Dès le repas terminé, nous nous sommes bien vite précipités à l’extérieur histoire d’écourter ce moment de malaise le plus rapidement possible Devon et moi. Je n’aurais pas du me sentir aussi gênée et même si mon père avait décidé de nous faire savoir que c’était très certainement des choses qu’il avait aussi faites dans son jeune temps, cela ne m’avait pas plus aidée. Enfin, je ne compte plus faire en sorte que ça se reproduise et cela attendra un moment où nous ne serons que tous les deux dans notre maison. D’ailleurs, nous avons décidé de laisser Nephalie avec Darius pour la simple et bonne raison que nous ne savions pas où nous allions puis ce dernier était encore jeune. Alors marcher sans arrêt en notre compagnie allait très certainement le fatiguer et je ne veux pas que ma journée soit interrompue par les caprices du petit dragon.

Enfin, dans tous les cas, je ne sais pas dire si je suis à l’aise de me promener sans me cacher dans cette ville. Je n’y ai jamais été la bienvenue, mais les gens changent et j’en suis la preuve vivante. Moi qui me cachais et refusais que les autres m’approchent, je me baladais main dans la main avec un homme que je connaissais depuis quelques mois seulement. D’ailleurs, bien que je ne veuille pas me faire remarquer, les citoyens présents semblaient nous observer d’un étrange regard. J’imagine que certains reconnaissent l’araignée que je suis et le fait que je sois accompagnée de Devon ne doit pas réellement les enchanter. Après tout, un paquet de muscle couvert de tatouage mesurant un peu plus de deux mètres de haut n’inspire pas réellement la confiance, non? Mais bon, je fais comme si de rien n’était, comme s’il n’y avait que nous deux sur ces plateformes. Je lui parle des endroits que nous pourrions visiter et je dois dire que jamais je n’aurais imaginé que nous finirions tous les deux dans la grande bibliothèque.

Sans même me laisser le choix, il m’entraîne à sa suite nous faisant ainsi pénétrer les grandes portes qui étaient ouvertes au public. « Et qu’est-ce qu’un grand gaillard comme toi irait faire dans une bibliothèque? » Après tout, j’ai du mal à l’imaginer assis tranquille à tenir un bouquin entre ses mains. Ce n’est pas du tout son genre ni le mien. Donnez-moi un couteau et une branche et je vous en ferai une arme, mais donnez-moi un livre et je l’utiliserai pour me tenir au chaud si vous voyez ce que je veux dire. Puis il faut dire que je n’ai pas eu de précepteur pour poursuivre mon éducation alors je me débrouille à la lecture, mais me demander pas de vous le lire à voix haute.

Première chose que je note lorsque nous entrons, c’est l’odeur de renfermé qui m’assaillit les narines. L’odeur des vieux bouquins et des vieilles reliures en cuir me chatouille le nez. Rien à voir avec la forêt. Du coup, ne sachant pas ce que ce dernier recherchait, je ne peux ni chercher le bibliothécaire ni chercher dans les rangées pour lui. En fait, ce dernier semble nous avoir entendus arriver et semblait surpris de nous voir ainsi main dans la main. Après tout, la bibliothèque n’était certainement pas le premier lieu pour un rendez-vous entre amoureux, non? Il s’approche de nous silencieusement, replace ses petites lunettes rondes sur son nez et nous regarde en plissant légèrement des yeux.

« Mmh, ouuui? Comment puis-je vous aider? » dit-il en parlant légèrement du nez.

Je bats des paupières un nombre incalculable de fois me retenant par la même occasion pour ne pas me moquer de ce pauvre homme qui n’avait certainement pas choisi d’avoir cette drôle de voix.

« C’est pour monsieur ici » que je dis finalement en déposant ma main libre contre son bras.

