Depuis le naufrage qui l’avait conduite à rencontrer Zoran, Luz ne prêtait plus qu’une foi méfiante en la capacité des navires à… Flotter. Grand bien lui en pris. Car lorsque Valentino bascula sous ses yeux ébahis alors qu’elle s’apprêtait à lui tendre le cocktail précédemment demandé, le verre suspendu au-dessus d’eux deux, elle était justement équipée des pieds à la tête de ses multiples objets de pouvoirs. Elle ne put néanmoins que le voir s’étioler en toute impuissance dans le vide sous ses prunelles, les bras brassant l’air, avant que les immenses vagues de l’océan ne l’absorbent dans un infime déchainement d’écume. Un instant, un léger vertige la saisit. De toute évidence, la donzelle qui venait si sauvagement de le renverser était pour sa part aussi tétanisée qu’un lapin pris dans la lumière d’une torche, peinant à comprendre pleinement l’ampleur de sa « bourde ».

Dans un temps qui parut durer une éternité, son bras tendant toujours un cocktail au vide où se trouvait précédemment Valentino, Luz tourna un très bref regard au troisième luron de leur groupe. Fenrir. Elle ne connaissait pas son nom de famille, car le garçon était d’un naturel calme et discret, et n’avait que trop tendance à bâtir un contrefort de mystère et de distance avec ses interlocuteurs. Elle n’était parvenue au terme de ces cinq derniers jours qu’à le harceler de questions et à nouer avec Valentino et lui une sorte de groupe de vacanciers paisibles. Cela, avant que Valentino ne meure noyé dans d’atroces souffrances dans des flots de… Elle s’ébroua violemment et jeta presque dans les bras de la donzelle maladroite les deux verres qu’elle tenait jusqu’alors, toute entière saisie d’une autorité pressée par l’urgence.

« Toi, tu tiens ça. Va chercher des renforts. Fen’, avec moi ! »

Il ne fallait pas être doté d’un sens de l’observation magistral pour constater qu’il n’y avait absolument personne à perte de vue. L’entièreté du pont était désertée. Inutile donc d’espérer croiser un petit vieux armé d’un pouvoir fantastique permettant comme par hasard de sauver les gens en pleine noyade… Luz courut jusqu’au bout du bateau, son regard affolé déjeté en tous sens autour d’eux. Là ! Elle attrapa la corde –une corde de service, probablement un cordage de remplacement pour le bastingage-, et la tendit à Fen’. Le regard grave, elle tâcha néanmoins d’investir ses propos d’une note un brin plus rassurante. Fen’ lui paraissait jeune et Lucy seule savait combien son instinct maternel ne cessait d’être aiguillé chaque fois qu’elle posait les yeux sur son visage…

« Je vais créer une plateforme. Sur un bateau mobile, je vais néanmoins avoir besoin de toute ma concentration pour la faire léviter et la déplacer jusqu’à Val’. Je… J’ai besoin de toi pour y monter et aller récupérer Val’. Il ne pourra pas se hisser par lui-même sans accroche… Mieux vaut cependant que tu attaches cette corde autour de ta taille, si d’aventure le plan ne se déroule pas comme prévu. Nous pourrons au moins vous hisser ensuite quand elle sera revenue avec de l’aide ! »

Ce faisant, elle attacha fermement l’autre bout de la corde au parapet. Pourvu que Valentino ne se soit pas encore noyé ! Et qu’il sache nager… Elle recula donc, ferma un court instant les yeux et tâcha de faire fi de son anxiété galopante pour trouver en elle une once de concentration. Une plaque de lumière d’un bleu irisé de 2 mètres sur 2 mètres se matérialisa dans l’espace et vint paisiblement patienter devant Fen’, à hauteur approximative de ses genoux. La surface était entièrement lisse et n’accordait aucune prise. Pourvu que le jeune homme soit adroit et vif, et qu’il conserve son équilibre tout au long du process…


Elle leva les prunelles et fouilla l’océan à la recherche de la silhouette vacillante de Valentino, une main tendue droit devant elle pour mieux diriger son emprise sur sa magie. Ce moyen de transport n’était certes pas très rapide, mais cette plateforme improvisée permettrait peut-être de leur attirer un miracle ?

Les vacances moi, je suis pas réellement fan en vrai! C'est con je sais, c'est pas que j'aime pas l'idée d'une croisière, dans les faits ce serait même plutôt l'inverse, les cocktails, le soleil, les filles en bikinis... Comment pourrais-je prétendre que tout cela ne m'intéresse pas? Le problème ce sont les enquêtes! J'ai toujours plusieurs affaires sur les bras qui me rendent fou alors c'est sûr que j'ai pas le temps de prendre du bon temps, sauf que voilà, j'ai une amie assez insistante qui m'a pas vraiment laissé le choix, Khalie m'a littéralement obligé à accepter ce gain, paraîtrait que, pour reprendre ses mots, j'suis chiant quand je ne suis pas détendu et que ça la fatigue de me supporter... Ouai apparemment j'suis trop gentil avec ma subalterne vu qu'elle se permet de me dire ça mais bref! J'lui ai confié Aja, mon drarbuste, en lui rappelant les règles d'usages et elle m'a répondu de son magnifique "ouai ouai..." plein de motivation.

