Des festivités ne sont jamais une perte de temps depuis quelques années… Avec les famines annuelles, les pirates et les affres de la nature, il est bon de profiter de chaque occasion pour se réunir et faire une fête. La nouvelle année est une de ces bonnes occasions. La coutume voulant, nous n’avons aucune organisation pour cette célébration, chacun fait ce qui lui plaît et est libre de créer ce qu’il veut pour cette fête locale. Ladrim s’est parée de nombreuses couleurs, les champs entourant la petite ville se sont recouvert de nombreux stands plus ou moins grand. Même si la maison n’est pas à côté de la ville, les odeurs des multiples stands de nourritures nous arrivent aux narines. Mère et père ne sont guère friands de ces instants au milieu du peuple de l’Ile Centrale, mais moi, j’adore ces moments où personne ne se préoccupe de mon statut. Habillée d’un épais manteau de laine blanche pour résister au froid de l’hiver, et ses quinze minuscules degrés, je déambule au milieu de la ville. J’adore regarder les décorations mise en place par chacun. En passant près des champs, la gourmandise m’a poussée à acheter des noix caramélisées à l’odeur alléchante pour caler mon estomac le temps d’attendre une heure raisonnable pour manger.
Peu d’étrangers viennent sur les îles à cette époque de l’année alors quand un continental se promène sur l’île, on ne peut pas le manquer. Surtout quand cet étranger possède de grandes ailes bien visibles et surtout une troupe d’animaux très actifs et pleins d’énergies. On peut dire que cela met une ambiance supplémentaire dans la rue. On n’a pas souvent l’occasion de voir tant d’animaux regroupés aux mêmes endroits, les habitants n’ont que peu d’animaux, juste de l’utile comme des chats et des chiens pour chasser les nuisibles ou des animaux de ferme.
Mais même sans ça, l'hybride ne passait pas franchement inaperçu, vu la ménagerie qui l'accompagnait! Et vu ses attributs aussi, entre ses immenses ailes rousses, certes repliées mais quand même visibles si on le voyait de dos ou de côté, sa queue et ses oreilles mobiles de la même couleur, et les bois de quelques centimètres de haut, on l'aurait remarqué même sans la catosor désormais presque de la taille des suikys de l'élevage - bien que Yami ne soit pas là pour servir de comparatif de taille - le grand rapidodo bleu l'accompagnant et évidemment le jeune ribec blanc au plumage encore juvénile perché sur ses épaules. Et ça, ce n'étaient que les animaux visible, restait un dernier petit timide caché dans une des poches du druide.
Soucis... Si Zemir ne posait pas vraiment de soucis, observant calmement les alentours de toute sa hauteur de rapidodo sans être impressionné par le monde, et que Talja, bien que plus curieuse et téméraire qu'avant et osait se décoller des jambes du dresseur pour aller renifler et observer les alentours sans néanmoins trop oser s'approcher des gens, il en était complètement différemment pour Likva. Le petit ribec piaillait sans cesse, posant des questions, faisant des commentaires sur tout ce qu'ils voyaient, et remarquant une odeur sentie par la catosor grâce à leur télépathie commune via Niraen, il sauta sur le félin pour demander à s'approcher d'une jeune fille avec un sac contenant un reste de noix caramélisées et, sentant l'intérêt de Zemir pour le contenu du sac, s'empressa de demander à la jeune fille le portant :
- Dis dis, Likva pouvoir en avoir aussi? Goûter! Et Zemir aussi! Vouloir!
Le vocabulaire du ribec s'étoffait rapidement, comme si parler était inné chez lui, mais sa capacité à former des phrases restait limitée, même si ça s'améliorerait sans doute un peu avec le temps. Niraen s'empressa de s'approcher, récupérant le petit familier blanc dans ses bras tandis que Talja osait timidement renifler l'odeur de l'inconnu et que Zemir approchait légèrement, restant derrière Niraen mais n'ayant besoin que de se pencher un peu pour observer l'inconnue et surtout estimer ce qui restait dans son sac de papiers. Niraen s'empressa de réprimander mentalement tout ce beau monde, leur rappelant qu'il fallait lui demander s'ils voulaient quelque chose et qu'ils n'avaient pas le droit de toucher quoi que ce soit sans permission.
- Pardon pour le dérangement! Il est très curieux...
- Et faim! Likva faim!
- Oui, j'ai cru comprendre, mais il ne faut pas importuner les gens comme ça!
Le druide se passa la main dans les cheveux, gêné, alors que le ribec continuait à parler, insistant pour goûter ce que la jeune fille tenait dans ses mains, et il finit par lui demander.
- Bon. Hum... Je peux savoir où vous avez acheté vos noix caramélisées?
C'est que l'odeur lui ouvrait bien l'appétit à lui aussi, qui avait peu l'habitude de manger ce genre de chose, surtout en voyage. Mais c'était une période de fête, alors pourquoi pas... Il faudrait sans doute qu'il trouve autre chose pour Talja, qui risquait de ne pas apprécier ce genre d'aliment, mais ce n'était pas une raison de se priver!
En tout cas, après rapide observation de la jeune fille, il eu l'impression qu'elle avait un teint un peu malade, et une odeur qui avait un côté atypique qu'il n'arrivait pas à nommer. N'ayant pas des sens aussi développés depuis très longtemps, il rencontrait encore nombre de nouvelles choses, et il y avait un truc ici qui le titillait, mais il était incapable de deviner quoi, et il serait sans doute impoli de demander, surtout vu le contexte de sa rencontre avec la jeune fille! Du moment qu'elle tenait sur ses jambes et n'avait pas l'air en souffrance, c'était l'essentiel.
Tu es bien curieux toi ! Et le s'il te plaît mon petit ?
Pas que j'en soit offusquée mais il faut inculquer les bonnes manières au plus jeune âge sinon où irait le monde. Mais c'est tellement amusant que je peux bien leur donner une petite noix à chacun. Juste une parce que mine de rien, il ne faut pas abuser du sucre. Mais avant que j'ai le temps de donner les noix, leur propriétaire vient les sermonner et surtout s'excuser du comportement de ses familiers. Je pouffe de rire lorsque le petit rapace blanc exprime sa grande faim, rapidement suivi d'une interrogation de l'homme.
Ce n'est pas grave, c'est toujours agréable de rencontrer de nouveaux visages. Tenez, prenez ce qu'il reste, il serait mauvais pour moi d'abuser par gourmandise. [/color]
Je récupère le paquet dans mon sac et le tend au jeûne homme aux grandes ailes. Ailes qui attirent invariablement mon regard.
Ils sont amusants vos familiers, nous n'en voyons pas souvent par ici.
Je viens taquiner les plumes du rapidodo qui continue de renifler mon sac avant de fouiller à l'intérieur. Il ne me faut pas longtemps pour trouver une noix caramélisée perdue au milieu de mes quelques affaires.
Je peux ?
Je montre la noix au jeune homme, on demande toujours aux parents avant de donner quelque chose à un enfant. On fait pareil avec les familiers non ?
D'ailleurs, je suis Onélie Maple et vous ? Et tout ces petits monstres ?
Un peu de curiosité ne fait jamais de mal quand on rencontre une nouvelle personne certainement venue du continent.
Voyant l'offre de l'inconnue, Niraen afficha une mine surprise avant d'accepter le paquet tendu, ne se formalisant pas du regard sur ses ailes.
- Oh, vraiment? C'est très gentil de votre part... Non, Likva, tu ne touches pas, tu attends!
Bien sûr que le petit ribec avait essayé d'attraper le sac au passage, mais il risquait plus de le déchirer qu'autre chose, et il fallait bien qu'il apprenne un peu à canaliser sa curiosité et surtout apprendre comment se comporter au milieu d'autres humains.
- Ah? Vous n'avez pas de familiers marins par ici? S'étonna Niraen alors qu'il prenait une des noix restantes.
