- Donc tu me quittes pour un beau-gosse, c’est ça ?
- Swan, je t’ai déjà dit que c’était un ordre de mutation. Rien à voir avec le faciès de cet homme.    
- Non mais avoue-le, tu ne pouvais plus voir ma tronche et maintenant qu’un nouveau capitaine est nommé, tu cours retrouver ta Forteresse chérie.
- Tu sais bien qu’au fil du temps, je t’appréciais, arrête de dire autant de bêtises. Tu es surtout heureuse de te débarrasser de moi !    
- Pas faux. Je crois qu’il me reste encore deux ans ici et je file me planquer à la Commission !
- C’est si horrible que ça d’être à la Régulière ou même un régiment tout court ?    
- Mon talent n’est pas de tenir une arme dans la main. Je pourrai tellement servir à autre chose.
- C’est vrai que tu as rattrapé tout le retard de nos documents et autres parchemins qui traînent. Tu sais qui me remplace ?    
- Un vieux snock qui vient prendre du bon temps…. Blessure sur le terrain près de l’arbre sacré, il est affecté ici maintenant. Je l’ai déjà aperçu de loin… il sent bien mauvais mais lui il sait rigoler.
- Tu ne perds donc rien au change finalement...  
- Et ta mère ? Elle l’a pris comment ?
- Tu la connais. Elle a pleuré pendant une heure puis elle a dit que c’est une très bonne chose que je retourne là-bas. Elle m’a dit que mon foyer était à Forteresse. Elle n’a pas tort mais je n’ai pas envie de la laisser seule ici, à la Capitale.    
- Dis que je fais mal mon travail pendant qu’on y est ! Les Myrmidons protègent cette ville depuis des années, rien n’arrivera à ta mère. Son quartier sera bien surveillé !
-  Tu ferais ça ?  
- Si c’est pour voir ta tronche de merlan frit à chaque alerte, oui ! Puis nos hommes la connaissent bien, ne t’inquiètes pas. Part l’esprit tranquille et elle a sa vie ici… puis tu feras peut-être enfin la tienne.
- Tout sera différent sans Elina...    
- Mais Monsieur Beau-Gosse sera peut-être ta nouvelle Elina ! Ses longs cheveux… sa barbe…
- Arrêtes de baver puis ça sera mon supérieur, on ne fait rien avec les supérieurs.    
- Tu es vraiment pas drôle ! Tu as trente six ans et tu n'as jamais eu de rendez-vous galant depuis qu’on est collègues.
- Je...  
- Ne dis pas non car je t’espionne. Je sais tout ! S' il ne ferait pas aussi froid là-haut, je ramènerai mes fesses avec toi.
- Pour apprendre à bien connaître le Capitaine.    
- Entre autre !
-  Tu es incorrigible toi !  
- Arrête ce Brive  Brive est trop sexy. On l’appelle Harald le Kirin, je pense que c’est pour divers arguments.
- Je ne veux pas savoir, ne dit plus rien s’il te plait !    

Mais je la vois continuer à dire toutes ses bêtises pendant que je levais les yeux au ciel. Elle était comme ça Swan, elle va me manquer après toutes ses quelques années ensemble. Oui, j’avoue qu’elle va me manquer mais je ne connaissais pas cet autre Lieutenant et encore moins ce Capitaine. Je ne préférais pas écouter les on-dits et me faire mon propre avis.

- Allez ramène tes fesses, on a une surprise pour toi dans la cour.

J’étais fébrile sur la fameuse surprise mais j’attrape mon dernier sac et le jette sur mon épaule. J’avais enfilé mon armure légère, une cape par-dessus le tout. Je ne le montrais pas mais j’étais triste de partir alors que je commençais à m’habituer à cette vie. Une vie avec beaucoup moins de danger, moins sujet aux aléas climatiques, être proche de ma famille. Je venais de reprendre contact avec ma cousine Ivara, elle avait une boutique en ville. Je n’ai même pas pris le temps de lui dire au revoir… j’enverrai un message à la sculptrice pour l’informer de ce changement d’affectation. On quitte le quartier des officiers, prends le couloir et fait quelques pas. C’était calme, beaucoup trop calme et quand on débouche sur les murailles, je compris alors. Beaucoup de mes hommes, enfin mes anciens soldats, se sont réunis pour un dernier adieu. Lucy et Loki avaient joué le jeu aussi. Ils étaient devant avec plein de Gardes qui se mettent au garde à vous. Swan me donne une tape dans le dos qui a failli me faire cracher les poumons.

- Merci Swan...    

Je ne dis rien d'autre, l’émotion était là. Je descends les marches et certains de mes officiers s’approchent de moi pour me serrer dans les bras. De nombreux soldats me souhaitent bonne chance pour survivre au froid dans le Grand Nord mais ce n’était pas un souci pour moi, j’étais heureuse d’y aller, de retrouver mon chez moi. Les embrassades durent un certain temps mais Lucy revient avec une charrette accrochée à son harnais. Il y avait toutes mes affaires et j’avais laissé pour l’instant mes gloobys chez ma mère, je les prendrais une autre fois. Je fis un dernier signe de la main pour rejoindre le téléporteur. Le cœur était lourd et je finis par voir ma mère qui était sur le chemin. Elle était là devant moi, les yeux légèrement brillants.

- Ma puce…

Elle m’attrape dans ses bras, encore une fois, j’avais les larmes qui menaçaient de tomber mais je résiste. Il ne faut pas que je craque, surtout pas sinon je vais avoir une sale tête pour mon premier jour.

- Ne t’en fais pas pour moi, tout ira bien !
- Je le sais et si tu as besoin, va voir Swan, d’accord ?    
- Elle est déjà passée me voir hier à la maison. Elle a dit de ne pas m’inquiéter, elle assura ton rôle ici à ta place.
- Je vais la tuer !    
- Non, elle a fait ça pour que tu partes l’esprit tranquille et sache que je suis très bien ici. Alors fait ta vie là-bas. Je sais que tu es triste depuis que tu as quitté ta Citadelle. Lucy te donne une seconde chance.
- Tu crois que Lucy a fait ça pour moi ?    
- On ne le saura jamais mais va ma fille.
- Je t’aime Maman.    
- Moi aussi ma fille. Tu feras attention ?
 - Promis, j'intègre les Grognours, je n’affronte pas les monstres de la frontière.    
- Je préfère cela que te savoir tout là-haut.
- Je ferai attention, promis...  

Un dernier câlin et me voilà de nouveau partie. Ce dernier quart d’heure fut long mais je finis par rentrer dans le bâtiment. C’était parti pour une nouvelle vie, un nouveau chapitre et j’espère qu’il se passera bien…