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    Un monde plein de mystères,
    plein de magie et surtout plein d'aventures...

    Il est peuplé de créatures fantastiques. Certaines d'une beauté incomparable, d'autres aussi hideuses qu'inimaginables, beaucoup sont extrêmement dangereuses alors que quelques unes sont tout simplement adorables. La magie est omniprésente sur ces terres : des animaux pouvant contrôler la météo, des fleurs qui se téléportent, des humains contrôlant les éléments, des objets magiques permettant de flotter dans les airs...

    Dans ce monde, il y a le royaume d'Aryon. Situé à l’extrémité sud du continent, c'est un royaume prospère, coupé du monde. Il est peuplé d'hommes et de femmes possédant tous un gros potentiel magique, chacun vivant leurs propres aventures pour le meilleur comme pour le pire.

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    Red et Bridget se transforment en instructeurs de la Garde de la Forteresse pour une journée, en compagnie d'une véritable instructrice...

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    [Assignation] Sceau magique | Calixte
    Le royaume d'Aryon  » Le royaume d'Aryon » Les montagnes
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    Solveig P. PrêthLa Garde
    Solveig P. Prêth
    Informations
    [Assignation] Sceau magique | Calixte
    Mer 3 Fév 2021 - 22:21 #
    Solveig avait l’impression qu’elle allait mourir gelée. Le vent fendait l’air comme une myriade de lame de glace et même sa cape de fourrure, empruntée dans la réserve pour l’occasion, ne suffisait pas à lui tenir chaud. La montée n’était pas encore trop abrupte aussi elle poussa Adonis au petit trot. Sans doute aussi gelée que sa cavalière la jument ne se fit pas prier et força l’allure. Cela faisait maintenant plusieurs jours qu’elles avaient quitté le sud, empruntant chemins et portails de téléportation afin de couvrir au plus vite la distance qui les séparaient de la Forteresse. Oh si seulement ils savaient à quel point Solveig exécrait l’idée de retourner là-bas. Même la région ne voulait pas d’elle ; dès qu’elle avait commencé à emprunter le sentier qui grimpait le long de la montagne la neige s’était mise à tomber. Silencieuse, morne comme annonciatrice de mauvais présage. Le paysage au pied de la montagne n’était pas beaucoup plus accueillant. Jusqu’ici elle n’avait croisé que deux maigres bâtisses dont l’une était complètement délabrée. La jeune femme avait hésité à s’y arrêter pour la nuit, il était un peu tôt pour faire halte mais cela lui ferait gagner une nuit en plus hors de cette maudite Forteresse. « Tu es une adulte, tu as des ordres, avance » s’admonesta-t-elle en silence.

    La neige avait également rendu les sols gelés, boueux. Mais par chance la demi-chiraki quitta la piste qu’elle suivait pour s’attaquer à un chemin plus escarpé et caillouteux. La petite jument ne sembla pas mécontente, en revanche elle abandonna le trot pour repasser au pas. Son pied, bien qu’un tantinet hésitant était sûr, sa cavalière se contenta de la guider de temps à autre. Puis tout à coup, dans la quiétude du temps nuageux où le soleil commençait doucement à décliner, un cliquetis se fit entendre ainsi qu’une voix étouffé. Louis et Leiftan. Ils avaient gardés le silence depuis si longtemps qu’elle en avait presque oublié leur existence.

    Griller… Louis.
    Elle craint de voir son familier s’éveiller aussi, tout recroquevillé qu’il était dans sa sacoche mais il n’en fit rien et bientôt sa conscience quitta de nouveau celle de sa propriétaire. Il s’était rendormis.

    - Quand arrivons nous ?
    - Quand on s’ra mort gelé pardi.

    Solveig soupira. Ils faisaient la paire autant qu’ils ne se correspondaient pas. C’était quelque chose à voir.

    - Je dirais dans une heure ou deux, tout dépendra du rythme d’Adonis. Dit-elle en tournant la tête vers le vide qui se faisait petit à petit plus grand à travers les arbres. Elle flatta l’encolure de sa jument pour l’inciter à poursuivre.

    - Nous commençons par nous rendre à la forteresse c’est cela ?
    - Oui. Maugréa Solveig.
    - Voit le côté positif, tu auras du confort et un bon feu au moins jusqu’à demain.
    - Mh. Grogna-t-elle.

    A choisir elle troquerait volontiers son confort pour une petite centaine de kilomètre entre elle et ce lieu. Malheureusement la majorité de leurs informations devrait leur être délivré sur place, par leur supérieur. Ils devraient donc dormir là-bas avant de prendre la route du camp et de la cité le lendemain matin. Sauf si ils décidaient de voyager de nuit, mais ça, même Solveig ne le recommandait pas.

    D’une certaine façon elle était impatiente de retourner aux abords de la cité. A l’époque, encore affilié aux équipes du Village Perché, elle n’avait que servit d’escorte afin d’aider. Autrement dit sa visite de l’endroit avait été succincte et dans l’urgence. Somme toute elle avait passé plus de temps à ramasser des cadavres d’inconnu et à entretenir le feu qu’à faire ce qu’elle savait faire de mieux ; se battre. Ô il n’y avait pas de sot métier aux yeux de la demoiselle, toutefois rester en arrière garde n’était pas dans ses habitudes. Avec un peu de chance, cette fois, elle pourrait voir plus loin. L’énoncé de son assignation n’était pas très clair à ce sujet. En vérité il l’était, mais elle espérait qu’il y eut manqué un ou deux éléments. Comme le nom de son coéquipier. Bien qu’il fut possible, cette fois encore, qu’elle eut rangé la missive avant même de regarder la partie, proprement écrite où il était aisé de lire «  Calixte Alkh’eir ».

    Les contours de la Forteresse se dessinèrent enfin lorsque le soleil ne fut plus qu’une fine ligne rouge à l’horizon. En contre bas les quelques villages étaient semblable à des tâches de peintures noires sur le paysage devenu blanc. Le chemin n’était plus escarpé, il était très bien aménagé et Adonis ne peinait plus à avancer. Elle croisa quelques gardes, un marchant râlant après sa mule qui n’avançaient vraisemblablement pas, ainsi qu’un détachement de cavalerie qui revenait de mission. Sur la face nord de la montagne à juger par le givre qui s’était prit dans les moustaches des chevaux et montures. Tous la saluèrent poliment et elle en fit de même, sans sa jovialité naturelle. Un regard sur la bâtisse et elle manqua d’avoir un haut le cœur.

    - Même cinq enfers me semblent plus enviable. Siffla-t-elle tout en passant la jambe par dessus la selle afin de mener la jument par la bride qu’elle confia ensuite à un jeune palefrenier. Avant de le laisser s’en aller avec la terreur alezane qui, il ne ne le savait pas encore, allait lui donner du fil à retordre, elle défit ses sacoches, son paquetage et le hissa sur ses épaules avant de tourner les talons en direction de l’entrée.

    Aussi inhospitalière que le reste de la région, l’arche se dressait devant elle en montrant ses petites dents de fer, prête à l’avaler. Elle émit un grognement guttural, et fut incapable de réprimer le frisson qui lui ébouriffa le poil des oreilles mais elle entra. Traversant la cour principale, les quelques terrains d’entraînements, passant sous une nouvelle arche puis franchit au moins deux portes avant de se retrouver dans une vaste pièce. Les dimensions étaient presque extravagantes pour un tel endroit mais cela n’avait rien à envier à ce qu’elle connaissait déjà de l'aile d'accueil du bastion du sud. Par chance quelqu’un avait allumé ou entretenu le feu, il faisait chaud. Elle alla s’adosser à un mur, déposa ses paquetages puis se défit de sa cape qu’elle roula en boule au dessus du reste de son chargement. Ne restait plus qu’à attendre les ordres, et son collègue. Pour toute réponse son estomac gronda ; elle se rembrunit.  
    Calixte Alkh'eirDamoiseau
    Calixte Alkh'eir
    Informations
    Re: [Assignation] Sceau magique | Calixte
    Ven 5 Fév 2021 - 16:43 #
    Ses pas s’arrêtèrent devant le couloir plongé dans l’obscurité, et ses mains se resserrèrent sur les manuscrits qu’elles transportaient. Dans la pénombre ayant gagné le manoir à la faveur du temps maussade et des lueurs chagrines de la saison, les deux billes d’ambre tracèrent les contours austères du passage. Il y avait là-bas, au cœur de la bâtisse, au-delà de l’une de ses portes dérobées, un souvenir en lambeaux d’effroi, de colère et de peine. Une horreur oubliée que ses songes évitaient soigneusement. Mais chaque fois que ses pas le ramenaient à l’orée de ce couloir, l’ombre rémanente accrochées aux parois semblait tendre ses sombres tentacules pour happer son corps. Pour engloutir sa conscience. Pour lui rappeler ce que sa morale avait choisi de taire. La conséquence de choix. Et Calixte, qui avait toujours été curieux à la limite de la bêtise, ne pouvait qu’être captivé par cette singularité malsaine affriolant son âme. Distraitement, ses doigts rattrapèrent une longue mèche auburn pour la recaler dernière son oreille, et il ajusta son paquetage contre la poitrine plus développée de son pendant féminin. Cela faisait presqu’un an maintenant. Déjà.

    Kana pas aimer ici, lui indiqua la loutre géante à ses côtés, lo poussant de son museau pour l’inciter à poursuivre son chemin et arracher son regard de ce passage s’enfonçant dans les entrailles du manoir.

    Incapable de trouver les mots qui la rassureraient, iel passa une main dans la fourrure du familier, prit une grande inspiration et tourna les talons. Reprenant ses déambulations à travers des parties de la bâtisse moins chargées en émotions niées, en souvenirs oubliés. Les documents qu’iel avait récupérés et les rapports à l’adresse de Lichael ne nécessitaient nullement qu’iel allât se reconfronter à la salle de torture.

    ~

    L’ordre le rattrapa alors qu’il faisait un crochet par le bureau de poste de la Caserne de la Forteresse, déposant une liasse de missives que Wendy lui avait confiée. Défait de son apparence féminine, temporairement libéré de ses obligations d’espion, Calixte avait profité de la fin de l’après midi pour retrouver son amie médecin. Depuis le trépas de la Capitaine von Andrasil, certains remaniements avaient eu lieu dans l’organisation et la hiérarchie du régiment montagnard, et si son amie avait vu ses responsabilités mieux partagées, son emploi du temps ne s’était pas tant allégé. Cela n’avait pas empêché les deux jeunes gens, même penchés au-dessus de quelques camarades souffrants, de rattraper le temps perdu et de profiter l’un de l’autre. L’enthousiasme débordant et communicatif de la rousse avait apaisé le tourment du coursier, et alors que l’obscurité glaciale de l’heure vespérale se fondait impatiemment contre les courbes de la Forteresse, une flamme moins mélancolique réchauffait les entrailles de celui-ci. Que sa nouvelle assignation refroidit néanmoins.

    Parcourant d’un regard incrédule les lignes à son adresse, Calixte se dit qu’il aurait tout à fait pu passer à côté de l’ordre de mission s’il n’avait pas eu cette tendance à passer son temps aux bureaux de poste – ou administratifs – des différentes Casernes. Mais le lieutenant Calyx semblait bien le connaitre, et ce qui aurait pu passer pour de la négligence révélait davantage une connaissance fine de ses troupes de la part du gradé. Et ce, notamment, en ce qui concernait la Cité Enfouie. Fronçant les sourcils, le coursier se demanda à quel point cette décision d’assignation avait été influencée par la Maître-Espion. La dernière fois où il avait eu affaire au lieu, cela avait été, déjà, sur ordre du précédent Maître-Espion. Il n’en avait pas gardé un très bon souvenir. Et si c’était bien sa cheffe officieuse qui avait choisi de l’y renvoyer – n’était-ce qu’aux abords de celle-ci – et ce d’autant plus en la compagnie de Solveig… Calixte pinça les lèvres d’indécision. Assurément la présence de son amie était un bonus agréable. Mais il y avait certains souvenirs liés à la Cité Enfouie qui l’inquiétaient plus à savoir la Valkyrie présente.

    Cal pas content ?
    Je vais aller en mission avec Soly,
    choisit de répondre l’espion en rangeant la lettre dans l’une des poches de sa cape. Ça sera plus loin dans la montagne. Sans doute plus dangereux, aussi. Veux-tu rester ici en attendant que l’on revienne ?
    Non ! Kana forte comme K’awill maintenant. Avec armure pour protéger. Et puis surveiller Eli et Mél.


    Retrouvant un sourire léger à la détermination de la loutre, Calixte tapota doucement le sommet de la tête de celle-ci.

    Merci, Kana. Je suis sûr que tu vas te débrouiller comme une championne, oui. On racontera tout ça à K’awill et Carci la prochaine fois.

    ~

    Le planning de la soirée avait été, sur le papier, relativement simple. Seulement, comme leurs sacs avaient été rapidement finis, eu égard au fait qu’ils n’eussent jamais vraiment été déballés jusque-là, le coursier était à nouveau allé trouver Wendy dans l’attente du rendez-vous avec la hiérarchie pour obtenir le dossier de sa mission à venir. Et de fil en aiguille, de patient en patient, de thérapeutique en thérapeutique, Calixte avait de nouveau utilisé son SAPIC sous le regard curieux et empressé de la médecin. Il n’avait à ce moment-là pas pensé à grand-chose d’autre que de satisfaire l’intérêt de son amie comme de pouvoir discuter avec elle des divers effets indésirables que le produit semblait avoir sur iel. Comme le temps leur avait rapidement manqué, leurs retrouvailles fragmentées coupant court, dans un rire amusé – et pensif ? – la jeune femme lui avait rédigé un certificat attestant de son statut, physiquement temporairement altéré par-rapport à ce que l’administration attendait certainement. L’éclat cristallin de l’amusement de Wendy l’avait suivi le long des couloirs de l’infirmerie alors qu’iel s’éloignait au pas de course, et iel n’avait pu empêcher un sourire franc de s’installer sur ses traits.

    Soly chérie ! repéra avec ravissement Kaname en poursuivant leur course effrénée à travers le couloir puis le large hall.

    La loutre se retint cependant tout juste de sauter à la rencontre de la Valkyrie, prenant la mesure de la femme à l’uniforme sévère se tenant aux côtés de celle-ci. Heurtant avec maladresse son familier dont la carrure toute de muscles et de poils amortit la collision, Calixte avisa rapidement le badge indiquant « L. Cipraite - administration » de l’inconnue, et fourra sous le nez de celle-ci sa médaille de garde comme le mot de Wendy.

    - Soldate Prêth et soldate… soldat Alkh’eir, acquiesça la soldate d’un ton où pointait une certaine irritation. Je suppose qu’à cheval donné, on ne regarde pas les dents. Veuillez me suivre. Vous tâcherez de laisser la loutre à la porte.

    Sans s’offusquer de la froideur de leur hôte à l’image de la Forteresse, Calixte adressa un sourire éclatant à son amie par-dessus la truffe tout aussi enthousiaste de Kaname, et sans s’arrêter pour quelques explications ou complaisances puisque leur guide ne paraissait pas d’humeur plaisante, iel emboita le pas de cette dernière. Iels eurent vite fait de gagner le giron d’un bureau dont le rangement minutieux rivalisait certainement avec la méticulosité du lieutenant Calyx, et la soldate Cipraite leur adressa chacun-e un dossier parfaitement tenu et étiqueté, sorti d’une étagère au classement visiblement scrupuleux.

    - Voici vos ordres de mission, présenta-t-elle sans ambages. Je vous laisse vous familiariser avec ceux-ci, et tacher de relever tout questionnement que vous pourriez avoir dès à présent afin que je puisse y répondre. Concernant l’approche de l’affaire vous êtes libres du mode opératoire, mais vous rapporterez vos décisions comme vos avancées au Sergent-Chef Aliar, responsable du campement nord. Votre statut de gardes du Régiment Al Rakija, comme celui d’enquêteurs, ne vous ouvre aucune prérogative sur vos camarades en dehors des clauses de mission prévues à cet effet. Que, bien entendu, vous connaissez. Et si votre mémoire devait vous faire défaut, vous les trouverez en annexe numéro trois.

    Le regard balayant rapidement les mots tracés à l’encre devant ses yeux, lo coursier-e tenta de s’imprégner au plus vite des détails de l’assignation.

    - Vous êtes attendus au plus vite sur les lieux ; néanmoins gardez à l’esprit que la montagne, certainement à l’image de vos océans, ne pardonne guère la moindre imprudence. Je vous recommanderai ainsi de prendre la route demain matin aux aurores, le temps y étant annoncé comme clair. Des questions ?

    Lorsque tout fut clarifié, aussi rapidement que possible comme il semblait que personne – à part les deux ami-es – n’avait envie de rester trop longtemps en la présence les uns des autres, Solveig et Calixte furent rapidement mis à la porte. Et cette fois-ci Kaname ne se gêna pas pour embrasser de ses pattes la silhouette emmitouflée de la Valkyrie, comme de lui administrer une généreuse léchouille.
    Solveig P. PrêthLa Garde
    Solveig P. Prêth
    Informations
    Re: [Assignation] Sceau magique | Calixte
    Lun 8 Fév 2021 - 17:18 #
    Solveig resta de marbre, un air hébété scotché au visage. Il lui en arrivait des choses improbables mais elle avait l’impression que plus le temps passait plus ce trait précis de sa vie s’accentuait. A quoi cela allait ressembler dans cinq ou dix ans ? A cette simple idée elle frissonna tout en réprimant un rire. Elle n’était pas pressé de le savoir, mais d’un autre côté elle était persuadée qu’elle allait s’amuser. Il valait mieux ça qu’une vie rongée d’ennuis. Quoi qu’un peu de normalité ne lui aurait pas déplu. En parlant de normalité, une loutre géante était gentiment en train de lui laver le faciès tandis qu’une blonde aux allures parfaitement Astridesque était à ses côtés. Elle y voyait aussi un peu de Calixte. C’était un étrange mélange. Pas désagréable à regarder et pourtant… Elle ne comprenait pas. Cipraite l’avait appelé soldat Alkh’eir, et du peu qu’elle retenait, le seul détenteur de ce nom de famille dans la garde était son ami et amant. Cependant, -et elle était bien placé pour le savoir – il n’était ni doté de cheveux long, ni d’une petite poitrine plutôt bien caché par les vêtements -ce qui n'avait pas l'air bien compliqué soit dit en passant -, de même il avait une voix plus grave.

    Sans le connaître sur le bout des doigts, le jeune homme avait des caractéristiques bien à lui, suffisamment en tout cas pour que Solveig soit capable de le reconnaître avant même qu’il n’apparaisse devant elle. Seulement aujourd’hui, pour la première fois depuis qu’elle le fréquentait, elle douta. Tout avait changé, même son odeur. D’ailleurs, les relents qui émanait d’iel lui donnait la nausée. Ils lui disaient quelques choses, elle les connaissaient, comme l’arrière goût d'un fruit amer qui reste en bouche et dont rien ne peut venir à bout. C’était exactement ce qu’elle ressentait. En revanche, elle percevait aussi, plus difficilement l’odeur sucrée qui avait toujours été la sienne. Machinalement elle se pencha vers l’avant pour le sentir, gorgeant ses poumons de son odeur, l’une de ses mains tapotant la tête de Kaname. La fragrance était légère, presque fébrile compte tenue de celle qu’iel dégageait d’habitude mais elle était là. Et puis qui d’autre aurait ainsi puis lui ressembler tout en étant accompagné de Kaname ? Personne. Mais Calixte en femme ? Elle le regarda de nouveau, se demandant si oui ou non, ses sens la trompait. Et si c’était bien lui, pourquoi diantre n’avait-il jamais évoqué ce genre de capacité ? De combien de pouvoir était-il doté ? Et ce parfum entêtant qu’elle sentait mais qui ne lui revenait pas… Solveig se recula en plissant les yeux.  

    La valkyrie ouvrit la bouche puis la referma aussi sec.

    - Ce gamin a beaucoup trop de secret tch. Cracha la voix de Leiftan, prenant de cours Solveig.

    - Je ne comprend pas. Répondit-elle simplement en tendant les mains pour tirer ses joues de part et d’autre. - Tu es plus féminine que moi, je pense que je devrais me sentir un peu vexé ou jalouse. J’imagine que ça fait partie des choses dont tu ne peux pas parler. Ou peut-être qu’il pouvait mais qu’il n’en avait pas envie, de toute façon, elle lui avait promis de ne pas insister et pour l’heure elle était encore en mesure de composer avec. Aussi elle haussa les épaules et toute trace d’inquiétude, de questionnement ou même de mauvaise humeur s’évanouirent pour faire place au radieux sourire qu’elle arborait constamment.

    - Bien trop complaisante cette petite. Maugréa le gant.
    - Bonjour cher ami ! Lança Louis à la cantonade.

    Solveig offrit une ultime tape sur le crâne de Kaname avant de la délaisser pour aller prendre le bras de Calixte, le traînant de nouveau dans la pièce d’accueil où elle récupéra ses effets personnels. Une fois que ce fut chose faite elle hissa le tout sur son épaule et prit le chemin des dortoirs. Le temps avait beau être passé, elle avait l’impression que c’était hier qu’elle foulait les pavés de la forteresse, hier qu’elle était assise devant l’âtre de la cheminée en faisant griller une paire de guimauve. Ce qui lui avait d’ailleurs valu une tour de garde à la frontière en pleine nuit et avec un dénommé Peldryc, indécrottable goujat que personne ne souhaitait pour binôme. Depuis elle n’avait plus jamais tentée de faire griller quoi que ce soit dans une cheminée.

    - Je crois qu’ils m’ont refilé une des chambres à l’autre bout du bâtiment. Et la déesse seule savait à quel point la Forteresse aurait aussi bien pu s’appeler « Le Labyrinthe du bout du monde ». - Si ça ne te dérange pas de m’accompagner. Tu es là depuis quand ? Ils empruntèrent la porte que Solveig avait utilisé auparavant, pénétrèrent de nouveau dans la cour principale. La valkyrie pressa le pas, elle n’avait pas remit sa cape et déjà le froid lui broyait entrailles. Elle se dirigea vers une porte lourde, faites de bois et de fer qui ne céda pas immédiatement, pas même d’un coup d’épaule.

    - Elle a du g’ler. Leur lança un camarade qui s’entraînait non loin.
    - Misère.

    Et dans toute sa délicatesse, Solveig prit de l’élan puis enfonça la porte sans douceur aucune. Cette dernière émit un craquement sonore qui laissa penser qu’un morceau venait de se briser, pourtant elle resta bien droite et s’ouvrit.  

    - Des années que le problème persiste, tu crois qu’ils auraient installés un système magique de réchauffement de serrures ?  Enfin, ça ne me surprend pas vraiment.

    - Le raffinement, la délicatesse, bon sang, que faire de vous…

    - Tu connais un peu la cité enfouie, du moins son secteur ? J’y ai été envoyé lors de la dernière expédition royale, mais mon détachement venait du Village Perché, nous n’avons servit qu’à remonter les cadavres et aider les quelques survivants. Se lamanta-t-elle. - J’avais espoir de pouvoir y descendre à l’occasion de notre assignation mais il faut croire que Lucy me refuse encore ce privilège… Sans compter qu’on va devoir aller se geler là-bas. J’ai pas enviiiiie. Et elle laissa retomber sa tête sur l’épaule du coursier, ses oreilles allant chatouiller son cou et sa joue.

    Enfin après encore une bonne dizaine de minutes de marche ils arrivèrent devant la chambre qui avait été désignée à la jeune femme.

    - La peste et le choléra. Marmonna-t-elle en ouvrant la porte.
    Calixte Alkh'eirDamoiseau
    Calixte Alkh'eir
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    Re: [Assignation] Sceau magique | Calixte
    Mar 9 Fév 2021 - 22:27 #
    La surprise comme l’incompréhension se lisaient aisément sur les traits de la Valkyrie, que ce fut le long de l’arrondi de ses prunelles, de l’arcade de ses sourcils, ou jusqu’au bout de l’apex de ses oreilles duveteuses. Intrigué-e par la suite, Calixte la laissa s’approcher un temps, humant le parfum de sa chair qui avait peut-être changé – iel aurait été bien incapable de le dire, c’était un sens sur lequel iel comptait peu – puis se redétacher de iel pour l’observer davantage, yeux plissés. Presque suspicieux. Le sourire du-de la garde s’étira davantage, et avec l’impatience de celui ouvrant une pochette surprise, iel regarda Solveig s’exprimer enfin. Ou pas.

    - Bonjour Leiftan, répondit-iel sans se départir de sa bonhomie, penchant la tête pour mieux appréhender le gant animé.
    - J’ai lu dans Garde Actuelle, une trèèèèès belle phrase de Simone de Bellevision : « pour entrer dans le secret des choses, il faut d’abord se donner à elles ». Y a ptet là le fond de la relation de nos amis, qu’est-ce t’en dis Le Flaaaan ? M’enfin j’avais répondu plus de triangles que de carrés au test de la page suivante, donc le message subliminal de la citation n’est peut-être pas celui-ci. T’es plus « lecture auprès du feu » ou « arrestation à mains nues », Le Flaaaan ?

    Levant les yeux au ciel tandis qu’Abdallah, probablement réveillé par la présence d’autres interlocuteurs potentiellement plus attentifs que Calixte et Kaname – cette dernière l’écoutait bien, mais même s’il était friand des longs monologues, le manque de répartie intelligible de la part de la loutre pouvait être frustrant – poursuivait sa discussion sur la fiabilité des revues populaires quant aux tests de personnalités qu’elles proposaient, lo coursier-e rebaissa finalement ceux-ci sur la Valkyrie alors qu’elle se saisissait de ses joues.

    - Plus féminine que toi ? rit-iel doucement en rattrapant les mains de Solveig pour y déposer un léger baiser. Cela me flatte, mais je crains ne pouvoir adhérer à ton affirmation. Néanmoins, dans le doute, poursuivit-iel en se penchant – iel était presque de la même taille sous forme féminine et masculine – pour effleurer de ses lèvres l’une des pommettes griffées de Solveig. Peut-être nous faudra-t-il prendre le temps d’examiner plus en profondeur cette notion.
    Examiner comment ?
    En intimité, juste Soly et moi,
    répondit Calixte en s’éloignant de son amie pour poser son regard sur Kaname qui les observait avec curiosité. Tu te souviens de l’intimité ?