Bref, j'dois avouer que pour le coup, la croisière se passe plutôt bien! Le hasard a mit sur ma route mademoiselle Weiss, la jolie et jeune médecin, amie de Zahria, pour laquelle la garde et moi-même avions accomplit une mission, ainsi qu'un jeune homme sympathique mais discret du nom de Fenrir qui, au départ, a dû supporter mon humour légendaire et toute les blagues possibles et imaginables faisant le lien entre son nom et la créature mortellement dangereuse que l'on peut croiser, si l'on est peu chanceux, au nord du royaume... Quoi qu'il en soit, nous en sommes au cinquième jour de cette croisière, nous discutons tranquillement alors que je suis adossé à la rambarde, une bien mauvaise idée dont je me serais passé si j'avais été au courant de la suite des événements. Je tends la main pour prendre le verre que me tend sympathiquement Luz lorsque soudain, une femme qui m'est inconnue arrive bien trop vite et me fonce littéralement dedans! J'suis pas contre le rentre dedans mais là, la situation s'y prêtait pas vraiment! Je n'ai pas le temps de me rattraper à la main tendue par Fenrir, pas plus que de me retenir à quoi que ce soit en fait, ma grande carcasse passe littéralement par dessus le bastingage et, alors que je mouline des bras dans le vent comme si j’espérais que des ailes me poussent, me voilà faisant une chute vertigineuse vers la surface azurée de l'eau...

Les scorpions et l'eau, ça fait pas bon ménage! Certes, je sais nager, après tout je suis tout de même garde au grand port, ce serait le comble que je sois incapable d'au moins flotter cependant, je dois avouer que cela n'est pas chose aisée dans cette situation, après tout, le navire ne semble pas se rendre compte que l'un de ses passagers (sans doute le plus important, on parle de moi là quand même) n'est plus à son bord, les remous provoqués par le glissement de l'embarcation me font boire la tasse et croyez-moi, le goût des cocktails est bien plus agréable que celui de l'eau salée! Et puis aussi, quelle genre de saloperie peut bien se trouver sous mes pieds? À cette profondeur j'espère ne pas me faire bouffer par un animal plus gros que moi... Remarque, par un plus petit non plus en fait!

Je suis en train de batailler, une nouvelle vague vient me choper et je bois la tasse de trop, c'est donc ainsi que meurt une légende, une lumière, un héro... Noyé sans même avoir graillé une dernière de ces délicieuses olives cocktails? Mais non! Car que serait le monde sans Valentino Rivolti? Apparemment mes deux comparses pensent que ce serait moins agréable (et ils ont raison!) car, alors que seul l'un de mes bras semble faire les derniers adieux à ce monde en se balançant au gré des vagues, Fenrir arrive sur sa passerelle volante et attrape mon bras pour me remonter auprès de lui sur une surface, ma foi, relativement instable mais qui suis-je pour me plaindre? Je suis vivant! Inconscient mais vivant! Reste à espérer qu'on ne va pas couler une seconde fois!

Lorsque la plateforme atteignit enfin le pont, sa lumière bleue irisée s’était déjà considérablement étiolée, menaçant à tout instant de s’évaporer sous les pieds de ses deux étonnants voyageurs. Fort heureusement, Luz parvint à les tracter dans un ultime effort qui projeta les deux hommes d’une légère rebuffade sur le bois du bateau. Si l’atterrissage fut indélicat, au moins tous deux étaient bien arrivés en vie… A la seconde où son bouclier disparaissait, Luz se relevait et franchissait d’une grande enjambée la distance qui la séparait encore de Valentino. Elle le retourna sans ménagement, pressée par le temps. Les yeux clos, il était de toute évidence inconscient et plus aucun souffle ne soulevait sa poitrine. Farouchement opposée à tout décès sur ce foutu navire, Luz joignit ses mains sur son torse et entreprit à genoux de lui prodiguer un massage cardiaque véhément. Lorsqu’au troisième bouche à bouche sans résultat elle commença à envisager de lui envoyer une pleine décharge d’électricité, Val se cabra enfin d’un spasme de vie et recracha l’eau salée qui voulait sa peau avec tant d’ardeur.

Ce n’est qu’alors qu’elle s’aperçut du boucan qui régnait proprement derrière eux. La jeune femme était revenue accompagnée du Capitaine et de trois autres matelots. Le médecin de bord, identifia-t-elle l’individu le plus à gauche, s’empressa de se diriger vers elle pour prendre la relève auprès de Valentino. Fenrir devait leur avoir expliqué une part de la situation, car le Capitaine fronçait présentement les sourcils, une main un brin incrédule agrippée à son couvre-chef.


Il n’en fallut pas plus pour qu’une étincelle furieuse franchisse les prunelles de la praticienne. Sa peau s’embrasa d’une légère lueur électrique tandis qu’elle se relevait d’un bond et marchait vers lui à grands pas.

« Vous n’êtes pas sérieux ! N’y a-t-il personne sur ce foutu bateau capable de respecter les mesures de sécurité les plus élémentaires ?! »

Elle écrasa son index sur son torse et vissa le vert ombrageux de ses iris au regard du Capitaine. Sa voix descendit de plusieurs tonalités, presque un ronronnement grondé.

