La jeune femme n'était pas très grande comme moi, elle aurait pu me ressembler les cicatrices en moins, mais la comparaison s'arrête là, pour le reste on était le jour et la nuit : moi timide et réservée, elle social et jovial, moi de grand cheveux blanc, elle noir
Je n'avais rien à faire ce jour-là, le dispensaire n'avait pas besoin de moi, j'en profitais pour aider un maximum l'aubergiste. Ayant eu récemment une mauvaise expérience dans une taverne en montagne, je me réfugiais dans la cuisine afin d'astiquer l'empilement de vaisselle sale qui ne semblait jamais vouloir s'arrêter de s'amonceler.
Une fois chose faite, je me servis un bol de thé bouillant avant de m'asseoir non loin de la jeune femme pour écouter par curiosité. Je frissonnais encore rien que de penser aux froids glacials des montagnes et à ces tempêtes aussi terribles que soudaine.
Sous le regard noir de l'aubergiste je me relevais, allant prendre une commande qu'il me tendait afin de l'amener à des clients récemment installés. Heureusement pour moi il était encore très tôt et à cette heure là l'auberge était presque vide. Le souvenir des poivrots me hantait encore.
Je me réinstallais, buvant rapidement mon thé avant qu'il ne refroidisse complètement, écoutant les aventures de la jeune femme souriante. Je me délectais de cette journée de repos après toutes mes dernières rencontres, un peu de calme était bienvenue.
Elle faisait mention d'une course contre un rapidodo, de mer déchaînée, de bateaux qui partaient vers le large d'autre qui revenaient, d'une jungle luxuriante, etc... Rêveuse, j'essayais de m'imaginer comme Raquel Murilo ou Siggy Haraldson vivant le jour le jour et pourchassant des monstres. Les enfants ponctuaient chacune de ses histoires par des « Oh »
Perdu dans mes pensées je ne remarquais son absence qu'au moment où la porte de la taverne se refermait. Je me levais d'un bond, avisant le tavernier me tendant un plateau chargé puis la porte. Mon choix fut vite fait, je m'éloignais sous les protestations de l'aubergiste. J'emboîtais le pas de la jeune, ne sachant pas trop comment l'aborder
Foutu timidité
Du moins c’était ce qu’elle avait pensé quand quelqu’un était rentré avec quelques gamins. Pourquoi les avoir menés dans une taverne pour ça? Elle n’en savait rien, toujours était-il qu’il semblait connaître le patron et que la ribambelle de marmots qui venait d’elle ne savait où ne semblait pas si dépaysée que ça par l’environnement un peu plus adulte, qui avait tout de même de quoi leur servir quelques jus de fruits ou autres sirops.
Bien vite, certains vinrent s’intéresser à celle qui n’était pas du tout une habituée et de fil en aiguille elle en était venue à conter quelques-unes de ses rencontres avec des tas de fourrure légèrement vindicatifs qui avaient voulu la croquer. Notamment un Solstice, une bête en général assez peu amicale. Et elle eut droit bien vite à tout un auditoire autour d’elle. Bon, puisque c’était des enfants elle devait un peu modifier et édulcorer ses histoires, chose qu’elle ne faisait pas en général. Son plus grand regret était peut-être qu’en tant qu’enfants, ils n’avaient vraiment pas grand-chose à lui apprendre. Pas grand chose d’intéressant en tout c as, si ce n’était des contes ou autres histoires qui n’avaient rien de réelles.
Elle ne s’attarda donc pas tant que cela dans le lieu, elle avait déjà réglé sa consommation et terminé sa tasse de vin chaud, alors elle finit par dire au revoir aux enfants, forcément un peu déçus qu’elle ne reste pas plus longtemps. Ils ne tarderaient de tout de façon pas à courir partout dans la salle quasi vide de tout de façon. L’aventurière quitta donc l’endroit, une fois ré-emmitouflée dans son manteau et ses gants.
