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    Un monde plein de mystères,
    plein de magie et surtout plein d'aventures...

    Il est peuplé de créatures fantastiques. Certaines d'une beauté incomparable, d'autres aussi hideuses qu'inimaginables, beaucoup sont extrêmement dangereuses alors que quelques unes sont tout simplement adorables. La magie est omniprésente sur ces terres : des animaux pouvant contrôler la météo, des fleurs qui se téléportent, des humains contrôlant les éléments, des objets magiques permettant de flotter dans les airs...

    Dans ce monde, il y a le royaume d'Aryon. Situé à l’extrémité sud du continent, c'est un royaume prospère, coupé du monde. Il est peuplé d'hommes et de femmes possédant tous un gros potentiel magique, chacun vivant leurs propres aventures pour le meilleur comme pour le pire.

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    Une robe!
    Fedora SanwardI'm a Barbie girl, in the Barbie world
    Fedora Sanward
    Informations
    Une robe!
    Jeu 16 Juil 2020 - 3:23 #

    Une robe!

    Tout de même elle ne peut pas! Elle a porté cette même robe toute sa vie! Il est temps d'en avoir une nouvelle, celle-ci a été recousue par sa mère de nombreuses fois mais maintenant elle n'est plus là et elle ne peut tout de même pas rencontrer son père avec cela sur le dos! C'est décidé : Fedora vous engage donc pour lui ramener une robe un peu speciale... Elle vous donnera une certaine somme pour cet achat. S'il y a trop vous pouvez garder le reste s'il n'y a pas assez elle mettra la différence mais elle veut cette robe!
    + Proposé par : @Fedora Sanward
    + Participants : @Calixte Alkh'eir et @Ashelia Branford
    + Objectif : Trouver un tailleur qui accepte de faire une robe aux tailles invraisemblables : littéralement une robe de poupée humaine.


    Prologue : Une Robe!
    L'un des domestiques lui a apprit la grande nouvelle : il a fait passer sa demande à toute personne susceptible de l'aider et apparemment, deux personne ont répondues positivement! Elle va enfin avoir une nouvelle robe! Juste à temps pour entamer son grand voyage vers le grand port! Elle sera sans aucun doute magnifique pour rencontrer son père mais, avant l'arriver de ses deux bienfaiteurs, la demoiselle doit absolument se préparer! Elle a une idée bien précise de la robe qu'elle désire! Après tout, son père est capitaine alors, il doit avoir l'habitude de beaux vêtements non? Elle veut des manches longues pour pouvoir cacher ses chaines, elle veut une jupe moins gonflée parce qu'elle trouve que tout cet espace est inutile vu sa taille, elle veut conserver un corset, avec sa taille elle n'a pas le choix sinon ce sera laid elle en est persuadée!

    Elle dessine donc la robe de ses rêves, elle ne sait pas si ce sera possible, elle est capable de recoudre sa robe, ou son corps, quand elle se coupe mais créer une robe de rien? Cela doit être affreusement compliqué non? Bah ce n'est pas grave, tout sera mieux que sa robe rafistolée de toute façon! Alors elle sourit, avec un peu de chance cela sera possible de faire la robe qu'elle dessine! Après tout, elle dessine bien alors un tailleur devrait comprendre exactement ce qu'elle veut n'est-ce pas? Le dessin préparé, elle va dans sa chambre et demande à l'un des domestiques de prendre ses mesures : hauteur, tour de poitrine, tour de taille, tour de hanche, longueur des jambes et des bras... Tout ce qui est nécessaire pour que la robe tombe juste! Après tout, il serait dommage qu'elle soit trop longue, trop courte ou surtout trop large! Non il faut que tout soit absolument parfait!

    Le hasard fait parfaitement les choses, alors que les dernières mesures sont prises et ajouté sur son dessin, voici qu'on l'appelle depuis l'étage inférieur : "Mademoiselle Sanward! Les deux braves volontaires pour votre robe viennent d'arriver!" Oh non! Cela ne va pas, elle ne veut pas les faire attendre! Elle sort donc de sa chambre en toute hâte, court dans les escaliers en tenant sa tête pour ne pas qu'elle tombe de ses épaules et arrive au niveau de la grande porte d'entrée avec un énorme sourire sur le visage! Deux personnes qui lui sont inconnues, mais qu'importe, ils sont là pour lui rendre service alors, naturellement, elle les aime déjà! Elle pourrait presque les prendre dans ses bras, en enlevant ses bras et en utilisant toute la longueur de ses chaines, elle pourrait sans doute câliner les deux mais, rien n'affirme qu'ils apprécieront cela!

    "Merci merci merci! Je m'appelle Fedora et c'est moi qui désire une robe! Et vous c'est quoi vos noms? Vous vous y connaissez en robe? Moi pas vraiment mais j'en veux une belle pour une occasion spéciale! J'ai même fais un dessin! Vous voulez le voir? Oh suis-je bête je dois vous le donner pas vrai? Bien-sûr sinon vous ne pourrez pas aller chercher la robe! En plus vous savez que..."

    "Hum hum... Mademoiselle Sanward..." La rappelle à l'ordre le majordome.

    "Oh oui... Pardon!" S'excuse-t-elle visiblement triste de ne pouvoir parler plus... Pour une fois qu'elle avait quelqu'un avec qui converser... "Voici le dessin de la robe de mes rêves, mes mesures sont dessus! On vient juste de les prendre vous savez, cela a été plus rapide que je ne le pensais et..." Un regard du majordome et un petit raclement de gorge la ramène sur le droit chemin. "Ah oui oui pardon... Voici également les cristaux pour l'achat." Dit-elle en tendant une bourse bien remplie à l'un des deux braves gens. "J'ignore combien peut coûter une robe mais vous devriez avoir assez d'après Wilfred. Ajoute-t-elle en désignant l'homme à ses côté. "Cette robe est véritablement importante pour moi... Si cela coûte plus cher je pourrais payer! Je ne peux juste pas y aller moi-même, habituellement les tailleurs prennent peur et refusent de me servir alors, je vous en supplie, vous êtes mon seul espoir..." Et ainsi, elle leur confie les cristaux, le dessin et ses espoirs et les regarde partir, les yeux vides car ce sont ceux d'une poupée mais le petit coeur lourd par la peur d'être déçu une nouvelle fois. Elle les regardes ainsi jusqu'à ce qu'ils disparaissent et plus longtemps encore, jusqu'à ce que Wilfred ne la fasse rentrer dans la demeure, elle n'a plus qu'à attendre maintenant.
    Codage par Libella sur Graphiorum
    Calixte Alkh'eirDamoiseau
    Calixte Alkh'eir
    Informations
    Re: Une robe!
    Dim 19 Juil 2020 - 14:31 #
    Comme souvent dernièrement, les pas de Calixte avaient trouvé le chemin de la Capitale pour y passer quelques jours. Apparemment on avait plus besoin de ses capacités de coursier à la ville royale qu’au Grand Port, et ça n’était pas lui qui allait cracher sur l’occasion de passer un peu plus de temps avec ses amis du coin. Autant quelques lunes plus tôt il avait tout fait pour prendre de la distance, autant à présent il retrouvait à chaque fois ces visages aimés avec enthousiasme. Il avait cette fois-ci posé ses valises dans l’appartement spartiate de Naëry, et Apolline était rapidement partie rouler vers d’autres horizons. Apparemment sur sa liste : la grange de Carciphona, et le bureau de chasseur de primes du Soleil de sa vie.

    Après deux premières journées bien chargées à la Caserne, une langueur estivale s’était emparée du service postal de la Garde, et Calixte s’était retrouvé de fait au chômage technique. Il en avait donc profité pour passer davantage de temps au quartier général des espions, à brasser de la paperasse et à refaire un tour des stocks. C’était ainsi qu’il était tombé sur une Ashelia peut-être aussi désœuvrée que lui. Profitant de l’intérêt naturel de la jeune fille pour tout ce qui touchait de près comme de loin au vestimentaire, le coursier l’avait embarquée dans son ménage d’été des placards de la planque. Ils avaient ainsi dépoussiéré les multiples déguisements et leurs accessoires, jeté tout ce qui n’était vraiment plus utilisable, et refait une liste du nécessaire. Après avoir obtenu l’approbation de Zahria, ils étaient partis arpenter les rues chaudes de la Capitale pour redonner un coup de neuf – ou en tout cas renflouer – la garde-robe des espions.

    C’était ainsi qu’au détour d’une énième friperie que les deux jeunes gens étaient tombés sur l’annonce : une Noble cherchait quelques âmes volontaires pour l’aider à obtenir une nouvelle robe. L’homme derrière le comptoir, celui qui venait de leur réclamer quelques cristaux pour leurs achats, leur avait glissé qu’ils ne semblaient pas dépourvus de goût ni de connaissances concernant l’offre vestimentaires de la Capitale, et que la paie valait vraiment le détour. Un regard appuyé aux habits de seconde main qu’ils avaient entre les bras leur avait fait comprendre qu’ils avaient sans doute besoin d’un peu de sous. Le fait qu’ils eussent évoqué l’achat de nombreux vêtements pour les nécessiteux avait probablement aussi influencé le raisonnement du vendeur. Et comme ils n’étaient pas hyper occupés, qu’Ashelia ne paraissait pas contre se faire quelques cristaux, et que ça semblait être plutôt un bon plan pour allier l’utile à l’agréable… Ils acceptèrent l’affaire.

    Ils étaient donc rentrés terminer le rangement qu’ils avaient entrepris dans les placards du quartier général des espions, s’étaient brièvement renseignés sur la Noble à l’origine de la demande, étaient restés intrigués des descriptions étranges sur lesquelles ils étaient tombés, puis s’étaient séparés pour la soirée en se donnant rendez-vous le lendemain matin quasiment à la porte de la fameuse Fedora Sanward.

    ~

    La journée était déjà bien entamée lorsque les deux espions se retrouvèrent et se présentèrent à la porte de dame Sanward. On les avait prévenus que le temps qu’elle fût informée et qu’elle préparât ses directives mieux valait ne pas trop se presser, et ils avaient ainsi pris le temps de s’organiser eux-mêmes. Afin de ne pas faire de fausse note, Calixte arborait la même chevelure sombre et les mêmes vêtements humbles que la veille. De prime abord c’était une allure qui pouvait ne pas enchanter la haute société, mais le vendeur de la friperie où ils avaient été la veille n’avait pas eu tort concernant ce personnage : il avait un bon réseau de boutiques de fringues et de tailleurs en tous genres. Bon, probablement un carnet d’adresses moins huppées que ce qu’il aurait été souhaitable pour le contexte mais ça, ça pouvait toujours se bidouiller.

    Il frappa à la porte du manoir, et un domestique leur ouvrit. Aussitôt on les fit avancer à l’intérieur de la luxueuse demeure, et on alla chercher la maitresse des lieux. Il ne fallut probablement pas plus que quelques minutes pour qu’une boule d’énergie vînt à leur rencontre. Ou plutôt, un pantin d’énergie. Ou une poupée. Ne cachant pas sa surprise ni sa curiosité – après tout cela collait mieux à son personnage du jour – Calixte observa l’étrange poupée dévaler les escaliers en tenant sa tête, comme si elle avait peur qu’elle tombât, et s’arrêter tout juste à quelques mètres – centimètres, vraiment – d’eux. Il comprenait mieux les surprenantes notes qu’ils avaient trouvées sur la jeune fille en préparant leur mission.

    Dans un nuage de mouvements, de dents pointues, de mots et d’exclamations, dame Sanward leur expliqua plus en détail ce qu’elle attendait d’eux. Et bien qu’intrigué par celle-ci, Calixte ne put s’empêcher de se prendre de sympathie pour cette singulière personne. Elle lui rappelait Carciphona et Wendy dans son dynamisme papillonnant. Il récupéra le papier et jeta un coup d’œil au dessin. Et nota que niveau mensurations – qu’il avait évaluées de manière tout à fait professionnelle – bien qu’elles fussent particulières, il ne s’était pas trop trompé. Il se saisit aussi de la bourse de cristaux qu’elle leur tendît et rangea le tout dans sa besace.