« Qu’auriez-vous fait, dîtes-moi, si votre incompétence manifeste avait entraîné la mort d’un Officier supérieur de la Garde ? Comment vous seriez-vous justifié devant la famille Royale, devant le Capitaine de la Garde ? Vous n’étiez pas à votre poste, et vous n’avez pas même laissé de surveillant sur le pont comme l’exigent les règles les plus élémentaires de sécurité ! Et pour quelle raison : vous goûtiez au plaisir du buffet en solitaire ? »

Elle désigna d’un geste courroucé les miettes qui subsistaient encore sur son col. Elle n’attendit pas qu’il daigne lui répondre et, manifestant là toute sa froideur, fit volte-face et revint s’agenouiller auprès de Valentino. Elle passa un bras protecteur autour de ses épaules dans le but de le soutenir pendant qu’il reprenait lentement ses sens. Le Capitaine remua, mal à l’aise, et crut bon de se défendre de la pire des façons :

« Allons bon, je ne l’ai pas poussé non plus votre bonhomme ! Cette jeune femme ne respectait pas les consignes ! Nous interdisons pourtant de courir sur le pont… »

La coupable désignée choisit cet exact moment pour fondre en larmes. Son visage fort juvénile exprimait à lui seul combien l’expérience l’avait à tout jamais vaccinée de se montrer maladroite… Elle parvint toutefois à se justifier dans un reniflement bruyant, les épaules secouées de sanglots :

« Je… Je suis désolée… Je ne comptais pas… Il a reculé et… Je voulais juste avoir l’air jolie devant… Devant lui… »

Son regard éploré réapparut derrière ses larmes tandis qu’elle se tournait vers Fenrir, l’objet de toutes ses convoitises et fanfaronnades depuis le début de cette croisière. Malheureusement, le jeune homme paraissait insensible à son charme malgré toutes ses tentatives pour passer chaque fois devant lui sous son meilleur jour. Il lui avait paru judicieux de prétendre être fort occupée pour le dépasser d’une foulée toute féminine, lorsque son bras avait malencontreusement bousculé Valentino. A cet instant du récit, l’ensemble des personnes présentes pivotèrent vers Fenrir, un « Oh » soudain compréhensif sur les lèvres et le regard plus qu’inquisiteur.

Heureusement Fernir parvient à me ramener sur l'embarcation au prix d'un effort relativement impressionnant, heureusement aussi je suis inconscient lorsque nous sommes propulsés, assez violemment, sur le sol! Cependant j'vais pas me plaindre, de un parce que j'suis pas en état même si je le voulais et de deux, parce que vaut mieux avoir quelques ecchymose qu'une magnifique sépulture! J'suis trop jeune, trop beau et trop unique pour mourir en pleine croisière! Dans ma malchance cependant il semblerait que Lucy, ou n'importe quelle divinité pour ce que j'en sais, m'apprécie tout de même au moins un minimum! En effet, j'ai tout de même une chance folle d'être sur ce navire en compagnie d'un médecin aussi professionnel qu'efficace en la personne de cette chère et belle Luz! J'ai droit à un magnifique massage cardiaque des plus efficace et même une séance de bouche à bouche? Si j'avais pas frôlé la mort j'me serai probablement décrit comme béni mais je doute que cette petite blague fasse rire mes deux compagnons qui, pour leur part, doivent être relativement inquiet vu mon plongeon non voulu!

Enfin bon, quoi qu'il en soit, j'finis par recracher une belle quantité d'eau salée, rien de bien agréable! Se noyer c'est déjà une épreuve que je ne vous souhaite pas mais recracher l'eau de mer après en plus? J'ai l'impression qu'on m'enfonce de force plusieurs huîtres dans le gosier et, en toute sincérité, c'est un goût dont je me serai bien passé! Être sauvé de la noyade ça a de quoi vous dégoûter des fruits de mer pour un bon moment et j'vais éviter les plateaux en contenant pour le restant de la croisière! Dans tous les cas, j'suis pas trop sûr de ce qu'il se passe après, Luz me laisse avec le médecin de bord qui est arrivé et très vite, le volume de décibels monte mais j'suis encore trop groggy pour réellement comprendre les tenants et les aboutissants de cette discussion. Tout ce que je peux affirmer, c'est que la belle rousse est en colère, que les marins se dédouane, que mon "agresseuse" est en pleures et que Fenrir est le centre de l'attention malgré lui... Un sacré bordel du coup et c'est plutôt drôle de se rendre compte que tout le monde semble avoir oublié mon existence alors que bon, c'est quand même moi la victime innocente dans cette histoire!

Dans les faits j'dis tout le monde mais c'est pas totalement vrai, après tout, Luz revient à mes côtés, plaçant un bras protecteur autours de mes épaules et, pour être honnête, si on enlève la noyade avortée, j'ai connu pire comme situation que d'être soutenu par une séduisante demoiselle! Cependant, malgré mon état, je remarque bien que Fenrir est dans une situation délicate! Le pauvre est devenu la cible de plusieurs regard furibonds et il se dédouane comme il peut avec une remarque en bonne et due forme en plus! Effectivement les gens devraient prendre leurs responsabilité cependant, cela commence également par moi! Il n'y a pas besoin qu'un esclandre commence. après tout rien ne serait arrivé si je ne m'étais pas adossé à la rambarde dans un premier temps! Certes, jamais je n'ai imaginé que quelqu'un allait me foncer dedans et que j'allais passer par dessus le garde-fou cependant, cela aurait été plus sécuritaire de garder une distance de sécurité avec le bastingage. Du coup, je demande de l'aide au médecin pour me relever, j'aurais sans doute pu prendre appuie un peu plus sur la belle rouquine mais il ne faut pas abuser des bonnes choses et puis, je me doute qu'elle a dû puiser dans son pouvoir pour matérialiser et contrôler cette plateforme, il serait donc bien malaisé de ma part de lui en demander plus! Une fois debout, les regards se reportent forcément sur moi, y a pas à dire, j'fais un meilleur premier rôle que mon ami bien trop timide pour être le centre de l'attention, si j'peux le décharger de cela, c'est avec plaisir.

