En sortie officielle pour rencontrer un noble de la Grande Forêt, le prince Aeron et sa garde sont surpris par une tempête. Bien que l’endroit ne se prête pas à sa royale majesté, la troupe est bien obligée de se diriger vers une demeure d’apparence miteuse. Aeron est envoyé à l’intérieur avec Xylia, garde du Village Perché, venue assister et guider la Garde Royale, tandis que les troupes de la Garde Royale se répartissent à l'extérieur pour protéger le périmètre.
A peine entrée, la porte claque. Malgré des essais répétés, impossible de l’ouvrir, elle semble verrouillée. Des pas commencent à retentir à l'étage, semblant indiquer que vous n’êtes pas seuls dans cette demeure...
Participants : Xylia Mavrocordato et Aeron Renmyrth
Challenge RP : Vos posts seront majoritairement commposés de paroles
C’est les mots de Pastis que tu grognes en regardant autour de toi avec une certaine appréhension. En temps normal, c’est-à-dire sans être la seule escorte du moment pour le prince héritier, la situation t’amuserait et tu chercherais à explorer les lieux, mais là, tu sens sincèrement que cela va pas le faire l’excuse du « Désolé, il est blessé parce que je voulais savoir s’il y avait vraiment des monstres dans le coin ». Un soupir et tu te reprends un peu avant de sourire à sa Grâce pour tenter de faire bonne figure tout de même.
— Bon et bien, visiblement, comme vous l’avez certainement remarqué, nous venons d’être enfermés à l’intérieur. L’avantage c’est qu’on est à l’abri de la tempête, l’inconvénient c’est qu’on ne sait pas ce qu’il y a dedans. Nous pouvons, à votre choix, soit attendre comme des rats morts que les gardes royaux trouvent une solution. Ce qui arrivera forcément, parce qu’on n’engage pas n’importe qui à ce rôle, soit on peut explorer les lieux pour s’occuper et voir si on trouve une sortie par nos propres moyens.
À aucun moment tu évoques la possibilité que cela soit un piège, il a assez de jugeote selon toi pour le comprendre comme un grand. Sinon le souci n’est pas le piège en question, mais plus l’avenir du royaume.
— Par contre, j’aimerais simplement votre avis sur une question. J’aimerais beaucoup savoir si ce n’est que mon esprit qui imagine cela ou bien est ce que les vous voyez aussi les ombres qui semble réagir au son de ma voix ? Genre, est-ce que vous aussi, si jamais je m’arrête de parler et bien…
Tu te stoppes et presque immédiatement il y a des ombres grises qui semblent venir directement dans votre direction sans aucune hésitation.
— Si c’est que mon esprit. Même si je doute que cela soit mon esprit je dois l'avouer.
En même temps que ton débit de paroles se fait, les ombres stoppent leur progression et reculent même un peu mine de rien.
— Parce que j’aimerais beaucoup ne pas tester les effets de ces ombres sur votre personne. Par contre si vous avez des idées de sujets de conversation pour renouveler un peu ça ne serait pas de refus. Je vous parlerai bien des Archipels indépendants, mais mon petit doigt me dit que cela ne serait pas forcément le sujet de conversation de rêve pour aujourd’hui. Dommage pour moi.
« Ne vous inquiétez pas, votre Grâce. Nous allons nous abriter le temps de la tempête dans le manoir. Il est abandonné depuis quelques années, mais les reconnaissances dans la région tendent à dire qu’il n’y a aucun risque. Toutefois, afin d’être certain de la situation, nous allons patrouiller autour du bâtiment afin de nous assurer que les dangers sont maîtrisés et minimaux. Pas d’inquiétude, donc. »
Aeron hocha la tête, et entra dans le manoir avec la Garde locale, une certaine Mavrocordato. Et ils se retrouvèrent magiquement enfermés, avec des ombres galopantes qui n’étaient pas sans rappeler de façon extrêmement désagréable les tentacules d’ombre qui l’avaient enlevé il y avait maintenant plus d’un an.
