On pouvait y trouver tout et rien, et rencontrer tous et personne.
C’était une ambiance un peu différente de celle qui régnait à Grand Port, qui avait pourtant sa propre effervescence : celle de la Capitale faisait parfois tourner la tête d’Ayah Stormsong.
Promue garde depuis maintenant plus de cinq ans, au terme de sa formation à l’internat, on l’avait affectée ici. On jugeait manifestement qu’il y avait besoin de quelques renforts pour s’assurer que la situation reste stable en ville.
Il faut dire qu’avec autant d’individus différents, pas forcément animés des meilleures intentions, il pourrait bien y avoir un peu de grabuge. Mais dans l'ensemble c'était plutôt calme, peu d'émeutes, juste des larcins.
Ayah observait l’étal d’un marchand de porte-bonheurs quand une voix haut perchée la tira de sa rêverie :
« Mademoiselle ? Pardonnez mon… Scepticisme… Mais sommes-nous vraiment dans le quartier commerçant dont nous avons entendu parler ? Cet endroit est un peu… Répugnant. »
Discrètement, elle poussa un long soupir, cette voix irritante et quelque peu hautaine appartenait à la femme du couple de nobles qu’on l’avait chargée d’escorter pendant leur visite de la capitale. Cela faisait déjà plusieurs heure qu'elle passait en leur *agréable* compagnie et ils devenaient vraiment pesant.
Elle se tourna vers son interlocutrice et inclina légèrement le buste comme il était coutume de faire avec la noblesse du pays. Elle ne devait pas entacher l'image de la garde.
« Oui, ma Dame, nous sommes bien dans le quartier commerçant, et plus précisément en son centre historique, la place commerçante. »
Ces gens étaient en visite, ils venaient du Nord et se présentaient comme désireux de s’imprégner de la « culture » du Sud.
Ils n’étaient manifestement pas habitués à côtoyer le peuple, mais c’étaient eux qui avaient lourdement insisté pour se rendre ici, malgré les réticences et mises en garde de la jeune femme.
« Vous pouvez trouver ici des produits typiques de la ville. Comme vous le souhaitiez. Mais je réitère qu’il vaudrait mieux ne pas rester ici trop longtemps, mes seigneurs. »
Elle balaya les environs d’un regard méfiant, elle respectait profondément l’autorité et les lois qui plaçaient la noblesse sur un piédestal, mais ne pouvait s’empêcher de trouver qu’ils prenaient des risques inutiles.
Ces petits aristocrates se rendaient dans des endroits connus pour les vols avec tout leur apparat. Il fallait être inconscient… Ou idiot… Ou les deux...
Ayah se sentit nerveuse et leur tourna brièvement le dos, ces gens ne lui facilitaient pas la tâche. Elle devait les escorter et dissuader les voleurs des rues de s’en prendre à eux, mais il était difficile de les protéger d’eux-mêmes.
« Et pourquoi ne devrions-nous pas profiter paisiblement de cet endroit, aussi décevant soit-il. » Intervint l’homme du couple de nobles, d'un même ton condescendant que sa compagne.
« Parce que… Il y a régulièrement des agressions… » Répondit-elle après une petite hésitation, respectueusement et calmement tout en continuant d’observer les alentours.
« Foutaises. Votre boulot c’est bien d’éviter que de telles choses se produisent. A quoi serveriez-vous sinon ? »
Quel enfer. La jeune garde leva les yeux au ciel, sans toutefois leur laisser l’occasion de le voir, un peu agacée par l’attitude de ces gens. Mais elle ne s’énerva pas elle garda une attitude très calme :
« Oui, bien sûr. Vous avez raison. Veuillez m'excuser. »
Quelque part, il avait raison, elle était présente pour qu'il puissent profiter de la ville sans craindre de se faire chaparder un quelconque objet précieux.
Le couple parut soudainement s’intéresser à un étal de bijoux un peu plus en retrait et se dirigèrent dans cette direction.
Ayah leur emboîta le pas avec méfiance, elle avait un mauvais pressentiment et sentait que ces gens étaient observés.
La conversation allait de bon train même s'il n'y avait pas forcément de contenu. C'était juste pour passer le temps et pour te faire un peu discret car, avec ton pouvoir plus ta tenue et ton physique qui faisait un peu pirate et bien... Il fallait dire que tu avais tendance à t'attirer la méfiance de la Garde :
« … J'ai entendu dire qu'un couple de nobles visitait le quartier. Ça doit leur changer des hauts quartiers »
« Ouais tu l'as dis ! J'espère qu'ils ont de quoi se payer une escorte »
« T'inquiètes pas pour ça, vu les cristaux qu'ils ont c'est plus que sûr ! »
Plus loin, un groupe « discutait » également même s'ils riaient plutôt aux éclats, se moquant de ce couple de nobles qui voulait visiter la place commerçante alors que... Celle ci avait tout de même une mauvaise réputation mais bon... Après tout, cela ne te concernait pas donc tu te contentas de hausser les épaules en buvant une gorgée de ta bière car qu'est ce que tu en avais a faire de savoir que des nobles étaient en « visite » sur la place ?...
Finissant ta chope, tu la reposa ensuite sur le comptoir en réfléchissant avant de saluer le barman pour sortir dehors et te dégourdir les jambes en faisant un petit tour de la place justement, décidant simplement de profiter du beau temps qui annonçait une journée calme et tranquille mais... Il y avait toujours un mais...
La place grouillait de monde, des gens s'étaient rassemblés autour d'un homme faisant son numéro avec une colombe volant au dessus de sa tête. En gros, une journée normale dans la place commerçante, rien qui faille s'inquiéter en vérité. Cependant, le « calme » ne dura pas bien longtemps.
Alors que tu t'approchais d'un étal d'artisan, tu ne fis pas attention aux enfants qui s'amusaient à se courir après si bien que tu sentis une petite masse te heurter :
« Ah ! Désolé, M'sieur, j'vous avais pas vu ! »
« T'inquiètes pas va, il n'y a pas de mal. Fais quand même attention la prochaine fois pour pas de nouveau rentrer dans les gens comme ça »
Le garçonnet fit la moue tandis qu'une fillette le rejoignait. T'étant baissé pour être à la hauteur de l'enfant, tu te redressas en grimaçant légèrement car tu venais de ressentir la douleur caractéristique dans ta mâchoire et... Fatalement, ce qui devait arriver arriva :
« AAAH ! »
La fillette se mit à crier, apeurée par l'apparition de tes crocs pointues qui, évidemment, étaient apparues comme ça sans que tu n'ai ton mot à dire. De plus, son cri fut si puissant qu'il fit se redresser le couple de nobles non loin de là. Te redressant rapidement, avec une attitude de bête traquée, tu mis aussitôt tes mains devant ta bouche tandis que la fillette pleurait dans les bras de son camarade et que tu entendais des bruits derrière toi :
« Qu'est ce qu'il se passe ? Pourquoi ce cri ? Un voleur ?! Que fais la Garde ? »
Tu sentais bien que la situation s'agitait autour de toi et, bien que cela te donne l'air encore plus suspect, tu suivis ton instinct qui t'ordonnas de courir. Aussitôt donc, tu traversa les étals, passant devant le couple de nobles qui devait se demander ce qu'il se passait mais également devant la jeune femme aux cheveux bleus :
« Regardez le qui s'enfuit ! »
Effectivement, tu étais entrain de t'enfuir mais pas parce que tu avais fais quelque chose de mal parce que techniquement, tu n'avais rien fait de répréhensible. Il s'agissait juste... De ton pouvoir qui se déclenchait comme bon lui souhaitait, tes crocs ayant une « légère » tendance à effrayer les gens...
Et puis, évidemment, fatalement, comme un problème en cachait souvent un autre, pendant ta course, tes ailes décidèrent également d'apparaître, te faisant décoller au sol et c'est ainsi que tu vis l'agitation autour de toi, les hommes te montrant du doigt, les femmes ayant une main devant leurs bouches dans une attitude choquée :
« On se calme, tout va bien ! Tout est normal ! » Essayas tu de rassurer tandis que la Dame s'était rapprochée de son mari qui, lui, semblait aboyer quelque chose à la jeune femme aux cheveux bleus, sûrement son escorte, qui les accompagnaient : « Tout va s'arranger ! Je vous assure que je suis pas dangereux ! » Pendant ce temps, tu faisais toujours du surplace dans les airs, tes ailes battant dans ton dos juste pour maintenir ton équilibre : « C'est vraiment pas la peine de paniq.... Waah ! »
Ce qui devait arriver, encore une fois, arriva. Tes ailes disparurent, d'un coup, comme par magie, te faisant tomber près d'une zone où, heureusement pour toi, se trouvait une botte de foin. Bien que modéremment douloureuse, ta chute provoqua cependant un ramdam impossible : entre les chiens qui aboyaient, les chats qui feulaient, les enfants qui criaient...
