Je n’ai pas pour habitude de venir en ville dans le seul but de boire, mais disons que quelque chose m’avait attirée en cette soirée et pourtant, j’aurais pu me rendre à la taverne de Devon, mais avec sa demande particulière, je préférais aller dans une autre. Pas que je ne l’appréciais pas ou que j’en avais peur, seulement, je préférais prendre du recul et ne pas être influencer par ce dernier. Même si je m’étais assise dans un coin, comme présentement, mon regard n’aura été aimanté que par lui. Sa taille, sa musculature, son gabarit hors norme… juste à l’idée d’y penser, j’ai les doigts qui se resserrent sur ma chope. Je repense à notre dernière nuit ensemble et je me dis que se lever tous les matins dans ses bras pourrait être bien, non?

Enfin, le reste de la soirée est plus banale, je continus de boire observant les alentours toujours seuls dans mon coin. Je préfère garder ma tête cacher sous mon capuchon malgré tout et quand je termine ma dernière consommation, je paie en laissant un pourboire et je quitte aussitôt la taverne à la recherche d’un endroit où dormir. Je suis pas très difficile et je suis fauchée comme les blés alors que ce soit un arbre ou une ruelle tranquille cela fera l’affaire. Enfin, je finis par m’endormir m’enroulant dans ma cape et une dague en main pour réagir aux moindres soucis. Le sommeil me gagne rapidement et j’ai plus trop conscience de ce qui se passe autour de moi tombant tranquillement dans un sommeil plus profond.

Mais voilà que je me réveille au petit matin, réveiller par le son des oiseaux et de la ville qui commençait déjà à s’animer. Je frotte mes yeux et je range mon arme par la suite. M’étirant rapidement avant de me remettre sur pieds je prends le temps de vérifier qu’il ne me manque rien. Puis je me mets en marche afin de me trouver quelque chose à me mettre sous la dent, sauf qu’à peine je sors de ma ruelle, je tombe sur un être humanoïde à l’apparence des plus particulières. Je ne sais pas trop dire s’il s’agit d’un homme ou d’une femme, mais tout ce que je sais c’est que ça ressemble pas mal à un ours. Je tourne sur moi-même et je constate qu’il n’y a pas que lui ou elle. Non, je fais un pas vers l’arrière et j’entends un cri des plus aigu. Je me retourne en regardant vers le sol et je vois une petite souris qui me montre son poing alors que de l’autre elle tient une mallette.

«  Mais, qu’est-ce que j’ai pris…? »

J’essaie de me repérer et pourtant tous les magasins sont les mêmes, seulement, il n’y a pas d’humain seulement des animaux aux caractéristiques humaines… Bon, je fais quoi? Alors j’attrape le premier passant par l’épaule et le tire vers moi. Il me regarde quelque peu courroucer, mais je m’en fiche que cette face de rat soit en colère.

« Vous savez où est-ce qu’on est?
- On est à la Capitale, quelle drôle de question!
- Ouais, bon, et si je vous dis que vous avez tous des têtes d’animaux, est-ce que tu vas me traiter de folle?
- Des animaux? Ça a toujours été le cas.
- Euh, ouais, quelle idiote que je suis, haha, ça a toujours été le cas, en effet. »

Je le laisse partir et je passe ma main dans mon visage. Est-ce qu’il y a au moins une personne normale? Je ne peux pas croire qu’en une nuit tout le monde s’est transformé en une créature spéciale. Du coup, j’ai toujours cette sensation de faim qui me tenaille l’estomac et malheureusement pour eux, voir toute cette viande ambulante ça me met l’eau à la bouche. Je dois contenir mes crocs de sortir, car je ne peux pas me permettre de tuer publiquement l’une de ses créatures, car je n’ai pas réussi à me contenir. Je me dirige donc vers la place publique où souvent quelques vendeurs de bouffe se tiennent. Je ne dirais pas non à un petit pain chaud fourré à la viande, tiens! Sauf que plus je m’avance et plus je suis capable de percevoir une statue, mais en vérité ce n’est pas ce qui m’attire, c’est plutôt la personne qui est en train d’escalader. Oh putain! Un humain!

Je cours alors en sa direction. Je m’en fou si c’est un enfoiré de la pire espèce, mais j’ai besoin de renseignement.

« Hey toi là! Ouais, toi qui es en train de grimper. Tu sais ce qui se passe ici? »

Alors que j’accours vers le seul humain de ce lieu, ce dernier se laisse tomber de la statue sur laquelle il avait commencé à grimper. Je lui jette vite fait un coup d’œil et remarque qu’il s’agissait là d’un Glooby géant fait de marbre. Tant d’animaux emblématiques et eux il trouve le moyen de nous foutre l’une de ces grosses limaces gluantes en plein milieu de la place. Par contre, je n’ai pas souvenir que ça se trouvait dans la capitale… Enfin, je ne suis pas une habituée, peut-être que ça m’a toujours échappée.