    Depuis le développement de leur relation, l’espion-ne avait dû se résoudre à entamer l’éducation de la loutre quant aux sujets d’ordres sexuels. Parce qu’elle s’intéressait grandement aux liens étranges qui se tissaient davantage entre les deux soldat-es, avec des us particuliers que l’environnement public ne lui expliquait pas. Et puis, lo coursier-e préférait prendre le temps d’expliquer les choses à son familier, plutôt que de laisser la tâche à Apolline. Assurément personne, en dehors de la trousse de cuir, n’en sortirait indemne.

    Oui ! Kana sait ! Kana garder Abou, Eli, Mel, Le Flan et P’tit Louis pour laisser Soly chérie et Cal intimes. Apo aussi. Sûrement cachée quelque part.

    Aussi amusé que touché, Calixte tapota à son tour la tête de la loutre avant d’entrelacer ses doigts à ceux de Solveig tandis qu’elle passait son bras autour du sien.

    - De ce que je peux te dire, c’est que c’est le résultat d’un objet de pouvoir, commenta-t-iel alors qu’iels récupéraient les affaires de la Valkyrie. Je ne l’ai pas depuis très longtemps, et je crois que je ne tolère pas encore très bien ses effets.

    Peu coutumier-e de la Caserne de la Forteresse en dehors de son bureau de poste et de l’infirmerie, iel se laissa guider par son amie au fil des couloirs austères. Les conversations improbables des âmes artificielles en fond sonore – elles discutaient présentement des mérites des différents types de papiers utilisés pour la confection de magazines – Calixte suivit d’un œil intéressé la courbe des pierres sombres au gré des passages. Aurait-iel pu vivre plusieurs lunes – années – dans la bâtisse à la rudesse de son environnement ? Probablement, si on le lui avait ordonné. Certainement, si la compagnie avait été aussi bonne qu’au Bastion. Instinctivement, ses doigts caressèrent à nouveau ceux de Solveig.

    - Juste depuis ce matin. J’avais quelques courses du Grand Port jusqu’ici, puis dans la Forteresse. Je pensais être rentré pour la soirée, mais le lieutenant Calyx en a visiblement décidé autrement. Habituellement je squatte chez une amie – Wendy, l’une des médecins du régiment – qui est tellement débordée que sa chambre est usuellement vacante. C’est d’ailleurs parce qu’elle était curieuse des effets secondaires de mon objet que je suis parti pour huit heures sous cette forme. Ou sinon, lorsque je suis simplement de passage, je dors dans les dortoirs communs du tout-venant.
    Kana aussi ? Ou retrouver écuries ?
    Non, je pense que c’est comme au Bastion. Tu sauras retrouver le palefrenier ? Sol est probablement venue avec Adonis.
    Kana futée, trouver facilement. Adonis fait bisous mordants, marrante. Mais Eli pas aimer, et Mel risque être mangée.


    Comme iels s’arrêtaient devant une porte dont la serrure s’avérait être capricieuse, Calixte se détacha de la Valkyrie pour embrasser une dernière fois sa loutre avant qu’elle ne s’éloignât d’un pas bondissant vers son propre toit. Le bruit sourd du bois maugréant sous la violence d’un choc rappela son attention, et iel tourna la tête pour découvrir Solveig qui était venue à bout de la porte récalcitrante. Certainement de manière un peu brutale.

    - Le Capitaine actuel ne doit pas avoir l’adresse du notre en ce qui concerne les questions de trésorerie, commenta lo soldat-e surtout heureux-se de pouvoir se remettre à l’abri.

    Comme iel avait quitté sa cape anti-climat pour déambuler plus librement à l’infirmerie, iel accusait le froid mordant de la cour.

    - D’ailleurs, as-tu entendu la rumeur de l’ouverture de bains autour de sources chaudes près du Bastion ?

    Sans plus attendre, l’espion-ne pénétra à la suite de son amie, et iels poursuivirent leur route ; on avait vraiment attribué à Solveig l’une des chambres les plus excentrées de la bâtisse ! Leur conversation prit cependant une tournure professionnelle, revenant sur le sujet de leur assignation et les données qu’iels avaient déjà sur le lieu particulier qu’était la Cité Enfouie, et Calixte fronça les sourcils. Ses souvenirs de l’endroit étaient mitigés, voire erratiques. Comme la plupart des situations délicates dans lesquelles iel avait foncé tête baissée, elle avait porté le sceau du Maître-Espion. Et pour lui, assurément, iel aurait pu aller au-devant de bien plus périlleux encore. Etait-ce toujours le cas ? Plongé-e dans ses pensées, iel laissa instinctivement son corps se lover davantage contre celui de Solveig venant à son contact, et la douceur de l’oreille chatouillant son cou lo réconforta quelque peu.

    - J’y ai été, répondit-iel finalement. J’ai fait partie de l’une des escouades d’exploration. C’est à cette occasion que j’ai rencontré Naëry.

    Celui-là même dont iel lui avait longuement parlé au travers de leur correspondance. Celui qu’iel avait menacé de mort. Celui qu’iel avait, brièvement, aimé. Celui sur lequel iel avait, plus longuement, fantasmé. Celui chez qui iel squattait encore, de manière occasionnelle, lorsqu’iel était de passage à la Capitale. Mais qui, en l’absence de Luz, lui paraissait à présent incomplet. Bien moins charmant. Aurait-ce été de même si son cœur, aux émois apparemment aussi forts que maladroits, n’avait jeté son dévolu sur la mi-chiraki à ses côtés ?

    - Notre groupe a joué de malchance ; nous avons essuyé l’attaque de centipèdes géants dès le premier poste de sécurité souterrain. Puis nous avons rencontré des créatures étranges. Humanoïdes, mais pourvues de quatre bras. Puissantes, mortelles, se souvint-iel dans un frisson.

    Non pas d’effroi, mais d’intérêt vif. Les rapports auxquels iel avait par la suite eu accès, en raison de sa participation à l’exploration mais aussi de son statut d’espion-ne, avaient donné un nom à ces créatures, les « wardäns ». Iel avait même réussi à se procurer une dague issue de la chair – ou carapace, ou ossature – de celles-ci, au tranchant et à la dureté remarquables.

    - Avant que d’immenses tentacules, sortis des ténèbres, ne nous prissent d’assaut, poursuivit-iel, plus sombre. Je ne me souviens pas de ce qu’il s’est passé, exactement, à leur rencontre. J’ai été blessé – assommé – et je pense que c’est Naë qui m’a ramené au camp de base. Mais Krysta…

    Elle avait été jeune. Pas autant que Ruth, mais bien trop jeune tout de même. Rapidement, ouvertement, les deux hommes s’étaient entendus sur la nécessité de faire de Krysta leur priorité. Que si seul un d’eux trois aurait dû être protégé, sauvé, cela aurait dû être elle. Lucy, dans son ironie infinie fleurtant avec le mauvais goût, avait décidé d’exactement le contraire. Laissant l’aventurière au sortir de l’enfance être happée par les ténèbres de la Cité Enfouie. Initialement, ils avaient eu l’espoir de la voir réapparaitre avec les survivants que les patrouilles avaient continué à ramener à la surface. Mais plus les jours s’étaient transformés en semaines, et les semaines en lunes, plus l’amère résignation s’était fait une place dans leur cœur.

    - On lui a aussi fait un nœud au Temple, conclut-iel.

    Aux côtés de ceux de Ruth. De Nahel. Des enfants – quand bien même auraient-ils été à l’orée de leur majorité – partis trop tôt. Un court instant, iel caressa la folle idée de profiter de l’assignation pour se glisser à nouveau dans les entrailles de la Cité Enfouie, et d’aller y chercher iel-même la camarade qu’on lui avait arrachée. Entre ses compétences d’espion-ne et celles de la Valkyrie, iels arriveraient bien à retrouver trace de l’aventurière ! Puis l’immensité traitresse de l’endroit se rappela à iel ; percluse de créatures mortelles, pavée de mécanismes complexes et piégeux, tombeau de tant d’âmes qu’il avait fallu appeler en renfort d’autres unités pour assurer leur évacuation les pieds en premier.

    Iels stoppèrent leur pas dans un couloir que la pénombre vespérale n’égayait guère, et Solveig indiqua que sa chambre devait être là. C’était vraiment – assurément, depuis le temps qu’iels marchaient – le bout de la Caserne. La porte, moins capricieuse que celle battue par les intempéries, les fit pénétrer sur ce qui tenait plus du cagibi qu’autre chose et, un temps, iels détaillèrent du regard les malheureux mètres carrés spartiates qui leur faisaient face.

    - En comparaison, les dortoirs communs semblent presque accueillants, nota avec amusement Calixte que les pénibles souvenirs n’émouvaient plus autant qu’avant. Es-tu sûre de ne pas vouloir d’une couchette entre quelques collègues aux relents de boucton ?

    Et comme il semblait que l’odorat développé de la Valkyrie préférait l’humidité glaciale de la minuscule chambre aux effluves soufrées de celle commune, après avoir négligemment jeté Abdallah à terre – alors que ce dernier devisait avec Leiftan et Louis du cours actuel de la soie – iel se laissa tomber dans un rire auprès de son amie, sur le matelas rudimentaire. Avant de se relever d’un bond à la nausée subite lo prenant. Sans demander son reste, iel atteignit en une fraction de seconde la porte, et en trois enjambées empressées les sanitaires communs qu’iel avait repérés dans le couloir. Lorsqu’iels reviendraient de leur assignation, il lui faudrait retourner voir Wendy et passer davantage de temps auprès de la jeune femme qui, assurément, aurait bien un avis – et une solution – quant à ces effets indésirables de son objet de pouvoir.

    - Pardon, s’excusa lo coursier-e contrit-e auprès de Solveig, alors qu’Abdallah lui tendait d’une lanière son équivalent de brosse à dent, suite à son retour vacillant dans la chambre. Ça a tendance à m’arriver sous cette forme. Je voulais en parler à Liory, mon cousin, qui s’y connait en enchantement d’objet, mais je n’en ai finalement pas eu l’occasion. Comme à Wendy mais… l’heure a tourné plus vite que prévu. D’ailleurs…

    Coinçant son bâtonnet entre ses dents, avisant son tempus, iel proposa :

    - Sans doute vaudrait-il mieux ne pas trop tarder à se coucher, si le départ est prévu pour l’aurore. Nous aurons tout le loisir de discuter du dossier sur le trajet jusqu’au campement. Je doute que la neige n’ait des oreilles.
    Solveig P. PrêthLa Garde
    Solveig P. Prêth
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    Re: [Assignation] Sceau magique | Calixte
    Mer 10 Fév 2021 - 18:01 #
    Calixte piqua sa curiosité au vif  - pas que cela fut franchement difficile. Solveig aurait payé cher pour être, elle aussi, descendu dans les tortueux méandres de cette cité dont elle n’avait vu que les vestiges, ou pour affronter ces créatures dont elle n’avait qu’entendu les cris, entraperçu des ombres qui les lorgnaient derrière la barrière de lumière des cristaux de l’avant garde. Son ouïe avait aussi pu capter les battements, les chuintements, les grognements. Son nez s’était saisi des odeurs mais cela était tout. Il avait fallut remonter et si son instinct guerrier était fort, les bras du camarade qui l’avait traîné jusqu’à l’extérieur aussi. Elle s’était même débattue, sans grand succès, prenant une réprimande qui lui avait remit les idées en place ; qui lui avait juste rappelé que des corps jonchaient son chemin et qu’ils étaient sa priorité ; celle de ses supérieurs. C’était sans doute là son côté le moins humain, mais partie intégrante de ce qu’elle était.

    Instinctivement elle resserra sa poigne autour du bras de Calixte. Elle savait ce que cela faisait de perdre un proche. Les circonstances étaient différentes par bien des égars, leurs liens également mais la culpabilité et la douleur, étaient sensiblement aussi fulgurantes. La valkyrie aurait volontiers ajouté quelque chose, une tirade stupide quant au fait qu’elle reposait sans doute aux côtés de Lucy, que maintenant elle n’avait plus à craindre quoi que ce soit, mais elle savait également à quel point ces mots pouvaient être futiles voire même agaçants. Elle préféra donc se taire, se raidissant à l’évocation du temple, celui où Calixte avait fait un nœud en l’honneur de son fils. Le souvenir manqua de déborder mais elle l’étouffa instantanément, tout comme elle s’échinait à réduire à néant la moindre once de bribe du passé qui tenter de ressurgir et elle excellait dans ce domaine. C’est à ce moment qu’elle avait trouvé la porte de sa chambre, comme une bouée de sauvetage.

    Bouée crevée cela dit mais bouée quand même. Solveig avait lancé un regard médusé à l’intérieur du cagibis ; son emport’out était plus grand, mieux aménagé mais il ne disposait pas d’une mini salle de bain -un lavabo- et puis il n’était pas aussi chaud. Mais comme le disait si bien le coursier, les dortoirs communs étaient plus accueillants. Mais ils étaient également plus bruyant, plus odorants et les gens avaient la fâcheuse manie de laisser constamment une lumière allumée. Autrement dit, ce n’était pas du grand luxe mais c’était bien mieux que ce qu’elle aurait pu avoir. Le nouveau commandant avait tenu compte de ses capacités ou c’était là un heureux hasard, dans un cas comme dans l’autre elle ne comptait pas se plaindre.

    - Un jour je te ferais dormir à la bouctonerie, tu m’en diras des nouvelles ! Railla-t-elle tout en allant s’installer sur le lit duquel des volutes de poussière s’échappèrent, traversant un rayon de lumière qui s’infiltrait par une fenêtre qui était d’ailleurs plus proche de la meurtrière. Maintenant qu’elle était plus ou moins installée, elle entendait bien profiter de Calixte, ne serais-ce que de se lover contre lui mais avant que sa main tendue ne puisse l’atteindre il avait disparu. Jamais elle n’aurait pu imaginer qu’il soit capable d’une telle rapidité sans que quelque chose de catastrophique ne lui arrive et elle ne parlait pas du dégueulis dont l’odeur lui parvint presque avant le son, mais plutôt d’un pavé sortant un peu trop du sol, d’une porte plus lourde que prévu ou encore du fait qu’il se soit trompé de côté. Par chance il était arrivé à bon port et presque aussitôt de retour. Toujours debout, elle se mit à jouer avec l’une des mèches blondes de son ami, la faisant rouler entre ses doigts d’un air songeur.

    - Tu ne devrais pas oublier de poser des questions aussi importantes, si ton enchantement ronge ta santé, il n’a rien d’enchanteur. Puis elle relâcha ses cheveux pour lui laisser le loisir de se laver les dents à sa guise. De son côté elle ouvrit son sac et commença à en sortir quelques affaires dont elle aurait besoin pour le lendemain. Notamment une nouvelle chemise en lin, sa cape qu’elle étendit derrière la porte et de quoi cirer ses bottes qui n’avaient définitivement pas apprécié leur passage dans la neige un peu plus tôt. Si elle elle n’avait pas prit soin de les huiler avant de partir elle était prête à parier qu’elles se seraient déjà fendiller.

    - Tu as sans doute raison, reprit Solveig à l’adresse du coursier, mais ce n’est pas de dossier ni d’assignation que je veux te parler. Son air était sérieux, peut-être même un peu trop. Elle se tourna vers les âmes artificielles qui, mine de rien, avaient stoppés leur discussion pour les écouter en douce. - Et je n’ai pas besoin d’un public… Dit-elle en souriant. Ses propres âmes émirent quelques éclats d’indignation mais Azazel profita de cet instant précis pour sortir de sa sacoche, à moitié endormis.

    Kana est à l’écurie avec Adonis, si tu veux aller la voir.
    Kana… Ecurie avec méchante Ado. Hum… Griller Ado.
    Non. Emporte les garçons
    Dommage… Marmonna l’esprit engourdit du familier, s’approchant du sac a dos qui accueillait maintenant un Louis et un Leiftan mécontent. Non sans mal et avec une lenteur atroce il les traîna dans son sillage. Solveig réprima de toute sa volonté un rire tonitruant. Il y avait plus urgent ; elle referma la porte derrière eux.

    - Bien, un soupir franchit la barrière de ses lèvres et elle se glissa dans le dos de Calixte, plongeant son nez dans ses cheveux, laissant ses mains courir sur son torse comme elle l’aurait fait si il avait été homme. - Tu offres une toute nouvelle perceptive et tu pensais que je n’aurais pas envie d’en profiter ? Lui demanda-t-elle d’un air tantôt boudeur, tantôt amusé. Sa dextre abandonna ses caresses pour commencer à le débarrasser de ses vêtements, alors que ses lèvres et son autre main avaient dégagés sa nuque et se faisait un plaisir de l’embrasser ainsi que la naissance de ces épaules.

    La perspective d’étreindre une femme ne lui était jamais venu à l’esprit, sûrement parce  qu’aucune d’entre elles ne s’y étaient essayés ou bien parce qu’elles n’étaient pas Calixte. Dans un cas comme dans l’autre, elle n’était pas disposée à laisser cette occasion passer et comptait bien remettre le couvert si l’envie leur en disait. Enfin, le haut en tissus vint choir à leurs pieds sous le regard brûlant de la Valkyrie. Cessant sa traîtrise au revers de son amant – ou plutôt amante – elle repassa devant lui. Bien décidé à ne pas lui laisser un instant de répit, elle lui arracha un baiser, enlaçant sa taille, se ravissant des nouvelles courbes qu’elle sentait sous ses doigts. De ses lèvres, elle passa à ses joues, glissant ensuite sur sa gorge qu’elle vint mordre avec affection. Ses mains se fondaient sur les hanches délicates d’un Calixte qu’elle redécouvrait, dans ses cheveux également qu’elle se surprenait à aimer emmêler autour de ses doigts. La nouveauté lui plaisait, celle ci particulièrement. Sa langue prit la place de ses lippes et sa course descendit encore, torturant la chair qui croisait sa route, dévalant le val de sa poitrine jusqu’à son nombril. Un genou à terre, les joues meurtries par une chaleur incandescente, une main prête à le débarrasser de son pantalon tandis que l’autre s’attardait sur les hauteurs. Brusquement, Solveig se changea en statue de sel.

    - Je… Bafouilla-t-elle. Son visage perdit immédiatement toute couleur et une lueur d’effrois passa dans le tréfonds de ses iris. Ses mains, devenues subitement maladroites, s’enroulèrent autour de la taille gracile de Calixte et elle colla son oreille contre la peau de son ventre. Comme si elle venait de se brûler, elle s’écarta de lui d’un bon.

    Elle avait l’impression que l’air venait à lui manquer, le monde semblait tourner autour d’elle comme un manège entêtant, comme un bateau bringuebalé par la houle. Elle eut la nausée. « Impossible » s’écria sa conscience alors qu’elle cherchait à comprendre. Ses pupilles, aussi larges que des billes se posèrent enfin sur Calixte. Que dire ? Oui, comment pouvait-elle lui demander une telle chose ? C’était grotesque et surtout, si c’était là l’un de ses secrets supporterait-elle qu’il ne le lui partage pas ? Les questions se bousculèrent dans son esprit, s’entrechoquèrent. Elle était plus perdue que jamais. Mais il y avait plus important. Plus impératif que les questions qu’elle se posait. Ses yeux restaient ostensiblement posés sur la blonde, ne la quittant que lorsqu’elle alla s’asseoir sur le lit.

    - Je… Jusqu’à quel point l’enchantement est-il efficace Cal ? Demanda-t-elle d’une petite voix, prenant son visage entre ses mains en cherchant la meilleure façon d’annoncer une telle nouvelle. - Est-ce que… Est-ce que tu as couché avec un homme sous cette forme ? La jalousie lui transperça l’estomac, lorsqu’elle réalisa que la réponse à cette question était évidente, mais elle n’en fit rien et s’obligea à lui sourire. - Assied-toi s’il te plaît. Elle le tira pour qu’il obtempère, il ne manquerait plus qu’il s’évanouisse et se fracasse le front contre le sol en pierre. Lorsque ce fut chose faites, elle caressa sa joue du bout des doigts et lui offrit un sourire plus proche de la grimace qu’autre chose. - Tu n’es...Pas seul. Je… Elle en perdait ses mots. - J’ai… Silence.- Deux cœurs. Finit-elle par lâcher de but en blanc. - Le tiens et un autre. Un autre qui est là. Elle pointa le bas de son ventre du doigt. Enfin, ses yeux remontèrent sur celui aux traits fins de Calixte, appréhendant plus que tout sa réaction. Mieux que personne, elle savait le genre de choc que cela pouvait produire.  
     
    Calixte Alkh'eirDamoiseau
    Calixte Alkh'eir
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    Re: [Assignation] Sceau magique | Calixte
    Ven 12 Fév 2021 - 21:43 #
    Iel tendit sa brosse à dent nettoyée à Abdallah qui s’empressa de l’avaler, et imita Solveig qui récupérait quelques affaires propres pour le lendemain. Iel n’en avait pas prévu beaucoup ; à la base le plan n’avait été que de faire un aller-retour vers la Forteresse. Mais tant que faire se peut, iel préférait accommoder l’odorat développé de son amie, et éviter de manifester trop rapidement l’odeur de boucton qu’iel pouvait reprocher à ses collègues plus négligents. Ceci dit, iel avait aussi, quelque part dans l’immensité de son grand sac sans fond, un médaill’ond’air qui devait pouvoir garantir la paix des ménages au besoin. Une nébuleuse encore transite de sommeil passa devant iel, et iel accusa un moment de doute, avant que Vreneli se ne dégagea de sa manche pour saluer Azazel. Et l’aider à déménager le paquetage d’âmes artificielles. Amusé-e, Calixte leur ouvrit la porte et les regarda s’éloigner lentement à travers le couloir. Distraitement, iel se demanda si Mélyne était restée dans les sacoches de Kaname, ou s’iels risquaient de la découvrir au hasard des draps. Ce qui ne dérangeait guère l’espion-ne, mais affolerait certainement la Valkyrie, dont l’appréhension pour les glooby – aussi incompréhensible qu’attendrissante – était maintenant bien connue de ses proches.

    Les mains de Solveig passèrent de part et d’autre de son corps, fermant l’issue de leur cagibi, et les pensées songeuses du-de la coursier-e haltèrent leur course pour abruptement s’arrimer à celles-ci tandis qu’elles se rabattaient contre son torse. L’effleurant d’une caresse tout en sensualité, l’effeuillant presqu’avec empressement. Comme le vent emportant d’une bourrasque décidée les feuilles échouées vers d’autres horizons, le désir rapidement embrasé de l’espion-n éparpilla tout autre préoccupation. Un sourire gourmand gracia bientôt ses lèvres, et iel alla pleinement à la rencontre de sa séduisante amie. Il y avait une certaine curiosité, dans les gestes enthousiastes et volontaires de la mi-chiraki, et Calixte se demanda distraitement si elle avait déjà joué avec des partenaires de sexe féminin. Ou présentant des courbes féminines. L’idée se fraya un chemin alambiqué dans les volutes brumeuses accompagnant la flamme de sa concupiscence et, un temps, son esprit engourdi d’envie ne put résister à celle d’imaginer la Valkyrie aux mains d’autres créatures similairement dotées. Avait-elle déjà été intime avec Sammael, dont elle partageait la chambre ? Aurait-elle pu embrasser la fièvre de Luz, dont le tableau de chasse n’égalait que l’adresse de sa passion ? Si le destin en avait voulu ainsi, se serait-elle laissée aller à quelques danses, non seulement avec Valentino, mais aussi avec Khalie ? Il y avait une tension au creux de ses reins qui, viscéralement, refusait de partager sa voluptueuse amante. Mais elle était engloutie dans un océan de fantasmes bien plus alléchants.

    La caresse humide traçant le vallon de sa poitrine jusqu’à son nombril lo rappela à des considérations bien plus délicieusement immédiates, et iel glissa ses doigts avec ravissement dans les mèches nacrées de Solveig, jusqu’à effleurer ses oreilles duveteuses. Il y avait là une tendresse qui frisait l’obsession, mais depuis qu’iel avait entendu – et vu – que les appendices faisaient partie des zones érogènes de son amante, iel ne réfrénait plus son envie de les toucher. En privé. L’une des mains de la Valkyrie s’arrima avec détermination à son pantalon, et iel la couva d’un regard brûlant. Si le cagibi qui leur servait de chambre ne leur laisserait certainement pas un souvenir impérissable, leurs prochains jeux d’adultes leur rendraient leur passage assurément plus mémorable. Et agréable. Néanmoins, la suite de leur bagatelle prit une drôle de tournure lorsque la mi-chiraki se figea soudainement. Ses gestes se crispant, une tension d’autre ordre que celui du plaisir empressé se moulant le long de ses muscles. Surpris-e par le brusque revirement d’attitude, conscient-e des sens surdéveloppés de son amante, Calixte pensa instinctivement que la porte allait s’ouvrir, interrompant leurs ébats et les laissant dans une position compromettante. Son regard se leva avec effarement sur le bois du battant, ses doigts cherchant instinctivement un abri dans lequel les faire fusionner. Et puis, Solveig cala son oreille contre son ventre, et les pensées de l’espion-ne firent un nouveau cent-quatre-vingts. Etait-elle en réalité plus perturbée par le changement de son entre-jambe – et l’absence évidente de certaines parties à cet endroit présentement – que ce que sa délectation pour ses nouveaux atours pectoraux avait laissé préjuger ?

    Iel n’eut cependant pas l’occasion de trop s’appesantir sur cette étrange notion, car la Valkyrie se détacha d’un bond de son corps, comme s’il l’avait brûlée. A moitié nu-e, les mains encore levées dans l’empreinte de leur embrasse, Calixte cligna bêtement des yeux en contemplant le vide laissé par son amie. Assurément, il y avait là quelque chose qui lui échappait complètement. Levant son regard avec interrogation, iel fut surpris-e de lire sur ses traits une confusion miroir à la sienne, ainsi qu’une myriade d’émotions fugaces, accompagnant certainement une floppée de songes encore plus nombreux.