Tu te redressas cependant, affichant une grimace légèrement douloureuse, essayant de te sortir de ton « nid de pailles » alors que tu voyais la jeune femme s'approcher de toi. Aie...Dans quel pétrin t'étais tu donc encore fourré Yanxlin...
Madame s’égosillait tandis que Monsieur faisait savoir à qui voulait l’entendre que le prix n’était pas un problème pour acheter un article quelconque.
Plutôt arrogant, il fallait bien le reconnaître. Ayah n’avait rien contre la noblesse et savait que certains étaient bien plus humbles et malins, mais ceux-là étaient particulièrement détestables.
Un cri apeuré se fit soudainement entendre non loin d’ici, à une vingtaine de mètres là où Ayah escortait les deux aristocrates, c’était une voix de petite fille, elle sursauta.
« Qu’est-ce que… » Commença-t-elle en portant la main à la garde de son épée de service.
« Qu'est-ce qu'il se passe ? Pourquoi ce cri ? Un voleur ?! Que fais la Garde ? »
Les gens commencèrent à s’agiter autour d’eux, elle fut déchirée entre son devoir de rester auprès du couple de noble et celui d’aller voir qui venait de pousser ce cri, elle reconnaissait que ce n’était pas une voix d’adulte.
Mais tout se passa en un éclair, un homme fendit la foule et déboula à quelques mètres d’elle. Il avait l’air jeune et arborait de longs cheveux bleus comme le saphir. Au vu de la tenue qu’il portait il paraissait un peu roublard.
Il était propre sur lui mais avait l’apparence d’un fauteur de troubles, peut-être était-ce une idée reçue due au cache œil qu’il portait ?
« Regardez-le qui s'enfuit ! » Cria quelqu’un dans la foule.
La surprise fut telle qu’il put se mettre hors de sa portée avant qu’elle ne réussisse à l’intercepter.
Du bref instant qu’elle le vit de près elle remarqua qu’il se tenait la bouche et fut perplexe, était-il blessé ? Pourquoi courrait-il ainsi ? Il était forcément suspect.
Il était encore à moins de dix mètres quand de grandes ailes de chauves-souris sortirent du dos du jeune homme, Ayah se plaça devant les nobles et étendit un bras protecteur devant eux au cas où il s’agissait d’une attaque.
« On se calme, tout va bien ! Tout est normal ! » Dit l’étrange jeune homme aux cheveux bleu tandis qu’il voletait à toute vitesse pour s’éloigner.
Ayah l’observa, avec méfiance tandis qu’il se stabilisait et faisait maintenant du sur-place, largement au-dessus du sol. Tous les regards étaient tournés vers lui et il criait pour se faire entendre, sa voix était forte et claire.
L’homme du couple de noble faisait mine de se montrer protecteur envers sa Dame, mais Ayah était sûre que ce n’était qu’une façade et que cet homme ne pourrait rien faire s’il y avait vraiment un danger.
« Qu’est-ce que vous attendez ?! Arrêtez ce terroriste ! » Beugla l’homme du couple de noble à son adresse. Sa voix tremblait un peu, il n’était pas très sûr de lui.
La jeune garde ne répondit rien et continua d’observer le jeune homme aux cheveux azur, elle l’aurait bien appréhendé pour le mettre hors d’état de nuire, mais il était comme qui dirait… Hors de sa portée. Elle était totalement impuissante face à cette situation.
« Tout va s'arranger ! Je vous assure que je suis pas dangereux ! C'est vraiment pas la peine de paniq.... Waah ! »
Ses ailes disparurent aussi soudainement qu’elles étaient apparues, et l’étrange jeune homme se mit à chuter. Il disparut hors de sa vue, tombant derrière un bâtiment voisin qu’il survolait, dans une rue adjacente à la place commerçante.
Très surprise par ce qui venait de se produire Ayah regarda nerveusement autour d’elle mais ne vit aucun autre garde dans les alentours direct.
Elle se tourna donc vers le couple de noble :
« Entrez dans la boutique et attendez-moi à l’intérieur. Je dois m’assurer que cet individu ne menace pas la sécurité publique. » Dit-elle, très sûre d’elle en désignant une échoppe qu’elle savait être sûre pour ces gens.
Sans leur laisser le temps de répondre elle s’élança dans la direction où elle avait vu l’étrange ange choir. Il avait provoqué un sacré remue-ménage et les animaux donnaient de la voix au vacarme ambiant.
« Circulez ! Il n’y a rien à voir ! » Dit-elle à l’adresse des badauds qui s’approchaient avec curiosité du site de la chute du suspect.
Elle n’était pas exactement convaincante quand elle essayait de donner des ordres, mais son insigne de garde lui suffisait généralement à se faire respecter par les plus dociles. Quelques personnes s’éloignèrent, bien que certaines continuaient d’observer la scène suffisamment loin pour ne pas se confronter directement à la jeune garde.
Elle vit l’étrange garçon et s’approcha de lui à pas comptés, tout en l’observant avec attention, ne sachant pas vraiment s’il constituait une réelle menace. Au vu de ce qu’elle avait entendu de lui il ne paraissait pas mal intentionné…
Mais alors pourquoi se comportait-il de cette manière ?
Par chance, il avait atterri sur une botte de foin qui traînait là. Vue la distance à laquelle il avait décollé il y avait moyen de se faire mal et elle aurait peut-être eut à recourir à son pouvoir pour l’aider. Mais ce n’était heureusement pas le cas.
Il ne regardait d’abord pas dans sa direction, jusqu’au moment où il se redressa et fit mine de se relever, mais il était quelque peu gêné par le nid de paille qui était aussi son salut.
Il grimaçait de douleur et par reflexe Ayah eut soudainement de la compassion pour lui, bien qu’elle sût qu’elle devrait plutôt se tenir sur ses gardes :
« Attendez. Ne bougez pas. N’aggravez pas vos blessures je jure que je ne vous veux pas de mal. »
Elle s’avança lentement dans sa direction pour qu’il ne se sente pas menacé et n’ait pas envie de s’enfuir.
Elle ne dégaina pas son épée et montrait ses mains en signe de paix, il ne lui semblait de toutes façons pas en état d’être une menace imminente pour elle et pris donc le parti de régler le problème en douceur.
« Je suis Ayah Stormsong, de la garde régulière… Je suis chargée d’assurer la tranquillité en ville. Je suis désolée mais il va falloir que vous me rendiez des comptes. Qu’avez-vous fait ? Etes-vous blessé ? »
Elle s’immobilisa et le regarda en essayant de se montrer très calme pour éviter de compliquer la situation. Elle ne savait pas si l’expression sur le visage de son interlocuteur était de la surprise, de la peur ou une sorte de méfiance.
Quel étrange jeune homme, elle ne savait pas trop quoi en penser.
Pourtant, tu ne pouvais rien faire et, même si c'était très frustrant, c'était ainsi et tu ne pouvais rien y changer. Pourtant, lorsque la jeune femme t'annonça faire partie de la Garde régulière, tu ne pouvais t'empêcher d'être méfiant, d'agir comme un animal traqué, te remémorant les six mois passés dans la rue lorsque tu avais l'âge de 15 ans à devoir te débrouiller...
Ton passé n'était pas blanc et il était vrai que tu avais volé mais c'était uniquement pour te nourrir sauf que tu te rappelais également de tes « parties de cache cache » avec la Garde qui ne s'étaient pas forcément passées pour le mieux pour toi même s'il y en avaient certains qui avaient été indulgents.
D'ailleurs, en parlant d'indulgence, cette Ayah Stormsong, car tel était son nom, ne te voulais pas de mal même si elle te disais que tu allais devoir lui rendre des comptes. Malgré ta méfiance et l'envie que tu avais de t'enfuir, tu regardas la jeune femme dans les yeux conscient que, même si tes ailes avaient disparues, ce n'était pas le cas de tes crocs qui étaient toujours présentes :
« Merci mais... Tout va bien. Ça va vous paraître bizarre mais j'ai l'habitude de ce genre de situations... » Tu poussas un soupir en maudissant intérieurement tes crocs avant de reprendre : « Hem... J'avoue que je suis responsable du cri de cette fillette mais je ne lui ai rien fait ! Si vous cherchez un coupable ce sont elles » Tu montras tes propres crocs à la jeune femme : « C'est mon pouvoir que j'arrive pas à maîtriser donc il se déclenche comme il veut, comme le petit numéro aérien de tout à l'heure... » Pendant que tu parlais, tu eus un petit gémissement de douleur en comprenant que tes crocs étaient sur le point de disparaître : « … J'imagine aussi que le fait de m'être enfui comme ça n'aide pas à m'innocenter mais là encore c'était un réflexe ! Même si ça sonne comme une excuse... Enfin... » Tu poussas un soupir résigné, te rendant compte que tu te débattais inutilement pour rien en t'embarquant dans des explications qui te rendaient sûrement encore plus suspect au regard d'Ayah : « Moi c'est... Yanxlin... Yanxlin Riwel et je suis un aventurier... Madame... »
Pendant tout le long de ton « discours , tu avais fais un effort pour continuer à regarder la jeune femme dans les yeux, aussi bien par politesse que pour lui assurer que tu n'étais coupable de rien mais, plus le temps passait, plus tu commençais à t'en sentir incapable.