"On... On se calme! Y a pas mort d'homme héhéhé... Capitaine! Je comptes sur vous, faudra respecter les consignes de sécurité à l'avenir, ce serait dommage que la garde doive venir vérifier que tout est dans les normes!" Une menace à peine voilée mais qui devrait faire son effet! "Toi arrêtes de pleurer! Si tu veux parler à Fenrir fais le directement ce sera plus simple!" Et ça évitera de risquer la vie d'un homme au passage ce qui pourrait être intéressant. Maintenant j'vais juste... Me reposer si vous le permettez!" Et j'veux pas dire aller dans ma cabine, vu la situation j'préfère rester proche de Luz, entre elle et le médecin de bord c'est celle qui a réagit le plus vite et le mieux cependant, j'aurais pas l'indécence de la priver du soleil pour lui demander de m'accompagner dans ma cabine, j'suis un gentleman quand même! Du coup j'm'assied en plein milieu du pont, j'doute de passer par-dessus la rambarde en m'y adossant mais, je préfères éviter de prendre des risques, avec ma chance il arrivera encore une merde! Quoi qu'il en soit, j'ai encore besoin de reprendre un peu de force, jouer les héros pour calmer les ardeurs, ça m'a épuisé...

Un air d’incrédulité un peu trop familier sur le visage, Luz regarda sa vie courir au désastre pour la deuxième fois depuis qu’elle avait eu l’heur de s’adonner aux croisières. Elle prit soin de noter méticuleusement dans un coin de son esprit de ne plus jamais reprendre le moindre navire jusqu’à la fin de ses jours, puisque ceux-ci daignaient la gratifier systématiquement d’un naufrage. Sous leurs pieds, la coque émit un effroyable frissonnement, suivi d’un grincement audible à des kilomètres à la ronde et d’un énorme bruit de cassure. Ce fut comme une aspiration d’air soudaine, et penchée par-dessus le bastingage, elle put observer des trombes d’eau bouillonnantes et glacées s’engouffrer soudainement sous la coque. Le bateau, à demi échoué sur l’iceberg, parut tanguer sur ses bases et soudainement se dégager de la glace du fait du déséquilibre créé par la violence de l’eau : il retomba lourdement dans l’océan, s’enfonça de plusieurs mètres et remonta aussitôt en un effroyable mouvement de manège. Ce brusque à-coup irrésistible ne manqua pas de déclencher une série d’hurlements. Si la plupart des voyageurs se trouvaient toujours dans la cale, à boire et à manger, quelques-uns s’étaient égarés sur le pont pour prendre l’air et se trouvèrent présentement violemment jetés à l’eau. Le reste des vacanciers, prisonniers dans une immense cuve de fer, ne tarderaient pas à voir des trombes d’eau envahirent leur joli buffet dans la cale…

Agrippée au bastingage au point que ses jointures en avaient blanchi, Luz s’était immédiatement rapprochée de Valentino pour s’assurer qu’il ne glisse pas dans cette débandade, au vu de l’expérience traumatique qu’il venait déjà de vivre. Fort heureusement, personne ne parut tomber par-dessus bord dans leur groupe, malgré un matelot et la jeune fille violemment projetés au sol.


Il se redressa tout à fait, une main passée douloureusement sur sa hanche.


Elle fronça les sourcils et chassa la pointe de sang qui maculait sa lippe malmenée.

« J’ai un cristal de communication dans mon sac, il se trouve dans ma cabine. Si Farik m’accompagne, il pourra me transmettre les coordonnées actuelles du navire ! Même si nous dérivons les secours ne tarderont guère à nous rejoindre s’ils sont immédiatement prévenus… Nous vous rejoindrons sur le pont sitôt après ! »

Les hurlements redoublèrent sous leurs pieds. Le Capitaine valida sa proposition d’un geste et incita tous les volontaires à le suivre.

« Nous devons impérativement calmer la foule avant que cela ne dégénère ! Suivez-moi ! Les canaux de sauvetage se trouvent de chaque côté du bateau, sur les flancs de celui-ci. »

Luz échangea pour sa part un regard entendu avec le dénommé Farik et se dirigea vers un couloir qui s’enfonçait dans la coque. Des cris, des pleurs et des pas précipités se faisaient entendre dans le goulot, couvrant presque le bruit terrifiant de l’eau qui continuait à envahir l’habitacle du -5 à gros bouillons. Elle n’avait pas hâte de devoir se mouiller, songea-t-elle en grimaçant à la vue de sa petite robe d’été.

« Par ici, ma cabine est au -2 ! »

Que feraient Fenrir et Valentino dans cette débandade ? Etait-ce une bonne idée de se séparer ? Elle espérait qu’il ne leur arriverait rien… Elle se rassura néanmoins. Malgré son état, Valentino était effectivement un officier supérieur de la Garde, et un homme férocement habitué à traiter des situations difficiles d'une main de maître. Il n'arriverait vraisemblablement rien à Fenrir tant qu'il resterait à ses côtés. Pourvu que Lucy soit généreuse avec eux !

Sérieusement? Il a foutu quoi ce con? Quand t'es pas foutu de boire sans faire de la merde tu ne le fais juste pas! Quand le navire est venu se cogner contre l'iceberg, j'dois avouer que j'ai été relativement heureux que Luz soit présente! Elle s'est directement assuré que je ne retourne pas me mouiller les miches et pour cela j'suis reconnaissant! En plus, il semblerait qu'elle se soit blessée la lèvre dans l'opération? Ok cet ivrogne j'vais le foutre en dégrisement! C'est criminel de blesser un si joli visage merde même si ce n'est qu'une coupure à la lèvre! Sauf que bon, faut que je pense d'abord à la situation actuelle : le navire coule doucement mais sûrement, les gens paniquent et si on se bouge pas le fion on risque d'être dans la flotte jusqu'au cou - voir plus- ! Du coup, je laisse Luz partir avec le matelot pour récupéré son cristal, j'vais avouer que ça me plait pas trop mais il connait mieux ce vaisseau que moi et j'ai d'autre chat à fouetter sur le pont! Après tout, le plus problématique ça va être ici : les gens paniquent, certains sont ivres, d'autres sont tombés voir se sont blessés suite au choc... Non vraiment, ma présence est nécessaire c'est un fait!