Enfin, l’homme ne semble pas plus savoir ce qui se passe et me dit avoir dormi dans une auberge et s’est réveillé à la même place. Du coup, moi aussi je me suis endormie là où je me suis réveillée. C’est plutôt logique à moins d’être somnambule ou que quelqu’un d’autre nous bouge, mais je crois qu’à ce moment, je l’aurais senti.

Enfin, l’humain se présente à moi et dit s’appeler Red… Je le jauge de la tête aux pieds, car il souhaite qu’on fasse équipe dû à notre situation particulière. Du coup, j’ai pas vraiment le choix, n’est-ce pas? Enfin, il émet une théorie qu’on ne serait pas dans notre monde et je le regarde en fronçant les sourcils. Nooon, tu crois?

« Moi c’est Saryna, mais pas de coup bas! Sinon, y’a peu de chance que tu repartes d’ici entier. »

J’étais tout de même armée de mon arc ainsi que de mes deux dagues. Monde parallèle ou pas, s’il fallait me défendre et lui faire la peau, je n’hésiterais pas! Bon, c’était surtout la mise en garde que je donnais à tous ceux qui souhaitaient faire équipe avec moi et c’était aussi pour leur faire comprendre que j’étais une tendre et sensible personne. Leurs problèmes m’indifféraient, mais comme j’étais dans le même merdier que ce dernier je n’avais pas trop le choix.

Je regarde tout autour de moi et les odeurs qui se manifestent me mettent l’eau à la bouche. Il me pose une question, mais ça devra attendre. Je sens mes crocs qui frétille dans leurs cavités signe que je pourrais très bien perdre le contrôle de moi-même. Alors je me dirige vers le premier stand que je vois et il s’agit d’un vendeur de pain. Bon, c’est mieux que rien. Je lui donne les cristaux conséquents et je m’empiffre aussitôt. Si seulement, il y avait de la bidoche avec tout ça, mais non! Je me contenterai de ça...

« Ch’que me chouviens. Chais que j’ai bu hier à la taverne non loin d’ichi. » J’avale ma bouchée pour terminer ma phrase. « Mais je suis partie de la taverne pas très tard et je me suis endormie dans une petite ruelle tranquille et c’est là que je me suis réveillée. Du coup, ça ne nous avance pas vraiment cette histoire, mais j’espère qu’on n’a pas mis de quoi d’étrange dans l’une des mes chopes! Parce que dès qu’on règle notre problème, je vais leur en faire voir de toutes les couleurs! »

Je sais que je n’ai pas toujours la meilleure des accueils. Je pourrais me contenter d’une simple présentation polie, mais non, je ne suis pas comme ça. Je préfère que les gens sachent à quoi s’attendre, au moins ils seront prévenus qu’au moindre coup foireux qu’y’a des chances qu’ils perdent un morceau. J’ai eu assez de merde plus jeune, je n’ai pas besoin de m’entourer de connard dans mon présent. Enfin, il lève les mains vers le ciel, certainement pour faire la paix avec moi et me promet qu’il ne fera rien.

En effet, moi aussi je veux me casser d’ici et vite. Je n’ai pas que ça à faire que de me promener dans un garde-manger ambulant. Enfin, on discute un peu, je lui parle de ce dont je me souviens et ce dernier me donne le nom de la taverne. Donc on a tous les deux étés dans la même taverne qui est reconnue pour droguer ses consommateurs? Je reste muette de stupéfaction, mais aussi parce qu’il le vaut mieux. Mon visage doit virer rouge à ce moment-ci et le tavernier est chanceux de ne pas se trouver devant moi, parce que j’aurais exigé un remboursement et un dédommagement. Déjà, même s’il s’agit d’une spécialité, on doit être avisé et j’suis sûre qu’on à le droit de refuser.

« Donc si j’comprends bien. On est dans un rêve!? Et on fait comment pour en sortir? On attend simplement qu’on se réveille ou y’a une sortie secrète quelque part? »

Enfin, je finis à peine de parler que je vois mon partenaire devant moi, perdre en centimètre. C’est étrange non? Où est-ce moi qui suis en train de grandir. Mes jambes et mes bras me font subitement mal alors que j’ai l’impression qu’il fait soudainement chaud. Même mes dents sont étranges et ma vision semble meilleure? Alors que Red devient une espèce de petite créature moche, moi j’ai l’impression d’être devenue toute autre chose. Je regarde mes mains maintenant velue et armée de griffes. Bon, pour les griffes ça ne fait pas tant de changement, mais bordel de merde! C’était quoi tout ce poil? Je retourne mes grosses paluches pour y voir des coussinets foncés et quelque chose semble se balancer derrière moi; une queue? Je tâtonne mon visage et mes crocs, normalement discret était devenu énorme et sortait de ma bouche? Je monte plus haut et je sens des petites oreilles rondes. J’suis un félin et pas n’importe lequel! Au vu des dents,  j’crois que je suis devenue un smilodon!