    - Vous nous avez mâché le travail en prenant toutes les mesures nécessaires, je pense que nous n’aurons pas trop de mal, répondit-il avec le sourire franc de son personnage.

    Personnage habitué à l’étrange, à la veuve et l’orphelin, au rebut de la société. Et s’il ne pouvait que montrer un visage confiant à dame Sanward, dans l’optimisme caractérisant cette facette de lui, il était en réalité moins certain de ce qu’il avançait. Ça n’était pas pour rien que cette jeune fille avait été jusqu’à proposer une demande de Noble pour ce qui semblait être quelque chose d’assez trivial. L’affaire allait certainement rapidement s’annoncer moins aisée que ce qu’il paraissait sur le papier.  
    Ils quittèrent le manoir pour retrouver les rues animées de la Capitale et Calixte se tourna vers Ashelia... qui avait disparu ? Haussant les sourcils tout en balayant les alentours de son regard surpris, il finit par trouver la silhouette de sa cadette s’éloignant rapidement au bout de l’allée de graviers.

    Urgence poireau, lui signa-t-elle avant de contourner une haie et de se soustraire à ses yeux.

    Bon, heu. Très bien. Soupirant, il jeta un dernier regard au manoir de dame Sanward avant de se remettre en route. La mission serait certainement moins amusante sans Ashelia, mais peut-être pourrait-il tout de même glaner quelques rumeurs intéressantes en côtoyant les commerces du gratin de la société. N’y avait-il pas dernièrement quelques potins concernant Olenna Belmont et ses royales fréquentations ?

    ~

    Calixte était doucement en train de désespérer. Si on lui avait dit qu’il essuierait refus sur refus pour la demande de cette robe singulière, il n’aurait peut-être pas accepté la mission de dame Sanward. Il avait déjà passé une journée entière à écumer le carnet d’adresses de Lucas – son rôle actuel – puis quelques enseignes plus cossues, et en commençait actuellement une nouvelle en tentant directement sa chance chez quelques vendeurs d’étoffes. Les rumeurs de ce type de lieu avaient eu le temps de devenir des musiques de fond tournant en boucle, et il se muait peu à peu dans une errance toute mécanique. Ce qui l’amusait lorsqu’il repensait à son employeuse. Et l’ennuyait lorsqu’il songeait à son personnage qui s’épuisait davantage le temps – et les échecs – passant. Retenant un soupir, il poussa la porte d’une petite boutique de tissus.

    Il avait eu l’adresse par celle, plus humble, qu’il avait visitée quelques minutes plus tôt. Apparemment il y avait là de magnifiques soieries que la noblesse s’arrachait, et surtout quelques noms de tailleurs hautement compétents sur les lèvres de la femme en tenant les rênes. Restait à voir si cette dernière était prête à lui lâcher le morceau, et si ledit morceau acceptait les commandes un peu… particulières. Car si Calixte avait pensé que la richesse pouvait se permettre toutes les excentricités, il y avait visiblement des limites indicibles imposées par la société qui lui avaient jusque-là échappées. Expliquant sa série de refus. Et les moyens détournés de dame Sanward utilisés pour obtenir sa robe.

    S’approchant d’un étal exposant quelques coupons de tissu, il glissa un sourire enthousiaste à la vendeuse qui l’observait prudemment de derrière son comptoir où elle encaissait une famille endimanchée. Il n’avait pas le code vestimentaire adéquat, et serait certainement rapidement invité à prendre la porte ; il allait falloir être rapide. Ses yeux ambrés glissèrent sur les fournitures dépliées, les murs ornés de croquis et gravures de mode, et les quelques clients qui profitaient de la journée encore jeune pour commencer à débourser quelques cristaux. Alors qu’il envisageait de se rapprocher du couple conversant sur les tenues qu’ils allaient porter au mariage auquel ils étaient invités, son regard accrocha une singulière silhouette. Qui, même dans cet univers déjà fortuné, réussissait à rayonner d’une élégance tout particulièrement luxueuse. Il y avait une finesse évidente dans la coupe de ses vêtements, une richesse certaine dans leur tissu attirant l’œil. Non pas par ses teintes, sombres au demeurant, mais bien par sa qualité. Et l’œil avisé de Calixte, noble avant d’être espion, ne pouvait qu’apprécier davantage la beauté de l’habit sublimant parfaitement le corps qu’il drapait.

    Ses pas changèrent de trajectoire avant que sa décision ne fût consciente, et il s’approcha avec un grand sourire de la femme merveilleusement vêtue. Comme elle s’intéressait à un étal et lui présentait son dos, il se pencha légèrement pour tenter d’attraper son regard :

    - Bonjour ?

    Parce qu’il fallait bien commencer quelque part. Parce qu’assurément, l’auteur de cette création vestimentaire ne pouvait qu’être talentueux. Et qu’avec un peu – beaucoup – de chance, ce même auteur serait intéressé par la requête de dame Sanward. Et cette Noble ravie de lui livrer son nom. … Il en était où dans les faveurs de Lucy ?
    InvitéInvité
    Anonymous
    Informations
    Re: Une robe!
    Dim 20 Sep 2020 - 0:31 #
    La Capitale. Vesper, dont la vie se déployait habituellement autour de Grand-Port, ne s'y rendait que très rarement, mais à l'occasion d'un déplacement au Village Perché pour des affaires d'une sombre importance, son garde Main d'Argent et elle avaient entrepris d'y faire une brève escale. Après un trajet de quelques jours entre la ville portuaire et ce centre névralgique que représentait la métropole, pouvoir faire une halte, même de courte durée, était salvateur aux yeux de la noble. Le transport en calèche, bien que plus confortable qu'un voyage à dos de monture, offrait en effet quelques désagréments, notamment par les nombreux cahots émaillant la route, provoqués par les aléas du terrain irrégulier.

    Rejoindre l'enceinte des murs de la Capitale allait donc permettre donc de connaître un répit bienvenu, et surtout, d'offrir des opportunités, pour la noble, de conclure de nouveaux accords commerciaux au passage. Vesper était en effet perpétuellement en quête de nouveaux commerçants intéressés pour vendre des étoffes provenant des ateliers Devern, ce qui permettrait à sa famille d'engranger les marges correspondantes sur les transactions concernées. Le réseau de revendeurs de textiles de leur confection était encore peu développé en dehors de Grand-Port, et presque inexistant à la Capitale, où il y avait donc un véritable marché à investir.

    Ce fut dans cette optique que Vesper rejoignit une boutique d'étoffes du quartier marchand, petite mais cossue, et ayant la réputation de trier ses produits sur le volet. Une fois à l'intérieur, la noble commença par se diriger vers les pupitres richement pourvus en monceaux d'étoffes luxueuses. Il lui fallait en effet d'abord jauger de la qualité de la marchandise proposée, afin de savoir si la sienne méritait d'être présentée parmi celle-ci.

    En examinant ces dernières, ses prunelles se mirent rapidement à luire d'intérêt, réveillant son appétence à garnir sa propre garde robe. Alors que son regard était rivé sur un velours particulièrement attrayant, Vesper entendit soudain un bonjour, courtois mais visiblement peu assuré, au regard de la note interrogative sur lequel il se terminait, émaner d'un homme qui l'avait approchée subrepticement. Son faciès pivota légèrement, et ses yeux se tournèrent vers ce nouveau visage qui entrait prudemment dans son champ de vision. Son timbre lui avait semblé vaguement familier, si bien qu'il était parvenu à accrocher son intérêt.

    Ce fut alors qu'une silhouette sombre vint s'interposer entre eux. Il s'agissait de Main d'Argent, qui avait accompagné Vesper dans la boutique, et était demeuré dans un angle jusqu'alors, en retrait mais aux aguets, investi de sa mission immuable de veiller sur sa maîtresse. Et ce fut en l'honorant consciencieusement, qu'il s'adressa de façon quelque peu sèche et abrupte à celui qui avait ainsi osé l'importuner :

    « Veuillez ne pas déranger madame, je vous prie. »

    Vesper considéra un instant l'homme qui l'avait saluée. Ce dernier était doté d'une sombre chevelure, mais ce qui retint surtout son attention fut sa tenue fort modeste, dont les atours déparaient avec l'élégance du lieu dans lequel ils se trouvaient. Cela expliquait que le manant avait naturellement attiré la vigilance de Main d'Argent : qu'est-ce qu'une personne de si basse extraction, à en juger par ses pauvres nippes, pouvait donc vouloir à une noble de sa lignée ?

    Vesper avait cependant été troublée par les intonations de sa voix, lorsqu'il s'était adressée à elle. Aussi, elle décida de faire momentanément fi des étiquettes, et posa la main sur l'avant-bras de son garde du corps, dans un signe d'apaisement.

    « Laissons donc ce jeune homme s'exprimer, Main d'Argent. Cela n'est guère décent d'éconduire un salut poli. »

    Dans un mouvement lent et qui apparaissait clairement être esquissé à contrecœur, le garde du corps s'écarta alors, prenant du champ mais sans totalement s'éloigner, et gardant des prunelles inquisitrices fermement dardées sur le malandrin. Au moindre faux pas de sa part, il ne se ferait aucunement prier pour intervenir, cela se devinait aisément à son regard.

    « En quoi puis-je vous aider ? » Le regard azur de Vesper se porta sur celui, ambré, de son interlocuteur, qui vint quelque peu la déstabiliser lorsqu'elle s'y plongea. Une nouvelle question franchit alors la barrière de ses lèvres, sans crier gare : « Excusez-moi, mais... Nous serions-nous déjà rencontrés antérieurement ? Vous me semblez singulièrement familier. »

    La question pouvait paraître assez incongrue, leurs conditions étant visiblement à des lieues d'écart, mais Vesper souhaitait en avoir le cœur net. Qui sait, leurs chemins s'étaient peut-être déjà effectivement croisés, par le passé, d'une quelconque manière ?
    Calixte Alkh'eirDamoiseau
    Calixte Alkh'eir
    Informations
    Re: Une robe!
    Mer 23 Sep 2020 - 21:49 #
    La jeune femme se tourna doucement vers lui, dévoilant peu à peu le reste de sa silhouette. Sous les mèches blondes habilement coiffées apparut un visage à la peau claire, orné de deux prunelles en amandes. Et si leur froide couleur bleue aurait pu suffire à faire hésiter Calixte, c’étaient surtout les tâches foncées, dessinant une multitude de constellations sombres contrastant avec la peau laiteuse, qui perturbaient le rythme de son cœur. Le trouble persista un moment dans sa chair, mais son sourire de façade, habitué par les années d’exercices, ne bougea quasiment pas. Était-il encore temps de fuir ?

    Sursautant franchement à l’apparition d’une silhouette imposante aux côtés de Vesper Devern – car il y avait à présent peu de doute pour ses yeux avisés – Calixte recula d’un pas en appréhendant le garde du corps de la jeune femme. Focalisé par la fabrique des vêtements de celle-ci, il n’avait pas prêté attention à son entourage immédiat puis, perturbé par la reconnaissance de ce visage si particulier, il n’avait pas eu la présence d’esprit de chercher l’homme pourtant usuellement attaché à ses chausses. Et sans doute aurait-il dû profiter de l’occasion pour mettre les voiles ; il avait après tout coutume de ne pas mélanger les facettes qu’il présentait à une même personne afin de limiter le risque d’être reconnu – la Fameuse Soirée avec Naëry lui avait suffi en la matière et il n’était pas pressé de revivre pareil mélodrame. Mais sa curiosité – qui l’avait initialement poussé à aborder Vesper – fût poussée par sa malchance – la politesse et l’intérêt de son interlocutrice – et il décida de laisser temporairement son appréhension au placard.