    - Sol ? finit-iel par demander, ne sachant par quel bout appréhender l’étendue du miasme émotionnel semblant avoir saisi la Valkyrie.

    La réponse de celle-ci lui fit froncer les sourcils. Il y avait là un enchainement de pensées dont le fil conducteur lui échappait totalement. Mais aisément conciliant-e, bien que ses neurones cherchassent toujours le dénominateur commun des réactions de Solveig, iel s’accommoda de ses interrogations.

    - Heu assez ? Comme tu peux le voir j’ai là mes deux seins à l’image d’un corps féminin plus que masculin. Si on continue, il va sans dire que je te montrerais aussi mes organes génitaux qui ont changé. Le timbre de la voix, les courbes de la silhouette, les caractéristiques musculosquelettiques… le SAPIC modifie vraiment d’un sexe vers l’autre. Pour huit heures d’affilées. Je ne pense pas que ma verge ressurgira inopinément au milieu de…

    Iel ne savait pas si cela ajoutait du tracas à l’embarras soudain de son amante, ou si cela la réconfortait. Et comme ses interrogations se poursuivaient, iel observa avec inquiétude le visage de celle-ci. A la recherche de la moindre indication dans le maelstrom d’émotions défilant le long de ses traits. Avait-iel encore réalisé une quelconque maladresse ? Iel n’en aurait pas été étonné-e, mais iel ne souhaitait pas que cela impactât la Valkyrie pour laquelle iel avait une tendresse toute particulière, et iel était tout à fait prêt-e à passer la nuit à répondre à ses doutes si cela pouvait l’apaiser. Comme, notamment, ceux concernant ses autres partenaires de danse.

    - Oui, avoua-t-iel simplement, sans comprendre. Il y a quelques lunes ; quatre peut-être ? Une fois. La première fois où j’ai utilisé le SAPIC. Ça n’était pas du tout prévu comme ça ; je n’avais pas acquis l’objet de pouvoir pour cela. Mais la tournure des évènements a fait que…

    Ses pensées, qui s’étaient rapidement suspendues au souvenir des valses ardentes, revinrent abruptement à la situation présente. Il était sans doute inélégant qu’iel s’attarda davantage sur cet épisode charnel, alors qu’iel participait actuellement à des jeux d’adultes avec une toute autre partenaire. Avec une amante dont, non seulement la chair sensuelle appelait son désir, mais dont tout l’être attisait son amour. Distraitement, alors que Calixte se demandait s’il n’y avait finalement pas une étonnante trace de jalousie dans les propos décousus de Solveig, iel nota qu’iel aurait été prêt-e à partager, au gré des envies de celle-ci, le corps de son amante. Mais certainement pas son affection. Emmêlé-e dans ses conjonctures malavisées, ainsi que dans ses propres révélations, iel n’obtempéra pas immédiatement lorsque la Valkyrie lui indiqua de s’assoir à côté d’elle. Etait-ce déjà la maladresse, le secret, de trop ? Les yeux de l’espion-ne s’arrondirent d’inquiétude, et son battant embraya sur un tempo presto.

    - Je n’ai pas réfléchi, poursuivit-iel rapidement. On était à la Volière… je veux dire à la coloc, et il y avait Luz et Naëry. Et comme je venais d’essayer le SAPIC, je galérai un peu à trouver un nouvel équilibre grâcieux dans ce corps aux nouvelles proportions. Ça a commencé par des pas de valse…

    Echos de temps plus insouciants, au Chat Noir, avec Sakuna.

    - … et puis de fil en aiguille, continua-t-iel alors que la main de Solveig venait lo chercher pour l’assoir à côté d’elle. Est-ce cela qui t’ennuie ? La liaison antérieure avec d’autres, sous…

    La douceur des doigts agiles de la Valkyrie sur son visage, glissant le long de sa pommette avec tendresse mais fermeté, arracha ses tourments pour les laisser s’étioler, un temps, contre leur chaleur. Ça n’était pas cette notion là qui, à leur âge, à leur avancée sur le chemin de la vie, relevait du commun et de l’attendu. Qui n’était pas nécessairement agréable à la réflexion, mais qu’il aurait été péniblement vain de nier. Un instant, toute alarme quitta l’espion-ne qui se coula instinctivement davantage contre la main réconfortante de son amie. Bien sûr qu’iel n’était pas seul-e, mais il était agréable de l’entendre de la bouche de celle-ci. Souriant béatement aux propos de Solveig, Calixte se demanda si c’était le moment de candide émotion, prenant son amante aux réactions aussi changeantes et brusques qu’une tornade, qui avait embarrassé celle-ci. C’était étonnant, car au regard de leur soirée passée en haut des murs du Bastion, à se livrer pour mieux se retrouver, elle ne lui avait pas paru plus timide de ses sentiments que de ses désirs. Alors finalement quoi ? Qu’est-ce qui la perturbait présentement ? Apparemment, la présence de deux cœurs. Dont l’un, à un endroit incongru.

    Le sourire de Calixte se figea, avant de disparaitre sur une moue confuse. Ses orbes ambrés suivirent le geste du doigt de la Valkyrie, se posant en premier lieu sur sa propre poitrine – qu’iel admira quelques secondes, ne se faisant toujours pas totalement à son corps de femme – avant de dévaler jusqu’à son ventre, sur lequel Solveig avait posé son oreille quelques minutes plus tôt. Iel avait aussi un cœur là ? Ses sourcils s’arquèrent d’incrédulité. Iel était loin d’être lo plus fin-e des scientifiques, mais n’était-ce pas anormal ? Iel ne connaissait aucune créature dotée de deux cœurs. Il y avait bien des animaux, ruminants, qui disposaient de plusieurs estomacs ; mais plusieurs cœurs ? Les marins racontaient que certaines bêtes maritimes en étaient dotées, mais Calixte ne s’était jamais renseigné plus que cela. Et, jusqu’à preuve du contraire, iel ne possédait pas de parenté aquatique. A moins que le SAPIC, non content de changer son sexe, ne lui attribuât quelques autres caractéristiques improbables ? Le vendeur ne lui avait pas mentionné de tels effets, mais il ne lui avait pas non plus indiqué qu’iel passerait la plupart du temps à vomir, s’iel utilisait l’objet. Quel type de créature possédait deux cœurs et passait son temps à dégobiller ? A choisir, l’espion-ne aurait peut-être préféré être soumis-e aux affres des menstruations. Les pensées de Calixte patinèrent à cette notion, et effectuèrent un retour arrière avec soupçon. Puis perplexité. Et enfin effroi.

    Sur un mouvement brusque du chef, iel fendit son regard épouvanté dans celui, perclus d’expectative, de Solveig. Ses lèvres s’entrouvrirent sur une interrogation – un hurlement, un déni – mais aucun son n’osa franchir celles-ci. De longues secondes, iel tourna et retourna la pensée que son amie venait de lui soumettre, et dont les aspérités prenaient bien trop parfaitement la forme des doutes qui l’avaient accompagné-e jusque-là. Instinctivement, ses doigts gourds allèrent chercher la chaleur de ceux de son amie, et la rugosité de la peau guerrière fit dérailler la boucle de réflexion, tétanisée, de l’espion-ne. Iel n’avait jamais été du genre à se complaire longtemps dans l’immobilisme, ni à nier les évidences. C’était d’ailleurs bien pour cela qu’iel trouvait satisfaction dans la fuite ; il y avait là un entre-deux qui soulageait sa curiosité, et respectait son intégrité. Et alors maintenant, où fuir ? L’ambre vacilla un instant, et lo coursier-e attrapa distraitement son haut qui trainait à quelques centimètres seulement. Se réengonçant dans des affaires chaudes, iel se leva d’un bond et avisa la sortie de la chambre.

    Iel n’aurait su dire si c’était iel qui avait tendu sa main vers Solveig, ou Solveig qui avait attrapé la sienne ; probablement s’étaient elles automatiquement cherchées, pour se rencontrer à mi-chemin.

    - Je vais aller voir Wendy, déclara Calixte d’une voix alourdie par l’hésitation – la peur, la culpabilité, la résignation. J’aimerai que tu viennes, poursuivit-iel par-dessus son épaule, son regard effleurant celui de la Valkyrie.

    Plus qu’un espoir, c’était peut-être bien un besoin viscéral. Assurément Wendy confirmerait-elle ou infirmerait-elle la pensée – la lourde sentence d’une utilisation malavisée d’un objet de pouvoir mal connu – qui tordait d’une main de fer ses entrailles ; iel savait qu’il existait des plantes et décoctions pour s’informer de ce genre de condition. Et si c’était bien le cas, si l’expertise médicale affirmait celle déjà habile de la mi-chiraki… alors y aurait-il des questions autrement plus pesantes, autrement plus décisives, à investiguer.

    Finalement, la nuit risquait d’être bien plus courte que prévu.

    Solveig P. PrêthLa Garde
    Solveig P. Prêth
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    Re: [Assignation] Sceau magique | Calixte
    Lun 15 Fév 2021 - 22:23 #
    Le trajet jusqu’aux quartiers de la dénommée Wendy se fit dans un silence de mort. Solveig, malgré son bras qui entourait celui de Calixte, malgré sa dextre qui caressait en douceur et à des intervalles irréguliers le dos du coursier, se perdait dans ses pensées. Tantôt dans son propre passé, en essayant de se souvenir du sentiment qu’elle avait ressentit lorsqu’elle même avait prit conscience de son état. Et elle ne s’en souvenait que trop bien. Comme une explosion d’un millier d’émotions ; de la peur, des regrets, l’urgence de vouloir faire un bon dans le temps pour amener à changer ce présent auquel il faut faire face. Passé le coup des premières émotions, dévastatrices, ne reste qu’un paysage paisible mais désolé, une vaste plaine d’où émane une terreur froide, indicible. Que faire ? Que choisir ? La facilité ? Et ainsi refuser d’assumer le choix de nos erreurs, ou au contraire en prendre la pleine responsabilité. Mais surtout que veux véritablement dire « assumer son erreur » lorsqu’à nos yeux, tout n’est pas qu’erreur ? Solveig aurait aimé l’enlacer, lui ôter le poids de ses pensées, qui, elle le supposait devait paraître soudainement d’une lourdeur écrasante. Mais elle n’en fit rien, comme lui, elle voulait en avoir le cœur net.

    Ses sens ne l’avaient jamais trompés, pas même lors de sa propre grossesse. L’odeur caractéristique que dégageait Calixte, ce son fébrile mais pourtant bien présent qu’elle entendait dès que le silence se faisait. Impossible de se tromper et pourtant, ils étaient en train de traverser l’entièreté de la Forteresse au pas de course. Comme si il restait une once d’espoir que cela fut faux. Après tout qui était à l’abri d’une sinusite couplé à une otite hein ? Personne ! Et Solveig aurait préféré qu’il en soit ainsi, il s’en fallut de peu pour qu’elle fausse compagnie à son amant pour aller brûler un cierge dans le temple de Lucy le plus proche. Malheureusement leur trajet se finissait déjà devant une porte en bois.

    Il fallut un certain temps pour que la jeune femme leur ouvre la porte, vu l’heure ce n’était pas étonnant. Au vue des  fentes qui lui tenait lieux d’yeux il était aisé de deviner qu’ils l’avaient tirés des bras de Morphée. Cependant elle les laissa entrer avec amabilité. De ce qu’il sa passa, Solveig n’en garda qu’un souvenir très vague. Elle qui était d’une nature bavarde et avenante resta dans un coin, le regard vague, l’esprit ailleurs. Quelques mots lui parvenait parfois. « Comment ? » « Naëry ? » « Je vois... ». Puis le silence s’était de nouveau fait roi. Ce dernier était tendu, crispé même, il alourdissait l’air et accablait les épaules des gens présent. A ce moment là jeune femme manqua de sortir en trombe, elle étouffait. Malgré tout elle resta sagement à sa place, inspirant longuement en fermant les yeux.

    Enfin, le couperet tomba. Bien moins lourdement qu’elle n’aurait pu l’imaginer. Ce n’était pas une surprise, elle savait. Ce qu’elle ne savait pas en revanche, c’était ce qui se tramait dans la tête de Calixte. Elle aurait parié que la nouvelle l’avait dévasté, qu’il avait peur, mais elle savait aussi qu’il était parfois d’ôté d’une force et d’une vivacité qui auraient pu la faire pâlir de jalousie. Présence silencieuse, elle lui tint compagnie jusqu’à ce que l’heure fut trop avancée et qu’elle du le quitter afin d’aller préparer leurs montures.

    Le soleil n’était même pas encore levé, faible lueur violacée par delà le mont qui la tenait en respect. Le ballet des flocons la captiva, tous différents, tombant presque sans faire de bruit. Elle avait beau être enfermé dans une nasse silencieuse depuis des heures, c’est seulement maintenant qu’elle en profita pleinement. A croire que le vent qui lui glaçait le sang en profitait pour geler tout ses doutes, ses questions et ses angoisses « Revigorant. » pensa-t-elle. Ce qui était ironique lorsque l’on savait à quel point la valkyrie haïssait le froid. Resserrant sa cape autour de son cou, elle s’enfonça dans la nuit en direction des écuries, la neige nouvelle crissant sous ses pas.

    Avec l’aide d’Emma une palefrenière diablement efficace, qui en plus avait réussit à s’attirer les faveurs d’Adonis, Solveig prépara leur départ. Harnachement, sacoches, âmes artificielles, elle ne cessait d’aller et venir, se rajoutant parfois quelques détour entre les murs de pierre afin de vérifier telles ou telles informations sans grands intérêts. Il fallait qu’elle s’occupe c’est tout. Elle ne prit même pas le temps de déjeuner, et encore moins de papoter.  

    Quand l’aurore daigna enfin leur parvenir, que les raies de lumière traversèrent avec peine les nuages gris, Solveig était déjà sur le dos d’Adonis. L’une de ses mains tenait les rênes de Kaname, tandis que l’autre réajustait son étrier dont la lanière s’était tordue. Quand tout fut en ordre elle se mit machinalement à gratter l’encolure de la loutre tout en marmonnant.

    - Sois sage aujourd’hui ma vieille. La journée risque d’être longue… Et comme pour confirmer ses dires elle bailla à s’en décrocher la mâchoire.
    Calixte Alkh'eirDamoiseau
    Calixte Alkh'eir
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    Re: [Assignation] Sceau magique | Calixte
    Mar 16 Fév 2021 - 21:48 #
    L’aurore arriva en perçant difficilement les nappes de nuages qui s’étaient amoncelées là pendant la nuit, mais sous les vents mordants venus d’encore plus haut dans les montagnes, la chappe en camaïeu de gris s’esquinta contre les reliefs tranchants des pics avant de s’étioler en direction des plaines. La soldate Cipraite n’avait pas menti, la matinée serait certainement propice à leur progression jusqu’au camp du Sergent-Chef Aliar, le ciel se dégageant peu à peu à la faveur de rayons faiblards mais réconfortants. Calixte, qui aurait été bien en peine d’expliquer depuis combien de temps ils avaient quitté la Forteresse, et quel chemin ils avaient emprunté, coula un regard par-dessus son épaule dans la direction de Solveig. Probablement n’avait-elle que peu dormi – voire pas du tout – car sa silhouette avachie contre celle de la fière alezane dénotait avec son attitude usuellement bien plus alerte et plus vive. Les lèvres du coursier s’entrouvrir pour héler son amie, mais la mélodie joyeuse d’un groupe d’eadi tournoyant dans les hauteurs vertigineuses au-dessus de leur tête appela son attention. Et le temps de quelques minutes, l’espion resta le nez levé, à observer les circonvolutions habiles des oiseaux.

    Toujours par-là ? le rappela à l’ordre Kaname, sentant qu’il s’égarait à nouveau.

    Flattant l’encolure de celle-ci, il jeta un coup d’œil à la carte maintenue grossièrement par un jeu de fins cordages contre le pommeau de la selle, et acquiesça en réponse à la loutre. Celle-ci avançait lentement le long du chemin recouvert de poudreuse, et bien qu’ils eussent étudié celui-ci ensemble, demandait régulièrement au coursier son avis. C’était la première fois qu’ils s’aventuraient ensemble aussi loin dans les montagnes, et surtout dans la neige. C’était aussi l’une des rares fois où la loutre portait son armure. Eu égard aux dangers inhérents à ces contrées hostiles, et à la nature protectrice envers ses familiers de l’espion, Solveig avait préparé Kaname de son équipement le plus complet. Afin de soulager une part de son fardeau alors qu’elle appréhendait un terrain peu familier sous ses pattes, un pendentif plume avait été fixé à son paquetage le plus lourd. Et, si l’on passait l’inquiétude palpable de la créature devant la fatigue morose des deux gardes, elle accomplissait sa tâche avec enthousiasme et application. L’étude des cartes s’était révélée être un exercice complexe et encore trop difficile pour elle, mais nul doute que dans quelques années, elle saurait aussi aisément s’y atteler que le coursier qu’elle véhiculait. Conformément aux consignes de la Valkyrie, et bien que l’étrange tension entre les soldats ne chatouillât sa curiosité, Kaname se tenait sagement coite. Elle était sensible aux requêtes des humains, surtout de ceux qu’elle aimait, et se trouvait parallèlement toute disposée à se concentrer sur cette piste qui lui donnait du fil à retordre et irritait sa fierté de monture. Mélyne, cependant, moins disciplinée et certainement moins occupée, cherchait l’attention du coursier dans la naïve intention de lui redonner le sourire. De ses petites pattes, elle effectuait de lents trajets du sommet de la tête à la croupe de la loutre, en passant par l’épaule de Calixte, pour jeter de fréquents coup d’œil à cette soldate tout aussi éreintée que son maître.

    Indifférent au ballet de ses familiers – Vreneli tournoyait avec Azazel autour de leur petit groupe, à l’affût de la moindre âme belliqueuse – l’espion s’était à nouveau replié dans cette bulle songeuse qui s’était formée autour de lui, pétale par pétale, depuis la consultation avec Wendy. Chaque affirmation, chaque explication, toujours plus incongrue, de la médecin avait dressé l’un de ces remparts invisibles, l’isolant du reste du monde pour mieux le garder dans celui de ses pensées, de ses émotions. Il avait l’impression de vivre entre deux eaux, celles opaques de ses tourments intérieurs, et celles éclatantes de vie, jusqu’à l’aveuglement, de l’extérieur. Ses songes flottaient chaotiquement d’une berge à l’autre, tantôt pour le contraindre à la réflexion des tenants et aboutissants de sa condition actuelle, tantôt pour le laisser s’échapper au contact de la moindre source de distraction. Il n’avait pas fermé l’œil de la nuit, voguant des propos de Wendy, qui lui revenaient de manière erratique et insensée, aux reliefs de la chambre cagibi qui lui paraissaient subitement fort intéressants. Lorsqu’il avait rejoint Solveig – à un moment de la nuit ou de la matinée, il ne savait plus trop – et qu’ils avaient quitté la Caserne à deux – quatre – de front tant que l’entretien du chemin le permettait, il avait été pris d’une logorrhée aux sujets désordonnés et versatiles, dans laquelle il avait distraitement inclus son amie. Son amante. Celle qu’il chérissait au creux de ses bras comme, chaque jour davantage, au creux de son cœur. Celle qui devenait, dans la tempête fracassant ses pensées contre les pics de l’émotion, le point d’ancrage à son intégrité mentale. Le phare, peut-être aussi, de sa réflexion. Il était étonnant qu’elle eût pris tant d’importance alors que, quelques lunes plutôt, il l’aurait probablement laissée à la lisière de ses considérations pour n’y intégrer que le commandement de sa Maître-Espion, mais à présent… il n’aurait su dire quand, ni comment, et certainement pas pourquoi, sa loyauté première semblait avoir viré – il se souvenait après tout de ce dilemme viscéral, entre la passion et le devoir, et le triomphe entendu de ce dernier – alors qu’il lui semblait qu’il n’avait jamais autant rien dû à sa supérieure, brillant surtout de son absence dernièrement. Laissant Lichael endosser ses responsabilités avec habileté. Mais c’était à présent bien clair dans son esprit : si les espions étaient sa famille, les racines de son passé, Solveig était son présent. Et peut-être son avenir. Et s’il fallait faire un choix, le choix était évident.

    Il avait donc évoqué à Solveig, membre intégrant de son équipage de fortune face à la houle cinglante sentenciant son imprudence, son trouble. Sa difficulté à y croire, malgré tout. La beauté de la neige fraiche, et l’interrogation que suscitaient chez lui les quelques traces matinales s’aventurant entre les bâtisses. L’austérité de celles-ci. La noblesse du manoir familial des Alkhaia de Eliëir au Grand Port. Sa destitution nominale si sa famille devait avoir vent de sa grossesse. Son étonnement que le SAPIC l’eût permis. L’incertitude de Wendy quant aux liens entre son corps masculin et son corps féminin. La voluptuosité de celui de la Valkyrie, quoi qu’elle en eût dit, par rapport à ses propres formes. La netteté de l’harnachement de Kaname et Adonis, de leur entretien. Son désir d’obtenir pour la loutre une médaille, similaire à celle de K’awill, de laquelle elle pourrait déplier et replier son armure en quelques secondes. Il avait parlé de beaucoup de choses, beaucoup trop. Aléatoirement au gré des distractions, avant de se refermer subitement, encore plus hasardeusement, lorsque les pétales de sa bulle choisissaient de l’emprisonner à nouveau. S’enfonçant dans les remous de songes préoccupés, secrets, pour mieux repartir quelques secondes ou minutes plus tard, dans une avalanche de propos décousus. Il n’y avait guère que sa main, cherchant instinctivement celle de la Valkyrie, inatteignable par-dessus le vide de leur progression, qui respectait un rythme régulier, cohérent, quoi que vain. Et puis leur route avait disparu pour laisser place à un sentier bien entretenu – on devinait qu’il était fréquemment fréquenté, au moins par la Garde – mais que les neiges récentes rendaient traitre. Dans l’impossibilité de poursuivre à deux de front, Calixte – habitué au jeu de piste – avait pris la tête de leur expédition tandis que Solveig – clairement l’élément de force du duo – avait écopé de la queue. Leur nouvelle formation rendant difficile toute conversation, et les lieux s’y prêtant de moins en moins, le silence les avait emmitouflés de son voile. Il était relatif. Le crissement de la neige n’avait rien de discret, la brise mordante arrachait quelques bruissements aux cimes des arbres, provoquant parfois le bruit mat de paquets de neige chutant des hauteurs, les plus larges courants d’air faisaient chanter les parois vertigineuses qui les contemplaient de leurs sommets, et l’on entendait la faune qui profitait de la chaleur relative des rayons de soleil hasardeux perçants entre les branches des conifères.

    L’esprit partout et nulle part à la fois, Calixte laissa son regard poursuivre le mouvement brusque d’un buisson qui se termina sur la fuite d’un renard. Alors que l’ambre de ses yeux mesurait le changement de couleur du pelage de l’animal en raison de la saison, ses pensées retourbillonnèrent au contact des souvenirs de la consultation nocturne avec Wendy. Comme le reste des évènements depuis que Solveig lui avait déclaré entendre « deux cœurs », ils étaient brumeux. Perdus dans un espace-temps avec ses propres règles, et surtout son propre chaos. Lorsque le coursier avait remis la main sur Abdallah, il avait consigné dans son livre mémoire toutes les informations, en vrac, que la médecin leur avait données. A la suite de ses longs paragraphes sur Vrenn, quelques éléments cryptés de mission, et divers intérêts du quotidien. Il allait lui falloir réinvestir dans un nouveau livre, ça devenait n’importe quoi. Wendy lui avait expliqué le résultat du pétale blanchâtre de la sevragea laiteuse sur laquelle elle avait fait perler son sang. De ce qu’elle avait appelé la hauteur utérine, en posant ses mains sur son ventre, à la recherche d’un renflement à la palpation. De l’âge gestationnel, qu’elle estimait très bas, du fait de ses mesures. De la probabilité, de fait, que cela correspondît au temps que l’espion avait passé sous forme féminine, au vu de la discordance avec la date présumée de la conception. Que cela pouvait expliquer les fameux effets secondaires du SAPIC, qu’il avait souhaité lui montrer. Elle lui avait parlé de changement physiques et émotionnels. D’implications professionnelles et sociales. De semaines d’aménorrhée et de congé – ou mise à pied – parental. Des limites et intrications entre ses deux formes qu’elle ne saisissait pas bien, car c’était la première fois qu’elle était confrontée à ce type de situation. Il avait retiré, suite à ses conseils, la bague aux entrelacs d’azur et d’ocre qui avait cerclé son doigt depuis le passage du Solstice et qui, non seulement le liait à Solveig, mais disposait aussi d’un pouvoir contraceptif. Par prudence, il avait enfermé l’anneau dans son tatouage de rangement, à côté de sa clef dimensionnelle. Il se souvenait aussi qu’au terme de tout un laïus – plus ou moins fidèlement retranscrit dans son livre mémoire – elle avait attrapé sa main, pour lui rappeler que s’il le souhaitait il existait des moyens d’interrompre le processus. Surtout si tôt. Qu’ils étaient complexes et dangereux – potentiellement mortels – mais possibles.

    Calixte songea qu’il allait surtout arrêter d’utiliser le SAPIC, et l’histoire en resterait là.
    Alors que le soleil dépassait son zénith, l’espace boisé se découvrit pour laisser place à une large étendue caillassée blanchie par la neige, et ils avisèrent quelques solides plateaux rocailleux propices à la halte, tandis que les yeux des deux soldats repéraient le sillage discret du sentier qui s’élançait toujours plus vers le nord. Les façades grisâtres de quelques hameaux accrochés aux flancs de la montagne comme, encore au-delà dans les confins des terres enneigées, celles du village plus conséquent construit aux abords de la mine visée, étaient aisément visibles pour la mi-chiraki, mais beaucoup moins pour le coursier à l’esprit préoccupé.

