Le Capitaine prend le temps de m’écouter faire le récit très résumé de mon histoire commune avec la garde de la Ville Aquatique puis avec Penthagast. Il a le mérite de ne pas m’interrompre ni d’essayer de défendre inutilement l’honneur de l’institution à laquelle il appartient. Je lui suis même reconnaissante de ne pas tenter une telle chose. Même si cela fait une dizaine d’année, je n’ai pas passer l’éponge sur ce qu’il s’est passé dans cette cellule sombre. Certains diraient sûrement que j’ai la rancune tenace mais c’est ainsi que je fonctionne. Je souris à l’homme lorsqu’il me fait part de sa déception à voir que certains abusent de leur position. Les nouvelles qu’il me donne de Caïn, même si elles datent un peu me font quand même plaisir. Bien que froid et un brin ennuyant, il a été gentil avec moi et m’a aidé à reprendre une vie “normale” à la Capitale. Dommage qu’il n’ait pas réussi à s’adapter au poste de Capitaine, il aurait sûrement pu faire un travail correct à cette position. Mais si cela ne lui convenait pas, c’est mieux ainsi. Je ris un peu lorsqu’il suppose qu’il sera le nouveau destinataire de mes carnets de vente.

Je suppose. Enfin, si les Gardes de la Ville Aquatique ne les brûlent pas à réception. Inutile de les lire à moins que vous soyez curieux de voir ce que les gens me demande, même si je vous accorde que certaines demandes sont particulièrement cocasses.

Je hausse les épaules, j’ai une copie des carnets bien cachée chez moi et les bordereaux de livraisons des coursiers. Je n’ai aucune confiance en ces gens, je ne les ait jamais rencontrer pour pouvoir éventuellement leur faire confiance. Je le regarde réfléchir un instant sûrement à se demander que faire maintenant qu’il connaît les raisons de mon refus. Peut-être devrais-je accéder à sa demande ? Qu’est-ce que je risque avec un Capitaine. Certainement assez peu, s’il tue sans raisons, il aura certainement des soucis bien avant moi. Sa prise de parole me fait sourire. Pas parce qu’il admet se sentir mal de vouloir que je m’occupe de ça malgré mon refus mais plutôt parce qu’on lui a vendu le fait que je soit “la meilleure du secteur”. Je ne sait pas qui a bien pu lui dire cela mais je n’aurais pas la prétention de prétendre à ce titre. Si par secteur, il n’inclut que la Ville Aquatique, c’est possible mais il existe sûrement d’autres enchanteurs très doués à Grand Port. Mais cela me fait rire qu’on pense ça de moi. Je me penche vers lui lorsqu’il m’invite à lui envoyer toute personne qui viendrait me chercher des noises concernant ses armes.

Ne sous-estimez pas le nombre de personnes qui pourraient surgir dans votre bureau par pure jalousie de ne pas avoir d’arme enchantée par mes soins contrairement à vous. C’est une demande que j’éconduit régulièrement même pour des clients réguliers.

Même Carciphona a été envoyée chez un collègues pour sa sarbacane alors qu’elle est sûrement celle en qui j’ai le plus confiance. J’écoute avec attention sa proposition de signer presque n’importe quel papier pour essayer de me garantir une certaine sécurité. Si je lis bien entre les lignes, il me propose une certaine “protection” de sa part comme le gouverneur T’hoi. Cela ne serait assurément pas un mal même si je commence à cumuler les contacts politique. Le gouverneur, Zahria qui est en contact avec un gradé de la Garde… Cela pourrait sûrement être utile quand même. Je réfléchis à toute vitesse à l’utilité que pourrait avoir un Capitaine dans mon carnet d’adresse pendant qu’il se charge lui-même de démonter son argumentaire.