    Temporairement dura l’espace de dix secondes, soit la brève durée entre la première partie des propos de la jeune Noble et la mise en lumière de ses doutes. Non, vraiment, la porte de la boutique semblait soudainement très intéressante comme développement de la situation. Pourtant, l’espion enfonça les bribes de prudence qui lui hurlaient de prendre ses jambes à son cou, et se fendit d’un sourire contrit :

    - J’pense que j’aurai retenu votre visage si j’vous avais déjà croisée, et honnêtement j’pense pas qu’on fréquente les mêmes endroits. Usuellement. Sauf si vous passez un peu d’temps au niveau des friperies ou des orphelinats de la ville. Mais vraiment, j’crois pas vous y avoir d’jà vue !

    Il haussa les épaules et indiqua d’un doigt peu rustre les vêtements de Vesper.

    - M’enfin pour l’coup c’est moi qui dévie d’mon chemin de d’habitude. Mais c’est pour la bonne cause ; j’vous montre.

    Sortant le croquis esquissé par Fedora Sanward, il le tendit entre ses mains pour le présenter à la jeune femme – et à Main d’Argent de fait.

    - J’cherche un tailleur qui serait capable de réaliser cette robe. Enfin j’pense qu’y en a pas mal qu’en sont capables ; mais surtout un qui soit bon, et pas opposé à être un peu… fantaisiste ? Sur les dimensions. Ou plutôt p’tet…

    Après une brève hésitation, il posa à nouveau son regard sur les vêtements d’excellente facture de Vesper.

    - Et vous avez là une très, très, belle robe. Du coup j’me disais que vous deviez aussi avoir une très, très, bonne adresse. Ou d’jà de bons conseils en la matière. Si ça vous dérange pas d’partager. Parce que bon en fait, on va pas s’mentir heum… J’en ai d’jà vu pas mal des tailleurs. P’tet pas du bon niveau ceci dit vu mon carnet d’adresses d’base, mais… Enfin. Y en a pas mal – tous en fait – qui veulent pas trop être associé au nom d’Sanward. Ou d’avoir leur nom collé à c’projet.

    Il afficha un air volontairement dépité.

    - Pourtant elle est vraiment gentille, m’dame Sanward. Elle doit pas être bien plus âgée qu’certains des pensionnaires d’l’orphelinat, mais elle s’conduit bien, elle. Et puis ça l’a pas rebutée qu’ce soit un type comme moi qui s’propose de gérer sa requête ; avec p’tet pas le meilleur profil pour sa demande. C’est sûr qu’elle en a un d’assez atypique. Mais que ça suffise pour rebuter certains… Ou y a p’tet quelque chose qui m’échappe. P’tet que vous pouvez aussi m’éclairer là-dessus ? Mais bon. Si déjà vous aviez une adresse… pour un tailleur, bien sûr. J’doute pas qu’vous-même vous ayez un toit.

    Autant pour l’idée de ne pas s’attarder. Comme celle de faire preuve de prudence. Mais pour le coup, il savait que Vesper pouvait vraiment être de bon conseil pour la suite de sa mission. De sa quête. Du calvaire dans lequel il galérait tout seul alors qu’à la base celui-ci aurait dû être l’objet d’un entraînement entre espions.
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    Re: Une robe!
    Dim 27 Sep 2020 - 16:11 #
    Le doute qui avait éclos dans l'esprit de Vesper n'eut guère le temps de déployer l'ensemble de sa corolle : très rapidement, l'air penaud de son interlocuteur vint faner celui-ci, et dissiper toutes les ébauches d'hypothèse qui l'avaient accompagné, sur les circonstances potentielles d'une rencontre passée. Tout comme les mots prononcés par ce dernier, qui confortèrent l'invraisemblance d'une telle éventualité, en soulignant l'absence d'endroits communs ayant pu être fréquentés.

    Toutefois, ce ne fut pas tant la teneur de ces paroles que leur accent, qui marqua en réalité le plus Vesper. En effet, celui-ci imprégnait et infléchissait le moindre des dires de l'homme de tonalités disgracieuses, pour les oreilles de la noble davantage habituées aux élocutions distinguées. Ce parler bourru et ce défaut de diction lui écorchèrent hautement l'ouïe, de fort déplaisante manière.

    Face à la douce amertume de la déception, et parce que ce manant venait résolument de perdre tout semblant d'intérêt à ses yeux, l'attitude de Vesper changea sensiblement. Elle se para de davantage de morgue, et commença à le toiser avec un mépris qui n'était plus guère dissimulé. Non seulement ce rustaud avait commis l'affront de la déranger, mais en plus, il avait osé lui faire perdre son temps en faisant naître en elle une fausse présomption... Et quel était donc ce papier, qu'il se permettait à présent de lui montrer ?

    Vesper n'accorda qu'un bref regard au croquis déployé, bien trop irritée par la présente situation. Cet homme recherchait un tailleur pour confectionner une robe aux dimensions particulières ? Grand bien lui en fasse. Elle ne comptait aucunement consacrer davantage d'attention à ce rustre personnage, et encore moins lui partager des conseils ou des adresses. Mais tandis que sa main gracile s'apprêtait à esquisser un mouvement, pour signifier à Main d'Argent que cet échange n'avait que trop duré, Vesper s'interrompit subitement. Un nom venait en effet d'être prononcé par son interlocuteur : Sanward.

    Le patronyme d'une maison noble, dont les demandes devaient être à la hauteur de leurs rétributions. Cela fit brasiller un nouvel éclat d'intérêt dans ses prunelles de rapace. En aidant ce manant, Vesper rendrait un précieux service à cette dame. Et tout concours impliquait une contrepartie, à ses yeux, cela s'entendait. En l'occurrence, elle pourrait ici en exiger deux : une de la part de la noble, et une de la part du rustaud. Elle pouvait donc effectivement diverger momentanément de ses propres objectifs pour accéder à cette requête, fort bien considéré.

    « Je suis disposée à vous aider dans cette entreprise... plus que délicate, j'en conviens. » commença-t-elle par lui répondre, avec un ton à l'empathie entièrement calculée. « Je ne doute pas que madame Sanward saura exprimer toute sa reconnaissance, pour mon concours. Tout comme vous me serez hautement redevable, également, pour les ressources que je saurais vous apporter. »

    Vesper prit un instant pour réfléchir à l'objet de la demande. Des tailleurs, elle en connaissait effectivement, mais ils étaient tous situés à Grand-Port, son lieu habituel de résidence. Ceux de la Capitale lui étaient plus distants, et par là-même moins connus. Toutefois, elle pouvait aisément recueillir quelques noms.

    « Attendez-moi ici un instant, je vous prie. »

    Sur ces paroles, elle se dirigea vers le comptoir de la boutique, afin d'échanger quelques mots avec la vendeuse qui y était campée. Une petite kyrielle de sourires et de politesses plus tard, elle revint, non sans un rictus triomphant au coin des lèvres.

    « Bien, je viens de recueillir trois adresses de tailleurs de haute renommée, à la Capitale. Pourquoi pas un seul, me demanderez-vous ? Eh bien, sachez qu'au regard de l'incongruité de la demande, il va falloir... appâter leur égo. Leur faire croire à l'aval de leurs confrères, et instaurer toutes les conditions d'une compétition entre eux. Ils s'illustreront dans la rivalité, et nous ferons peut-être la moisson de plus d'une robe, pour madame Sanward. »

    La noble avait délibérément employé le terme « nous », car elle s'incluait dans la suite de l'entreprise, sans réellement laisser le moindre choix à son interlocuteur. L'importance de son concours ne ferait, en effet, qu'influer sur la grandeur de la dette contractée. Par ailleurs, il lui paraissait évident qu'il était tributaire de ses compétences, au vu de son profil de manant.

    « Je me nomme Vesper Devern, et je vous saurais gré de ne pas l'oublier. Tout comme la dette que vous devrez honorer, si notre opération rencontre le succès escompté. Comment puis-je vous appeler ? »
    Calixte Alkh'eirDamoiseau
    Calixte Alkh'eir
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    Re: Une robe!
    Mar 29 Sep 2020 - 21:31 #
    Il savait qu’il avait l’attention de Vesper au moment où il prononçait le nom de Sanward. Il avait cependant mal calculé à quel point. Retenant ses mimiques usuelles qui n’aspiraient qu’à crever la surface pour exprimer sa panique grandissante, il se força à glisser davantage dans le rôle de Lucas. Simple, gentillet Lucas, qui ne cherchait qu’à se faire quelques cristaux pour les coffres de l’orphelinat où il travaillait. Lucas qui s’extasiait de la bonté de cette Noble qui, non seulement lui apportait son aide, mais en plus lui proposait une stratégie pour répondre au mieux à la demande de Fedora Sanward. Lucas qui ne pouvait que comprendre et approuver qu’il eût une dette envers la charmante jeune femme. Lucas dont la naïveté de la naissance fictivement humble ne saisissait aucun des sous-entendus de sa bienfaitrice. Calixte avait envie de se fracasser le crâne contre le mur, et prendre les jambes à son cou. Pas nécessairement dans cet ordre-là.

    Vesper Devern avait toujours été une douce curiosité pour lui. Au plus loin qu’il se souvenait, elle avait toujours fait partie, de manière récurrente, du paysage de la Noblesse du Grand Port. De son paysage de la Noblesse du Grand Port. Leurs âges étaient proches, et ils avaient évolué dans des sphères qui se croisaient voire s’entre-mêlaient. Les précepteurs, les divers maîtres et maîtresses d’arts divers, les soirées mondaines et les adresses huppées avaient été les mêmes à les voir grandir. Et même si Calixte s’était peu à peu détaché de cet univers de par son entrée à l’Académie Militaire – et de par sa médiocrité remarquable que sa famille ne souhaitait mettre en valeur plus que nécessaire – il avait gardé pour la scène Noble une affection – et une attention – toute particulière. Comme une certaine méfiance. Vesper était pour lui une compagnie agréable et intéressante ; surprenante même. Mais il savait que si la jeune femme ne manquait pas d’intelligence ni de courtoisie, comme ceux qui savaient quelles cordes jouer pour arriver à leurs fins, elle pouvait volontiers se montrer sournoise et manipulatrice. Et là, dans cette boutique, sous le masque d’un autre rôle, l’espion savait qu’il venait de sauter à pieds joints dans la toile de la jeune femme.

    - C’est vachement intelligent c’que vous venez de faire ! J’y aurai pas pensé ! s’exclama-t-il d’une voix teintée d’un faux enthousiasme mais d’une vraie admiration. Et puis jamais j’aurai pu avoir autant d’adresses, ça j’en suis sûr ! Même si j’avais dit à la vendeuse que c’est pour m’dame Sanward, j’suis pas certain qu’ça aurait suffi à la faire m’aider. Ou à pas m’mettre à la porte. Merci infiniment !

    Il nota que Vesper s’était bien gardée de lui divulguer ces fameuses adresses de tailleurs tout comme elle s’incluait d’un « nous » dans la suite des opérations, et s’il se résignait peu à peu à l’idée que, pour jouer totalement son personnage d’emprunt, il allait encore lui falloir lui demander l’aide de la jeune femme, il ne pouvait que grimacer intérieurement au pétrin dans lequel il s’enfonçait inexorablement. Une dette envers la Noble n’était déjà pas quelque chose qu’il souhaitait contracter en tant que Calixte, alors dans le rôle de Lucas… Ca sentait le rurd cette histoire.

    - Mais j’dois vous avouer que… ben j’ai pas tout compris de c’que vous avez expliqué sur « l’aval des cons frères » et qu’j’vois pas trop comment en faire une compétition. Ou « cons-pétition » du coup ? ‘Fin j’ai jamais fait ça.

    Laissant ses doigts jouer avec le croquis que Fedora Sanward lui avait remis, il afficha un air songeur mais un peu inquiet.

