Jin, tu vaques tranquillement à tes occupations, dans la capitale (a toi de voir) quand tu es arrêté par une dame assez grande avec un accent prononcé.
Cette dernière t'arrête net avant de te dire
-AH LA LA LA MON CHERI.... CELA NE VA PAS DU TOUT !
Cette dernière t'observe de haut en bas, avec un air désapprobateur, jugeant tes vêtements avant d'arrêter une belle dame bien habillée. Et oui, toi Olenna
-A toi ma chérie ! J'aime ta tenue, tou es m-a-g-n-i-f-a-ï-q-u-e !
Il faut que tu m'aide à le relooker !
Frappant ses deux mains couvertes de bijoux, elles vous transportent tout les trois dans une immense pièce remplie de rangées de vêtements en tout genre.
Tout porte à croire qu'elle ne vous laissera pas partir tant que Jin ne sera pas à la dernière mode
Elle détourna son regard vers l’homme que la boutiquière aux cheveux courts avait également fait entrer. Il était grand, mince, le visage ovale et un nez pointu. Ce qui frappait chez lui, c’était surtout sa très longue chevelure noire, dépeignée, aux reflets grenat. Sous sa frange aux allures de tignasse sans structure brillaient deux yeux d’ambre qu’on peinait néanmoins à distinguer.
- Vous êtes ? fit nonchalamment Olenna à l’intention du jeune homme, estimant qu’elle n’avait pas besoin de se présenter.
- Jin Hidoru, le Châtieur Ardent.
Olenna tordit la bouche pour réprimer un gloussement nerveux, préférant étirer un large sourire sur son visage de porcelaine lorsqu’elle remarqua la plaque d’aventurier pendant autour de son cou.
- Hm… Votre pouvoir ? Enchaîna-t-elle du même ton.
-Je peux manipuler le feu, répondit Jin en fronçant les sourcils, visiblement agacé par la situation.
- Je vois. Rétorqua-t-elle en arquant un sourcil. Ça manque de féerie, mais ça a du potentiel, beaucoup de potentiel. Voir quelque chose brûler a toujours quelque chose d’envoûtant et d’effrayant à la fois, on se demande toujours s’il y a quelqu’un dans ce grand bâtiment en flammes…
-Pardon ?
- Rien, rien d’important. Retirez les fripes qui vous servent de tenue, la vue de ces haillons me retourne le cœur. Ensuite, nous pourrons entamer votre transformation.
- Vous n’allez tout même pas accepter cette mascarade ?!
- Écoutez, vous tuez des monstres pour le compte de la Guilde et sauvez le tout venant d’une mort certaine. Moi, je sauve le monde du mauvais goût. Vous avez le choix, sortir d’ici avec du panache ou rester en loques comme maintenant.
Lady Belmont ne lui laissa même pas le temps de répondre, elle attrapa Jin par le poignet et l’entraîna vers une cabine d’essayage dans un coin de la pièce.
- Vous me remercierez une fois sorti. Nous verrons comment vous pourrez rembourser votre dette auprès de la grande couturière royale, à savoir moi. J’ai déjà ma petite idée… Maintenant, déshabillez-vous.
Plus jamais j'fais une course pour m'man dans ce coin-là. Terminé. J'ramène du fric, j'ai rénové la baraque, elle devrait pouvoir acheter ses œufs et son lait toute seule comme une grande jusqu'à la fin de sa vie.
Putain. Mais dans quel merdier j'me suis fourré encore une fois.
Donc, j'récapitule: j'me balade pépère, une nana arrive de nulle part, me dit grosso modo que mon accoutrement relève du désastre - même si j'en ai rien carrer - alors qu'une autre donzelle, visiblement Sa Majesté la couturière qui se considère aussi grande que la Reine en personne se trouve assez tendance pour vouloir me rhabiller. Mais cocotte, à ce niveau c'est tout le royaume que tu dois saper.