Si j’avais l’impression d’avoir affaire à un plaisantin, vous seriez déjà à l’extérieur de ce bâtiment Capitaine…

Je tapote du doigt sur mon livre-mémoire pesant le pour et le contre de ce choix. Beaucoup de contre s’amassent rapidement face à bien trop peu de pour… Mais en même temps, le risque est tout de même limité selon mon ressenti. Il me prend de vitesse en coupant court à ma réflexion et se préparant à mon refus. Je me mords la lèvre, une part de moi me dit que je vais regretter ce que je vais faire…

Je vais m’occuper de l’enchantement de vos épées mais je souhaite poser quelques conditions. La première étant que vous signerez mon registre pour justifier d’une décharge de responsabilité sur votre honneur de Capitaine et d’homme. Je souhaite également que vous gardiez pour vous ma participation à ce travail, je ne souhaite pas que l’information s’évente partout. Ma dernière condition est que vous apportiez votre soutien à ma demande d’accés aux archives royales contenant les livres proscrits portant sur la magie. Si vous vous demandez pourquoi je fais une telle demande, c’est pour cela.

Je pointe à nouveau la structure de bois qui encombre le laboratoire.

Il s’agit d’une copie de l’enchantement permettant de créer un dôme identique à celui de la Ville Aquatique. J’ai espoir de trouver un moyen de comprendre la rune grâce à ces livres cachés.

Il n’y a que là qu’il me sera éventuellement possible de trouver des ouvrages assez anciens pour comprendre tout ça, en priant pour qu’il existe encore quelque chose d’encore assez bien conservé pour être lisible… Je tend une main à Yuduar par-dessus la table.

Si cela vous convient, apportez vos épées ici pour que l’on discute de ce que nous allons pouvoir en faire.

Cela fait tellement longtemps que je n’ai pas travaillé sur un objet destiné à tuer… Des couteaux, des marteaux d’artisans, j’ai l’habitude et accepte ces travaux mais ce n’est pas destiné à tuer un autre humains à la base. Peut-être que je devrais envisager l’idée d’un enchantement “rapporté”. Cela permettra d’inactivé l’enchantement en cas de besoin...

Ma décision de réaliser l’enchantement des armes du Capitaine a le mérite de le surprendre. Mais c’est uniquement parce que je vois une opportunité d’utiliser son nom pour parvenir à mes fins. En l'occurrence, obtenir un accès aux archives royales et ses livres secrets. Fort heureusement, il ne refuse aucune de mes conditions proposant d’apposer un sceau de cire avec son insigne pour marquer encore plus le fait qu’il se porte garant de cet enchantement. Cela ne pourra que donner un côté plus officiel donc je ne dis pas non à cette proposition. Par contre, je me dois de refuser sa proposition de m’emmener lui-même dans les archives en attendant que les membres du Conseil Royal fassent leur travail. Je ne voudrais pas qu’il s’attire des ennuis pour si peu.

Votre proposition est très généreuse mais je ne voudrais pas que la Commission de la Garde vienne vous causer des problèmes pour m’avoir offert un accès aux archives. Je patienterai le temps que les responsables étudient ma demande.

Il serait malvenue de ma part de profiter ainsi de la reconnaissance de l’homme. Tandis qu’il part chercher ses armes, je reprend mon carnet pour commencer à prendre des notes. Cela fait bien longtemps que je n’ai pas travailler sur des armes mais c’est un enchantement comme un autre. Il est juste clairement destiné à éliminer une autre vie… Une fois les deux lames posées sur la table, il commence ses explications sur leur créations. Je souris en comprenant qu’elles ont une valeur sentimentale pour lui en plus d’être ses outils de travail. Tandis qu’il continue, je prend la plus petite lame en main pour l’étudier un peu. Sortie de son fourreau, la lame étincelle. Plus que de jauger le travail d’entretien, je m’intéresse à la fabrication de la lame en elle-même. Meilleure qualité veut dire meilleur acceptation de l’enchantement et moins de risque de rupture catastrophique. Et elles semblent bel et bien comme il l’a dit, une très bonne qualité, l’enchantement devrait très bien se passer.

