Raziakin Glide

Razia à la capacité d’absorber, avaler tout être non-vivant qu’elle touche. Il est pour cela impératif un contact direct peau contre objet. L’absorption prend 2cm/s et varie selon la taille et/ou l'épaisseur. Le poids et la masse n’ont aucune incidence. Si par exemple, elle tente d’absorber un bâton d'une hauteur de 30cm à l’horizontale, cela prendra 15 secondes. Mais si le bâton est tenu à la verticale et collé à sa jambe, c’est son épaisseur qui compte désormais ; ici, une épaisseur de 3cm et il sera avalé en une seconde et quelques. Un objet plus large et/ou plus grand qu’elle ne pourra pas être absorbé. (Le cours est fi- pas la peine de poussé à la sortie !) On peut comparer visuellement son pouvoir à l’action de sable mouvant, sauf que contrairement à ce dernier, il est très facile de s’en dégager. Un pouvoir qu’elle refreine du mieux qu’elle peut, au vu d’un contrôle quelque peu… ouais, nul. Un sursaut, une blague hilarante, une tristesse lancinante et le voilà partit (ses vêtements avec). Il est, à ce moment précis, humain de se questionner : Mais où diable atterrissent tous ses objets ? Razia a un espace de stockage temporaire. On ne peut pas réellement parler de salle ni de boîte… Disons, un bric-à-brac de 10m3, plongé dans le noir complet. Pour faire court : The Hall. Cet espace, une fois bondé, est inutilisable par l'utilisateur. Razia se retrouve tranquille, quoi.  Dans tous les cas, rien ne reste plus de 24h avant de disparaître. Où ?  Eh bien... vers une planète inconnue ou un trou noir ou une autre galaxie… qui sait ?

évolution:

***

Elle l’a trop gâté, cette poule... Si Razia pouvait montrer une similaire patience et empathie avec le genre humain, le ciel serait bleu et les papillons voltigeraient. Anxiogène, pour elle et pour les autres, elle a un second don caché : le stress. Elle a la capacité d’angoissé, elle et toutes personnes aux alentours. Les contre-coups sont : un pouvoir qui part en vrille, des réactions excessives, une perte de ses moyens et un besoin de se cacher sous sa cape. C’est assis en boule, la capuche enfoncée qu’elle broie le mieux ses sentiments, Raziakin. D’un point de vue extérieur, ça doit paraître pathétique. En tout cas, c’est ce qu’on susurre dans son dos. Ouch ! Retour à la case départ. Razia a de nouveau dix ans. Elle ne sait pas comment jouer avec les autres et leur fait peur. Faites comme je dis, ne faites pas ça, c’est nul, raté. On y voit au mieux une coincée, au pire de l’arrogance. C’est dommage pour la jeune femme, parfaite petite soldate en devenir, elle ne cherche qu’à s’améliorer. Elle s’inquiète pour son régiment, ses camarades. Dans l’équipe, c’est celle qui va pointer du doigt une plaque sale, un pli, une selle desserrée, une épée émoussée, une défense lacunaire… Sans cesse à inspecter ses camarades pour pouvoir leur être le plus utile. Alors oui, c’est un peu chiant, et puis, sa franchise est un peu sèche, voire méchante, mais c’est comme ça qu’elle a appris. Si jamais vous êtes intéressé, vous serez surpris de Razia détendue. Des bêtises, des bêtises et des bêtises ! Gamine qui relève les défis les plus débiles parce que « t’es pas cap » ou raconte des blagues nulles pour briser un silence étouffant. Honnêtement, avec quelques années et une poussée de confiance en soi, elle pourrait devenir un excellent capitaine.