Je sens le regard accusateur de Devon sur ma personne  alors que je tente de me contrôler pour ne pas éclater de rire bien que ce ne soit pas tout. Sa main se fait plus pressante contre la mienne – petit avertissement pour m’aviser que je ne dois pas rire – et j’inspire profondément avant de répondre à la question du responsable. Si nous sommes ici, c’est pour lui et non pour moi et contrairement à moi, ce dernier possède un excellent contrôle de sa personne. Il fait montre d’une politesse hors pair qui n’a rien avoir avec mes propres manières et questionne finalement ce cher monsieur sur ses intentions. Est-ce que la bibliothèque possédait des livres recensant divers alcools. Je dois dire que je suis surprise et je tourne la tête vers ce dernier. Bien évidemment l’homme ne cherche qu’à faire son boulot et se détourne de nous pour aller vérifier les registres ce qui nous laisse tous les deux seuls.

« En effet, ce n’est pas l’endroit rêvé pour un rendez-vous romantique, mais j’imagine que tu as tes raisons et nous sommes plus des gamins… » Bon bien évidemment je cache tout de même ma déception, parce que notre relation est tout de même naissante et s’il profite de ce genre de moment pour faire le rat de bibliothèque je ne peux pas nier que cela a un goût de trop peu? Enfin, je ne sais pas comment l’expliquer, mais bon.

« Je suis sûre que si on se fait discret, entre-deux ranger de livre tout au fond du bâtiment, y’a moyen de rendre le tout romantique! »

Je tente de garder mon sérieux, malgré le sourire qui s’était dessiné sur mes lèvres, mais je ne le regarde pas. Si je le fais, c’est là que je flancherai. Bref, si vous n’aviez toujours pas compris, c’était une plaisanterie. Je ne ferai jamais ce genre de truc en public puis nous allons nous garder une petite gêne, n’est-ce pas?

« Bref, tu te feras pardonner une prochaine fois. »

C’est après ses mots que l’homme revient finalement vers nous pour nous annoncer qu’il avait bien ce que Devon recherchait. Il nous donne les indications, quelle ranger prendre et dans quelle section nous allons les trouver. Bien évidemment, il nous précise tout de même de rester le plus discret et silencieux possible puisque nous ne sommes pas les seuls en ce lieu. Je ne sais pas ce que je vais faire pour ma part, mais tant qu’à être ici, autant améliorer mes connaissances sur la flore de la forêt, non? Du coup, je m’excuse auprès de ce dernier et lui demande où je pourrais trouver les livres sur les plantes en général et me donne rapidement les indications. Il s’avère que ce que je recherche est bien plus demandé que l’alcool et les spiritueux.

« Je vais chercher de mon côté, on se rejoint à une table, ça te va? Tu me diras par la suite ce que tu cherches dans ce genre de livre. »

Pas vraiment le choix en réalité et je ne pense pas qu’il ait besoin de moi à moins qu’il doive grimper bien haut, mais des échelles sont mise à notre disposition, quoi qu’avec son bras, cela sera bien difficile de redescendre un bouquin en main. En tout cas je me dépêche et vais chercher mes livres avant de ne prendre place à une table libre. Je dois dire que j’en prends au moins deux, histoire de ne pas avoir à me relever inutilement et m’assure de prendre des livres ayant des dessins histoire de pouvoir reconnaître plus facilement les plantes.

Aucune réaction de sa part lorsque je lui mentionne qu’il suffit d’être un peu plus discret? J’ai envie de lui jeter un regard, afin de voir sa réaction, mais je ne dois pas bien que son silence en dise déjà bien long. Il hésite à savoir si je suis sérieuse ou pas, je le sais. Je le connais en fait et je me connais parce que bien que j’aille mentionner qu’il s’agissait que d’une connerie, je suis du genre à aimer la provocation et même si cela peut paraître osé à ses yeux, moi j’adore. Cela m’amuse et s’il embarque c’est encore mieux! Alors le savoir hésitant me fait jubiler de plaisir. Enfin, mais nous sommes tout de même dans une bibliothèque, n’est-ce pas? Ce n’est clairement pas le lieu par excellence pour ce genre de petit jeu, alors je préfère mentionner qu’il n’a qu’à se rattraper une prochaine fois. Mais bon, bien que je suis un peu déçue, je le cache quand même bien. Autant en profiter et chercher aussi quelque chose de mon côté.