Même si, en toute sincérité, Fenrir se débrouille parfaitement bien dans un premier temps! Bien qu'il n'apprécie pas être le centre de l'attention on peut dire que, lorsque cela est nécessaire, il a du mordant le loup! Cependant, il s'approche en me disant qu'il a besoin de mon aide et en plus il s'excuse pour cela? Je ne peux pas m'empêcher de rire doucement alors que je relève ma grande carcasse du sol pour me remettre sur mes pieds, bien-entendu qu'il a besoin de moi après tout, je suis le grand, le seul, l'unique : Valentino Rivolti. "T'inquiètes Fenrir! Après tout, gérer les situations difficiles, c'est mon boulot!" C'est moi le garde ici, c'est moi l'autorité compétente et surtout, c'est moi qui doit m'assurer que tout le monde aille bien! J'aide la gamine et le matelot à se relever puis je donne mes consigne d'une voix forte et claire, pas la peine de crier mais faut quand même que ma voix se fasse plus forte que les bruits de panique! Fenrir m'a déjà mâché le travail à moi de m'assurer d'utiliser son intervention à mon avantage.

"Messieurs et mesdames veuillez garder votre calme! Tout se passera bien, nous avons suffisamment de canots pour tous et largement le temps d'agir! Que chaque matelot emmène un groupe vers un canot! Sans précipitation et dans le calme!" Ensuite j'avance vers le mec ivre responsable de tout ce merdier! J'pourrais le mettre au tapis, l'envoyer vers un somme pour qu'il soit pas trop chiant mais ce serait pas professionnel! À la place, je l'attrape, j'lui mets les mains dans le dos et je lui passe les menottes! L'idée c'est juste de l'incapaciter pour pas qu'il fasse plus de connerie! Je le confie ensuite à l'un des matelots... Bien tout devrait bien se passer maintenant...

C'est alors que j'entends l'appel de Fenrir : Coincés dans la cale? Et merde! Je fonce immédiatement pour voir la situation : des débris bloquent la porte et j'entends les gens qui paniquent de l'autre côté! Bon... Je déteste cela surtout après avoir bu la tasse mais pas le choix! Au revoir ma belle gueule bonjours la plus grande force physique! Je commence à me transformer, ouai j'vais être moche pendant un moment mais qu'importe, avec cette forme je suis plus grand, plus robuste et plus fort! Ma peau commence à changer de couleur pour virer sur le gris, ensuite ma carapace naturelle de chitine commence à prendre forme! Finalement c'est le pire, la gueule qui change : plus vraiment de cheveux, des mandibules à la place de la bouche... Ouai c'est dégueulasse nais c'est pas grave! Je m'accroupis, je mets mes épaules sous les débris et je me relève en forçant pour porter la charge! Heureusement, mon amure naturelle est solide, elle risque pas de se briser comme pourrait le faire un muscle suite à cet effort! Bientôt, je décale les débris sur le côté et la porte s'ouvre.

"Fenrir guide tout le monde jusqu'aux canots! Luz n'est pas encore revenue je vais m'assurer qu'elle va bien!" Et je pars vers la cabine de la jeune femme, hors de question de la laisser là! De toute manière ma présence n'est plus nécessaire sur le pont. Cependant, je reprends ma forme humaine également! J'vais quand même pas apparaître avec cette gueule cauchemardesque devant Luz!

Luz gronda un juron lorsque sa cheville s’enfonça dans plusieurs centimètres d’eau glacée. Depuis quand les océans étaient-ils aussi froid dans le sud… ? Le liquide noire comme de l’huile s’épaississait presque à vue d’œil dans un horrible bruit de siphon, et de l’écume venait lécher sa peau nue par vagues désagréables tandis qu’elle tâchait d’avancer à contre-courant. Derrière elle, Farik n’en menait pas plus large, certes protégé de la température par ses bottes et son pantalon, mais fortement ralenti par l’eau qui imbibait le tissu de ses vêtements. Luz pour sa part renonça rapidement à l’idée de se déplacer avec ses chaussures, au risque de se couper malencontreusement sur un débris alentour : elle ôta rapidement ses sandales et en attacha les sangles autour d’une épaule, avant de retrousser son jupon mouillé sur ses cuisses.

« C’est par là, plus que quelques mètres ! »

Ils arriveraient bientôt au bout du couloir et ne cessaient de croiser des voyageurs affolés qui courraient en sens inverse. Farik leur indiquait d’ailleurs progressivement de sa grosse voix grave la direction du pont à grands renforts de « Vous y trouverez des canaux de sauvetage ! ». Quelle sacrée débandade… Ils s’arrêtèrent enfin devant sa cabine et Luz put constater avec surprise que la porte était totalement bloquée. Une nouvelle imprécation sur les lèvres –et bien décidée à faire le tour de son répertoire aujourd’hui-, Luz et Farik reculèrent d’un mètre, se jetèrent un coup d’œil entendu et s’élancèrent ensemble contre la porte de la cabine qui partit valdinguer sur son axe. La petite table d’appoint qui devait précédemment la bloquer s’était promptement éloignée, aisément portée par l’eau qui rendait le sol glissant comme de la glace. Fort heureusement, la praticienne avait laissé son grand sac sans fond dans une armoire… Elle ne fut donc pas mécontente de le retrouver parfaitement sec.