    - As-tu une idée de comment nous y prendre pour faire la lumière sur la situation ? finit-il par demander à son amie, en essayant de revenir à leur mission.

    Mélyne, qui s’était perchée sur son épaule, observait Solveig tout en mordillant la bretelle d’Abdallah qui s’était mis à fredonner une chanson aux échos écologistes. Complètement obnubilé par ses pensées, l’espion ne réalisa pas que la présence du glooby pouvait importuner son amante.

    - On peut s’amuser à interroger tout le monde, j’ai un globe de vérité qui peut nous aider. Mais ça risque de nous prendre du temps.

    Du temps. Il en avait trop, ou pas assez. Et surtout, il était mal utilisé.

    - On peut se planquer aux abords de l’entrée scellée. Ou y laisser un familier. Mel est discrète, et peut me partager ses sens. Eventuellement en duo avec les teisheba…

    Oserait-il en parler au duo de ses amis ? Luz et Naëry ? Que leur invitation – si irrésistible et généreuse quelques lunes auparavant – s’était soldée d’un impair de sa part.

    - Je ne peux pas ne pas utiliser le SAPIC, réalisa-t-il soudain, changeant complètement de sujet. Il m’est trop avantageux pour certaines missions.

    Alors que faire ? Son regard s’arrêta sur sa main gantée, tenant son thermos qu’il avait sorti à l’occasion de la pause. Cette main de laquelle il avait retiré la bague Contre-Mouflet, pour ne pas craindre d’abimer le fœtus. Inconsciemment, le choix n’était-il pas déjà fait ? L’ambre se perdit un temps dans l’éclat aveuglant de la poudreuse, avant de remonter les courbes emmitouflées de la Valkyrie pour croiser ses yeux vairons. Non, le choix était là. Les doigts de sa main libre parcoururent l’espace, infime et immense, entre eux deux pour se saisir ceux de Solveig. D’une caresse ils les entrelacèrent intimement, faisant fi de la couche protectrice des gants, avant de se retirer presque tout à fait, à la manière de l’onde se repliant au gré d’une vague. Il y avait là une interrogation plus forte que les autres, dont la réponse ferait le lit des préoccupations suivantes. Adaptées à celle-ci. Fidèles.

    - Joueras-tu encore avec moi, malgré tout ? murmura-t-il en écho à cette soirée.
    Solveig P. PrêthLa Garde
    Solveig P. Prêth
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    Re: [Assignation] Sceau magique | Calixte
    Ven 19 Fév 2021 - 23:33 #
    Le voyage se passa comme dans un mirage. Oh bien entendu le froid mordant l’empêchait de perdre pied mais c’était comme si son esprit s’était retrouvé prisonnier d’une bulle de solitude. Seules ses propres pensées lui parvenaient, les mots de Calixte, ses conversations sans queue ni tête lui échappaient presque complètement. Elle aurait voulu les écouter, peut-être même lui répondre mais sur le moment il lui sembla plus judicieux de garder le silence. Non pas parce qu’elle ne voulait pas partager son fardeau avec lui, mais bien parce qu’elle même se débattait avec de nouvelles questions, des peurs et des interrogations qui n’avaient pas lieu d’être. Ou peut-être que si, puisqu’elles étaient là.

    Tout d’abord elle se demanda comment une telle chose avait bien pu arriver. Aux dernières nouvelles et de ce qu’elle avait pu en constater Calixte était un homme, il était né homme. Alors même avec un objet tel que le SAPIC. « Comment … ? » Adonis s’ébroua et manqua de la désarçonner. « Comme toi et Fauve » se répondit-elle d’un ton sarcastique. De naissance ou non, Calixte était en mesure d’être une femme. L’image de l’inconnu dans le cadre magique lui revint et des images désagréables se créèrent dans son esprit. Intérieurement elle espéra une attaque surprise ou que sa jument s’ébroue de nouveau, mais plus fort cette fois pour qu’elle puisse goûter à la neige et se changer les idées.  Ensuite elle se demanda comment allait se dérouler cette grossesse peu commune, comment le jeune homme allait-il la supporter et surtout comment allait-elle tout simplement fonctionner. Elle passa sa main gantée sur son visage l’air maussade. Avec la chance qu’avait son camarade il était bien capable de rendre l’âme en couche. En couche, ça aussi c’était quelque chose :  l’accouchement. Était-il prêt pour une telle chose ? Déjà que l’idée était difficile à concevoir pour une femme alors pour un homme. D’un simple regard en coin, elle s’assura de son état. Il lui était toujours si difficile de cerner le blond dans les moments d’angoisse. Il était si changeant, tantôt silencieux, tantôt aussi agité que pouvait l’être un enfant. De même, elle ne savait si elle devait l’étreindre ou au contraire le laisser en paix. Leur chevauchée fit le choix pour eux et elle en fut ravie.

    Ce n’est que lorsqu’ils arrivèrent aux pieds d’un sentier plus escarpé qu’ils devraient empruntés, qu’ils firent une halte. Les muscles endoloris, Solveig s’étira tout en abandonnant Adonis accroché à une branche d’arbre. Cette dernière poussa un long soupire lorsque sa cavalière la dessangla. Puis elle revint près de Calixte, avant de faire un bon franc sur le côté, le poil de ses oreilles se hérissant. Son regard darda sur le glooby qui se tenait d’un air innocent perché sur une épaule. « Vile créature » siffla une voix craintive dans sa cervelle alors que Mélyne la regardait en dodelinant de la tête.

    - Je ne sais pas. Avoua-t-elle tout en retirant l’emballage d’un biscuit qu’elle avait pioché dans une de ses besaces. - Ton globe de vérité nous sera utile c’est certain mais je crains que nous ne puissions pas faire de plan à l’avance. Sans voir l’état du sceau c’est compliqué. Elle mordit dans la nourriture tout en écoutant ses suggestions, lançant un nouveau regard assassin au glooby. - Si tu as confiance en… Mel… Son nom fut prononcé comme si elle parlait d’une chose peu ragoutante, ce qui somme toute était le cas. - Les teisheba par contre… Ils ne seraient pas trop facilement repérable ? Ou alors les laisser en planque. Si nos ou notre individu ne met pas trop de temps à arriver… Hum… Tu as de bonne idée ! Mais je reste d’avis que nous pourrons sérieusement mettre un plan en place lorsque nous serons sur place. D’ailleurs est-ce qu’il ne serait pas plus judicieux d’annoncer une autre mission que celle qui nous amène ? Elle avala son gâteau tout rond. - La rumeur de notre arrivée va vite se rependre aussi bien dans les rangs que dans les villages alentours, si ils ne savaient pas que nous venons pour le sceau ils devraient être moins méfiant. Je suppose. Ce genre d’assignation n’est pas vraiment dans mes… Capacités.

    Solveig n’était certes pas sotte mais la discrétion n’était pas son domaine de prédilection. Finalement, la grossesse de Calixte n’était peut-être pas si mal tombé ; elle se montrait bien moins bavarde.

    - Tu ne peux pas qu-… Oh…

    Si elle avait commencé à se changer un peu les idées, voilà que tout refluait soudainement et ce ne fut pas la chaleur des doigts de Calixte malgré les gants qui l’aidèrent à s’en débarrasser. Tout simplement parce que la réponse évidente qui lui vint se mua en un silence d’une lourdeur incomparable. Jouerait-elle encore avec lui ? Elle ouvrit la bouche mais de nouveau, sa voix ne donna lieu qu’au néant. Ses doigts se serrèrent doucement autour de ceux du coursier mais ses yeux, eux, s’enfuirent.

    - Je serais là. Je serais toujours là. Dit-elle d’une voix faussement rieuse. Puis elle détacha ses doigts des siens et tourna les talons. - Nous devrions reprendre la route, le sentier à l’air sinueux, je ne suis pas sûre de pouvoir monter Adonis avec le gel. Ca nous prendra plus de temps que prévu et il faudrait arriver avant la nuit. La neige nous guette. Annonça-t-elle alors que le temps n'avait pas bougé d'un pouce. Solveig n’avait jamais été une bonne menteuse.

    Sans demander son reste, elle prit les rênes de sa monture, réajusta la sangle et partie en tête de leur duo. A cette étape ses yeux seraient sans doute plus utile que les cartes de Calixte mais pas plus sûr que le pied de Kaname c’était certain. Cela n’empêcha pas leur avancée de se passer correctement. Par chance Solveig, qui souffrait du mal de mer, ne subit pas celui de la montagne. Sûrement parce qu’elle en avait fait les frais par le passé, lors de ses premières années de service. Ce fut sur les coups du milieu d’après midi qu’ils gagnèrent le village. « Maussade » songea la chiraki sans en être surprise. Tout était gris à cette période de l’année de toute façon, encore plus ici. Le sol, constamment humide et gelé avait laissée place à une marre de gadoue qui collait à leurs bottes mais aussi aux sabots d’Adonis. La garde espéra que la loutre géante eut moins de mal. Ne cherchant pas à s’arrêter, elle se remit en selle dès que ce fut possible. De nouveau elle esquiva du mieux qu’elle pu son amant -si tant est que ce fut possible lorsque l’on se retrouvait seule en sa compagnie – et fila vers le campement qui ne devait plus se trouver bien loin.

    La jeune femme s’en voulait, elle avait parfaitement conscience que ce n’était aucunement le moment d’abandonner ainsi son ami. Volontiers elle lui aurait promis tant de chose, comme continuer de jouer avec lui encore et encore. Mais il y avait ça. Et ce qui lui faisait peur ce n’était pas cette chose, ou même la façon dont elle était arrivée là. Non ce qui la terrifiait était le simple souvenir qu’elle ait pu lui répondre un « oui » sans aucune hésitation. Elle l’avait retenue in-extremis et était resté sans voix. Pourtant il était bien là sur le bout de sa langue, tout comme cette pulsion affectueuse qui l’incitait à aller l’enlacer en lui assurant que tout irait bien et contre laquelle elle luttait depuis déjà de longues heures. Se retournant sur le dos d’Adonis pour lui lancer un regard, elle se demanda si elle ne l’aimait pas un peu trop, lui, le jeune coursier qui l’avait guidé dans les entrailles du bastion sud lors de son premier jour. Si elle ne l’aimait pas tout court en fait. Un plomb lui tomba sur l’estomac et son dos se voûta sous le poids de la réflexion.

    - Calixte je… Commença-t-elle.
    - Déclinez votre identité. La voix était posée mais sèche. L'homme se tenait au milieu de la route, le regard droit et incisif. Un garde à n'en point douter.

    Solveig, mécontente d’avoir été coupée tira de sous sa cape sa médaille de soldat qu’elle laissa pendre sous le nez de la sentinelle.

    - Soldat Prêth et Alkh’eir. On nous attend.
    - Suivez moi.

    Talonnant sa jument, Solveig lui emboîta le pas dépitée.
    « Trouillarde » S’houspilla-t-elle.
    Calixte Alkh'eirDamoiseau
    Calixte Alkh'eir
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    Re: [Assignation] Sceau magique | Calixte
    Sam 20 Fév 2021 - 19:40 #
    Il y avait des notes rieuses dans la voix de Solveig, toujours de celles à tenter de voir le bon côté des choses, à soulever la légèreté dans les moments pesants. Dorant d’un écrin radieux ses propos rassurants, volontaires. Contrastant avec la fuite de son regard, la tension de ses épaules, les secousses de sa respiration embarrassée. Le souffle de Calixte marqua une halte, son cœur rata un battement. Pour lui qui était versé dans l’art de la dissimulation, et celui du recueil d’informations, il n’y avait pas plus criant que le mensonge de ces quelques mots prononcés derrière le masque de la délicatesse. Sa bulle pensive vola en éclats, chaque écharde s’enfonçant dans son âme un peu plus profondément jusqu’à ce que son enveloppe charnelle vacillât, comme si les coups avaient bien été réels. La morsure glaciale du vent lui sembla soudainement bien plus violente, et un froid étourdissant se glissa le long de ses membres, ses écailles perçant profondément sa chair du bout de ses doigts jusqu’à l’antre de son torse. Sa main, encore levée au contact du fantôme de celle de Solveig, finit par se baisser tandis que l’évidence s’imposait au coursier. Depuis les lunes qu’ils se connaissaient, et les déboires qu’ils avaient affrontés, jamais Solveig n’avait failli dans sa sincérité. Failli à elle-même. Il y avait une peine immense, bordée d’une culpabilité encore plus grande, à savoir que cet impair – son impair – l’avait poussée dans ces retranchements extrêmes, vils, si contraires à sa nature. Et une résolution douloureuse mais indiscutable, qui en découlait nécessairement, s’empara de l’esprit de l’espion.

    S’il devait être seul face aux conséquences cinglantes de son imprudence, alors la solution s’imposait à lui.

    Rajustant les pans de sa cape anti-climat autour de ses épaules, il imita avec un temps de retard la Valkyrie qui s’éloignait déjà. Contre ses pensées, il sentit celles inquiètes de Kaname, mais la traitrise du chemin boueux et verglassé requit bientôt toute l’attention de la monture, lui évitant de répondre au questionnement de celle-ci. Dans le choix des possibles sur lequel sa décision s’était arrêtée, il devenait soudainement plus commode de garder sa situation – et ses complications – dissimulée, dans la mesure du possible, à son entourage. Plus ou moins proche, plus ou moins immédiat. Luz et Naëry n’entendraient certainement jamais parler de cette affaire, et la Maître-Espion non plus. Calixte veillerait à ce qu’un voile opaque de secrets restât autour de cet impair, comme de la myriade d’ennuis qui risquait de s’y accrocher. Pour tout son embarras actuel Solveig verrait sans doute à redire sur la nécessité de passer sous silence cet épisode, mais le risque qu’elle croisât les personnes pour lesquelles celui-ci aurait été intéressant était quasiment nul. Finalement, il serait aisé d’étouffer celui-ci dans l’œuf.

    Il n’aurait su dire si le trajet jusqu’au village leur avait pris encore beaucoup de temps, lorsque la voix de Solveig attira son attention et qu’il leva le regard du passage où Kaname avançait prudemment. Sur l’horizon crénelé des pointes impérieuses des falaises enneigées, le soleil déclinait déjà pour s’effacer derrière le rempart rocheux, projetant de larges ombres contre les pans accidentés des montagnes alentours. Son tempus indiquait qu’il était encore le milieu de l’après-midi, mais la saison comme le terrain accidenté semblaient avoir décidé de reprendre au lieu les quelques rayons du soleil qui s’y aventuraient. Calixte n’eut cependant pas l’occasion de trop s’attarder sur l’observation des façades glacées des maisons de pierre, ni sur ce que son amie avait à lui dire, car un collègue venant à leur rencontre les apostropha. Avant de les enjoindre à le suivre. Ils poursuivirent ainsi leur chemin, sous l’escorte morose de celui-ci, et alors qu’ils quittaient l’enceinte du village montagnard relativement bien développé, les baraquements du campement de la mine leur apparurent au creux d’une dépression un couple de centaine de mètres plus loin. Ils croisèrent sur leur chemin quelques patrouilles, mais aussi hommes et femmes rentrant au hameau dont ils s’éloignaient. S’ils attirèrent quelques regards, ceux-ci n’étaient que peu curieux et globalement amicaux. Sans doute que, dans ces contrées connues pour leur rudesse, toute aide était la bienvenue.

    Le soldat les mena directement à la large bâtisse de pierres qui servait apparemment de quartier général sur les lieux, et les conduisit jusqu’à la pièce servant de bureau au Sergent-Chef Aliar. Ce dernier, occupé à lire quelques rapports visiblement préoccupants, faillit les congédier aussi vite en les répartissant dans quelques patrouilles, lorsque la mention du régiment Al Rakija franchit les lèvres de Solveig. Levant alors un regard vif sur eux, l’homme leur fit signe de s’avancer davantage tout en fermant précautionneusement la porte.

    - Ca fait bien une lune qu’on demande du renfort pour élucider l’affaire, mais visiblement la Commission se bat royalement les couilles de c’qui peut se passer par ici. La menace de voir les saletés de la Cité Enfouie se répandre en Aryon l’émeut pas plus que ça. Vous remercierez votre Capitaine pour la faveur.

    Il sortit du fin fond d’un tiroir deux dossier différents, et après en avoir vérifié le contenu, se leva pour les tendre aux soldats.

    - Même si on manque cruellement de bras, j’ai pas l’ambition de vous garder trop longtemps dans nos montagnes. Soldate Prêth, du fait de votre statut de Valkyrie, vous allez tourner sur la plupart des équipes qui patrouillent aux abords de l’entrée de la Cité. En une semaine vous aurez vu quasiment tout le monde – vos rotations sont marquées dans votre pochette – j’espère que ça n’vous prendra pas beaucoup plus. Soldat Alkh’eir, même si j’doute pas que le lieutenant Calyx veille à l’entrainement physique de la logistique, j’veux que vous donniez un coup de main à celle d’ici en maternant l’enchanteur qui est là pour examiner le sceau. Il est arrivé y a trois jours, il repart dans sept. Il pue la suffisance et l’incompétence, mais c’est le seul que la Forteresse avait de rapidement disponible pour une évaluation sur place. Et j’en n’ai rien à carrer qu’ce soit pas votre job premier, mais s’il veut bouffer, vous lui apportez sa bouffe, s’il va chier, vous le suivez aux chiottes, et s’il va sur la mine, vous l’aider dans ses recherches. Et surtout, vous profitez de l’occasion pour glaner des infos sous couvert de son expertise en cours, même s’il demande rien. Compris ?

    Bêtement, instinctivement, Calixte faillit réclamer à son supérieur qu’ils restassent ensemble, Solveig et lui, pour leur mission. Puis le devoir fit le lit de la résignation. Peut-être était-ce mieux, de toute façon, vu les circonstances, qu’il laissât un peu de distance à son amie.

    - J’préfèrerais que la véritable raison de votre présence de s’ébruite pas, vu qu’on ne sait pas exactement de quoi il en ressort. Mais vous avez mon aval pour faire valoir celle-ci au besoin. Vous avez carte blanche dans la limite du code de la Garde pour votre enquête, faites juste gaffe aux caprices de la montagne. On est loin de la douceur du littoral, notamment aux heures noires.

    Embrayant sur l’agencement du campement, il leur évoqua brièvement les difficultés de recrutement dans le coin – surtout depuis le décès de la Capitaine von Andrasil – et des nombreux va-et-vient en conséquence des militaires de la Forteresse au campement, et du village à celui-ci. Toute aide supplémentaire était la bienvenue pour pallier au manque d’effectif. D’ailleurs, tout était fait pour tenter de garder les soldats sur place – chambres individuelles avec cristaux d’eau chaude dans quasiment toutes, avantages pour ceux ayant de la famille, réductions négociées avec le hameau pour certains produits voire activités, etc. – et dans une tournure délicate mais non dissimulée, le Sergent-Chef leur proposa – à Solveig surtout – un changement d’affectation si leur temps dans les montagnes devait leur plaire. Puis, comme il semblait qu’il n’y avait rien de plus à savoir, et que les deux soldats n’avaient pas de question pour leur supérieur qui leur demanda de le tenir au courant de leur avancée par billet quotidien, ils quittèrent le bureau pour suivre les instructions qu’il leur avait données pour la soirée. Accompagnés du même collègue qui les avait accueillis au village, ils récupérèrent chacun la clef de leur chambre attribuée dans les baraquements, et déposèrent Adonis et Kaname aux écuries. Le palefrenier parut initialement plus réticent à l’idée de s’occuper de la loutre géante, mais son avis changea bien vite à la première morsure de l’alezane. Comme la soirée était encore jeune et qu’elle leur avait été donnée eu égard à leur voyage fatiguant, ils amenèrent leurs affaires à leur piaule respective où ils furent laissés à eux-mêmes. Profitant de cet instant pour s’éclipser, prétextant l’envie de rendre visite à ses collègues montagnards de la logistique, Calixte faussa compagnie à la Valkyrie.

    ~

    Il était frigorifié. Défait de ses vêtements, en caleçon sous son plaid compact, Calixte observait avec morosité les divers objets qu’il venait de déposer sur la petite table de sa chambre. Celle-ci était mitoyenne à celle de Solveig, et faisait partie des rares non pourvue de cristal d’eau chaude. Patiemment, le coursier attendait que le courage d’aller toquer à la porte de la Valkyrie lui revint afin d’emprunter sa salle d’eau mieux équipée, dans l’objectif de chasser le froid mordant qui s’était infiltré jusqu’à ses os à la faveur de quelques chutes dans la neige. Sur le sentier noirci des ténèbres de la nuit, l’espion n’avait pas eu le pied très agile. Sans doute, déjà, était-ce un miracle qu’il ne se fût pas perdu.

    Le médecin de la garnison l’avait reçu dans l’attitude rustaude qui semblait aller de paire avec la rudesse de l’environnement, et Calixte avait rapidement quitté l’infirmerie sans demander son reste. Une infirmière, plus sympathique, lui avait donné quelques noms de guérisseurs au village, et le coursier n’avait pas hésité à s’aventurer vers celui-ci, bien que la soirée fût déjà entamée. Il avait ainsi trouvé la porte d’une soigneuse d’un âge vénérable, dont l’agilité du pas contrastait avec le visage parcheminé aux multiples crevasses. Madame Weil l’avait écouté, bien plus attentivement que le médecin militaire, puis ils avaient discuté. Longuement. Les étoiles brillaient haut dans le ciel lorsque l’espion avait quitté la cabine de la ville femme, mais armé d’informations fondamentales, de quelques instruments et du nom du maïeuticien le plus averti en la matière – à la fois par la discrétion et l’expérience – Calixte avait repris le chemin des baraquements avec l’assurance crédule des étrangers à la montagne. Sa chair, à présent humide et glacée, en accusait la bêtise.

    - Okaaaaaay, donc, fit la voix trainante d’Abdallah avec curiosité. On a des potions, un assortiment de tiges métalliques, et une espèce de seringue. Ça a l’air compliqué pour défaire ce que la nature a fait.
    - Rien n’est naturel là-dedans, grommela l’espion en jetant un regard mauvais au sac à dos.
    - Tranquille frère. Mais y a un truc du miracle dans cette affaire quand même. Ou de la taquinerie de Lucy. Sacré humour. Bon, faut apprécier ce type d’humour. Mais crois-moi que d’ici c’est appréciable !
    - Je suis heureux que cela t’amuse…
    - Merci ! Tu veux commencer par quoi ? Cette brochure est excellente, j’ai déjà mes protocoles préférés grâce à elle. On part sur une aspiration ? Un percement de la poche ? Je te déconseille les préparations orales, parce qu’à moins qu’elles favorisent la dilatation du col, ça dit ici que c’est de la daube. Ou alors partir sur une potion de changement permanent d’apparence ; à prendre plutôt sous forme féminine même si ça risque d’altérer celle masculine. Ça a l’air de plutôt bien marcher ça. Qu’est-ce que t’en penses ? C’est bien de changer un peu de temps en temps. J’te verrai bien avec un teint un peu plus hâlé, des traits un peu plus carrés, et des cheveux plus longs. J’ai une icone comme ça dans Jardin & Nature en Aryon ; un mec qui gère des serres autour de la Capitale, avec de très bons conseils en entretien de pépinière.

    Laissant sa tête tomber en arrière en heurtant dans un bruit sourd le mur de la chambre, Calixte ferma les yeux pour laisser le flot des propos de l’âme artificielle se fondre en arrière-plan de ses propres pensées nombreuses. Il n’y avait pas de décision à prendre pour ce soir, car il valait mieux attendre le creux de leur mission pour ce genre d’affaire déplaisante. Mais quoi qu’elle aurait pu donner, il aurait aimé l’appréhender avec Solveig. Dans la pénibilité du plan qui s’annonçait à lui, son absence ne s’en trouvait que davantage exacerbée. Et son cœur, comme sa chair, semblait s’être embourbé dans le marasme glacial de cette solitude imposée. Le faisant glisser dans une torpeur résolue mais viscéralement nostalgique de que qui avait été, et de ce qui aurait pu être. S’emmitouflant un peu plus dans la douceur de son plaid, esquivant la pensée qu’il aurait préféré qu’elle fût des bras de son amie, il attendit que le sommeil le gagnât ou que ses jambes trouvassent la force de le mener jusqu’à la salle de bain de la Valkyrie. Dans tous les cas, le lendemain et son lot de devoir viendrait bien assez vite. Ainsi que son rendez-vous avec le faiseur d’anges.
    Solveig P. PrêthLa Garde
    Solveig P. Prêth
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    Re: [Assignation] Sceau magique | Calixte
    Sam 20 Fév 2021 - 23:50 #
    Sans surprise le camp du nord n’était pas plus accueillant que l’était le petit hameau qu’ils venaient de traverser. A l’instar de la Forteresse il faisait froid, le personnel faisait grise mine et tout en ce lieu donnait envie à Solveig de s’enfuir à toute jambe. Malheureusement le devoir, Calixte et les attraits pour la cité enfouie l’obligèrent à rester sagement en place et à écouter les monologues d’un homme qui sentait le bouc. Elle fit des pieds et des mains afin de ne pas lui bailler grassement au visage. Yuduar pouvait rire de ce genre de chose, cependant elle doutait fortement que ce bon vieux Aliar l’entende de cette oreille. La seule chose qui avait réussit à la sortir de sa torpeur - outre la main tendue pour récupérer le dossier– fut d’apprendre la séparation de son binôme. Immédiatement son regard s’était tourné vers lui, espérant l’accrocher. Plaider leur cause ensemble pourrait peut-être leur permettre de conserver leur duo. Mais ce fut l’ignorance qu’elle rencontra, et elle ne chercha pas à insister. Subitement et jusqu’à la fin de l’échange ses pieds lui semblèrent soudainement fort intéressants, avec leurs jolies carapaces de boue. Le reste du laïus ne fut pas plus intéressant mais la jeune femme écouta poliment, opposant tout de même un non franc et net à la proposition de changement d’affectation. Aucune chance qu’elle remette jamais les pieds ici. Enfin, après avoir récupéré leurs clefs, leurs affaires et s’être assurés que leur montures seraient bien au chaud, ils regagnèrent leurs chambres respectives.