Bien évidemment, ce dernier embrasse mon front alors que je pose finalement mon regard sur son visage souriant. Comment puis-je en vouloir à cet homme lorsqu’il me regarde de cette façon? Je fonds à chaque fois et je sais que cela pourrait vous paraître un peu gnyagnya, mais c’est tout de même ma première relation sérieuse. Je ne suis pas habituée à ce genre de chose, ni même à toute cette attention. C’est le premier homme à vouloir réellement de moi à ses côtés et non simplement essayer de tester ce que cela ferait avec une femme telle que moi? Pourtant, mon anatomie ne change pas réellement. Je dois faire plus attention avec mes griffes et mes dents, mais sinon, ma peau mise à part sa couleur étrange, n’a rien de différent. J’imagine que le reste sous la ceinture l’est aussi, enfin je l’espère. Faudrait peut-être que je demande à Devon? En tout cas il ne m’a rien dit sur ce point et semble plutôt bien se débrouiller… Bon, je m’égare n’est-ce pas? Et si nous retournions à nos moutons?

« T’es mieux! » que je lui chuchote accompagné d’une grimace avant que l’homme ne revienne avec les informations demandées.

On se quitte chacun de notre côté, puisque j’ai demandé aussi des informations par après et rejoint finalement une table avec deux bouquins en main. Toutes les deux parlent de la flore en général, mais l’un semble plutôt les séparer selon leur habitat naturel. Puis il y a des dessins, c’est bien les dessins! Enfin, je suis donc la première installée à la table et Devon ne tarde pas à me rejoindre s’installant finalement devant moi. Et c’est après tout ce  temps qu’il me répond enfin. Je l’écoute et ne sais pas si mon expression change en ce moment, mais je pousse un léger soupir avant d’ouvrir l’un de mes bouquins et d’appuyer mon coude contre la table tout en écrasant ma joue contre mon poing fermer.

« Je vois. » Que je dis sans rien ajouter.

Je vois surtout qu’il pense toujours au boulot et pourtant je ne devrais pas m’en fâcher, mais nous sommes tout de même en visite chez mon père. Le but était de faire un peu de tourisme, surtout pour lui, mais nous voilà à la bibliothèque pour des questions de boulot. Ça m’énerve, mais bon. Je ne peux pas lui dire. Il a tant fait pour moi alors je reste muette et commence à feuilleter mon bouquin cherchant avant tout dans les plantes et fleurs forestières. Je me mets un petit défi personnel, cherchant à mentionner la plante qu’il s’agit et ses effets avant de ne regarder son nom. Après tout, mon père n’a peut-être pas utilisé des termes exacts et y est allé avec sa mémoire.

Bien évidemment, mon silence semble l’avoir affecté pour la simple et bonne raison qu’il met de côté ses propres trouvailles pour faire je ne sais quoi. À vrai dire, je ne le regarde pas, mais je l’entends bouger et se pencher. Son ombre me gêne un peu, mais je ne fais comme si de rien était. Il doit essayer de comprendre pourquoi je suis ainsi et pourtant ça devrait être évident, non? C’est comme si quelqu’un qui prenait des vacances amenait le boulot avec lui. S’il avait été seul, ça ne m’aurait rien fait, mais là, je suis là. Peut-être que vous pouvez voir cela comme un caprice, mais voilà. Il aurait pu me demander si cela me dérangeait, non? Du coup, je fais comme si de rien était et poursuit mon petit jeu jusqu’au moment où ce dernier se met à tousser devant moi.  Je ne lève que les yeux vers lui, le voyant finalement les bras croisés avec son air sérieux? Je hausse un sourcil cherchant à comprendre puis il se met alors à me parler.