AN 982

C’était une belle journée, le village roupillait, les oiseaux gazouillaient, le ruisseau tonnait, les fleurs souriaient, le soleil rayonnait. Razia allait naître. Elle serait la fille choyée, la première. C’était une belle journée, le vent susurrait l’espoir, l’avenir. Un cri. Déchirant, apeuré, douloureux. Lorsqu’un enfant né, sa première sensation, c’est les battements de sa mère. Mais ce n’était pas Razia qui avait hurlé. La petite était né sans bruit, déjà en deuil. Razia naquit emportant avec elle le souffle de sa mère, une belle journée, le 25e jour de la deuxième lune douce 982.

AN 992

Dix ans passèrent. Mr Glide, agriculteur bedonné, ne s’était pas remarié, personne ne convenait et dans un petit village comme le leur, on avait vite fait le tour des possibilités. Cependant, les yeux criaient et les mauvaises langues glissaient sur les champs de patates. Il fallait « une présence féminine » à cette pauvre Razia. Cette pauvre Razia… petite insolente de dix années, qui, vagabondait toute nue dans les champs en tyrannisant les élevages. Et puis, lorsqu’elle ne les embêtait pas, elle engloutissait les cailloux. On ne les revoyait plus. Son pouvoir s’était réveillé à ses 8 ans, durant une bataille de boules de neiges, et n’eut pas l’accueil espéré. Mr Glide avait dû l’entraîner des mois et des mois pour arriver à un semblant de contrôle. Trop tard. L’abomination, comme on aimait à la surnommer, n’apportait que malheurs et problèmes dans l’imaginaire. Devenue la paria du groupe, elle passait son temps à effrayer les autres. Enfant détraquée s’amusant à déchiqueter les insectes, les petits animaux et poursuivre les malheureux sur la route. Elle n’existait que pour être pointée du doigt.

Dans cette bulle solitaire, son seul réconfort était Fuli. Fuli était beau, gentil, un peu bébête, c’est vrai, mais elle l’aimait comme ça. Il l’écoutait, le soir, se lovait contre elle, les paupières lourdes. Fuli comprenait ses peines, sa solitude, sa douleur. Tout ce qu’elle voulait, c’était être une enfant normale. Jouer dans les ruisseaux, courir après les autres, faire des batailles de boule de neiges, se disputer, bouder, se salir. Et si… si seulement elle pouvait se faire disparaître, elle aussi. Allongée, elle observait les étoiles en silence, Fuli nettoyant son plumage à ses côtés.

Mr Glide fulminait. Razia n’avait pas d’amis, pas de manière et passait son temps avec une poule d’un an, prénommé Fuli. Non, décidément, cette petite avait besoin d’une mère. C’est la conclusion que tira Mr Glide, de ces innombrables bêtises. Voilà comment la nouvelle Mme Glide passa le seuil de la maison, un jour de canicule. La première chose que Razia aperçut fut un nez crochu, dépassant d’une poitrine disproportionnée. Des gouttes de sueurs s’égouttaient et s’écrasaient sur la tunique trop serrée de la bonne femme. Elle posa ses deux valises, provoquant deux tremblements de terre. Elle tourna ensuite son regard de prédateur sur Razia, dévoila une dentition à moitié finie et prononça ces mots glacés :

« On n’embrasse donc pas sa nouvelle môman, Raziakin ? »