    - J’ai besoin d’appâts ? Et d’un champ de robes pour la moisson ? C’est la saison d’la récolte du blé, un champ c’doit pas être bien difficile à trouver… mais j’vois pas trop l’lien… C’est pour les conditions de la compétition ?

    Et Vesper était certainement aussi douée que lui pour dissimuler une partie de ses émotions, car elle savait très bien occulter le mépris qui devait pointer son nez. Mais peut-être que la couche de consternation était suffisante pour couvrir tout autre état d’âme. Main d’Argent, à ses côtés, était moins subtil.

    - J’suis désolé d’vous demander ça m’dame Devern, vous avez déjà fait beaucoup pour moi et j’voudrais pas vous déranger trop dans vos affaires, vous avez probablement beaucoup à faire… mais j’crois qu’j’ai rien compris de c’qu’il valait mieux faire pour m’dame Sanward et… j’aurais encore besoin de votre aide ? Pour la suite ?

    Lucas, évidemment, n’avait rien remarqué de l’oubli – certainement tout calculé – de la jeune femme de lui transmettre ses adresses. Calixte se demandait, lui, à quel point il était en train de creuser sa tombe.

    - Bien sûr j’vous devrais un service, une dette comme vous dites ! Même plusieurs ! Mais j’serais vraiment, heu, gré ? que vous m’aidiez encore pour la suite. Et j’m’appelle Lucas. Croyiez bien qu’Lucas oublie pas quand il a des dettes, ajouta-t-il en envoyant par deux doigts sur la tempe un ersatz de salut militaire.

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    Re: Une robe!
    Dim 4 Oct 2020 - 21:41 #
    La reconnaissance du modeste jeune homme fut tangible, lorsqu'il remercia Vesper pour sa première contribution fructueuse à l'édifice de son - leur ? - entreprise. Pour la noble, soutirer ces adresses auprès de la vendeuse de la boutique n'avait guère été qu'une formalité. Ses atours luxueux et son phrasé poli avaient créé un climat favorable pour dialoguer avec la marchande d'étoffes, qui avait été encline à lui fournir ses meilleurs contacts sans la moindre hésitation. Il en aurait été tout autrement face à l'allure médiocre du manant, et Vesper et lui le savaient tous deux. Et ce, même si ce dernier avait brandi le nom de la maison Sanward pour se prémunir d'un refus...

    La noble s'était d'ailleurs bien gardée, quant à elle, d'informer la boutiquière de la personne à qui bénéficierait réellement sa recherche de couturiers de renom. Vesper avait en effet jugé préférable de prétendre requérir ces adresses pour satisfaire ses besoins propres en nouvelles toilettes. La réputation de cette dame Sanward était en effet teintée de bien trop d'étrangeté, aux dires du manant - qui avaient été pleinement étayés par la singularité du croquis dont il disposait - si bien qu'il aurait été mal avisé, voire fort hasardeux, d'évoquer le nom de cette dernière. Toute information superflue ne méritait d'être prononcée, et cette vendeuse n'avait pas, au demeurant, besoin de savoir que Vesper n'endossait qu'un rôle d'entremise.

    Son truchement allait encore être plus qu'essentiel, car il n'était point certain que même le plus cupide des artisans accepte une requête empreinte de tant d'originalité. C'était pourquoi Vesper avait esquissé son plan de créer une concurrence entre plusieurs tailleurs à son humble partenaire de circonstance... Mais ce dernier révéla quelques difficultés de compréhension.

    Le sourcil effilé de Vesper commença par s'arquer, lorsqu'il formula ses premières interrogations, et ne fit que s'accentuer à mesure qu'il les égrenait. Elle s'efforça toutefois, dans cette maîtrise qu'elle conservait immuablement d'elle-même, de ne rien laisser paraître de la floraison de désespoir qui s'épanouissait en elle, à leur entente. Voire même, de détresse abyssale. Son regard croisa celui de Main d'Argent, et leurs prunelles échangèrent leur consternation sans mot dire.

    Ce rustaud avait résolument besoin de leur aide, comme il leur signifia. Cela confortait Vesper dans son rôle... mais elle en venait à se demander si ce dernier recelait un vrai potentiel, en terme de dette pouvant lui être due. Car il ne semblait tout de même pas très finaud, ni riche en ressources probables, de quelconque nature. Soit, elle aurait le loisir d'estimer la portée de sa rétribution plus tard. Il lui avait au moins garanti qu'il n'oublierait point être son débiteur. Et puis, il y avait toujours la gratification dont s'acquitterait dame Sanward.

    « Je vais en effet continuer de vous faire bénéficier mon aide, très cher Lucas. Cette dernière ne pourra vous être que profitable, ayez-en l'assurance. »

    Elle le jaugea soudainement à nouveau, d'un œil dénué de toute chaleur, une interrogation flottant sur son visage lactescent. Pouvait-il décemment l'accompagner, dans cette si insignifiante tenue ? Il risquait d'entacher le tableau, et de créer de la suspicion chez leurs futurs interlocuteurs. Non, il fallait peaufiner leurs abords dans leurs moindres détails.

    « En revanche, pour que je puisse pleinement vous offrir mon concours, je vais avoir besoin d'un... petit effort de votre part. Il faudrait que vous acceptiez... d'endosser un rôle. Celui de mon valet. N'y voyez-vous pas d'inconvénient ? »

    À nouveau, cette question était davantage rhétorique, venant de Vesper. Elle poursuivit donc diligemment :

    « Et pour se faire, nous allons devoir redorer un peu... votre allure. » Le mépris dans sa voix fut perceptible, lorsqu'elle évoqua sa toilette actuelle. « Nous demanderons à l'un des tailleurs dont il m'a été donné l'adresse de vous confectionner une livrée de page digne de ce nom. Puis, après qu'il vous ait habillé, nous lui soumettrons le défi de produire la robe tant souhaitée par dame Sanward. »

    D'abord mandé pour réaliser une honorable tenue de domestique aux couleurs de la famille Devern – car Lucas devrait prétendre en faire partie – Vesper interrogerait ensuite le tailleur sur son intérêt quant à œuvre plus conséquente, et  à même de concurrencer celle - prétendument – consentie par ses pairs artisans.

    « Puis il suffira de porter une missive aux deux autres tailleurs, rédigée par mes soins. Avec l'éclat de votre nouvel accoutrement, et le crédit apporté par ma plume, ces derniers devraient accepter de concourir à la réalisation de cette robe, par esprit de rivalité envers leurs pairs. »

    Elle conclut alors avec un sourire. De ceux que l'on adresse à un enfant, en espérant qu'il ait compris la teneur des paroles proférées.

    « Qu'en pensez-vous, Lucas ? Vous pouvez même choisir le tissu de votre tenue dans cette boutique, avant que nous nous mettions en route. Ils ont une facture digne de la maison Devern. »

    Le terme facture était ici employé dans le sens de qualité, comme de prix. Cependant, cela ferait partie des coûts supportés par la bourse allouée par dame Sanward, pour l'opération, en tant que dépense inhérente au bon déroulement de celle-ci. Car en effet, si cette étrange noble souhaitait réellement une robe embrassant ses désirs, elle devait bien être encline à consentir des concessions sur quelques dépenses connexes mais indispensables.
    Calixte Alkh'eirDamoiseau
    Calixte Alkh'eir
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    Re: Une robe!
    Sam 10 Oct 2020 - 16:58 #
    Les doigts accrochés à son bout de papier, un sourire niais décidément suspendu à ses lèvres, il but les paroles de Vesper tout en s’attachant à laisser son visage exprimer l’interrogation, l’intérêt et l’enthousiasme crédules de Lucas. Au fond de lui, il sentait la panique et la résignation se batailler la belle part. Hochant frénétiquement la tête, les sourcils légèrement froncés à la mention d’une « facture », il appréhenda le plan de la jeune femme en affichant sa complète adoration. Que cette noble était prévenante et son esprit affuté ! Un parangon de bienveillance. Si l’on oubliait de s’intéresser au revers de la médaille. Nul doute que la facture lui reviendrait, à lui aussi, salée.

    - J’pense que j’ai vraiment eu d’la chance de tomber sur vous, m’dame Devern, z’êtes vraiment trop bonne, répondit-il le plus sérieusement du monde.

    Fallait bien qu’il y ait quelques avantages à se faire passer pour un autre. Un autre qui, visiblement, allait encore devenir un autre. Si avec tout ça il arrivait à tenir son rôle, il irait oublier cette journée en plongeant dans l’une des bonnes bouteilles du cellier de Luz.

    - J’ferai d’mon mieux pour pas vous faire honte, m’dame. J’sais qu’parfois il suffit d’pas grand-chose pour entacher un nom.

    Son regard ambré détailla sans gêne l’étoffe qui enveloppait élégamment Vesper, puis s’attarda à examiner de la même manière les habits de Main d’Argent. Si son œil baladeur en profita pour réajuster les mensurations qu’il avait en tête pour les deux personnages, ce ne fut évidemment qu’un hasard fortuit.

    Se réintéressant aux produits exposés dans la boutique, et après un coup œil prudent à la vendeuse qui faisait de son mieux pour ignorer les affaires pourtant curieuses du trio, l’espion avisa quelques tissus dont les teintes et le tissage se rapprochaient de ceux de ses deux nouveaux… camarades ? collègues ? Assurément pas. Complices ? Peut-être. Les gestes emprunts d’hésitation, il s’avança vers un établi dont les soieries, d’excellente facture au demeurant, juraient quelque peu avec le style vestimentaire de Vesper et son garde du corps. Un regard aller-retour vers le visage de la jeune femme leva l’indécision de Lucas qui poursuivit son chemin, et s’arrêta quelques pas plus loin, au niveau d’étoffes se rapprochant de celles de Main d’Argent. Ravi de voir qu’une lueur plus satisfaite éclairait les prunelles claires de sa bienfaitrice, il désigna d’un geste enthousiaste le velours sombre qui devrait convenir pour la livrée mentionnée. Ses mains allaient se saisir du tissu convoité lorsque la jeune Noble lui fit signe d’en rester là. Suspendant ses mains abîmées à quelques centimètres de celui-ci, il s’écarta d’un pas pour laisser Vesper rapidement inspecter le textile avant de retenir l’attention de l’un des vendeurs afin qu’ils fussent servis. Un sourire émerveillé sur son visage, l’espion sous couverture la regarda gérer l’affaire avec l’aisance de ceux habitués à tant de luxe, et de l’étiquette venant avec.

    Lorsque tout fut détaillé, emballé, et négocié, il sortit la somme demandée de la pochette de cristaux remise par dame Sanward, et régla habit de page en devenir. Le paquet fermement calé entre ses bras, il se précipita pour tenir galamment la porte à Vesper, et le trio improbable gagna les rues animées de la ville.

    - Par lequel est-ce qu’on commence, m’dame Devern ? demanda-t-il d’une voix excitée. J’ai jamais eu d’vêtements d’page jusque-là.

    La jeune femme avait eu à lui expliquer que non, une livrée n’était pas un livre dont la couverture était faite par un tailleur, mais bien un costume.

    - Mais j’suis pas page, donc bon. J’pourrai l’refiler à l’orphelinat après, ajouta-t-il songeur. Mais les p’tits – comme les grands ceci dit – risquent d’le mettre en pièces, et ça serait bien dommage.

    Elle avait aussi dû le rassurer sur le fait qu’il n’allait pas porter « Miss Yves », mais une lettre à l’adresse des deux autres tailleurs qui allaient être mis en compétition. Lucas aurait détesté abîmer son bel habit aussi rapidement, même si une demoiselle ne devait pas peser bien lourd. Quoi que. L’argent laissant souvent accès à un régime alimentaire plus fastueux, « Miss Yves » aurait pu peser davantage que quelques sacs de riz.

    - Vous avez d’jà des pages, m’dame Devern ? Main d’Argent est un page ? poursuivit-il en toute innocence. Si c’est l’cas p’tet qu’il vaut mieux que j’vous donne le vêtement après coup. Vous en aurez plus utilité qu’moi.