Il ordonna à Likva de ne pas bouger, et la donna à Talja. Il essayait de faire attention à la solliciter, tantôt avant Likva, tantôt après, pour leur apprendre tous les deux la patience et à ne pas être trop jaloux... Bon, en réalité, la patience c'était pour Likva, et la jalousie pour Talja. En tout cas, contre toute attente, la catosor semblait apprécier le goût caramélisé. Niraen sourit et la gratifia d'une caresse tandis que la jeune femme lui demandait l'autorisation de donner une noix oubliée au fond de son sac à Zemir, qui se montrait étonnamment curieux pour une fois. Lui qui d'habitude aimait garder ses distances et se montrait rarement curieux envers les humains, ces petites noix semblaient l'intriguer, et comme il avait assez de self contrôle pour attendre l'approbation de Niraen avant de gober la noix pourtant déjà à sa portée, le dresseur hocha la tête avec un sourire sans soucis, félicitant mentalement le rapidodo.
- Likva! Papa avoir oublié Likva!
- Du tout, ne t'inquiète pas. Mais tu dois d'abord remercier la gentille personne qui nous a donné ces noix, d'accord?
Le petit ribec s'exécuta rapidement et avec enthousiasme avant de fixer la récompense promise, se retenant visiblement d'essayer de la gober entre les doigts du dresseur. Sentant que sa patience arrivait à bout, Niraen sourit et finit par lui donner la noix, qu'il goba avec entrain, semblant marmonner quelque chose se rapprochant de "Ché bon" dans le processus.
- Enchanté ! Je m'appelle Niraen Thrani. Le petit monstre ici présent qui a faillit me croquer un doigt, c'est Likva, la catosor s'appelle Talja, et le rapidodo bleu Zemir. J'ai également un dernier invité surprise, le petit Keshi, caché dans ma poche. Vu l'énergie de Likva, je préfère éviter les accidents.
Il faudrait bien que les deux arrivent à cohabiter, et que le ribec apprenne à faire attention aux animaux plus petits et fragiles que lui, mais ils n'étaient pas très nombreux à la maison en dehors du glooby, et Keshi étant timide, Niraen préférait se contenter de limiter les contacts entre les deux à des moments précis et encadrés pour éviter tout accident. Nul doute que ça irait mieux avec le temps au fur et à mesure que les deux grandiraient !
- En tout cas, j'en déduis que vous habitez, et êtes sans doute née ici? Suggéra Niraen.
Nul besoin de préciser que ce n'était pas son cas, entre sa dégaine et le simple fait qu'il pose la question, c'était sûrement déjà assez éloquent en soit !
Le jeune homme semble surpris que je lui offre le reste de mon paquet. Cela me paraît tellement normal que j’ai du mal à imaginer que celui puisse surprendre. Si cela fait plaisir à quelqu’un, même si ce quelqu’un est à plume, pourquoi ne pas le faire profiter de ma possession ? Je n’y vois aucune raison, surtout que je ne devrais pas manger autant de ces sucreries. Je rebondis sur sa question concernant les familiers aquatiques.
Assez peu à vrai dire, avoir des familiers n’est pas quelque chose de répandu. Les marins racontent souvent que les familiers font fuir le poisson quand ils partent à la pêche.
Surement des croyances mais ce n’est peut-être pas si faux. Un animal, potentiellement un prédateur en plus, qui nage près d’un navire, cela peut certainement effrayer les bancs de poissons. Peut-être le coût d’un tel animal est-il peut-être aussi une des raisons sur nos îles généralement assez pauvres malgré nos tentatives pour augmenter le niveau de vie de chacun… Mais il est vrai qu’il est amusant de voir l’interaction entre l’oiseau coquin et son maître. On peut sentir qu’ils sont bien ensemble et qu’un lien privilégié existe entre eux. Je m’incline un peu devant le ribec lorsqu’il me remercie pour les noix à l’initiative de son propriétaire. Je suis avec attention la présentation de Niraen et de l’ensemble de sa petite troupe, après tout, c’est toujours agréable de pouvoir mettre un nom sur un visage.
Enchantée de vous rencontrer messire Thrani.
Je fais une belle révérence au jeune homme tout en lui faisant part de mon plaisir de le rencontrer, plaisir qui n’est pas feint comme lors de nombreuses rencontres de nobles peu intéressants. J’acquiesce lorsqu’il m’interroge sur le fait que je puisse être originaire de l’île.
En effet, j’ai toujours vécue sur l’Archipel, cette île en particulier. Ma famille est installée ici depuis plusieurs dizaines d’années, on peut dire que je suis une habitante de l’océan pur souche.
Mes très lointains ancêtres étaient bien des pirates, cela est donc tout à fait adapté. Difficile de se dire citoyenne du royaume quand celui-ci ne se préoccupe que très peu des îles autrement qu’en terrain de jeu ou de vacances… Ces derniers temps, j’ai beaucoup entendu de rumeur venant des marins, des fortes augmentations prochaines de taxes en particulier… Rien qui ne puisse améliorer les choses prochainement.
Et vous messire Thrani ? Vous nous venez du continent ? J’espère que votre séjour sur les îles est plaisant et les habitants accueillants.
Chose que je regrette même si je peux comprendre leur rejet. A voir d’innombrables riches continentaux dédaigneux dégrader le territoire de l’Archipel, on ne peut que devenir méfiant envers tout ceux qui peuvent en venir…
Si vous permettez, je peux vous guider vers le plus gros des festivités. Nous fêtons la nouvelle année, il est encore un peu tôt pour se rapprocher du port pour les offrandes.
Plus tard dans la nuit, nombres d’habitants de l’île se regrouperont sur le port pour des offrandes à l’océan. Pour l’appeler à épargner nos demeures lors des tempêtes, apporter de bonnes pêches… C’est un beau spectacle à regarder et sûrement assez unique pour une personne étrangère. Je prends les devants pour prendre la direction des champs tout en continuant de discuter avec Niraen.
Si ce n’est pas trop curieux de ma part, puis-je vous demander ce que vous faites dans la vie ?
Hormis des nobles, nous voyons surtout des aventuriers qui viennent se mesurer à la faune et la flore locale. Enfin assez peu sur l’Île Centrale plutôt calme en général. L’Île Sud est plus propice à leurs activités, plus sauvage et moins explorée.
- Ah? Tous ne sont pourtant pas très impressionnants. Ceux que je connais en tout cas! Et pour les plus gros, ne pourraient-ils pas justement être utilisés pour rabattre le poisson?
Ça lui paraissait simple et évident, mais il devait lui manquer des informations, sinon sûrement qu'ils le feraient déjà, depuis le temps! Quoiqu'il lui semblait bien que les gens ici étaient assez superstitieux, si c'était vrai alors ils n'avaient peut-être jamais osé vraiment essayé, sans doute suite à une première mauvaise expérience. Ou alors il se fourvoyait complètement! Après tout, il connaissait bien mal la vie près des côtes, alors sur les îles, n'en parlons pas! Ses connaissances se limitaient à quelques voyages, rien de très approfondi en somme.
En tout cas, ses interactions avec Likva semblaient amuser sa nouvelle rencontre. Il faut dire que malgré sa télépathie avec le ribec, Niraen avait prit l'habitude de lui parler la plupart du temps, n'utilisant la télépathie que pour des échanges plus difficiles à formuler, s'assurer rapidement qu'il allait bien, ce genre de chose. De toute façon Likva était plutôt bavard et expressif, alors autant en profiter!
La salutation d'Onélie le surprend un peu. "Messire Thrani", carrément? Il était très rare qu'on utilise une telle formulation pour parler de lui, et les plus aptes à le faire étaient généralement les nobles ayant fait appel à ses services. Nobles qui ne se reconnaissaient pas toujours à leurs vêtements ou manières, mais là il ne pouvait s'empêcher de se poser la question. Il s'inclina brièvement de même, prenant note consciemment pour une fois de faire preuve du même respect, au cas où. Mais il se voyait mal poser la question aussi directement, aussi préféra-t-il partir sur un autre sujet.
- En effet! Je suis du nord-est du continent, je suis donc assez dépaysé ici, surtout que je n'ai pas eu l'occasion de venir souvent. L'accueil dépend un peu des gens sur qui je tombe, mais j'imagine que la situation n'est pas aussi simple qu'il n'y paraît ici.