Pas de soucis, c’est toujours utile de connaître l’usage de ce que j’enchante. Ainsi que d’observer la qualité de la matière mais aussi de la fabrication. Une bonne qualité de matériaux et de fabrication est primordial pour que l’objet résiste à la puissance magique.

Il continue en me parlant de son pouvoir en posant des flasques à côté des armes. Je hausse un sourcil interrogateur auquel il donne rapidement une réponse. Si son pouvoir lui permet de rendre tout et n’importe quoi extrêmement tranchant, l’abus d’alcool semble causer un dysfonctionnement de son pouvoir. Cela ressemble beaucoup aux problèmes de crise magique que je connais à intervalle plus ou moins réguliers… Finalement vient l’explication de ce qu’il souhaite que je crée pour lui. Une magie permettant d’amplifier l’effet de son pouvoir sur le tranchant de ses armes. Cela me semble tout à fait faisable moyennant un peu de travail et de bonne volonté de l’homme. Je m’amuse qu’il envisage sérieusement le fait de se mettre dans un sale état en remettant sa sécurité entre mes mains. Tout du long, j’ai pris des notes réfléchissant en même temps à une bonne méthode à mettre en oeuvre dans son cas.

Des questions, pas vraiment, vous avez été relativement clair et précis. Vous avez bien fait d’apporter ceci. Je montre les flasques. Il va effectivement être nécessaire que j’observe ce dysfonctionnement de votre pouvoir lorsque vous êtes sous alcool. Je dois quand même vous prévenir que la création de l’enchantement risque de prendre un peu de temps, ce que vous me demandez est assez complexe.

Je me lève de ma place. En quittant la table, je fais tomber involontairement mon livre-mémoire qui s’ouvre machinalement à la plage que j’ai la plus regarder ces derniers temps. Le portrait de cette adolescente dont je ne me souvient pas du nom qui pourrait être ma mère selon Carciphona. Sans m’en être rendue compte, je file vers les stands installés un peu plus loin.

Tout d’abord, il va falloir quelques préparatifs. Avec un enchantement bien construit, il est possible de visualiser la magie. C’est plus simple avec un objet mais on peut le faire avec une créature vivante à condition qu’elle se tienne un minimum.

Mes explications ne semblent sûrement pas très claire pour le Capitaine. Armée des petits pylônes permettant la visualisation de la magie des objets sur mon établi dédié et d’un flacon d’encre, je revient vers lui.

Vous savez vous tenir un minimum même en buvant n’est-ce pas ?

Je pose les pylônes sur la table avant de déboucher le flacon d’encre.

Vous devriez commencer à boire pendant que je prépare ça. Les Gardes ont souvent une sacrée résistance à l’alcool, non ?

Tout ceux que j’ai connu étaient de vrais trous à alcool alors je suppose que c’est partout pareil. Inconsciente du potentiel danger représenté par un Capitaine éméché, je commence la création de la partie centrale de la rune que les pylônes compléteront. Les cercles et symboles se succèdent en une litanie sans fin. Cette rune m’est connue même si je ne l’utilise pas souvent. Ma dernière utilisation de celle-ci doit remonter à une introspection sur mon propre pouvoir…

Nous n’en n’avons pas parler mais vous êtes bien conscient que cela va vous coûter une petite fortune ?

Parce que je ne travaille pas gratuitement et, en l'occurrence, il y a un sacré travail à faire. Je termine rapidement mon dessin à l’encre sur mon sol tout neuf et place les pylônes. Immédiatement, la rune se met à luire. Faisant face au Capitaine, je lui indique d’aller se placer au centre.

Aller, c’est le moment pour vous de travailler Capitaine. Au milieu de la rune et on continue de boire.

Une fois le Capitaine en place, la rune fait son office sur lui en créant une image lumineuse représentant sa magie. Il faudrait sûrement des jours pour en comprendre la structure en sachant déjà comment il fonctionne mais ce n’est pas ce qui m’intéresse immédiatement. Je veux voir comment l’alcool affecte justement cette représentation pour pouvoir l’exploiter proprement et sans risque pour lui.