    Ce qui n’était pas tout à fait faux. Car l’espion ne se risquerait pas à réutiliser cette livrée. Ou alors en assignation dans les montagnes. De l’autre côté du gouffre. Il avait déjà joué de malchance à croiser – plus que croiser, même, à ce stade – une connaissance du visage officiel de Calixte sous ses traits officieux de Lucas, et il ne la provoquerait pas davantage.

    - Ca vous intéresse pas à tout hasard d’adopter un d’nos p’tits gars ? s’exclama-t-il soudainement. Ou d’employer un d’nos grands comme… ben comme page, p’tet. Y a des filles, aussi, à l’orphelinat s’vous préférez. C’est qu’après c’pas toujours facile de leur trouver du boulot. Autre que la rue.

    Il jeta un rapide coup d’œil à Vesper, tout en passant mentalement en revue à quel point sa couverture de Lucas était affutée, histoire d’éviter trop de faux raccords.

    - Mais vous avez p’tet d’jà vos enfants à vous à gérer. Z’êtes intelligente et pas laide, j’suis sûr qu’vous avez, si c’n’est d’jà un mari, au moins tout un tas d’prétendants !
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    Re: Une robe!
    Mer 14 Oct 2020 - 22:33 #
    Si elle pouvait être qualifiée, officieusement, de psychologue, Vesper ne pensait pas en revanche se voir un jour affublée du qualificatif de « pédagogue »... Et pourtant, ce fut bien un adjectif qu'elle cultiva, quand elle s'affaira à éclaircir certains de ses propos tenus à l'intention de Lucas, afin d'abolir les quelques – nombreuses ? - incompréhensions du jeune homme, dues à son manque cruel de vocabulaire.

    À vrai dire, leurs statuts foncièrement différents auraient pu instaurer un abîme linguistique infranchissable entre eux, et les priver de toute possibilité de communication – avec d'une part, le phrasé miséreux de Lucas trop informe pour être entendu par les oreilles vaniteuses de la noble, et d'autre part, le vocable soutenu de Vesper trop abscons pour Lucas – mais il n'en était heureusement rien. Avec force efforts, ils parvenaient à atteindre, bien miraculeusement, une compréhension mutuelle.

    Son partenaire temporaire lui avait assuré qu'il tâcherait de ne point l'entacher de honte, ce qu'il réussit à faire, du moins lors de la suite directe des évènements, qui portèrent sur le choix et l'achat du tissu qui composerait la livrée. Vesper y avait bien entendu veillé, en aiguillant Lucas et en lui apportant son assistance lorsque nécessaire. Elle fut fort aise de constater qu'il lui ouvrait élégamment la voie, lorsqu'ils quittèrent la boutique, lui tenant la porte et endossant déjà ce rôle factice de page qui lui incombait par les circonstances.

    « Merci, Lucas. Nous allons nous adresser à... Maître Lygrim. » lui répondit-elle après avoir jeté un coup d'oeil à sa liste garnie d'adresses. « Il pourra sans nul doute accéder à nos demandes. »

    Il fallait concéder que les noms couchés sur le papier ne lui étaient que peu évocateurs, et qu'elle avait tout bonnement choisi le premier. Vesper laissa alors le soin à Main d'Argent de les guider jusqu'à l'adresse du couturier, en menant la marche quelque peu au devant d'eux. Délestée de cette charge de les orienter, elle pouvait ainsi accorder son attention à Lucas, qui ne manquait pas de questions.

    Ce dernier s'inquiétait en l'occurrence du devenir de ses vêtements de page, une fois leur opération achevée, étant notamment incertain quant au soin que leur porteraient ses successeurs, s'il les confiait à l'orphelinat auquel il était lié. La noble présuma qu'il devait être lui-même orphelin, ce qui expliquait son défaut d'éducation. Lorsqu'il lui demanda si Main d'Argent était son page, les lèvres carminées de la noble se pincèrent en une mince ligne. Ce fut le seul signe de la contrariété qui avait jailli fugacement en elle, et qui reflua tout aussi rapidement.

    « Non, Main d'Argent est... mon garde du corps. Il se distingue d'un page de bien des façons, notamment par ses compétences martiales hors pair. » Le sujet était manifestement sensible, pour Vesper, et elle embraya rapidement : « Le plus profitable, pour vous, serait certainement de revendre cette livrée. Cela vous offrira un petit apport supplémentaire, mais ce n'est que mon conseil. »

    S'il voulait la garder en souvenir, ou s'en servir pour attiser un feu, elle n'allait pas s'immiscer dans ses choix, après tout. La suggestion que lui fit alors Lucas, d'employer l'un des enfants – ou grands enfants – de l'orphelinat, ne piqua guère son intérêt. Vesper n'y voyait pas là un vivier réellement intéressant. Surtout au vu de l'échantillon que lui en offrait cet énergumène.

    « Cette suggestion ne manque pas d'intérêt. » mentit-elle de façon tout à fait naturelle. « Mais je suis déjà bien pourvue en domestiques. Vous semblez très attaché à cet orphelinat, en êtes vous vous-même issu ? »

    Ce fut quand ils arrivèrent devant l'office du tailleur que le jeune homme lui porta un nouveau coup, au tranchant particulièrement aiguisé, par l'une de ses interrogations – de façon probablement involontaire, au vu de la simplicité d'esprit manifeste dont il faisait preuve. Vesper le regarda avec une expression indécise, l'espace d'un instant en suspend, puis consentit finalement à lui livrer une réponse peu ou prou honnête.

    « Je n'ai ni mari, ni progéniture. » Sa réplique fusa sur un ton un peu plus acide qu'elle ne l'aurait souhaité. « Mais vous avez raison, les prétendants ne manquent pas. La gageure est de parvenir à déceler ceux qui n'ont de galanterie que le vernis. »

    Et Lucy savait que les imposteurs étaient présents en nombre, dans ce milieu d'hommes attirés par l'argent et le pouvoir. Bien sûr, la notion d'amour, dans le futur couple qu'elle devrait immanquablement un jour former, était également exclue pour Vesper. Mais elle souhaitait tout de même bénéficier d'un mari aux manières honorables, même si leur union serait purement pragmatique, choisie pour l'alliance profitable qu'elle permettrait de sceller.

    « Ne perdons pas davantage de temps et entrons, à présent. Juste une dernière recommandation, pour votre rôle : les beaux vêtements ne dissimulent pas forcément les carences, et peuvent au contraire les mettre en évidence. Tâchez de soigner votre posture, pour éviter cet écueil. »

    Une fois accueilli par l'assistant du tailleur, le trio gagna rapidement son atelier, et firent la connaissance du couturier. Il s'agissait d'un homme de taille moyenne, au cheveu rare et à la taille alourdie par l'embonpoint, mais remarquablement vêtu. Après s'être fendus des présentations et autres formalités, Vesper lui exprima donc sa première demande, conformément à leur plan : un habit pour Lucas, élaboré à partir du splendide velours de soie qu'ils avaient soigneusement choisi.

    « Ce sera avec un grand plaisir, ma dame ! Voilà un jeune homme fort bien bâti ! Qu'il monte sur ce tabouret, je vais prendre ses mesures. »

    Tandis que Lucas se faisait assaillir à coups de craie, de ruban et d'épingles, Vesper jugea le moment opportun pour reprendre leur conversation.

    « Et vous ? Êtes-vous de ceux dont le cœur saigne, ou fait saigner celui de ces chères demoiselles ? »

    Sonder les âmes et leurs coupures plus ou moins profondes, voilà qui faisait partie des activités favorites de la noble.
    Calixte Alkh'eirDamoiseau
    Calixte Alkh'eir
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    Re: Une robe!
    Dim 18 Oct 2020 - 16:07 #
    La silhouette martiale de Main d’Argent les devançant, le duo improbable de Vesper et Lucas fendit la foule de badauds animant les rues de la Capitale à cette heure affairée de la journée. Jetant toujours quelques regards à intervalles réguliers à son interlocutrice, le coursier ne pouvait s’empêcher de reporter son attention sur les larges épaules de l’homme qui leur ouvrait la voie. Cela faisait quelques lunes – quelques années même très certainement – que Calixte n’avait pas croisé l’héritière Devern au cours de quelques mondanités. Son travail double de garde et d’espion ayant limité ses passages au Grand Port. Et le mépris de sa propre famille pour sa médiocrité ayant lui-même diminué ses interactions avec le gratin de la cité portuaire. Mais il y avait dans la démarche assurée de l’homme de main, dans son regard perçant comme dans le brun de ses cheveux, quelque chose de familier. Où donc Vesper l’avait-elle recruté ? La Noblesse était friande de serviteurs issus d’établissements prestigieux, et les carnets d’adresses de ces pépites étaient à la fois jalousement gardés comme bien souvent très similaires. Il n’y avait pas pléthore d’écuries renommées en Aryon. Néanmoins, il y avait une idée, agaçant l’orée de sa conscience, qui soufflait à l’espion que c’était dans un cercle bien plus intime qu’il avait déjà croisé Main d’Argent. Etait-il déjà aux côtés de la jeune femme, une décennie auparavant ? Ou était-il issu d’un milieu d’évolution de Calixte ? La Garde ? La Noblesse ? Hochant distraitement la tête aux réflexions de Vesper concernant le futur de sa livrée de page, le coursier continua à détailler la haute silhouette les précédant à quelques pas.

    L’acidité de la voix de la jeune femme lui fit décrocher son regard de Main d’Argent pour le poser sur le visage de celle-ci, et il laissa ses sourcils se froncer face au phrasé dont Lucas ne comprenait assurément que la moitié des termes. Lui-même se demandait s’il avait là touché une corde sensible. Peut-être. Probablement. Tout comme la sienne, la famille Devern avait besoin d’une descendance pour assurer la pérennité de son entreprise. Et aux dernières nouvelles, puisque l’aîné avait préféré un parcours d’aventurier pour laisser la gestion des affaires textiles à Vesper, la mission de prolonger la lignée devait certainement incomber à présent à cette dernière. Il n’y avait pas de mariage autre que de raison, dans ce milieu sélectif. Était-ce là la raison de l’ennui de la jeune femme ? Calixte avait du mal à y croire. Ils arrivèrent cependant bien vite à la boutique du premier tailleur, et le coursier laissa la discussion prendre une autre direction. Hochant à nouveau la tête aux directives de Vesper, il afficha un air soucieux, répéta en marmonnant les consignes de sa bienfaitrice, rajusta ses vêtements en essayant de dissimuler les « quarts rances », balaya des yeux le chemin pour éviter « l’écureuil », et pénétra dans le commerce.

    Il n’y avait pas foule, à l’intérieur de l’établissement. Juste assez de clients, dont la mine satisfaite et le raffinement des vêtements éveillaient l’intérêt rassuré des bourses méfiantes passant le porche. Calixte n’était jamais venu ici, mais il avait déjà entendu parler de Maître Lygrim. Il faisait partie de ces adresses dont la discrétion plaisait aux espions lorsqu’ils avaient besoin de refaire faire quelques tenues sophistiquées, et le coursier était à peu près certain que Luz avait déjà fait confectionner quelques robes par ces mains expertes. Le charisme assuré de Vesper les fit rapidement passer de l’assistant au tailleur lui-même, et l’espion fit de son mieux pour redresser les épaules voûtées de Lucas. Se prêtant volontiers au jeu sous l’émerveillement crédule de son rôle de façade, il monta sur le tabouret présenté et se laissa mesurer de toutes parts afin qu’on lui confectionnât sa livrée. Mentalement, il nota qu’il lui serait certainement plus sûr de revenir à des heures plus indécentes afin d’effacer toute trace du passage de ses mensurations dans la boutique.

    Vesper reprit la parole, et il se demanda s’il s’agissait encore là d’un effort poli de conversation ou si son interlocutrice s’intéressait réellement au personnage mal dégrossi de Lucas.