« Je suppose qu’à défaut de trouver une sortie par notre propres moyens, nous devrions commencer par établir un périmètre sécurisé dans lequel nous pourrons maîtriser les dangers qui nous entourent possiblement. Ensuite, nous verrons s’il est possible de sortir. Enfin, il ne s’agit que d’une proposition. C’est vous la Garde, après tout, je me plierai à vos avis concernant ma sécurité. »
Il allait sans dire que ce serait sa tâche prioritaire, et qu’il entendait bien la lui faciliter, pour des raisons évidentes : tant qu’à faire, son choix était nettement de survivre.
« Oui, les ombres ont un fonctionnement étrange dans ce manoir. Il s’agit peut-être d’une forme de malédiction issue du dernier occupant, par exemple. Il me semble avoir lu des notes sur ce sujet : peut-être le manoir était-il totalement abandonné, et propriétaire a dû subir le silence absolu des lieux, d’où la présence de ces ombres qui ne s’éloignent que quand les gens présents parlent à voix haute. De fait, il ne devrait pas être trop complexe de les maintenir à distance. Peut-être risquons-nous tout au plus d’avoir la gorge sèche à force. »
Et il n’avait pas de gourde fontaine ou quoi.
« Si la Garde Royale, cependant, met plusieurs heures à parvenir à nous libérer des lieux, il faudra peut-être envisager des rondes pour que l’un de nous deux parle pendant le sommeil de l’autre. Toujours est-il que nous n’en sommes pas là. Et que le sujet des archipels indépendants n’est probablement pas notre priorité première. »
Le sujet prenait de l’ampleur, même au sein du gouvernement, mais Aeron tendait naturellement plutôt contre : il s’agissait d’une part du Royaume, et si problème il y avait, il faudrait plutôt creuser dans l’autre direction, pour davantage intégrer les îles et leur donner le sentiment d’appartenance. Le problème se situait sans doute là, plutôt qu’une différence irréconciliable.
« Nous sommes présentement dans l’entrée du manoir. »
Les ombres reculèrent à nouveau.
« Il n’y a rien de particulier à part de la poussière et des toiles d’araignées, ainsi que ces armures laides et vides. Très septième siècle, en terme de décoration, mais peu choquant au vue de la vétusté des lieux. Je pense que c’est du cristal, sur le lustre, au fait. C’était traditionnel, à l’époque, à moins que cela n’ait été vendu pour être remplacé par du verre, bien entendu. Une pratique courante chez les familles nobles qui connaissaient des temps de disette. »
Tant qu’il trouverait des sujets de conversation, il n’y avait pas à s’en faire.
Tu es tout ce qu’il y a de plus lucide là-dessus. En plus, certains de tes propres arguments pour l’indépendance des Archipels avaient bougé suite à ta discussion avec la reine. Là tout de suite tu l’utilisais plus pour avoir quelque chose à dire sur le moment qu’autre chose.
— Bouger ne serait effectivement pas un mal, je pense, au pire des cas on pourra toujours revenir ici si cela se complique un peu trop. Puis, en plus d’un périmètre de sécurité, on trouvera peut-être l’origine du mal qui nous guette pour l’éliminer. Cela fait plaisir de pouvoir explorer, j’avoue sans le moindre gène que ma curiosité me titille beaucoup pour ce lieu et ses ombres étranges. Vous ne seriez pas là je pense que j’aurais voulu voir ce que cela fait d’être touché par l’une d’entre elles, mais on m’a toujours dit que j’avais des comportements toxiques quand je suis en solo.
Tu dis cela à moitié en rigolant pour détendre un peu le moment d’une certaine façon. Te redressant, tu regardes les options face à vous. Escalier pour l’étage, une porte sur le côté droit, un couloir donnant sur une pièce à gauche.
— Commençons par ce qui est déjà ouvert, la gauche si cela vous convient.
Tout en disant cela, tu amorces un mouvement dans cette direction-là, mais en restant assez proche du prince en cas d’intervention rapide à faire.