« Donnez-moi les coordonnées. »

Elle s’appuya sur son lit pour sortir son cristal de communication et tous deux parvinrent à joindre l’une de ses connaissances du Grand Port. Après s’être assurée qu’il avait bien saisi les informations transmises et l’extrême urgence de la situation, Luz mit un terme à la connexion mentale et passa la sangle de son sac autour de son autre épaule. La manipulation ne leur avait pris que dix minutes tout au plus… Et l’eau atteignait déjà presque leur taille.

« Partons vite ! »

« J’espère que tous les voyageurs de cet étage sont remontés… »

Farik jeta un coup d’œil dans le couloir et héla d’éventuels retardataires. Personne ne lui répondit. Personne, sauf un homme seul et son petit garçon qui déboulèrent pile à cet instant. Le gamin grelottait fortement dans les bras de l’adulte et lui-même jetait des coups d’œil hystériques en tous sens.


Il fit mine de reculer pour faire demi-tour, refusant de lâcher prise sur le pauvre gamin qui n’était de toute évidence pas son fils. Lorsque Luz et Farik firent un pas en avant pour intervenir, l’homme montra pratiquement les dents et commença à présenter des signes manifestes d’énervement. Oui, ses nerfs venaient tout simplement de se transformer en brasier vivant.

« N-N’approchez pas ! Vous me voulez du mal ?! M’empêcher de récupérer mes cristaux ?! »

« Il faut venir avec nous, Monsieur… Donnez-nous au moins l’enfant… »

Luz jeta un regard désespéré sur la scène alentour, l’eau glacée investissant ses hanches d’une morsure tout à fait désagréable. Elle ne pouvait décemment pas espérer le paralyser à l'aide de son pouvoir. User d'électricité dans une telle marre impacterait principalement son allié... Et ils n’avaient certainement pas le temps de négocier !


Il resserra son étreinte autour du gamin qui se mit à pleurer, presque en position de défense. Val’, ici ? Où était Fenrir ?

J'vais pas mentir, ça devient difficile de se déplacer! Même pour moi qui suis grand, beau et fort, l'eau est légèrement chiante et ralentie pas mal les déplacements! Dans les faits, on peut dire que c'est la merde! Cependant cela ne me donne que plus de force pour avancer! Après tout, cela fait un moment que Luz est partie et, vu la vitesse à laquelle l'eau monte, je ne veux pas que la jeune femme soit en difficulté! Après tout, c'est le rôle du héro de s'assurer que tout le monde va bien même si, de toute évidence, la jolie médecin est loin d'être une jeune femme en détresse! Mais bon, quoi qu'il en soit, j'dois tout de même m'assurer que tout le monde sorte de ce foutu navire! Pas question de laisser quelqu'un derrière - sauf bien-sûr s'ils sont déjà morts - ce serait dramatique et puis, j'ai ma réputation en jeu moi aussi d'une certaine manière... J'arrive bientôt dans le couloir dans lequel nos cabines sont : celle de Luz n'est pas bien loin de la mienne, c'est d'ailleurs alors que je sortais de ma cabine le premier jour de cette croisière que je suis tombé nez à nez avec la demoiselle, une bonne surprise donc! La surprise est bien moins bonne lorsque je revois la jeune fille en ce moment cependant!

En effet alors que je vois parfaitement cette chevelure rousse non loin devant moi, je remarque surtout qu'elle ne bouge pas le moins du monde! Que peut-il bien se passer? J'avance aussi vite que l'eau me le permet, faudrait voir à pas traîner ici sinon on risque d'avoir du mal à rejoindre les canots en temps et en heure! Sauf qu'alors que j'avance, je commence à comprendre la raison de cette immobilité : un homme qui semble tenir un enfant comme s'il s'agissait d'un otage? Sérieusement? Le bateau est en train de couler, tu risques d'y passer et toi tu trouves rien de mieux à foutre? J'en ai déjà vu des cons mais celui-là c'est la palme bordel de merde! Je continue à avancer, de toute manière ce type m'a déjà vu ou alors il est complètement aveugle mais, je doute que cela soit le cas vu que je l'entends parfaitement demandé qui je suis... Je souris calmement alors que Luz se tourne, visiblement surprise de me voir! Je sors une cigarette parce qu'il faut toujours avoir une clope pour ce genre de situation et... Rien en fait, j'me rappel que je suis tombé à l'eau et que du coup tout mon tabac est foutu! Merde! Ça enlève des points de prestige mais c'est pas grave, le tout c'est d'avoir de l'assurance.

"Officier supérieur Valentino Rivolti! Pour vous servir!"

On se présente en balançant le grade tout naturellement, après tout cela risque d'impressionner voir de faire hésiter notre preneur d'otage! Ma seconde phrase par contre est plus ironique même si, d'un certain point de vue, n'est-ce pas le rôle de la garde? Protéger et servir? Je m'avance tranquillement jusqu'à arriver aux côté du marin et de la jeune femme, je range également ma clope qui ne me sert à rien avec toute la grâce et la discrétion du monde! Pour le reste, je regarde l'homme et tente d'analyser rapidement la situation : il semble plus inquiet qu'autre chose, anxieux même l'enfant, lui par contre, semble réellement terrorisé et on peut le comprendre vu la manière de laquelle il est tenu. Il faut désamorcé la situation au plus vite!