    Les choses s’étaient franchement amélioré depuis le temps. A son époque les soldats, même en hiver, devaient faire chauffer l’eau eux même si l’envie leur prenait d’une douche chaude. Surtout lorsqu’il s’agissait d’un camp secondaire. Aussi elle ne dissimula pas sa joie lorsqu’elle découvrit que sa salle d’eau était dotée de cette capacité. Ni une ni deux elle avait filé sous la douche, se prélassant longuement. Quand la peau de ses mains eut flétrie, ses joues rougies et que la pièce fut devenu un hammam, elle daigna enfin la quitter. Sortir après ça ne fut pas une corvée, son corps était brûlant et une simple cape molletonnée suffit à lui tenir chaud. Ses bottes, encore humides émirent un « spouich » qui la fit grimacer. « Elles seront bonnes à jeter ! ». A contre cœur elle les enfila ; son corps perdit presque immédiatement quelques degrés. - Par la sainte… Gémit-elle en attrapant une grosse écharpe en laine de boucton.

    A l’extérieur rien n’avait changé ; la porte à côté de la sienne demeurait close et elle n’osa pas y toquer. Pas sans être certaine de sa décision. « Quelle décision d’ailleurs ? » Songea-t-elle en se demandant si son avis avec un quelconque poids dans les affaires de Calixte. « Poids ou pas, la neutralité n’est qu’une autre façon de parler de lâcheté » se répondit-elle alors qu’un rire nerveux secouait ses épaules. Toutefois, elle ne pouvait pas se précipiter au chevet de son ami maintenant. Principalement parce qu’elle n’était pas certaine qu’il l’accepte après ce qui s’était passé un peu plus tôt, lui laisser le temps d’avaler la pilule serait peut-être plus judicieux. Pourtant elle resta un moment planté devant la porte, à hésiter. Finalement elle tourna les talons.

    A l’instar du Sergent-chef, les troupes n’étaient pas très aimable et accueillirent la venu de Solveig avec des haussements de sourcils ainsi que quelques commentaires graveleux. Heureusement, parmi eux elle trouva quelques têtes sympathiques dont celle d’Arthur. C’était un jeune soldat dont l’affectation remontait à seulement huit mois, loin d’être rongé par la monotonie de la vie de montagnard il lui fit découvrir le camp avec des explications et des anecdotes qui réussirent à arracher plus d’un rire à la valkyrie. Il lui présenta ensuite l’escouade avec qui elle repartirait demain matin. Ils étaient au nombre de cinq, Solveig étant celle qui occuperait la sixième place. Parmi eux, elle fit la connaissance de Galéa. Une femme un peu plus âgée qu’elle aux chevaux noir corbeaux et qui, d’après ses dires, avait toujours fait partie des rangs de la Forteresse. Sans jamais se targuer d’avoir une excellente mémoire, le visage de la soldate ne lui revenait pas. Tout comme son nom ou même son odeur. Cela dit après sept ans d’absence ce n’était pas une surprise, sans compter qu’à l’âge d’or du bastion nord les soldats défilaient sans que l’on pu les compter.

    Après un dernier tour entre les baraquements, lorsque le soleil commença à se cacher derrière un pique rocheux, Arthur, Solveig et Galéa prirent la direction du réfectoire. Sans surprise elle n’y vit pas Calixte, sa culpabilité n’en fut que plus grande. Elle mangea sur le pouce guettant le ballet incessant des entrées et des sorties sans que jamais le visage qu’elle espérait ne se présente. Finalement du repas elle n’emporta qu’un bout de pain et une pomme qu’elle n’avait pas eut le cœur de manger. Faussant compagnie à ses nouveaux compagnons d’infortune, elle avait prit son courage à deux mains pour aller toquer à la porte du coursier. Qui lui répondit par un humble silence. Elle attendit. Rien. Alors elle cogna de nouveau. Le calme. Collant son oreille contre le bois de la porte, elle comprit que son manège ne servirait à rien, il n’y avait personne. Nul doute qu’il eut mieux valu qu’elle retourne dans sa chambre, pourtant elle n’en fit rien et se hâta sur le terrain d’entraînement. Quelques mouvements la détendrait.

    La lame d’acier émoussée fendit l’air en une vrille parfaitement maîtrisée, pivotant agilement sur ses pieds Solveig para un coup invisible avant d’attaquer d’un coup d’estoc vers l’avant. Son jeu de jambe s’accéléra, elle trancha, sauta, dévia jusqu’à ce que le souffle vint à lui manquer et que ses muscles lui semblent sur le point de rompre. Là, elle reposa l’épée d’entraînement qu’elle avait emprunté. Levant le nez vers le ciel, elle constata que la nuit était tombée. Depuis combien de temps ? Cela était une autre affaire. Mais Calixte devait être rentré.

    - L’enchanteur lui a aussi demandé de lui servir de traversin ? Grogna-t-elle quand, de nouveau, la porte resta close devant son nez. D’un geste rageur elle avait ouvert la sienne avec perte et fracas puis disparue dans la pénombre. Louis dormait déjà et Leiftan semblait parti en vadrouille avec Azazel. Une bonne chose ; elle ne se sentait pas d’humeur à converser avec qui que ce soit. Pour se calmer, elle décréta qu’une nouvelle douche-hammam était nécessaire.

    Il était étonnant de constater à quel point une douche était en mesure d’ouvrir l’esprit, les chakras ou tout autre chose saugrenue qui pouvait amener à réfléchir. Depuis des heures déjà Solveig, sans même s’en rendre compte, s’échinait à éviter tout moment de réflexion. Sauf que maintenant qu’elle n’avait plus rien à faire tout lui revenait en plein visage. Couarde, elle manqua de tout laisser en plan pour aller courir dans la neige, ne pas se laisser le temps de penser c’était ça la clef. Mais Calixte ne le méritait pas. Si ce n’était pour elle qu’elle le faisait, elle devait au moins le faire pour lui. Et comme si Lucy lui faisait - pour une fois – une faveur, la porte d'une chambre claqua ou une tête contre un mur, elle se sut dire tant le bruit était étouffé. Le coursier était rentré. Solveig passa encore un moment immobile, seule avec elle-même. Quand enfin elle fut arrivé à une conclusion qui lui sembla respectable elle quitta la pièce, s’habilla et fila sous les draps. Demain elle irait lui parler, demain.

    Mais demain n’estima pas nécessaire de venir puisqu’elle ne ferma pas l’œil. Même pas une seconde, pourtant dieu savait à quel point elle l’aurait voulu. Son esprit tournait et retournait sa décision, encore, encore, encore sans s’arrêter. « Vas-y maintenant ! » soufflait une petite voix, ce à quoi elle répondait en s’enroulant encore plus profondément dans ses couvertures. Le sommeil lui manquait atrocement en raison de leur dernière nuit mouvementé, elle aurait tant voulu s’endormir mais sa conscience le lui refusait. Au bout de longues minutes, peut-être même d’heure, elle rejeta ses couvertures avec véhémence. Sa maudite cervelle ne la laisserait pas en paix tant qu’elle ne lui aurait pas parlé.

    - Fais chier ! Maugréa-t-elle en frissonnant, se souvenant subitement qu’elle n’était plus au sud. Elle attrapa la couette sur son lit et s’enroula dedans.

    - Silence. Lui répondit Louis dans un grognement.

    Elle s’abstint de l’envoyer se planter dans la porte, et se contenta de s’en aller.

    Dehors le froid était toujours aussi mordant, si ce n’était plus en raison du vent qui s’était levé et qui passait facilement entre les lattes de bois. Pieds nus, avec pour seule barrière une longue chemise et sa grosse couette elle trépigna devant la chambre voisine. Même sans l’entendre, elle pouvait sentir sa présence ainsi que celle de la boue et d'autres choses. Finalement après presque dix longues minutes de piaffement et d’hésitation, elle toqua. Puis pressée d’échapper au froid elle tourna la poignée et entra.  

    - Calixte, il faut qu'on parle...

    Si Solveig se félicitait souvent de la nyctalopie qu’elle avait acquise de son hybridation. En revanche, lorsque ses yeux se posèrent sur la petite table de fortune, elle jura avoir préféré que ce ne fut pas le cas. Il avait suffit d’un simple coup d’œil pour l’interpeller. Parce qu’aussi triste que cela puisse être, ce genre d’instruments ne lui étaient pas étranger.Elle s’était demandée, naïvement et avec espoir, si cela n’était pas un simple malentendu. Attiré comme un aimant elle n’accorda d’intérêt à rien d’autre que ce qui se trouvait sous yeux.

    - C-c-c’est… Ses yeux étaient rivés sur les flacons, seringues et autres engins de torture. Comment aurait-elle pu regarder ailleurs ? Sa main tremblante s’empara d’un flacon qu’elle déboucha. Ses sens ne lui mentaient pas. Pas plus ses yeux que ses narines. Le choc lui fit lâcher la fiole qui éclata sur le sol, tout comme sa peine. Se balançant d’avant en arrière, Solveig se mordait furieusement les lèvres. L’agitation transparaissait par tout les ports de sa peau. Elle cherchait ses mots, la colère rongeant la douceur qu'elle aurait voulu y glisser. Pas une colère froide, une grogne inquiète et chagrine. - P-pourquoi ? La question était rhétorique, elle savait pourquoi. Pour les mêmes raisons qu’elle avait faillit le faire par le passé mais également parce qu’elle ne lui avait été d’aucun soutien, d’aucun conseil. Plus que jamais Solveig s’enfonça dans une franche colère qui jaillit sur l’instant.

    - Est-ce que tu as au moins conscience de ce que tu risques Calixte ? Siffla-t-elle en se tournant vivement vers lui. - Est-ce que tu as au moins prit le temps d’y réfléchir ? Tu sais ce que tu es ? Un idiot ! Un grand idiot ! Et je pèse mes mots. Oh par la sainte ! On ne fait pas ce genre de choix en une nuit ! Tu n’es même pas venu me voir alors que je suis littéralement à deux pas de toi ! Il n’y a qu’un mur entre toi et moi ! Sa voix était monté d’un cran et elle criait presque, le poil de ses oreilles étaient gonflés au possible et ses iris s’étaient subitement rétractée pour ne devenir que deux minuscules fentes noires. - Tu n’as… Tu n’as pas le droit ! S’écria-t-elle.

    Comme si elle même avait un quelconque droit sur sa vie ou même sur lui. Mais ses sentiments faisaient fit de la bienséance et de la logique. Tout ce qui lui parvenait c’est ce qui allait être, ce qu’elle risquait de perdre. Mais également ce dont elle n’avait pas été capable. D’un geste coléreux elle balaya le dessus de la table.

    - Pourquoi tu ne m’en a pas parlé ?! Je n’ai… Je n’ai aucun droit sur toi mais je t’ai dis que je serais présente et j’ai toujours tenu mes promesses ! En un instant elle franchit les quelques pas qui les séparaient et attira le coursier entre ses bras, piétinant allégrement la couverture qu’elle avait laissé tomber dans sa stupeur. Ses mains si tendues se firent douceur à son contact, glissant affectueusement dans ses cheveux et dans son dos pour le presser avec tendresse. - Tu n’as pas besoin d’affronter ça tout seul. Souffla-t-elle en embrassant l’une de ses joues.  
    Calixte Alkh'eirDamoiseau
    Calixte Alkh'eir
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    Re: [Assignation] Sceau magique | Calixte
    Dim 28 Fév 2021 - 14:46 #
    Ce fut l’instinct de soldat qui le réveilla en sursaut, son regard hagard cherchant de manière erratique la source de son malaise. Et ce fut son odorat qui, reconnaissant en premier les effluves familiers du parfum de son amie, apaisa le reste de ses sens soudainement à l’affut, bien avant qu’il ne remarquât la silhouette de la mi chiraki dans la pénombre de sa chambre. Le cristal de lumière qui avait vivement éclairé la pièce à son retour du village quelques heures plus tôt avait depuis longtemps baissé d’intensité pour se transformer en veilleuse et, encore abasourdi par le sommeil qui l’avait apparemment cueilli avant qu’il n’ait pu trouver le courage de se lever pour aller profiter de la salle d’eau chauffée de Solveig, Calixte regarda celle-ci venir à sa rencontre. Appréhender le matériel qu’il avait récupéré un peu plus tôt. Et quitter sa couverture pour revêtir celle de la colère. Son corps d’hybride, pantin aux traits grossièrement découpés dans la lumière crue de l’artifice magique, gonflé d’indignation de sa poitrine jusqu’au bout de ses poils dressés, parlant un langage bien plus à la portée de l’espion alangui que les mots eux-mêmes. Suivant d’un œil de plus en plus rond de surprise l’évolution de la posture de son amie alors que son esprit, encore bercé par le cocon léthargique de la nuit, se débarrassait péniblement par nappes des mailles de celui-ci, le coursier se redressa sous son plaid dans l’espoir de se défaire complètement de la confusion du sommeil. Mais la scène, complètement incongrue à cette heure indue et dans de telles circonstances, avait bien du mal à faire sens à ses pensées embrumées.

    Comme l’une de ses mains venait masser ses yeux embués de fatigue, sa couverture de fortune glissa quelque peu de ses épaules, et le vent froid de la nuit qui avait suivi Solveig à l’intérieur de la chambre lui arracha un frisson, et davantage de lucidité. Il allait demander à la Valkyrie de lui exposer clairement, par mots simples, ce qui la mettait dans cet état de courroux, parce qu’il n’arrivait pas à démêler le flot déchaîné de ses propos que la colère faisait résonner contre ses tempes, lorsqu’un bruit encore plus étourdissant de métal heurtant brutalement le sol le fit à nouveau sursauter. Et arracha une partie du sommeil nimbant son esprit. Son regard se posa instinctivement sur le matériel rudimentaire d’avortement qui avait été rageusement balayé de la table, et ses sourcils se froncèrent avant de s’arquer d’étonnement tandis qu’il prenait la mesure des affirmations de Solveig. Ses bras accueillirent instinctivement le corps fiévreux de la mi chiraki contre le sien, et ses pensées s’égrenèrent dans les rouages de ses interrogations ravivées. Avait-il mal perçu ? Mal compris ? Mal interprété ? Guidé par les œillères de ses habitudes, et de ses devoirs, s’était-il tant fourvoyé ? Se glissant contre le doute et la curiosité, un soulagement aux vagues furieuses déferla en son être, de son battant jusqu’au bout de ses doigts, balayant toute autre notion pour s’installer maitre. Le plaid dérapa de ses épaules pour s’entasser autour de ses hanches, mais fermement ancré contre la chaleur de la Valkyrie, Calixte ne s’en rendit guère compte.

    - Pardon, murmura-t-il en premier lieu, son souffle caressant le cou de Solveig contre lequel il avait enfoui son visage. Merci, ajouta-t-il en savourant la présence de son amie.

    En se délectant de son parfum réconfortant, de ses courbes épousant les siennes, de sa flamme ravivant la sienne. De sa compagnie dont l’existence devenait, jour après jour et lune après lune, si importante, si essentielle, à son être. Il était perdu, encore, quant à sa condition. Leur condition. Mais tant qu’ils étaient perdus ensemble, cela lui convenait.

    - Reste, s’il-te-plait, reste, poursuivit-il d’un ton qui relevait presque de la prière.

    Cette nuit, et les autres à venir. Et il y avait certainement là, dans l’intensité de cet attachement qui ne semblait aller que crescendo – presqu’une dépendance – le lit des sentiments fondamentaux, pesants, dont il avait initialement craint ensevelir Solveig. Mais présentement aveuglé par la nécessité et l’étau encore serré de la fatigue – de la peur et du sommeil – il s’engouffra tout entier sur cette voie, sans se soucier de ménager son amante. Sans s’inquiéter de risquer y perdre des plumes.

    - J’ai besoin de toi.

    ~

    L’enchanteur, en réalité, semblait tout à fait compétent et était d’une amabilité certaine. Son humour laissait en revanche à désirer, mais Calixte avait connu charge bien plus lourde et désagréable, donc il n’allait clairement pas s’en plaindre. Peut-être, aussi, était-il de trop bonne humeur pour s’attarder sur les éventuels propos moins sympathiques de l’homme. Suite à la nuit précédente, où Solveig était restée dormir avec lui – présence tangible et rassurante au creux de ses bras – le coursier avait le cœur et l’esprit suffisamment allégés pour endurer le plus pénible des blizzards, au sens propre comme figuré. Sa situation ne s’était pas résolue, il ne savait toujours pas comment se positionner par-rapport à celle-ci – et notamment restait la possibilité de l’éradiquer comme il avait initialement pensé – mais savoir qu’il ne serait pas seul pour se repencher, en temps et en heure, sur la question lui avait ôté presque toute inquiétude et sentiment d’empressement.

    - Là, vous voyez ? lui indiqua l’enchanteur Emrys en montrant du doigt quelques sillons grossiers contre les courbes autrement plus délicates du sceau. Il y a là quelque chose qui attaque – ou a attaqué – la protection.

    Des pans de sa cape, il sortit tout un arsenal d’instruments dont le coursier n’était capable de reconnaitre aucun d’entre eux, et s’affaira autours de l’artefact. Suivant docilement ses instructions, Calixte s’empara d’une plume et d’un calepin aux pages désordonnées, et nota toutes les indications de l’enchanteur. Un peu plus loin, il pouvait sentir le regard curieux et prudent des patrouilles passant à proximité, et il se retint de tourner la tête toutes les quinze minutes dans l’espoir de croiser celui de Solveig. Il la verrait bien assez vite. Sifflotant gaiment tandis qu’Emrys le mettait à contribution pour tenir ce qui ressemblait à une large équerre, il espéra que son amie passait une aussi bonne journée que lui.

    ~

    Perché sur le petit bureau de la chambre de Solveig, balançant joyeusement ses pieds déchaussés dans le vide, l’espion grignotait une des pommes qu’il avait récupérées du réfectoire tandis que la Valkyrie ramassait ses mèches humides dans une serviette pour les essuyer. Une brume moite l’avait suivie de la salle d’eau où elle venait de rincer chaudement les affres glacées de la journée, et bien que pris à son récit enthousiaste de ses propres heures de travail, Calixte ne put empêcher ses yeux de courir le long des courbes généreuses de son amie. Léchant du regard les gouttes taquines qui traçaient quelques sillons ensorcelants sur la peau nue de celle-ci.

    - Il a encore toute une batterie de tests à réaliser, poursuivit-il en mordant vigoureusement dans son fruit à défaut d’autre chose. Mais Emrys est déjà presque certain que c’est un produit magique qui est la source de l’affaiblissement du sceau.

    L’enchanteur avait répondu à la curiosité du coursier de manière affable et tout à fait académique – à grand renfort de disgressions et termes alambiqués – et ce qui n’aurait dû prendre que quelques minutes s’était transformé en de longues heures d’échange, ayant amené les deux hommes à louper leurs repas et à se quitter relativement tardivement. Pressé de retrouver Solveig au décours de sa journée, Calixte n’avait fait qu’un détour par les cuisines avant d’aviser la chambre de son amie. Où, visiblement, il n’était pas le seul à avoir trouvé refuge. Vreneli semblait avoir décidé de ne pas quitter Azazel, et Abdallah, qui avait dû ramper de la pièce adjacente, était en grande discussion avec Leiftan sur le mérite des allocations familiales dispensées par certains régimes. Pendant de brèves secondes, il avait pensé que la mi chiraki s’était habituée à la présence de Mélyne, mais apparemment celle-ci avait retrouvé Kaname et Adonis.

    - Donc à moins que ce produit n’ait des jambes, quelqu’un – ou quelque chose, mais ça parait plus capillotracté – l’applique sciemment sur le sceau, termina l’espion. Des pistes de ton côté ?
    Solveig P. PrêthLa Garde
    Solveig P. Prêth
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    Re: [Assignation] Sceau magique | Calixte
    Jeu 4 Mar 2021 - 22:26 #
    Solveig aurait voulu le détester, hurler et pleurer à en perdre haleine. Toutes ces émotions qui refluaient dans sa poitrine comme une marrée montante la terrifiait, lui faisait tourner la tête. Face à la détresse de Calixte, elle eut espérée être plus adulte et mature. Après tout c’était elle l’aîné, et la situation dans laquelle il se trouvait lui était familière, peut-être même trop. Si tout ceci lui était inconnu, si par le passé elle n’avait pas hésité un seul instant à porter le fruit d’un amour déchu, aurait-elle agit ainsi ? N'aurait-elle choisit la fuite tout simplement ? Une personne sensée l’aurait fait, songea-t-elle sans partager ses pensées. Pour sa part, la raison lui faisait défaut depuis toujours, sa vie entière n’était battit que sur des caprices, des sensations et de instincts qui, chez elle, avaient voix au chapitre. Elle ne pouvait dire si les choix qu’elle faisait étaient les bons, mais elle pouvait dire qu’elle les avait fais. Et si de tout cela découlait sa présence ici avec lui, alors elle ne les regrettaient pas un seul instant.

    - Je reste. Lui répondit-elle simplement en venant poser sa joue contre sa tempe, enfermant son corps dans la cage de ses bras affectueux. Elle resterait tant qu’il voudrait d’elle à ses côtés car il ne pouvait en être autrement, toute dévouée qu’elle lui était, toute éprise également, elle ne put se résigner à le laisser et cela ô combien la raison lui intima de le faire. Solveig le savait ; la voie qu’elle empruntait en le choisissant était aussi glissante qu’une lame de glace mais la perspective de jouer sur un fil tendu, telle une funambule, l’excitait au moins autant qu’elle la terrifiait. Néanmoins le temps des inquiétudes viendrait bien assez tôt, ainsi Solveig occupa sa nuit à le veiller aussi bien qu’à l’aimer.

    ***

    - Tu rêvasses soldat Prêth ! S’exclama la voix d’Arthur qui la regardait d’un air suspicieux.
    - Peut-être bien. Un sourire niais étira ses traits, ce qui arracha un rire franc à son compagnon.
    - Je l’ai vu entrer dans la chambre voisine à la sienne, tu m’étonnes qu’elle rêvasse ! Sans crier gare, Galéa avait trottiné jusqu’à eux puis avait asséné un petit coup d’épaule amical à la valkyrie, dardant un regard curieux sur elle. Arthur pour sa part se gratta le menton ou une petite barbe naissante faisait son apparition, semblant ne pas comprendre ou voulait en venir le brune.

    - Sinon plus sérieusement, comment se déroule les tours de gardes ? Demanda Solveig, en faisant montre d’un soupçon de maturité, retenant ardemment l’envie pressante de taquiner le garde candide.

    Ce fut d’ailleurs ce dernier qui entreprit les explications, Galéa disparue aussi vite qu’elle était arrivée plus tôt. Il lui expliqua que pas moins de quatre équipes se relayaient sur un total de six heures chacune. Un manège parfaitement millimétré qui permettait d’avoir le sceau à l’œil jour et nuit. La chiraki l’interrogea ensuite sur les activités en dehors des heures de rondes, et cette fois ce fut Marlo, un autre soldat d’une quarantaine d’année et dont le portrait avait dû croiser plus d’un hiver rigoureux, qui lui répondit. Il parla en premier lieu des autres travaux dont ils devaient s’occuper et qui allait du tour de garde dans la village, à la traque des créatures trop proche du camp en passant par mille et une chose que Solveig ne reteint pas. Il fallait avouer que le camp était grand et que si elle avait retenu le visage de sa première escouade, avec qui elle partageait actuellement le premier tour de surveillance, bien mal lui aurait prit de vouloir se souvenir des dix huit autres. Un avantage pour quiconque voulait se fondre dans la masse afin d’approcher le sceau.

    - Est-ce que… Quelqu’un vous a semblé suspect ? Ou une nouvelle recrue… Quoi que ce soit qui pourrait vous sembler étrange ?

    Pendant un instant le regard de Marlo se posa sur Arthur, après tout le jeune guerrier avait rejoint les rangs précisément au moment où les premiers signes de d’affaiblissements étaient apparut. Toutefois il n’en dit et se contenta de secouer la tête.

    - Non m’dame, pis c’difficile à dire les équipes restent jamais longtemps les mêmes. L’petit Arthur, Galéa et moi on en a vu défiler du garde. Il se frotta les mains afin de les réchauffer. - Entre ceux qui supportent pas le froid et sa rudesse, plus ceux qui trouvent pas l’boulot assez prestigieux, restent rarement dans le coin bien longtemps.

    - Je vois.. Dit-elle en laissant son regard se perdre sur l’étendue glacée balayée par un vent de sud. Il fit vibrer les branches d’un arbre qui se délestèrent d’un bon gros monticule de neige. - Difficile de se cacher dans le coin en plein jour.

    - Oh oui, soupira Arthur en s’étirant, les arbres ont été coupés lors de l’expédition principale afin de pouvoir monter le camps d’après ce qu’on m’a dit.

    - C’est le cas. Confirma Solveig. - Il faudrait donc agir soit de nuit, soit avec un pouvoir d’invisibilité.

    - Même avec un pouvoir d’invisibilité… Releva Marlo en pointant les traces de leurs propres pas dans la neige.

    - La nuit donc. Ça pourrait laisser supposer qu’ils connaissent les heures des rondes et des changements.

    - Pas le meilleur moment ou v’nir fouiner. Les changements ils s’effectuent ici, c’qui donne douze gardes d’un coup au même endroit en même temps.

    - Oui… C’est vrai… Ses yeux virèrent brusquement sur la droite pour apercevoir Galéa qui marchait silencieusement dans leur direction. - Mais c’est aussi le moment où vous êtes le moins attentif, le plus nombreux et ou un geste quelconque passerait inaperçu.

    - Moi j’pense qu’tu vois l’mal ou il est pas m’dame. Fourrer son nez dans les affaires des autres ça a rien d’bon.

    - Tu as sans doute raison... Rétorqua-t-elle dans un rire.