Il a pris le temps de réfléchir aux paroles de mon père? Lesquels? Enfin, si cela concerne la taverne il parle certainement du fait qu’il lui faudrait des employés pour gérer lors de ses absences. Enfin, bien évidemment, je ne le coupe pas et l’écoute parler. Je croise mes bras sur ma poitrine et m’appuie contre le dossier de ma chaise. D’une vue externe, on pourrait croire que je suis fermée à la discussion ce qui n’est vraiment pas le cas. Je suis tout ouïe et je n’attends que la suite. Bien évidemment, mon inactivité niveau boulotte crée un certain problème dans l’équation. Si je ne travaille pas, cela fait des cristaux en moins et même si je devais travailler pour lui, je ne serais pas réellement salariée. Seulement, nous pourrions traiter plus de commandes rapidement et avec un bras en moins, il ne dira certainement pas non à ce coup de main. En sommes, si nous sommes ici aujourd’hui, c’est que ce dernier cherche à créer et embouteiller des alcools qu’on ne trouve qu’à de très rares endroits, soit devenir le monopole de ces boissons afin d’attirer de la clientèle. S’il augmente ainsi les profits, il pourra certainement payer quelqu’un pour venir y travailler quand il sera occupé à la maison avec moi et l’enfant que nous aurons. Bien évidemment, c’est un projet sur long terme puisque le bébé n’est pas pour maintenant.

Comment voulez-vous que je reste fâchée contre lui quand je vois qu’il fait cela pour avoir un avenir avec moi sans avoir à se battre entre le boulot et la famille. Je pousse un soupir, laissant tomber mes bras mollement de chaque côté de mon corps et la fixe finalement en prenant un air coupable.

« Désolé… Je savais qu’il devait y avoir une raison, mais je ne sais pas pourquoi je me suis sentie aussi frustrée. Enfin, je ne peux pas rester fâchée quand j’entends que les raisons qui t’ont poussé à venir ici sont pour le futur de notre famille. »

Je me rapproche alors de la table cherchant à attraper sa main que je caresse doucement de la mienne et lui souris.

« Tu as amené de quoi prendre des notes au moins? Sinon, je vais voir le bibliothécaire et j’en profite pour passer au petit coin, parce que ça fait depuis qu’on est arrivé que je me retiens. »

Je ne sais pas ce que j’ai d’ailleurs depuis un moment, mais j’ai l’impression que je dois toujours aller aux toilettes. C’est fou!  Pourtant je ne bois pas plus d’eau qu’à l’habitude, puis sans compter que des brûlements d’estomac depuis ce matin. C’est peut-être pour ça que je ne me sens pas très bien et que je réagis aussi mal pour un rien?

Je m’excuse auprès de ce dernier, puisqu’il s’agit de la meilleure chose à faire. Je ne suis plus une enfant et lui montré une attitude vexée que je viens de le faire n’a rien de très mature. C’est même plutôt froid et je m’en veux alors je fais ce qui me semble juste. Je m’approche de ce dernier cherchant un contact physique avec sa main afin de sentir sa douce chaleur se répandre dans ma main et je lui souris par la même occasion. Bon, bien évidemment, nous ne sommes pas là pour nous faire les yeux doux, bien que j’aurais préféré cela, mais bon. Il avait du pain sur la planche et semblait déjà en possession de matériaux pour prendre quelques notes. Du coup, je m’autorise donc une petite pause pour me rendre à la salle de bain, laissant donc mon livre ouvert sur une page parlant d’une fleur bien spéciale à l’apparence fort jolie. Cette fleur, la sevragea laiteuse, n’était pas blanche comme neige ce qui pouvait parfois mélanger les gens lorsqu’il en cherchait une. Bien évidemment, cette dernière avait une particularité bien spéciale. Même si elle était très jolie, elle avait la capacité, avec une simple goutte de sang, de faire repérer les hormones de grossesse d’une femme. Elle était très utilisée dans le domaine de la médecine. D’ailleurs, je me souviens en avoir vu à quelques reprises, mais jamais je ne me serais doutée de son utilisation.