En tout cas c'était ce qu'il avait cru comprendre vu certaines des réactions à son égard! Rien de bien méchant cependant, fort heureusement, et la présence de Zemir et Talja, même si cette dernière n'était pas adulte, avait visiblement tendance à calmer un peu les gens les plus véhéments, pour autant le druide avait senti des réactions un peu trop mitigées pour que ce soit un hasard. S'il connaissait bien la faune et la flore, il ne connaissait pas leur état en permanence partout sur leur territoire, et encore moins la géopolitique humaine même s'il savait qu'elle avait un impact dessus, mais il en savait assez pour avoir entendu diverses informations et rumeurs sur les îles. Il n'osait cependant pas trop demander si oui ou non ce qu'il avait entendu était vrai ou de simples clichés.
- Oh? Je veux bien, c'est gentil! Je déambulais un peu au hasard, comme je ne connais pas bien la ville.
Ni les îles entières tout court en fait! Il était arrivé trop récemment pour avoir eu le temps de s'imprégner un peu du lieu, il connaissait presque mieux une des îles de l'archipel où il s'était rendu pour le travail que les lieux avec des humains, c'est dire.
Commençant à marcher doucement, Niraen ne pouvait s'empêcher de continuer à jeter des coups d’œils curieux tout autour, avant de cesser pour se concentrer sur sa discussion avec Onélie, laissant ses familiers jouer les curieux à sa place, faisant particulièrement attention à ce que Likva n'essaie pas de sauter sur un passant ou un étal au passage. S'il gardait le même caractère en grandissant, ça risquait d'être terrible dès qu'il pourrait voler! Mais avec un peu de chance, il finirait par se calmer un peu... Ou à mieux écouter l'hybride.
- Je suis druide, mais on me sollicite aussi très souvent pour du dressage ou trouver des familiers. Quelqu'un de la région où je vis m'a justement demandé des plantes des îles, assez difficiles à trouver dans les commerces par chez nous, d'où ma venue ici. J'aime beaucoup profiter de ce genre de prétexte pour observer la faune et flore locales, c'est si différent de ce que je connais! Et vous?
Bon, elle ne lui avait pas demandé pourquoi il était là, mais la question serait sans doute venue à un moment ou à un autre. Et c'était bien aussi parfois de s'ouvrir un peu avant de commencer à poser des questions, même si chacun semblait déjà curieux de l'autre et plutôt enclin à la discussion... Y comprit Likva qui s'exclama sans y avoir été invité :
- Plus tard, Likva voler! Et vouloir goûter encore plein bonnes nouvelles choses!
Niraen retint un facepalm, préférant sourire devant l'attitude du ribec. Il était enthousiasme, mais n'avait pas vraiment réalisé que la question ne s'adressait pas à lui, et qu'en plus il avait répondu à côté. Heureusement, Zemir et Talja ne pouvaient y aller de leur petit commentaire, et même mentalement, ils semblaient assez indifférents, préférant sentir et observer les alentours. Keshi, lui, osa sortir timidement la tête, observant quelques secondes avant de retourner se réfugier dans sa poche, intimité par tout ce monde et tous ces mouvements.
Mon partenaire de discussion nous venait effectivement du continent, bien loin sur le continent d’ailleurs. Je suis rassurée de l’entendre dire qu’il a quand même reçu un accueil agréable de la part de certains habitants de l’Archipel.
Je m’excuse de la froideur dont certains ont pu faire preuve à votre égard. Malheureusement, la majorité des voyageurs venant du Continent n’ont pas votre gentillesse et votre respect des populations locales.
Le climat particulièrement attrayant des îles et la beauté des paysages est un plaisir qui attire les curieux en manque de dépaysement mais malheureusement, on ne récupère bien souvent que la mauvaise graine des voyageurs… Assez riches pour s’offrir un voyage grand luxe et se croire les seigneurs de ces terres. Et je n’ai jamais trouvée de solution satisfaisante pour endiguer ce souci… Je suis quand même heureuse qu’il accepte ma proposition de le guider. Cela occupe un peu ma soirée et je trouve ces animaux amusants, surtout le petit bavard aux plumes blanches… Commençant à avancer, je l’écoute me décrire ses activités. Activités forts intéressantes qui expliquent en partie toute cette troupe autour de lui. Il semble beaucoup voyager et prendre le temps de découvrir les lieux qu’il visite au passage. Une attitude que j’apprécie particulièrement me rappelant Red, si ce n’est que son habitude de découvrir la zone dépend de son talent pour se perdre dans le cas de l’aventurier.
Vous avez dû voyager aux quatre coins du royaume alors ?! Et vous voyagez toujours avec tous vos familiers ? Ce n’est pas trop contraignant ?
Les familiers n’étant pas courant sur l’Archipel, ma curiosité est sans limites. Mes rares connaissances sortent des livres sur le commerce des animaux vivants que j’ai pu lire. Commerce qui ma famille a effectué pendant des dizaines d’années avant de cesser sous l’impulsion de ma grand-mère au cinquième rang. Une bonne chose de mon avis… Je ris à la remarque de Likva alors que Niraen m’Interroge sur mes activités.
Mais bien sûr que tu vas voler un jour. Pour vous répondre Messire Thrani, je suis marchande. Enfin, j’apprends le métier auprès de ma mère et mon père, nous commercialisons des marchandises provenant uniquement de l’Archipel vers le continent. Ma famille, les Maple, est spécialisée dans le commerce de produits jugés « luxueux » sur le continent, comme le nacrium. Il m’arrive de voyager jusqu’à Grand-Port ou des villes côtières mais jamais à l’intérieur des terres.
Bien que j’aimerai visiter la grande ville qu’est Capitale, nous ne commerçons pas avec des marchands basés là-bas. Se rendre en navire jusque-là est trop contraignant pour y tirer un quelconque intérêt commerciale. Charge aux acheteurs de Grand-Port de tirer un bénéfice de leurs achats. Au fur et à mesure que l’on approche de la sortie de la ville, le brouhaha joyeux de la fête se fait plus présent. Après un dernier changement de rue, on commence enfin à apercevoir les lumières et autres feux des festivités. Un peu avant d’arriver vraiment entre les différents espaces, un homme tirant un chariot nous hèle :
Bien le bonsoir jeunes gens ! Je vois que vous êtes bien entourés, que diriez-vous de tenter votre chance ?
Par curiosité, je me penche pour regarder son chariot derrière lui. Son approche commerciale n’est pas au top pour attiser l’envie mais on y peut rien, ce n’est pas chose simple d’attirer le chaland à la volée. J’entrevois plusieurs œufs délicatement posés sur un coussin de paille.
Je vois que mademoiselle est curieuse, laissez-moi vous expliquer. J’ai ici de nombreux œufs de familiers. Parmi toute cette foule de potentiels familiers se cache un œuf de Teishaba. Tous les œufs donneront naissance à un familier mais aurez-vous la chance de trouver ce petit monstre si rare ?
Bien que le pari puisse être intéressant, mon côté marchande me pousse à une méfiance importante… Cela sent l’arnaque à plein nez… En temps normal, j’aurais certainement tournés les talons mais Niraen a dit s’y connaître en familier, il saurait sûrement faire la distinction entre un véritable œuf de familier et un vulgaire œuf braconné dans n’importe quel nid. Chose que cet homme payera bien plus qu’il pourrait le croire.
Messire Thrani ? Qu’en pensez-vous, ces œufs vous semblent vraiment être de futurs familiers ?
Ma chère demoiselle, je vous assure de ma bonne foi. Pour preuve, je ne demande que dix cristaux gris pour tenter votre chance.
Une tactique vieille comme le monde, offrir un prix alléchant à un client réticent pour mieux l’amadouer. Cela fonctionne certainement sur des personnes lambda mais pas avec une personne formée au commerce…
Si tel est le cas, vous n’hésiterez pas à laisser Messire Thrani jeter un œil. Dans le cas contraire, je me devrais de vous reconduire à la Capitainerie pour vente mensongère et suspicion de braconnage d’espèces locales.