Effectivement, tu avais remarqué ses cheveux bleus et tu commençais à faire un parallèle même si, évidemment, tu savais que tout cela était impossible. Après tout, la couleur de cheveux de la demoiselle était peut être naturelle alors que, pour toi... Il s'agissait d'un accident lorsque tu avais joué avec un Peigne Magique étant enfant mais... C'était comme si une partie de toi voulait espérer, malgré tout...
De plus, elle semblait être plus jeune que toi mais elle était Garde donc tu avais intérêt à tenir ta langue si tu ne voulais pas être considéré comme plus suspect que tu en avais l'air. Tu déglutis donc un instant, avant de finalement sortir de ton « nid de paille » et t'épousseter pour retirer ce qui restait coincé dans tes vêtements et tes cheveux. Une fois sur pied, tu réfléchis mais la solution la plus logique s'imposa à toi : ne pas t'enfuir car la jeune femme ne semblait apparemment pas avoir l'intention de t'arrêter pour le moment du moins.
Tu lui assuras donc :
« Désolé de vous avoir dérangée dans votre travail avec tout ce raffût... J'avais vraiment pas l'intention de provoquer ce bazar il faut me croire. J'avoue que j'ai tendance à aimer faire mon intéressant mais je sais me mesurer et puis... »
Tu poussas un long soupir avec l'intention de jouer « le tout pour le tout », même si tu savais que cela consistait en un pari risqué pour toi. Soit la jeune femme le prendrait avec humour et ça passait ou soit elle le prendrait au premier degré et tu étais bon pour passer par la case prison, sans passer par la case départ et sans rafler 200 cristaux au passage.
Ainsi, tu décidas de jouer ton couillon en offrant, à Ayah, le grand sourire que tout enfant fait devant ses parents quand il sait qu'il a fait une bêtise mais qu'il veut être pardonner. Avec un peu de chance, ça pourrait passer :
« …. Vous ne croyez tout de même pas que j'avais réellement l'intention de faire quelque chose de mal, si ? Je me répète peut être mais c'est involontaire... »
Pas sûr que le « charme à la Yanxlin » allait opérer mais... à force de « clamer » ton innocence, peut être que la jeune Garde allait te croire. C'était ce que tu espérais tout du moins...
Il lui expliqua qu’il n’avait pas son pouvoir sous contrôle, il lui avait montré sa dentition en expliquant que ce point était à l’origine de l’effroi de la fillette, qui avait alors cédé à la panique.
* Juste ça ? * S’était-elle demandé intérieurement en examinant les crocs de l’inconnu sans montrer la moindre gêne ni la moindre peur, juste de la surprise et de l’intérêt.
Elle comprit que même si cette apparence ne la mettait pas plus mal à l’aise que cela, les enfants étaient plus fragiles et pouvaient très bien avoir une frayeur en les voyant. Elle se remémora ses mots alors qu’il essayait de s’échapper.
Et que dire de ces ailes ? D’après ses dires, cela n’était pas la première fois qu’il tombait de la sorte, c’était dangereux pour lui en plus d’avoir le potentiel d’effrayer les personnes mal préparées.
Elle soupira de soulagement, personne n’avait été blessé ni même agressé, et tout cela n’était qu’un malentendu.
Elle crut immédiatement à sa version des faits, il n’avait pas l’apparence ni le style vestimentaire d’une personne honnête mais il y avait dans son regard quelque chose qu’elle perçu comme une profonde franchise.
Et puis, elle réalisa que sa réaction de fuite était plutôt teintée de tristesse à y repenser. Le fait qu’il ne contrôle pas son pouvoir était une chose, mais le fait de se sentir obligé de fuir les autres en était une autre. Son apparence provoquait-elle tant de peur chez les gens pour qu’il ait cet impérieux besoin de s’isoler ?
Il parlait d’un « reflexe » de fuite, comme si la première chose à laquelle il pensait quand son pouvoir se manifestait était de se cacher à tout prix.
C’était une situation qui lui parut plutôt horrible, si la manifestation de son pouvoir ne mettait personne en danger, ne pouvait-il pas s’accepter lui-même en faisant fis du regard des autres ? Mais c’était plus facile à dire qu’à faire… Comment faire quand les gens hurlent d’effroi en vous voyant ?
Il se présenta, il s’appelait Yanxlin Riwel et était aventurier, c’était un joli nom. Et les aventuriers étaient des personnes généralement très intéressantes, ils avaient toujours des histoires à raconter, ils parcouraient le monde et en voyaient les merveilles.
Plus elle l’écoutait, et moins elle voyait en lui le suspect qu’elle pensait appréhender pour dangerosité, même si de base ce n’était absolument pas son intention première. En réalité elle s’attendait à tout, et avait envisagé l’idée qu’il réagisse avec violence ou tente de s’échapper à nouveau.
Et puis il avait eu ce grand sourire candide complètement sorti de nulle part, un peu malicieux, comme celui d’un enfant qui venait de faire une bêtise et elle abandonna définitivement l’idée de l’arrêter.
Toujours était-il que cet air enfantin si soudain était pour elle un revirement tout à fait inattendu, sans qu’elle ne sache trop pourquoi elle laissa échapper un éclat de rire après lui avoir lancé un regard surpris.
Réalisant cela, elle se repris tout de suite, sa mission d’escorte de ces deux nobles était si fatigante mentalement qu’elle se laissait un peu aller.
« Oh, pardon votre situation ne porte peut-être pas à rire. J’ai juste été un peu surprise. » Lui assura-t-elle avec sincérité en inclinant légèrement la tête en signe d'excuse, voulant à tout prix éviter qu’il pense qu’elle se moque de lui.
Elle avait déjà pris le parti de lui faire confiance et se détendit, mais ne souhaitait pas qu’il prenne congés tout de suite. Ce n’était pas d’une garde à vue dont il avait besoin, mais d’aide. Elle ne sut pas vraiment ce qui l’amenait à penser cela mais elle ressentait une sorte de tristesse dans ce garçon un peu bizarre.
« Quelque part je suis contente d’avoir été « dérangée », comme vous dites, dans le cadre de cette mission. Disons que ça me fait une pause. » Dit-elle avec un sourire franc dans l’espoir de détendre un peu l’atmosphère et de lui permettre de se détendre un peu lui aussi.
Elle marqua une courte pause et le regarda droit dans les yeux, avec un air redevenu très sérieux. Sans qu’elle s’en rende compte elle cessa de le vouvoyer, sûrement dans un élan d’empathie qui lui fit oublier les distances d’usage :
« Yanxlin. Tu ne devrais pas avoir honte de ce que tu es. Les gens naissent avec des pouvoir variés, et cela fait partie de nous. Tu ne maîtrises peut-être pas ton pouvoir, mais au moins n’essaie pas de fuir à tout prix le regard des autres. »
Son regard se porta ensuite vers le bloc de paille qui avait amortit la chute de Yanxlin par chance, un petit voile d’inquiétude passa dans ses paroles :
« Tu te mets en danger inutilement quand tu panique et que tes ailes t’emportent. Je sais que tu as l’habitude, mais je crains que ça finisse mal pour toi un jour. Il vaut peut-être mieux que les gens aient une petite frayeur que tu te tues en essayer de la leur éviter.»
Elle haussa les épaules et reporta son attention sur lui :
« Il faut trouver une solution pour t’aider à mieux contrôler tes ailes. Mais moi je n’ai jamais eu de problème avec mon propre pouvoir… J’aimerais vraiment pouvoir t’aider. »
Elle se tint le menton et réfléchit en le regardant, essayant de se souvenir si elle avait déjà eu des camarades dans le même cas que lui… Peut-être en savait-il plus sur les conditions d’activation de ce pouvoir ? En tout cas elle ne pouvait pas se résoudre à le laisser comme ça.