    - Mais je… je n’fais saigner personne ! bafouilla-t-il en ouvrant de grands yeux, son regard alternant rapidement entre la jeune Noble, Main d’Argent, et l’homme prenant ses mesures un air concentré sur le visage. C’pas permis ! J’oserai pas, je…

    Il se pencha légèrement vers Vesper par-dessus le crâne dégarni du couturier, et baissa le volume de sa voix.

    - C’pas très légal d’faire saigner les gens, m’dame Devern. Enfin j’crois.

    Et c’était dire la délicatesse de leur premier tailleur qui ne leva même pas le regard de sa tâche et s’abstînt de tout commentaire désobligeant ; sourd aux étranges affaires ayant lieu entre ces deux protagonistes mal appareillés. Maître Lygrim lui fit lever les bras avant de s’adresser à Vesper dans ce moment de silence incrédule :

    - Vous trouverez, ma dame, sur le présentoir à votre gauche, un livret de nos modèles standards. Pour une livrée de page nous en proposons actuellement trois différents. Au vu de la carrure de notre jeune homme, permettez-moi de vous conseiller celui annoté du numéro treize.

    Quatre coups de craies plus tard, et un plateau de mignardises déposé aux côtés de la Noble, Calixte était convié à redescendre de son tabouret pour s’assoir auprès de sa bienfaitrice. L’assistant du tailleur s’était à nouveau éclipsé pour chercher des breuvages au goût de ces clients, et Maître Lygrim étudiait avec enthousiasme le velours qu’on lui avait remis pour l’occasion.

    - Un excellent tissu que vous avez là ! De chez Vel Corex, ou peut-être Lyon, si je ne m’abuse ?

    S’approchant de Vesper qui lui indiquait le modèle sur lequel elle avait arrêté son choix, il approuva d’un mouvement vif du chef – qui se répercuta le long de son embonpoint – et discuta encore de quelques détails avec elle. Souhait-elle l’ajout ou le retrait de certains détails ? Ils disposaient de quelques étoffes de bonne facture pour compléter la parure si elle souhaitait un peu de diversité dans la présentation du vêtement. Et fallait-il l’ajout d’armoiries ? Laissant la jeune femme s’occuper des détails avec Maître Lygrim, Calixte s’avança prudemment vers Main d’Argent. La naïveté de Lucas lui permettait d’oser aborder le mystérieux personnage, mais son habitude fictive de la rue savait aussi le retenir de s’aventurer trop vite vers la gueule du loup.

    - Hé Main d’Argent, fit-il d’un ton sérieux et ennuyé, presque dans le souffle d’un murmure pour ne pas déranger ni la discussion entre la Noble et le couturier, ni trop perturber l’eau qui dort. J’crois que j’fais que des bêtises, poursuivit-il en jetant un regard tracassé vers Vesper. Elle est vraiment trop gentille, m’dame Devern, mais j’suis trop bête pour comprendre la moitié de c’qu’elle dit. Quand elle parlait de saigner et faire saigner, elle disait pas ça pour de vrai hein ? C’est moi qu’ai pas compris j’suis sûr ?

    Se tassant derrière une grimace contrariée, il s’adossa à une table près d’un recoin dans lequel l’homme de main avait trouvé un pan d’obscurité dans lequel se fondre presque tout à fait. Dans la lueur chaude des rayons de soleil matinaux, le tailleur indiquait à la jeune femme de profiter des douceurs amenées par l’assistant, et ce autant qu’elle le souhaitât, le temps qu’il réalisât la livrée demandée. La commande n’était pas d’une complexité extraordinaire, et arriver aux finitions serait certainement une histoire d’un couple d’heures tout au plus. Les clients dans l’expectative étaient invités à patienter dans le confort de la boutique – et éventuellement craquer pour davantage de tenues à faire réaliser – ou de vaquer à leurs occupations avant de revenir plus tard.

    - T’as pas des conseils pour moi ? Pour pas faire tout capoter. Et pas lui faire honte. Ou pas trop honte.
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    Re: Une robe!
    Sam 24 Oct 2020 - 18:10 #
    Les mots employés avaient pourtant été éminemment simples, tout à fait à la portée du savoir lexical sommaire de Lucas, mais la métaphore qu'ils ébauchaient ne fut apparemment perceptible par ce dernier. Les yeux ronds et outrés, le jeune homme se défendit de porter atteinte à quiconque, ayant pris au sens premier la question de Vesper. Cette dernière fut déçue, mais davantage d'elle-même, pour l'avoir vu plus fin qu'il ne l'était, et s'être attendue à ce qu'il comprenne son interrogation quelque peu déplacée, motivée par sa curiosité insatiable pour les états d'âme douloureux – qu'elle pouvait aider à étioler au demeurant, en les aspirant, d'où cet appétit un tantinet vorace pour ceux-ci.

    Surestimer ses interlocuteurs était toutefois habituel, chez Vesper, car cela lui permettait de se prémunir contre bien des surprises et des bassesses. Il restait en effet préférable de leur prêter plus de sagacité et de rouerie qu'ils n'en avaient, car les sous-estimer pouvait avoir de fatales conséquences, par manque d'anticipation. Cette posture avait permis à la noble, jusqu'alors, de rester plus ou moins à l'abri des mauvaises intentions de ses pairs...

    Ce Lucas n'était d'ailleurs probablement pas à déconsidérer, malgré son manque apparent de jugeotte. En effet, quand ce dernier se pencha vers elle pour lui rappeler à mi-voix le caractère illégal de faire saigner autrui, le teint de nacre de la noble perdit une nuance supplémentaire, pâlissant malgré elle. Le propos faisait en effet sombrement écho aux agissements qu'elle s'apprêtait à commettre, au Village Perché, sous les directives de la Cabale. Simple coïncidence ? Ce Lucas avait tout de même le don d'effleurer les cordes sensibles, de façon tout à fait anodine, avec cette insouciance impertinente de justesse, et il y avait pour cela matière à se défier de lui.

    Vesper demeura toutefois impavide, et s'attacha plutôt à prêter l'ouïe aux dires du tailleur, qui continuait de travailler avec professionnalisme, en faisant fi de l'étrange manège qui se jouait devant lui.

    « Il provient de chez Vel Corex, en effet. Quelle splendide boutique, au demeurant. Elle ferait de l'ombre à bien des enseignes de Grand-Port... »

    Tandis que la noble poursuivait la discussion engagée avec Maître Lygrim, convenant avec lui des détails de la livrée de page qui allait être confectionnée, portant notamment sur l'ajout de certains passements pour parfaire celle-ci, Main d'Argent fut soudain discrètement interpellé par Lucas. Le garde du corps s'était tapi dans un écrin d'ombre, dans un coin de la pièce, se faisant ainsi oublier pour mieux remplir sa mission. Il s'y tenait avec une indolence qui demeurait factice, prêt à tirer son épée, dont la gaine pointait à son flanc sous sa cape, à la moindre difficulté.

    « Question inutile, tu connais déjà la réponse. » lui répondit-il laconiquement, ses yeux d'acier clair se posant sans aménité sur Lucas.

    Et voilà que ce dernier lui demandait, bravant le tranchant de son regard, des conseils pour ne pas porter ombrage à Vesper ni compromettre leur mission, avec une singulière candeur. Une notable inconscience, vu d'un autre point de vue.

    « Des conseils, hein... ? » répéta Main d'Argent, le temps de chasser son incrédulité face à la demande du manant.

    « Malheureusement, ça va être dur de corriger ta pauvre élocution dans le temps qu'il nous reste, donc je te recommanderais... de parler le moins possible. L'intelligence transparaît souvent dans l'économie de mots. M'enfin... disons qu'on devrait t'accorder le bénéfice du doute, sur celle-ci, au moins. »

    Si Lucas ne pouvait offrir le plaisir de deviser convenablement, autant qu'il cesse d'offenser trop abondamment les oreilles de la noble, jugea Main d'Argent.

    « Et c'est parce que tu as tout à y perdre que tu y gagneras peut-être quelque chose, au bout du compte. »

    Main d'Argent venait de finir de délivrer ses préconisations, lorsque Vesper revint vers eux. Cette dernière avait profité de ses échanges avec le maître tailleur pour lui faire part de la requête de dame Sanward, de façon tout à fait fortuite, exécutant le plan qu'ils avaient ainsi élaboré. Cela avait produit l'effet escompté : maître Lygrim avait accédé avec facilité à sa demande, sans trop avancer de réticences, attiré par le défi d'être ainsi mis en rivalité avec ses concurrents.  

    « Je viens de présenter la requête de Madame Sanward à Maître Lygrim, et il m'a donné son accord. Je lui ai laissé la pleine liberté de l'accepter ou de la refuser, mais les participations des maîtres Tinefred et Ardisen l'ont convaincu de relever le défi. »  Bien sûr, elle perpétuait le mensonge convenu, car était consciente qu'ils pouvaient être entendus. Elle baissa quelque peu la voix avant d'ajouter : « Je vais rédiger les lettres pendant qu'on confectionne votre livrée, Lucas. Vous pourrez alors jouer les coursiers. » acheva-t-elle avec un sourire équivoque.
    Calixte Alkh'eirDamoiseau
    Calixte Alkh'eir
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    Re: Une robe!
    Sam 31 Oct 2020 - 18:07 #
    Le moins que l’on pût dire au sujet de Main d’Argent, c’était qu’il n’était guère loquace. Etudiant d’un œil naïvement curieux la silhouette de l’homme, Calixte se dit qu’elle lui était résolument familière. Mais d’où ? Malgré le peu de phrases que le garde du corps avait daigné lui servir, le coursier ne pouvait s’empêcher de pencher davantage pour une origine Noble de leur rencontre préalable, si elle avait bien eu lieu. Il y avait dans le phrasé de Main d’Argent une tournure toute endimanchée, un ton aux consonnances particulièrement altières, que seul l’appartenance à une certaine caste ancrait aussi pleinement. L’espion l’avait-il connu avant que l’homme ne devînt l’ombre de Vesper Devern ? Leurs pas s’étaient-ils croisés lors de mondanités quelques années auparavant ? Peut-être. L’un et l’autre étaient encore jeunes, et à l’acmé de leur croissance il n’était pas impossible qu’ils se fussent déjà rencontrés sous des traits plus juvéniles. Différents. Avant de rester familièrement inconnus.

    Hochant frénétiquement la tête avec un sérieux tout feint aux recommandations sévères de Main d’Argent, Calixte hésita à poursuivre sa tentative de discussion lorsque l’arrivée de Vesper à leur hauteur le fit se tourner vers elle avec anticipation. Apparemment la jeune femme avait pris les devants pour amener maître Lygrim à accéder à leur requête, et ne restait plus qu’à convaincre les deux autres tailleurs de participer à leur défi, afin de pouvoir proposer à dame Sanward une robe à la hauteur de ses espérances. Voire plus. Observant Vesper s’installer à la table adjacente en s’équipant de papier et d’une plume, l’espion se dit qu’il n’avait que peu de doutes quant au pouvoir d’incitation des missives en cours de préparation de la jeune femme. Elle avait jusque-là géré l’affaire d’une main habile, et il était certain que cette histoire ne trouverait son terme que dans la satisfaction de l’héritière Devern. Quand bien même une autre Noble fût à l’origine de celle-ci. Il se faisait davantage de soucis sur la dette que Lucas, son rôle actuel, allait contracter vis-à-vis de la tête pensante de leur opération. Réussirait-il à définitivement esquiver la jeune femme jusqu’à ce qu’elle oubliât son existence comme ses obligations ? A voir les rouages du cerveau de Vesper ainsi carburer, il en était moins que convaincu. Et il savait que si Lucy devait avoir son mot à dire, la Noble le poursuivrait jusque dans la tombe.