- Oh, mais vous n'avez pas à vous excuser! Et puis si les gens sont impolis, c'est compréhensible de faire de même en retour.
Après tout, le druide est du genre à renvoyer la monnaie de leur pièce aux gens, que ça soit pour des choses positives ou négatives. Il sera familier avec des gens familiers avec lui, poli avec des gens polis, et ainsi de suite, et il est très rare qu'il adopte une attitude très différente de cette de son interlocuteur. Cela ne vaut bien sûr pas que pour le degré de politesse utilisé avec les gens, mais c'est l'aspect le plus évident chez lui.
- J'ai déjà été littéralement aux quatre coins du Royaume, oui, mais j'ai été moins souvent et longtemps à certains endroits qu'à d'autres!
Quant à mes familiers, je ne les ai pas depuis très longtemps! Avant je voyageais généralement avec ma famille, plus rarement avec quelques connaissance, puis tout seul. Mais depuis que j'ai des familiers, je n'ose pas voyager sans eux! Certes, cela nécessite quelques aménagements, et d'être plus prudent, mais c'est aussi très agréable, et très bien pour eux. La plupart sont jeunes, ça leur fait de bonnes expériences. Zemir est le seul à être déjà adulte, et il m'aide beaucoup pour les bagages, car je dois avouer n'avoir jamais trop apprécié devoir porter des sacs à dos appuyant sur mes ailes!
Il n'avait sans doute pas besoin d'expliquer le pourquoi du comment de ce dernier point, aussi ne développa-t-il pas plus que ça. Il avait déjà la sensation d'avoir beaucoup parler, et avait prit l'habitude de ne pas trop se laisser aller, car le lancer sur ses animaux était sûrement le meilleur moyen de le transformer en pipelette ne s'arrêtant jamais! Il avait mille choses à dire sur les animaux en général, mais sur les siens aussi, dont il était assez gaga, il fallait l'avouer, même s'il le cachait plutôt bien. En tout cas, on ne pouvait pas dire qu'ils manquaient d'amour ou d'affection, et ça se voyait!
- Oh, je vois! Et ça vous plaît? J'ai l'impression que nombre de gens font comme nous et apprennent le métier de leurs parents, ou un métier approchant!
Il y aurait sans doute bien d'autres choses à dire et à demander par rapport à un tel métier, que Niraen connaissait au final assez peu même si à sa manière, lui aussi faisait office de marchand, sauf que ça concernait des plantes, remèdes et animaux. Mais ils furent distraits par leur arrivée dans une partie différente de la ville, d'avantage marquée par les festivités, avec plusieurs stands, et où les gens abordaient volontiers les visiteurs. Ce fut d'ailleurs leur cas, un homme tirant un chariot les hélant.
Intrigué par ce qu'il racontait, Niraen ne tarda pas à hausser un sourcil devant son pitch, observant les œufs et humant l'air pour avoir plus d'informations. Forcément, comme le jeu était de trouver un œuf de familier en particulier parmi d'autres, le vendeur avait eu l'intelligence de mélanger tous un tas d’œufs aux couleurs, formes et même tailles différentes, histoire de rendre la tâche plus difficiles, et si le druide n'était pas sûr de bien identifier certaines des coquilles, la plupart semblaient en effet être des œufs de familiers courants, le prix était un peu chers pour eux, mais peu pour un familier combattant recherché.
Néanmoins, ce simple principe de proposer des êtres vivants au hasard comme ça fit coucher les oreilles en arrière au dresseur, qui appréciait très peu le procédé. Lorsqu'Onélie se tourna vers lui, il en profita pour le faire savoir, fixant le vendeur droit dans les yeux.
- Il y a certes des œufs de familiers là dedans, mais pas tous. Et c'est particulièrement irresponsable pour un vendeur de proposer des animaux à la vente, surtout si c'est pour refiler un teisheba à une personne aléatoire! Ce n'est pas un animal de compagnie dont il est simple de s'occuper si on ne sait pas s'y prendre. Il faut que la personne puisse y réfléchir avant et soit sûr de pouvoir s'en occuper.
Il se tourna vers Onélie pour continuer :
- Et si certains sont bien des œufs de familiers, d'autres sont des œufs d'espèces d'oiseaux locales qu'il a du aller chercher lui-même, et qui sont certes domesticables mais ne sont pas des familiers en tant que tel. Mais il y a bien un œuf de teisheba parmi eux.
Il aurait été très tentant de montrer directement l’œuf en question, mais certains passants semblaient leur prêter attention, et s'ils étaient peu habitués aux familiers, il pourrait venir l'idée à certains de le prendre pour l'observer et ainsi le nommer et le faire éclore par accident. C'était quelque chose de trop courant pour ne pas prendre le risque, il avait déjà pu le constater par lui-même aussi avec Tsuya!
Est-ce qu’être marchande me plaît ? C’est une bien étrange question… Si cela ne me plaisait pas, je ne le ferais pas, tout simplement. Les mœurs sont-elles si différentes sur le continent même en matière de choix de sa propre vie ? Certes, on m’a toujours dit que j’allais reprendre l’affaire familiale mais j’ai moi-même décidée de m’y investir…
Bien entendu, je ne continuerai pas dans cette voie si tel n’était pas le cas. Il n’y a pas vraiment de doctrine telle que vous l’évoquez par ici, chaque jeune est libre de choisir sa voie. Peut-être qu’il s’agit de problématique financière qui guide cela sur le continent ? Nos iles sont suffisamment petites pour que chacun connaissent presque tout le monde. Cela doit être plus simple pour être accepter comme apprenti sans garantie derrière.
Impossible que je compare ne connaissant pas le fonctionnement du continent… Ici, il n’est pas rare qu’un boulanger accueille le fils du voisin pour lui apprendre le métier. Ou qu’une ferme entière change de main parce que l’enfant n’a pas souhaité continuer l’agriculture…
Arrivés près des festivités, nous sommes abordés par un vieil homme proposant un jeu de hasard. Si les modalités me semblent potentiellement correctes, je n’ai guère confiance en l’homme… Qui pourrait vérifier ces dires et constater qu’il s’agit bien de véritables œufs de familiers et non de poules. Ou pire, d’espèces locales… Chose qui doit être réprimée avec la plus grande fermeté pour leur bien. Heureusement, la personne qui m’accompagne m’a dit s’y connaître en familier. Niraen pourra certainement démêler le vrai du faux dans ce jeu. Chose qu’il n’hésite pas à faire à ma demande faisant part de son inquiétude également à voir un tel familier vendu aussi inconsciemment. Mais surtout, je tique lorsqu’il m’explique ne pas voir que des œufs de familiers… Mais aussi, et surtout, des œufs qui n’ont rien à faire dans cette situation. Je comprends tout à fait ce qu’il veut dire également pour le teishaba mais malheureusement, à ma connaissance, rien ne lui interdit de le faire. Tant qu’il ne ment pas sur la présence de l’œuf dans le panier, il peut… Alors que je réfléchis à la meilleure chose à faire, je constate que plusieurs personnes ont été attirées autour de nous. Et le vieillard commence à leur faire sa vente… Avant que quelqu’un se fasse arnaquer, je me doit d’intervenir en tant que puissance commerciale de l’île.
Une minute mon cher, nous n’en avons pas terminé. Votre escroquerie n’a pas sa place ici. Messieurs, mesdames, je vous déconseille de faire affaire avec cette personne le temps que la situation soit éclaircie. En effet, il est soupçonné que certains œufs ne soient pas des familiers mais de futurs habitants animaliers de notre île.
Mon rapide discours ne laisse pas l’attroupement indifférent. Mon nom est largement suffisant pour que l’on m’écoute, et une fois que l’on m’a reconnu, plus personne ne tente de commercer avec le vieillard.
Maintenant que nous avons tout le temps nécessaire, nous allons nous rendre à la Capitainerie pour que ces œufs vous soient confisqués et établir votre procès-verbal en vue de jugement.
Jeune demoiselle, je vous assure que mes œufs sont tout ce qu’il y a de plus véritable et vous n’avez aucune autorité pour me contraindre à vous suivre.