"Que se passe-t-il monsieur?" Je reste calme malgré la situation, si mon interlocuteur ressent de l’inquiétude, cela risque de le rendre plus nerveux et donc plus colérique encore.

"Mes cristaux... Je dois aller chercher mes cristaux!"

Sérieusement? Le bateau est en train de couler et lui, il veut ses cristaux? La peur lui a peut-être fait perdre toute notion de priorité? Ou alors il est vraiment con! Dans tous les cas, il tient un gamin en otage... Si cela ne tenait qu'à moi, je lui dirai simplement d'aller chercher ses cristaux et de nous rendre le gamin, cependant cela serait de la non-assistance à personne en danger! Très clairement il n'en sortirai pas et, même s'il est très con, je suis un garde je ne peux faire cela! Je souris calmement.

"Mais bien-entendu c'est compréhensible! Que diriez-vous de relâcher cet enfant et nous irons ensuite, calmement, chercher vos cristaux?"

"Non! Vous voulez me voler! Vous voulez mes cristaux!"

Il s'énerve alors je souris plus encore et je fais un pas vers lui, inutile de montrer le moindre signe de peur ou d'hésitation, cela n'aurait pour effet que de renforcer sa paranoïa.

"Allons monsieur, je suis garde! Je n'ai aucune intention de vous voler, je ne veux que vous aider."

Et je souris avec toute l'assurance qui me défini en faisant un nouveau pas vers lui. Il hésite cela se voit mais si je lui laisse la moindre occasion de douter il risque de devenir dangereux. Doucement son étreinte se relâche sur l'enfant qui n'en demandait pas tant, le garçon s'échappe des griffes de son "ravisseur" et se met à courir vers Luz! J'en profite pour charger l'homme et le plaquer au sol dans l'eau! Il se débat, me mets plusieurs coups heureusement, la puissance des impactes est réduite par le fait que nous soyons dans l'eau. Quand finalement je le sors de l'eau, je lui décroche un coup de poing dans la mâchoire qui le met au tapis! Pas très professionnel mais j'ai pas réellement mes menottes vu que je suis supposé être en vacance et puis, il m'a pas raté non plus! Je saigne de la lèvre et j'vais sans doute avoir quelques ecchymoses mais bon... Je soulève le gars et je me tourne vers le marin qui accompagnait Luz.

"Farik aidez moi à le porter! On a plus de temps à perdre!"

L'homme vient m'aider en prenant les pieds de l'inconscient et je me tourne vers Luz. "Fenrir s'assure que tout le monde rejoint les canot sans heurt... Qu'en est-il des secours?"

Heureusement que ce foutu gamin avait du répondant. L’espace d’un instant, Luz craignit qu’il ne reste tétanisé dans les bras de son ravisseur, mais visiblement l’instinct de survie fut le plus fort. A moitié hoquetant à cause de l’eau qui menaçait de l’ensevelir, Luz le rattrapa de justesse par le bras pour l’extraire de cette mélasse glacée avant qu’il n’avale de travers une gorgée d’eau. Elle le hissa péniblement dans ses bras, n’ayant de toute façon guère le temps de manifester une once de douceur : son attention était accaparée par Valentino qui venait de les sortir d’une situation drôlement délicate. Il était bien plus facile de faire entendre raison à un gloot qu’à une satanée personne hystérique.

« Dans trente minutes, peut-être moins je l’espère. Tu vas bien ? »

Elle lui retourna un drôle de regard, plus maternelle avec ses amis qu’avec les enfants. Qui se soucierait de demi-humains incapables de survivre par eux-mêmes ? Fort heureusement, Valentino semblait un tantinet abîmé, mais parfaitement fonctionnel. Il arborait son éternel sourire confiant et dragueur, inébranlable dans la tourmente. Elle pouvait difficilement dire le contraire… Il y avait quelque chose d’infiniment rassurant à lutter pour sa survie aux côtés d’un ami dont les habitudes étaient demeurées inaltérées. Heh, quelle différence avec un café matinal au bord d’un splendide bassin finalement, semblait dire son sourire. Si ce n’est qu’ils étaient trempés de la tête aux pieds…

Ouvrant la marche, elle fit volte-face avec son sac sur une épaule et un gamin silencieux et effrayé tenu contre sa hanche à l’aide de son bras libre. Elle repoussait sur leur passage les quelques meubles mobiles qui avaient repris leur pleine liberté dans ce bouillon d’eau, tout en ne cessant de jeter des coups d’œil inquiets au groupe qui la suivait. Ils s’apprêtaient à atteindre l’escalier de retour lorsque la mine inquiète de Fenrir apparut brutalement dans son champ de vision.


Un poids se libéra de ses épaules tout en même temps qu’un soupir rassuré. De nouveau tous les trois. Qu’importait le reste du monde ? Il l’aida à grimper les quelques marches encombrées et à s’extraire de l’eau. L’onde avait plombé son jupon et le tissu s’empêtrait dans ses jambes dans une étreinte aussi lourde qu’un amant jaloux.

« On va bien, Valentino et Farik auront peut-être besoin d’aide. Nous devons nous mettre à l’abri dans les canots, les secours arrivent ! »

Déjà, des picotements naissaient dans ses muscles, la tension de l’urgence dévorant avec une rapidité flagrante son énergie. Elle ne s’était certainement pas attendue en cette fin de journée à deux sauvetages successifs ! Ils coururent plus qu’ils ne marchèrent sur le pont brinquebalant du navire. Les hurlements n’étaient presque plus audibles par-dessus le grondement tonitruant de l’eau qui avait presque atteint la lisière du bastingage. Luz pouvait apercevoir l’écume s’agiter et entraîner avec elle la structure entière du navire vers le fond de l’océan et Lucy seule savait quelle créature horrible. Des kilomètres d’eau noire et tumultueuse vers les abysses… Une bulle d’air principale dut lâcher, puisque le pont se souleva brusquement, à présent fortement penché à l’oblique. L’arrière du bateau n’était déjà plus visible.