— Après, pour revenir sur les armures moches, j’ai envie de dire que beaucoup d'armures de base sont moches ou peu fonctionnelles. Rien que celle de la royale, c’est là que pour le prestige, on est d’accord ? Comment est-ce que l’on peut se taper un sprint avec ou encore bouger de manière fluide ? Il suffit d’avoir un manipulateur de métal ou encore d'avoir juste placé une pièce d’armure non correctement et c’est mort. Si j’avais eu l’occasion de travailler à la royale, même si c’est un immense honneur et plein de trucs super sympas, on ne va pas se le cacher, j’aurais certainement fait plein de papier de procédure pour ne pas avoir d’armure lourde. Aucune envie d’être une pièce de décoration ambulante. En plus mon pouvoir est lié au toucher et avoir ma peau recouverte me dérange.
Tu fouilles un peu ton sac sans fond et sors une gourde fontaine de ce dernier.
— Si jamais on a soif à un moment de parler de tout et n’importe quoi, j’ai de quoi faire. Tout comme j’ai tout pour les blessures sans effet magique. J’ai aussi un cristal massant si a un moment il y a besoin de détendre certain nerf. Je sais que pas tout le monde n'est à l’aise avec le contact des autres et c’est une petite merveille pour masser correctement si besoin.
Tout sort naturellement, baratiné n’est pas ce qui est le plus compliqué en même temps, puis, surtout, c’est un exercice qu’il faut souvent faire dans ta position mine de rien.
— Si le lustre est vraiment en cristal cela doit être beau quand on allume les cristaux de lumière dessus, cela à toujours un effet plus féérique je trouve. Je me demande si des cristaux magiques sont encore fonctionnels dans les lieux, c’est assez rare une fois qu’une bâtisse est abandonnée, mais certains perdurent un moment. Il arrive même que certains se corrompent avec ce qui se passe dans les lieux en perturbation magique. Il y a tout un rayon sur ce genre de théorie dans la bibliothèque du village perché.
Le Prince s’arrêta alors même qu’il commençait à entrer dans le sujet. Ce n’était clairement pas la priorité, de traiter cette question avec une garde du Village Perché, a fortiori quand ses royaux géniteurs eux-mêmes n’avaient pas la réponse à la question. Cependant, échanger sur un sujet pouvait toujours s’avérer intéressant, cela, il ne le remettait pas en doute.
« Je pense que faire le test de se laisser toucher, surtout en étant seule, serait au contraire encore plus dangereux. Evidemment, vous devez assurer ma sécurité, mais dans ce cas, il faudrait faire un essai en présence de la garde royale, si elle parvient à pénétrer dans le manoir et que les ombres sont toujours aussi maudites. J’avoue moi aussi éprouver de la curiosité vis-à-vis de ces ombres, et souhaiterais vérifier mes hypothèses, mais mon statut fait que c’est naturellement impossible. »
Ils se dirigèrent vers la gauche.
« Oui, commençons par le rez-de-chaussée, il sera toujours temps d’aller explorer l’étage par la suite. Je vous laisse passer devant, évidemment, pour répérer s’il y a un danger. Pour ma part, je vais m’assurer que les ombres ne viennent pas dans notre dos alors que nous ne les regardons pas, au cas où nos paroles incessantes ne seraient pas suffisantes pour les maintenir à distance. »
Avançant prudemment, ils constatèrent que la pièce était vide, et poussiéreuse. Quelques meubles moisissaient péniblement et le tapis était rongé par les mites.
« La Garde Royale a toujours utilisé des armures, et cela a souvent été un point de contention. Le Major Grassim n’en porte pas, d’ailleurs, pour incompabilité avec son pouvoir de transformation, par exemple. Cependant, au sein du palais, l’armure constitue un avantage indéniable sur d’éventuels assaillants qui seraient dépourvus de leurs pouvoirs. En dehors, il est vrai que la protection constitue autant une aide qu’un inconvénient, en raison de son poids, qui fatigue les troupes davantage, et des restrictions de mouvement. Cela dit, la condition athlétique des gardes royaux fait qu’ils minimisent la gêne. »
Mavrocordato montra la gourde fontaine et les autres objets qui se trouvaient dans son sac sans fond.
« Je suis rassuré. Avec simplement la gourde, nous pourrons tenir plusieurs jours. Evidemment, j’espère ardemment que vos collègues trouveront une solution, ou même nous, pour sortir d’ici au plus vite. Mais il faut envisager toutes les hypothèses, et celle que nous restions coincés quelques temps à l’intérieur fait partie des scénarii catastrophe. »
Il écouta quelques instants la théorie sur les cristaux magiques et fronça les sourcils.