AN 995

Ils étaient seuls à l’étage, Razia et son nouveau petit frère, Otlah. Les parents étaient en bas. Elle devait le surveiller. Razia s’approcha du berceau. Laid. Un misérable insecte, incapable de se tenir sur ses pattes. Pourquoi avait-il droit à sa maman, lui ? Mme Glide, était « fatiguée », mais bien vivante. C’était injuste. La jeune fille détestait ce monstre, donnant ordre sur ordre. « Cuisine, nettoie, ne court pas, ne crie pas, ne parle pas, ne murmure pas, ne regarde pas les adultes comme ça, ne pleurniche pas chez ton père, ne nous dérange pas, n’approche pas. » En bref, n’existe pas. Pourquoi ce serait à elle de ne pas exister ? Depuis que Oltah était venu au monde, l’équilibre fragile qui régnait avait été brisé. Son père se mettait à la réprimander, Mme Glide criait sans cesse et pleurait de nerfs. Tous leurs maux provenaient de cet être, face à elle. Oltah se réveilla. Il braillait à mesure que Razia approchait. Ce misérable insecte n’avait qu’à disparaître. Délicatement, Razia approcha ses petites mains menues à son cou. Aucune expression, émotion ne l’envahissait ni haine, ni tristesse, ni folie. Elle voulait juste tuer un insecte. Ses mains empoignèrent la ridicule tête, elle serra. Le petit hurlait à la mort. Une seconde, cinq secondes, dix… Un cri perçant. Razia se retourna, lâcha sa proie. Mme Glide, à l’entrée de la chambre, s’égosillait à en faire fuir un Jinda. La femme se précipita vers sa chair.

Oltah n’avait rien.

AN 998

Razia, faisait ses valises, Fuli pourchassait un cafard. Ce n'était plus une jeune recrue désormais et... Hm ? Comment en étions-nous arrivés là ? Après « l’affaire Oltah », Razia fut envoyée à la caserne militaire. Dernier recours pour un père dépassé et une Mme Glide qui la détestait. Les communications furent coupées. Elle n’osa pas insister. Soupir. À vrai dire, elle avait à peine travaillé son pouvoir ou plutôt sa malédiction. Elle ne comptait plus jamais l’utiliser. La force de ses bras, son maniement de l’épée devraient suffire. L'affaire Oltah coulait dans son sang et la frigorifiait. Savait-il qu’elle existait ? Était-elle la mécréante qui avait voulu l’assassiner ou se pensait-il fils unique ? Son père allait-il bien ? Mme Glide avait-elle eu d’autre morveux ? Ses questions l'angoissaient.

Durant les quatre années passées à la Caserne, les seules pensées qui l’avaient assailli furent : « j’ai mal, j’ai faim, j’ai soif, j’ai sommeil ».  Ah et : « j’espère que ce connard de piaf, n’a pas fait de connerie », aussi. La morve au nez, le jour du départ, elle avait réussi à cacher Fuli dans une valise trouée (bien légère pour le coup). Sa chance ne s’arrêtant plus, écopant d’une chambre individuelle, elle n’avait pas eu à négocier le silence d’un camarade. Bon, elle avait du mal à expliquer les meubles rongés et son étrange manie de ramener discrètement (ou pas) des restes avec elle… m’enfin… ces temps-là étaient révolus, arborant fièrement sa plaque luisante et son grade risible, elle avait bouclé le tout et rejoint les gardes.

V

AUJOURD'HUI

Aujourd’hui, la fougue a dépéri. Elle a peur de retourner voir sa famille, a une vie sociale basé sur le « oui, chef ! » et les pleurs nuptiaux pour lui tenir compagnie. Monter des grades lui paraît insurmontable et elle peine toujours à utiliser son pouvoir. Dans l’équipe, c’est un peu le boulet, la (excusez-moi donc) : connasse. Elle veut absolument suivre les ordres, appliquer les règles et est toujours à l'affût d'une erreur. On la fuit comme la peste, puisqu’elle rapporte tout au supérieur avec un sourire mesquin. Elle ne part même pas se bourrer la gueule après. Bref, une briseuse d’ambiance.  Si au moins égale était douée... Mais à part faire la morale aux autres avec sa poule qui la suit quasiment partout où elle va, elle ne risque pas d’évoluer de grade maintenant. Maladroite, facilement stressée, elle se laisse dépasser par les évènements et a dû mal à gérer les plus ridicules situations. Elle parle rarement de son pouvoir, mais des rumeurs circulent sur elle, son passé, sa maîtrise. Elle est dangereuse, c'est la conclusion qu'ont tiré ses supérieurs. Voilà comment elle s'est retrouvée au Village Perché comme cadeau de dix-huit ans. L’abomination, le retour.