La calèche ralentit dans un crissement témoignant de la fatigue des roues qui la portaient, avant de marquer un stop complet. La porte s'ouvrit pour laisser sortir un jeune homme hâbleur, qui tenait un bouquet de fleurs colorées dans une de ses mains.
- Merci, mon brave, dit-il en se retournant vers le cocher avant de lui donner un pourboire beaucoup trop maigre comparé au prix des fleurs qu'il tenait dans son autre main.
Sans plus de cérémonie, il passa le portail de la maison devant laquelle il venait de s'arrêter. Valente s'annonça au majordome avec son habituel air enjoué, en déposant son épée dans le présentoir prévu à cet effet, près de l'entrée. Après une brève inspection, le garde lui demanda simplement de patienter. Même s'il était un invité familier, on n'entrait pas comme ça dans la demeure d'une personne aussi importante que la Trésorière.
Le personnel le connaissait assez bien, depuis le temps, pour l'avoir vu entrer et sortir régulièrement, et parfois à des heures tardives.
Le fait que Valente partageait occasionnellement le lit de la trésorière était un secret de polichinelle ; mais aux yeux du personnel, il n'était qu'un homme de plus dans le défilé perpétuel des amants de Queen. Il n'en avait que faire, à vrai dire. Lui même n'était attaché à personne (enfin, jusqu'à ce que ses parents se décident à lui coller une fiancée, mais Lucy soit louée, ce jour n'était pas encore venu) et vivait selon le même credo qu'elle : profiter du jour présent.
Aujourd'hui il ne venait pas avec juste des fleurs, mais aussi avec les dernières rumeurs sur la cour du Grand Port. Elle en connaissait probablement déjà la moitié, de toutes façons. Les informations arrivaient beaucoup plus vite à la Capitale qu'au Grand Port, et Valente avait sans cesse un train de retard sur elle. C'était donc une excuse toute faite pour lui rendre visite en se mettant à jour des derniers ragots de la Capitale, une de ses activités favorites.
Voilà au moins cinq minutes qu'il patientait - un délai bien au-dessus de ce que Valente était capable de supporter, et le pied du jeune noble commença à taper nerveusement sur le sol sans qu'il s'en rende compte. Qu'est-ce qu'elle fabriquait ?
- Spoiler:
- Mademoiselle, Monsieur Fosca.
Elle mit un moment mais finit par lever les yeux de ses parchemins.
- Fosca ? Valente est ici ?
Le majordome hocha la tête.
- Je ne me souviens pas que nous ayons rendez-vous… Aurais-je oublié de le noter ? Elle passa un doigt sur son menton, pensive. La jeune femme avait la fâcheuse tendance d’oublier certaine chose en ce moment et cela l’agaçait au plus haut point. - Qu’à cela ne tienne, faites le patienter je vais descendre. Prépare nous de quoi passer un bon moment. L’ordre claqua dans l’air et la porte se referma. - Bien. Pas mécontente, Queen rangea ses papiers avec précaution puis nettoya rapidement sa plume avant d’aller faire un tour dans la salle de bain. L’une des choses qu’il était impossible d’ôter à la Milan était sa capacité à toujours être présentable. Peu importe l’heure du jour ou de la nuit. C’était pour des occasions telles que celle-ci d’ailleurs. Lorsque des visiteurs impromptus venaient lui rendre visite. Toutefois Valente n’était pas n’importe quel visiteur. En plus d’un bon ami, il était également un bon amant, Queen prenait donc toujours soin de l’accueillir correctement et de lui réserver d’autre surprise chaleureuses. Cette fois ne dérogerait pas à la règle.
S’observant dans le miroir elle soupira.
- Parfait. Dit-elle en prenant soin de dénouer ses cheveux, les laissant retomber en cascade dorée dans son dos. Après cela seulement, elle daigna quitter ses appartements et rejoindre son convive.
D’un simple coup d’œil, elle pu déceler l’impatience du jeune homme et cela lui arracha un sourire nonchalant.
- Te serais-tu mit aux percussions ? Dit-elle d’un ton hilare. - Cesse donc de taper du pied. Je ne suis pas en retard, tu es simplement en avance. En quelques enjambées elle franchit la distance qui les séparaient puis tendit la main pour caresser les fleurs avant qu’enfin son regard ne vienne rencontrer celui du roux. - Que me vaut la visite de cet éphèbe ? Aurais-je réussit à me rendre indispensable ? Elle éclata d’un léger rire puis l’invita à la suivre. - Nous allons passer dans le salon si cela ne te dérange pas. Non pas que je n’aime pas rester plantée comme un piquet… Se plaçant à ses côtés elle poursuivit. - Cela faisait longtemps que nous ne nous étions pas vu, comment vas-tu ?