Bon, ce n’est pas tout, mais je dois aller au petit coin! Alors je me lève, questionne l’homme responsable qui me fait savoir où me rendre, je fais ce que j’ai à faire et quand je reviens, mon livre n’a toujours pas bougé et Devon semble absorbé par sa propre lecture. J’essaie donc de me faire assez discrète, bien que j’aille l’impression qu’il fait plus froid que tout à l’heure? Je ne sais pas dire s’il s’agit de moi ou simplement de la température, mais dans tous les cas, nous sommes tout de même à la fin de la première lune de la saison chaude. Nous sommes bien loin de voir apparaître les flocons blancs annonçant l’arrivée de la terrible saison froide! D’ailleurs, plutôt que de m’installer en face de lui, je pousse doucement mes livres de l’autre côté et replace la chaise sous la table, histoire qu’aucun passant circulant dans l’allée ne s’y prenne les pieds. Je tire donc la chaise à ses côtés et y prends place, me collant doucement à ce dernier. J’ai envie de le sentir tout près de moi, et je me sens d’humeur câline. Enfin, j’observe à ses côtés ce qu’il est en train de lire et je ne peux m’empêcher d’arquer un sourcil en voyant des recettes.

« C’est de l’alcool ou de la nourriture que tu veux préparer? » Que je demande en plaisantant à ses côtés.

Bien évidemment, je n’attends pas spécialement une réponse de sa part et je continue la lecture de mon côté. Cela me prend du temps, je dois l’avouer, car il arrive que je doive repasser plusieurs fois sur le même mot pour le lire comme il faut. Je suis une sauvageonne. J’ai eu la base, mais je ne l’ai pas réellement entretenue, alors si cela doit me prendre cinq minutes lire une page complète, qu’il en soit ainsi. Peut-être qu’il faudrait que je m’améliore sur ce point? Après tout, je vais avoir un peu plus de temps libre devant moi, maintenant que je n’ai plus à me garder en mouvement pour surveiller le périmètre de mon campement dans la forêt. Maintenant je suis bien tranquille, je dois l’avouer.

« C’est fou à quel point de si petites choses fragiles peuvent être si utile. Tu vois celle-là, elle permet à la femme de détecter si elle est enceinte ou pas. »

Je sais que mes déplacements sont des plus discrets par occasion, mais de là à ce qu’il sursaute ainsi alors que je m’assois à ses côtés. Il m’a même fait sursauter puisque je ne m’y en attendais pas. Les battements de mon cœur accélèrent un petit peu et je porte à ma main à mon cœur le temps que ce dernier se calme. Enfin, je pousse un petit soupir pour sortir l’excédent d’air et projette un regard sur son bouquin. Qu’est-ce qu’il est en train de lire? D’après moi, il s’est trompé de registre parce que ça ressemble bien plus à un livre de recettes. Bien évidemment je lui en fais la remarque, mais sa réponse me laisse perplexe. L’ai-je à ce point surpris? Levant les yeux vers son visage, je constate qu’il semble légèrement troublé. J’aurais pu me moquer de lui, essayer de le reprendre, mais je ne pense que cela soit nécessaire. Alors j’appuie doucement ma tempe sur son épaule en guise de caresse et je reprends aussitôt ma lecture en reprenant place devant ma place.