Cependant, tu n'allais évidemment pas te plaindre d'être toujours libre et, quelque part, tu te persuadas que le « charme à la Yanxlin » avait fonctionné même si tu savais pertinemment que c'était faux. Pourtant, tu te posais toujours la question de, pourquoi une telle indulgence avec toi ?...
Enfin, tu lui avais expliqué que ce n'était pas volontaire, que tu n'avais aucune maîtrise de ton pouvoir et que cela avait tendance à « légèrement » effrayer les gens mais que tu avais l'habitude d'une telle attitude ainsi que ces atterrissages forcés heureusement, toujours sans gravité.
Par la suite, tu avais tenté le tout pour le tout en offrant à la jeune femme un sourire d'enfant qui souhaitait se faire pardonner de ses fautes et... Alors que tu t'attendais plutôt à une remontrance sérieuse, tu fus surpris d'entendre Ayah éclater de rire un bref instant avant de s'excuser en s'inclinant et t'assurant qu'elle avait juste était surprise mais... Tu n'étais pas offusqué bien au contraire :
« Je l'ai pas mal pris rassurez vous. En fait je suis plutôt le genre de gars qui aime quand on rit de la situation. Ça m'apaise en quelques sortes... Et puis moi aussi je suis plutôt surpris... Je pensais passer tout de suite par la case prison à vrai dire... » Tu te grattas l'arrière de la nuque, dans une attitude embarrassée avant d'offrir à Ayah un sourire gêné : « Je suppose que je dois m'estimer chanceux d'être tombé sur une Garde aussi indulgente que vous. Merci c'est gentil parce que bon... J'avoue que je dois pas passer pour un gars super honnête avec la tenue que je porte... Le pire c'est quand on me prend pour un pirate et là... Je dois vous avouer que, pour prouver que j'ai rien fais, c'est plutôt ardu comme truc » Tu te mis à rire, à moitié gêné à moitié amusé de cette « anecdote » que tu racontais à Ayah : « Comme quoi les gens commencent toujours à juger par l'apparence mais je vous assure que j'ai rien d'un pirate ! J'ai une explication pour le cache œil en plus ! C'est un héritage de la part de l'aventurier qui m'a tout appris en disant que ça aidait vachement pour plaire aux filles mais... » Tu te stoppas soudainement, comme un enfant prit en faute puis baissa la tête en murmurant, peu assuré cette fois ci : « Ah... Oubliez ça, c'était juste une blague entre nous et puis... En vérité, j'ai jamais eu trop de chance avec les filles mais... On dérive là, ça doit pas vous intéresser... »
Pourquoi tu disais tout ça en fait ? Comme si tu avais besoin de te confesser à Ayah en quelques sortes alors que la jeune femme n'avait rien d'une Soeur du temple de Lucy et qu'elle était d'abord là pour vérifier que tu ne troublais pas l'ordre public avec tes bêtises mais là... Tu avais plutôt l'impression que tu coulais alors que, justement, tu voulais essayer de « sortir la tête hors de l'eau » pour prouver ton innocence.
Par la suite cependant, tu t'étais excusé d'avoir dérangé Ayah dans son travail parce que tu te doutais bien que la jeune femme n'était pas là pour le plaisir où alors peut être qu'elle aimait cotoyer des aristocrates mais, quelque part au fond de toi, tu étais comme persuadé du contraire. Cependant, la jeune Garde te répondis avec un grand sourire que cela ne la dérangeait finalement pas d'être « dérangée » comme tu disais. Ça lui faisait même une pose, ce qui te fis rapidement retrouver une attitude souriante après le « malaise » qui pouvait s'être installé entre vous :
« Je vous comprend totalement. Moi aussi j'ai un peu du mal à supporter l'exigeance souvent mal placée des nobles mais qu'est ce qu'on y peut ? Pour eux on est que des gens sans valeur tout juste bon à obéir à leurs ordres et à leurs caprices » Ayah pouvait d'ailleurs bien s'en rendre compte, au ton de ta voix et à ton attitude que tu n'étais pas étranger à tout ça même si, encore une fois, tu te « défilais » : « Désolé, je devrais pas m'emporter tout seul comme un idiot comme ça... Vous y êtes pour rien après tout »
C'était étrange pour toi de discuter aussi tranquillement avec un membre de la Garde alors que... Souvent de par ton attitude, mais aussi ton style vestimentaire, tu avais tendance à vouloir les éviter. Pourtant Ayah semblait être différente même si elle faisait partie de la Garde Régulière vu qu'elle s'était présentée ainsi.
Pourtant, tu ne fus pas au bout de tes surprises car tu finis par constater que la jeune femme avait laissé tombé la « distance » entre vous pour se mettre rapidement à te tutoyer. Aussitôt, tes yeux s'écarquillèrent en l'entendant te dire que tu ne devais pas avoir honte de ce que tu étais, que les gens naissaient avec des pouvoirs variés et qu'ils n'y pouvaient rien.
Tu ouvris la bouche, voulant dire quelque chose, mais ta voix resta bloquée un petit moment dans ta gorge avant de finalement se libérer :
« Euh... Bah... Hem... Merci du conseil c'est gentil à vous... » En fait tu ne savais pas trop comment réagir sur le fait qu'Ayah se soit mise à te tutoyer : « C'est pas vraiment que j'ai honte de moi c'est juste que... C'est pas courant de voir un type s'envoler dans les airs avec ce type d'ailes parce que, je sais pas si vous avez pu remarquer mais elles font plus chauve-souris que oiseau donc bon... Je peux comprendre que ce soit quelque chose qui fasse peur aux autres. Et puis pour les crocs, ça fait plus vampire qu'autre chose... » Répondis tu avant de laisser un silence s'installer légèrement entre vous avant de reprendre, sur le ton de la réflexion : « Hum... A bien y réfléchir ce serait assez logique que vous ayez décidé de me tutoyer. Après tout on doit avoir le même âge même si vous paraissez plus jeune que moi mais... Vous faites partie de la Garde donc il y a un risque que le fait que je vous tutoie également soit mal interprété, non ? »
En réalité, si tu avais eu un pouvoir d'hybridation canines, nul doute que ta queue animale ce serait joyeusement agité derrière toi tellement l'attitude d'Ayah envers toi te rendais heureux. Voir un membre de la Garde qui s'inquiétait pour toi alors qu'elle était censée t'arrêter à la base... C'était inhabituel mais agréable. De plus, c'était elle qui avait prit l'initiative de te tutoyer...
De plus, son inquiétude ne s'arrêta pas là, apparemment. Effectivement, tu l'entendis te dire que tu étais celui qui se mettait le plus en danger lorsque tes ailes apparaissaient et décidaient de t'envoler. C'était pas faux mais, encore une fois, comme tu lui avais dis : tu avais l'habitude de ce genre de choses :
« Encore une fois c'est gentil de vous inquiéter pour moi et mon pouvoir mais je crois que, malgré tout, j'ai la situation sous contrôle parce que je me suis rendu compte que je chutais souvent sur des trucs moelleux qui m'amortissais. Là il y avait la paille mais avant c'était l'herbe et une autre fois... Mes ailes ont disparues alors que je survolais un lac donc... à part un gros « plouf » je n'ai pas eu vraiment d'autres bobos à signaler. Je dois être chanceux malgré tout ! » Souris tu comme un gamin fier de s'être relevé à chaque chute qu'il faisait : « Et puis faut pas croire mais je suis aussi assez résistant comme garçon ! » Déclaras tu en te tapotant le torse avant de conclure : « Enfin... Vous êtes sûr qu'on ne va pas se poser des questions en ne vous voyant pas revenir ? Je vous accompagnerais comme ça je m'excuserais pour le raffût provoquer et, si la fillette et encore là, je m'excuserais également auprès d'elle pour la frayeur que je lui ai faites.. J'ai beau faire l'idiot, je suis pas fier de moi sur ce coup là... »
Effectivement car et tu n'allais pas le nier, tu avais quand même fichu un sacré bazar...
Il disait ça en paraissant très fier de lui, dans une attitude amusante qui était la sienne, elle n’insista pas et haussa les épaules en signe d’acquiescement.
Il était vrai qu’il était difficile de ne pas juger un livre à sa couverture, elle-même avait eut pas mal d’appréhension en voyant son look un peu pirate et s’était demandé sérieusement s’il n’allait pas poser des ennuis. Mais effectivement il n’en fit rien et se révéla être fort poli et éduqué, voire sympathique.
Il fallait bien le reconnaître, elle l’avait jugé elle aussi, tout comme les gens le jugeaient quand ils apercevaient ses ailes ou ses crocs. Intérieurement, elle eut un peu honte d’elle-même, mais n’en laissa rien transparaître.