« Pourriez-vous m’en dire davantage ? Et éventuellement m’indiquer dans quel rayon de la grande bibliothèque ils se trouvent ? Je dois avouer que cette théorie ne m’évoque rien pour le moment, mais qu’elle s’avère extrêmement intéressante. Cela pourrait être une autre explication à l’amplification de la malédiction des lieux, après tout. En tout cas, il n’y a rien ici, donc je vous propose que nous allions examiner le couloir de droite, puis l’étage. Il ne semble y avoir aucune présence à part les ombres, mais une mauvaise surprise est toujours possible, après tout… »
Il était même certain que tes propos soient justes. Tu l’avais bien remarqué en parlant directement avec la reine la dernière fois. Tout était souvent une question de point de vue et de comment aborder les thèmes en question. En tout cas, un sourire assez sincère fleurit sur tes lèvres en retrouvant cette même sensation de bien être en discutant simplement avec une personne de la royauté presque d’égale à égale.
— Et oui, cela aurait été bien plus dangereux, voire suicidaire de me laisser toucher seule. J’en conviens parfaitement. Quelque part, sans l’ombre d’un doute, vous êtes mon point de salut aujourd’hui. La curiosité est un bien vilain défaut qui en plus de l’insolence mon fermer quelques portes. La garde royale va arriver à rentrer, il n’y a aucun doute là-dessus. Même si cela prendra un peu de temps, ils ne se laisseront pas faire par une simple maison hantée, c’est à nous de faire bonne équipe pour que leurs efforts ne soient point vain, mais on est sur la bonne voie, je pense.
En tout cas, sur la bonne voie pour parler et rebondir sur le différend sujet semble bien partie. Quelque part, c’est peut-être un peu idiot, tu te sens à l’aise maintenant que la conversation a commencé.
— Pour les armures, je ne vois pas cela de la même manière. Autant des armures en cuir avec quelques plaques de fer me semblent efficaces, autant j’ai plus de mal avec celle entièrement en fer. Même avec une personne sans pouvoir c’est souvent des armures bien lourdes et inconfortables. J’ai entendu parler de procédés mis en place par des enchanteurs pour les alléger et rendre leur utilisation viable dans l’enceinte du palais, mais n’ayant point mis les armures en question je sais que j’ai du mal à visualiser. Mon esprit ne peut s’empêcher d’imaginer cela comme un bon déguisement pour des personnes voulant s’infiltrer dans le palais avec le casque bien placé, mais à ce compte-là même les places de domestique sont facilement infiltrables si on regarde bien. Je crois, je suis même certaine, que mon souci avec les armures vient de la fois où j’en ai porté une en pleine saison chaude, un jour encore plus chaud que les précédents à l’académie. On nous fait tester différentes armures pour nous apprendre, mais aussi différentes armures pour être le plus à l’aise possible suivant la situation. Entre la chaleur, l’incapacité de boire facilement, le poids et l’effort, la nausée est venue et cela c’est tout sauf bien terminé… Ma mère me ferait certainement couper la langue pour le faire parler de cela avec vous plutôt que de vanter les mérites de mon ventre pour porter des héritiers nombreux. Si on vous demande, dites simplement que je suis insupportable comme garde, il me manque quelques recommandations pour un poste dans la garnison de la Forteresse.
Quelque part tu tentes une pointe d’humour pour lui tenter de le faire un peu sourire et surtout ne pas voir la situation comme quelque chose d’horrible. Pas dans l’immédiat en tout cas. Tu prends la tête du groupe de deux que vous formez comme il le propose et avance vers l’un des meubles de la pièce bien dégarnis.
— Je peux vous proposer aussi des marrons glacés en repas en plus de la boisson. Ma famille a jugé bon de m’envoyer un objet magique permettant de glacer tout marron qu’on met dedans immédiatement. J’ai aussi une boite pour avec une graine de la plante de votre choix et la faire pousser à l’envi immédiatement, mais j’avoue préféré éviter de possiblement endommager quelque chose dans cette maison, plus que c’est déjà le cas, pour que les ombres ne commencent pas à réagir étrangement. On a déjà suffisamment de mal ainsi sans les énervés plus que cela.