La question de ma rémunération le prend un peu par surprise mais finalement, cela ne semble pas être un soucis pour lui qualifiant même son achat de “petite folie”. Une petite folie qui va certainement aller chercher dans les seize ou dix-sept cristaux clairs tout de même… Mais j’imagine qu’il connaît la valeur d’un bon enchantement magique vu l’insistance qu’il a mit à me demander d’enchanter ses armes. Terminant la première partie de mon travail, je l’invite à s’installer au centre de la rune magique. Mais le Capitaine ne se montre pas aussi réactif que jusqu’à maintenant. Il se reprend assez rapidement quand même en affirmant avoir peut-être un peu trop picoler d’un coup. Comme il semblait un peu préoccupé dans cet instant où ses pensées avaient prises le dessus, je décide de le taquiner un peu.

J’ai connu des gardes plus alertes que ça après bien plus d’alcool Capitaine. Vous devez souvent payer les tournées au bar.

Je me moque en silence lorsqu’il se relève en chancelant confirmant mes dires par la même occasion. Dès qu’il arrive au centre de la rune, celle-ci commence son oeuvre. Tandis qu’il m’interroge sur un éventuel besoin de faire une démonstration de son pouvoir, le tracé au sol et sur les pylônes s’illumine.

Cela pourrait faciliter l’observation mais seulement s’il n’y a pas de risque de détruire quoi que ce soit, autrement, je me débrouillerai sans. Continuez de boire par contre, Capitaine.

Dans quelques secondes, la rune sera pleinement active et il devrait ressentir comme un échauffement de son corps. Mais je ne sais pas s’il s’en rendra compte avec tout l’alcool ingurgité. Cela n’est pas dangereux de toute façon, ce n’est que la magie de la rune qui traverse son corps pour se gorger de l’essence magique de son corps. Il ne faut pas bien longtemps pour que la rune fasse son effet et commence à projeter une image rémanente de son pouvoir dans le laboratoire. La structure est intéressante et démontre une certaine complexité dans ses capacités. Ma curiosité de chercheuse en magie voudrait que je remonte à l’origine de cette magie en décortiquant l’image mais cela serait une curiosité mal placée de ma part. Je pourrais en apprendre bien plus que voulue sur l’homme en lui-même et cela n’est pas déontologique. Pour le moment, je ne vois strictement aucun signe d’une éventuelle modification de ses capacités liée à un pic de magie alcoolique.

Pour l’instant, il n’y a rien. Vous êtes certains d’avoir prévu assez d’alcool pour exciter correctement votre magie ?

Mais d’un coup, quelque chose se produit. Le petit point lumineux légèrement vert se met à enfler puis dégonfler aléatoirement modifiant l’image rémanente. Cela doit être ça… Je passe un bon moment à observer le mécanisme sous toutes les coutures réfléchissant à l’enchantement qui permettra de recréer cette vague de magie de façon contrôlée et sans qu’il ait besoin de s’alcooliser. Décidant que cela est suffisant, j’efface un bout de ma rune pour la désactiver tout en prévenant mon client sérieusement alcoolisé.

Cela me semble suffisant. Vous devriez peut-être vous poser un peu le temps de décuver un peu, je vais commencer à travailler sur vos épées.

S’il le sent, il peut revenir vers la table et se poser là le temps de revenir à un état plus présentable ou tout bêtement rester là en plein milieu du laboratoire comme une loque.