Il n’avait pas l’air de beaucoup apprécier les nobles, peut-être en avait-il rencontré qui étaient aussi hautains et imbus d’eux même que ceux qu’elle avait été missionnée d’accompagner.
Elle n’avait pas particulièrement d’avis sur la question, elle suivait simplement les ordres de ses supérieurs, et si elle devait se mettre en même en danger pour la mener à bien, alors ainsi soit-il. Peu importait si la personne était vertueuse ou corrompue.
Ayah constata qu’elle avait peut-être mal estimé le mal-être de Yanxlin, peut-être n’y avait-il pas de tristesse aussi profonde qu’elle le pensait. Elle se sentit un peu présomptueuse de lui avoir fait la « morale » comme ça. Quelle idiote elle faisait.
Quand il évoqua le fait qu’il était un peu étrange qu’elle le tutoie elle réalisa qu’effectivement elle s’était mise à le tutoyer sans vraiment faire attention. Cette révélation la laissa un peu gênée, mais c’était un mal pour un bien, et cela avait permis de bien détendre l’atmosphère.
Toutefois, comme il le disait si bien, ce n’était pas forcément une attitude qu’elle devait adopter, surtout dans le cadre de ses fonctions dans la garde régulière. Et elle devait aussi revenir le plus vite possible pour reprendre son poste, mais d’abord il fallait résoudre ce malentendu auprès de tous.
Elle l’écouta tranquillement et attendit qu’il ait finit de parler pour reprendre la parole. Il lui avait offert de la suivre pour retourner sur les lieux de l’incident et apaiser la situation, elle ne demandait pas mieux. Ainsi tout rentrerait dans l’ordre sans plus de cérémonie.
« Vous avez raison » Dit-elle tranquillement « Cette rencontre survient en dehors de ma vie civile, et j’entacherais la réputation de la garde régulière si je me montrais trop familière. Effectivement le devoir m’appelle et je dois retourner au plus vite auprès des personnes que je dois escorter. »
Elle avait repris le vouvoiement, comme elle le devait, mais ne se montra pas froide pour autant.
« Mais chaque chose en son temps. Allons voir si la fillette va mieux. Je suis sûre qu’elle comprendra et ne vous en voudra pas. Vous n’êtes pas une mauvaise personne. » Dit-elle chaleureusement.
Elle lui fit signe de la suivre et se dirigea tranquillement vers la place commerçante qui débordait de vie, juste à la sortie de la petite ruelle adjacente dans laquelle Yanxlin avait gracieusement terminé son vol plané.
Elle remarqua que certains curieux qui les avaient observés la regardaient avec un air incrédule, comme s’ils ne comprenaient pas pourquoi elle n’avait pas arrêté le jeune aventurier de manière plus radicale. Elle crut en entendre quelques-uns murmurer mais elle les ignora complètement.
Hormis ces gens-là, la vie avait déjà repris son cours normal sur la place, les choses allaient et venaient si vite ici… Il ne lui fallut que quelques instants pour retrouver les deux enfants, ils n’avaient pas bougé.
La fillette ne pleurait plus mais avait encore quelques hoquets de sanglots, son camarade continuait de la réconforter, et cela fit chaud au cœur de la garde qu’elle était.
Elle s’approcha d’eux et posa un genou à terre pour se mettre à leur hauteur, elle posa une main sur l’épaule de chacun d’entre eux :
« Je m’appelle Ayah, je fais partie de la garde. Tout est fini tu n'as plus à avoir peur. »
La fillette leva les yeux vers elle et Ayah lui adressa un sourire bienveillant :
« Tu as dû avoir très peur, mais ce monsieur a peut-être eu aussi peur que toi tu sais. En réalité il est très gentil ! » Lui dit-elle gentiment.
Elle tourna son attention vers le petit garçon :
« Et toi tu peux être fier d’avoir réagis ainsi ! Tu es très courageux. » Lui dit-elle.
Tout d’abord il rougit, puis il parut soudain très fier de lui et bomba le torse avec un petit air satisfait.
Sans se redresser Ayah tourna la tête vers Yanxlin qui l’avait suivie et lui fit signe d’approcher un peu plus des enfants. Elle sentit d’un coup que la fillette se réfugiait dans ses bras et elle sursauta légèrement de surprise :
« Il ne t’arrivera bien, petite. » Lui dit-elle. « Tu peux me faire confiance. Tu verras le monsieur est très gentil et très poli ! »
Elle reporta son attention sur l’aventurier, l’invitant à appuyer ses propos pour rassurer la gamine une bonne fois pour toutes.
Cependant, c'était le cas pour Ayah. Elle écoutait tes explications, sincères certes, mais plus que bancales, sans rien dire te faisant d'ailleurs te demander si elle croyait en ta version des faits car, évidemment, tu n'avais pas le pouvoir de lire dans les pensées même si ce serait plus utile que ce pouvoir de vol que tu ne maîtrisais pas, mais la situation parlait d'elle même : tu n'avais encore aucun liens aux poignets ce qui voulait dire que la jeune femme n'avait réellement aucune intention de t'arrêter ? Surtout que tu venais de lui assurer que tu acceptais de l'accompagner pour t'excuser de tout le raffût provoqué...
De plus, tu avais remarqué que la jeune femme avait commencé à te tutoyer et même si, en soit, ce n'était pas une attitude très professionnelle venant d'un membre de la Garde, tu devais avouer que tu étais tout sauf offusqué car, selon toi, cela annonçait une certaine proximité même s'il fallait évidemment que tu lui fasse la remarque et qu'elle repasse aussitôt au vouvoiement en disant que cette « rencontre » intervenait en dehors de sa vie privée.
Elle disait ensuite qu'elle devait retourner à son devoir et auprès des personnes qu'elle devait escorter :
« J'ai pas dis que ça me dérangeais mais oui, je comprends... C'était sympa quand même... » Soupiras tu alors que, fatalement, Ayah se remettait « dans la peau d'un membre de la Garde » : « Je vous suis alors. Je sais que j'ai pas intérêt à m'enfuir si je veux pas paraître encore plus suspect que j'ai l'air »
Et, effectivement, tu suivis la jeune femme, en te mettant à quatre pas derrière elle, la tête légèrement baissée, soit en signe de soumission, soit en signe de repentance sincère tandis que vous traversiez la place jusqu'à arriver à destination. Tu aurais pensé que les enfants étaient partis depuis longtemps mais, apparemment, ils n'avaient pas bougés de là où ils se trouvaient.
Ayah se montra aussitôt rassurante envers eux en s'agenouillant pour se mettre à leur hauteur. Elle se présenta en disant qu'elle était membre de la Garde régulière elle qu'ils n'avaient plus à avoir peur car le « monsieur » avait sûrement eu plus peur qu'elle.
Au départ, la fillette ne semblait pas convaincue car elle se fourra rapidement dans les bras de la jeune femme avant de se reculer et de lever lentement le visage vers toi, tandis que tu t'agenouillais également :
« La dame a raison fillette. J'étais surpris mais j'aurais pas dû courir comme ça. Je suis désolé de t'avoir fais peur... »
Après quelques instants de réflexion, la fillette sembla décidé de quitter le concon protecteur des bras d'Ayah puis se recula légèrement pour retourner à coté du petit garçon. Ils se regardèrent quelques instants, avant d'afficher un léger sourire et, avant que tu ne puisse demander ce qu'il se passait, le regard des deux enfants se tourna vers Ayah et toi et ils vous demandèrent, presque d'une même voix :
« Dites, vous avez la même couleur de cheveux. Ça veut dire que vous êtes frère et sœur ? »
Ils se mirent ensuite à rire en se rendant compte qu'ils avaient posés la question en même temps tandis que tu écarquillas les yeux de surprise. Pardon ? Ayah et toi frère et sœur tout simplement « à cause » d'une couleur de cheveux semblable ? C'était tellement ridicule que tu aurais pu éclater de rire mais tu ne le fis pas, de peur de vexer les enfants.
Au lieu de ça, tu restas agenouillé à leur hauteur semblant réfléchir à une réponse même si elle était évidente. Puis, au bout de quelques minutes, tu finis par te redresser et commencer une réponse :
« Alors... Je veux pas vous décevoir mais... »
Mais tu ne pus terminer ta réponse puisque tu venais d'oublier quelque chose d'important : vous étiez toujours sur la place commerçante qui était un lieu plein de vie et, soudainement, tu entendis un aboiement furieux. Cependant, tu ne fus pas assez prompt à réagir et ce qui devait arriver arriva encore une fois.
Tout d'abord, ce fut un chat qui fila entre tes jambes et qui manqua de te faire tomber mais, heureusement, tu réussis à garder l'équilibre même si, honnêtement, tu te demandais bien comment tu y étais arrivé. Puis, après le chat, ce fut au tour du chien qui le poursuivait et là...