Tout en disant cela, tu ouvres doucement le buffet face à toi, la porte fait un grincement bien strident, mais s’ouvre tout de même sans rien casser laissant voir de magnifiques étagères vides et de belles toiles d’araignées en prime.
— Pour la section, de mémoire, c’est celle juste après les contes et légendes du royaume. Cela a été mis à ce niveau-là, car cela reste de simples théories et qu’aucune étude assez poussée n’a pu mettre en avant ces idées-là, mais si c’est passionnant à lire. Vu le nombre de fois où c’est écrit qu’il faut prendre tout ce qui est écrit avec des pincettes, cela se ressent que l’auteur n’a pu publier son ouvrage qu’avec ces mentions-là.
Tout en disant cela, tu refermes la porte de l’armoire et regardes les directions que propose le prince.
— La prudence est toujours mieux que l’imprudence, nous sommes parties pour le couloir de droite Majesté. Sinon, pour reprendre sur les cristaux, comme vous devez l’avoir certainement remarqué, mais pas mal de pouvoir est lié aux émotions. Pas dans le sens avec un effet sur les émotions, mais de comment on se sent quand on utilise la magie peut faire varier une utilisation, ce qui est assez normal si on y réfléchit bien. Nos propres capacités physiques sont influencées à de comment on se sent de base. Même si on peut s'entraîner pour que l’influence soit moindre elle existe tout de même. La théorie voudrait qu’en reproduisant des pouvoirs en cristaux, on enlève aussi une base essentielle pour les faire fonctionner correctement, les émotions de leurs propriétaires originels. De ce fait, les émotions fortes, positives ou négatives arrivent à les faire réagir et provoquent des incidents. Mais que cela ne se contente pas de l’énergie des humains, mais de tout être vivant capable d’émotion et que la corruption s’inscrit ainsi de plus en plus avec un objet qui se veut à l’origine pour notre utilité publique. Un peu comme certains familiers qui deviennent fou après la mort de leur propriétaire, qui ne se retrouve pas mourir avec eux ou a cherché inconsciemment un nouveau propriétaire. Après, ce même auteur a fait un ouvrage sur les tenant et aboutissant des liens de familier et de comment ce dernier influe sur les deux parties du lien. À la base je lisais cet ouvrage de lui.
Le couloir donnait sur une petite porte en bois qui n’était pas verrouillée, une simple pression de la main le poignet vous laissa entrer. Visiblement c’était l’ancienne cuisine au vu du plan de travail et surtout du four présent, le tout sous une couche de poussière.
— C’est étonnant vu l’emplacement des lieux qu’il y est… ah ! J’allais dire autant de poussière, mais regardez, là, il y a comme l’emplacement de quelque chose de rond qui n’est plus là…
Tout en disant cela, tu désignes effectivement un rond sans poussière bien visible au sol. Peut-être un vol récent.
Et, quand bien même, une simple garde n’était peut-être pas l’interlocuteur que le Prince aurait choisi pour cela. Sans doute un notable des archipels, des historiens et économistes seraient sans doute des experts plus intéressants à écouter sur le sujet.
« Ne vous inquiétez donc pas pour le danger. C’est également le rôle de la famille royale que de protéger les habitants du pays, même si, physiquement, c’est plutôt l’inverse qui se produit. Nous pouvons voir cela comme une relation collaborative entre les deux systèmes, encore qu’ils ne soient pas disjoints non plus. Une symbiose, peut-être. Quant à votre recrutement par la garde royale… Tous les gardes ne sont pas fait pour en faire partie, tout comme les gardes royaux ne sont pas forcéments adaptés à des régiments ou garnisons plus classiques. C’est de la même façon qu’un homme barbu et hirsute des montagnes ne sera peut-être pas adapté au régiment du sud, pour prendre un exemple un peu cliché et idiot. »
Etrangement, au-delà de l’effet immédiat sur les ombres mystérieuses qui les entouraient, et alors qu’ils fouillaient les alentours, échanger ainsi permettait de juguler la crainte qui montait en lui que quelque chose de vraiment grave n’arrive. Après tout, il était l’héritier du Royaume, et se devait de rester bien portant et en bonne santé pour la suite. Et si jamais c’était l’Umbra… Encore que la méthode semblait être aux antipodes des précédentes.