    Son rire mourut dès que Galéa se trouva à sa hauteur. Ses yeux, semblable à deux puits de ténèbres, la scrutant intensément.

    - Ton ami et l’enchanteur sont partie. Solveig la regarda en clignant des yeux sans comprendre. - Ils étaient venu analyser la sceau.

    - Oh… Dit-elle, déçu de n’avoir pu échanger quelques mots avec Calixte. Malheureusement si son rôle de sentinelle l’avait rapprochée de son but, elle avait préféré choisir un poste qui lui permettrait de découvrir son terrain de jeu. Rester collé au sceau ne lui aurait pas permis de découvrir l’endroit et si un affrontement venait à arriver elle voulait être prête. Haussant les épaules elle sourit à Galéa. - J’espère qu’il se porte bien.

    Interdite pendant de longues secondes, la garde aux cheveux de jais la fixa en silence puis se fendit d’un sourire aussi jovial que soudain.

    - Et moi donc Prêth, et moi donc. Puis elle s’en retourna à son poste de son pas silencieux, presque fantomatique.

    ***

    Bénit soit celui qui avait inventé l’eau chaude, Solveig n’aurait pas donné cher de sa peau ce soir sans cela. Elle était rentrée relativement tôt de son expédition aux abords de la cité enfouie mais Arthur et Marlo ne l’avaient pas lâché d’une semelle, tant et si bien que non seulement elle avait dû leur apprendre quelques jeux de jambes de sa composition mais en prime elle était repartie pour la garde de l’après-midi avec le second groupe. Là un blizzard glacial s’était levé et elle avait bien cru qu’elle allait finir en statue de glace. Par chance ça n’avait pas été le cas ; elle avait trouvé le couvert de sa salle de bain avant de perdre son premier orteil. Maintenant parfaitement réchauffée – de même que sa chambre, en témoignait la buée qui montait aux rares fenêtre – elle pouvait s’adonner à une écoute active du compte rendu de Calixte, non sans regretter de ne pouvoir lui voler ce qu’il était en train de manger.

    - Un produit magique hein… Fit-elle en se massant les cervicales. Cela semblait effectivement logique, rare auraient été les magies capable de détruire un sceau d’une telle puissance, voire même inexistantes. Elle n’était pas suffisamment renseignée sur le sujet pour l’affirmer. Tout en l’écoutant, elle commença à se débattre avec ses cheveux et une serviette. Une fois qu’elle eut manqué par deux fois de la faire tomber elle laissa ses cheveux humides retomber sur ses épaules et passa une chemise qui se trouvait là. Enjambant le sac à dos elle vint s’appuyer sur le bureau aux côtés du coursier. - Pas grand-chose je le crains. Je ne savais pas vraiment quoi chercher et poser des questions sans éveiller les soupçons… Un soupire las et profond lui échappa. - J’ai mis Marlo et Arthur dans la confidence. Dit-elle finalement. - A moi toute seule je ne peux couvrir les quatre équipes et les autres soldats ne me connaissent pas, ils ne me font pas confiance. Je pense ne pas me tromper avec ses deux là. Marlo est un vieux loup de mer, il a vu les dégâts à la cité enfouie quant à Arthur, il se berce encore des illusions du jeune soldat. Il était même content de repartir avec moi sur une deuxième ronde. Il n’y a qu’un jeune imbécile pour ce réjouir de ce genre de chose. Dit-elle en levant les yeux au ciel. En tout cas elle espérait ne pas se tromper, si elle était dans l’erreur nul doute qu’elle ruinerait leur chance de réussite. Toutefois elle ne pouvait s’empêcher de leur accorder sa confiance, quelque chose lui soufflait qu’elle le pouvait.

    - Nous avons finit par tomber d’accord sur une chose et tu viens de me la confirmer, si quelque chose se passe, c’est sans doute de nuit. De jour ce serait bien trop dangereux. Ses bras se croisèrent sur sa poitrine tandis que ses iris se plantèrent sur un point lointain connu d’elle seule. - Ils m’ont dit que de nombreux de soldat allaient et venaient. Je peux accorder une chose au nord : C’est sans doute l’endroit dont les soldats s’en vont le plus vite, mais je n’ai jamais vu tant de changement au sein des rangs, même ici. Alors je me demandais… Elle tourna la tête pour regarder le coursier. - Tu crois qu’ils pourraient prendre la place des gardes ? Je veux dire… Non ça serait impossible… Les rangs de la garde infiltré si facilement ? Il faudrait quelqu’un de l’intérieur pour les faire rentrer… Mais qui voudrait risquer sa peau pour de l’or ? De l’or qu’il n’est même pas sûr de trouver qui plus est… Sa tête vint doucement reposer sur l’épaule de Calixte. - J’ai l’impression que nous n’avançons pas…

    D’un coup d’un seul, Solveig se redressa et tapota dans ses mains, comme si l’instant de morosité qui avait précédé n’avait jamais existé.

    - Au fait j’ai trouvé quelques choses sur le chemin du retour ! Sautillant elle alla jusqu’à son sac à dos dont elle tira un œuf de la taille de celui d’une poule. - Tu crois que c’est un œuf de quoi ? J’ai trop de familier mais je suis tombée dessus prêt du sceau et il était tout seul alors… Elle lui mit sous le nez. - En plus les couleurs sont adorables ! Je m’étais promis que mon prochain familier s’appellerait Lulub-… Oh par la sainte… L’air émerveillé de la chiraki lorsque la coquille craqua fut très vite remplacé par une moue terrifiée, le sang quitta l’entièreté de son visage, ses oreilles tombèrent sans vie sur ses tempes et elle hésita entre l’évanouissement ou le coup de chaussure sur la créature qui se tortillait dans sa main. A la place elle lança à Calixte un : - Aide moi… Étranglé et suppliant.
    Calixte Alkh'eirDamoiseau
    Calixte Alkh'eir
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    Re: [Assignation] Sceau magique | Calixte
    Dim 7 Mar 2021 - 14:38 #
    L’épaule de Calixte se cala contre celle de Solveig, et il soupira de contentement autour de sa pomme presqu’entièrement croquée tandis que son amie poursuivait son propre récit. Sans doute ne se ferait-il jamais complètement à la chaleur et au parfum entêtant de la mi chiraki, cherchant instinctivement leur présence comme le papillon volète aveuglément vers la lumière. Au risque de s’y brûler.

    - Dans une région aussi hostile et peu attractive même pour le plus zélé des gardes, cela ne m’étonnerait guère que sur un malentendu adroitement formulé il y ait eu l’infiltration de mercenaires, ou autres individus en quête de richesses imaginées, commenta le coursier. Et que parmi nos collègues, l’attrait de celles-ci ait rendu moins pénible leur affectation ici.

    Un temps, ses songes allèrent se perdre au souvenir des ténèbres de la Cité Enfouie, et un voile désabusé obscurcit son regard ambré. Il pouvait comprendre l’avidité des chasseurs de trésors, ainsi que leur volonté entretenue par une imagination fertile bien qu’inappropriée. Lui-même avait été particulièrement curieux lorsqu’il avait fait partie des missionnés pour explorer l’antre de la ville antique. Au point d’aller saluer naïvement quelques créatures mortelles. Mais si le sceau devait se rompre sous l’effort cupide des malfrats ignorants, le campement de la Garde risquait d’être rapidement soumis à d’autres difficultés que le blizzard. Et ce ne serait pas d’enquêteurs dont il aurait besoin, mais bien de corbillards.

    - Nous venons tout juste d’arriver, sourit avec amusement l’espion en déposant un baiser sur la couronne de mèches humides de la Valkyrie.

    L’impatience de son amie ne lui était pas étrangère, et pas non plus inattendue sur ce moment de creux, et sur ce type de mission. Assurément était-elle davantage dans son élément au cœur des confrontations, au-devant de la lame acérée et punitive de la Garde. Quelque part, elle lui rappelait Rid, un camarade de promotion, dont le sang ne semblait s’échauffer qu’à la perspective d’en faire couler. Dont le caractère pugnace, bien qu’assagi par les années au sein du corps militaire, s’éveillait totalement lorsque le tempo des situations se corsait. Il était certainement normal et heureux qu’une partie des soldats eût cette appétence pour le combat et l’aventure, il était tout aussi plaisant que l’entrainement leur eût appris à canaliser cette force volontiers entropique.

    Regardant d’un œil curieux Solveig qui, justement, mettait à profit cette énergie débordante pour sauter du bureau et aller farfouiller dans son sac à dos, Calixte se redressa à sa suite. Succombant à son enthousiasme contagieux – pas qu’il y opposât non plus de grosses réserves – il sourit avec ravissement alors qu’elle dévoilait un œuf de familier. Et ses lèvres ne purent que s’étirer davantage aux propos de la mi chiraki. Il comprenait tout à fait cette dualité face aux œufs, et aux familiers de manière générale. Lui-même avait déjà toute une ménagerie de compagnons, mais si l’occasion devait se présenter d’en recueillir encore… la raison ne lui suffirait sans doute pas pour s’y opposer.

    - Il n’est pas très grand, mais je ne suis pas expert dans les créatures du coin. Bien que je me fusse un peu renseigné, justement, avant la Cité Enfouie.

    Et, surtout, que le, puis la, Maître-Espion insistât sur l’état des connaissances globales de ses pions. Sautant à son tour du bureau, il rejoignit son amie pour mieux observer l’objet de leur émerveillement.

    - On dirait presque un œuf de poulor. Mais en familier… ? Quoi qu’un peu plus petit. Un ribec peut-être ? Ou un eadi ?

    Répondant aux commentaires à voix haute de Solveig, la coquille se fendilla pour mettre un terme à leurs interrogations. Et alors que le corps de la Valkyrie se figeait sur une posture terrifiée, les sourcils du coursier s’arquèrent d’incrédulité. Quel était donc le risque que son amie, apeurée par les glooby, en recueillît un ? Quoi qu’ils semblassent actuellement pulluler en Aryon, trouvant leur chemin auprès de ses habitants aussi sûrement que les cristaux. Récupérant d’un geste leste le familier qui avait eu le malheur de revêtir l’apparence effrayant la mi chiraki, Calixte glissa son bras libre contre les lombes de celle-ci et la guida vers le moelleux de son lit afin qu’elle s’y assît. Ou, plutôt, qu’elle s’y évanouît promptement. Interloqué, le coursier se figea dans ses mouvements et son regard accrocha un peu désespérément la silhouette inerte de son amie. Qui, vraiment, ne semblait pas pressée de se remettre de ses émotions. Etendue en étoile, les jambes encore hors du matelas, Solveig avait visiblement choisi l’extinction des feux et lumières à la vision du glooby se tortillant au creux de sa main. Partagé entre l’inquiétude et l’hilarité, l’espion retint un rire aux tonalités s’approchant de l’hystérie, mais les traits de son visage se contractèrent dans un étrange mélange de rides préoccupées et mimiques amusées. Et puis, cédant au cocasse de la scène, qui était d’une banalité ridicule pour eux, il finit par laisser s’échapper un petit pouffement.

    Déposant le glooby à terre avec le trognon de sa pomme que celui-ci s’empressa de grignoter, le coursier entreprit d’installer un peu plus convenablement Solveig sur son lit et sous ses couvertures. L’affaire n’était pas nouvelle, et un jour sans doute serait-il expert en la matière. Ses pensées effleurèrent l’idée de border, dans un futur plus ou moins lointain, l’enfant que portait sa forme féminine, et ses mains haltèrent leur ballet, hésitantes, contre le tissu lisse de la couette. Avant que ses doigts, alourdis par les sentiments, ne dégageassent du visage endormi de la Valkyrie – apaisé dans l’ignorance – les mèches rebelles qui étaient venues y faire leur nid. Caressant d’un baiser la joue griffée ayant reprit quelques saines couleurs, il quitta la forme assoupie de son amie pour récupérer le petit familier, débitant joyeusement quelques minuscules morceaux de pomme, inconscient de la crise de sa maitresse.

    - Lulub, drôle de nom, commenta Calixte en observant attentivement la petite créature. Tu ressembles plus à Mélyne que Moudy, avec le givre sous tes pattes. Je vais te présenter Mel et Kana ; peut-être que Sol sera de meilleure composition demain, mais ce soir c’est chambre à part !

    ~

    Deux journées et quelques séries d’évanouissements plus tard, les deux collègues estimèrent en avoir suffisamment vu et entendu pour tenter une veille vigile auprès du sceau gardant la Cité Enfouie. Ça, et les perles météo et de température de l’espion leur avaient assuré une nuit moins agitée par les éléments que les précédentes. Car si les conditions étaient déjà rudes en journée, l’horizon de leur enquête nocturne, à la large pelleté de degrés en dessous du zéro et à la luminosité traitresse, avait de quoi rebuter l’âme la plus vaillante. Seulement Solveig et Calixte étaient bien plus que vaillants, ils étaient chacun d’une volonté proche de la bêtise dont la synergie leur offrait une détermination de bulldozer. Nul doute que le bulldozer finirait dans quelques crevasses d’ici l’aurore, mais ce n’était pas cela qui l’arrêterait.

    Leur point d’observation relevait plus du système D qu’autre chose. Comme le terrain avait été dégagé et déboisé pour, dans un premier temps permettre un accès facile à la Cité Enfouie dans le cadre de l’expédition Royale, puis dans un second temps entretenu pour permettre sa surveillance, celui-ci ne regorgeait guère de cachettes pour les deux soldats. A une cinquantaine de mètres de leur cible, sur une plateforme rocheuse dont ils avaient tassé le revêtement neigeux à la va vite entre deux patrouilles les ayant complètement ignorés grâce aux habiles manœuvres de Marlo et Arthur, ils avaient déployé l’emport’tout du coursier et bâché celui-ci du vêtement en tissu caméléon de Kaname. L’envergure de la loutre géante leur avait permis de rendre l’habita temporaire relativement discret, et dans les ténèbres de la nuit l’enveloppant celui-ci s’était complètement soustrait à la vue des ignorants. L’entrée de la tente avait été rabattue pour permettre aux deux jeunes gens de sonder l’obscurité, et si Solveig bénéficiait naturellement de l’acuité de sa vision de mi chiraki, Calixte s’était armé de sa longue-vue Aiglefin dotée de la vision nocturne. Emmitouflé dans sa panoplie du solstice et le plaid compact enroulé autours de ses épaules, il avait passé autour de celles de la Valkyrie sa cape an tissu anti-climat, afin qu’elle ne prît pas froid sur leur veillée. Dans l’attente effacée de leur garde, ils s’étaient retenus d’allumer tout foyer lumineux – avaient même usé du peigne magique pour assombrir leurs chevelures – et le silence relatif de la montagne s’était glissé entre eux deux.

    Les teishebas avaient disparus sous leurs couches de vêtements, et Mélyne avait été déposée presqu’au pied du sceau magique. Le coursier l’avait dotée d’un grelot pour familier, et il attendait le tintement du jumeau qu’il conservait dans l’hypothèse où le glooby repèrerait quelque chose d’anormal. Les minutes s’égrenèrent lentement, semblant encore plus longues dans le froid mordant de la montagne malgré leur abri de fortune, et les heures semblèrent s’étirer dans les ténèbres de la nuit. De temps à autres, lorsque la tension du corps de Solveig reflétait l’exacerbation temporaire de son impatience, visible de la crispation de ses mains et l’inflexion de ses oreilles, les doigts de Calixte se glissaient au contact des siens pour les embrasser de leur chaleur, et de leur patience. Et puis, alors que l’espion se résignait peu à peu à une veille fructueuse uniquement en nombre de courbatures obtenues et à l’augmentation de la jauge de leur frustration, le son clair de son grelot accrocha son attention. Dans un avertissement silencieux, sa dextre se referma d’une pression plus soutenue sur la senestre de la Valkyrie, et l’espion partagea les sens de Mélyne.

    Un moment dérouté par les sensations complètement différentes du glooby, qui semblait plus compter sur son odorat que sur sa vue, il accusa quelques secondes de confusion. Il y avait là quelque chose d’anormal, tranchant avec le calme qui avait jusqu’à présent entouré les environs du sceau. Le bruit d’un flacon que l’on dévisse attira son attention, et il analysa rapidement les données qui parvenaient à Mélyne. Le parfum de la sueur, du cuir huilé, du métal froid, des discrètes senteurs fleuries de produits de toilette ; l’odeur de l’humain. Le bruissement des vêtements en mouvement, l’écho des outils manipulés, de la respiration gênée par l’air glacial de la nuit. L’absence de crissement de la neige sous le poids d’un être, comme de l’empreinte de traces de pas. L’absence, aussi, de silhouette décelable en dépit de la présence certaine, massive comparée à son petit corps de glooby. Sans s’attarder davantage, Calixte mit fin au partage des sens. Sentant le changement d’atmosphère, alors que le coursier s’équipait de ses lunettes de jour au cas où, Vreneli quitta la manche de celui-ci pour se fondre sous les vêtements de Solveig.

    - Une personne près du sceau, invisible ou presque, murmura rapidement le soldat à cette dernière. Pouvoir ou objet magique. Pas de trace apparente ni audible dans la neige. Odeurs – musc, cuir, savon de douche rose et thym – assez marquées.

    Et dans l’entente silencieuse de ceux ayant l’habitude de se côtoyer, et confortés par les divers plans qu’ils avaient travaillés ensemble ces derniers jours, ils s’embrassèrent chastement pour mieux fusionner. Usant de la fusion auxiliaire, l’espion se fondit en la Valkyrie pour exacerber encore davantage les capacités liées à son hybridation et celle-ci, profitant de l’occasion offerte, glissa d’un pas félin, leste et rapide, au cœur de la nuit. Tout au partage de ses ressources, évanoui en l’être de son amie, Calixte ne douta pas une seconde qu’elle mettrait la main sur leur cible, ou la marquerait suffisamment pour la traquer d’une manière ou d’une autre si cette opportunité-ci ne leur était tout à fait favorable.
    Solveig P. PrêthLa Garde
    Solveig P. Prêth
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    Re: [Assignation] Sceau magique | Calixte
    Ven 12 Mar 2021 - 22:07 #
    Solveig avait, par le passé et à plusieurs reprises, expérimenté de nombreuses choses. Certaines étaient douteuses, d’autres un peu folles, certaines même incongrues mais la plus étrange fut de voir Calixte disparaître pour se fondre dans son propre corps. Sans être capable de définir sa personne à travers la sienne elle le sentait, là quelques part. Comme à l’angle de son esprit, elle ne pouvait ni le voir, ni le rendre tangible mais il était là ; elle sentait son énergie la traverser de part en part comme si elle se réveillait d’une sieste exceptionnellement reposante. L’expérience aurait pu lui paraître terrifiante si il ne s’était pas agit de lui, toutefois, même si elle lui faisait une confiance presque aveugle elle se demanda à quel point il pouvait bien se fondre en elle. Sans arrière pensée évidemment. Mais que devenait sa conscience lorsqu’il se soustrayait à son existence ? Elle ne le savait pas, elle n’arrivait même pas à l’imaginer et d’une certaine façon elle se demanda s’il ne valait pas mieux qu’elle ne sache pas. Tout comme elle écarta de ses pensées la possibilité qu’il puisse ressentir, ou même entendre ce qu’elle pensait. Ainsi elle cloisonna aux tréfonds de son être toutes les émotions qu’elle ne désirait pas partager et se concentra uniquement sur leur mission. Emprunte d’une nouvelle énergie, elle se mit à sourire ; la nuit allait être amusante, et elle se glissa dans l’obscurité de celle-ci.

    Fendant la bise comme un fantôme, Solveig progressait dans l’étendue blanche avec un lenteur qui l’irritait prodigieusement. Ses mouvements n’étaient entravés par rien qu’autre que le son qu’ils produisaient, attendant qu’un coup de vent suffisamment fort lui permette de courir plus vite. Une fois qu’elle fut assez proche à son goût, elle déploya les deux teisheba à l’opposé de sa zone d’approche, de là où, en toute logique, venait leur ennemi. Leur mission était somme toute très simple. Ils devaient se faire aussi discret que possible, donner l’alerte si quelqu’un approchait et dissuader leur proie de s’échapper si elle venait à se défaire de Solveig. Dès qu’ils eurent disparu, son attention se porta au loin, là ou la ligne de ténèbres ne permettait pas à ses yeux de voir malgré sa nyctalopie. Il fallait qu’elle agisse vite et maintenant, vider une bouteille ne prenait pas longtemps et la fusion de Calixte n’était pas éternelle. Profitant d’un coup de vent plus bruyant que les autres elle fila à toute vitesse.

    La distance qui la séparait de la parois et du sceau était maintenant suffisamment réduite pour qu’elle puisse distinguer les arabesques qui constituaient son pouvoir. L’endroit était d’un calme terrifiant, presque morbide. Comme si les ténèbres de la cité enfouie faisaient taire toutes vies. La garde avait presque l’impression de s’entendre respirer. Tapis dans l’ombre elle huma l’air. « musc, cuir, rose et thym » confirma-t-elle d’une simple pensée, pourtant ses yeux ne détectaient rien. Seuls ses tympans lui permirent de saisir les battements réguliers d’un cœur, juste dans son dos. Une violente douleur la saisie à l’estomac  et elle rendit son dîner.

    - J’ai vu chiraki plus discret. Souffla une voix féminine qu’elle reconnut être celle de Galéa.

    Incapable de reprendre son souffle, la valkyrie s’obligea à se concentrer sur son odorat et son ouïe, les deux seuls sens qui ne lui faisaient pas faux bonds dans cette situation. Malheureusement, si elle pouvait déterminer à peu près la position de son adversaire, elle fut bien en peine d’esquiver ses coups aussi invisible qu’imprévus. Elle reçu cette fois une droite en plein visage qui la fit vaciller. Ni une ni deux elle riposta sur la gauche d’un coup de pied latéral qui ne frappa que le vent.

    - Tu es plus rapide que je ne le pensais, une chance que tu ne me vois pas. En tout cas, tu n’était pas loin.

    - J’adore les jeux. Répondit subitement la blanche. Oh oui elle adorait ça et celui de la fausse garde venait justement d’attirer toute son attention. D’ailleurs un sifflement venant de la droite lui permit d’esquiver un nouveau coup. Aussi vite que possible elle répondit mais frappa de nouveau le vide.

    - Je ne suis pas venu pour faire mumuse avec un gros chat.

    - Dommage. Une lueur de folie illumina le visage de la chiraki et d’un mouvement net elle entailla la joue de Galéa. - Ton sang n’est pas invisible ! S’extasia-t-elle lorsque des perles carmines tombèrent sur la neige.

    - AHAHAH ! Le rire tonitruant se perdit dans le néant. - Je crois que c’est la première fois qu’on arrive à m’atteindre ainsi.

    - J’ai toujours aimé les  premières places !

    - Plus besoin de se cacher de toute façon… En un instant la coupable reprit toute sa contenance, doté d’une armure en cuir souple sa tresse aussi noire que la nuit retombait lourdement sur ses épaules. Sa dextre alla se poser sur la garde de son épée. - Tu sais, si tu me laisse m’en aller je pourrais partager ma part du butin avec toi !

    - Vraiment ? Demanda Solveig en retour.

    - Oui vraiment !

    - Non je veux dire, tu tentes vraiment cette feinte qu’on voit dans les fables d’enfants ? Et puis je trouve ça plus drôle de me battre avec toi ! Et sans demander son reste elle se jeta sur elle.

    Galéa n’eut même pas le temps de dégainer, ainsi commença un long corps à corps. Si Solveig était rapide, son adversaire disparaissant par intermittence et ne lui facilitait aucunement la tâche. Néanmoins elle s’amusait comme une folle, animé par un plaisir morbide. A mesure que les coups pleuvaient, la mi-chiraki eut tout le loisir de constater que la brune disparaissait de moins en moins souvent, et surtout que son rythme avait ralentit. Il fallait dire que la cadence imposée par Solveig n’était pas des moindres. Comme une enfant, elle poussa encore un peu plus et redoubla elle-même d’effort puisant ainsi dans les réserves que lui offrait Calixte. Nul doute qu’elle aurait pu mettre fin à leur combat plus tôt mais comme un chat avec sa proie elle ne la relâcha pas tout de suite. A vrai dire elle ne le fit que lorsque Galéa usa d’un couteau très fin qui réussit à lui entailler l’épaule. La douleur raviva sa raison, lui rappelant que ce qu’elle usait d’énergie à son compte était ce que son amant de coursier aurait besoin de récupérer. Sans compter que le temps était presque totalement écoulé. Tout se passa très vite, trop presque. En un tour de main Solveig prit le contre pied, effectuant un simple bond pour se retrouver dans le dos de la fausse garde.    

    - Tu as de la chance, si ça ne tenait qu’à moi, le sceau t’aurait servit de tombeau… Lui souffla-t-elle langoureusement à l’oreille avant de lui tordre le bras si violemment que sa victime mais aussi son épaule émirent un gémissement plaintif. Chassant ses chevilles d’un coup de pied elle lui broya le dos à l’aide de son genou dès lorsqu’elle fut face contre terre. - Bien. Maintenant nous allons sagement attendre que Calixte réapparaisse ! Elle emprisonna ses mains avec les menottes anti magie puis s’assit en tailleur directement sur le dos de la victime.

    « Revenez » intima-t-elle aux teisheba.

    - Tout ça pour de l’or… Soupira Solveig tout en dessinant du bout de l’ongle dans la neige.
    Calixte Alkh'eirDamoiseau
    Calixte Alkh'eir
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    Re: [Assignation] Sceau magique | Calixte
    Mar 16 Mar 2021 - 17:18 #
    C’était la première fois que Calixte utilisait cette amélioration de son pouvoir. Il avait le souvenir, à la fois certain et vaporeux, de l’avoir demandé afin de pouvoir apporter son aide à ses collègues de terrain. A ceux sur le front, à ceux aux pouvoirs offensifs ou défensifs. A ceux dont l’action comptait. A ses camarades espions. Un murmure en délicate dentelle de sentiments perdus, plus évident dans le creux de son absence que l’évidence de sa teneur, lui soufflait que quelqu’un en particulier avait compté pour cette acquisition. Pour le travail de réflexion autour de celle-ci. Noyé dans la chaleur de l’être de Solveig, inconscient de presque tout sauf de l’énergie en action de la Valkyrie tirant sur les siennes et brouillant les quelques pensées affleurant son esprit, le coursier accusa un moment, infime, de doute. Qui avait ainsi pu autant compter ? Ne laissant en lui que l’ombre de sa présence. Ce n’était pas son amie et amante, il en était certain. Il y avait eu quelqu’un d’autre. L’idée s’étiola rapidement à la faveur du pouvoir commandant son attention, et il oublia qu’elle pût même exister. Rien d’autre ne compta plus que les besoins de Solveig.