Mais elle remarqua assez rapidement qu’elle était suivie, par une trogne qu’elle avait bien entendu remarqué dans l’auberge mais qui s’était tenue assez silencieusement à l’écart tout du long. Celle qu’elle avait deviné comme étant serveuse. Assez surprise de la voir partir avec elle. Violette se retourna donc, assez dubitative.
« Euhm… Salut! J’ai oublié quelque chose derrière? J’ai déjà réglé ma consommation, normalement! » se défendit-elle assez rapidement tout en vérifiant rapidement ses affaires. Que pourrait-elle bien avoir oublié derrière elle pour qu’une serveuse la suive ainsi silencieusement? Elle n’avait absolument rien sorti de son sac et elle était quasiment certaine qu’il était restait fermé. A moins qu’un des gamins ne l'ait ouvert quand elle était distraite, mais elle l’avait gardé dans sa ligne de vue la majeure partie du temps, question d’habitude.
« Attends, tu es bien serveuse là-bas, non? » demanda-t-elle ensuite en désignant rapidement la taverne qu’elle venait de quitter. L’aventurière était quasiment certaine qu’il s’agissait bien de la même personne. Mais à Aryon, on ne pouvait jamais trop en être sûrs. Si ça se trouvait, la blanche était juste partie vers le marché re-remplir les stocks de l’endroit avant l’heure de pointe...
Bien emmitouflée dans son manteau, la jeune femme ne semblais pas souffrir des températures saisonnières. Elle n'avait même pas passé deux rues que déjà elle se retournait vers moi étonné que je la suive, fouillant dans ses poches, se demandant si elle n'avait rien oublié.
Tout aussi surprise qu'elle, me demandant encore comment je pourrais l'aborder, je mis un moment à comprendre qu'elle me questionnait, sans compter qu'elle parlait d'une serveuse en désignant l'établissement derrière moi.
L'idée même d'être serveuse après les événements de la taverne en montagne me rebutait au plus haut point. Laissée les clients posés leurs sales pattes sur moi, jamais de la vie. Quelle horreure! Comment pouvait-on en arriver à accepter un travail aussi minable.
Moi ? Serveuse ?
Comment pouvait-elle imaginer une chose pareille ? J'aurais du lui en vouloir, il n'y a même pas une lune de ça, une simple question m'aurait mise en colère ou m'aurait fait pleurer, mais là rien à part du dégoût à l'idée de travailler dans une taverne. Je me surpris à sourire, tout heureuse de ce constat.
Oh ! Non ! Je travaille dans un dispensaire non loin d'ici.
En désignant la direction opposée. Toute joie disparue de mon visage comprenant que ce n'était pas la question qu'elle me posait, mais qu'elle voulait simplement savoir pourquoi je la suivais. Ma fierté d'avoir réussi à répondre à la question d'une inconnue sans bégayer ou pleurer s'envolât aussi soudainement qu'elle était apparue.
La jeune femme attendait encore une réponse satisfaisante, alors que mes yeux s'embuaient. Si je restais bloquée sur la réponse, j'allais certainement fondre en larme. Je l'avais suivie sur un coup de tête, voulant moi aussi vivre une aventure aussi palpitante que celles qu'elle venait de raconter
Je...Je voulais t'accompagner ! Voir toutes ces belles choses que tu racontais, les bateaux, la jungle, les différents villages, les bêtes monstrueuses.
En vérité je voulais surtout quitter la capitale, cette ville m'oppressait. Combien de fois je me faisais bousculer par un marchand bedonnant ou des ouvriers pressés, combien de fois mes patients n'écoutaient pas mes conseils et combien revenaient à cause de ça ? Ça faisait une dizaine de jours que je n'avais pas quittée la ville, j'avais besoin de sortir et l'occasion m'avait semblé trop belle.
Déconfite, je laissais perler quelques larmes avant de rajouter d'une voix basse et presque implorante :
Je ne veux pas rester en ville
Parlant de froid, elle remarqua un flocon tomber au coin de sa vision, suivi d’un autre puis d’une myriade de ceux-ci. La neige était fine, bien loin des tempêtes qu’elle avait pu affronter, et ces quelques flocons ne tiendraient sûrement même pas sur le sol de la Capitale. Pas encore, tout du moins.