    Se remémorant les conseils de Main d’Argent, Calixte prit sur lui de brider légèrement sa curiosité, et laissa son visage afficher la volonté déterminée de Lucas. Jetant régulièrement des regards à l’homme tapi dans l’ombre, il tenta de copier la posture de celui-ci afin de donner l’impression de le prendre comme modèle. Absorbée dans sa tâche, Vesper tenta néanmoins initialement de relancer la conversation ; mais entre le vocabulaire limité de Lucas et sa résolution à suivre les recommandations du garde du corps, celle-ci s’étiola peu à peu pour laisser place à un silence confortable, affairé, où la jeune Noble couchait quelques phrases adroitement tournées sur le papier. Sous l’œil vigilant de Main d’Argent, lui-même attentivement observé par le coursier. De temps à autres l’assistant du couturier effectuait un aller-retour dans la petite salle où ils patientaient, afin de s’assurer de leur confort comme de les tenir informés de l’avancée des commandes. Et, au terme d’une heure allant sur la demi, alors que, comme ils avaient du temps à tuer – quoi que l’expression semblât légèrement perturber la jeune femme lorsque Lucas l’associa à celle de retenir son souffle dans l’attente du dévoilement de sa livrée – et que la jeune Noble semblait avoir su trouver davantage de patience pour accepter ce rôle temporaire de pédagogue, celle-ci apprenait à Lucas à reconnaitre certains mots de ses missives terminées depuis déjà quelques temps, maître Lygrim et son assistant firent irruption dans l’étrange petite bulle du trio improbable.

    Sous les ordres du tailleur, Calixte se défit alors – derrière un paravent à l’insistance de ces gens bien élevés alors qu’il se dépoilait sans décence aucune au centre de la pièce – de ses humbles vêtements et enfila la livrée produite avant de monter à nouveau sur le tabouret indiqué pour laisser maître Lygrim s’adonner aux finitions. Il ouvrit la bouche pour faire part de son contentement à Vesper, mais son regard accrocha la silhouette de Main d’Argent – qui faisait pourtant tout son possible pour se fondre dans cette ombre dans laquelle il avait établi ses quartiers – et il refréna ses propos pour finalement laisser l’émerveillement de Lucas ne se peindre que sur ses traits stupéfaits. Quelques coups d’aiguille plus tard, et le coursier tournoyait fièrement sous le regard de Vesper qui l’observait d’un œil critique. Lui faisant part de ses dernières recommandations, elle finit par lui tendre les missives à l’adresse des deux autres couturiers à mettre en compétition, et alors qu’il se penchait de son tabouret pour les saisir, son pied glissa du plateau de bois. L’équilibre perdu, il battit un moment des ailes, aperçut l’ombre quitter l’ombre, puis s’écroula droit sur Vesper qui esquissait un mouvement de recul. Et, en soi, cela n’aurait probablement pas été dramatique. Peut-être. Le rictus sur le visage de Main d’Argent ne semblait pas de cet avis, mais qui comptait ? Cependant, l’assistant de maître Lygrim qui passait à ce moment-là derrière la Noble, une théière nouvellement remplie à la main, changea un peu la donne. Les yeux de l’espion s’arrondirent complètement à la vision du récipient fumant volant au-dessus d’eux, et son geste suivant fut instinctif. Dans un mélange de mouvements chaotiques, d’exclamations surprises – ou outrées – et de tissus tournoyants, Vesper et Calixte disparurent soudain, fusionnant dans le pantalon de l’assistant alors que ce dernier finissait sa chute en solitaire.

    Lorsqu’ils réapparurent quelques secondes plus tard, Main d’Argent tenait fermement la théière au liquide brulant, l’assistant se confondait en excuses, et maître Lygrim se remettait de ses émotions.

    - Oula, heu, pardon, fit maladroitement Lucas en se relevant précipitamment avant de tendre sa main à Vesper.

    Il fut cependant devancé par le garde du corps qui lui fourra la théière offensive entre les bras, pour s’occuper lui-même de sa protégée. Lui décochant un regard peu amène au passage. Grimaçant, le coursier refila à son tour sa charge à l’assistant du couturier qui s’empressa de s’éloigner du cœur de la commotion.

    - Mes excuses, ma dame, peut-être avons-nous eu la main un peu lourde sur le cirage du tabouret. J’espère que vous n’avez pas souffert de cette chute, et votre employé non plus ? Venez, là, installez-vous donc ici le temps que tout le monde se remette de ses émois, indiqua le couturier en montrant une banquette confortable à proximité. Un homme fort talentueux que vous avez là ; j’aurai juré qu’il était à l’autre bout de la pièce avant que celui-ci ne vous tombât dessus ! Même si apparemment… Ah mais ce ne sont pas mes affaires ! Et en parlant d’affaires, vous avez fait tomber vos lettres jeune homme.

    Détachant son regard inquiet de la silhouette de Vesper, Calixte observa un moment maître Lygrim sans comprendre, avant de s’apercevoir qu’effectivement les missives préparées par la Noble gisaient par terre depuis son moment de maladresse. Ramassant rapidement celles-ci, il vérifia distraitement leur intégrité avant de les enfouir dans l’une des poches de sa livrée.

    - J’suis vraiment désolé m’dame Devern, finit-il par débiter d’une traite auprès de la jeune femme lorsque Main d’Argent lui permit enfin de l’approcher. Vous vous êtes pas fait mal ? J’suis maladroit parfois, pardon ! J’vais aller porter les lettres. Restez là pour vous r’mettre. Vous voulez que j’passe chercher quelqu’chose pour vous chez l’monsieur des herbes ? Pour les douleurs ? Non ?

    Et pendant que Vesper lui assurait que non, l’espion se dit qu’il allait lui falloir essayer de glisser quelque chose de chez l’apothicaire, ou l’enchanteur, dans la tasse de la Noble. Avait-il déjà employé son pouvoir devant la jeune femme en tant que Calixte ? Zahria allait encore s’arracher les cheveux sur son rapport de mission ; ça commençait à faire beaucoup trop d’éléments pouvant réveiller le doute dans l’esprit de l’héritière Devern. Il allait falloir qu’il trouvât de quoi rendre ses souvenirs de cette journée incertains. Flous. Vrenn ? Non, pas en premier lieu.

    S’inquiétant une dernière fois de l’état de santé de Vesper, sous l’insistance de cette dernière qui avait rapidement repris contenance malgré le voile du songe enveloppant ses prunelles, Calixte finit par mettre les voiles pour porter les missives aux deux autres tailleurs. Et récupérer quelques produits peu recommandables.
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    Re: Une robe!
    Dim 8 Nov 2020 - 20:57 #
    Ce qu'aimait plus que tout Vesper ? Les entreprises parfaitement contrôlées, qui dévidaient leur cours selon ses plans minutieusement tissés, sans la moindre anicroche pour venir les perturber, ou, pire, compromettre leur réalisation. Cette maîtrise absolue de la situation, elle avait bien cru l'avoir, lorsqu'elle s'était employée à écrire les lettres destinées aux deux couturiers, dans ce silence fort appréciable auquel semblait s'être astreint Lucas. Puis lorsque ce dernier avait revêtu son habit, confectionné exactement dans les temps par Maître Lygrim, non sans leur apporter une entière satisfaction. Ou encore quand, une fois l'uniforme parachevé dans ses ultimes finitions, elle avait tendu les missives à Lucas, assurée qu'il était paré pour mener à bien la suite de leurs desseins...

    Jusqu'à ce que tout vacille, sombre et s'abîme dans ce tumulte impromptu nouvellement créé par la maladresse de Lucas. Enfin, il n'y avait que l'assistant du tailleur qui ait réellement chu, en vérité, sa théière heureusement sauvée de justesse par l'habilité prompte de Main d'Argent. Vesper, quant à elle, avait disparu avec Lucas pour ne devenir qu'étoffe, avant de réapparaître tout aussi subitement, dans une profonde confusion.

    Alors que les excuses fusaient, elle se redressa, aidée par son garde du corps qui avait préféré refiler l'ardent récipient intact à Lucas plutôt que de le voir épauler la noble, et réajusta les plis de sa robe de façon assez sèche. Puis elle se tourna vers maître Lygrim, qui s'était empressé de prendre la parole suite à ce déplorable incident.

    « Ç-ça va, je vous remercie. Aucun dégât n'est à déplorer, c'est là l'essentiel. Il aurait été regrettable que cet incident soit venu abîmer la remarquable livrée que vous avez réalisé pour mon page. »

    Bien qu'elle s'exprimât calmement, sa voix s'était teinte d'une musicalité rauque – pareille à celle d'un chat en colère – qui trahissait sa contrariété intérieure. Après avoir récupéré à la hâte les missives qui jonchaient le sol, Lucas réitéra ses excuses à son encontre et elle le considéra d'un œil glacial, toute once chaleur ayant déserté son regard.

    « Je n'ai besoin de rien, merci. Contentez-vous de réaliser la mission convenue, je vous prie. »

    Heureusement, parfois, les perturbations non anticipées pouvaient rester profitables. En l'occurrence quand celles-ci étaient vectrices d'information.

    « J'avais des doutes, mais ils viennent de se fortifier en une certitude : je le connais. » affirma Main d'Argent, une fois que Lucas eût quitté la boutique pour exécuter son œuvre. Une conviction aux accents irrévocables perçait dans sa voix.

    « Que veux-tu dire ? » Le faciès de Vesper avait pris un air incrédule, similaire à celui que provoque la découverte d'un ver dans une pomme.

    « Je n'avais guère que d'imperceptibles soupçons sur lui, jusqu'alors, mais entrevoir son pouvoir m'a permis de l'identifier : il s'agit de Calixte Alkh’eir, ce noble de Grand-Port que nous avons fréquenté, dans notre jeunesse. »

    « Calixte, dis-tu ? Maintenant que tu le dis... Cela expliquerait en effet cette étrange impression qu'il m'a laissé, lors de notre première rencontre. Voilà un élément qu'il nous est fort précieux de connaître. »

    Car Vesper disposait d'une information de taille, sur ce noble : elle connaissait son identité d'espion, ce dernier étant fiché de près par la Cabale. Elle avait donc attiré dans sa toile un plus gros poisson qu'escompté... Bienheureux était le destin qui l'avait mis sur son chemin, songea-t-elle, non sans une cruelle délectation. Certes, elle pouvait être gênée du piège qu'elle allait lui tendre, eu égard à l'amitié qu'elle avait conçu pour lui, par le passé. Mais Vesper n'était plus la même qu'autrefois, et les intérêts de l'organisation qu'elle servait primaient sur le reste. La vie de Main d'Argent, plus précisément, primait sur tout.

    ►◄

    Comme attendu, l'espion, sous ses apparats de page de la maison Devern, n'avait eu aucune difficulté à délivrer les messages aux deux autres tailleurs, et ces derniers en étaient venus à accepter le défi qui se présentait à eux. Il avait été convenu que les rendus seraient livrés directement au Manoir Sanward, quelques jours plus tard pour leur laisser le temps de réaliser la gageure qu'ils avaient accepté de relever.

    Le jour venu, la demeure accueillit donc les couturiers, ainsi que Calixte et Vesper qui avaient le plaisir d'assister à la compétition qu'ils avaient contribué à faire naître. Les trois propositions de robe furent amenées sur des mannequins. Elles représentaient trois visions singulièrement différentes, les tailleurs s'étant autorisé quelques personnalisations de leur cru. Une profusion de dentelle, de tulle et de volant parait les pantins inanimés, taillés pour l'occasion sur la morphologie de Fedora.

    « Qu'en pensez-vous, Mademoiselle Sanward ? L'une d'entre elles a-t-elle votre préférence ? » l'interrogea Vesper, en essayant de ne rien laisser paraître du trouble que lui inspirait cette noble à la physionomie des plus étranges.