Je continue ma lecture concernant cette fameuse plante et je suis toujours émerveillée par ce que la nature nous réserve. Je ne peux m’empêcher d’avoir un sentiment de nostalgie lorsque j’y repense, mais voilà. Au moins, je suis avec quelqu’un qui m’accepte pour ce que je suis même si mon apparence en dérange plus d’un. Puis, je finirai bien par m’y habituer à cette grande ville.  Enfin, je parle de ma lecture à Devon à voix basse pour ne pas déranger les autres et ce dernier m’observe. À vrai dire je ne m’attendais pas à ce qu’il dépose ma main sur ma joue pour m’offrir son air de joueur. Si j’essaie de lui passer un message? J’ouvre grand les yeux et rougit malgré moi. Ce dernier se met à rire et le responsable arrive presque aussitôt pour gronder du regard mon aimé. Je secoue vivement la tête attendant que l’homme s’éloigne et je dépose le livre devant moi ouvert.

« On a dit qu’on attendrait non? Seulement, je suis tombée sur celle-ci en premier. Ce n’est pas ma faute si le hasard fait mal les choses. » Un sourire moqueur étire mes lèvres sombres et je finis par m’appuyer sur la table en regardant dans sa direction. Mon air change doucement, alors que ma main libre se glisse sous la table pour atteindre sa cuisse. « Par contre, je ne suis pas contre l’idée de me pratiquer à en faire si tu vois ce que je veux dire… » Je soulève par deux fois les sourcils avant de sourire à pleines dents. Bon cela suffit les bêtises! S’il veut m’en dire c’est qu’il est capable d’en prendre, puis en réalité même si nous avons dit que nous allions attendre, je ne possède pas cette fameuse bague contraceptive et je ne me souviens pas en avoir déjà vu une à son doigt. Alors si cela venait à arriver, ce sera tant pis pour nous.

Enfin, je reprends donc ma lecture pendant un certain temps, passant de plante en fleur et de fleur en herbe. D’ailleurs, bien de ses dernières semblaient être utilisées en cuisine, mais aussi dans des remèdes. Par exemple, l’estragon pouvait servir à aromatiser bien des plats même du vinaigre, et certains l’utilisent même contre les plaies empoisonnées. Je me souviens aussi d’un potage aux fines herbes que ma grand-mère avait l’habitude de faire de son vivant. Malheureusement, elle n’est plus de ce monde aujourd’hui et n’a pas pu me transmettre cette recette. Enfin, peut-être que l’une des sœurs de mon père la possède. Par contre, elle m’a appris à faire une salade fraîche délicieuse qui se fait rapidement. Bon ça y est, à force de parler de nourriture je commence à avoir faim et le grommèlement de mon estomac semble en accord avec mes pensées.

« Ça fait combien de temps que nous sommes ici? »

Pour quelqu’un qui n’avait pas envie d’être ici, je ne m’attendais pas à ne pas voir le temps passer cette façon.

Zut! J’ai manqué l’occasion d’user de ce collier magique qui nous lie tous les deux. L’homme qui me l’avait vendu m’avait spécifié que nous pouvions faire passer de nombreux messages par ce dernier, même si la plupart du temps il était utilisé pour signaler un danger. Après tout, n’importe qui aimerait savoir si tout ce passe bien pour son être aimé lorsqu’il est en voyage. Comme je ne suis toujours pas habituée de porter un tel bijou, je n’y pense pas. Enfin, me contenter de l’agacer par vive voix et de caresser doucement sa cuisse a bien valu sa réaction. Il a compris mon message subtil bien que ce n’était pas une invitation à reprendre là où nous nous étions arrêtés la nuit d’avant. Peut-être est-ce le fait de ne pas réellement avoir eu d’intimité tout le long de notre voyage qui nous a poussés dans les bras de l’un l’autre cette nuit, mais avec un peu de recul, je nous trouve bête et aussi nous n’avons pas pris assez en considération mon père. Que va-t-il penser de tout cela? Il plaisante, mais tout de même. Première rencontre et voilà qu’il nous entend pratiquer le sport de chambre. C’était terriblement gênant, mais je n’ai qu’à m’en prendre qu’à moi-même!