Celle qui l’avait suivi la laissa pour le moins pantoise. Elle aurait juré pourtant de l’avoir vu sortir de derrière le comptoir de la taverne, et l’avait peut-être assimilée à une serveuse un peu vite. Une myriade d’émotions défilaient sur le visage et dans les mots de la jeune femme qui lui faisait face. Elle semblait encore plus jeune qu’elle, d’ailleurs, et semblait aussi avoir des rêves plein la tête. Elle finit même par laisser échapper quelques larmes devant elle, ce qui laissa l’aventurière encore plus désemparée.
« Ow, pas la peine de le prendre comme ça! Qu’est-ce-qui t’arrives? Des gens te font du mal ici? » demanda-t-elle alors, ne voyant pas particulièrement d’autres explications. Après tout de son côté c’était tout un mélange de circonstances qui l’avait faite partir à l’aventure dans une manœuvre fortement chaotique, mais au final, c’était pour suivre ses rêves. Elle ne voulait juste pas forcément que d’autres fassent l’erreur de se lancer dans un état de préparation largement insuffisant, surtout en plein hiver.
« Et puis, tu sais, j’ai condensé quatre ans d’aventure en une demi-heure, ce n’était vraiment que le meilleur et je suis passée sur tout ce qui était bien moins intéressant, voire pas intéressant du tout! C’était juste pour faire plaisir aux gamins avant tout, mais c’est bien plus complexe que ça. » précisa-t-elle alors dans un premier temps. Elle aussi avait pensé à la base que l’aventure était constitué de folles rencontres et aventures quotidiennes et d’événements extraordinaires, mais la réalité était bien loin de la fiction des livres. Au final, cela n’avait en rien émaillé sa passion et elle vivait toujours dans l’attente et l’expectative de nouvelles rencontres ou d’aventures folles, mais avait aussi apprit une certaine forme de patience…
« Notamment, partir sans équipement, ni vivres, ni habits de voyage adaptés, surtout alors que la saison froide approche, c’est vraiment la pire des idées! Mieux vaut se lancer à la saison douce, histoire de rassembler assez de cristaux avant la prochaine saison froide pour être bien équipé et avoir assez d’expérience pour passer la saison. » expliqua-t-elle alors, considérant qu’une fille de son âge méritait une explication bien plus poussée que les récits pour faire rêver qu’elle avait pu raconter aux gamins. Après tout, le monde réel était bien moins fait de grandes quêtes épiques et plus de petits boulots nécessaires pour payer l’équipement nécessaire, à, justement, ces grandes quêtes épiques. Et clairement, ce n’était pas Violette qui allait apprendre à quelqu’un à gérer ses finances, vu l’état désastreux des siennes. Clairement, elle n’avait largement pas de quoi acheter de l’équipement d’hiver en ce moment, pour elle ou bien pour une autre personne. Heureusement, elle avait gardé le sien de l’hiver dernier.
Je pensais à tous ceux que j'avais croisé depuis que j'étais arrivée dans la capitale, il y avait eu Loki qui m'avait accompagné jusqu'au Village perché, Niraen le druide que j'avais même croisé deux fois, Lisa la jeune garde qui m'avait secouru, Val un jeune vagabond que je ne comprenais pas très bien et Lulla une jeune hybride qui m'avait entraîner dans une folle randonnée en montagne, mais aucun d'eux n'avait voulu me faire du mal. Il y avait bien eu les deux hommes dans la ruelle, rien que d'y repenser, j'en avais encore la chair de poule, mais j'avais le pressentiment que ce n'était pas de cela dont elle parlait.
Je ne savais pas trop comment répondre à cette double question, car pour ça, il aurait fallu que je comprenne mes émotions, heureusement pour moi qu'elle enchaînait sur des explications que je n'écoutais qu'à moitié, réfléchissant à ce que je pourrais lui répondre. Je ne savais pas comment lui expliquer mon angoisse dû à la proximité avec quelqu'un, à moins que je lui raconte mon histoire, mais l'idée de partager mes souvenirs me rebutaient, je ne voulais surtout pas les revivre.