    Lorsqu’il fut éjecté du corps de la Valkyrie, il retomba mollement dans la poudreuse malmenée aux abords du sceau de la Cité Enfouie. Reprenant son souffle comme si c’était lui qui avait dû batailler pour maitriser leur suspect – suspecte – il observa prudemment le décor de blanc et de ténèbres qui vacillait dangereusement derrière ses lunettes de jour. Une fatigue intense tressée de courbatures avait saisi ses muscles, et quelques vertiges finissaient leur ronde avant de le laisser à son épuisement. Celui-ci cependant, il en était intimement convaincu, était bien moindre que ce qu’il aurait pu être. La mi chiraki avait été mesurée dans l’utilisation de ses ressources, puisant certainement davantage de ses capacités propres, et le contre-coup n’était pas aussi implacable que ce à quoi le coursier s’était attendu. Même si, visiblement, à en croire l’histoire racontée par la neige rudoyée autours de lui – ainsi que l’odeur de vomi mêlée à celle du sang – l’affaire n’avait pas été simple.

    Fourbu mais l’esprit de moins en moins confus, Calixte ramassa Mélyne qui tentait péniblement de le rejoindre de ses petites pattes, et se releva laborieusement pour assister Solveig. Ils voulurent tirer leur captive jusqu’à leur camp d’observation de fortune, mais comme celle-ci semblait peu encline à se laisser faire et que la patience du coursier s’était trouvée assez abimée par l’utilisation de son amélioration de pouvoir, il la fondit dans une bille. Se réinstallant à l’abri de l’emport’tout, une brève course-poursuite plaqua à nouveau la suspecte – Galéa, selon Solveig – au sol après sa défusion inopinée. Privée de son don, comme de l’usage de ses mains, il était presque ridiculement aisé pour la mi chiraki – et les deux teishebas – de la maitriser. Distraitement, passant son doigt contre une déchirure du vêtement au niveau de l’épaule de son amie mais ne trouvant qu’une cicatrice récente sous celle-ci – peut-être avait-il en partie résorbé la blessure lors de sa fusion – le coursier essaya de mettre en forme ses pensées, ainsi que l’ébauche d’un plan pour leur interrogatoire. Il était dommage que la Valkyrie eût grillé leur carte « d’intéressés par le trésor » – même s’il était intéressant que le motif fût ainsi révélé – mais il existait tout un panel d’autres possibilités pour obtenir des informations de leur captive. A nouveau, la mémoire en dissonance de Calixte s’aventura du côté du manoir des espions à la Forteresse, et son attention vacilla un instant avant que la voix de Solveig ne le ramenât au moment présent. Galéa semblait relativement loquace, et si elle utilisait actuellement plus sa voix pour antagoniser le duo, l’espion ne doutait pas qu’ils pourraient utiliser cette tendance à leur avantage.

    - Ca suffit, intervint-il alors que leur captive tentait à présent, de manière maladroite mais relativement documentée – elle avait du les observer depuis leur arrivée au campement nord – de les monter l’un contre l’autre. Regarde-moi, intima-t-il en sortant de sa poche le globe de vérité.

    L’injonction, engoncée dans un manteau de fatigue et d’impatience, avait claqué plus sèchement que le ton coutumier de Calixte. Et celui-ci songea, dans une grimace presqu’avortée par l’épuisement, qu’il y aurait pu avoir là, dans cet agacement autoritaire, une facette de ses nombreux masques. S’il avait été sciemment incarné. Afin d’assurer son jeu alangui, profitant des longues minutes d’observation des deux jeunes femmes se toisant comme chat et souris, il activa discrètement son bracelet de mimétisme pour mieux adapter ses propos à la compréhension plus fine qu’il obtiendrait ainsi du comportement de Galéa.

    - J’ai fait partie des escouades de l’expédition mandatée par la Couronne, il y a plus d’un an, dans la Cité Enfouie, poursuivit-il plus doucement, mais pas moins fermement. Je n’ai pas besoin de ce globe de vérité pour savoir que tu n’y étais pas, ni toi ni tes éventuels complices ; il n’y a que l’ignorance sotte pour chercher des trésors dans cet endroit mortel.

    La sphère, au creux de sa main présentée devant Galéa, luisait d’une douce lueur de nacre.

    - Je vais te raconter quels « trésors » sont tapis dans les méandres de la Cité Enfouie, et je veux que tu observes la couleur du globe au fur et à mesure de mon récit. Lorsque celui-ci sera terminé, tu pourras me poser toutes les questions que tu as, concernant la Cité, ses trésors que tu cherches, et nos intentions te concernant. Tout ce temps, je tiendrai le globe, reflet de ma bonne ou mauvaise foi.

    Et après une brève pause, la reprise d’un souffle fatigué, il narra la descente funeste dans les entrailles lugubres de la Cité Enfouie.

    Son récit dura plus que les cinq minutes d’affilées allouées par le bracelet de mimétisme, mais l’utilisation de celui-ci lui permis déjà, suffisamment à son goût, d’orienter ses propos, leur tonalité, ainsi que son attitude afin de mieux obtenir l’attention de Galéa. Sa compréhension. Sa compassion. Sa coopération. Il aurait préféré que ses dires restassent neutres, d’une précision chirurgicale impassible, mais sous l’impulsion de son objet de pouvoir il laissa l’émotion, humble mais d’une allure sincère, infiltrer son discours pour mieux toucher leur captive. Il ne lésina pas non plus sur le descriptif des vies arrachées, des liens meurtris, des blessures relationnelles auxquels la jeune femme semblait finalement plus sensible à la lueur de l’absence évidente de richesses cachées. Ce projet clandestin était-il celui d’amis ? De parents ? De son couple ? Lorsque les mots moururent enfin sur les lèvres parcheminées du coursier, une lueur humide valsait dans les yeux de Galéa. Et bien qu’il n’eût plus l’appui de son bracelet, Calixte songea qu’il y avait certainement plus de peine à la réalisation de la bêtise de son – leur ? – entreprise, qu’une réelle empathie. Jusqu’où la jeune femme – voire ses complices – avait-elle été pour tenter de mener à bien son plan ?

    Elle eut quelques questions. Aucune sur la Cité Enfouie. Et l’espion lui répondit sincèrement, quoi que succinctement. Réactivant tout de même son bracelet alors qu’elle se réintéressait à leurs personnes. Mais rien, via l’objet de pouvoir, ne l’alerta.

    Il y eut un temps de silence – bref car il n’était pas dans la nature de Solveig ni des teishebas de se complaire dans l’immobilité – où Galéa sembla se terrer dans le méandre des possibilités qu’il lui restait, avant que son regard, retrouvant quelques touches farouches et prudentes, ne se raccrochât au globe de vérité.

    - Tu vas me le filer maintenant j’imagine, fit-elle avec réticence.

    Et comme Calixte était à peu près certain qu’il ne fallait plus grand-chose pour obtenir sa coopération, et qu’ils étaient bien capables de déceler à eux deux toute trace de mensonge – dans la voix, les prunelles, la respiration, et peut-être même le rythme du cœur pour la Valkyrie – il rangea soigneusement son objet magique dans sa ceinture.

    - Non, je te fais confiance, répondit-il simplement en posant son menton sur ses genoux, observant calmement – et avec une certaine dose de lassitude – la jeune femme. Mais effectivement, à toi maintenant.

    Laissant Galéa se saisir, ou pas, de l’ouverture, il attendit patiemment. Peut-être aurait-elle besoin d’un peu plus que des paroles pour la convaincre de s’ouvrir tout à fait, mais il n’avait aucun doute que Solveig saurait alors lui secouer les puces.
    Solveig P. PrêthLa Garde
    Solveig P. Prêth
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    Re: [Assignation] Sceau magique | Calixte
    Sam 20 Mar 2021 - 22:05 #
    Les oreilles de Solveig s’agitaient sur son crâne comme des girouettes sous un vent violent, elle s’ennuyait, profondément. Non pas que l’histoire de Calixte ne fut pas intéressante, au contraire mais la chiraki était comme un lion en cage. L’adrénaline parcourait encore ses muscles, et même Azazel avait du mal à tenir en place. N’eut été la présence de Galéa et l’inquiétude qu’elle éprouvait à les laisser seuls tout les deux - si il arrivait quoi que ce soit à Calixte alors qu’elle était allé se dégourdir les jambes elle s’en voudrait affreusement – elle aurait filé à la première occasion. Malheureusement son calvaire sembla s’éterniser, à tel point que lorsque il eut terminé son récit et qu’il commença à ranger la petite sphère dans ses affaires, Solveig était perdu dans un monde joyeux tout en barbe à papa très loin dans l’étendu créative de son esprit. Il ne fallut pas moins de deux décharge de son teisheba pour que ses oreilles ne se dressent à l’attention de ses deux compagnons d’infortunes. Et quelle ne fut pas sa surprise d’entendre le blond offrir sa confiance à la prisonnière. Interdite, la blanche le regarda longuement. Galéa dû penser la même chose car elle coula un regard en direction de la Valkyrie.

    - Très bien. Soupira-t-elle en gesticulant, voyant que le visage de Solveig ne lui donnerait aucun indice. A vrai dire elle-même n’était pas certaine de comprendre sa démarche. Soit il avait trop confiance en elle, soit c’était en lui. Dans un cas comme dans l’autre, la soldate comprit qu’il lui incombait maintenant la tâche de déceler vérité et mensonge là où elle seule était en mesure de la voir. Et si Galéa savait ? Et si elle était avait apprit à se jouer des sens aiguisés de la chiraki ? Ses yeux, apeurés glissèrent en direction de Calixte, encore. Silencieusement, elle le pria de revenir sur ses paroles et de changer d’avis. Il n’en fit rien. Il avait confiance en elle. Plus que jamais elle le trouva sot, peut-être un peu fou aussi. Mais elle était mal placé pour le lui faire remarquer. Alors, en faisait un effort drastique afin de se donner contenance, elle offrit son attention à celle qui était, il y avait de la une heure encore, sa sœur d’arme. - Mais je ne suis pas certaine que mon histoire vous intéresse. Poursuivit cette dernière.

    - Dit toujours… Marmonna Solveig dont l’impatience refaisait surface maintenant que l’étonnement était passé. C’est ainsi que la guerrière leur conta les grandes lignes qui l’avaient menée jusqu’ici. Galéa venait d’une famille de fermiers, tout le monde savait qu’ils n’avaient pas la vie facile ici bas, les terres gelées du nord n’étaient pas propices aux développement de champs de blé et autres joyeusetés. Sommes toutes sa famille avait toujours réussit à vivoter plus qu’à vivre. Ainsi, lorsqu’elle avait eu quinze ans, elle avait rejoint les rangs de garde. Non pas par obligation mais bien par envie d’aider les siens. Son histoire fit en écho à celle de Solveig qui ne put s’empêcher d’éprouver une once de compassion pour elle, entrer à l’académie en retard était synonyme de travail acharné. Galéa le lui confirma ensuite. Rien dans ses propos ne pouvait laisser deviner qu’elle ne raconta pas la vérité, pourtant la valkyrie veillait au grain. Ses oreilles, immobiles, étaient rivées sur son vis-à-vis, jaugeant de sa voix, de son palpitant qu’elle percevait régulièrement mais qui se confondait avec celui des autres êtres vivants dans leur cachette. Ses yeux, quant à eux ne perdaient pas son visage de vu, chaque tressautements d’un nerf, chaque regards fuyants était peut-être un indice.

    - Vient en au fait. Si elle l’avait laissé déblatérer jusqu’ici afin de jauger de son comportement normal, elle n’avait aucunement envie d’entendre les détails ennuyeux qui allaient suivre. Sans compter que toute sympathie à l’égard de l’ancienne garde s’était envolé. Solveig n’était pas d’une nature belliqueuse, cependant elle avait toujours eut du mal avec les traîtres d’autant plus lorsqu’ils étaient égoïste comme Galéa. Cependant, elle devait lui concéder une chose ; elle se battait bien et si un jour l’occasion se présentait, elle l’affronterait volontiers. Mais le sujet n’était pas là, et elle dû se mettre à pianoter du bout des ongles pour qu’elle daigne enfin reprendre la parole.

    - J’ai quitté la garde deux ou trois ans après ma première affectation.
    - Tu n’as donc jamais été à la Forteresse ?
    - Jamais.
    - YOUHOU ! S’exclama Solveig sous le regard incrédule de leur prisonnière. - Je savais que ma mémoire ne pouvait pas être si mauvaise ! Dit-elle à l’attention de Calixte qui, sans nul doute devait se demander d’où pouvait bien lui venir une telle explosion de joie. - Enfin continue. Dit-elle en reprenant son sérieux.

    Sans se faire prier, presque trop facilement, l’ancienne soldate leur expliqua qu’elle avait fait la connaissance d’un groupe de chercheur de trésors. C’était à cause d’eux qu’elle avait délaisser le labeur d’un travail honnête pour le pillage et la destruction. Grâce à eux elle avait pu permettre à sa famille de quitter les terres infertiles du septentrion. Pour la première fois depuis au moins trois génération sa famille avait pu vivre de son commerce, et cultiver son lopin de terre sans rentrer aussi fourbu que gelé. Sans le cautionner, Solveig comprit, elle en aurait fait de même et peut-être même pis pour sa famille. Cependant elle n’en dit pas un mot et la laissa poursuivre. Vint ensuite le sujet le plus intéressant ; comment avaient-ils fait pour approcher le sceau.

    - J’ai agis seule. Déclara Galéa.

    Aux vues et aux sues de tous, sa conviction aurait pu être parfaitement crédible. Pourtant une mélodie dissonante frappa de plein fouet les sens de la garde.

    - Tu mens.
    - Je ne mens pas !

    La dissonance se fit plus prononcée encore et sa bouche se crispa légèrement.

    - Elle ment. Cette fois elle ne s’adressait plus à Galéa. Mais bien à Calixte. - Je suis sûre qu’elle n’a pas agis seule. Elle ne savait pas comment le prouver, ni ce qui pouvait la pousser à ce point à ne pas croire les mots, qui jusque ici sonnaient comme vérité, mais elle ne la crut pas.

    - Tu n’as aucun moyen de le prouver. Rétorqua la jeune femme aux cheveux de jais, comme si elle lisait dans les pensées de la chiraki.

    A cet instant précis, un sourire amusé naquit sur ses lèvres, écho à celui de la captive. L’une d’elles pensait avoir mit l’autre en déroute, pourtant aucune n’en avait la certitude. Solveig fut la première à réagir, avec un calme aussi surprenant qu’étrange et qui ne lui seyait pas du tout, elle se leva afin de contourner Calixte puis elle approcha d’une démarche féline de sa vieille camarade. Tout aussi agilement elle se glissa dans son dos, puis enroula ses bras autour de ses épaules avant de glisser sa joue contre son oreille. Ensuite ses lippes rosées s’agitèrent sans qu’aucune autre personne qu’elles ne puissent en saisir le sens. Ainsi, le sourire de Galéa resta figé avant de s’évanouir pour laisser place à une mine épouvantée. Son visage devint livide et une lueur aussi horrifiée que celle de Solveig semblait aliénée passa fugacement dans ses yeux d’un noir d’encre.  

    - Trois. Nous sommes trois. Lâcha-t-elle finalement à contre cœur.
    - Ah tu vois quand tu veux ! S’exclama la chiraki en tapotant ses mains, sautillant jusqu’à aller reprendre sa place. - Je pense qu’elle n’essaiera plus de mentir ! Ajouta-t-elle tout sourire, posant un regard affectueux sur le coursier.
    Calixte Alkh'eirDamoiseau
    Calixte Alkh'eir
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    Re: [Assignation] Sceau magique | Calixte
    Dim 21 Mar 2021 - 18:18 #
    Calixte aurait pu s’endormir. Entre l’heure qui ne rajeunissait guère, l’utilisation de la fusion auxiliaire et le récit de Galéa, sa vigilance ne tenait qu’au fil ténu de sa curiosité. Car au-delà de leur mission officielle, l’espion était réellement intéressé de savoir comment la jeune femme s’était retrouvée à tenter de faire céder le sceau d’une cité dont le seul trésor résidait dans sa capacité à fournir toujours plus de créatures belliqueusement mortelles. Il aimait les histoires, bonne ou moins bonnes, et celle de leur victime entretenait son appétit en la matière. Instinctivement, formaté par les années d’entrainement et d’activité, ses sens s’accrochèrent au timbre de la voix de Galéa, à son rythme, à celui de sa respiration et de sa gestuelle plus ou moins éloquente, cherchant et décryptant l’hésitation, les omissions et le mensonge. L’esprit cependant de moins en moins alerte, il ne s’y attarda pas, s’attachant davantage aux propos de la jeune femme et laissant Solveig s’occuper de la sincérité de celle-ci. S’il était certain que la Valkyrie aurait préféré milles fois retourner à son combat plutôt que de s’enfoncer dans les méandres tourbeux d’un interrogatoire, Calixte avait aussi une confiance infinie dans son professionnalisme et ses compétences. Ainsi se contenta-t-il d’acquiescer, sans incertitude aucune, lorsque son amie affirma que leur captive mentait.

    Le menton toujours posé sur ses genoux, le regard plus vif à la mention de cette irrégularité brisant le récit hypnotique de Galéa, le coursier se demanda comment appréhender la suite. Assurément la jeune femme serait réinterrogée par leurs collègues, longuement, mais s’ils pouvaient obtenir quelques noms de complices avant que le soleil ne se levât cela faciliterait tout de même la gestion et fermeture du dossier. Voire l’arrestation de ceux-ci avant qu’ils ne disparussent dans la nature. Le mouvement à ses côtés ne le surprit guère, car il n’était pas dans la nature de Solveig d’attendre, surtout face à de l’antagonisme.

    Attaquer ? demanda immédiatement Vreneli, qui semblait être un peu chagriné par le manque d’opportunité d’électrocuter quelqu’un.
    Non, répondit immédiatement l’espion qui soupira de soulagement lorsque le teisheba vint sagement s’enrouler en écharpe scintillante autour de son cou.

    Dans les ténèbres de la nuit, faiblement chassées par la lampe magique que Calixte avait allumée dans l’enceinte de l’emport’tout, la petite créature de lumière semblait accuser elle aussi un moment de fatigue.

    Le coursier ne perçut pas les mots que Solveig murmura au creux de l’oreille de Galéa. Il observa cependant sans peine son visage blêmir, ses yeux s’écarquiller, ses lèvres s’entrouvrir sur une inquiétude silencieuse, ses muscles se crisper pour tendre son corps sur une posture défensive, sa respiration rater une mesure, puis deux, avant de devenir erratique. Le doute, la peur puis le désespoir exsuda de tous ses pores pour finalement prendre forme dans la confession résignée de la présence de collaborateurs à son plan.

    Il ne leur fallut pas longtemps pour trouver un nouvel équilibre mieux organisé entre l’intimidation mordante de Solveig et la compassion – documentée mais principalement feinte – de Calixte, laissant Galéa osciller de l’un à l’autre. Rendant ses propos moins fluides que son récit initial mais plus intéressant dans sa teneur pour la Garde. Obtenir des détails sur leur organisation ne fut guère compliqué, car il semblait qu’il y avait là un fond de fierté d’avoir réussi à duper les soldats. Peut-être pas dans le mensonge, mais dans le fait d’avoir pu s’y réintégrer, comme si elle – ils – faisait toujours partie de l’établissement. Il fut aussi aisé de récupérer le nom du fournisseur du produit magique, suffisamment abrasif pour déliter le sceau que les enchanteurs de la Couronne avaient apposé à l’entrée de la cité pour la condamner, dont l’expertise en la matière mériterait d’être enquêtée voire inquiétée. L’obtention du nom de ses complices fut en revanche d’une pénibilité majeure. Alors que les ténèbres de la nuit viraient à un gris aux teintes de plus en plus claires laissant présager de l’aurore à venir, les deux amis tentaient pour la quatrième fois de faire avouer à Galéa l’identité de ses compagnons de méfaits.

    - Nariné, lâcha finalement la captive alors que Calixte se demandait s’il ne valait mieux pas qu’il troquât la patience profonde qu’il puisait actuellement contre un bon coup de tatane peut-être plus efficace – mais certainement moins légal.

    Il sentit Solveig se rassoir à côté de lui, les yeux plissés et les oreilles tournées vers la jeune femme – visiblement il n’était pas le seul à avoir envisagé le coup de tatane exaspéré – mais la Valkyrie émit immédiatement un doute en dépit de la sincérité qu’elle lui reconnaissait.

    - Elle ne fait pas partie des patrouilles, c’est pour ça que tu ne l’as pas croisée en escouade, poursuivit dans un grommellement Galéa. Elle a son poste à la logistique ; elle fait principalement du secrétariat.

    Le coursier n’avait pas souvenir d’une Nariné, mais il avait surtout passé ses journées avec l’enchanteur Emrys donc il n’était pas étonné de ne pas reconnaitre le prénom.

    - Elle est du village attenant, c’est elle qui nous a contactés pour ce travail.
    - Elle fait partie du groupe de chercheurs de trésors ?
    - Non. Elle nous connaissait d’avant, nous sommes restés en contact pour diverses raisons, et lorsqu’elle a appris pour la Cité Enfouie, elle est revenue vers nous. C’était son idée, insista la captive avec une ardeur retrouvée. C’est elle qui a repéré les lieux, qui a entendu parler des richesses des sous-sols ; au hameau ils sont plusieurs à parier là-dessus, et ils étaient là pour aider à préparer l’expédition Royale !
    - Maintenez-vous que j’aurai pu vous mentir ?
    - … non, admit Galéa à contre-cœur, le regard avisant la poche où il avait rangé son globe de vérité.
    - Je n’ai pas le souvenir d’avoir entendu beaucoup de rumeurs à ce sujet dans le village, poursuivit Calixte en se remémorant ses aller-retours avec l’enchanteur – son tout premier en quête de faiseur d’ange ne lui avait pas donné l’occasion de s’intéresser à plus que sa propre condition immédiate.
    - Ça dépend qui on interroge, répondit la jeune femme en haussant les épaules.

    Et l’espion était enclin à la croire. Certainement que la plupart, notamment si elle avait prêté main forte à l’expédition, se doutait que les ténèbres de la cité regorgeaient plus de périls que de trésors. Mais à mesure que le temps passait, érodant sous son voile le souvenir du danger des profondeurs, nul doute que l’imagination fertile reprenait ses droits et que l’espoir ma fondé d’un butin nécessitant la garde des soldats prenait le pas sur la circonspection.

    - Qui est « nous » ? choisit-il de noter.

    La posture de Galéa se raidit à nouveau, et son regard balaya rapidement la Valkyrie qui paraissait prête à user de son bondissement félin pour obtenir ce dernier élément. Plus il leur semblait toucher au but, plus il devenait difficile de s’armer davantage de patience et ne pas céder à l’empressement. Terrain d’échec et de bavure. Calixte allait activer une troisième fois son bracelet de mimétisme pour tenter d’orienter au mieux son interrogatoire afin d’obtenir cette dernière information, lorsque la situation lui échappa complètement.

    - J’ai pas…
    - Son amant unijambiste ! s’exclama avec enthousiasme une voix beaucoup trop claironnante à ces heures indues.
    - Quoi ? fit Galéa confuse, cherchant des yeux la silhouette de cet interlocuteur surprise.

    Ou, bien évidemment, de cette interlocutrice.

    - De son amante unijambiste ?
    - Qui est unijambiste ? demanda la captive qui semblait à la fois ahurie et perplexe de ce changement d’approche.
    - Ton amant ! Suis un peu : la troisième personne. Quelle mauvaise mémoire, on dirait Soleil de ma vie quand il oublie la moitié de ses rendez-vous.
    - J’ai une bonne mémoire ! Qui est…
    - Ptet meilleure pour les positions avec l’unijambiste ! Audacieux de vouloir l’faire dans les souterrains ; j’approuve. Prenez des notes, Solixte, mam’zelle et son amant ont visiblement d’la ressource à vous faire partager.
    - On n’est pas amants !
    - Ouuuuh ça sent de Zahtruelle ça ! Bien sûr, bien sûr… M’enfin si Soly chérie avait dit oui pour le trésor – le pillage et toute cette bagatelle – ça vous aurait intéressé un p’tit quatuor ? Il faut que je documente les techniques de réchauffement dans les froides montagnes du nord, et à quatre y a un sacré potentiel ! En dehors de la belote. Des positions préférées avec ton amant pas amant ?
    - C’est mon frère ! s’écria Galéa excédée.
    - … d’accord, un brin d’inceste. Mais qui a dit que…

    Les doigts de Calixte se refermèrent sur la trousse de cuir qui continua joyeusement à évoquer les diverses possibilités des plans à quatre – voire cinq avec Nariné – et il se demanda si la colère qui s’imprimait sur les traits de la captive visait surtout Apolline ou bien elle-même. Son abandon à l’impulsion rectificatrice et révélatrice, elle ne pouvait que s’en sentir coupable. Profitant du sillon – de la tranchée – tracée involontairement par Apolline, le coursier tenta d’en apprendre davantage sur le frère – et troisième membre du groupe – de Galéa. Cette dernière néanmoins, murée dans un silence obtus d’inquiétude et de vexation, garda les lèvres fermement pincées.  