« Les armures remplissent leurs utilités. Je ne les utilise moi-même que très peu, aussi bien en raison de mon pouvoir que des faibles dangers auxquels je suis exposé. Je suppose que si la garde royale les utilise tant, c’est qu’elles ont prouvé leurs performances au cours des âges. Mais je comprends bien les difficultés que vous avez eues pendant les essais, surtout si le climat y était peu propice. J’ai beaucoup vu les gardes sortir dégoulinant de leurs armures suite aux rondes et aux surveillances au sein du Palais. Quant à vos recommendations… La Forteresse n’est pas parmi les destinations préférées des soldats, et il s’agit pourtant d’un des points les plus importants du dispositif du Royaume, eu égard à la proximité avec la Frontière. Hélas… »
Aeron ignora l’air de rien la phrase sur les ventres faits pour porter de nombreuses fratries à venir, la rangeant avec toutes les allusions généralement plus discrètes qui avaient pu lui être faites par une grande partie de la noblesse au cours des années.
« Très bien, nous ne mourrons donc pas de faim. C’est une excellente nouvelle, si jamais mon escorte devait aller chercher un enchanteur à proximité, et la situation s’éterniser. Et je suis d’accord, il n’y a aucune raison d’agiter encore davantage le propriétaire des lieux ou l’origine de la malédiction. »
Les meubles jusqu’à présent ne renfermaient rien de bien intéressant : tout avait déjà dû être vendu ou écoulé par les héritiers, ou des voleurs de passage.
« Contes et légendes du royaume, c’est bien noté. Ce sera peut-être l’occasion de réfléchir à lancer des recherches supplémentaires. Sait-on jamais, s’il reste une chute de budget. »
Le Prince se tourna vers sa seule escorte du moment maintenant qu’il était avéré que la salle était vide de tout intérêt. Il écouta avec attention ce qu’elle savait sur les cristaux magiques et les possibilités de corruption.
« Tout cela est, ma foi, bien intéressant. Peut-être y a-t-il une forme de porosité magique entre le cristal et le monde qui l’entoure, et qui fait qu’il peut se transmettre de l’un à l’autre. La question devient alors, si on place un cristal qui sera… maudit ? souillé ? dans des conditions positives, est-ce qu’alors on se retrouverait avec une situation qui s’améliorerait petit à petit ? Faut-il commencer à stocker des cristaux auprès des monastères de Lucy, par exemple, pour profiter de leur état d’esprit paisible et positif ? Encore que certains pourrait mettre ce dernier en doute, évidemment. »
La cuisine était vide, à part une trace dans la poussière, et des pas qui s’en éloignaient.
« Il s’agit probablement d’un homme, à voir la pointure. Quant à en savoir davantage, je ne pourrais vous dire. Si la cuisine a été pillée, il faudrait peut-être aller voir à l’étage. Il semble s’agir de la dernière possibilité, après tout. Il doit y avoir quelques chambres plus haut, et probablement un salon, également. J’espère que l’escalier est en suffisamment bon état pour nous permettre de monter, dans tous les cas. »
C’est dit sur un ton parfaitement moqueur, pourtant, avoir un plus tard plutôt qu’un jamais ne lui fait plaisir. Peut-être que le conseil des huit devrait en prendre de la graine quant à leur révolution. À trop vouloir le faire frontalement, on en oublie facilement que discuter n’est pas forcément un mal.