Moi qui pensais que la vie d'aventurière était palpitante, parsemée d'embûche et d'épopée héroïque, j'étais déçu par sa première tirade, je ne pouvais pas comprendre comment une vie sur les chemins pouvait être inintéressante. Je ne me souvenais pas de m'être ennuyée une seule fois quand j'errais seule dans la forêt. Je fus d'autant plus dépitée par la seconde, surtout que cette fois, je décelais une part de vérité dans ce qu'elle disait, d'autant plus depuis mon retour des montagnes.
Elle me fixait attendant une réponse qui tardait à venir, alors que dépitée comprenant que mes rêves, de sortir de la capitale venait de s'envoler, j'affichais un air las qui caressait la mélancolie. Attristée, relevant les yeux vers la jeune femme je la voyais me regarder, me rappelant soudain de sa question, à la quelle je n'avais toujours pas de réponse.
Je me détournais brusquement, manquant de justesse de rentrer dans un ouvrier qui me bousculât sans ménagement tandis qu'un second me poussât sans même un regard. Je reculais apeurée, me laissant glisser sur une caisse le long d'un mur, mettant ma tête entre mes mains afin de cacher mes yeux larmoyants.
Je... je...
Je voulais tout lui dire, tout lui raconter, me libérer de ce poids une bonne fois pour toute, mais je ne savais pas par quoi commencer, ni comment m'y prendre sans me mettre à pleurer ou en colère. Sans que je ne puisse rien y faire des larmes se mire à couler abondamment le long de ma joue et je finis par réussir à sangloter quelques mots.
J'en peux plus !
Alors qu’elle observait un peu interloquée la blanche, un mouvement brusque la fit se cogner à un passant assez baraqué avant que son collègue d’ailleurs ne la pousse sur le côté. Rien de bien grave, mais Violette jeta tout de même un regard sombre vers les deux hommes. Elle ne se laissa en rien déphaser par leur carrure impressionnante, elle s’était déjà battue contre pire, après tout. Mais elle n’avait aucune envie non plus de les provoquer et que cela finisse en bagarre pour si peu, surtout que les responsabilités étaient un minimum partagées dans ce qu’elle venait de voir.
« Pourriez être un peu moins brutaux, non? » siffla la brune d’un ton assez mauvais qui n’eut comme seule réponse qu’un grognement énervé qui ne la fit pas chanceler alors qu’ils continuaient leur chemin dans une indifférence complète. Elle les suivit du regard un instant, voyant qu’ils n’avaient apparemment pas le temps pour ce genre de conneries, fort heureusement, mais sans leur arracher la moindre politesse non plus. Elle soupira doucement face à l’insensibilité de certains, reportant son attention sur la blanche qui s’était affalée contre des caisses.
Violette fronça légèrement les sourcils, pas certaine de bien comprendre. Le contact lui avait semblé particulièrement bénin et même malgré sa faible constitution elle avait eu droit à dix fois pire et s’en était tirée sans séquelles. Elle approcha tout de même, posant sa main sur son épaule.
« Hey, tu vas bien? Ils t’ont fait mal? » demanda-t-elle pour être sûre même si ses mots laissaient entendre que c’était autre chose. Des choses qu’elle ne pouvait évidemment pas deviner toute seule, et dont elle n’allait pas la brusquer non plus. Avait-elle un problème avec la capitale ou était-ce juste la société en général? Des manières de pensées assez étrangères aux yeux de Violette, mais qu’elle pouvait comprendre, dans une certaine mesure.
La jeune femme aux cheveux noirs me perturbait plus que tout ceux que j’avais croisé jusque-là. Elle avait l’air gentille et attentionnée, mais ses questions me déstabilisais au plus haut point. D’un côté, sa bienveillance me donnait envie de m’ouvrir à elle, mais le sentiment de vulnérabilité me laissait coi.
Je...