« Oh merde…, je me penche pour observer Red et j’ai un petit rire narquois, en tout cas, t’as pas eu de chance on dirait! Heureusement que t’as dit qu’on était dans un rêve, parce que sinon j’t’aurais dit que c’qu’on a pris c’était vraiment de la bonne! »

Mon museau tressaille de lui-même, mes oreilles gigotent pour en chercher la source. Je me tourne et je vois passer derrière moi une magnifique gazelle avec ses longues et superbes jambes. Ce fumet est si délicieux que j’en ai l’eau à la bouche. Je laisse en plan mon pauvre ami errant des marais et d’une vitesse dont je ne me croyais pas posséder je bloque le chemin à la pauvre créature humanoïde cornue. Elle sursaute, ses pupilles se dilatent, son pouls accélère tout comme sa respiration. La salive s’accumule dans ma gueule et je me lèche les babines alors que j’observe son petit cou tout fin.

« Alors ma donzelle, on t’a déjà dit que t’avais l’air mignonne à croquer? Parce que je prendrais bien une bouchée de toi… »

Elle éclate de rire et passe son chemin sans rien ajouter. QUOI!? Bon, je n’essayais pas de la draguer en vrai, mais même si on est dans un rêve, j’crois pas que mon copain ici présent aimerait me voir tuer de sang-froid des femmes et des hommes même s’ils n’existent pas en vrai. Bon, c’est vrai que je l’aurais bien mangé moi…

Alors que mon plat pour attire la jolie gazelle dans un coin sombre de la cite n’a pas fonctionné, je retourne auprès de la petite créature hideuse qu’était devenu Red qui se moque littéralement de moi. D’ailleurs alors qu’il rigole, j’entends son rire qui s’aggrave alors que son corps commence à changer de forme. Son corps massif se couvre de poils bruns me rappelant l’apparence d’un ours? Ouais, il y a vraiment une tête d’ours. D’ailleurs, il me fait une remarque me demandant de me concentrer afin de trouver une façon de sortir d’ici. Sauf que je le vois lui et son gros pif en train de renifler l’air. Il doit avoir capté quelque chose. Nos sens changent et c’est plutôt intéressant de ressentir et de voir ce que l’animal vie en tant que tel. C’est une perceptive différente. Ça pourrait m’aider lors de mes chasses si je suis capable de me mettre dans la peau de la bête, non?

Du coup, Red s’en va, mais on dirait que moi aussi je change. J’ai l’impression de suinter d’un liquide visqueux, alors qu’un appendice se forme dans ma bouche. Deux grands yeux globuleux sans paupière sont bien présents dans mes yeux. Je n’ai pas l’impression d’avoir rapetissé, mais lorsque je regarde mes mains, je vois bien qu’elles sont verdâtre massive et à la fois griffues.

« Bordel, je suis une mutante ou quoi? »

J’ai envie de bondir soudainement et de tournoyer dans tous les sens. Sauf que finalement y’a une petite odeur qui me monte au nez. Je tourne sur moi-même et je lève l’un de mes bras pour me sentir. BEURK ça vient de moi! Enfin, Red revient avec son poisson et l’engloutit pour ma part. J’essaie de tester ce nouveau corps, mais le sol tremble et je tombe littéralement sur le sol. Je ne sais pas comment ça fonctionne, mais une le choc me fait cracher une grosse masse poisseuse de ma gueule et celle-ci se met aussitôt à fumée grugeant le sol sur lequel nous marchions. Oh, merde… une grenouille mutante qui crache de l’acide? J’suis un crapaureau! Quelle horreur!

Je tente de me relever et Red semble aussi ne pas savoir ce qui passe, car le sol tremble de nouveau. Cette fois, j’ai une drôle de sensation dans ma bouche et ma langue s’étire d’elle-même frappant d’elle-même vers l’avant. Le muscle revient vers moi et comme je ne suis pas une grenouille dans la vie de tous les gens, celle-ci me frappe en plein visage et je tombe sur le derrière.

« Borrel! Mais qu’esf-fe qui fe paffe?!? » dis-je avec la langue à moitié sortie.

Le sol se dissout de plus en plus rapidement là où ma bave était tombée et le trou s’élargissait. C’en était presque inquiétant, mais ce n’était pas ça le pire. Non, tout le monde se semblait s’effriter comme si les bâtiments tombaient en morceaux et moi, je suis incapable de bouger. Mon corps est figé sur place et finalement tombe dans le gouffre. Je tournoie dans tous les sens pour finalement m’écraser dans le noir le plus total.

À ce moment, j’inspire comme si je venais d’émerger des profondeurs de l’océan et que je cherchais mon souffle. Quand je regarde où je suis, je suis de nouveau dans la ruelle où je m’étais couchée et un homme se tenait accroupi devant moi en me tenant l’épaule.

« J’suis désolée. Je croyais que vous alliez pas bien et j’ai préféré vous réveiller. On aurait presque dit que vous ne respirez plus.
- Oh…bordel de merde. Vous ne savez pas à quel point je suis heureuse de voir un être humain… »

Bon il me regarde comme si j’étais folle et me tapote l’épaule avant de quitter la ruelle.  Au moins, j’étais revenue dans le monde réel.