Bref, nous continuons de lire chacun de notre côté et bien que je n’ai pas de papier, j’ai tout de même une bonne mémoire et pour la plupart, je les connaissais déjà. Seulement, il est plaisant d’y mettre leur véritable nom par occasion, ainsi je pourrai communiquer plus facilement avec d’autre personne que je pourrai croiser lors de l’un de mes contrats. Le temps passe vite et mon ventre nous le fait savoir alors que je réalise que nous sommes ici depuis un bon petit moment. J’avoue ne pas avoir lu toutes les pages, mais j’ai pris mon temps. Enfin, je le demande tout de même et Devon semble avoir entendu le vacarme qu’avait fait mon estomac en plainte.  À vrai dire, cela sonne l’heure du départ et Devon fait un prêt promettant ainsi de ramener le bouquin dans un délai de trois jours. J’imagine que nous serons encore ici d’ici là. Après tout, j’aimerais profiter de la présence de mon père. L’aider, puis s’il a besoin d’un coup de main nous sommes là pour quoi que ce soit.

Sa maladie m’inquiète, même s’il ne le montre pas, mais pour le moment, Nemue a dit qu’elle était stable et que tant qu’elle ne voyait aucun changement drastique, il n’y avait pas de quoi s’inquiéter. Mais quand même, je ne veux pas le voir souffrir si jamais ça venait à arriver. Cet homme si fort et si têtu, je le connais et il ne demandera jamais d’aide même s’il devait ramper au sol pour se déplacer.

Je suis donc Devon jusqu’à trouver un petit café où nous nous installons. Il semble servir des repas et ça tombe bien j’ai faim! Du coup je regarde la carte avec envie, même si je ne m’attends pas à voir de très grosses assiettes. Enfin, le repas du jour semble être un risotto à la pintade accompagné de son lit de champignon sauvage. Mon choix n’est pas difficile, par contre, j’ai une envie de sucré alors je prends un jus de pomme chaud aux épices. La serveuse me fait savoir qu’ils font chauffé le jus avec du gingembre, de l’anis, du jus de citron ainsi que de la cannelle. Ça me semble bon? Enfin j’imagine, puis je dois dire que j’ai des envies étranges parfois, alors je prends!

Les breuvages nous sont apportés. Devon a pris un thé et je vois son petit mouvement de recul quand il se brûle un peu le bout de la langue et je ne peux m’empêcher de sourire alors que je porte moi-même mon breuvage à l’odeur délicieuse sous mon nez. Je prends une légère gorgée et ouvre grand les yeux. Mais c’est délicieux et ça semble si simple à faire! La douceur de la pomme est là et la chaleur fait en sorte que j’ai l’impression de goûter à une bonne tarte aux pommes bien chaude. Je reprends cette fois-ci une plus grande gorgée et me lèche les lèvres rapidement comme une véritable gamine.

«  Et bien, il y a toujours le parc qui pourrait être intéressant à visiter. On peut y voir bien des variétés de plantes et créatures. Sinon, la tour d’astronomie? Il parait que c’est un endroit bien, bien que de nuit ça doit être mieux pour regarder les étoiles. »

Un petit sourire malicieux se dessine sur mes lèvres signes que je vais encore dire une bêtise et je regarde subtilement de droite à gauche et je mets ma main sur la table pour faire avancer cette dernière avec deux doigts grimpant doucement sa main non loin de la mienne.

« Ou bien, il y une auberge, plutôt sympathique, qui éviterait que l’on dérange mon père… »

Je veux voir sa réaction, ça m’amuse. Bien que je plaisante, ou pas en fait, il sait que je suis bien provocatrice et s’il choisit la dernière proposition, il me fera plaisir de l’accompagner. D’ailleurs, je ne sais pas pourquoi, mais j’ai l’impression que cet appétit la semble plus fort qu’à l’habitude. Je n’en ressentais pas réellement le besoin, autrefois, mais maintenant que je suis avec Devon j’ai l’impression que de dire ce genre de chose. Est-ce une impression?  