J'étais partagé entre l'envie de lui décoller le plus gros crochet de ma vie dans sa tempe avant de marteler son crâne avec tous les portemanteaux de la boutique, et l'incompréhension totale. Pourquoi moi ? Pourquoi maintenant ? Un pet de travers et j'me réserve le droit de tout incinérer ici. J'pousse un soupir pendant que la nana qui ne s'est toujours pas présentée bave sur Sa Grandeur blablabla "tout le monde est insignifiant si vous portez du bordeaux avec du vert".
Vraiment dommage, parce que si on met ça de côté, elle n'est pas si mal à regarder. Gâché par un comportement toxique au possible, mais pas mal. Ces cheveux azurés, une peau de porcelaine, des iris opalins, son visage aux traits fins décorés par une mèche de cheveux qui tombe dans une cascade de couleur, et comme j'bite que dalle à la mode, apparemment elle serait bien habillée. D'accord. M'en tartine le fion, concret. Pas le temps de répondre mon refus qu'elle saisit mon poignet avant de plonger dans les allées. Un bordel de sapes sans nom. J'finis dans une cabine d'essayage et elle me promet d'être le plus stylé du coin.
Ah mais j'serai endetté en plus? Qu'est-ce j'vais devoir encore faire pour être tranquille un jour... Comme c'est une noblarde et que j'pense qu'un claquement de doigts lui permettrait de ramener l'armée d'Aryon, j'vais éviter de lui fracasser la bouche. A contre cœur. De l'intérieur de la cabine, j'grogne. Puis une image me vient à l'esprit.
Haru Du Lys.
Peut-être que j'pourrai avoir une tenue qui me permettrait de fondre dans son cabinet, ou même dans son manoir ? Maintenant que je sais que j'pourrai peut-être y aller un jour... J'ravale ma fierté, et j'vais laisser une chance à cette excentrique de faire quelque chose. Pour mon amie. Putain ce qui faut pas faire dans la vie...
- Vous me transformez en tapin, j'réduis cette boutique en cendres.
J'défais mes vêtements, gardant que mon caleçon puis je détache mes cheveux, avant d'échapper ma tête du rideau qui sépare mon vis-à-vis de ma quasi nudité.
- Bon, allez, j'vous écoute. Avec votre prénom au moins. Que j'puisse éviter de vous appeler "vielle branche", "plumeau bleu" ou "couturière barrée".
Et par pitié, que ça ne dure pas dix jours surtout.
- Ministre de quoi ?
Olenna soupira longuement en rejetant une de ses mèches colorées par dessus son épaule, toisant Jin à présent déshabillé d’un regard navré.
- Des élégances, clairement quelque chose dont vous manquez. C’est moi qui dicte la tendance, la mode, au palais comme dans toute la bonne société. Il suffit que je dise que quelque chose est in pour que tout le monde suive.
- N’importe quoi…
À ces mots, un fin rictus se dessina sur le visage d’Olenna, le genre de rictus qu’il ne fait pas bon de voir sur le visage de n’importe qui. Son visage de sirène prenait peu à peu celui d’une démone, une succube qui avait repéré sa proie et s’apprêtait à lui faire vivre l’enfer. Elle décelait quelque chose en fixant encore et encore ce Châtieur Ardent.
- Regardez-vous dans le miroir, ordonna-t-elle.
- Pardon ?
- Le miroir, maintenant ! Rugit-elle de plus belle.
D’un geste toujours plus énervé, Jin se tourna vers la psyché pour se faire face. Il n’y avait que lui, dans son plus simple appareil, Olenna s’étant écartée pour disparaître de la glace. Elle continuait de le scruter de son regard doré, aussi perçant que celui d’un aigle tournant dans le ciel.
- Vous pensez que vous valez plus que les autres parce que vous ne suivez pas la tendance. Vous pensez que vous êtes original sous prétexte que n’écoutez pas un traître mot de ce que les gens comme moi peuvent dire. Ça vous procure quoi exactement quand une femme comme moi vous dit que vous n’êtes pas élégant et que vous n’en avez cure ? De l’auto-satisfaction ? Un orgueil galvanisé par votre propre bêtise ?