Je n’y arriverais donc jamais ? Si seulement Luz était là, elle m’aurait comprise du premier regard. Je m’en voulais de ne pas réussir à parler de ce qui me tenaient à cœur, c’est un point sur lequel je me devais travailler, qui s’est peut-être qu’à force la vie de citadine pourrait me plaire. Mon corps fut parcouru d’un frisson à cette simple pensée.
Je...
Par moments, je réussissais à canaliser mes émotions, pourquoi je n’arrivais pas à m’ouvrir à quelqu’un d’autre que Luz ? Si je lui déballais tout peut-être qu’elle voudras bien m’accompagner dehors, j’aimerais juste pour un moment ne pas sentir l’air vicié de la ville, l’air remplie d’odeur fétide de pisse, d’ordure et autre immondice que les habitants avaient l’habitude de jeter par la fenêtre.
Aller, je me lance !
Je...
Et voilà que j’éclatais en sanglots avant même d’avoir dit un mot. Que va-t-elle penser de moi maintenant ? Elle me devait rien, elle va sûrement repartir sans même un regard en arrière, me laissant seule ici. Que vais-je faire dans ce cas le tavernier devait m’en vouloir maintenant, il comptait sur moi et j’avais pris la fuite.
J’AIMES PAS LA VILLE
Oups, venais-je de crier ? Je jetais un coup d’œil embué de larme à la jeune femme, visiblement oui. Je me ressaisis, rouge de honte et continua en murmurant.
Je n’aime pas les villes, ils me font peur.
En désignant du menton des passants dans la rue
Je veux retourner dans la forêt, je voudrais aller voir l’arbre sacré, mais elle ne le voudrait pas.
Humiliée, dégradée, confuse, embarrassée, je me levais d’un bond, le visage écarlate et m’enfuis en courant jusqu’à la petite place entourée de verdure que le druide m’avait fait découvrir.
L’aventurière resta néanmoins plantée là, pleine d’interrogations, avant d’obtenir enfin une réponse. Une réponse qui la fit même reculer d’un pas avant d’hausser un sourcil en la voyant détaler à toute vitesse. Elle secoua légèrement sa tête. Elle était prête à lui donner des conseils si elle voulait aller dans un milieu plus sauvage mais la discussion n’était pas vraiment aisée pour elle.
Peut-être ce qui lui échappait le plus était pourquoi avoir choisi de travailler dans un dispensaire si les passants lui faisaient peur. C’était comme travailler dans un zoo en aillant peur des animaux, c’était un choix de carrière assez étrange… Mais soigner restait un noble métier, qui nécessitait tant de compétences que d’empathie même si la blanche semblait en déborder.
Haussant les épaules, Violette se dirigea à la suite de la blanche d’un pas rapide, pas des plus motivées à lui courir après. L’aventurière avait le temps, après tout, mais si elle décidait de fuir loin d’elle, ainsi en serait-il. Elle se retrouva assez rapidement sur une place de la capitale, presque un petit parc, un petit refuge de verdure au milieu de la pierre environnante. Un coin sympathique qu’elle connaissait même s’il était peut-être légèrement insuffisant pour s’isoler complètement de l’activité urbaine. Elle y retrouva d’ailleurs la blanche, qui s’y était arrêtée.
« Ah, tu es là. » nota-t-elle simplement en revenant, n’insistant pas si elle voulait rester seule d’ailleurs. Elle n’aurait qu’à continuer son chemin.
« Mais pourquoi tu n’irais pas déjà au village perché? Ou bien la forteresse ou encore l’archipel? Il y a des zones assez isolées là bas et largement le confort pour y vivre. Et puis je suppose qu’il y a toujours besoin de soigneurs un peu partout. Et puis, qu’est-ce-qui t’empêche d’aller à l’arbre perché? » déclara-t-elle d’ailleurs comme une proposition. Ce serait déjà un premier pas, s’éloigner de la capitale. Il y aura bien plus de gens capables de se débrouiller en pleine nature et capables de l’aider aussi, d’ailleurs, dans ces endroits.