Autant tu avais réussis à garder ton équilibre au passage du chat mais, à celui du chien, tu battis vivement des bras pour essayer de te redresser mais, malheureusement, tu tombas en arrière :
« Aioutch !... Décidément, je suis abonné aux chutes aujourd'hui... » Gémis tu tandis qu'une minute de silence s'installa entre les deux enfants avant que ceux ci n'éclatent de rire : « Enfin, c'est pas si mal s'ils rigolent finalement même si... J'avoue que cette chute là m'a fais mal... »
Pas au point d'en pleurer évidemment mais, à comparé entre ton « atterrissage raté » dans une botte de pailles et ta chute sur le sol... Celle ci était un peu plus douloureuse que la précédente. Tu lanças ensuite un regard désolé vers Ayah en se disant que, décidément, la jeune Garde devait avoir honte d'être tombée sur un rigolo comme toi...
En réalité, la crainte avait littéralement laissé place à une sorte de sympathie, même après cet épisode les enfants semblaient plutôt à l’aise en sa présence. La fillette semblait complètement rassurée et était retournée auprès de son ami.
De là les deux enfants s’étaient mis à les détailler avec curiosité avant de s’échanger un regard, quelque chose paraissait les amuser, Ayah leur lança un regard interrogateur :
« Dites, vous avez la même couleur de cheveux. Ça veut dire que vous êtes frère et sœur ? » Demandèrent-ils à l’unisson.
La jeune femme ne s’attendait pas à une telle question et fut un peu abasourdie, les deux enfants éclatèrent de rire, sûrement parce qu’ils avaient pensé la même chose en même temps. Ayah ne pu s’empêcher de pouffer de rire elle-aussi devant cette situation.
Elle jeta un coup d’œil à Yanxlin et constata qu’il avait été autant surpris qu’elle, il paraissait amusé de voir les deux enfants rire, mais n’ajouta pas sa voix aux éclats. Il se redressa et fit mine de réfléchir quelques instants sous le regard amusé de ses trois interlocuteurs.
« Alors... Je veux pas vous décevoir mais... »
Tout se passa très vite. Un chat, Ayah frissonna, elle n'aimait pas trop ces animaux, suivi d’un chien, et vous avez un Yanxlin à terre.
Les deux enfants restèrent interdits un moment, puis éclatèrent à nouveau de rire. Décidément, ce garçon était un vrai numéro bien malgré lui. Il fallait dire qu’il était tombé d’une manière plutôt comique.
Tout garde fût-elle, Ayah restait une personne sensible, et elle aurait pu elle aussi rire de cette situation. Mais son sourire amusé s’effaça pour un air un peu plus inquiet quand elle se rendit compte que c’était une mauvaise chute.
Il était tombé en arrière et grimaçait de douleur en essayant de se remettre en position assise. Ayah s’approcha vivement et lui et s'agenouilla à nouveau à proximité pour lui porter assistance, elle l’aida à s’assoir :
« Décidément vous allez finir par vous faire vraiment mal. » Lui dit-elle un peu inquiète.
Elle posa une main ferme sur son épaule pour lui intimer de ne pas se relever immédiatement :
« Je suis médecin. Dans ce genre de chute il vaut mieux s’assurer que vous n’ayez pas de problème au niveau des cervicales avant de se redresser. Attendons quelques instants, s’il vous plaît. »
Elle s’assit à côté, à même le sol, il était difficile pour elle de savoir s’il avait besoin de plus que d’un peu de calme, il n'avait pas de blessure apparente. Elle était attentive à ses plaintes pour intervenir en cas de besoin.
Les deux enfants semblèrent réaliser que Yanxlin s’était fait mal et s’empressèrent de s’approcher à leur tour. Ils étaient tous les 4 au milieu de la place commerçante et les passants leur jetaient de regards curieux, mais nul ne releva et on les laissa tranquilles.
« Le monsieur a eu un bobo ? » S’enquit la gamine.
Ayah acquiesça d’un signe de tête, sauf s’il manifestait une douleur qui pouvait laisser penser à une fracture ou une quelconque blessure il fallait qu’il reste quelques instants ici. Elle en profita pour discuter tranquillement :
« C’est vrai qu’on aurait pu être de la même famille. » Répondit-elle avec un air jovial à l’adresse des deux enfants. « Mais non, nous ne nous connaissons pas. »
Les deux enfants se regardèrent et haussèrent les épaules :
« Alors vous pouvez être amis ! Ce serait l’équipe cheveux bleus ! Moi je fais équipe avec elle ! On est les meilleurs amis ! » Lança gaiement le petit garçon en prenant son amie par les épaules.
Une expression bienveillante passa sur le visage d’Ayah tandis qu’elle écoutait le petit garçon, les enfants étaient si purs. Amis disait-il ? Pourquoi pas après tout. Elle avait assez peu d'amis depuis qu'elle avait été mutée à la capitale, manque de temps.
Mais dans le cadre de ses fonctions il était un peu difficile de nouer des liens avec les civils et aventuriers.
D’ailleurs elle était très curieuse de savoir ce que Yanxlin avait pu voir à travers le monde.
Elle lui demanderait avant qu’il prenne congé s’il accepterait de le lui raconter plus tard, à condition qu’il aille bien et qu’elle finisse son travail.
La fillette eut soudain une drôle d’expression dans le regard, comme si elle venait de trouver une solution à un problème. Elle se mit à fouiller dans ses poches et en ressortit un petit caillou sur lequel Ayah distingua des traces de peinture. En y regardant de plus près, il y avait une petite fleur enfantine dessinée sur l’objet.
La gamine trottina vers Yanxlin et lui tendit fièrement l’objet :
« C’est un cadeau pour que ça aille mieux, monsieur cheveux bleus ! » Dit-elle, c’était mignon. « C’est un porte-bonheur ! »
Un porte-bonheur ? Ayah aimait bien ce concept, et elle aimait elle aussi en confectionner quand elle était en permission ou au repos. C’était un joli cadeau de la part de l’enfant, elle retourna son attention vers Yanxlin, essayant de déterminer s’il allait bien ou non :
« Ça va aller ? » Lui demanda-t-elle avec bienveillance.
Enfin, évidemment, il y avait une explication au fait que tu te retrouves actuellement sur le sol, allongé, ressentant une douleur inhabituelle au niveau du dos mais, même si ça ne paraissait ne pas être grave, Ayah avait raison sur le fait qu'il ne fallait pas que tu te relève trop vite.
Alors, si on devait résumer la situation ce serait que tu avais tellement été surpris par la réflexion des deux enfants qui, à l'unisson, vous avaient demandés, à Ayah et toi si vous n'étiez pas frère et sœur à cause d'une couleur de cheveux similaire, que tu n'avais pas été attentif à ce qu'il se passait autour de toi d'où ce nouvel atterrissage sur le sol.
Heureusement, Ayah t'assuras qu'elle était également médecin et tu dûs avouer que tu avais appris un truc :
« Je savais pas qu'il y avait une unité médicale au sein de la Garde... Finalement j'ai de la chance que ce soit vous qui ai été chargée de « m'arrêter » » Répondis tu avec un sourire grimaçant tandis que tu t'étais redressé, te mettant en position assise : « Vous inquiétez pas, je vais rester comme ça. Vous avez raison, ça ira mieux si je me lève pas tout de suite. Enfin... L'avantage c'est que vous n'aurez pas droit à un nouveau numéro aérien »
Parce que, effectivement, tes ailes n'étaient pas apparues dans ton dos cette fois ci et, même si tu n'avais réellement aucune idée de la fréquence à laquelle elles apparaissaient, tu avais pu constater qu'il leur fallait quand même un temps de « repos » avant qu'elles ne se manifestent de nouveau.
Une fois « confortablement » assis, tu poussas un soupir de résignation. Décidément, comme tu le disais, tu étais abonné aux chutes et, à part inquiéter les gens autour de toi avec tes pitreries involontaires, tu ne faisais pas grand chose d'utile. Enfin, au moins n'étais tu pas seul dans cette situation.