Provocante je suis et je n’hésite pas. S’il s’agit de l’homme avec qui je vais partager ma vie, il lui faut bien s’habituer à ce genre d’invitation de ma part. Je ne passe pas par quatre chemins et ce que je veux normalement je l’obtiens, alors je ne vais pas attendre que le moment propice pour faire ce genre de chose. Pour moi, il n’y en a pas réellement, puis j’imagine que nous nous trouvons toujours dans cette phase lune de miel ou tout semble beau et magique et rien ne nous effraie. Nous ne passons pas aux conséquences de nos actes et je ne parle pas de crime ici. Puis j’imagine qu’être loin du travail et libre de faire ce que nous voulons aide à la chose.  Enfin, je fais donc une proposition tout autre à ce dernier tout en l’observant avec mon éternel sourire de charmeuse. Sourire que je lui réserve, puisqu’il est le seul homme avec qui j’ai agi de la sorte.  Enfin, j’attends sa réponse et ai droit à un petit secouage de sa tête ce qui me fait tout de même rigoler. Je dois le désespérer par occasion surtout que je me laisse bien aller aujourd’hui.

Ainsi donc monsieur se fait violence pour repousser mes avances? Peut-être que la prochaine fois sera la bonne, mais il ne s’arrête pas là. Je lui ai donné trois choix et il propose donc de faire les deux premiers pour commencer. Une visite du parc en premier lieu, découvrir l’écosystème local ainsi que sa faune qui normalement était habitué à la présence humaine. Il était donc possible de pouvoir caresser certaines de ses créatures. Malheureusement pour moi, celles-ci m’avaient toujours fuie, mais l’expérience pourrait être agréable pour Devon, autant en profiter alors que nous en avons la possibilité. Puis, il passe alors au sujet de la tour que nous pourrions visiter de nuit lorsque l’astre solaire déclinera pour être remplacé par sa consœur lunaire. Et pour terminer, le voir s’approcher ainsi de moi pour me murmurer dans un souffle qu’il y avait toujours moyen de passer un moment ensemble qui nécessiterait, cependant, de découcher de chez mon paternel me fit frissonner. Un sourire étira mes lèvres et je dois vous avouer que sur le moment, l’idée de me lever ainsi que lui prendre la main afin de partir en courant, m’était passée par la tête, mais voilà que la nourriture détourne finalement mon attention. L’odeur me fait déjà saliver et que dire de l’apparence de mon repas. Nous souhaitons le bon appétit, la demoiselle nous laisse alors seuls.

Je ne me fais pas prier et creuse alors dans mon repas à l’aide de ma fourchette et ferme les yeux pour profiter de cette première bouchée remplie de saveur délicieuse. Enfin, lorsque j’ouvre les yeux, Devon m’observe comme s’il attendait que je réponde quelque chose, bien qu’il précise que nous choisirons après avoir mangé.

« Il faut que je t’avertisse, mais je n’ai rien d’une séductrice.
Tu me connais bien plus provocatrice, voire même prédatrice.
Alors ce que tu me proposes n’est que délice.
Cela rend justice à mes caprices. »

L’idée de faire les trois ne me déplaisait pas pour tout dire et passer une journée complète avec ce dernier n’allait que nous faire du bien. Nous avions besoin de ces moments ensemble.

« Bien évidemment, je vais me montrer patiente, bien que je ne te promette de rester sage jusqu’à ce soir. » dis-je avec le sourire aux lèvres avant de porter de nouveau ma fourchette à ma bouche. Remplissant alors celle-ci de nouveau, je la dirige vers Devon, avec de grands yeux interrogateurs. Après tout, il n’est pas poli de parler la bouche pleine, alors j’essaie de lui demander à l’aide de langage corporel s’il veut goûter.