— Je ne m’inquiète point du danger, quand on rentre dans la garde tôt, même sans avoir un poste en première ligne, c’est quelque chose avec lequel on apprend à vivre. Le danger n’est pas un ennemi. C’est notre garde-fou quelque part, le baromètre n’est pas toujours égal. Est-ce que vous avez déjà vu un baromètre ? Mon oncle en avait un sur son bateau, il l’avait ramené du quartier des ingénieurs. C’était bien grand pour l’utilité que ça avait, enfin, pas si grand que cela, mais cela se voulait mesure les futurs changements de température ou encore la hauteur de la marée et d’autres mesures dont il était certain pourrait l’aider à mieux navigué, seulement, même si cela permettait effectivement à son second de naviguer correctement, malgré cet objet étrange, mon oncle n’a jamais su navigué lui-même et a coulé son navire, sans perte humaine heureusement, à cause d’un rocher qu’il ne voulait pas voir. C’est un homme qui ne venait pas des archipels, ma tante a repris les rênes de la compagnie plus tard, mais bref, ce n’était pas la question. Ce que je voulais dire c’est que le danger est ce qui nous permet de plus ou moins bien maintenir le cap pour reste une personne qui sera avec une importance pour le royaume. Juste, certains ne savent pas l’utiliser correctement et de manière saine. Puis, il doit bien avoir un objet magique qui a les mêmes effets que ce baromètre, mais bien plus pratique à utiliser.
C’est pas forcément une haine de la technologie qui te fait dire cela, plus une habitude de voir en la magie quelque chose de plus simple que tout ce que les ingénieurs peuvent mettre en place dans leur atelier. Pourquoi faire autant de recherche pour faire fonctionner des choses sans magie ?
— Donc, c’est aussi le rôle de la garde de faire que la famille royale reste en bonne santé pour guider un peuple dans une direction unie.
Parce que tu n’es pas contre la royauté non plus. C’est tout le complexe de ce que tu voudrais expliquer avec ta vision de l’indépendance. Ce n’est pas le jour de toute manière de mettre cela sur le tapis. Un rire assez franc sort de ta bouche quand il parle de mettre des cristaux dans les temples de Lucy, en soit, même s’il avait proposer de les mettre dans les lieux de culte des Astres cela t’aurait fait rire un peu jaune.
— Les maîtres dans lieux positifs est quelque chose qu’il faudrait effectivement tenter pour en voir leurs évolutions, mais je doute que tout lieu de culte soit le bon endroit. Il y a certes des personnes des plus heureuses à pratiquer sans contrainte extérieure, mais il ne faut pas non plus oublier que la religion est dans ce qui plonge ceux allant au plus mal pour se relever. Ça ne serait pas de vrais sentiments positifs dans ce cas là, plus un ersatz de bonheur et pourrait fausser les résultats… Je conseillerais plus, des sorties d’enfant ou encore des événements festifs, mais là encore, il y aura toujours une possibilité à la négativité des gens. Il est tellement plus simple de maudire une personne autour de nous que de la bénir après tout.
Alors que tu mets un pied sur la dernière marche qui vous conduit à l'étage, des bruits se font de plus en plus fort au niveau de la porte d’entrée, visiblement la résistance est de plus en plus mise à mal par la garde royale dehors et leurs efforts commencent à vraiment payer. Les ombres de leurs côtés semblent osciller entre vous et la porte sans trop savoir sur qui se concentre vraiment.
— Si vous cherchez où mettre une chute de budget, cela reste un projet intéressant, même si je suppose que beaucoup de projets tout aussi intéressants attendent un geste de votre part. enfin, de la part de la royauté, pas forcément de ta main précisément. La bibliothèque qui semble au fond du couloir te tente ou bien retourner en bas à attendre la cavalerie est plus ce que vous souhaitez ?
Un peu d’impertinence et de tutoiement avant de revenir au vouvoiement sur la fin. Une façon aussi à toi de jouer un peu sur les derniers temps de cette conversation qui a été bien plus longue que ce qu’on pouvait t’accorder de base avec le prince. Il a un esprit qui donne de bonnes matières à discuter, c’est toujours cela de pris. C’est bien de connaître ce que l’on doit défendre après tout. Ça implique un peu plus quelque part.
« Le danger n’est pas en lui-même un ennemi, je suis d’accord. Je n’ai par contre jamais vu de baromètre. Toutefois, la morale de votre histoire me fait dire qu’un outil doit être utilisé correctement, et par des gens qui savent s’en servir et garder un esprit ouvert. Et, bien sûr, l’objet lui-même ne règle pas tous les soucis : votre oncle, paix à son âme, ne savait peut-être pas suffisamment naviguer, d’où le destin tragique qu’il a connu. Le danger n’est qu’une variable à prendre en compte pour accomplir un objectif, et qui peut s’avérer une contrainte si elle est trop importante par rapport au bénéfice qu’il est prévu d’en tirer. »
Le sujet dériva ensuite sur les cristaux.