Ils se rapprochèrent tant bien que mal du bord, luttant contre l’attraction terrestre. Maudit soit ce marin qui avait ciré le pont deux jours auparavant ! Luz baissa les yeux. A trois mètres sous eux, un canot de sauvetage s’était avancé et le Capitaine leur faisait des grands signes. La distance menaçait de s’agrandir de minute en minute, ce foutu rafiot étant bien déterminé à s’élever à la verticale.


Ils échangèrent un rapide regard de concertation. Hé bien… Quand il fallait y aller… Quitte à finir dévorés par un requin ou couler à pic… Luz prit son élan et sauta d’un bond. La chute fut courte, mais l’eau glaciale les absorba, elle et l’enfant, avec la violence d’un coup. Le souffle coupé, elle dut fournir un effort pour remonter à la surface, réalisa que le bateau qui s’enfonçait dans l’eau créait une énorme aspiration aquatique et… Fut brutalement happée par une main habile qui la hissa sur le canot où elle put enfin crachoter en paix.

Je rassure Luz, faudrait pas qu'elle s'inquiète trop! Après tout j'suis au top de ma forme! Bon légèrement blessé mais c'est ça les risques du métier! Pour le reste, j'suis plutôt pas mal! Trente minutes avant que les secours n'arrivent? Ok faut encore que je brille pendant ce temps là puis on verra ce qu'il en est! De toute façon, pas de repos pour la garde! J'vais sans doute pas me la couler douce même une fois les secours sur place, faut s'assurer de maintenir l'ordre et que tout le monde aille bien! Pour ça, c'est déjà raté malheureusement! Je sais pertinemment que certains ne s'en sont pas sortis! Juste la famille du gamin déjà sinon, il ne serait pas seul ou alors il a les parents les plus irresponsables du monde! J'vais pas mentir, ça me fait un petit pincement au coeur! Rien de pire que de savoir une vie perdue sans que j'ai pu la sauver mais bon, faut bien rester fort pour les autres! Je vérifierai le registre des passagers et j'irai faire une prière à Lucy pour les morts! J'suis pas spécialement croyant personnellement mais, dans le doute, autant le faire! Leurs âmes seront peut-être plus heureuses dans ce cas là...

On se tire aussi vite que possible, vu qu'on tient le corps de l'autre connard idiot et avare, c'est Luz qui ouvre forcément la voie! J'peux pas dire que j'aime particulièrement cela, on sait jamais ce qui peut arriver mais pas trop le choix vu l'encombrement que je traîne! Bonne nouvelle cependant, Fenrir apparaît! Je soupire soulagé, il va pouvoir aider Luz et j'imagine que s'il est là c'est que tout est sous contrôle du côté des canots! Bonne chose donc! Il aide la jeune femme à sortir de l'eau ainsi que l'enfant et on lui passe le gars inconscient pour sortir avant de le reprendre parce que bon, j'préfère être de ceux qui le tiennent si jamais il se réveil! J'dis au jeune homme de s'assurer que Luz va bien et que le passage est libre pour elle, je sais qu'elle s'inquiète pour tout le monde mais faudrait voir à ce qu'elle fasse attention à elle aussi! Elle a quand même subit un choc dans le choc avec le glaçon et l'eau doit pas lui avoir fait du bien vu la pression qu'elle applique!

On arrive au niveau des canots alors que le navire commence à avoir du mal! Monter vers la pointe encore émergée s'avère compliqué alors que le capitaine avec les canots nous dit de sauter! Luz se lance la première, Fenrir la suit en second... Je dis à Farik d'y aller ensuite et il me regarde inquiet. "On a pas toute la journée mon gars! Saute ou j'te pousse!" J'dis ça avec un large sourire - même si au fond j'suis sincère - et il obtempère! Se jetant littéralement à l'eau! Une fois qu'il est remonté sur le canot, je balance le corps de l'autre en m'assurant de le projeter de toute mes forces pour que les marins puisse le réceptionné au vol! Heureusement qu'ils sont plusieurs! Bon, reste que moi... Je m'apprête à sauter alors que le navire fait un dernier mouvement, un soubresaut d'estime de celui qui veut pas réellement couler qui me fait perdre l'équilibre alors que j'allais sauter! Résultat je commence à tomber de manière magnifiquement acrobatique et un volontaire, un salto avant vrillé sur le côté et je retombe dans l'eau avec une pointe absolument parfaite! J'arrive à remonter tant bien que mal en étant hissé par un marin qui me regarde impressionné.

"Belle acrobatie."

"Merci gamin! Des années d'entraînement juste pour cette occasion! Faut toujours rester EPIC après tout!" que je balance ironiquement... Je rejoins Luz et Fen' j'm'installe entre les deux et chope les deux par les épaules en les attirants vers moi dans une accolade soulagée! J'suis heureux qu'ils soient tous les deux en vie! "Prochaine réunion j'propose une taverne! Y aura toujours des cocktails et surtout pas d'eau!" Et on se dirige vers la côte... Ils vont devoir passer l'inspection médicale, moi j'vais ouvrir un rapport parce que bon, le boulot avant tout même si j'suis en vacances mais au moins, tout va bien maintenant!