Je soupire, je n’ai en effet pas le pouvoir de l’obliger à me suivre à la Capitainerie. Mais je n’ai pas dit mon dernier mot, j’ai bien plus de ressources que cela. Je continue alors bien fort pour tout à chacun puisse en profiter.
Qu’est-ce qu’un honnête commerçant aurait à craindre à se rendre à la Capitainerie où les experts locaux pourront infirmer ce qu’annonce messire Thrani ? Ainsi gracié de tous les chefs d’accusation, il n’y a guère de doute sur le succès de votre jeu. Mais cela n’est vrai que si vous êtes honnêtes, n’est-ce pas ?
Voyant qu’il n’est pas prêt à me suivre même si l’idée fait son chemin dans sa tête, je sors quelques cristaux gris que je lui lance. Il me dévisage un instant avant de comprendre ce que je suis en train de faire. Un œuf de familier éclos quand on lui donne un nom, une des rares choses que je sais sur eux. Si je tombe sur un œuf local, il n’aura plus de choix que de se rendre pour éviter plus d’ennuis. Je m’approche du chariot prête à prendre un œuf que j’ai dûment acheté.
Messire Thrani ? Puis-je vous demander de m’indiquer un œuf que vous pensez ne pas être un familier ? J'aime les animaux sauvages de mon île en liberté, ils n'ont pas leur place dans ce jeu.
Quelques cristaux perdus ne sont pas grand-chose si je peux sauver quelques spécimens sauvages… Arraché à la nature, ils ne pourront certainement pas être relâchés comme ça mais l’élevage des Maple devrait au moins permettre leur survie. J'aime trop les animaux de notre îles pour laisser un braconnier officier en pleine liberté chez nous. Mes favoris, les grands balbuzard pécheurs ont des oeufs dont la taille correspondrait parfaitement...
- Je ne voulais pas forcément dire que les gens étaient obligé de suivre le chemin de leurs parents, quoique ça doit sûrement arriver! Plutôt que parfois, ils le faisaient un peu par défaut sans toujours réfléchir, mais surtout que c'était plutôt fréquent. Ce n'est pas un jugement de valeur, ce serait malvenu de ma part!
Déjà parce qu'il ne connaissait pas Onélie ni sa vie, donc partant de là, qui était-il pour juger? Et quand bien même, il était dans le même cas, si ce n'est qu'il avait réussi à faire une sorte de mélange du métier de ses deux parents. Bref, là encore, pas de quoi se la ramener en somme.
Pour autant, ce que lui racontait la jeune fille était très intéressant. C'est vrai qu'il ne s'était même pas spécialement posé la question de si les choses étaient différentes ou non ici par rapport au continent, mais elle lui avait déjà donné la réponse, et même s'il ne savait pas à quoi s'attendre, il ne pouvait s'empêcher de se dire que ça l'étonnait. Il aurait au contraire cru que les gens auraient plus de mal à changer d'activité au fil des générations ici, par le poids de la pression des paires peut-être, mais visiblement il s'imaginait des choses. Va savoir d'où il tenait ça! Surtout que ce n'était même pas tant qu'il n'ai que des exemples allant dans un sens sur le continent, il avait aussi croisé des gens n'ayant pas d'autre choix que de faire un métier différent de celui de leurs parents, ou avec un commerce différent.
La discussion dérive bien vite alors qu'en arrivant au cœur de la fête, ils sont hélas par une personne au mieux mal renseignée sur les œufs fournis ou qu'elle a trouvé - après tout, comment distinguer des œufs classiques d’œufs de familiers dans le cas d'oiseau par exemple, ça il pouvait l'entendre de la part d'amateur - au pire malhonnête. Et puis ce simple principe de filer un familier tel qu'un teisheba à n'importe qui... Non, vraiment, il n'aimait pas ça.
En tout cas le dresseur ne pouvait que penser qu'il avait bien fait de ne pas révéler l'emplacement du bon œuf, car les badauds s'approchaient rapidement, sans doute attirés par les paroles du vendeur et le fait qu'ils donnaient l'impression de s'y intéresser vu qu'ils étaient en pleine discussion. Et en un sens, ce n'était pas faux, ils s'intéressaient à lui, mais sûrement pas dans un sens qu'il risquait d'apprécier... Néanmoins, ici, Niraen ne disposait d'aucune autorité. Dans sa région encore, il avait une marge de manœuvre même sans être garde, mais là, autant laisser faire Onélie qui semblait bien plus impliquée et légitime à le faire que lui.
Et en effet, malgré sa stature guère impressionnante, les gens l'écoutaient et s'éloignèrent rapidement. Était-ce lié à ce qu'elle avait expliqué, que tout le monde se connaissait? Elle bénéficiait déjà d'une certaine renommée? En tout cas c'était impressionnant, même si cela ne semblait pas convaincre le vendeur de la suivre. Placé un peu derrière Onélie, en observateur attentif, Niraen eu un sourire un peu mauvais, très atypique chez lui, qui laissait entrevoir ses canines pointues d'hybride. Entre ça, ses attributs d'hybridation et la clique qui l'accompagnait, en général il n'avait pas besoin de trop insister pour avoir un minimum d'attention.
Mais jouer à ce petit jeu - qui restait fort légal d'ailleurs, ce n'était pas de la menace à proprement parler, juste de l'intimidation pas très directe - ne semblait pas être dans les plans d'Onélie, malgré ses tentatives pour le convaincre par les mots. Elle finit par lâcher quelques cristaux, ce qui fit hausser un sourcil au druide. Oh, elle était prête à aller jusque là? Il n'aurait pas aimé donner de l'argent à un tel individu, mais il se devait de souligner le geste malgré tout, ils tenaient là un moyen imparable de prouver leurs accusations.
- Hé bien, celui-ci par exemple correspond à un petit oiseau au plumage coloré, celui-ci à un rapace pêcheur...
Ah ça, il y avait de la variété, c'est sûr. Forcément, pour pouvoir proposer des œufs assez différents pour perdre le spectateur. Même si trouver des œufs ressemblants à un teisheba pouvait également être un bon plan, vu qu'il était sensé n'y en avoir qu'un, si plusieurs se ressemblaient, on serait tenté de ne pas les choisir.
Devinant qu'Onélie devait savoir comment faire éclore un œuf de familier, il n'en dit pas plus, la laissant faire son choix. Il n'avait pas osé nommer les espèces en question directement, des fois qu'elle ne les connaisse pas. Après tout, ce n'est pas parce qu'elle était du coin qu'elle connaissait le nom de toutes les espèces d'oiseaux, et certains œufs n'étaient pas des espèces d'ici d'ailleurs, mais assez peu. Pour le reste, il ne pouvait que la laisser faire! Il était sûr de son coup, mais il ne pu s'empêcher d'observer attentivement le vendeur pour repérer toute combine pouvant lui servir à faire éclore un œuf au bon moment pour le faire passer pour un œuf de familier. On ne sait jamais!
Bien, puisque monsieur n'est pas prêt à faire preuve de bonne volonté, il va falloir lui forcer un peu la main. Rien de mieux pour cela que de mettre en évidence l'arnaque. Maintenant que j'ai payé ce qui m'était réclamé, je suis tout à fait en droit de piocher dans le chariot. Non sans un peu de triche grâce à l'aide d'un professionnel. Niraen, comprenant certainement mon plan, se plie sans rechigner à ma demande en m'indiquant des œufs potentiels.
Merci Niraen, votre aide m'est précieuse. Je vous laisse une dernière chance de me suivre sans faire d'histoire…
Je vois bien que l'homme n'est guère à l'aise mais il reste muet. Il espère certainement que Niraen se soit trompé. Ne le connaissant pas depuis longtemps, je ne lui fais pas une confiance aveugle mais il a l'air sûr de lui. Après cette dernière opportunité que je lui laisse, je m'empare de l'œuf désigné comme rapace pêcheur. Je montre bien l'œuf pour que tout le monde puisse voir la suite.
Bien,maintenant, donnons-lui un petit nom pour le faire éclore….
Alors que je réfléchis à un nom pas trop débile au cas où l'oeuf éclose vraiment pour me lier à un familier, une voix s'élève par-dessus la foule.