    Sans doute auraient-ils encore pu travailler leur captive, et lui arracher quelques informations supplémentaires, mais la clarté s’affirmant toujours plus au dehors ne jouait pas tellement en leur faveur comme la fatigue de plus en plus prégnante dans leur corps et leur esprit. Propice à l’erreur. Et finalement, lorsque seuls les tremblements effrayés et malheureux de la jeune femme leur répondirent à la suite d’un rappel intimidant de Solveig, les deux amis décidèrent d’un accord commun de s’arrêter là de leurs investigations. Auprès de Galéa. Logeant à nouveau celle-ci dans une bille afin de regagner le campement dans une discrétion relative quant à leur mission, Calixte laissa la Valkyrie replier et récupérer leurs affaires avant de les guider jusqu’aux baraquements. Malgré les lueurs de plus en plus affirmées de l’aube et les lunettes de jour de l’espion, celui-ci gardait une difficulté plus grande que la mi chiraki à se repérer et évoluer dans l’étendue blanche.

    Au camp militaire, ils avisèrent le bureau du sergent-chef Aliar, et lorsqu’il devint évident que celui-ci n’était encore levé, dévièrent leurs pas jusqu’aux quartiers de celui-ci. Il leur fallut attendre quelques minutes qui leur parurent interminables à la mesure de leur fatigue et du froid ambiant, mais lorsque leur supérieur les reçut enfin, la suite des opérations se déroula dans une fluidité et une simplicité tout à fait bienvenue. Galéa fut placée de manière temporaire sous la surveillance réservée du sergent-chef, et ce dernier écouta leur rapport oral – soutenu par le silence maussade de la suspecte – en leur demandant de réaliser l’officiel écrit après un temps de repos. Celui-ci, cependant, ne serait pas pour tout de suite. Soucieux de profiter de l’élément de surprise, leur supérieur planifia rapidement l’arrestation de la soldate Nariné Doriblaze par une escouade féminine, et la recherche du frère de Galéa par deux petites équipes. La première composée de Solveig et Calixte, la seconde, à nouveau, de membres de la gente féminine. Il avait, quelques secondes, semblé hésiter à réquisitionner Arthur et Marlo, mais ces derniers étaient prévus de patrouille aux abords du sceau dans les heures à venir et chambouler toute l’organisation déjà en place ne serait sans doute pas si contributif. Il fit cependant transmettre le message aux gardiens des limites du campement, que nul de quitterait celui-ci jusqu’à nouvel ordre.

    Evidemment, Galéa et son frère ne s’étaient pas inscrits sous le même nom de famille. D’ailleurs, peut-être n’avaient-ils tout simplement pas le même. Evidemment, ils n’avaient pas non plus mentionné leurs liens particuliers à la hiérarchie, ni à leur entourage militaire. Dans l’attente d’en découvrir davantage des aveux éventuels de Nariné, les deux groupes de recherche avaient obtenu la liste des fréquentations connues de Galéa, et avaient reçu les ordres de s’atteler rapidement à cette piste-ci. Ainsi, éreintés mais ravivés par le développement animé de leur assignation, Solveig et Calixte poursuivirent leur enquête armés de listes. Et des sens affutés de la mi chiraki.

    - Penses-tu qu’ils se ressemblent un minimum ? Ou bien tout se jouera à leurs odeurs ? demanda le coursier à son amie, aussi curieux que désireux d’employer tous les moyens à sa portée pour ne pas céder à l’appel du sommeil. Même s’ils ont gardé leurs distances entre eux, il ne serait pas étonnant de trouver des affaires de l’un chez l’autre, et vice versa. Penses-tu qu’on devrait commencer par faire un détour dans la chambre de Galéa ?
    - Sacré délire de renifler les draps de votre suspecte avant d’aller chercher votre plan à trois ! Mais y a une piste à exploiter. Hé Soly chérie, si on couvre Cal de bouffe, est-ce qu’avec ton odorat ça te donnerait envie de…
    - La chambre de Galéa est juste là, sur la droite. Et nos suspects sont un peu plus loin sur la gauche. On en a un qui est sur son tour de patrouille, deux qui devraient avoir rejoint le réfectoire pour le petit-déjeuner avant leurs assignations, et un dernier qui risque d’être à demeure. Certainement endormi, il était de garde cette nuit, énuméra Calixte dans un bâillement.
    - Vous avez réfléchi aux dépenses bouffe ? Parce qu’entre les chouettes utilisations en culbutes, l’appétit de mi chiraki de Soly chérie, les dernières lubies de Cal – Farci m’a raconté pour les plaquettes de chocolat ! – et les deux microbes que vous allez avoir à élever…

    L’espion s’étrangla sur sa salive, et la suite du joyeux laïus de la trousse de cuir fut ponctuée d’une violente quinte de toux.

    - Samoussa mange pas des masses, mais l’môme à venir ? Sauf si tu l’cuisines finalement. Y a de sacrés instruments de cuisine dans ta piaule, et j’crois qu’Abou est en train de te faire un classement des meilleures recettes.
    - Pas de cuisine, toussota Calixte d’une voix rauque les larmes aux yeux en raison de l’irritation persistant dans sa trachée. Pas de cuisine ? répéta-t-il d’un ton plus incertain en récupérant contre ses doigts ceux de Solveig qui lui tapotait le dos.
    Solveig P. PrêthLa Garde
    Solveig P. Prêth
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    Re: [Assignation] Sceau magique | Calixte
    Mer 24 Mar 2021 - 22:41 #
    Solveig était tout bonnement dépitée, en plus d’être fatiguée. Elle qui avait espéré que son séjour dans le nord soit de courte durée, le voyait s’éterniser sans discontinuer. Ces brigands allaient-ils un jour se laisser arrêter ? Les escouades du nord ne pouvaient-elle pas se débrouiller par elles-mêmes ? Tandis que son supérieur s’était lancé dans un long laïus, préparant au passage l’arrestation de Nariné, ainsi que la mise en place des recherches du frère de Galéa, Solveig avait ruminé. Tant et si bien que lorsqu’ils furent enfin libéré elle avait finalement retrouvé un soupçon de bonne humeur. L’air frais lui avait toujours fait du bien. Toutefois, elle aurait volontiers prit quelques minutes afin de se lancer dans un entraînement intensif avec Marlo ou Arthur. A sa grande peine aucun des deux ne fut dépêcher sur l’affaire. Pourtant ils y auraient eut leurs places, c’était somme toute grâce à eux qu’elle avait pu récolter plusieurs informations et jusqu’à lors ils n’avaient pas trahis sa confiance. Il était triste d’écarter ainsi d’aussi bons compagnons. Toutefois, la fatigue était bien présente et elle n’eut pas le courage de rétorquer. Vu le caractère de cochon du sergent-chef, elle était presque prête à parier qu’il serait bien capable de lui retirer Calixte pour faire bonne mesure.

    - J’sais pas. Marmonna vaguement Solveig en réponse à la question du coursier. La seule chose dont elle était on ne peut plus certaine fut que le sommeil commençait cruellement à lui manquer et que son estomac n’allait pas tarder à crier famine. Cela devait faire au moins six bonnes heures qu’elle n’avait rien avalé ; son système digestif n’était pas conçu pour rester vide aussi longtemps, c’était peut-être cela qui lui causer une aussi grande fatigue. - La chambre. Poursuivit-elle d’un même ton avant que la trousse ne se mette subitement à déblatérer une histoire de plan à trois, de repas et de… Calixte ? Plissant les yeux elle leur lança un regard suspicieux ? « Où va-t-elle chercher de telles idée ? »  la question méritait d’être posée, et alors qu’elle allait y répondre son imagination lui offrit l’image d’un dessert succulent dont son compagnon était la pièce principale. En un instant son regard fut ravivé d’une lueur vive, gourmande et parfaitement intéressée. Il fallait qu’elle mange, maintenant, auquel cas c’est un autre genre de repas qui attiserait ses sens. Faisant fit de la chaleur qui se rependait dans son estomac, elle concentra toute son attention sur la discussion qui suivit, tapotant le dos de Calixte lorsqu’il manqua de s’étouffer avec sa propre salive. Encore une démonstration de sa talentueuse maladresse.

    - Pas de cuisine. Répondit-elle en haussant les épaules, pas certaine de comprendre de quel sujet ils pouvaient bien parler. Et si c’était bien celui qu’elle pensait alors elle n’était qu’un commis, c’était lui le chef de cuisine, de son côté elle avait fait son temps. Lui adressant un sourire rassurant, elle retira ses doigts des siens. Non pas qu’elle n’apprécia pas la douceur chaleur qui émanait de lui, mais entre les idées que la trousse de cuir faisait fleurir dans son esprit, ses deux appétits débordants et la fatigue qui rendait ses agissements instinctifs plus que raisonnables, elle les pensait tout à fait capable de louper leur mission sur les simples pulsions d’une valkyrie excédée. Nul doute que la distanciation sociale fut inventée par une femme.

    - Je ne pense pas que la chambre de Galéa nous apportes des éléments de réponses. Dit-elle tout en s’étirant. - A moins que les affaires de son frère n’aient été déposées récemment son odeur la recouvrira et puis… Comme l’a fait remarqué Apo tout à l’heure, c’est peut-être un amant dont je capterais l’odeur. C’est une criminelle certes, mais tu n’es pas aveugle. Elle est jolie. C’est par là. Indiqua-t-elle tout en de même, prenant la direction d’un baraquement sur leur droite. - Je pencherais pour ceux du réfectoire ensuite. Ils vont partir en patrouille dans peu de temps et je n’ai pas envie de devoir leur courir après. En plus j’ai faim. Son ton se fit ronchon, comme un enfant à qui l’on viendrait de conseiller de manger un yaourt pour combler son appétit.

    Il ne leur fallut pas très longtemps pour arriver devant la porte qui comportait le numéro de celle de Galéa. D’un simple coup d’œil ils s’assurèrent que personne ne les observait – entrer dans la chambre d’un camarade sans crier gare pourrait vite mettre la puce à l’oreille de leur cible – puis ils se glissèrent à l’intérieur avant de refermer la porte dans leur dos.

    - Sacré bordel… Souffla Leiftan.
    - AH-AH ! Vous voyez qu’il y a pire que moi ! S’exclama Solveig d’un air satisfait.

    Heureusement son gant n’avait pas d’yeux, mais s’il l’avait pu ils auraient roulés.

    Cependant la chiraki était dans le vrai. La pièce était un véritable capharnaüm ou se mélangeaient vêtements, armes, papiers et nécessaire à écriture. Les draps étaient tout retournés comme si quelqu’un venait tout juste de se lever et étaient tâchés d’encre. Plus loin reposait une carte avec quelques notes ci et là. Il ne fut pas compliqué pour la soldate de comprendre qu’il s’agissait d’une carte de l’entrée de la cité ; personne n’ayant franchement réussit à établir une cartographie clair du reste du lieu. S’approchant, elle souleva le parchemin pour en trouver un autre, sur celui-ci il s’agissait d’annotation concernant les méthodes aussi complexe que nombreuses pour défaire le sceau. Si on lui avait dit qu’il en existait autant elle ne l’aurait pas cru ! Encore en dessous il y avait un croquis des écritures magiques présentes sur la protection. Rien qui ne les avance à quoi que ce soit, sauf peut être Calixte qui avait étudié le sceau et qui verrait là une trouvaille enrichissante. Elle lui laissa tout le loisir d’en disposer à sa guise et se mit à fouiller dans le sac à dos de la captive. Elle en tira d’abord une cape, puis des vêtements de rechange, des fioles vides – qui avaient sans doute contenu la potion de destruction ; un simple coup de nez à l’intérieur le lui confirma -, un couteau et pour finir une série de parchemin vierge. Rien qui ne les intéresses.

    L’air mécontent, elle allait se tourner vers Calixte pour lui demander si lui avait trouvé quelques choses, mais avant qu’elle n’en ait le temps trois coups martelèrent la porte. Interdite, son corps se tendit comme un arc, elle ne l’avait pas entendu venir. Posant un doigt sur ses lèvres, elle intima à son compagnon de garder le silence.

    - Galéa ! Ouvre ! On a un problème ! S’écria une petite voix masculine au-delà de la porte.

    A pas de loup, Solveig franchit la distance qui la séparait de la porte. Humant l’air, elle ne détecta qu’une pure odeur de peur. La personne derrière cette porte était morte de trouille.

    - Galéa ! S’il te plaît, c’est moi… Sa voix se perdit dans un gargouillis terrifié lorsque la porte s’ouvrit à la volée et que Solveig la saisit par la col pour l’entraîner dans les ténèbres de la chambre.  Tout s’était passé extrêmement vite, trop pour le jeune homme qui cligna des yeux plusieurs fois avant de commencer à comprendre. Bouchée bée, ses yeux fous roulèrent dans ses orbites faisant des allers et retours entre Calixte et Solveig. - Je… J-je.. Je me suis trompé de chambre, je suis coursier ! Vous comprenez ! Je cherche le..la… So-so-soldat… La prise sur son cou se relâchant subitement, il tituba jusqu’au lit, se rattrapant in-extremis à l’encadrure pour ne pas vaciller. La valkyrie, pour sa part, alla se planter devant la porte. Loin d’être imposante, son air farouche suffit néanmoins à dissuader leur nouvelle prise. Ne restait plus qu’à espérer que celui là ne pouvait pas travers les murs. Elle avait suffisamment à faire avec un seul.

    Comme un lapin prit au piège, le jeune homme chercha un échappatoire, en vint. Il n’était pas très grand, tout juste la taille de Calixte et encore, il était également mince, presque trop pour un garçon de son âge. Nul doute qu’il avait, par le passé, manqué de nourriture. Ses cheveux noir de jais, était mousseux et abîmés comme des fils de laine mal cardée. S’il possédait deux yeux, ils n’étaient pas identiques mais contrairement à ceux vairons de Solveig, ils avaient un jour était de la même couleur. L’un aussi profond et noir que le néant, l’autre d’un bleu pâle presque blanc à l’air maladif. Ce dernier n’était plus utile et se contentait de suivre le mouvement de l’autre par pur réflexe. Plus soigné, et doté de ses deux iris, ce garçon aurait immédiatement était reconnu comme étant le cadet de Galéa. Pourtant, dans ce cas précis, il fallut une bonne dizaine de seconde à Solveig pour qu’elle comprenne. Une autre évidence s’imposa à son esprit, si ce garçon était bien le frère de la soldate – ce dont Solveig ne douta pas – il n’était que la pointe visible de l’ice-berg. Même un fou doublé d’un idiot ne s’en serait pas prit à la cité enfouie à l’aide d’une combattante -certes douée –,  d’un adolescent et d’un employé administratif. Non, tout trois n’était qu’un galet sur une plage de caillou. Cette simple idée lui donna mal au crâne, et en plus elle avait faim.  
    Calixte Alkh'eirDamoiseau
    Calixte Alkh'eir
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    Re: [Assignation] Sceau magique | Calixte
    Dim 28 Mar 2021 - 18:10 #
    Assis sur le lit en pagaille face à Tisaen – qui se disait apparemment « tisane », chose qui ne faisait rien pour calmer la faim de plus en plus lancinante des deux amis – lui-même attaché à la chaise du bureau par les menottes anti-magie de Calixte, ce dernier observait avec fatigue mais curiosité leur nouveau captif. Visiblement mal à l’aise dans ce contexte, et probablement déjà pas très vaillant de base, le coursier se dit qu’ils auraient certainement moins de mal à obtenir des informations de la part de celui-ci que de Galéa. D’ailleurs, il suffit à Solveig d’un sourire carnassier – assurément se languissait-elle en réalité du petit-déjeuner à venir – pour faire couiner de peur le jeune Tisaen.

    - Elle a faim, déclara d’un ton neutre l’espion à son adresse. Elle est mi-chiraki ; vivant dans la montagne, tu n’es pas sans savoir qu’ils ont un régime alimentaire particulier.
    - Je…j.. vous… v-vous n’avez pas le droit de me faire du m-mal ! C’est contraire au règlement de la G-Garde, chouina le jeune homme en pâlissant néanmoins.
    - Et qui croirait la parole d’un malfaiteur plutôt que celle de deux gardes ? Il suffirait de mentionner une résistance hargneuse de ta part pour justifier quelques blessures, répondit avec lassitude Calixte qui, pour tout son intérêt pour l’affaire, regrettait de plus en plus son lit. Et dans le pire des cas, cette épaisse couche de neige servira aisément de tombeau discret. Le temps que les chaleurs reviennent et déglacent le coin, tes chairs imbibées d’eau ne conserveront aucune preuve en faveur d’une bavure plutôt que de ta propre malchance.

    C’était bien évidemment faux, mais il semblait que la crédulité de Tisaen était au moins aussi grande que son affolement général. Sa jeunesse et son inexpérience, semblait-il, le desservant. Ce qui, dans le contexte, était assez étonnant. Le groupe à l’origine de l’affaiblissement du sceau comptait-il vraiment uniquement une ancienne garde, une secrétaire et un jeune homme dont la seule réussite évidente semblait être d’avoir faire ses lacets sans les emmêler ? Soit ils avaient eu beaucoup de chance jusque-là, soit Solveig et Calixte étaient passé à côté de compétences supplémentaires. De bras et de cerveaux supplémentaires.

    Le captif se raidit davantage sur sa chaise, avant de tenter de s’y faire le plus petit possible. Ses yeux – son œil – balayant de manière erratique la pièce à la recherche d’une issue, et revenant de manière systématique, comme irrésistiblement obnubilés, sur la silhouette de la Valkyrie. Suivant instinctivement son regard, l’espion avisa brièvement son amie. Gardant la porte, les bras croisés sur la poitrine, les pupilles verticales élargies certainement plus par la pénombre qu’un réel intérêt pour la scène – en attestaient ses oreilles tournées vers d’autres horizons – elle lui semblait absente. Ou concentrée sur son estomac criant régulièrement famine. Et puis, de temps à autres, probablement mus par quelques pensées alléchantes, les traits de son visage se modifiaient légèrement, ses prunelles s’acéraient, et ses oreilles se redressaient. Donnant l’impression d’un félin un peu lunatique en chasse, la pénombre de la chambre exacerbant ses mimiques bestiales. Calixte la trouvait ainsi terriblement séduisante, mais il était certain que le poil se dressant sur les bras de Tisaen réagissait pour sa part plus à l’effroi qu’à la concupiscence. Et c’était tant mieux, si l’attitude de la Valkyrie jouait ainsi en leur faveur.

    - Donc c’est assez simple : plus ça traine en longueur, plus on a faim. Et plus on a faim…
    - J-j’ai des biscuits secs dans ma chambre !
    - Comme c’est gentil, répondit le coursier d’un ton affable. Continue donc comme ça, cela nous laisse le temps de choisir par quel morceau attaquer.
    - Non m-mais, vrai-vraiment. Ga… Galéa a aussi des bonbons, des r-rations qui trainent ! V-vous pouvez fouiller !
    - Dix orteils, c’est assurément quelques-uns de trop. Ça peut faire un bon encas, et passer pour des suites d’engelure avec un pansement adapté.

    Comme de concert, les yeux de Solveig se voilèrent d’envie, ses lèvres s’entrouvrirent avidement et son nez huma l’air comme s’il pouvait la nourrir uniquement d’odeurs. A cette heure-ci de la matinée, quelques collègues passaient certainement devant les baraquements armés d’un dernier café ou muffin avant de partir sur le terrain. Mésinterprétant l’attitude de la mi-chiraki, Tisaen fondit en larmes.

    - M-m-me mangez pas, s’i… s’il v-v-v-vous plait, hoqueta-t-il avec désespoir. Je… je vais t-t-tout vous di… dire !

    Calixte, s’il avait été un peu moins fatigué et fourbu, aurait certainement pris pitié du jeune homme. Présentement, il se contenta de lui offrir un mouchoir avant de sortir son carnet de notes.

    Le discours de Tisaen, entrecoupé de pleurs et de coups d’œil effrayés, confirma les quelques informations qu’ils avaient déjà obtenues auprès de Galéa. Il leur apprit aussi que l’entreprise, si elle tenait principalement sur le trinôme, avait le soutien d’une petite cellule d’habitants du village adjacent au campement militaire. Ainsi, si le cerveau des opérations tenait au couple Nariné-Galéa, le jeune homme principalement présent pour servir de lien avec le hameau, la soldate de terrain était régulièrement aidée par quelques villageois. Par leurs compétences physiques, logistiques ou magiques. Voire leur statut social. Lorsque Tisaen leur énonça la liste exhaustive des impliqués – une demi-douzaine – Calixte ne fut guère surpris d’y voir apparaitre quelques élus. L’interrogatoire – la confession, plutôt, à ce stade – poursuivit encore un peu sur les modalités d’action du groupe complet, des éventuels soutiens supplémentaires – conscients ou inconscients – qu’il avait pu avoir, et l’infiltration au sein de la Garde des membres du trinôme. Et puis, assez rapidement en raison de la diligence apeurée du jeune homme, il sembla qu’ils avaient fait un tour raisonnable du sujet.

    Rassemblant ses notes ainsi que celles, semblant incriminantes – malgré ses quelques journées avec l’enchanteur Emrys il aurait été incapable de deviner quoi que ce soit des annotations techniques concernant le sceau – de Galéa, Calixte décrocha Tisaen de la chaise pour lui passer les menottes aux deux poignets, et Solveig se chargea d’attraper le bras de celui-ci pour le mener jusqu’au Sergent-Chef Aliar. Accusant un petit cri de panique, le captif réalisa ensuite :

    - Mais je… je… j’aurai pu crier et… et… et…
    - Oui, acquiesça simplement l’espion alors qu’ils quittaient la chambre de Galéa. Mais comme ça tu nous as fait gagner un temps fou, le remercia-t-il en tapotant doucement son épaule.

    Dépité, dans un silence morose, Tisaen se laissa mener sans opposition.

    ~

    Calixte avait dormi quasiment tout l’après-midi, avait réalisé son rapport écrit qu’il avait déposé au Sergent-Chef Aliar, puis était allé se restaurer dans un réfectoire relativement vide. En passant à côté des terrains d’entrainement il avait aperçu la silhouette féline de Solveig, effectuant quelques mouvements avec Arthur et Marlo, et il s’était arrêté quelques minutes, songeur et admiratif, avant de reprendre sa route vers la tente de l’enchanteur. Avec leur enquête menée à bien, il n’avait plus d’obligations envers Emrys, mais l’homme était bonne compagnie et le coursier avait souhaité le revoir avant leur départ – dès le lendemain matin, si la météo était clémente – du campement. Après une mission demandeuse en ressources et notamment en temps d’éveil, cet épilogue avait la douceur des beaux jours après la tempête. L’espion était certain que cela ne durerait guère, mais il était résolu à en tirer parti.

    Ainsi, laissant Solveig profiter d’un dernier dîner avec leurs collègues montagnards, il avait récupéré de quoi pouvoir leur concocter un thé vespéral, accompagné de petites douceurs négociées en cuisine, en tête à tête. Tirant le bureau au milieu de la chambre de la Valkyrie, disposant le nécessaire dessus et mettant les plantes à infuser, humant les effluves sucrés des pâtisseries, il se félicita un instant, sourire aux lèvres, de son installation de fortune.

    - Y a quelqu’un qui veut ken ce soir, nota Apolline du lit qu’elle avait pris pour trône.

    « Tête à tête » était une notion relative dans l’univers jonché de familiers et d’âmes artificielles des deux amants. Abdallah et Louis étaient penchés sur le dernier Garde Actuelle, et les deux teisheba s’amusaient à envoyer de minuscules décharges électriques contre la théière rustique. Leiftan n’était pas en vue, peut-être accompagnait-il Solveig, et Lulubelle et Kaname étaient restées aux écuries.

    - Je me dis juste que ça adoucit le contexte de la discussion.
    - La « discussion », bien sûr, bien sûr. Mais je vois que t’as pris note de mes conseils du « Guide des croisières en eaux troubles », la « discussion » devrait bien s’passer. T’as pris de la chantilly ?
    - De la… ? débuta Calixte avant de vaciller, supportant toujours mal les premières minutes de transformation via le SAPIC.

    Sa main heurta la coupelle de cookies alors qu’il tentait de se rattraper, et les biscuits effectuèrent un vol plané pour se disperser aléatoirement dans la chambre. Azazel, qui avait soulevé le couvercle de la théière pour que Vreneli et lui constatassent le résultat de leurs décharges sur le breuvage chaud, s’éloigna dans un vrombissement confus alors qu’un gâteau plongeait joyeusement dans celui-ci. Jurant, le coursier – la coursière – tenta de rattraper une partie des cookies au vol mais ses gestes ralentis par l’injection récente les dispersèrent encore davantage. Finalement, se résignant à repêcher celui qui était allé faire trempette avant qu’il ne se délitât tout à fait, iel plongea les doigts dans la théière. La chaleur brûlante du liquide lui rappela rapidement que son idée manquait de développement, et iel retira prestement sa dextre dans un glapissement de surprise. Le mouvement brutal s’imprima tout le long du plateau de la table et, le bol de sucreries qui fleurtait avec le rebord passa finalement par-dessus celui-ci, se fracassant gaiment contre le pied nu de l’espion-ne.

    - ParlesboursespendantesduRoi ! sursauta-t-iel avant d’enchainer sur quelques jurons plus colorés.
    - Tu vois, sœur, c’est marqué dans Garde Actuelle qu’un bon garde quitte jamais ses bottes de sécurité, commenta Abdallah de sa voix trainante alors que l’air s’emplissait du rire d’Apolline.

    Tenant son pied blessé entre les mains, sautillant misérablement entre les débris d’argile, de biscuits et de sucreries, Calixte vira un regard mauvais vers le sac-à-dos avant de le ramener hâtivement sur la porte de la chambre laissant apparaitre la silhouette de Solveig.

    - J’ai ta trousse du Parfait Maladroit, sœur, indiqua Abdallah.
    - A la base, y avait moins d’aliments par terre, et plus dans les assiettes, grimaça lo coursier-e à l’adresse de son amie. Rentre… comme tu peux. Je vais chercher un balai, et ma trousse. Il y a du thé, si tu veux. Blanc, notes de fruits rouges et, hum, cookies.
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