Jin voulut lui répondre, mais elle l’en empêcha. Olenna attrapa promptement la chemise en lin crème, légèrement jauni, que Jin avait retiré ainsi que ses braies brunes avant de lui jeter à ses pieds.
- Cette chemise est faite de lin de l’Archipel, un tissu aérien très agréable à porter qui garantit une liberté de mouvement incroyable. Très pratique pour un aventurier toujours en vadrouille. Votre pantalon est en fibre de coton, exactement pour les même raisons. Des vêtements dont on privilégie une couleur peu vive pour écarter tout repérage si vous devez rester discret. Quant à vos bottes, du cuir de léviaran, suffisamment résistant pour ne pas s’user trop vite. Tous ces atours sont pris en compte dans la confection d'attirail et de vêtements pour tous les aventuriers du royaume.
Tout en parlant, Olenna attrapa une grande tunique, à mi chemin entre la robe et le kimono, une ceinture semblable à une cordelette dorée, des souliers de soie, ainsi qu’un pic à cheveux en métal orné. Le tout avait une teinte sombre, avec plusieurs motifs rappelant l’automne. Elle empoigna les cheveux de Jin qu’elle s’empressa d’enrouler en chignon avant de piquer l’épingle pour les maintenir.
- Vous êtes fier de ne pas suivre les tendances, alors que toutes vos tenues ont été élaborées spécialement pour vous par des personnes comme moi, la “couturière barrée.”. Vous n’êtes pas original, ni unique, ni au dessus de moi. Vous êtes parfaitement à votre place. Habillez-vous.
Elle commence à blablater. Enfin, j'suis quand même sidéré par sa capacité à identifier les tissus de chaque vêtement et m'en dire sa provenance. Ouais, elle est bien couturière. Une couturière à prendre au sérieux vraisemblablement.
Mais elle blablate beaucoup, quand même.
Je la suis du regard, tandis que j'blottis le rideau au niveau de mes valseuses pour garder un semblant de dignité alors que j'suis seulement en calebard avec une parfaite inconnue. Elle saisit plusieurs vêtements, une tunique mais pas de froc, des pompes, et sans que j'puisse demander mon reste j'me retrouve avec tout ce merdier dans les bras alors qu'elle attrape mes cheveux pour faire un chignon. Me voilà devant mon miroir alors qu'elle me fait le parfait discours de la femme indétrônable.
Quand j'pense que j'protège ces personnes des criminels, des fois j'me dis que je devrai faire quelques exceptions pour certains.
J'commence à poser les autres articles sur le petit banc de la cabine alors que j'enfile ladite tunique. Un regard méfiant sur mon mentor de la mode; ses yeux perçants ne quittent pas ma personne, au contraire, on dirai qu'elle sonde mon âme et mes moindres faits et gestes.
Si on met Haru de côté, j'crois que tous les nobliaux que j'ai croisés ont un souci au casque. Qu'en est-il de la Reine? Elle torture son mari? Elle propose des sauteries dînatoires avec le gouvernement? Bref... Je termine mon habillage et j'essaie de me zyeuter en détaillant toutes ses couleurs rouges, marrons et oranges qui décorent mon ensemble. On dirait une tenue traditionnelle de noble. J'suis un peu serré dedans, mes mouvements sont plus restreints. Mais faut reconnaître que ça donne une certaine prestance. J'me retourne du côté de Belmont, toujours un peu sceptique.
- Et donc? J'vais devoir porter ce genre de truc même quand je vais devoir travailler ?
Sortir, allez au resto', un rendez-vous important ou un rencard avec Haru. D'accord, j'remets. Mais tabasser des gens, repousser une armée de Gevaudan ou se battre contre des pirates j'ai du mal à saisir la pertinence de la tenue.
Me tournant quand même d'un côté, puis de l'autre devant le miroir, j'me surprends à ...
... m'admirer ?
Les sentiments, quand tu nous tiens.