Qu'est-ce qui peut bien attirer tant de monde ?
La foule ne met qu'une seconde à s'écarter devant un homme. Une armoire à glace telle que les îles savent en forger. Je reconnais sans mal l'homme à sa carrure imposante : Gildartz, capitaine du port de l'île centrale. Et accessoirement l'homme à qui je souhaitais emmener ce gredin.
Capitaine Gildartz ! Ravie de vous voir ce soir, j'allais justement venir vous voir à la Capitainerie.
Si ce n'est pas la petite Maple. Qu'est-ce que je peux pour toi ?
Je lui souris, au grand damn du vil commerçant. Je désigne d'un geste Niraen.
Grâce à l'aide de Messire Thrani, il apparaît évident que cette personne arnaque nos concitoyens en vendant des œufs d'oiseaux braconnés sur nos îles en tant que familier. Nous allions justement confondre cette personne.
Intéressant, voyons ça alors.
Je souris à Niraen, au moins, il ne perdra pas de temps pour profiter de la fête avec ces bêtises.
Alors, je vais l'appeler Grandmir !
Voilà, j'ai donné un nom à l'œuf… Je regarde tour à tour l'œuf et Niraen. Je sais qu'il faut donner un nom à l'œuf mais est-ce que l'éclosion est immédiate ? Je n'ai pas pensé à ce menu détail… Fixant Niraen, je l'interroge.
Est-ce que l'on peut conclure que ce n'est pas un familier Messire Thrani ?
Là, je dois bien avouer que mes connaissances ne sont pas suffisantes pour conclure et incriminer le vieillard.
Il hoche la tête au remerciement de la jeune fille. Elle a l'air de lui faire confiance, même s'il y a une heure encore ils étaient de parfaits inconnus l'un pour l'autre. Il peut parfaitement comprendre une certaine méfiance, autant de lui personnellement que de ses capacités, mais ça ne semble pas être le cas, ou elle ne le montre pas même si elle doute un peu, et ça ça fait toujours plaisir! En même temps, être un hybride, ça donnait un peu confiance même s'il ne correspondait pas à l'image cliché que les gens se faisaient des druides.
Voyant le capitaine arriver, Niraen le salue d'un hochement de tête, amusé de le voir arriver de façon si pratique, eux qui avaient justement besoin d'eux! Les îles semblent tout autant décidées que lui à confondre ce malfrat, et il en est heureux. Il a toujours l'impression que les côtes et la mer dégagent une énergie particulière, et même si c'est sans doute lié à l'odeur de l'eau et du vent, dans ce cas précis il ne va pas s'en plaindre.
Devant le manque de réaction total de l’œuf devant le nom donné par Onélie, Niraen ne peut s'empêcher d'afficher un sourire assuré et tranquille de celui qui a tout prévu, fixant dans les yeux le marchand qui semble lui renvoyer de la haine en retour, furieux qu'il ai mit à mal son petit manège sûrement bien rôdé au demeurant.
- Oh oui, il aurait déjà du éclore si c'en était un. Mais chez les animaux normaux, on ne peut forcer l'éclosion. Heureusement, son chariot ambulant est chauffant, les empêchant de dépérir quand cela est nécessaire, sinon il aurait sans doute des soucis à vendre des animaux morts dans l’œuf, mais cela n'enlève rien à sa malhonnêteté!
Il n'avait hélas pas d’œuf sous la main pour étayer son propos, sauf s'il s'amusait à en prendre un parmi ceux de vrais familiers sur le présentoir ambulant, mais il s'y refusait. Se tournant vers le capitaine, il lui adressa un regard sûr de lui, au cas où il soit tout aussi ignorant qu'Onélie sur la durée d'éclosion d'un œuf de familier une fois nommé.
- Si vous en doutez encore et voulez vérifier par vous même la différence avec un vrai œuf, celui-ci ou encore celui-ci sont de vrais œufs de familiers. Je déconseille de faire naître des familiers à la légère, surtout sans personne pour s'en occuper ensuite qui soit prêt à prendre toutes les responsabilités, mais si vous voulez essayer, vous saurez lequel prendre. Par contre, il n'a pas menti sur la présence d'un teisheba parmi les œufs, il s'agit de celui-ci.
Pas besoin de préciser qu'il ne fallait pas le laisser dans n'importe quelles mains en principe, il devait le savoir. Le druide rappela quand même le principe qu'il fallait nommer un œuf pour faire éclore un familier, histoire d'être sûr que les gardes les manipulent correctement au besoin s'ils devaient s'en saisir, avant d'attendre patiemment leur verdict et leur réaction, surveillant malgré tout le marchand du coin de l’œil, guère rassuré par son air mauvais qui devenait de plus en plus sombre au fur et à mesure de son petit exposé en sa défaveur.
Bien bien… Mon cher monsieur, nous allons nous rendre à la Capitainerie pour nous occuper de tout cela et faire venir des experts… Ma petite Onélie, ce n’est pas un cadeau que tu me fais là, ça va encore prendre des jours.
Des jours, sans doutes le temps que des experts viennent d’autres îles pour identifier les œufs… Un temps que notre commerçant passera en cellule. Une chose qui ne me déplait pas, mais cela m’embête que le Capitaine voit sa soirée gâchée… Après réflexion, je lui fais une proposition.
Vous m’en voyez vraiment désolée Capitaine… Si je puis me permettre, nous pourrions nous montrer clément avec ce Monsieur et juste établir une faute à condition qu’il remette immédiatement les œufs d’animaux sauvages à nos bons soins. Je pense que de toute façon, son activité est terminée sur notre île. Son signalement sera ainsi transmis à toutes les îles de l’Archipel et tout autre crime lui vaudra immédiatement sanction.
Dans l’Archipel, une faute est le premier pas vers une condamnation. Si on le reprend à réaliser un crime sur notre territoire, la sanction tombera immédiatement. La justice des îles n’est pas aussi douce que sur le Continent…
Je suis certaine que Monsieur ne veut pas se voir condamner au pilori des plages face à la marée. Pas d’inquiétude mon cher, vous n’en mourrez pas mais les zebranops risque d’apprécier vous grignoter pendant quelques heures.
J’exagère peut-être un peu… ou pas. Il n’a pas besoin de le savoir de toute façon. J’interroge le Capitaine du regard, malheureusement, nous ne pouvons pas lui confisquer les œufs de familier sans longues démarches vu que son activité reste légale s’il s’en tient à cela. Le vieillard semble vouloir prendre la parole en premier mais il est stoppé net par la voix tranchante du Capitaine.
Je vous arrête maintenant. Bien que cette proposition soit intéressante, nous n’avons personne pour faire le tri actuellement et s’en occuper ensuite, ce Monsieur vient avec moi.
Une position tout à fait logique et que j’ai déjà anticipée. Opinant de la tête, je me tourne vers Niraen.
Ce n’est pas tout à fait exact. Messire Niraen est un spécialiste de l’élevage de familier, assurément suffisamment expérimenté pour cela comme nous avons pu le voir juste avant. Et je propose les services de l’élevage des Maple pour l’éclosion et essayer de relâcher ces animaux. Nos élevages devraient pouvoir accueillir sans soucis ces quelques œufs.
Au même âge que moi, mon arrière-grand-père a monté un élevage d’oiseaux de l’Archipel pour enrichir le commerce familial. Comme moi avec mon élevage de lézard aujourd’hui. Même si les tâches d’élevage sont déléguées à nos employés, nous avons les moyens pour cela. Le Capitaine se tourne à son tour vers Niraen le jaugeant de son regard.
C’est vrai ce que dit mademoiselle Maple, jeune homme ?
Son petit discours était surtout à l'intention d'Onélie et encore plus du capitaine, mais la plupart des gens aux alentours leur ayant prêté attention, ils furent nombreux à l'entendre, et semblèrent pour la plupart prendre son avis en considération, l'air un peu dépités et s'éloignant en maugréants. Certains commentaires semblaient d'avantage en sa défaveur à lui qu'à celle de l'escroc, mais qu'importe, assez de gens avaient été témoins de la scène pour rentre difficile toute autre tentative de vente dans le coin, si Onélie avait dit vrai sur le fait que sur les îles, tout le monde se connaissait.