Yuduar rejoint la table en titubant lamentablement mais cela reste logique vu la quantité d’alcool qu’il s’est envoyé pour me montrer l’impact de l’alcool sur sa magie. Je me demande un instant si je dois répondre à sa question. Pas sûr que cela soit nécessaire vu son état. Les épées sont lourdes dans mes mains. Pas juste du poids du métal mais aussi du pouvoir de mort qu’elles confèrent. Je m’en déleste sur le plan de travail le plus proche de l’escalier avant de monter à ma mezzanine. Quelques recherches vont être nécessaires avant de me lancer à la création de l’enchantement. Venir directement chercher une magie aussi aléatoire pour l’exploiter n’est pas une chose aisée. Pendant plusieurs minutes, je réunis plusieurs livres plus ou moins anciens. Certains portent sur les théories liées à la magie des humains et d’autres sur les différentes techniques pour lier la magie humaine à un objet. Redescendant pour garder un oeil sur mon illustre client, je m’installe juste à côté des épées.

La création de l’enchantement est assez longue pour que Yuduar ait le temps de cuver son alcool significativement. Enfin, je l’espère. Pendant ce temps, j’ai pu déterminer la meilleure méthodologie à appliquer pour ses armes après quelques recherches. En l'occurrence, une infusion relativement classique couplée à une infusion organique. L’infusion organique permet de lier l’épée à son propriétaire pour exploiter sa magie à un niveau plus “profond” presque comme si l’arme était une partie indépendante du corps de l’homme. Pour ça, il a fallu que j’aille chercher un cheveu de Yuduar. Je me suis même pas embêtée à le réveiller. Cela ne vaut pas le coup pour si peu, et au pire, qu’aurait-il dit ? L’odeur des solutions d’infusion est assez atroce mais c’est un nécessaire. Armée de la première lame, je la plonge jusqu’à la garde dans la solution classique pour créer la magie de l’objet en lui-même. Je la laisse tremper pendant une vingtaine de seconde le temps que la solution agisse. En la sortant, l’arme dégouline du liquide ambré. Après un séchage avec un chiffon, j'exécute la même procédure avec la seconde solution visqueuse et noire. Le lien magique est plus lent à se faire. J’espère que le Capitaine ne s'inquiètera pas des éventuels picotements qui pourraient intervenir au bout de ses doigts. Arrivée au terme du traitement de la première lame, je me dit qu’il serait peut-être intéressé de voir comment la magie de ses armes a été créé. Certains de mes clients sont plutôt curieux du processus, d’autre pas du tout. Rangeant l’arme dans son fourreau, je revient vers la table.

Capitaine ! Réveillez-vous !

Au cas où le simple fait de l’appeler ne suffise pas, je lui tapote le bras avec le bout du fourreau

J’ai terminée l’enchantement de la première épée, c’est l’heure d’aller essayer.

Vu qu’il y a deux épées, il vaut mieux faire un premier essai maintenant. Il n’y a pas de raison que cela ne fonctionne pas mais je veux vérifier s’il se sent à l’aise avec l’arme. Une fois le Capitaine alerte, je lui tend son arme, non sans vérifier qu’il soit dans un état acceptable pour l’essai.

Cette lame est terminée, elle devrait bien réagir avec votre magie. Vous pouvez aller faire un essai avec, en l’utilisant, votre pouvoir devrait se transmettre dans l’épée pour accroître son tranchant. Avec un peu d’exercice, vous devriez arriver à accroître son tranchant temporairement sur le principe des explosions de magie qui vous prennent lorsque vous buvez trop.

J’indique la porte au Capitaine préférant qu’il réalise ses tests à l’extérieur. Je n’ai pas envie que mon laboratoire soit en partie détruit par un mauvais mouvements malencontreux du Capitaine. Je le suis à l’extérieur tout en continuant mes commentaires.

Votre magie est intéressante, vous n’avez jamais réfléchi à d’autres utilisations de ces explosions d’énergies ? J’ai une idée qui a germée pendant que je travaillais sur l’enchantement. Il me semble possible de créer de véritables lames d’energies que vous pourriez propulser.

Cette particularité de sa magie est à la fois étrange et un formidable réservoir de possibilités à mes yeux.