    Dans l'attente du classement de la noble, elle ne manqua d'ajouter :

    « Tout cela n'aurait jamais été possible sans notre cher Lucas, qui a consenti à bien des efforts pour la réussite de notre entreprise. »

    Elle glissa ensuite à ce dernier, à mi-voix afin de n'être entendue que par lui seul :

    « Nul doute que vous saurez vous acquitter de votre dette avec la même habileté. Je me dois de louer vos compétences en matière de fusion, de rôles comme de matériaux. Mais ce que j'apprécie le plus, chez vous, mon cher Lucas, c'est bien votre Prévoyance. »

    Un raffiné venin exsuda du sous-entendu de ses propos. Elle avait déjà hâte de lui demander ce service auquel il ne pourrait aucunement déroger. L'on pouvait dire que ce petit détour par la Capitale n'avait pas été du temps perdu pour Vesper, assurément.
    Calixte Alkh'eirDamoiseau
    Calixte Alkh'eir
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    Re: Une robe!
    Lun 9 Nov 2020 - 17:51 #
    Le reste de l’affaire avait été d’une simplicité écœurante contrastant avec le purin dans lequel il s’était obstinément enfoncé depuis qu’il avait eu le malheur de demander de l’aide à la mauvaise personne. De tous les Nobles reluquant les étoffes luxueuses, il avait fallu qu’il fût tombé sur celle – voire ceux, il ne savait toujours pas quoi penser de Main d’Argent – qui pouvait potentiellement le reconnaître. Et qui, assurément, n’aurait aucun scrupule à utiliser cette information à son avantage. Calixte n’avait pas été certain que l’utilisation de son pouvoir l’eût tout à fait démasqué, mais il n’avait pas souhaité prendre le risque de laisser courir ce doute. Dans sa ceinture d’espion, il avait vérifié la présence du renflement de la poche dissimulant les diverses poudres – plus ou moins légales – permettant d’altérer les fonctions cognitives d’autrui, et avait mis à profit le temps nécessaire aux couturiers préparant les nouvelles toilettes de dame Sanward pour s’intéresser à l’héritière Devern. S’il pouvait simplement rendre plus incertains les souvenirs de Vesper quant à cette journée, voire ceux de son homme de main…

    Mais il avait semblé que Lucy – sans surprise, vraiment – n’était pas d’humeur conciliante, car les jours suivant la rencontre de Lucas et dame Devern, Calixte avait eu toutes peines du monde à mettre la main sur ses cibles, comme d’entreprendre ses plans peu honorables. Ils furent, d’ailleurs, vains. Trouver le point de chute du duo n’avait pas été très compliqué ; il n’était jamais très difficile de découvrir, ou de deviner, l’agenda officiel des Nobles. Mais même avec la connaissance de celui-ci, il n’avait réussi à atteindre l’héritière Devern. Ça n’était pas faute d’avoir tenté tout un panel d’approches plus ou moins audacieuses, mais le quotidien de la Noble paraissait laisser peu de place à l’insolite – comme au grain de sable qu’était l’espion tentant de s’immiscer au travers des rouages bien huilés – son garde du corps veillait d’une vigilance indéfectible – l’espion avait failli se faire surprendre par Main d’Argent plus d’une fois – et la maladresse comme la malchance de Calixte ne semblaient pas avoir décidé de prendre congé malgré son désespoir de plus en plus grand. Car plus les heures les séparaient du premier jour qu’ils avaient passé ensemble à élaborer un plan pour répondre à la demande de dame Sanward, plus difficile devenait l’entreprise de faire oublier celui-ci à Vesper. Voire illusoire. Alors, au troisième jour d’attente, finissant de rendre la tisane à base de rhonphle et de fruits séchés – dont certains antagonisaient visiblement son estomac – qui aurait dû arriver sur la table de chevet de Vesper et qui, par une opération du destin lui échappant encore, avait à la place fini dans la théière à l’attention des domestiques ; Calixte avait décidé qu’il était temps de rendre les armes et s’avouer vaincu.

    C’était ainsi que, l’humeur morose, il s’était à nouveau présenté sous les traits de Lucas à la demeure de dame Sanward le jour convenu. Et alors qu’il aidait les trois tailleurs et leurs assistants à disposer les diverses confections avant de rejoindre l’héritière Devern qui encourageait l’hôte des lieux à se prononcer, il se prit à espérer que, peut-être, Vesper et Main d’Argent n’avaient aucunement douté de son visage d’emprunt.

    - Nul doute que vous saurez vous acquitter de votre dette avec la même habileté. Je me dois de louer vos compétences en matière de fusion, de rôles comme de matériaux. Mais ce que j'apprécie le plus, chez vous, mon cher Lucas, c'est bien votre Prévoyance.

    La flamme de l’espérance n’avait vraiment pas fait long feu, mais sa lueur avait été merveilleuse à contempler le temps de deux secondes. Clignant des yeux, chassant le mirage s’accrochant à l’ombre de ses paupières, Calixte sentit une vague de résignation le saisir. Depuis ses – nombreux – échecs à altérer les souvenirs de Vesper – ou tout simplement à l’atteindre – l’espion s’était fait à l’idée que la jeune femme, si elle avait bien fait le lien avec son visage officiel, ne se gênerait guère pour le prendre en défaut. C’était loin de le réjouir, et il n’avait pas tellement d’excuse viable à offrir. Le bouclier de la Garde avait ses limites, surtout lorsque sa mission était alors officieuse. Mais en dehors de ternir son image – et celle de sa famille – l’impair l’affecterait certainement peu. Et la dette contractée auprès de Vesper serait certainement facilement payable. Pénible, mais réalisable. De quoi pouvait bien avoir besoin une Noble, sinon de pouvoir ? De notoriété ? Que ce fût via son statut de membre d’une famille Noble gestionnaire de la Prévoyance, ou de garde, nul doute que l’une ou l’autre de ses facettes servirait amplement à attester de sa reconnaissance. A moins que l’ambition de l’héritière Devern ne fut toute autre.

    Adressant un sourire contrit à Vesper, Calixte garda le phrasé médiocre de Lucas pour lui répondre. Dans cette affaire malheureuse pour lui, écorcher l’oreille de la jeune femme habituée à un verbe soutenu avait le goût de la rétribution. Certainement vaine, mais pas moins plaisante. Et comme Fedora Sanward arrêtait finalement son choix, leur discussion fut rapidement prise de court, et l’issue de leur rencontre se profila.

    Lorsque Calixte franchit à nouveau le palier de dame Sanward les poches alourdies de cristaux, sa conscience s’était elle appesantie de la promesse du service à venir pour Vesper Devern, lorsque celle-ci le contacterait à nouveau. Songeur, le coursier regarda les silhouettes de la Noble et de son homme de main s’effacer au coin d’une rue de la Capitale, avant de reprendre lui-même le chemin du quartier général des espions. Il avait un rapport ennuyeux à remplir, et le palmarès de celle dont il était devenu l’obligé à vérifier.
    Fedora SanwardI'm a Barbie girl, in the Barbie world
    Fedora Sanward
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    Re: Une robe!
    Lun 16 Nov 2020 - 15:15 #
    Prologue : Une Robe!
    Le grand jour est enfin arrivé, Fedora a reçu une lettre stipulant que les robes allaient être directement livrées à sa demeure! Les robes! Elle n'en revenait tout simplement pas! Elle avait déjà du mal à imaginer recevoir une robe alors avoir le choix entre plusieurs? Elle ne dormit que peu cette nuit là - façon de parler vu qu'avec sa condition elle ne nécessite pas réellement de sommeil - disons plutôt que les domestique, et notamment ce pauvre Wilfred, ont peu dormi! Il faut aussi dire que lorsque la jeune fille est impatiente comme cela est le cas en ce moment, elle ne reste simplement pas en place! Courir dans les couloirs, faire les cent pas, tenter tant bien que mal de s'occuper afin que les heures passent plus vite et que le jour arrive pour elle d'enfin avoir son habit... Après tout, c'est la première étape pour son départ vers le grand port et la rencontre avec son père, n'est-ce pas alors normal qu'elle soit si excitée?

    Les deux personnes engagées pour cette demande arrivent finalement, Wilfred leur ouvre la porte devant une Fedora bien trop énervée pour qu'elle attente sagement ce qui fait sourire - et également soupirer - le majordome. Bien-entendu, la jeune fille reconnait le jeune homme auquel elle a remit son dessin, elle lui fait un grand beau et effrayant sourire avant de se tourner vers l'autre dame qu'elle ne reconnait absolument pas! Et pourtant, elle devrait si elle l'avait déjà vu! De toute évidence ce n'est pas n'importe qui, sa tenue - ainsi que l'homme qui l'accompagne et semble être un garde du corps - font réaliser à Fedora qu'elle doit être importante! Elle devrait sans doute se questionner, se demander pourquoi ce n'est pas la même jeune fille, pourquoi une dame faisant sans nul doute partie de la noblesse a accepté de participer à cette recherche de robe, où a disparue l'autre jeune fille également... Oui, cependant toutes ses questions se volatilisent lorsqu'arrive enfin ce qu'elle attendait tant : les robes!

    C'est avec des yeux émerveillés - même si cela ne se voit pas - qu'elle observe ces trois créations! Elle guide, après un petit temps sans contenance, ses invités dans le salon, après tout n'est-ce pas la pièce la plus agréable pour recevoir de la compagnie? En bon majordome, Wilfred offre des rafraichissement ou cafés à qui le désire alors que la petite poupée n'est plus réellement attentive à ce qu'il se passe autours d'elle, concentré sur les robes mais, pas uniquement... *Ça alors...* Se dit-elle. *Ils ont même réussi à faire des mannequins avec mes proportions!* S'étonne-t-elle! En si peu de temps ils ont fait la robe et le mannequins? Quoi que, ce ne sont sans doute pas les couturiers qui ont fait les mannequins si? Elle est sortie de sa rêverie et ses interrogations futiles par la voix de la dame noble! Elle en sursaute presque et se tourne vers cette dernière en penchant la tête sur le côté, signe qu'elle est bien attentive à ses paroles... "Les trois son véritablement magnifiques!" Affirme-t-elle. "choisir la plus belle est difficile, je n'en espérais pas tant." Avoue-t-elle avant de reporter son attention sur les tissus s'offrant à son regard. Oui Lucas! En effet c'est lui qui a, le premier, répondu présent à cette demande, sans lui cela ne serait jamais arrivé en effet! Elle tourne autours des robes et finit par s'arrêter devant la robe sur le mannequin de droite, une robe noire avec un corset rouge, des toiles noirs, transparents, couvrant les bras également... La jupe est un peu courte et nécessiterait que Fedora montre ses jambes - chose à laquelle elle n'est pas encore prête - cependant, des trois, c'est sans aucun doute celle qu'elle préfère.

    "Celle-ci!" Dit-elle. "C'est ma favorite!" Affirme-t-elle ayant bien décidé que c'est celle qu'elle mettra pour rencontrer son père! Cependant, jetant un regard aux deux autres, elle sourit doucement. "J'aime également les deux autres cependant! Je suppose que je peux prendre les trois non?" Demande-t-elle non pas aux couturiers ou aux deux personnes ayant fait cette commission pour elle, mais bien en regardant Wilfred qui soupire en affichant un air vaincu, ce qui fait sourire la demoiselle!

    Elle prend donc les trois robes, après tout pourquoi choisir si l'on peut payer les trois? Elle remercie grandement et chaleureusement les couturiers - bien qu'ils semblent plus effrayés qu'heureux en voyant le grand beau et effrayant sourire de la demoiselle - puis remercie également les deux personnes sans lesquels cela aurait été impossible : Vesper et Lucas! Elle leur donne comme convenue la récompense pour cette recherche de la robe parfaite et reste à la porte du manoir, leur faisant de grands signes alors qu'ils s'éloignent et cela jusqu'à ce que Wilfred dépose une main sur son épaule pour l'inviter à retourner à l'intérieur... Elle a maintenant sa robe, ne reste plus qu'à trouver le courage d'aller jusqu'au grand port!
    Codage par Libella sur Graphiorum
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    Re: Une robe!
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