« D’ailleurs, même dans les différentes branches de la guilde des aventuriers, les soigneurs sont les bienvenus. Après tout, c’est plus que nécessaire dans les zones plus dangereuses du Royaume. » déclara-t-elle ensuite. Et c’était en général la guilde qui payait pour ces gens là, même si c’était rarement des professionnels, ils étaient assez doués pour rafistoler les blessures et les fractures inhérentes au métier. Et puis cela permettrait aussi de récupérer beaucoup d’autres connaissances.
Je sanglotais tristement, assise sur le banc, où Niraen m'avait apprit à utiliser la Phume en poudre. Je repensais à tout ce qui s'était passé depuis que j'étais arrivé dans la capitale, beaucoup de belles rencontres et quelques autres bien moins agréable. Le banc de pierre était froid et humide, mais le souvenir du druide me réchauffait le cœur.
La jeune femme aux cheveux noirs m'avait retrouvé, j'étais contente de la voir se rapprocher de moi. Je savais très bien pourquoi je restais à la capitale, j'espérais de tout cœur rencontrer Luz par hasard et c'est bien ici dans cette ville que j'aurais le plus de chance de l'apercevoir.
Je_J'ai promis à une amie, je ne peux pas sortir seule.
Je baissais le regard contrit, Luz avait tellement eu raison de me faire faire cette promesse, trop souvent j'avais eu envie de retourner vivre dans la forêt. Oui elle avait raison, je pourrais facilement trouver du travail ailleurs, mais si je m'éloignais de la capitale j'aurais beaucoup moins de chance d'espérer la croiser.
À sa dernière tirade, je relevais la tête, les yeux brillants d'espoir. Moi qui pensais que je ne pouvais pas rejoindre la guilde, j'avais espéré qu'elle m'accompagne quelque part, mais devenir aventurière serait encore mieux.
C'est vrai ?
« Si sortir seule est le souci, il suffit d’intercepter un convoi marchand qui quitte la ville, certains n’ont rien contre le fait de voyager dans de plus grands groupes, même avec des voyageurs solitaires. De leur côté, un plus grand groupe dissuade d’éventuels bandits, et ils font en même temps profiter de leur protection à des gens. » expliqua-t-elle assez simplement, puisqu’elle avait déjà constaté cette technique quelques fois, même si elle ne l’avait jamais appliquée elle-même. L’aventurière avait toujours préféré avancer à son rythme. S’arrêter lorsqu’elle avait envie, accélérer lorsque rien d’intéressant ne se passait. Un luxe que ne pouvaient pas vraiment se permettre de telles expéditions. Mais c’était plus sa manière d’être qui posait problème ici qu’autre chose.
« Après je ne sais pas exactement comment cela se passe, mais les plus grandes branches de la guilde ont en général des soigneurs donc je suppose qu’il y a des postes à pouvoir. Des branches de la guilde plus petites en auraient sûrement besoin aussi mais je serai bien incapable de te dire lesquels. Mais je suis sûre qu’à la Capitale on saura mieux te renseigner que moi à la Guilde même. » expliqua-t-elle alors, puisqu’elle n’était pas des plus concernées par ce genre de choses. Même si elle ne refusait un petit bandage mieux fait lorsqu’elle arrivait à se blesser, l’organisation et la logistique de la Guilde ne l’intéressaient absolument pas. Alors elle vivait sa vie.
Un marchand !
Apeurée, je regardais autour de moi heureuse de constater que la place était déserte et que nous étions seules. Je baissais la tête déconfite en entendant la suite de sa tirade. Voyager en groupe signifiait ne pas avoir d'intimité, il était hors de question que je voyage en groupe et encore moins avec un marchand.
Non pas un grand groupe !
Elle avait raison, je devais me renseigner auprès de la guilde si une soigneuse pouvait intégrer leurs rangs, mais ne sachant pas me battre, je n'avais que peu d'espoir de rejoindre leurs rangs. Même Luz savait se battre et je suis certaine que Niraen aussi, sans compter ses animaux qui pouvaient le défendre.
Juste toutes les deux ?
Je lançais un regard plein d'espoir à la jeune femme aux cheveux noirs, les yeux brillants tel un enfant qui attend une surprise. Toute guillerette, je me levais et allât lui prendre la main, comme je le faisais avec Luz petite pour lui signifier que j'étais prête à continuer la route.
