventure.. C’était une drôle de soirée aha .. Je peux donner un coup de main pour amarrer le bateau ?”
Questionnais-je alors la jeune femme, en me plaçant non loin d’elle. Rhésus tout fou, après avoir couru derrière la chouette vint caler ses pattes sur les rambardes du navire.
A peine levée, l’invitée se dirige vers la Capitaine et propose son aide pour amarrer le Glouton. Louise, toujours enveloppée dans sa couverture, lui répond par un simple non de la tête suivit d’un petit sourire. Elle vient poser son menton sur ses bras, eux même croisés sur la rambarde, et observe silencieusement l’horizon. L’ambiance n’a plus rien à voir avec la veille ; c’est désormais si calme et reposant… Elle voudrait presque ne jamais arriver à quai !
- Louise ? » Vient la sortir Allen de ses songes. On arrive, tout est prêt.
- Chouette. Va réveiller ceux qui l’sont pas encore. Quand on a une invitée, on s’en occupe jusqu’au bout.
- J’fais ça. » Lui répond-il avant de s’éclipser dans la calle.
- Comme tu l’as dis, c’était une drôle de soirée ! » Adresse-t-elle à Marie Madeleine, tandis que le bateau s’aligne au port.
- Ouais aha. C’était sympa de votre part, à l’occasion je ferais peut être en sorte de m’endormir à nouveau dans l’une de vos caisses de nourriture pour qu’on se refasse la même fête.
- T’es la bienvenue quand tu veux ! » S’empresse de dire Vingt-deux, déjà prêt pour dire au revoir à la dame.
- Ouais. Tu passes dés qu’t’en a envie. Fin, à condition qu’on soit pas en mer bien entendu.
- On traîne souvent au Requin Saoulard et dans des taudis du Grand Port. » Rajoute son compagnon. Et la Cap’tain organise aussi des visites médicales sur le Glouton une fois par mois. Si jamais !
- Ouais, enfin c’est pas trop légal comme affaire, si tu vois s’que je veux dire. Choisis de préférence un médecin avec un diplôme et un cabinet…
Le glouton finit son approche et s’amarre sans le moindre problème. Des planches sont rapidement mises en place par l’équipe pour relier le ponton en toute sécurité puis les pirates se mettent machinalement au travail, par automatisme. Louise les interrompt :
- Messieurs, vous oubliez pas un truc ?
- Le petit-dej ? MERDE, c’est en train de cramer ! » S’exclame P’titchef, disparaissant à nouveau à l’étage inférieur.
- C’est pas à ça que je pensais, mais en effet c’est important. Les gars, dites au revoir à notre nouvelle camarade !
- AU REVOIR MMP ! » Entonne l’équipage, comme d’une seule voix.
- Tu vas nous manquer. Haha.
- Marie ! Rhésus, ‘tendez ! » S’écrie P’titchef, un gâteau entre les mains. C’est pour vous.
- Euh, merci. C’est quoi ?
- Gateau au rhum, assez chargé. Mais on combat le mal par le mal, s’pas vrai Cap’tain ?
- C’est totalement faux.
- Ouais fin bref, y’en a assez pour toi et Rhésus. Et r’passez quand vous voulez, c’est un plaisir d’avoir des morfales comme vous à notre bord !
Après un au revoir de la main, Marie Madeleine s’éloigne finalement du groupe qui la salue. Visiblement, l’aventurière semble avoir prit du bon temps avec eux, autant qu’eux ont prit du bon temps avec elle. Une histoire qui, Louise l’espère, ne s’achèvera pas ici.
- Cap’tain, j’vous en ai fais aussi ! » Lui dit P’titchef tout en lui donnant une part de gateau.
Alors qu’elle porte la nourriture jusqu’à sa bouche et commence à la mâcher, elle ne peut s’empêcher de recracher aussitôt sur le sol, écœurée.
- Mais y’a quoi là dedans ?
- On avait pu d’œuf ni de lait, du coup j’ai tout remplacé par du Rhum !
Pauvre Marie...
Un sourire débile sur les lèvres, je pris un morceau de gâteau. Il était un peu bizarre, on aurait dit une boule de pâte qui aurait séché …
“- Woh… J’vais être pété rien qu’en mangeant des petit morceau aha”
Lâchais-je en rigolant. Le Coeurl qui trottinait à mes côtés leva le nez, pour me regarder. J’cris qu’il en voulait, à a manière de me regarder. J’en pris un petit bout que je lui tendis. Le familier approcha alors son nez et éternua. Les effluves d’alcool , sans doute. Il sentait fort la picole ! Rhésus s’y tenta quand même, en gobant le morceau. Mais au vu de la grimace qui déformait ses traits, je pus en déduire que c'était fort, même pour ce genre d’alcoolique qu’il était ! Je me mis à rire avant de reprendre ma route…
Direction, la Capitale désormais ! Et maintenant qu’allais-je rencontrer sur la route, une troupe de troubadour ? Un gang de mamie tyrannique ? Allez savoir ! .. D’ailleurs, c’est par où déjà la Capitale ? .. Si cette dernière était plus difficile que d’habitude à trouver, une chose était sûre. Je devais suivre mon instinct pour retrouver la Tavrerne du Nain qui roule… Parce que, ne dit-on pas que :