Hélas, le capitaine ici présent ne semble pas spécialement pressé de faire son travail. Non pas que l'effraction ne lui semble pas assez importante, mais il aurait visiblement préféré s'occuper de la fête. En un sens c'est compréhensible, mais le druide ne peut s'empêcher de hausser un sourcil. Il fallait s'y attendre, non? Les fêtes ne sont pas un moment particulièrement propice aux incidents? Et quand bien même, du moment que l'homme était arrêté et les œufs saisit, ils n'étaient pas obligés de régler ça dans la seconde!
Onélie tente de trouver un arrangement, et l'hybride la laisse volontiers faire, moins au courant des coutumes du coin. L'idée de laisser partir un tel individu lui déplaît passablement, surtout si c'est pour assurer des fêtes tranquilles à un haut gradé qui se devrait pourtant d'être exemplaire! Mais à son soulagement, le capitaine lui même refuse, coupant l'herbe sous le pied au marchand qui semblait aussi vouloir ajouter son grain de sel.
La proposition de la jeune fille qui suit surprend l'hybride. Vu tout le petit exposé qu'il vient de faire et les différents œufs qu'il a identifié, et il y en a quand même eu quelques nouveaux depuis l'arrivée des gardes, il ne s'était pas douté de lui-même qu'il était capable? L'hybride agita une oreille, prit au dépourvu mais aussi un peu agacé, avant de finalement hocher la tête.
- Oui, elle dit vrai. Je ne connais peut-être pas aussi bien la faune locale d'ici que celle d'autres milieux, mais il a pas mal d'espèces communes, donc ce n'est pas vraiment un soucis. Là par exemple vous avez, de la gauche à la droite...
Sous le regard attentif du capitaine, le druide décrit et identifia chaque œuf, bien content d'être capable de tous les identifier sinon cela aurait sûrement poser soucis. Il affirma être sûr de lui, laissant le capitaine se plonger dans ce qui apparaissait être une profonde réflexion, tandis que le marchand restait un peu en arrière, visiblement dépité.
- Est-ce que cela vous convient? Je sais également comme m'occuper de ces animaux, je pourrais aiguiller les élevages où ils seront confiés si besoin.
Pas qu'ils en auraient forcément besoin, mais qui sait, les œufs de certaines espèces présentes ici n'étaient pas du coin, alors mieux valait être prudent!
A la mention de la possibilité que Niraen soit certainement bien assez expérimenté pour l’identification des œufs, je vois bien que ce dernier s’est un peu renfrogné. Il faudra que je m’excuse auprès de lui de l’avoir impliqué dans cette histoire. Malheureusement, personne ne le connaissant par ici, il est compréhensible que le Capitaine cherche une assurance, même si cela est un peu désagréable pour le jeune homme. Mais je suis contente de voir qu’il accepte sans mal de faire le tri entre familiers et simple animaux sauvages. Il n’a vraisemblablement aucun mal à les séparer au grand damne du vieillard qui perd en contenance œuf après œuf. Une fois le tri terminé, Niraen se montre sûr de lui, suffisamment à mes yeux pour être digne de confiance. Sans mot, j’interroge du regard l’officier qui est tout à ses réflexions. Finalement, il fixe le vieillard et l’interroge.
Cet accord vous convient ? Signalement sur l’ensemble du territoire et confiscation des œufs incriminés ou procédure d’arrestation immédiate ?
Me rapprochant de Niraen pendant que l’officier et le commerçant échangent, je m’excuse auprès de lui.
Mes excuses pour vous avoir impliqué dans cette histoire Messire Thrani. Je ne veux pas laisser ces œufs d’animaux sauvages plus longtemps dans ces conditions… Dans les îles cela peut prendre beaucoup de temps pour qu’un expert vienne au risque que ces animaux en payent le prix.
Je finis par relever les yeux lorsqu’un accord semble avoir été trouvé entre l’officier et le commerçant. Finalement, il s’est décidé pour la confiscation des œufs. Un moindre mal certainement pour lui et une solution qui ne me satisfait pas totalement également. Mais la sécurité des animaux en danger passe avant. Avec le signalement, il sera immédiatement mis au fer s’il récidive et son petit commerce sera bien moins rentable s’il reste dans la légalité. J’ai quand même un peu réfléchis avant de faire cette proposition.
Mademoiselle Maple, je vous confie les œufs à remettre au plus vite dans votre élevage. Messire Thrani, je vous remercie de votre aide dans cette affaire et de votre proposition d’offrir vos conseils pour la sauvegarde de ces jeunes animaux. Quant à moi, je vais immédiatement m’occuper du signalement de Monsieur. Aller Messieurs, Mesdames, il n’y a rien à voir par ici !
Pendant que l’officier essaye de disperser le reste de la foule, je reviens au chariot en tirant un petit panier de mon sac sans fond. Continuant de fouiller, je tire plusieurs vêtements pour le tapisser d’un matelas douillé et un peu chaud. Délicatement, je dépose les œufs un par un dedans.
Ma famille commerce beaucoup avec le contiennent. Nous vendons des ressources « rares et luxueuses » de l’Archipel dont certaines plumes. Mon grand-père est à l’origine de cette partie de notre commerce, il a construit plusieurs serres un peu plus loin, on y élève plusieurs dizaines d’oiseaux et on récupère les plumes qu’ils perdent. C’est un peu un passage d’épreuve dans ma famille que de créer une nouvelle branche pour notre commerce.
Terminant de mettre les œufs dans mon panier, je prends également l’œuf de Teishaba. Immédiatement, le vieillard proteste arguant que cet œuf ne lui a pas été confisqué. Avec mon plus beau sourire, je rétorque.
En effet, je ne fais que prendre un œuf correspondant à ce que j’ai payé, non ?
Le vieillard grommelle mais un simple regard vers l’officier suffit à le faire abandonner. Finalement, je le laisse partir maintenant qu’il a été délesté de la majorité de ses œufs. Une fois l’homme assez loin, je souris à Niraen.
Comme si j’allais le laisser partir sans une dernière attaque, il n’est pas près de se remettre de tout ça. Je comprends que vous soyez circonspects de tout ça mais j’ai préféré assurer la sécurité des œufs. Il aura du mal à faire n’importe quoi maintenant, en tout cas sur l’Archipel… Les officiers de nos ports étudieront avec minutie son chargement quand il se déclarera. Quant à lui, on va devenir de très bon amis, j’en suis certaine.
Faisant face à Niraen, je m’incline humblement.
Je vous remercie de votre aide ou de vous avoir mis dans l’embarras.
Il était pour autant loin d’être inexpressif, et il se para rapidement de calme en répondant aux questions du garde, habitué à se retrouver sollicité pour son travail même dans des moments de détente. Son métier étant sa passion, ça ne le gênait pas vraiment. Mais vu ce dont il était question ici, il ne pouvait s’empêcher d’afficher un petit air suffisant et content de lui, autant pour narguer le marchand que pour se rassurer lui-même sur ses compétences.
Personne dans l’assemblée ne vint le contredire, une ou deux personnes semblaient même avoir reconnu quelques uns des œufs identifiés et allant donc dans son sens. Maintenant que c’est fait, le druide se recule un peu, laissant le capitaine faire son travail, ses conseils n’étant plus utile, en tout cas pour l’instant.
Le druide tourne ensuite la tête vers Onélie, un peu surpris par ses excuses avant d’offrir un sourire rassurant.
- Oh, mais ce n’est pas un problème, ne vous inquiétez pas ! C’est également contre mon éthique que de laisser ce genre de chose se faire sous mes yeux. Mais vous n’avez pas d’expert sur place ? S’étonna-t-il.
Les îles étaient donc à ce point la cible de ce genre d’individu malhonnête pour que les experts soient débordés au point d’être longs à venir ? Ou les seuls experts disponibles se trouvaient sur le continent ? Cela lui semblerait curieux tout de même !