« Du calme du calme...» commença-t-elle simplement à dire histoire de lui dire de ne pas trop s’emporter. Rien qu’en y réfléchissant quelques secondes, Violette voyait déjà plusieurs problèmes. Certes avec l’expérience des voyages et de la galère, mais ça ne se limitait pas qu’à ça.
« Vas pas partir vers le nord avant de savoir si tu as effectivement quelque chose à y faire. Si tu veux rejoindre la guilde en tant que soigneuse, je ne peux pas faire grand chose de plus que t’indiquer le QG de la guilde à la capitale. Ils sauront te dire si ils recherchent des postes de ce genre - ou non - comme je te l’ai déjà dis. » expliqua-t-elle dans un premier temps.
« Ensuite, je n’ai ni le matériel pour deux personnes, ni les cristaux pour entreprendre un tel voyage. Surtout en plein hiver, il faut être bien équipé. » ajouta-t-elle alors. Son instinct lui disait qu’Aube n’avait ni le matériel, ni les économies nécessaires pour une telle expédition. Entre les vêtements, les vivres, l'équipement, et les nuits dans les auberges, ce n’était pas aussi offert que certains voulaient le faire croire.
« A vrai dire, je comptais me reprendre un boulot ici puis descendre en trouver plus vers le Grand Port où les températures sont plus sympathiques. J’ai un pass de téléportation d’ailleurs, tu pourrais économiser pour en prendre un si tu veux voyager rapidement loin de la Capitale. Du coup je vais sûrement aller à la guilde, si tu sais pas où c’est. » ajouta-t-elle ensuite. L’achat n’était pas donné, c’était certain, mais la chose était pratique. Contrairement à son pouvoir utilisé sur de longues distances, la téléportation ne la rendait pas malade pendant des heures après...
Oh ! Mais je veux voir l’arbre sacré de mes yeux et pas juste en image.
Travaillant en tant que bénévole, je ne recevais aucun salaire bien que le responsable me donnait quelques cristaux de temps en temps. Je sortais fièrement ma demi-douzaine de cristaux prête à les lui donner si ça suffisait pour payer les auberges durant le voyage.
Allez, s’il te plaît !
Je fis la moue devant sa mine récalcitrante. Je ne comprenais pas pourquoi elle ne voulait pas m’accompagner vers l’arbre sacré, je n’étais pourtant pas si peu équipé que ça ; j’avais mon droguet, et même quelques cristaux. Et petite, j’avais bien survécu seule à deux saisons froide, je ne voyais pas ou étais le problème.
Devenir aventurière, c’est voyager seule, je ne peux pas, j’ai promis.
Je ne peux pas sortir de la ville seule, j’avais promis à Luz de ne pas le faire bien que ce ne soit pas l’envie qui m’en manquait. Et de toute façon, jamais je ne pourrais devenir aventurière, je savais qu’ils devaient se défendre contre toutes sortes de créature jamais je ne serais capable d’en blesser une. Il y a quelques semaines avec Lulla, j’avais tremblé de peur quand les wargs nous avaient attaqué et je ne parlais même pas de savoir me battre.
Je ne peux pas, je ne sais pas me défendre et je ne pourrais pas faire de mal à quoi que ce soit.
Un pass de téléportation, ça pouvait effectivement être une bonne alternative, j’en avais déjà entendu parlé et je ne quitterais même pas vraiment la ville. Le problème, c’est que j’étais bénévole, jamais je ne pourrais m’en acheter un.
Le grand port ? Oh ! Je peux t’accompagner dans ce cas ?
Je pourrais voir la mer et les bateaux, j’en avait vu tellement de représentation dans les livres que je voulais voir ça de mes propres yeux et pourquoi pas monter dans l’un d’eux aussi. Et on m’avait raconté que l’eau de la mer n’arrêtait pas de bouger, j’avais du mal à imaginer une eau qui bouge sans arrêt et les images fixes des livres ne le montrait pas.