Le réveil ne semble pas être une mince affaire. ça doit être l’âge qui fait ça, il paraît qu’on récupère moins bien de l’alcool quand on devient vieux… Un instant, j’hésite sérieusement à lui mettre son épée entre les mains, mal foutu il serait capable de détruire des choses importantes dans mon laboratoire en tombant comme il vient de manquer de le faire. Il a un peu de mal à se remettre les idées en place mais il finit par avoir un discours cohérent et intelligible. Obligée de recommencer mon petit discours, je recommence de bonne grâce, après tout, c’est un peu de ma faute s’il est dans un tel état. Heureusement, il aura encore du temps pour décuver pendant que je fini mon travail sur la seconde épée.

Oui, dehors Capitaine.

Cela va être compliqué, je le sens… Dehors, il ne devrait pas faire trop de dégâts, non ? Au pire, tant que ça n’abime pas mon laboratoire, je m’en fiche. Il s’arrangera avec le Gouverneur pour remplacer ce qu’il détruira. Je le guide à l’extérieur, dans une cour peu visible de la rue, histoire de n’effrayer personne. A l’extérieur, je m’écarte de plusieurs mètres du Capitaine armé de son épée. Même s’il semble être dans un état plus ou moins maîtrisé, je préfère ne pas tenter Lucy. Il s’agite un bon moment sous mes yeux avant que l’enchantement n’arrive à entrer en action. C’est normal, c’est la première fois que Yuduar essaye son enchantement, il faut un peu de temps pour que l’arme et l’homme soient au diapason. Mais enfin, l’épée se couvre d’un léger halo signe que la magie commence à s’accumuler et à faire effet. Enfin, il s’immobilise sûrement satisfait du résultat. Je me rapproche avant de vivement reprendre mes distance lorsqu’il semble décidé à tester le pouvoir des épées sur des blocs de pierres abandonnés là par les artisans à l’origine de mon laboratoire. La lame s’abat sur les pierres les découpant comme du beurre provoquant la surprise du Capitaine.

C’est à peu de chose près ce que vous recherchiez non ? La symbiose avec votre arme viendra plus rapidement avec de l'entraînement… Difficile de vous dire quelles seront les limites de tranchant que vous pourrez obtenir mais ne poussez pas trop loin la magie, il existe un risque de rompre l’épée si trop d’énergie s’accumule. Et, je disais précédemment que votre pouvoir est intéressant.

Avant toute chose, je récupère l’arme des mains de Yuduar pour essayer d’illustrer mon propos.

L’enchantement que je viens de réaliser canalise votre magie “tranchante” dans l’épée. Il me semble possible de canaliser cette magie autrement pour la projeter à distance.

Je retourne à l’intérieur du laboratoire afin de continuer mon travail avec la deuxième épée tout en expliquant mon idée au Garde.

Je suppose que vous n’êtes pas un grand utilisateur d’arc ou d’arbalète, non ? Vous me semblez plus être un pur épéiste. Il ne serait pas inutile de pouvoir user de votre magie à distance qu’en pensez-vous ?

Après avoir posé la première lame sur le plan de travail, je plonge la seconde dans la première solution d’imprégnation.

Avez-vous déjà observé les lame d’air ? De puissants courants d’air très fin pouvant découper la matière. Je pense qu’il serait possible de créer une lame magique similaire grâce à la particularité de votre magie.

Guère étonnée que le Capitaine soit intarissable lorsqu'il se met à parler d'armes coupantes, je poursuis mon travail sur la seconde lame. Maintenant que j'ai pu vérifier que mon traitement d'infusion fonctionne parfaitement, je ne me pose plus vraiment de questions et enchaîne les étapes tout en essayant d'expliquer mon idée à Yuduar lorsqu'il s'arrête enfin de disserter. Dans un premier temps, je me demande s'il arrive à saisir mes explications mais à ses mots, je constate que malgré l'alcool, il semble tout à fait alerte. Et on ne peut pas dire qu'il ne soit pas emballé par l'idée. Je tique à la mention de Wardan… J'en ai entendue parler uniquement vu que j'ai eu la chance de ne pas croiser la route de l'une de ces monstruosités durant l'expédition royale…

Et bien, cela demandera plus de travail mais ça me semble possible, je ne vous ferai pas cette proposition le cas échéant. Évitez quand même de vendre la peau du fenrir avant de l'avoir tuer, mes enchantements ne vous rendrons pas invincible Capitaine.