Ce n’était pas exactement ses affaires, mais il s’agissait de métiers proches du sien et en lien avec les objectifs de sauvegarde des écosystèmes qu’il poursuivait, alors il ne pouvait s’empêcher d’être un peu curieux. Niraen observa le verdict être rendu, hochant la tête pour lui même en écoutant. Bon, disons qu’il n’était pas contre donner une seconde chance, même si le marchand n’était pas de ceux qui la méritaient le plus vu comment il s’était montré obtus ! Sans doute que la période de fête avait aidé, sinon le garde se serait montré bien moins clément ! Pour autant, il ne repartait pas sans aucune sanction, et pour peu que le signalement se montre efficace pour empêcher toute récidive, du moment que le vieillard ne changeait pas de tête et ne s’éloignait pas de trop, cela devrait aller.
Likva continue à piailler, commentant la scène, tantôt à l’oral, tantôt mentalement, et lui aussi semble s’amuser de voir Onélie prendre l’œuf de teisheba avec un petit Bien fait! qui fit sourire le dresseur. Il ne l’aurait peut-être pas formulé ainsi, surtout devant tout le monde même si une partie des curieux s’était déjà dispersée, mais la jeune fille avait raison : quitte à ne pas récupérer la somme qu’elle avait payée, autant l’utiliser judicieusement ! Et au vu de ce qu’elle venait de faire, Niraen ne doutait pas que son choix n’avait pas été anodin et qu’elle saurait s’occuper correctement de lui.
- Ne vous inquiétez pas, ça ne m’a pas gêné, d’une certaine façon ça fait aussi parti de mon travail! Vous aurez besoin d’aide ou de conseils pour les œufs ou pour le teisheba ou ça ira?
Si elle avait déjà l’équipement nécessaire et les gens qualifiés, il n’allait sans doute pas l’embêter plus longtemps, afin qu’elle puisse directement aller s’occuper des œufs, mais si elle avait besoin d’aide, il se porterait volontiers volontaire ! Sa troupe ne devrait pas poser de soucis, s’ils étaient toujours très curieux de ce qui les entourait, le simple fait de marcher une bonne partie de la journée et découvrir tout un tas de nouvelles choses suffisait en général à les fatiguer, surtout les plus jeunes qui avaient de toute façon besoin de beaucoup de sommeil. Quant à Zemir, fort heureusement, il avait un caractère assez calme et placide.
Je suppose que cela vient de la logistique inhérente aux îles, il y a bien deux ou trois personnes capables d'identifier tant d'oeufs. Le trajet en bateau, même si de nombreux navires font les traversées, peut être assez long. Quand on ne possède pas ses propres navires, il n'est pas rare que le trajet prenne une journée à cause des haltes.
La problématique ne doit pas être aussi importante sur le continent où les déplacements entre régions sont plus aisés grâce aux routes. La fin de l'affrontement qui m'a opposé au vieillard sonne enfin. Maintenant que tout est acté, je récupère les œufs ainsi que celui de teishaba arguant que je ne fais que prendre l'oeuf que j'ai payé. Cela me fait sourire à nouveau d'entendre le ribec marquer son contentement de voir le commerçant malhonnête aussi mécontent. M'excusant à nouveau auprès de Niraen, celui-ci me propose directement son aide et ses conseils.
Pour les œufs, cela ne devrait pas être trop compliqué, je vais les confier directement à nos éleveurs. Je pense qu'ils vont tenter de les faire couver naturellement, ce sera le mieux pour réussir une réintroduction dans la nature.
Je réfléchis un instant au sujet du jeune teishaba qui attend patiemment dans son œuf. Je ne sais pas depuis combien de temps il a été pondu mais je suis certaine que ce petit a hâte de s'ébattre à l'extérieur. Mais il est vrai que je n'ai pas encore toutes les connaissances pour le faire éclore…
Je pense d'abord me renseigner d'abord. Vous ne connaîtriez pas un ouvrage de référence que je pourrais acquérir ? Je m'occupe de lézard assez turbulents régulièrement, dont une espèce venimeuse donc je pense pouvoir gérer ce petit bout mais un surplus d'informations ne faut jamais de mal.
Peut-être que mon élevage sera prochainement laissé entre les mains d'employés pour que je prenne ma place dans l'entreprise familiale… Je ne suis pas sûre de vouloir laisser de côté le contact de mes animaux, j'aime bien leur compagnie même si certains ne sentent pas leur force et tire sur ma capacité magique involontairement.
Je ne vais peut-être pas vous retenir plus longtemps, les festivités vous attendent. Vous n'étiez même pas avec moi pour affaires… Je vous prie de m'envoyer la facture pour vos services. Donnez la à n'importe qui, elle me parviendra et je ferai le nécessaire. Encore merci Messire Thrani, je me souviendrai de vous si j'ai besoin d'un spécialiste de confiance à l'avenir.
Apres tout, une personne qui met en suspens son plaisir pour sauver de simples œufs est une personne fiable à mes yeux. C'est ainsi que l'on découvre le véritable visage d'une personne. Et tout ce qui s'est passé ce soir m'a convaincu que Niraen Thrani est de ces personnes qu'il ne faut pas oublier.
Sur le continent, ce n'est pas forcément bien mieux ceci dit, si la personne qu'on cherche n'est pas à proximité, mais au moins les gens peuvent se déplacer à pied, même si ce n'est ni le plus rapide ni le plus sûr. Tandis qu'ici, il fallait a minima un bateau... Ou des ailes, mais les gens ayant un pouvoir semblable ne couraient pas les rues.
Comme Onélie semblait avoir des professionnels sous le coude à qui confier les œufs, il se contenta d'un hochement de tête.
- Très bien, je vous laisse faire. J'espère que ça ne fera pas trop de travail pour vos éleveurs.
La tâche pouvait sembler simple en apparence, mais il fallait tout de même avoir la place et les installations pour maintenir des œufs au chaud, vérifier régulièrement que tout allait bien, et surtout gérer la réintroduction de sorte à avoir des individus qui, adultes, seraient capables de se débrouiller seuls comme si de rien était.
Voyant le regard d'Onélie s'attarder sur l’œuf de teisheba, il eu une expression à mi chemin entre le sourire et la grimace. Ayant déjà eu une expérience passée malheureuse avec cette espèce, il n'avait pour une fois pas spécialement envie de se porter volontaire, surtout pour gérer un jeune turbulent. Et si vous pensiez leurs décharges indolores à la naissance, sachez que vous vous trompez lourdement!
- Oui, je connais quelques auteurs fiables et normalement assez simples à se procurer, mais si vous avez des experts dans les environs, n'hésitez pas à les consulter, les livres ne font pas toujours tout!
Surtout pour l'éducation. Il lui donna un titre assez général sur comment prendre soin d'un familier, et un autre plus précis sur les teishebas mais assez descriptif. La réalité pouvait être bien différente et elle ne trouverait pas réponse à toutes ses questions dans ces livres, même si cela devrait pouvoir lui fournir une bonne base. Un connaisseur pouvait toujours s'avérer utile dans ce genre de cas.
- Vous étiez aussi là pour les festivités, disons qu'on est quittes! J'espère que vous pourrez rapidement revenir pour en profiter. Merci pour votre aide et qui sait, peut-être à une prochaine fois!
Il la salua, lui souhaitant d'avance une bonne fête du solstice tandis que Likva la remerciait avec enthousiasme pour la nourriture offerte - en voilà un qui ne perdait pas le nord - puis le duo laissa la jeune fille vaquer à ses occupations. Son sac n'étant sans doute pas chauffant, et risquant de toute façon la collision avec d'autres gens présents, elle avait tout intérêt à se hâter, et la présence de l'hybride ne l'aiderait pas spécialement. En attendant, elle l'avait conduit au centre des festivités, alors maintenant qu'il avait fait ce qu'il avait à faire et fait une nouvelle rencontre, autant en profiter... Il n'avait pas cité de prix, mais il ne demanderait sans doute qu'une petite participation plus par principe qu'autre chose. Et maintenant, voyons ces stands, car le petit encas de tout à l'heure suivi de l'incident avec le vieillard semblait avoir ouvert l'appétit de tout le monde, dont le sien!