Effectivement, alors que tu aurais pensé qu'Ayah ressentirais une certaine honte en étant avec un gars comme toi, tu constatas qu'elle avait décidé de rester car elle s'assit à tes cotés, tandis que la fillette s'approchait en te demandant si tu avais bobo. Ayah avait répondu avec un hochement de tête tandis que tu précisais :
« Encore une fois je me suis laissé emporté par ma surprise, d'où cette nouvelle chute mais je crois pas avoir quelque chose de cassé, c'est déjà ça »
Effectivement, à première vue tu pouvais bouger tous tes membres sans problème et ce, même si c'était encore légèrement douloureux mais tout simplement parce que la chute était encore récente. Le médecin de la Garde, toujours assise à coté de toi, en profita pour discuter tranquillement pour dire que vous ne vous connaissiez pas et, étrangement, même si tu savais qu'il s'agissait de la pure vérité, cela te fis tout de même un petit pincement au cœur. Cependant, tu ne dis rien, affichant cependant un sourire lorsque le petit garçon vous proposa d'être amis et de constituer, à vous deux, « l'équipe cheveux bleus ». Décidément, l'imagination des enfants était souvent, rafraîchissante.
D'ailleurs, le petit garçon précisa qu'il faisait également équipe avec la fillette parce qu'ils étaient meilleurs amis. Aussitôt, un voile de tristesse mêlée à de la mélancolie passa dans ton regard. « Meilleurs amis » hein ?... Tu n'étais pas sûr de savoir exactement ce que cela voulait dire car, aussi loin que tu te souviennes, tu ne te rappelais pas avoir eu ne serait ce qu'un ami...
Enfin... Secouant vivement la tête, tu te mis à regarder les enfants avant de répondre :
« Cette idée de former une « équipe cheveux bleus » n'est pas si mauvaise que ça a y réfléchir mais je ne veux pas gêner Madame Stormso... Enfin Ayah... » Parce que tu te rappelais que la jeune femme s'était présentée par son prénom aux enfants : « …Dans son travail. Contrairement à moi, c'est très sérieux ce qu'elle fait »
Parce que, effectivement, entre un aventurier et un membre de la Garde... Et bien le travail n'était pas le même même s'ils pouvaient se ressembler sur quelques points : la dangerosité de la mission en premier lieu puisque la Garde était souvent appelée pour régler de gros problèmes tandis que les aventuriers pouvaient mener des quêtes sans avoir la « chance » de revenir et également la polyvalence des missions mais, pour toi, il y avait une chose sur laquelle ta « profession » était diamétralement opposée à celle de la jeune femme : la Garde était chargée de maintenir l'ordre, ce qui n'était pas le cas des aventuriers.
Cependant, même en sachant cela, tu te surprenais à penser que tu trouverais ça fort sympathique si tu pouvais discuter de tes aventures, anecdotes avec Ayah et former cette fameuse « équipe cheveux bleus » comme le disaient si bien les enfants mais... Plutôt que de parler d'équipe, pour l'instant vous n'étiez qu'un « duo ».
Enfin, tu avais beau avoir ce genre de pensée, cela ne t'empêcha pas de « revenir à la réalité » lorsque la fillette s'approcha de toi avec quelque chose dans la main. En te donnant l'objet, elle précisa qu'il s'agissait d'un porte-bonheur. Une fois l'objet en main, tu répondis dans un sourire :
« Merci beaucoup. Sois sûre que je le garderais précieusement avec moi » Assuras tu avant de tourner ton regard vers Ayah qui te demandais si tout allait bien. Hochant la tête, tu la rassura : « ça a pas l'air trop grave mais je pense, en effet, qu'il faudrait que je restes assis encore quelques instants. Vous inquiétez pas pour moi, vous pouvez retourner à votre travail »
« …. Parce qu'elle va partir ? Elle peut pas rester ? »
« Je pense pas non. Elle avait quelque chose à faire avant d'être venue pour « m'arrêter » et, si elle y retourne pas, il y a de grands risques qu'elle se fasse gronder » Les enfants firent une moue triste tandis que tu essayais de les rassurer : « C'est pas grave, moi je reste pour le moment, le temps de pouvoir me relever sans problème »
Tu avais beau faire comme si cela ne t'affectais pas mais tu ne pouvais t'empêcher de comprendre ce que pouvaient ressentir les enfants à l'annonce du possible départ d'Ayah mais.... Il était normal que la jeune Garde fasse passer son travail avant tout. C'était comme ça...
D’ailleurs elle se les imagina très bien, en train de râler sur quiconque leur donnerait un bon prétexte pour le faire, elle soupira à cette pensée. Oui, ce serait bien leur genre…
Elle encercla ses genoux de ses bras et observa tranquillement les gens autour, au moins ils ne se faisaient pas marcher dessus et on évitait de marcher trop près d’eux.
De ce qu’il disait, Yanxlin ne paraissait pas hostile à l’idée qu’ils soient amis. Pourtant il n’avait pas l’air de porter la garde régulière dans son cœur au vu de la méfiance qu’il avait manifesté. Peut-être avait-il eu de mauvaises expériences… Peut-être qu’après tout il n’était pas si innocent que cela, même si cette fois il l’était réellement.
En fin de compte, elle ne savait vraiment pas grand-chose de lui, mais il serait bête de le juger sans savoir. Le personnage était touchant et elle était persuadée qu’il n’avait pas un mauvais fond. Des malfrats cupides et intéressés par l’argent elle en avait déjà vu, et quelque chose au fond d’elle-même lui disait qu’il n’était pas de genre de personne.
Quand il lui suggéra qu’elle devait peut-être se retourner à ses occupations, elle avait simplement haussé les épaules, un peu perdue dans ses pensées. Elle savait au fond qu’il avait raison.
Les enfants parurent attristés quand l’aventurier leur révéla qu’elle s’apprêtait à leur donner congés, et elle les observa avec un léger air affligé, désolée de leur faire de la peine.
Finalement elle voulut dire quelque chose, ouvrit la bouche, hésita, se reprit, garda le silence quelques instants, puis se lança à nouveau :
« Cela ne me dérangerait pas qu’on se revoie dans d’autres circonstances. »
Elle tourna la tête vers lui et lui adressa un sourire jovial :
« Vous m’avez dit que vous étiez un aventurier, pas vrai ? Vous devez avoir beaucoup d’histoires à raconter sur ce qui se passe en dehors de ces murs ! Je dois dire que je n’ai jamais vraiment voyagé, du coup ça m’intéresse d’entendre des histoires un peu originales. »
Elle garda le silence quelque seconde et détourna les yeux avant d’ajouter :
« J’essaie de rester professionnelle dans l’exercice de mes fonctions. Mais j’ai aussi une vie civile vous savez. Peut-être ferions-nous de très bons amis, qui sait ? »
Une pensée l’amusa et la fit sourire :
« On peut dire que vous ne passez pas inaperçu, je pense que je n’aurais pas de mal à retomber sur vous si je vous cherchais. »
Elle était sur le point de retourner auprès du couple de noble pour poursuivre avec eux la visite de la ville. Ce moment, cette pause avait réellement été la bienvenue pour elle et elle se sentait plus vivante et plus heureuse qu’avant que ces évènements n’arrivent, elle en gardait un sourire aux lèvres.
Volontairement cette fois, et sans que cela ne soit un réflexe dicté par une quelconque réaction empathique elle décida de se comporter en civile en repassant par le tutoiement :
« Je vais devoir y retourner, est-ce que tu aimerais que l’on se revoie un jour ? » Lui demanda-t-elle en lui adressant un sourire chaleureux.
Pendant qu’elle lui disait cela, elle capta un peu de mouvement plus loin et se rendit compte que le couple de nobles était sorti la boutique, et semblait la chercher des yeux… Mais, même s’ils ne regardaient pas encore dans sa direction, elle ne pouvait pas traîner beaucoup plus.
Chacun allait devoir retourner à ses occupations. Ayah avait une mission à assurer. Quant à toi, tu avais.... Envie de prendre un verre dans une taverne du coin ? Pour l'instant, tout du moins, tu n'avais pas grand chose à faire donc autant profiter jusqu'à la prochaine quête, non ?
Cependant, tu fus assez surpris lorsque la jeune femme prit la parole en te disant que cela ne la dérangeait pas que vous vous revoyez dans d'autres circonstances. Aussitôt, ta réponse fusa, comme venue du cœur :
« ça me plairais carrément ouais ! » Un instant de silence gêné plus tard avant de reprendre : « Enfin... Je veux dire oui, ça pourrait être quelque chose de sympathique si on pouvait se revoir. Désolé... J'ai été un peu trop enthousiaste... »
Comme un enfant qui aurait, effectivement, été trop enthousiaste à l'idée de pouvoir jouer de nouveau avec une amie à la différence qu'... Aucun de vous n'étais enfant donc il fallait apprendre à te modérer un peu Yanxlin ! Surtout que, les « vrais » enfants, qui étaient toujours avec vous, continuaient de pouffer de rire sans que, évidemment, tu ne te montres offusqué.