Certains considéraient souvent l’aventurière comme étant immature, et sûrement à raison vu comment elle agissait par moment. Mais du coup c’était vraiment surprenant de se retrouver dans une position où c’était elle qui avait pour une fois le plus de sagesse et de bon sens. Mais cela ne voulait pas spécialement dire qu’elle savait ce qu’elle faisait.
« Je… écoute. C’est largement pas assez pour un tel voyage, il y a six jours de route entre la capitale et le grand port et six cristaux noirs suffisent à peine à se payer une bière, et encore, dans des auberges pas fameuses. » déclara-t-elle alors, espérant que le fait de réaliser six jours de route avec une si petite somme était très loin d’être suffisant.
« Bon, effectivement la guilde est peut-être une opération un peu ambitieuse pour le moment… » se corrigea-t-elle en se grattant l’arrière du crâne. Elle ne savait pas se battre quand elle était partie mais ses six mois d’entraînement sous la direction de Lilith avaient, après tout, fait d’elle une combattante potable. Avec l’expérience ensuite, elle avait réussi encore à s’améliorer même si elle était loin d’être la plus efficace.
« Le mieux ne serait pas que tu trouves un travail te permettant de gagner des cristaux? Assistante d’un artisan ou dans un cercle de médecins ou de guérisseurs? Enfin, je ne sais pas vraiment quoi, mais il y a l’embarras du choix à la capitale. Et, avec des revenus, tu pourras ensuite voyager comme bon te semble. » avança-t-elle alors même si elle n’était clairement pas prête à partir dans une recherche d’emplois actuellement. Surtout si ce n’était pas pour elle. Violette avait déjà bien assez de mal à sélectionner les quêtes qui lui convenaient le mieux, alors de là à trouver un boulot à quelqu’un…
« Malheureusement, tu ne vas pas pouvoir, je pense. Sur la route, je n’ai pas les cristaux pour nous deux, et pour la téléportation, je doute que tu ais besoin de moi pour le voyage... » répondit-elle alors. L’aventurière n’était pas contre la charité, bien au contraire, mais surtout la charité bien placée. Donner quelques cristaux à des gens affamées ou dans le besoin ne lui posait aucun problème et c’était une activité qui ne lui était d’ailleurs pas inconnue. Mais dépenser ses cristaux pour assouvir un caprice de gamine n’était pas vraiment le genre d’utilisation qu’elle comptait en faire. Violette en avait, après tout, déjà bien besoin elle-même pour améliorer son matériel.
En l’entendant raconté ses histoires, j’avais pensé qu’elle voudrait bien m’accompagner quelque part histoire de me ressourcer même si ce n’était que pour quelques jours. La capitale m’oppressait, je me sentais à l’étroit entourée de toutes ces habitations, j’avais l’impression que les murailles de ville étaient des barreaux de prisons. La proximité avec les miens était étouffante et je la supportais de moins en moins.
Il se fait tard, je dois aller au dispensaire.
J'avais espoir de me sentir mieux dans un environnement qui m’était familier et ou je me sentais en sécurité. J’avançais la tête basse et le cœur lourd sans lancer de regard derrière moi. Si elle changeait d’avis, elle pourrait facilement me rattraper.
J’étais déçue par ses nombreux refus, je l’avais prise pour quelqu’un de gentil et compréhensif, mais je me trompais sûrement. J’avais peut-être même eu de la chance qu’elle ne m’ai pas agressée et voler ma poignée de cristaux. Bien que je n’avais aucune idée de ce que je pouvais en faire, entre l’auberge et le dispensaire, je ne manquais de rien.
Ma journée de congé se terminait et à mesure que je m’approchait du bâtiment, j’en oubliais peu à peu cette histoire, me remémorant les patients et les soins à leur administrer. Je ne voulais pas dormir à l’auberge ce soir, le patron allait sûrement encore m’en vouloir pour ce midi. Je me dirigeais vers les cuisines du dispensaire en sentant une odeur de brûlé. Je jetais un verre d’eau sur un torchon en feu me demandant pourquoi le cuisinier l’avait négligemment laissé comme ça.
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