Aussi puissant mes enchantements soient, il n'en reste pas moins un homme de chair et de sang. Si je peux éviter d'entendre que le Capitaine Al Rakija s'est fait étriller, cela m'éviterait de devoir faire des pieds et des mains pour essayer de récupérer les armes pour détruire l'enchantement par précaution. Prudence est mère de sûreté, ne pas laisser une création dangereuse dans la nature est important. Finissant d'essuyer la seconde lame après les deux bains d'infusions, Yuduar m'interroge sur le programme pour réaliser ce second enchantement. Je range l'épée dans son fourreau en réfléchissant.

La meilleure solution serait de me laisser vos armes jusqu'à demain soir. Ce second enchantement risque d'être plus compliqué à mettre en œuvre. Sa nature est différente ce qui implique une nouvelle phase d'étude.

Faisant un rapide passage vers l'un de mes plans de travail, je récupère un calepin dans un tiroir pour faire les calculs de coût. Faire ces enchantements est une chose, encore faut-il que mon client puisse se les offrir. Capitaine ou non, mes enchantements ont un coût… J'aligne plusieurs colonnes de chiffre, exacts dans le cas de l'enchantement déjà réalisé et hypothétique pour le suivant.

Alors, pour ce premier enchantement, cela vous coûtera huit cristaux clairs. Pour le second, je vous fait un prix de lot pour six cristaux clairs. Ce qui donne un total de quatorze cristaux clairs, cela est-il bon pour vous Capitaine ?

Je fait glisser le calepin vers lui afin qu'il puisse jeter un œil à mes calculs, je n'ai guère de secrets à ce niveau.

Vous paierez à la livraison si cela vous convient. Bien entendu, pour ce tarif, je garantis la durabilité de mon travail et interviendrait gratuitement en cas d'un quelconque soucis avec l'enchantement.

Aucune protestation à l’idée de me laisser ses épées jusqu’au lendemain soir de la part du Capitaine. Bien qu’il semble très attaché à ses épées, il est plutôt conciliant, cela me change de certains clients bien moins arrangeants.

Parfait, si d’aventure il me fallait plus de temps que la durée de votre voyage à la Ville Aquatique, je viendrais vous les livrer en personne. J’en profiterai pour réaliser quelques achats et un tour à la Guilde Marchande, on trouve toujours des choses à faire.

J’ai toujours quelques achats à faire que l’on ne trouve pas ici et il fait bon passer à la Guilde Marchande pour qu’ils ne m’oublient pas et continue de m’envoyer des clients. En attendant, je réalise mes calculs de coût des enchantements et fait part du résultat à Yuduar. Celui-ci se lance directement dans sa bourse pour me payer immédiatement malgré ma proposition de payer à la livraison. Il ajoute même un cristal clair pour me remercier d’avoir accepté sa demande alors que je ne réalise pas ces choses là habituellement.

Merci à vous Capitaine. La lettre de recommandation pour l'accès aux archives royales est suffisante, je vous fait confiance pour ne pas perdre ces armes au hasard d’une bagarre.

A sa demande, je me dirige vers ma cape où mon cristal de communication attend patiemment d’être utilisé. Il prend plus la poussière qu’autre chose d’ailleurs, il n’y bien qu’avec Carciphona que je l’utilise régulièrement. Je reviens vers Yuduar cristal en main pour le synchroniser avec le sien.

Si j’ai besoin de plus de temps, je vous contacterai en début d’après-midi pour vous éviter de venir pour rien.

Je laisse le garde batailler un peu avec son compagnon à plume avant de partir en me saluant. Je salue également l’homme espérant quand même qu’il arrive jusque chez lui sans encombre malgré l’alcool ingurgité et certainement pas encore complètement digéré.