« Oui, vous avez raison, les temples et monastères ne sont pas que des hâvres de paix et de bonheur, ils permettent également de résoudre la misère et les sentiments négatifs. Toutefois, peut-être qu’en choisissant un lieu intéressant… Je vais garder cette idée dans un coin de ma tête, tout de même : elle peut toujours être utile, une fois que j’aurai consulté les ouvrages sur le sujet et demandé une note aux membres du Ministère de la Magie. Cette piste a, après tout, peut-être déjà été explorée. »
La Garde Royale semble enfin avoir remarqué que quelque chose clochait, et être disposée à entrer dans le manoir, de gré ou de force, ce qui dérange manifestement les ombres qui essaient de les dévorer alors même qu’ils parlent pour écarter la solitude et les esprits vengeurs.
« Nous n’avons pas élevé les gloobies ensemble, ni ne sommes particulièrement proches, répondit automatiquement le Prince. »
Puis son attention se tourna vers la bibliothèque de l’étage, seule pièce restante.
« Allons voir, s’il ne s’agit que d’ouvrir la porte, cela ne devrait pas présenter davantage de risque que se trouver dans le manoir de manière générale. De plus, il serait dommage de partir avant d’avoir le fin mot de l’histoire, surtout si l’escorte déboule à ce moment. »
Qui plus est, la garde royale refuserait sans doute de le laisser aller voir, et sa curiosité était maintenant piquée. Si c’était plus dangereux de s’y confronter lui-même, c’était également assurément plus intéressant que de simplement lire un résumé lapidaire griffonné sur un bout de parchemin.
« En ouvrant la porte, qui résiste un peu, mais uniquement parce que le bois du chambranle et du battant s’est déformé, on ne voit qu’une pièce très peu éclairée. Les étagères de la bibliothèque sont vides, dans tous les cas. Les livres ont dû être emportés par la famille ou revendus, je suppose. Quant aux meubles, il ne reste qu’un vieux fauteuil totalement décati, avec une table basse qui, même d’ici, semble branlante. »
Pas de doute possible, en tout cas, la magie venait bien d’ici, ils l’avaient bien senti en entrant.
« Ah, je crois que mon escorte arrive. »
Dans un recoin du fauteuil, un cristal brillait sombrement.
« Je suppose qu’il s’agit là du cristal. Je pense qu’il vaut mieux ne pas le toucher, en tout cas. Qui sait ce qui pourrait se passer ? Possession, malédiction permanente, fusion dans le corps… Nous avons vu des choses plus étranges dans le pays, au fil des années. »
Puis il y eut une cavalcade dans l’escalier.
« Votre Altesse ! Vous allez bien ? Aucune menace ?
- Non, Barr, aucun problème, ne vous inquiétez pas. Nous avons également trouvé la source probable de la malédiction qui pèse sur les lieux. Il s’agit vraisemblablement de ce cristal, là.
- Votre Grâce, je préfèrerais dans ces cas-là que vous restiez à l’abri dans un périmètre de sécurité. S’il venait à vous arriver quelque chose…
- Oui, vous en seriez fort marri, j’en conviens volontiers. Toutefois, avec la Garde Macrocordato, nous avons estimé que le danger était suffisamment faible pour chercher nous-mêmes une issue à la situation. »
Regard peu amène en direction de la jeune femme.
« Quoi qu’il en soit, vous noterez de dépêcher un expert en magie pour récupérer le cristal et le mettre à l’isolation et, éventuellement à l’étude.
- Oui, Votre Altesse.
- Sur ce, nous pouvons établir le campement dehors. Tant pis pour la pluie et l’inconfort.
- Justement ce que j’allais proposer. »
Une fin de journée intéressante, à n’en pas douter : une situation imprévue, un mystère à élucider, et des discussions originales. Cela faisait longtemps qu’il n’avait pas été aussi surpris.