Par la suite, Ayah repris en disant que, comme tu t'étais présenté comme étant un aventurier, tu avais certainement dû voir plein de choses hors les murs du Royaume, ce qui était bien vrai. Elle précisa également qu'elle pourrait être friande d'histoires originales et, même si elle restait professionnelle dans le cadre de ses missions – ce que tu comprenais parfaitement ! - elle avait également une vie civile. Elle ajouta même que vous pourriez être de bons amis.
Tu voulus répondre mais les enfants furent plus rapides que toi :
« Ouais, ça pourrait être bien ! Même que vous pourriez être meilleurs amis ? Comme Ritshka et moi ? » Bien que silencieuse, la fillette hocha vivement la tête : « Et même que vous pourriez passer nous voir ? On accompagne nos parents en visite à la Capitale mais on est originaires d'un village dans les Plaines alors... » Le petit garçon tourna la tête vers Ayah : « Peut être que quand tu pourras... Viens nous rendre visite ! On connait un super coin avec plein d'animaux ! J'ai même vu des Chapardeurs ! »
Et à la fameuse Ritshka de répondre :
« Jytzo a raison ! J'en ai vu moi aussi ! Ils sont supers mignons ! »
« Les enfants... Je partage votre enthousiasme mais on vient juste de se rencontrer avec Ayah et je crois pas lui avoir fait une bonne impression dès le départ donc soyez pas aussi rapides à tirer des conclusions ! Même si... » Tu te mis à réfléchir, toujours assis, la tête sur ta main : « Une petite expédition dans les Plaines pourrait être sympa un de ces jours. Faudra y penser même si ça fait un trotte. Enfin, je veux dire, c'est pas à coté »
« Mais tu peux voler, Monsieur aux cheveux bleus, non ? »
« Jytzo, c'est ça ? Oui, j'ai des ailes mais ce sera moins dangereux pour moi d'y aller à pieds »
Les enfants firent la moue pendant une minute avant de prendre ce fameux regard de « chiens battus » qui faisait craquer tout le monde et tu n'y faisais pas exception. Tu poussas un soupir : décidément, ces enfants allaient vraiment trop vite en besogne car ils avaient déjà intégrés le fait qu'Ayah et toi étiez les meilleurs amis du monde alors que vous veniez à peine de vous rencontrer et que la jeune Garde était venu pour t'arrêter à la base...
Pourtant, tu n'eus pas le cœur de refuser mais, avant de dire quoi que ce soit, tu préféras tourner ton regard vers Ayah pour lui demander, dans un soupir déjà résigné :
« Bon... J'ai comme l'impression qu'on a pas le choix. Pour ma part ça me dérange pas de faire un petit tour dans le village des Plaines mais... C'est plutôt pour vous que ça risquerait de coincer non ? Faudra attendre votre prochaine... Permission ? C'est comme ça qu'on dit ? » Les enfants étaient entrain de vous regarder avec des étoiles dans les yeux : « Je vous promets rien mais on verra d'accord ? »
Tu eus bien du mal à convaincre les enfants de vous laisser un peu de temps mais, heureusement pour toi, ils n'insistèrent pas, tandis que tu partageais l'avis d'Ayah comme quoi tu étais facilement reconnaissable. Tu eus même un petit rire avant que tu n'essaie de te relever car la douleur de la chute était partie.
Une fois debout, tu mis un temps à te rendre compte que la jeune Garde était de nouveau passée au tutoiement tout en disant qu'elle devait finalement y aller et en te demandant si tu aimerais la revoir un jour. Tu avais beau aimer jouer les « Don Juan », tu répondis avec un sourire plus enthousiasmé que véritablement séducteur :
« Vraiment ça pourrait être une bonne idée et puis... Je crois qu'on a déjà un « rendez vous » de fixé plus ou moins dans la zone des Plaines. Enfin, c'est qu'une idée vous inquiétez pas, on est pas obligés d'y aller. Juste que ça fera plaisir aux gamins et puis... J'avoue être assez intrigué par cette histoire de Chapardeurs mais bon, vous pouvez aussi choisir la destination c'est pas interdit » Assuras tu avec un sourire avant de baisser un ton pour conclure : « C'est vrai, vous devriez filer maintenant. C'est triste mais c'est comme ça, vous avez votre travail » Tu lui offris cependant une petite idée pour la suite : « Je vais sûrement m'éclipser après votre départ donc, si vous voulez une excuse auprès des Nobles, vous aurez qu'à dire que vous avez passé votre temps à me faire la leçon du genre « C'est mal de troubler l'ordre public ! C'est un avertissement et que je vous y reprennes plus ! » ou un truc du genre. Ah... Désolé pour la caricature mais, c'était trop tentant »
Effectivement, tout au long de cette « excuse », tu avais faussement imité l'attitude d'un Garde qui donnerait un avertissement à quelqu'un, ce qui vous avaient fais marrer, les enfants et toi. Maintenant, il restait à prier qu'Ayah ai vraiment le sens de l'humour et qu'elle ai prit cette « moquerie » au second degré parce que bon... Caricaturer la Garde devant un de ses représentants.... Y avait plus intelligent à faire, clairement...
Il semblerait que ces enfants n’étaient pas du coin, eux aussi étaient en visite. D’ailleurs ils devraient rapidement retourner auprès de leurs parents, mais Ayah n’eut pas le cœur de leur faire la morale et se contenta d’hausser les épaules avec un air calme et serein quand ils évoquèrent leur village dans les plaines.
Elle laissa Yanxlin mener la négociation avec eux, il avait l’air de plutôt bien s’entendre avec les plus jeunes. Et dire qu’il y a moins d’une heure ces enfants étaient terrifiés par lui… Quel revirement de situation ! Mais le principal était que tout était rentré dans l’ordre, et tout cela n’avait été qu’un terrible malentendu.
Pour ce qui était du pouvoir de Yanxlin, et bien, elle espérait qu’il puisse un jour trouver une solution à son problème, elle s’imagina à sa place. Non, ça ne devait pas être particulièrement agréable de s’envoler aléatoirement pour retomber plus loin. Quel drôle de pouvoir… Mais quelque chose lui disait qu’il y en avait des plus étranges encore dans ce vaste monde !
En tout cas, toute la défiance qu’il avait manifesté pendant leur entrevue semblait s’être évaporée, laissant place à un air jovial franc et enthousiaste. La gaieté du jeune homme était communicative et elle put la ressentir elle-même.
Et puis il se fendit dans une imitation d’un membre de la garde en vue de lui donner des idées pour se justifier auprès des nobles. Il grossissait un peu le trait, mais effectivement la situation aurait pu ressembler à ça. Cette idée lui arracha un sourire amusé et elle se retint d’en rire :
« Je pense que je m'en tiendrai à la version officielle courte, ils ne sont pas obligés d’être au fait des détails, mais je ne leur mentirai pas. »
Il était temps de se dire au revoir, et elle ébouriffa affectueusement les cheveux des deux enfants :
« C’est d’accord, je passerai visiter votre village à l’occasion » Dit-elle avec bienveillance.
Tandis qu’elle les laissait tranquilles se recoiffer elle reporta son attention sur Yanxlin :
« Les plaines hein… Je pense que ce serait une bonne idée à l’occasion. Mais je ne saurai pas dire quand sera ma prochaine permission. Je suppose que nous verrons le moment venu ! »
A contrecœur, elle leur fit un signe de la main et commença à s’éloigner :
« A bientôt, j’espère ! » Leur lança-t-elle.
Elle disparut dans la foule et se mit à chercher des yeux les deux nobles qu’elle avait vu sortir de la boutique. Il ne lui fallut pas longtemps avant de les trouver, elle les rejoignit immédiatement :
« Vous avez arrêté ce scélérat ? » S’enquit le noble.
« La situation est sous contrôle. » Dit-elle simplement, sans donner plus de détails. « Veuillez m’excuser pour l’attente. »
La femme la dévisagea avec un petit air supérieur, elle soutint son regard calmement et sans insolence :
« Vous en avez mis du temps ! M’est avis que vous ne vous êtes pas particulièrement dépêchée. »
« Oui, vous feriez mieux de vous rappeler que l’on ne vous paie pas pour tirer au flanc. » Renchérit l’autre.
Ayah savait parfaitement qu’il n’était pas utile de se confronter à ces gens et elle prit le parti de ne pas chercher le conflit, comme à son habitude. Ils ne l’intimidaient absolument pas, mais elle était comme ça, elle préférait les laisser parler :
« Je tâcherai de m’en souvenir. » Dit-elle simplement. « Et maintenant, reprenons la visite, voulez-vous ? »
Ils râlèrent encore un peu mais acquiescèrent et la suivirent jusqu’à leur prochaine destination. Oui… Cette pause avait réellement été la bienvenue, et Ayah en gardait un sourire accroché aux lèvres.